M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Le fait est que, comme je l’ai dit devant la commission, nous avons des idées sur chacun des sujets, y compris dans le domaine des opérations. Il s’agirait par exemple d’accélérer et d’alléger la chaîne de décision et de commandement dans l’Union européenne en cas de crise ; actuellement, sept ou huit échelons interviennent avant qu’une décision soit prise, ce qui, en matière de défense, est tout de même beaucoup. Cette initiative pourrait être lancée par plusieurs États et aboutir. (MM. Jeanny Lorgeoux et Jacques Gautier acquiescent.)

Notre travail avec les Britanniques pour la mise en place en 2016 d’un corps expéditionnaire conjoint, prévue par les accords de Lancaster House, est un exemple de coopération au niveau opérationnel. Nous coopérons aussi avec les Allemands et avec d’autres pays européens dans le cadre de l’opération Atalante. Accumulons les initiatives croisées pour aboutir à un concept de l’Europe de la défense qui s’imposera de lui-même, parce que l’Europe de la défense devient progressivement une nécessité après avoir été peut-être davantage un vœu. Telle est en tout cas la logique de mon action.

La question de l’Europe de la défense me conduit à celle des alliances, qui lui est liée. À ce propos, je tiens à signaler à plusieurs orateurs, notamment à Mme Demessine, que notre place dans l’OTAN est abordée dans le Livre blanc sur le fondement des suggestions émises par le rapport de M. Védrine.

Il s’agit de constater que nous sommes dans le commandement intégré et, partant, d’y prendre toute notre place. Autrement dit, loin d’être le passager clandestin ou le passager à regret de l’Alliance atlantique et de son commandement intégré, notre pays doit en être définitivement un acteur. Cette attitude change la donne car, dès lors que nous l’adoptons, nous pouvons être en mesure d’infléchir la doctrine et les orientations, tout en conservant notre autonomie stratégique et notre capacité de décision propre, comme nous l’avons fait dans l’opération au Mali. Telle est la voie tracée par le Livre blanc. Il ne faut pas qu’il y ait d’ambiguïté sur cette question, ni dans un sens ni dans l’autre.

Messieurs Lorgeoux et Berthou, la cybersécurité est inscrite dans le Livre blanc. Dans ce domaine, des priorités essentielles ont été fixées, en particulier l’existence d’une chaîne de commandement opérationnel de la cybersécurité au sein du centre de planification et de conduite des opérations, le CPCO. La nécessité a aussi été affirmée de consolider une base industrielle de bon niveau dans ce domaine. En outre, des ressources humaines notables doivent être affectées à la cyberdéfense ; cet objectif concerne à la fois le recrutement, la formation et la réserve, ainsi que l’expertise citoyenne.

En tout cas, c’est un fait acquis que la cyberdéfense, qui était une indication dans le Livre blanc de 2008, est aujourd’hui reconnue comme une nécessité et une véritable capacité militaire.

À propos de la maritimisation, monsieur Trillard, nous sommes tout à fait en phase sur les grands enjeux de demain. Le Livre blanc réaffirme trois objectifs dans ce domaine : faire respecter le droit et, en particulier, défendre notre souveraineté partout dans notre espace océanique, qui est le deuxième au monde ; s’opposer aux trafics illégaux et lutter contre la piraterie qui se développe, non plus seulement dans la corne de l’Afrique, mais aussi dans le golfe de Guinée ; nous assurer que nous sommes capables de mener des opérations à partir de la mer. Je suis convaincu que les choix qui ont été arrêtés, en particulier le renforcement, évoqué par le Livre blanc, de certaines capacités d’intervention de la marine, nous permettront d’atteindre ces trois objectifs.

D’ailleurs, mesdames, messieurs les sénateurs, si vous avez bien lu le Livre blanc, vous aurez observé que les inflexions géostratégiques qu’il marque par rapport au Livre blanc de 2008 intègrent, d’une part, l’enjeu maritime et les nouveaux risques maritimes et, d’autre part, la nécessité d’un partenariat stratégique rénové entre la France et l’Afrique.

S’agissant de ce dernier point, monsieur Lorgeoux, je partage entièrement votre position. Il faut que nos prépositionnements et notre présence en Afrique, ainsi que les accords que nous passons avec plusieurs pays africains, soient un outil réactif et flexible. La loi de programmation militaire sera l’occasion de réfléchir à l’évolution de ce dispositif pour le rendre mieux adapté aux besoins. Il s’agit d’une orientation forte du Livre blanc ; elle se traduira aussi dans la loi de programmation militaire.

Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations que je souhaitais présenter en réponse aux remarques qui ont été formulées dans le débat. Je n’ai pas répondu à la totalité de celles-ci, mais je ne veux pas être trop long. Le dialogue permanent que j’entretiens avec la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat me permettra de compléter mon propos.

Permettez-moi, pour conclure, d’évoquer les hommes et les femmes de la défense, qui sont pour moi le plus important.

Beaucoup d’orateurs ont fait référence à leur courage et à leur professionnalisme. Ils sont en effet en première ligne pour faire respecter nos intérêts de sécurité et nos valeurs, parfois au péril de leur vie. Ils le font le plus souvent dans l’ombre, la discrétion étant une des conditions de l’efficacité de notre défense.

Le débat que nous venons d’avoir et l’élaboration d’un Livre blanc sont des moments privilégiés pour rendre à ces hommes et ces femmes l’hommage qu’ils méritent. Vous l’avez fait.

Plus encore, nous ne devons cesser de penser à eux au moment de prendre les décisions les plus importantes pour notre défense. C’est ce qui a été fait pour le Livre blanc. Nous avons, dans le cadre de son élaboration, mis en place une plate-forme participative, qui a connu un très grand succès ainsi qu’en attestent les 300 000 visites et 7 000 contributions de militaires recueillies. Nous aurons la même attention à leur égard pour la loi de programmation militaire.

Je sais qu’il faudra réduire l’ensemble du périmètre de 24 000 postes. Nous mettrons en place les moyens d’accompagnement pour que cela se fasse le mieux possible et continuerons, dans le même temps, à recruter et à former ceux qui, de manière exemplaire, assurent la sécurité de notre pays et qui ont fait preuve, tout particulièrement au Mali, d’un courage et d’un professionnalisme reconnus de tous.

Monsieur le président, Mesdames, Messieurs les sénateurs, je vous remercie de votre contribution au Livre blanc. Je vous remercie de votre attention et vous confirme mon souci de poursuivre avec vous une collaboration active, dans l’intérêt bien compris de notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l'UMP. – M. Michel Le Scouarnec applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires étrangères et de la défense, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux et honoré à mon tour de m’exprimer devant vous aujourd’hui, sous la présidence vigilante de Jean-Pierre Raffarin. Je crois qu’il est en effet essentiel que le Parlement soit pleinement associé aux évolutions que vont connaître, dans les prochaines années, la défense et la sécurité nationale.

Jean-Yves Le Drian a, comme à son habitude, parfaitement apporté à ces débats ses éclairages et son engagement que vous connaissez tous.

Je veux à mon tour saluer ici l’implication des parlementaires qui ont participé aux travaux de la commission du Livre blanc. Pour le Sénat, je pense à Jean-Louis Carrère, Daniel Reiner et Jacques Gautier.

Le ministère de l’intérieur a participé de façon importante à l’élaboration de ce Livre blanc. En effet, la pertinence du concept de « sécurité nationale », introduit lors de l’exercice de 2008, a été réaffirmée en 2013 et devra, dans l’avenir, l’être tout autant sinon d’avantage.

Ce concept vise un objectif, je ne vous apprends rien, bien plus large que la simple protection du territoire et de la population contre les agressions extérieures imputables à des acteurs étatiques. Il traduit la nécessité de gérer l’ensemble des risques et des menaces, directes ou indirectes, susceptibles d’affecter la vie de la nation et de nos compatriotes.

Aujourd’hui, ces risques ne connaissent pas de frontières, terrestres, maritimes, aériennes ou numériques. Ils comprennent, évidemment, le terrorisme, mais aussi les catastrophes naturelles ou industrielles, ainsi que les attaques informatiques.

Qu’ils se manifestent à l’intérieur ou à l’extérieur du territoire, ils ont des dimensions nouvelles, évolutives et appellent une mobilisation large, cohérente et déterminée de toutes les ressources de la puissance publique.

Le Livre blanc de 2013 adopte, ainsi que M. le Premier ministre l’a rappelé, une approche globale qui repose sur la combinaison de cinq fonctions stratégiques : la connaissance et l’anticipation, la protection, la prévention, la dissuasion et l’intervention. Je m’arrêterai sur les deux premières d’entre elles – la connaissance et l’anticipation, et la protection – car elles concernent particulièrement le ministère dont j’ai la responsabilité.

Le Président de la République, cela a été rappelé, a fait du renseignement et des capacités de connaissance et d’anticipation une priorité majeure du Livre blanc.

L’affaire Merah et, plus récemment, l’assassinat d’un militaire à Londres marquent la constance de la menace terroriste sur le territoire national et européen.

Ces événements, dont nous avons eu l’occasion de traiter sous différentes formes, notamment ici même il y a quelques jours à l’occasion de questions cribles sur les défis du terrorisme, soulèvent bien sûr la question des moyens et de l’organisation des services de renseignements dans l’identification et la prévention des passages à l’acte.

L’activité du renseignement constitue donc le socle de la lutte antiterroriste. La lutte contre le terrorisme, coordonnée par l’unité de coordination de la lutte antiterroriste, l’UCLAT, participe d’une stratégie globale impliquant aussi bien les services de la défense que ceux du ministère de l’intérieur ou d’autres administrations, comme les douanes ou l’aviation civile.

Elle repose, pour faire simple, sur un dispositif administratif qui vise à prévenir, en les neutralisant, les acteurs et les réseaux de la mouvance radicale, je pense, par exemple, au processus d’expulsion d’étrangers radicaux ou du gel des avoirs.

Elle repose également sur un dispositif judiciaire qui combine l’action de la direction centrale du renseignement intérieur – la DCRI –, de la direction centrale de la police judiciaire, de la préfecture de police, de la police nationale et de la gendarmerie nationale autour d’un arsenal juridique en constante évolution.

Ainsi, récemment, l’adoption de la loi du 21 décembre 2012 relative à la sécurité et la lutte contre le terrorisme – ce texte, qui a bénéficié d’un apport important du Sénat lors de sa discussion, a été adopté à une très large majorité, sinon à la quasi-unanimité, par le Parlement – a permis que soient désormais sanctionnés les individus engagés dans les filières djihadistes à l’étranger, qu’il s’agisse de ressortissants français ou d’étrangers résidant en France. Dans ce contexte, on peut souligner – c’est un exemple parmi d’autres – les poursuites judiciaires engagées à l’encontre du français Gilles Le Guen.

Mais, nous le savons bien, la préoccupation du gouvernement français comme des autres gouvernements européens porte désormais notamment sur les filières ou les individus qui se rendent dans un contexte bien particulier en Syrie. Nous l’évoquons bien sûr avec les ministres des affaires étrangères et de la défense. Ainsi, j’aurai pour ma part dans quelques jours une réunion avec les ministres de l’intérieur des pays européens les plus concernés par ce mouvement préoccupant, qui se développe sur un long terme, et qui doit nous mobiliser sur le plan diplomatique, sur le plan du renseignement, mais aussi sur le plan judiciaire.

Les différents audits réalisés à l’issue de l’affaire Merah ont conclu à la nécessité de réformer et de mieux encadrer nos services, nous en avons déjà parlé ici même.

L’audit réalisé par l’Inspection générale de la police nationale a notamment formulé plusieurs observations, qui ont d’ores et déjà fait l’objet d’une mise en œuvre au travers de plusieurs mesures : la création d’une inspection du renseignement intérieur, la création d’une structure en charge de la coordination sur le plan opérationnel entre services centraux et territoriaux, ainsi que la création de bureaux de liaison au niveau parisien et dans chaque zone de défense afin de renforcer l’articulation entre la DCRI et la sous-direction de l’information générale de la direction centrale de la sécurité publique.

Le renseignement intérieur doit également bénéficier désormais d’un renforcement de ses moyens et d’un renouvellement du cadre de ses interventions.

Il convient, en premier lieu, de renforcer les effectifs en assurant une diversification du recrutement, et notamment du recrutement contractuel : ingénieurs, linguistes ou analystes. Je sais que c’est une préoccupation du président Carrère, qui me l’a souvent exprimée.

Il faut, en deuxième lieu, développer les investissements techniques pour renforcer les moyens opérationnels de la DCRI en termes d’équipements et de parc roulant.

Le rapport de la mission d’information présidée par le député Jean-Jacques Urvoas, par ailleurs président de la commission des lois de l’assemblée nationale, soulève, par exemple, la question de la création d’une direction générale du renseignement intérieur, en vue de lui conférer une autonomie en matière de budget et de gestion des ressources humaines. Je ne vous cache pas mon intérêt pour cette proposition. En tout cas, le débat est ouvert ; il faudra rapidement le trancher.

En troisième et dernier lieu, il apparaît nécessaire de renforcer les bases juridiques de l’action des services de renseignement. Il s’agit d’un sujet compliqué. La plupart des grandes démocraties ont cependant engagé de telles démarches en mettant en place les outils protecteurs. Il faut reconnaître que, pour différentes raisons, bonnes ou mauvaises, notre pays a encore du mal à le concevoir.

Le contrôle des services de renseignements par les représentants du peuple est un impératif démocratique ; c’est déjà le cas. Je le sais, la délégation parlementaire au renseignement accomplit d’ores et déjà un travail important, comme l’a démontré la qualité de son dernier rapport remis au Président de la République, qui le prend en considération. Je voudrais d’ailleurs saluer l’implication, au sein de cette délégation, des présidents des commissions des lois et de la défense de votre assemblée, Jean-Louis Carrère et Jean-Pierre Sueur.

En matière de contrôle, les conclusions de la délégation du Parlement ou de la mission Urvoas sont ambitieuses et bienvenues. Si elles ne concluent pas forcément aux mêmes propositions, elles posent les jalons d’une réflexion qui doit être menée, avec discernement, de manière intelligence, dans les mois et les années à venir.

C’est d’ailleurs ce que nous avons commencé à faire dans le cadre de la loi antiterroriste du 21 décembre 2012 que j’ai évoquée il y a un instant. Nous avons aussi des rendez-vous, comme je m’y étais engagé, dans ce domaine-là.

S’agissant de la seconde fonction stratégique, la protection du territoire national et de nos concitoyens associée à la préservation de la continuité des fonctions essentielles de la nation, celles-ci sont au cœur de notre stratégie de défense et de sécurité nationale.

Ainsi, en matière de lutte contre le terrorisme, le dispositif de l’État sera maintenu à un haut niveau de vigilance, et ce dans une approche globale, face à une menace qui reste majeure et persistante. J’ai eu souvent l’occasion de décrire cette menace. Nous avons un ennemi extérieur : des États ainsi que des organisations terroristes particulièrement organisées. Nous avons également un ennemi intérieur, et c’est ce que nous avons vécu au cours de la dernière année, depuis l’affaire Merah. Cela s’est aussi traduit par le démantèlement de filières ou de groupes et l’arrestation d’individus qui voulaient passer à l’acte dans notre pays ou se rendre sur des théâtres de guerre, au Sahel ou en Syrie.

Et il y a ces phénomènes, liés, d’auto-radicalisation, que nous ne découvrons pas. Voilà encore quelques mois, un français s’est rendu en Belgique pour poignarder deux policiers belges. Mais ce qui vient de se passer à Londres et les interrogations sur ce qui s’est passé à La Défense samedi dernier nous poussent à une très grande vigilance.

Le plan gouvernemental Vigipirate assure la mobilisation des différents ministères, des collectivités territoriales, des opérateurs d’importance vitale et des citoyens pour renforcer nos niveaux de protection, sans jamais sombrer dans la routine, ni céder à la communication. Ainsi, chaque fois qu’il y a un événement, une menace, on nous demande, à M. Jean-Yves Le Drian et à moi-même, si nous allons rehausser le niveau du plan Vigipirate. Il n’y aura bientôt plus de couleurs ! Il faut faire preuve de prudence pour être capable d’apporter à cette menace une réponse adéquate.

Ce plan repose, vous le savez, sur quatre grands principes : une posture de vigilance qui s’appuie sur l’analyse permanente de l’évolution de la menace – il faut aller vite, il faut être capable d’y répondre, et notamment à celle que nous connaissons sur internet – ; une approche globale qui permet d’exercer cette vigilance dans tous les secteurs de la société, celle-ci devant être sans cesse mobilisée ; un principe de responsabilité partagée entre autorités publiques, opérateurs et, donc, citoyens ; une gradation de la réponse de l’État, qui peut notamment comporter des mesures contraignantes.

Ce plan comprend enfin quatre niveaux d’alerte rendus publics et matérialisés par une couleur : jaune, orange, rouge – qui peut être renforcé – et écarlate. Ce dernier niveau d’alerte a été mis en œuvre après les assassinats perpétrés par Merah dans la région Midi-Pyrénées.

Compte tenu du caractère structurellement élevé de la menace terroriste, le plan Vigipirate est au niveau rouge depuis 2005. Ce niveau rouge est renforcé, ou rappelé, quand il s’agit de faire face à des menaces évidentes, comme celles qui pèsent sur notre pays après l’intervention juste et légitime de la France au Mali.

Conformément au mandat confié par le Premier ministre au secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale, le dispositif sera modernisé afin d’en renforcer l’efficacité.

Ce principe a été confirmé par le Livre blanc. Le ministère de l’intérieur est naturellement associé aux travaux de révision aujourd’hui engagés.

Le Livre blanc marque également une étape nouvelle et déterminante dans la prise en compte de la menace informatique et le développement des capacités de cyberdéfense. Il décrit aussi la vulnérabilité croissante de l’État et de la société face à des attaques de plus en plus dangereuses, rappelées tout à l’heure par M. Berthou : prise de contrôle à distance, paralysie ou destruction d’infrastructures d’importance vitale, voire tentative de pénétration de réseaux à des fins d’espionnage militaire, économique ou industriel.

Si le ministère de l’intérieur est déjà l’une des trois entités gouvernementales à disposer d’un centre de cyberdéfense, il participera aux côtés des autres ministères à l’amélioration de la fiabilité des systèmes d’information de l’État et des grands opérateurs.

S’agissant plus particulièrement de la lutte contre l’espionnage, il nous faut renforcer la préparation des acteurs économiques et industriels. Aussi, afin d’optimiser la réponse interministérielle, j’ai souhaité que les services de police et de gendarmerie contribuent, au sein de chaque territoire, dans le cadre de leurs actions d’intelligence économique, à la diffusion du guide d’hygiène informatique conçu par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information.

Dans le Livre blanc est aussi fixé l’objectif d’établir dès 2013 un contrat général interministériel, qui décrira les capacités civiles nécessaires aux missions relatives à la sécurité nationale. En effet, mesdames, messieurs les sénateurs, l’exercice de certaines missions en situation de crise suppose la disponibilité de capacités spécifiques bien identifiées.

Certains partenaires jouent un rôle essentiel dans la capacité de résilience de notre pays face à des crises souvent multiformes. L’enjeu est donc de mobiliser et d’identifier les savoir-faire présents dans l’ensemble des services publics, notamment au sein des collectivités territoriales et chez de nombreux opérateurs privés.

Le Livre blanc de 2013 confirme aussi les orientations de 2008, à savoir la montée en puissance des capacités civiles, et demande aux ministères concernés de faire les efforts d’équipement nécessaires. De ce point de vue, nous devons préserver les capacités d’intervention de présence en temps de crise sur nos territoires ultramarins. Le ministre de la défense était encore il y a peu de temps aux Antilles pour constater ce défi. Le ministère de l’intérieur participe également à la réflexion engagée avec les ministères les plus concernés.

Enfin, le ministère de l’intérieur est chargé des modalités de la déclinaison territoriale de la planification de crise. Celle-ci est mise en œuvre par les préfectures de zones de défense et de sécurité puis des départements. Il s’agit d’une démarche capacitaire que l’État mènera dans les zones de défense et de sécurité par grands bassins de risques, afin de mieux mobiliser, au-delà des ministères concernés, les différentes collectivités compétentes, acteurs clés de la gestion de crise.

Mesdames, messieurs les sénateurs, sur la base d’une analyse ciblée des risques et des menaces, la stratégie de sécurité nationale doit organiser des réponses diversifiées mobilisant une multitude d’acteurs pour prévenir et gérer les crises majeures sur notre territoire.

Au plan international, nous vivons dans un monde où le développement des réseaux et la circulation toujours plus intense des personnes, des marchandises, des capitaux et des informations relativisent la notion de frontière et multiplient en tout cas les interdépendances. Si ces évolutions peuvent être un facteur de vulnérabilité, dans la mesure où elles facilitent la propagation des crises, elles peuvent aussi devenir un atout, dès lors que, tirant toutes les conséquences du fait que notre sécurité ne commence pas à nos frontières, nous serons assurés de la promotion d’un projet, notamment européen, de sécurité, mais aussi, évidemment, d’un partenariat nous liant à des pays amis un peu partout dans le monde.

Un tel projet peut être réalisé, pour ce qui concerne l’Europe, dans les cadres juridiques actuels de l’Union et serait de nature à renforcer l’efficacité des politiques nationales, qui revêtent une importance particulière pour les peuples européens.

Ce sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les défis qui nous attendent et auxquels, bien évidemment, le ministère de l’intérieur apporte sa contribution et son action. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – MM. Hervé Marseille, Robert del Picchia et Jean-Claude Lenoir applaudissent également.)

M. le président. Nous en avons terminé avec la déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, sur le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale.