M. Jean-Claude Lenoir. Cela existait avant !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. … ce qui représente une dépense budgétaire de près de 400 millions d'euros. Nous augmentons le revenu de solidarité active 2 % au-delà de l’inflation, ce qui représente une dépense budgétaire de 600 millions d'euros.

Nous ouvrons à des étudiants dont les parents sont modestes la possibilité d’avoir accès à la connaissance et aux études par la mise à disposition de 55 000 bourses supplémentaires. Nous le faisons, après que le Sénat et l’Assemblée nationale ont engagé le débat avec le Gouvernement – les débats parlementaires sont là pour cela –, sans remettre en cause les niches fiscales liées aux frais de scolarité.

Je pourrais ainsi égrener encore bien des mesures qui vont dans le sens du renforcement du pouvoir d’achat des ménages. En effet, la croissance résultera non pas simplement de la restauration de la compétitivité de notre appareil productif, mais aussi de la demande. Pour que la demande soit au rendez-vous, les mesures que nous avons prises sont nécessaires. Nous les avons prises par souci de justice fiscale, mais également par souci d’efficacité de notre politique économique.

Je voudrais conclure en évoquant deux points.

Le premier concerne le Sénat en particulier, où les débats ont été riches, intéressants, mais assez funestes pour l’équilibre de nos comptes,…

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. … puisque, après que le texte a été amendé, le solde s’est trouvé dégradé de près de 10 milliards d'euros. (Mme Michèle André s’exclame.) Il arrive d'ailleurs qu’un certain nombre de parlementaires, parfois très avisés – j’en vois devant moi –, qui préconisent que nous accélérions le redressement de nos comptes,…

M. Jean-Claude Lenoir. Vous n’avez pas de majorité, monsieur le ministre !

Mme Michèle André. Et vous, vous n’avez pas les milliards !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. … soient aussi prompts à les dégrader (M. Jean-Claude Lenoir s’exclame.), en proposant des dépenses fiscales multiples et nombreuses, qu’ils le sont à nous conseiller d’accélérer la réduction des déficits.

Je dois dire que cela m’a beaucoup préoccupé. Je regrette vraiment que nous ne puissions pas, par-delà ce qui peut nous séparer, tomber d’accord sur le fait que, dans le contexte budgétaire particulier qui prévaut, nous devions nous unir pour essayer de faire en sorte que le redressement soit conforté, consolidé, approfondi.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Pour cela, il faudrait que le Gouvernement respecte l’opposition !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Le second point sur lequel je voudrais insister, c’est que par le biais des amendements, des discussions parlementaires, un certain nombre de dépenses fiscales, de dépenses nouvelles ont été décidées, ou d’économies remises en cause : je pense à la remise en cause de l’économie sur la dématérialisation des élections ; je pense aux décisions qui ont été prises relatives au minimum vieillesse ; je pense à l’étalement dans le temps des cotisations au titre du régime social des indépendants, le RSI ; je pense à l’élargissement de l’assiette de la TVA relative aux rénovations thermiques.

Sur tous ces sujets, quelques dépenses fiscales supplémentaires ou économies ont été remises en cause, à hauteur de 300 millions d’euros.

Nous avons pris des dispositions, comme je m’y étais engagé, par une taxation interministérielle, par un effort de maîtrise de la dépense, notamment de l’ONDAM, pour faire en sorte que cela ne dégrade pas le solde et que tout ce qui a été décidé par le Parlement, au titre des mesures que je viens d’indiquer, soit compensé rigoureusement par des économies en dépense.

Si bien que, dans le travail parlementaire très riche qui s’est accompli à l’Assemblée nationale et au Sénat, le texte s’est trouvé amélioré, amendé. Il est aujourd'hui plus fort au sortir du débat parlementaire qu’il ne l’était à l’entrée, et nous avons réussi à faire cela en gageant toutes ces dépenses par des économies supplémentaires à hauteur de 300 millions d’euros, auxquelles chaque ministère a dû participer. En effet, les priorités politiques que nous décidons ensemble doivent bien entendu être gagées par des économies pour ne pas dégrader le solde.

Je forme le vœu que notre discussion d’aujourd’hui et les débats au Sénat soient aussi riches qu’ils l’ont été au cours de nos dernières séances. Je vous redis la totale disponibilité du Gouvernement, la mienne sur les questions budgétaires et financières, pour être devant vous, rendant des comptes et assurant la transparence aussi souvent que vous l’estimerez nécessaire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte commun sur le projet de loi de finances pour 2014 a échoué,…

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Brièvement !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. … car il n’a pas semblé possible d’aboutir à une rédaction qui ait des chances d’être ensuite adoptée dans les mêmes termes par les deux assemblées.

Dès lors que le Sénat avait rejeté le projet de loi, c’est donc sur la base de son texte de première lecture, comportant 152 articles, que l’Assemblée nationale a statué en nouvelle lecture.

Elle a modifié son texte sur 62 articles. En proportion, elle a ainsi davantage amendé le projet de loi que ce n’était le cas l’an dernier. Ces modifications sont aussi, sur le fond, plus importantes.

L’équilibre global n’a pas été modifié, les principales hypothèses économiques ayant servi à la préparation du projet de loi de finances pour 2014 étant confirmées par les informations les plus récentes, s’agissant notamment des perspectives de croissance.

Les recettes ont toutefois été révisées légèrement à la baisse, en fonction de l’actualisation des prévisions 2013 associées au projet de loi de finances rectificative pour cette année. (M. Jean Besson s’exclame.)

Sur la première partie – la seule que le Sénat a examinée en séance, hélas ! –, dix amendements adoptés par le Sénat, portant sur sept articles, ont été repris. Malheureusement, les articles additionnels que nous avions insérés n’ont pu connaître cet heureux sort. Quelques-uns ont cependant pu être insérés dans le projet de loi de finances rectificative pour 2013 ; c’est le cas notamment de la taxe sur les cessions de fréquences hertziennes obtenues gratuitement, que nous avions adoptée sur l’initiative de notre excellent collègue David Assouline.

Avant de retracer ces modifications, je voudrais rappeler brièvement notre position institutionnelle à ce stade de la procédure législative. Nous sommes en nouvelle lecture, avant la lecture définitive du projet de loi de finances pour 2014, c’est-à-dire le « dernier mot » de l’Assemblée nationale.

Que nous disent la Constitution et le Conseil constitutionnel ?

En premier lieu, que l’ensemble du texte reste en discussion, puisque aucun article n’a fait l’objet d’un accord entre nos deux assemblées, le Sénat ayant rejeté le texte.

En second lieu, que lors de la « lecture définitive » par l’Assemblée nationale, les seuls amendements recevables au dernier texte voté par elle sont ceux précédemment adoptés par le Sénat en nouvelle lecture.

Or, la jurisprudence du Conseil constitutionnel ne laisse pas de doute quant à l’interprétation de cette condition : il s’agit bien d’amendements adoptés dans le cadre d’un texte qui serait lui-même adopté, ce qui ne semble pas être l’orientation qui est manifestée ici.

Pour être parfaitement explicite, l’Assemblée nationale ne pourrait reprendre aucun amendement voté par le Sénat si nous devions ensuite rejeter le texte.

Dans ces circonstances, il y a peu de chances pour que le Sénat soit encore en mesure de faire évoluer le projet de loi de finances pour 2014. En effet, compte tenu des positions exprimées par les différents groupes politiques en première lecture, on peut raisonnablement penser qu’il ne se trouvera pas davantage de majorité en nouvelle lecture pour voter un texte.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. C’est vraisemblable.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je voulais rappeler à mes collègues ces considérations juridiques afin que chacun prenne la mesure de la situation.

Pour ma part, je ne préconiserai pas de combat d’arrière-garde sur tel ou tel point de divergence avec l’Assemblée nationale dès lors que nous n’aurions aucune chance de peser sur le résultat final.

Après cette introduction, je vais à présent m’efforcer de retracer les principales modifications apportées par l’Assemblée nationale, en commençant par celles qui reprennent des dispositions adoptées par le Sénat en première lecture.

À l’article 7 quater, comme l’avait proposé la commission des finances, l’Assemblée nationale a adopté un amendement rendant éligible les engrais d’origine organique au taux intermédiaire de TVA, avec une différenciation par rapport aux engrais chimiques.

À l’article 11, concernant la réforme du régime d’imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières, elle a repris deux amendements correspondant à des propositions de la commission des finances.

Le premier tend à préciser que l’abattement fixe de 500 000 euros dont bénéficient les dirigeants de PME partant à la retraite pour le calcul de leur plus-value de cession s’applique à l’ensemble des gains afférents à une même société, et non par cession.

Le second vise à concilier l’incitation à l’investissement dans les PME les plus risquées avec l’imposition des plus-values tirées de ces investissements.

À l’article 13, relatif à la réforme de la défiscalisation outre-mer, l’Assemblée nationale a adopté deux amendements : l’un tend à permettre aux bailleurs sociaux de ne pas être soumis au seuil de 20 millions d’euros afin de pouvoir bénéficier de la défiscalisation à l’impôt sur les sociétés ; l’autre vise à la remise d’un rapport sur l’instauration d’un prêt à taux zéro se substituant, au moins partiellement, à l’aide fiscale. Tous deux correspondent à des propositions de nos collègues Éric Doligé et Thani Mohamed Soilihi que nous avions adoptées en première lecture.

À l’article 19, comme l’avait proposé la commission des finances, les députés ont prévu que pourront bénéficier d’un taux de TVA à 7 % les constructions de logements situées à plus de 300 mètres et à moins de 500 mètres de la zone ANRU, dont la demande de permis de construire a été déposée avant le 1er janvier 2014.

M. Philippe Dallier. La belle affaire !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Certes, le 1er janvier 2014 arrive bientôt,…

M. Philippe Dallier. Il va falloir se dépêcher !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. … mais vous n’ignorez pas que certaines affaires étaient en cours.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Par ailleurs, le taux réduit de TVA sera appliqué à la fourniture de nourriture et d’hébergement pour les logements-foyers, les foyers de jeunes travailleurs et les centres d’hébergement d’urgence. Une disposition semblable, qui n’incluait toutefois pas les hébergements d’urgence, avait été adoptée par le Sénat il y a quelques jours sur l’initiative du groupe écologiste.

Au-delà de la reprise de certains des amendements adoptés par le Sénat, l’Assemblée nationale a apporté de très nombreuses modifications aux articles du projet de loi de finances. Au total, pas moins de 175 amendements ont été adoptés par les députés. Je me propose d’exposer les principales modifications.

À l’article 7 ter, a été adopté un amendement visant à appliquer le taux réduit de TVA aux travaux induits par les travaux de rénovation énergétique, conformément à un engagement que vous aviez pris, monsieur le ministre, devant le Sénat.

À l’article 8, l’Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements renforçant les incitations à la reconstitution de titres de propriété immobilière.

À l’article 13, les députés ont maintenu la possibilité de recourir à la défiscalisation pour les opérations de logement social, sans limites de chiffre d’affaires, et étendu le crédit d’impôt sur les investissements productifs aux opérations portant sur le logement intermédiaire.

À l’article 18, l’Assemblée nationale a maintenu l’abattement exceptionnel d’imposition des plus-values immobilières pour les opérations de démolition suivies de reconstruction de locaux destinés à l’habitation et réalisées dans les zones tendues, jusqu’au 31 décembre 2014, et jusqu’au 31 décembre 2016 si une promesse de vente a été signée avant le 1er janvier 2015.

À l’article 20, les députés ont adopté un amendement visant à permettre aux PME et PMI grandes consommatrices d’énergie qui ne font pas partie du système communautaire d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre d’être incluses dans ce système, afin de bénéficier du maintien des tarifs actuels de taxe intérieure de consommation.

J’en viens à présent à la seconde partie, au sein de laquelle l’Assemblée nationale a adopté de très nombreuses modifications concernant les crédits, qui correspondent à divers ajustements ainsi qu’à des modifications « à titre non reconductible ». Je n’entrerai pas dans le détail de ces modifications, notamment celles qui sont « à titre non reconductible », que les membres de la commission des finances connaissent parfaitement.

L’Assemblée nationale a également majoré les plafonds des autorisations d’emploi des services du Premier ministre et du ministère de l’égalité des territoires et du logement, afin de tirer les conséquences de la création d’un commissariat général à l’égalité des territoires. Ces majorations ont été compensées par une minoration du plafond d’emplois du ministère des affaires sociales et de l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances.

Par ailleurs, à l’article 53, les députés ont rendu éligibles au « PEA-PME » les parts de fonds communs de placement à risques, les fonds communs de placement dans l’innovation et les fonds d’investissement de proximité. Ils ont également assoupli les conditions applicables à ces fonds.

À l’article 58 bis, relatif à la création d’un second fonds de péréquation départemental des droits de mutation à titre onéreux, les DMTO, l’Assemblée nationale a prévu que le reversement au titre du second fonds de péréquation serait effectué en fonction des restes à charge par habitant de chaque département au titre des allocations individuelles de solidarité à hauteur de 70 %, et en fonction du potentiel fiscal corrigé du département pour les 30 % restants. Il s’agit d’un sujet qui intéresse beaucoup de nos collègues et dont on peut regretter, cette année encore, que le Sénat n’ait pu débattre dans le cadre de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances.

À l’article 60, relatif au fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant contracté des produits structurés, l’Assemblée nationale a introduit la possibilité pour l’État de demander les informations utiles au calcul de l’indemnité de remboursement anticipé, sans que puisse lui être opposé le secret bancaire. Elle a également inclus les instruments de couverture dans le champ d’intervention du fonds.

À l’article 60 quater, les députés ont porté le montant de la dotation de développement urbain à 100 millions d’euros à compter de 2014.

À l’article 60 nonies, ils ont modifié les modalités d’entrée en vigueur de la réforme de l’abus de droit, qui ne pourrait s’appliquer rétroactivement, c’est-à-dire à l’occasion d’un contrôle fiscal portant sur des exercices antérieurs à la promulgation de la loi de finances pour 2014.

À l’article 73, l’Assemblée nationale a supprimé les dispositions relatives à la répartition libre du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC, à la majorité qualifiée, ainsi que la modification du critère d’éligibilité au prélèvement, qui conduisait à concentrer les prélèvements sur un nombre restreint de communes et d’établissements publics de coopération intercommunale. Les députés se sont donc livrés à un aller-retour entre leur position initiale et celle qu’ils ont adoptée en nouvelle lecture, plus conforme à ce que nous avions nous-mêmes à l’esprit.

Enfin, ils ont supprimé l’article 74 bis, qui prévoyait d’intégrer le versement transport dans le coefficient d’intégration fiscale.

Il s’agit, pour certains amendements relatifs aux collectivités territoriales, de la reprise d’amendements adoptés par la commission des finances du Sénat sur l’initiative des rapporteurs spéciaux Jean Germain et Pierre Jarlier, dont nous n’avons pu débattre en séance publique. Nous pouvons donc nous réjouir que la parole du Sénat ait été entendue sur nombre de ces articles relatifs aux collectivités, même si, bien entendu, certaines des dispositions adoptées auraient pu, de notre point de vue, faire l’objet d’ajustements plus en rapport avec notre ligne de conduite sur ces sujets.

Au total, la nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2014 à l’Assemblée nationale a conduit à améliorer le solde budgétaire de l’État de 10 millions d’euros. Cette évolution résulte de la prise en compte des modifications introduites dans le projet de loi de finances pour 2014 en nouvelle lecture, ainsi que des dispositions du projet de loi de finances rectificative pour 2013 impactant le solde budgétaire en 2014. Elles vont globalement dans le sens d’une minoration sensible des recettes comme des dépenses.

De manière résumée, les principales modifications ont été les suivantes.

Les recettes fiscales ont été minorées de 436 millions d’euros.

Les recettes non fiscales ont été majorées de 17 millions d’euros, compte tenu des nouvelles conditions de rémunération de la garantie accordée au Crédit immobilier de France.

Les prélèvements sur recettes à destination des collectivités territoriales ont été minorés de 147 millions d’euros, en raison des élargissements adoptés notamment en matière de péréquation, d’accroissement de certaines dotations.

Le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne a été majoré de 80 millions d’euros. En effet, l’adoption définitive par le Parlement européen, lors de la session plénière du 20 novembre 2013, d’un budget 2014 dont les crédits de paiement sont supérieurs de 500 millions d’euros à la position adoptée par le Conseil, entraîne une hausse de 80 millions d’euros de la quote-part revenant à la France.

Le solde des comptes spéciaux, quant à lui, a été amélioré de 60 millions d’euros.

Enfin, les dépenses du budget général de l’État ont été réduites de 302 millions d’euros. Cette évolution résulte principalement d’économies transversales visant à assurer le respect de la norme de dépense et à compenser certaines pertes de recettes. Ces économies ont été réparties sur la plupart des missions du budget général. Toutefois, comme c’est généralement le cas, les dépenses de personnel ainsi que les dépenses de guichet, sur lesquelles les ministères disposent de peu de marges pour procéder à des redéploiements en cours d’année, ont été sanctuarisées.

J’en termine, mes chers collègues, en vous précisant que le montant d’amortissement de la dette à moyen et long termes pour 2014 a été réduit de 1 milliard d’euros, afin de tenir compte des rachats de titres arrivant à échéance en 2014 effectués cet automne. Les émissions de dette à moyen et long termes ont été réduites à due concurrence.

Voilà donc, monsieur le ministre, mes chers collègues, les éléments essentiels que l’on peut retenir de la nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2014 à l’Assemblée nationale.

Compte tenu du stade de la navette auquel nous sommes parvenus et de l’équilibre global du texte voté par nos collègues députés, la commission des finances a ce matin suivi ma préconisation de proposer au Sénat d’adopter sans modification le projet de loi de finances pour 2014. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Christian Bourquin.

M. Christian Bourquin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme l’année dernière, nous examinons en nouvelle lecture le projet de loi de finances, après que notre Haute Assemblée en a rejeté la première partie. Une nouvelle fois, nous serons donc très vraisemblablement privés de l’examen de la seconde partie, ce qui signifie que nous ne pouvons pas discuter de la répartition des crédits budgétaires et des choix opérés quant aux réductions des dépenses publiques.

Avant d’évoquer le fond du texte, en six minutes, j’aimerais m’arrêter sur ce point avec vous, mes chers collègues.

N’est-il pas regrettable pour notre République et pour le respect de nos institutions que, pour la deuxième année consécutive, la Haute Assemblée ne puisse se prononcer sur l’intégralité du texte le plus important que le Parlement ait à voter chaque année ?

M. Philippe Dallier. La faute de qui ?

M. Christian Bourquin. Je peux comprendre les réticences, voire les désaccords, sur les choix budgétaires de ceux qui n’ont pas voté ce texte. D’ailleurs, comme l’avait déclaré le président de notre groupe, Jacques Mézard, en première lecture, la très grande majorité du RDSE estime que ce budget pour 2014 est loin d’être pleinement satisfaisant.

Toutefois, notre vocation n’est-elle pas de discuter, d’amender, de débattre, dans cet hémicycle, des dépenses de l’État, de la façon dont est répartie la diminution de la DGF pour les collectivités locales ou encore, entre autres dispositions, des modifications relatives à la péréquation verticale et horizontale ?

En tant que rapporteur spécial de la mission « Économie », permettez-moi d’exprimer ici ma frustration de ne pouvoir notamment échanger avec vous, mes chers collègues, sur les mesures que notre pays prend, en cette période de crise, pour soutenir l’emploi et restaurer la compétitivité des entreprises.

Pour en venir au fond, l’orientation du texte répond à l’impérieuse nécessité de rechercher de nouvelles ressources pour réduire dépenses et déficits. La France doit tenir ce cap pour conserver son indépendance et sa souveraineté à l’égard des marchés financiers, mais elle le doit aussi et surtout aux générations futures. Sachons nous rappeler, avec Antoine de Saint-Exupéry, que nous n’héritons pas de la terre de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants. La déclinaison économique de cette idée appelle aujourd’hui à la responsabilité dans nos choix budgétaires.

Comme vous tous, j’ai été attentif aux récentes remarques de la Commission européenne, qui considère que les prévisions macroéconomiques retenues par notre gouvernement sont « plausibles » et que le projet de plan budgétaire est conforme aux règles du pacte de stabilité et de croissance. Cependant, j’ai également noté plusieurs réserves, relatives à la baisse des recettes fiscales, aux prévisions d’emplois et, surtout, à la pression fiscale trop élevée.

Sur ce dernier point, si nous partageons la volonté du Gouvernement de redresser les finances publiques, nous estimons que, dans le contexte actuel d’une lente et difficile sortie de crise, une augmentation trop importante de la pression fiscale sur les ménages et sur les entreprises nuit gravement à la reprise et à la croissance sur le long terme.

En outre, nous sommes inquiets au sujet de l’emploi, dans les zones de revitalisation rurale, notamment, et plus largement dans les territoires « hyper-ruraux », chers au sénateur de Lozère Alain Bertrand. Alors que l’emploi n’y est pas suffisamment soutenu, le projet de loi abandonne des dispositifs qui auraient pu être efficaces, sans proposer d’alternatives.

J’en viens aux modifications adoptées par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture. Si certaines prennent en compte des préoccupations exprimées par le Sénat – et notamment par le groupe RDSE –, ce dont nous nous réjouissons, les députés ont aussi adopté des modifications significatives, en particulier dans la seconde partie, qui ne nous satisfont absolument pas.

Je pense notamment aux mesures relatives aux collectivités territoriales. Nous revivons ici le scénario délétère du projet de loi de finances pour 2013, lorsque les députés ont adopté in extremis des modifications très importantes concernant les fonds de péréquation départementaux de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE, et des droits de mutation à titre onéreux, les DMTO.

Cette année, le Gouvernement a introduit un article 58 bis, qui crée un nouveau dispositif de péréquation des DMTO, le « prélèvement de solidarité », corollaire de la faculté temporaire, accordée par l’article 58, de relever de 0,7 point le taux des DMTO. À l’issue de la première lecture, les critères de répartition de ce fonds entre les départements n’étaient pas définis. Un amendement du Gouvernement, résultant de concertations avec l’Assemblée des départements de France, a finalement été adopté en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale. Les critères qu’il fixe pour la répartition des ressources de ce fonds de péréquation sont d’une rare complexité.

À l’heure où tout le monde appelle à une fiscalité plus simple et plus lisible, ces modifications posent question. Pour les membres du RDSE, qu’il s’agisse des ménages, des entreprises ou des collectivités territoriales, l’objectif de justice fiscale passe indéniablement par une réduction de la complexité de notre fiscalité.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Certes !

M. Christian Bourquin. J’espère que c’est bien ce principe qui guidera la grande réforme fiscale annoncée pour l’an prochain. (M. Vincent Delahaye s’exclame.)

Nous regrettons donc vivement que, du fait du rejet par le Sénat de la première partie du présent projet de loi de finances, l’Assemblée nationale soit la seule à discuter et, surtout, à décider des dispositions qui concernent les collectivités territoriales, dont nous, sénatrices et sénateurs, sommes les représentants.

Pour conclure, en cohérence avec la position qu’il a adoptée en première lecture, et malgré les imperfections qu’il a soulignées, notre groupe soutient très majoritairement ce projet de loi de finances pour 2014, ainsi que l’a annoncé M. le rapporteur général. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur de nombreuses travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier.

M. Philippe Dallier. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, après avoir été rejeté dans cet hémicycle, après l’échec de la commission mixte paritaire, le présent texte revient en nouvelle lecture devant notre Haute Assemblée.

Mais, nous le savons bien, mes chers collègues, nous ne parviendrons pas à un accord. Cette nouvelle mouture est frappée des mêmes défauts que celle qui a été rejetée : insincérité, iniquité, inefficacité. (Oh ! et protestations sur les travées du groupe socialiste.)