Mme Marie-Noëlle Lienemann. Non, ce n’est pas vrai !

M. Philippe Dallier. Je vous taquine un peu, madame la ministre, en me faisant l’avocat de ceux dont je ne partage pas le point de vue, mais je tenais tout de même à souligner ce paradoxe.

Le nouveau dispositif sera-t-il au moins efficace ? Telle est la véritable question.

L’objectif premier, qui n’a bien sûr pas changé, est d’inciter les propriétaires à accepter les dossiers de candidats à la location en situation plus ou moins précaire et/ou dont les ressources ne sont guère élevées au regard du montant du loyer demandé.

Sur ce point, nous sous-estimons trop, me semble-t-il, les motivations des propriétaires. Si un propriétaire loue un bien, c’est bien sûr pour le rentabiliser. C’est pourquoi il cherche à minimiser le risque d’impayés, et il cherchera toujours à le faire, même avec la GUL.

Au-delà du manque à gagner lié au non-versement du loyer, aucun propriétaire n’a envie d’avoir à gérer les problèmes posés par un locataire défaillant, même avec une assurance lui garantissant la prise en charge d’une partie du risque pendant un certain temps. Le tri des bons et des mauvais dossiers existera toujours, GUL ou pas GUL : c’est un comportement humain, contre lequel nous ne pouvons pas grand-chose.

Dans quelle mesure le dispositif atténuera-t-il ce comportement ? C’est toute la question, mais nous ne connaissons pas la réponse. Vous faites donc un pari, madame la ministre ; un pari à 560 millions d’euros d’argent public, d’après vos estimations.

Mme Cécile Duflot, ministre. Non !

M. Philippe Dallier. N’aurait-il pas mieux valu, pour le même résultat en termes d’efficacité, imaginer un dispositif assurantiel obligatoire pour tous les locataires, comme l’assurance multirisque habitation ?

M. Philippe Dallier. Cette proposition, bien moins coûteuse pour les finances publiques, vous a été faite, mais vous l’avez systématiquement rejetée. Je persiste à penser que c’était une bonne solution, particulièrement en cette période de disette budgétaire.

Quant au coût de 560 millions d’euros, j’espère pour les finances publiques, madame la ministre, que votre estimation est juste. Là aussi, seul l’avenir le dira… Sur cette somme, 160 millions d’euros seraient pris en charge par Action logement ; quant aux 400 millions d’euros restants, vous soutenez qu’ils sont gagés par les économies que l’État réalisera grâce à l’extinction des différents outils de défiscalisation, en particulier les dispositifs « Scellier » et « Robien ».

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il faut dire qu’ils coûtent cher !

M. Philippe Dallier. Je suis bien d’accord avec vous, madame Lienemann, et je l’ai moi-même souvent signalé à cette tribune.

M. Jean-Claude Lenoir. Mais ils produisent des résultats !

M. Claude Bérit-Débat, rapporteur. Pas tant que ça !

M. Claude Dilain, rapporteur. Et pas là où sont les besoins !

M. Philippe Dallier. Madame la ministre, au moment où l’État a besoin de réaliser 5 milliards d’euros d’économies d’ici à 2017, ces 400 millions d’euros n’auraient-ils pas été mieux employés autrement ?

Vous devez trouver les moyens juridiques et financiers de relancer la construction, dont les chiffres pour 2013 sont alarmants : à peine 300 000 logements, peut-être 330 000, ont été construits, ce qui est très loin de l’objectif de 500 000 logements. Qu’en sera-t-il l’année prochaine ? Pour relancer la construction de logements neufs, n’aurez-vous pas besoin de trouver – avec plus de modération que par le passé, je l’admets – de nouvelles incitations fiscales ? Si oui, comment les financerez-vous ?

Vous devez aussi soutenir le financement du parc social. À cet égard, j’observe que, après lui avoir demandé de financer l’ANRU 1, puis l’ANRU 2, le Gouvernement demande à Action logement de financer la GUL en lieu et place de la GRL. Il est vrai qu’il n’est pas le premier à agir ainsi…

Par ailleurs, il faut se souvenir que l’ANAH est dans une situation budgétaire difficile. Chacun le sait, mais personne n’en parle, ce qui est tout de même assez étonnant dans un débat sur le logement ! De fait, on a eu la curieuse idée d’adosser le financement de cette agence, qui engage des dépenses pluriannuelles, à des recettes soumises à la volatilité des marchés ; la Cour des comptes vient d’en faire le constat, en soulignant que le financement de l’ANAH, à hauteur de 590 millions d’euros, est assis sur la mise aux enchères de quotas d’émission de gaz à effet de serre et sur la vente d’actifs carbone. Ce modèle ne tient pas la route, et il est urgent de trouver une autre solution, sans quoi une bonne partie des dispositions qui vont être adoptées ne seront peut-être pas efficaces, puisque l’ANAH n’aura pas les moyens de faire son travail.

Madame la ministre, l’argent public se fait rare et les besoins en matière de logement sont importants. Or je crains que vous n’ayez pas choisi la meilleure manière d’utiliser l’argent dont nous disposons.

Mme Élisabeth Lamure. C’est le moins qu’on puisse dire !

M. Philippe Dallier. Je le répète, votre projet de loi comporte de bonnes dispositions. Au total, malheureusement, il va trop loin et entraîne des déséquilibres, surtout en ce qui concerne les rapports bailleurs-locataires. Comme d’autres, je crains que, au bout du compte, le résultat obtenu soit l’inverse de celui que vous recherchez : les constructions seront moins nombreuses et l’objectif de 500 000 nouveaux logements par an ne pourra pas être atteint ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

Mme Élisabeth Lamure. C’est évident !

M. Jean-Claude Lenoir. Ça a même déjà commencé !

Demande de priorité

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové
Demande de priorité (interruption de la discussion)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. La commission des affaires économiques souhaite que, demain matin, après la fin de la discussion générale et l’examen de l’article 1er, l’article 8 soit examiné par priorité.

M. le président. Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, la priorité est de droit, sauf opposition du Gouvernement.

Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Favorable.

M. le président. La priorité est de droit.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Demande de priorité (début)
Dossier législatif : projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové
Discussion générale (début)

9

Retrait de deux questions orales

M. le président. J’informe le Sénat que les questions orales n° 664 de M. Gilbert Barbier et n° 696 de M. Louis Pinton sont retirées du rôle des questions orales, à la demande de leurs auteurs.

10

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 30 janvier 2014 :

À neuf heures trente-cinq :

1. Suite du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (n° 294, 2013-2014) ;

Rapport de MM. Claude Dilain et Claude Bérit-Débat, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 307, 2013-2014) ;

Avis de M. René Vandierendonck, fait au nom de la commission des lois (n° 301, 2013-2014) ;

Texte de la commission (n° 308, 2013-2014).

De quinze heures à quinze heures quarante-cinq :

2. Questions cribles thématiques sur le déficit démocratique de l’Union européenne.

À seize heures et le soir :

3. Suite de l’ordre du jour du matin

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le jeudi 30 janvier 2014, à zéro heure trente-cinq.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART