Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. … qui restreint le champ de l’incompatibilité entre le mandat de conseiller communautaire et l’exercice d’un emploi salarié au sein de l’EPCI (M. Pierre-Yves Collombat s’esclaffe.) – même si je vous ai bien entendu – ou de ses communes membres. Dans la rédaction proposée par votre commission des lois, un conseiller communautaire pourrait continuer à être salarié d’une commune membre de l’EPCI.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. Je répète ce qu’a déjà dit Manuel Valls lors des longs débats que vous avez eus ensemble : l’incompatibilité entre l’exercice d’un emploi salarié au sein d’une commune et le mandat communautaire est nécessaire ; elle évite qu’un conseiller communautaire ne se trouve en situation de conflit d’intérêt en raison de sa position de décideur – conseiller communautaire – et en même temps de subordination – agent d’une des communes membres de l’EPCI. La jurisprudence sur ces thèmes est suffisamment abondante pour servir d’appui à notre raisonnement et nous aider les uns et les autres à comprendre la nécessité d’en revenir au texte du Gouvernement.

De même, nous divergeons sur l’article 3 de la proposition de loi. Tout au long des débats, le Gouvernement a souhaité que les conseillers communautaires des communes de moins de 1 000 habitants soient élus en même temps que les conseillers municipaux, dans l’ordre du tableau. La loi du 17 mai 2013 autorise déjà une certaine flexibilité. Ainsi, un conseiller communautaire peut renoncer à son mandat communautaire afin de permettre à un autre membre du conseil municipal de le remplacer, ce qui atténue la rigidité du mécanisme de l’ordre du tableau.

Vous proposez qu’en cas de remplacement du maire ou d’un adjoint le nouveau conseiller communautaire soit désigné par le conseil municipal. Ce serait un retour en arrière par rapport au scrutin universel et le Gouvernement ne peut qu’être hostile à cette proposition.

Enfin, plusieurs amendements prévoient de revenir sur la suppression des sections électorales. La loi du 17 mai 2013 les avait supprimées, dans les communes comptant jusqu’à 20 000 habitants. Le texte de votre commission des lois achevait ce dispositif.

Pourtant, un amendement tendra ce soir à recréer des sections dans les communes de moins de 1 000 habitants, c’est-à-dire dans environ 60 % des cas !

Le Gouvernement est, là aussi, opposé à un tel rétablissement. Cette suppression participe, en effet, de notre volonté de moderniser l’action politique et administrative. Aujourd’hui, les sections électorales restent une source de grande complexité ; elles créent d’importantes difficultés pour constituer des majorités dans les conseils sectionnés. Il convient donc d’y remédier en supprimant les sections dans l’ensemble des communes.

C’est une disposition à laquelle le Gouvernement est véritablement attaché, même s’il entend les inquiétudes des élus de ces anciennes communes – je les ai entendues, il y a peu, en me déplaçant moi-même, sur place, dans l’un des départements où la problématique a été soulevée.

Toutefois, je rappelle que la suppression des sections ne remet pas en cause les prérogatives des communes associées, telles que l’existence de la mairie annexe et du maire délégué.

Mesdames, messieurs les sénateurs, nous allons maintenant devoir examiner un texte technique, un texte d’ajustement. J’espère, à la suite du ministre de l’intérieur, qu’ensemble nous saurons nous cantonner dans cet objectif et, surtout, que nous aurons à l’esprit une nécessité absolue : le droit applicable aux collectivités – vous l’avez réaffirmé, monsieur le rapporteur – doit être simple, lisible, facilité. C’est un impératif, tant pour les élus que pour nos concitoyens ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées de l’UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. Christian Favier.

M. Christian Favier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, quelques semaines après l’adoption de la loi portant modification des modes de scrutin locaux et départementaux, nous voici saisis d’un texte correctif, comme le qualifie notre rapporteur. Chacun en conviendra, cela ne va pas sans poser de problèmes.

D’abord, cela montre bien que les conditions d’examen du texte initial n’ont pas été optimales, comme nous l’avions d’ailleurs souligné, à l’époque.

En effet, malgré six lectures et une commission mixte paritaire, notre collègue Alain Richard note dans son rapport que des lacunes ou imprécisions semblent persister.

De plus, le Gouvernement ne semblait pas avoir totalement obtenu le texte qu’il aurait souhaité.

Finalement, nous allons débattre d’un texte « voiture-balai » - en ces temps de Tour de France, c’est d’actualité ! – sans avoir l’assurance que l’Assemblée nationale nous suivra sur ces propositions, à moins que cet accord ne soit d’ores et déjà acquis…

Que penser de cette initiative prise par notre collègue par ailleurs président de la commission des lois avec cette proposition de loi ? Ne serait-elle pas, de fait, une commande gouvernementale ?

M. Jean-Pierre Sueur. Non, pas du tout ! J’en ai pris l’initiative seul !

M. Christian Favier. Cette technique de présentation d’une proposition de loi pour masquer un projet gouvernemental, a toujours été, on le sait, durement critiquée sur les travées de la gauche, lorsque la droite était au pouvoir et usait de cette pratique.

M. Bruno Sido. Ce n’est pas nouveau !

M. Christian Favier. Aussi serait-il bon, à notre avis, de persister dans ce positionnement, car, finalement, cette procédure dessaisit les parlementaires de leur véritable initiative législative.

Par ailleurs, cette situation illustre le peu de liberté d’amendement accordée aux parlementaires, de l’opposition comme de la majorité. À cet égard, vos mises en garde, formulées à l’instant, madame la ministre, confirme tout à fait le sens restrictif que vous avez souhaité donner à l’examen de ce texte.

Enfin, que dire de cet amoncellement de textes qui nous est soumis ? Il aboutit à un véritable engorgement législatif et met en cause nos conditions d’examen. Il ne permet pas un véritable travail collectif ; il se solde par un examen rapide des amendements en commission et par une joute verbale en séance, avec l’objectif gouvernemental d’accepter le moins d’amendements possible !

En fin de compte, le Parlement est de plus en plus transformé en une simple chambre d’enregistrement. Ce faisant, il se convertit peu à peu en un outil exécutif, mettant en œuvre les décisions prises par le Président de la République et présentées par son gouvernement.

Aussi ce texte est-il finalement révélateur de dérives dans la mise en œuvre même de la Constitution et appelle à plus de respect pour notre assemblée.

Pour revenir sur le contenu, le texte porte pour l’essentiel sur des précisions techniques concernant la mise en œuvre de la loi du 17 mai dernier. Bien que nous ayons voté contre ce texte, nous ne nous opposerons pas à ces mesures.

De plus, nous soutenons le retour à neuf élus dans les conseils municipaux des communes de moins de 100 habitants. Espérons que, cette fois, l’Assemblée nationale acceptera cette mesure.

Une autre disposition constitue pour nous une avancée, certes légère, mais qui va, nous semble-t-il, dans le bon sens. En effet, l’article 3 prévoit l’élection des conseillers communautaires par le conseil municipal. J’ai bien entendu, madame la ministre, que vous n’étiez pas favorable à cette proposition.

Certes, ce retour à la situation actuelle n’est rendu possible que dans une situation particulière. Si nous soutenons cette mesure, nous maintenons néanmoins que ce mode d’élection devrait demeurer la règle en toutes circonstances. C’est le souhait d’une majorité d’élus locaux, largement exprimé au moment des états généraux de la démocratie territoriale, ici, au Sénat.

Enfin, comptons sur la navette parlementaire pour mieux harmoniser l’article 3 A et l’article 3, concernant la désignation du suppléant éventuel en cas d’élection par le conseil municipal d’un conseiller communautaire, dans les communes de moins de 1 000 habitants.

Ne nous opposant pas à l’essentiel des articles de cette proposition de loi et en soutenant le plus grand nombre, nous voterons en faveur de ce texte, malgré les remarques et préoccupations que j’ai pu exprimer au début de cette intervention. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault.

Mme Jacqueline Gourault. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’auteur de la proposition de loi a exprimé tout à l’heure quelle en était la philosophie

M. Jean-Pierre Sueur. C’est un bien grand mot !

Mme Jacqueline Gourault. J’exprime ici l’attachement d’un certain nombre d’entre nous à l’égard d’amendements votés en première lecture par le Sénat, mais qui n’avaient pas pu être rétablis en deuxième lecture, pour des raisons sur lesquelles je n’insiste pas.

Cette proposition de loi est donc utile et je soutiens cette initiative de M. Jean-Pierre Sueur, par ailleurs président de notre commission des lois. Je la soutiens d’autant plus qu’à l’occasion de réunions sur le terrain avec des élus j’ai pu constater plusieurs vides juridiques ou complications, notamment dans l’application du dispositif prévu pour l’élection du conseiller communautaire suppléant dans les communes où il n’y a qu’un conseiller communautaire.

Le texte apporte plusieurs précisions, comme nous l’a indiqué M. le rapporteur.

D’abord, le suppléant, dans les communes de plus de 1 000 habitants, sera le candidat supplémentaire. Alors que cet élément ne figurait par dans le texte initial, il est utile de l’ajouter ici.

En outre, le texte apporte des éclaircissements quant aux questions de parité. Je remercie le Gouvernement d’avoir déposé un amendement en ce sens. La parité s’appliquant à partir de 1 000 habitants, et sachant que nous sommes dans le cas d’un scrutin de liste, si le titulaire est de sexe masculin, le délégué supplémentaire sera de sexe féminin. Mais il était également précisé par ailleurs qu’en cas de vacance le remplaçant devait être du même sexe que le titulaire. En conséquence, le délégué suppléant ne pouvait donc jamais siéger en cas de vacance du siège.

Il est donc important de rétablir une exception au profit des communes de plus de 1 000 habitants où il n’y a qu’un seul délégué. Ce point paraît technique, mais il est d’importance.

Je vous rejoins, madame la ministre, lorsque vous rappelez qu’il nous faut, au cours de cet examen, rester dans le cadre de la loi du 17 mai 2013. La commission des lois s’y est d’ailleurs strictement conformée, afin de ne pas ouvrir de champs nouveaux.

M. Jean-Jacques Hyest. Mais… (Sourires sur les travées de l'UMP.)

Mme Jacqueline Gourault. Cependant, mais cela n’a rien de négatif, assouplir la désignation des conseillers communautaires dans l’ordre du tableau, dans l’hypothèse où le maire ou un adjoint renonce expressément à son mandat de conseiller communautaire, ne me semble pas être complètement étranger à une élection au suffrage universel direct. Cette disposition ne devrait pas être gênante ; j’en veux pour preuve qu’elle est appréciée quand on la présente aux conseils municipaux.

Je ne reviens pas sur les modalités d’anticipation de l’accord local sur la composition du conseil communautaire, cela a été très bien expliqué.

Toutefois, je voudrais mentionner trois points qui, selon moi et mes interlocuteurs de terrain, semblent plus discutables. Je ne reviendrai pas longuement sur la question des sections électorales, car M. Jean-Pierre Sueur l’a très bien exposée et Jean Louis Masson défendra un amendement sur ce point. Je crois que nous réglons globalement le problème.

M. André Reichardt. Cela n’est pas si sûr !

Mme Jacqueline Gourault. Cependant, deux autres sujets sont extrêmement discutés. Le premier concerne le rétablissement du nombre de conseillers municipaux de sept à neuf, dans les communes de moins de 100 habitants. Fixer le nombre de conseillers à sept apparaissait comme une bonne mesure pour un certain nombre de mes collègues. Cela paraissait préférable pour les communes de moins de 100 habitants, dont certaines ne comptent que dix, vingt ou trente habitants, mes chers collègues.

Mme Nathalie Goulet. Ou bien dix-huit !

Mme Jacqueline Gourault. Le second concerne la suppression de l’incompatibilité entre le mandat de conseiller communautaire et l’emploi de salarié au sein d’une commune membre de l’EPCI. C’est un problème pour de nombreux collègues.

Toutefois, cette proposition de loi est tout à fait utile, et certains amendements du Gouvernement apportent des compléments importants. Il faut absolument que ce texte soit voté. (MM. Jean-Pierre Sueur et Alain Bertrand ainsi que Mme Hélène Lipietz applaudissent).

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Si j’osais, je dirais que cette proposition de loi assure le service après-vente - ou après-vote - de divers projets de loi relatifs aux collectivités locales qui l’ont précédée de peu !

Il s’agit d’une proposition de loi destinée à préciser des points sur lesquels nous sommes probablement passés un peu vite, à donner un peu de souplesse à des dispositifs trop rigides ou à combler quelques vides.

Ainsi l’article 1er assouplit le régime des incompatibilités entre l’exercice d’un mandat et d’une profession salariée.

Contrairement à ce que pense Mme la ministre, il était, me semble-t-il, excessif, particulièrement en secteur rural, que l'agent d'un EPCI ne puisse être conseiller municipal d'aucune des communes membres de cet EPCI.

L’article 3 apporte aussi davantage de souplesse au mode de désignation des délégués communautaires dans les communes de moins de 1 000 habitants, libérant ainsi le maire et les adjoints de l’obligation de concilier les deux fonctions. Ils seront automatiquement délégués dans l’ordre du tableau, s’ils le désirent - dans la grande majorité des situations, cela sera le cas, au moins pour le maire -, mais s’ils le désirent seulement.

Cette solution est plus compliquée que celle que j’avais proposée dès la discussion de la loi du 17 mai 2013, mais elle s’inscrit dans la logique de ce qui avait été alors décidé. Ce n’est certes pas le cas de ma proposition, mais elle a au moins le mérite d’être immédiatement compréhensible par ceux qui auront à la mettre en œuvre. Là, il faudra envoyer des conseillers du ministère de l'intérieur pour expliquer le fonctionnement du système !

Quelle était ma proposition ? Permettez-moi de le rappeler.

Comme il a été jugé que le mode de scrutin des communes de 3 500 habitants et plus ne pouvait s’appliquer à toutes les communes, quelle que soit leur taille, ce qui était aussi ma position, comme il a été considéré que les électeurs n’éliraient pas directement leurs conseillers communautaires et que les communes de moins de 1 000 habitants devaient garder les joies du panachage, quintessence de la démocratie, selon certaines bonnes âmes, alors pourquoi ne pas tout simplement conserver le mode de désignation des délégués communautaires qui était aussi le leur, le scrutin uninominal majoritaire ?

La justification qui m’avait été alors donnée – conserver, avec l’ordre du tableau, un système s’apparentant à une désignation directe par l’électeur – n’était, avouez-le, mes chers collègues, guère convaincante…

Maire et adjoints, placés en tête du tableau, sont élus au scrutin majoritaire uninominal ; quant aux conseillers municipaux suivants, personne ne sait qu’en votant pour eux on désigne aussi les délégués communautaires. C'est, paraît-il, une façon de conserver, pour les communes de moins de 1 000 habitants, l'impression que les électeurs désignent directement les délégués.

Personne n'y croit,…

M. André Reichardt. C’est sûr !

M. Bruno Sido. Personne n’y croit, en effet !

M. Pierre-Yves Collombat. … mais, apparemment, ce dispositif a fait l'unanimité.

C’est pour cette raison que j’avais alors défendu mon amendement, sans succès à l’époque, et pour cette raison aussi que je le défendrai de nouveau, au risque de ne pas être plus suivi aujourd’hui. Mais peu importe, si tous les problèmes posés par la loi du 17 mai 2013 étaient là, on n’en parlerait même pas ce soir !

M. Bruno Sido. Tout à fait !

M. Pierre-Yves Collombat. Passons…

L’article 6, qui permet la mise en place anticipée de la nouvelle gouvernance des communautés résultant de la fusion de plusieurs EPCI en cas d’accord entre les membres est, quant à lui, tout à la fois un article d’assouplissement et de clarification.

Clarification encore, et précisions, avec les articles 3 A et 3 B, s’agissant du mode de désignation du ou des suppléants et de leurs pouvoirs ; précision et clarification également quant à l’interprétation des règles de présentation des listes de candidats de délégués communautaires.

Mesure de clarification mais aussi de prudence s’agissant de l’article 4, consacré à la situation compliquée des sections électorales des communes associées. Mieux vaut, comme le propose M. le rapporteur, simplifier ce qui peut être simplifié sans risque et se donner du temps pour traiter les situations plus complexes, donc à surprises. Cela dit, la discussion nous offrira peut-être l’occasion d’adopter immédiatement des solutions pratiques. Pourquoi pas ? Mais l'histoire nous a légué des situations particulièrement compliquées, aussi vaut-il souvent mieux y regarder à deux fois !

Enfin, je ne doute pas que le rétablissement de l’effectif des conseils municipaux des communes de moins de 100 habitants sera largement apprécié. Autant la réduction pouvait se justifier dans le but de faciliter l’extension à ces communes du mode de scrutin proportionnel de liste – c'est bien pour cette raison qu’il avait d'ailleurs été proposé –, autant une telle réduction des effectifs prenait un caractère discriminatoire si l’ancien mode de scrutin était maintenu. C’est en tout cas très largement comme cela que cette disposition a été interprétée dans les communes.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, notre groupe votera cette proposition de loi, modeste mais fort utile. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur celles du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Sueur. C’est un beau compliment ! Modeste et utile, tout un programme…

M. le président. La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ce texte est un peu étrange, non par sa forme, mais bien par sa genèse. Il s’agit d’un véhicule exprès, et express, ayant pour objectif de réintroduire les laissés-pour-compte de la seconde lecture au Sénat du projet de loi relatif, pour faire simple, à l’élection des conseillers départementaux et municipaux et au fléchage des délégués communautaires.

Les écologistes soutiendront ce texte puisqu’ils avaient voté, patiemment, un par un, les amendements qui sont aujourd'hui rassemblés dans cette proposition de loi.

Nous voterons aussi les amendements de réflexion, qui donnent plus de corps à ce texte. Le temps porte conseil, même s’il est certainement ce qui manque le plus à cette assemblée.

Nous voterons ainsi le rétablissement à neuf du nombre de conseillers municipaux des communes de moins de 100 habitants, ainsi que les dispositions relatives à l'incompatibilité des fonctions ou encore les successions dans les EPCI.

Je souligne toutefois qu’un certain nombre de coordinations que nous devons voter aujourd’hui n’auraient pas eu de raison d’être si notre assemblée, dans son immense sagesse, avait opté pour une solution plus démocratique et plus simple, oserai-je dire plus lisible et plus compréhensible par les citoyens et citoyennes : je veux bien entendu parler du scrutin de liste paritaire et proportionnel, que nous avons adopté pour notre propre élection.

Cela aurait permis de faire progresser la parité et la diversité politique et, surtout, d’élaborer, dans le cadre des EPCI, de véritables projets de territoires, au lieu d’additionner simplement des intérêts communaux. Je n’insisterai pas plus longtemps sur ce thème, notre temps étant précieux à cette heure avancée. Je connais et regrette le point de vue majoritaire dans cet hémicycle.

Mes chers collègues, je m'en tiendrai à cette très courte intervention ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Alain Fouché. Brève, mais de qualité !

M. Bruno Sido. Merci, chère collègue !

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson.

M. Jean Louis Masson. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, j'ai l'impression que cette proposition de loi, si elle est adoptée, donnera tout de même une étrange image du Parlement.

En effet, nous avons voté voilà à peine un mois une loi aux termes de laquelle, dans les communes de moins de 100 habitants, le nombre de conseillers municipaux serait dorénavant de sept, et qu’un conseiller qui démissionnait serait remplacé par une personne de même sexe. Et nous voilà en train de tout refaire à l’envers !

De deux choses l'une : ou ce que l'on fait maintenant n'est pas pertinent ou ce qui a été fait il y a un mois était complètement aberrant.

Le Parlement devrait veiller à ne pas se contredire, à ne pas voter un jour le contraire de ce qu'il a décidé la veille !

M. Bruno Sido. Très bien !

M. Jean Louis Masson. C'est comme si un chef d'entreprise réunissait son personnel le matin pour lui demander de travailler à tel endroit, puis lui commandait à midi d’aller travailler ailleurs…C'est exactement ce que nous allons faire, par exemple, avec les effectifs des conseils municipaux.

Soit il aurait fallu réfléchir davantage au moment où nous avons voté la loi du 17 mai 2013, soit c'est le texte qui nous est soumis aujourd'hui qui n'est pas pertinent, mais, dans un cas comme dans l’autre quelque chose ne va pas !

Un point me semble scandaleux, je veux parler des sections de communes. J'ai été le premier à soulever le problème. On m'avait alors indiqué qu'il n'y avait pas de difficulté. Le Gouvernement m’avait répondu que je n'avais rien compris et que le dispositif pourrait être revu par la suite. Mon amendement, adopté en première lecture, avait été torpillé. Maintenant, on nous propose un dispositif sur lequel il n'y a même pas d'accord entre le Gouvernement et sa majorité. Mais où va-t-on ? (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

M. Bruno Sido. Manifestement, ce n'est pas cela le plus important…

M. Alain Fouché. Et cela arrive de temps en temps…

M. Jean Louis Masson. Ce n'est vraiment pas du travail sérieux ! Cette démarche est complètement grotesque. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)

J'ai fait le tour de mon département pour expliquer que désormais il y aurait sept conseillers municipaux,…

M. Bruno Sido. Pas de chance !

M. Jean Louis Masson. … et maintenant je vais devoir recommencer pour dire que c'est neuf, finalement. C'est du Grand-Guignol ! (Mêmes mouvements.) Où allons-nous ? Si l’on continue comme cela, nous pourrons examiner un nouveau texte en septembre pour passer leur nombre à huit. On pourrait s'amuser longtemps ainsi…

Mme Cécile Cukierman. C’est bien que le Parlement entende les élus locaux !

M. Jean Louis Masson. Et ensuite on s'étonne que le Parlement ait trop de travail et qu'il ne légifère pas correctement…

Je le redis, si on écoutait un peu plus les intéressés, si mes amendements n’avaient pas été balayés lors des deux lectures au Sénat de la précédente loi, nous n’en serions pas là aujourd'hui !

M. Bruno Sido. C’est vrai !

M. Jean Louis Masson. J'aimerais que certains de mes collègues, le Gouvernement, les rapporteurs et les présidents de commission tiennent davantage compte de cela, ce qui nous éviterait de siéger à une heure tardive, avec la perspective de terminer à une heure plus tardive encore, pour finalement perdre notre temps parce que le travail a été mal fait précédemment ! (M. André Reichardt applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.

M. Jean-Jacques Hyest. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il m’arrive rarement d’être d’accord avec Jean Louis Masson – Mme la ministre siégeait parmi nous et s’en souvient certainement –, mais je dois reconnaître que, depuis quelque temps, nous avons une manière pour le moins chaotique de légiférer sur les collectivités locales… Je ne referai pas l’historique de ce texte, Jean-Pierre Sueur ayant très bien expliqué les raisons qui l’ont conduit à déposer cette proposition de loi.

Nous votons ici des dispositions, mais elles sont rejetées par l'Assemblée nationale, qui nous renvoie sans ménagement à nos chères études…

Il est vrai que, sur tout ce qui a trait aux collectivités locales, il y a parfois des incompréhensions entre les deux assemblées, mais, rassurez-vous, madame la ministre, cela n'est pas nouveau ! (Sourires.) Je me rappelle certains débats sur des lois antérieures où la discussion n’avait pas été facile et des dispositions sur lesquelles le Sénat n'a pas toujours été écouté.

Même si ce texte est indispensable, je ferai tout de même une réflexion : les élus locaux y perdent leur latin ! Ces dispositifs complexes, ces systèmes de fléchage sont très difficiles à expliquer. On leur dit qu’il faut prendre l'ordre du tableau, mais alors ce n'est plus une élection. On ne sait pas a priori qui sera délégué communautaire : cela peut être le maire ou l’adjoint, mais, s’ils renoncent, le conseil municipal désigne le remplaçant. Cela revient pratiquement au système applicable antérieurement dans les communes de moins de 1 000 habitants – je n’évoque pas le cas des communes plus importantes.

On a décidé de maintenir la fiction selon laquelle les conseillers communautaires seraient désignés au suffrage universel, pas directement – il ne faudrait tout de même pas abuser ! –, mais par le fléchage.

Je ne fais pas de reproche particulier à ce système qui, je dois l’avouer, figurait déjà dans le projet de loi de 2010, mais, comme nous n'avons pas eu la chance, ou le bonheur, de voter à l’époque cette partie de la loi, je peux dire ce que je pense de l’actuelle proposition de loi ! (Sourires.)

Ce texte a reçu le « brevet Richard » : le rapporteur l’a corrigé sur de nombreux points, notamment pour donner davantage de souplesse au fléchage, ce qui était indispensable pour éviter les difficultés, notamment entre majorité et opposition, auxquelles nous pourrions être confrontés.

Je crains néanmoins de nombreux contentieux, en raison d’erreurs commises lors des opérations électorales.

M. Alain Fouché. Les avocats vont se régaler…

M. Jean-Jacques Hyest. Je plains les services préfectoraux. C'est hélas ! la conséquence de dispositifs de plus en plus compliqués.

Sur les incompatibilités, je ne voterai pas la disposition proposée, car je considère qu'être à la fois délégué communautaire et salarié d'une commune de l’EPCI relève d’une trop grande proximité.

On me dit que ce ne sont pas les mêmes collectivités, certes, mais, de manière générale, et c’est la raison d’être des incompatibilités, cela finit par être malsain d’être salarié d'une structure et, en même temps, élu d'une autre structure, les deux n’étant pas étrangères l’une à l’autre. Je le dis notamment pour certaines collectivités.

En revanche, pour tout ce qui concerne les modalités de fléchage, nous sommes d'accord. D'ailleurs, nous les avions votées en commission et en première lecture.

Reste un sujet compliqué : celui des sections électorales, bien entendu. Je dois avouer que nous sommes partagés. Elles sont issues, le plus souvent, de la loi de 1971, dite « loi Marcellin ». Il se trouve que, pour être entré dans l'administration au moment où l'on opérait les fusions de communes, j’ai quelque connaissance du sujet et le privilège d’avoir pu observer que, dans certains départements – contrairement à ce que dit M. Sueur –, beaucoup de districts ont été comme les prémices des communautés de communes. Cela a très bien fonctionné dans mon département, où les districts sont devenus, sans problèmes particuliers, des communautés de communes exerçant de très larges compétences.