M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.

M. Jean-Noël Cardoux. Avant d’évoquer les questions de fond, je voudrais saluer la qualité de nos débats. Monsieur le ministre, nous avons connu des joutes oratoires bien plus musclées sur d’autres textes ! Sur ce projet de loi, malgré des oppositions de fond bien naturelles, nos échanges se sont déroulés dans un climat de sérénité et de courtoisie. C’est une expérience à méditer et à renouveler !

Sur le fond, je soulignerai à mon tour la suppression de l’article 20, à laquelle nous avons contribué. Cela étant, ce n’était pas là notre point de désaccord fondamental avec les défenseurs du texte.

De nombreux éléments du projet de loi, notamment le compte personnel de formation et le renforcement de la transparence, nous convenaient, mais nous avions déposé un certain nombre d’amendements visant à améliorer le texte. Malheureusement, la plupart d’entre eux ont été repoussés. Je citerai notamment ceux qui étaient relatifs au relèvement du plafond pour les demandeurs d’emploi, à la reconnaissance d’un socle commun de connaissances lié à une formation qualifiante – cette proposition, à laquelle nous tenions beaucoup, a été repoussée à deux reprises –, au renforcement de la mutualisation du financement de la formation pour les PME de 50 à 299 salariés, au transfert de compétences aux régions, dont nous remettons en cause non pas le principe, mais la brutalité, en déplorant surtout la suppression immédiate des contrats d’objectifs et de moyens entre l’État et les régions, ainsi qu’aux contrats de génération, sources de pénalités.

Néanmoins, la question centrale est celle de la taxe d’apprentissage. Vous m’avez transmis, monsieur le ministre, avec une célérité que je salue, les chiffres que je vous avais demandés hier. Je n’ai pas eu le temps de les recouper, mais, en tout état de cause, même si ces chiffres, qui laissent augurer une stabilité, voire une légère augmentation, des fonds destinés à l’apprentissage, sont avérés, demeure malgré tout un important problème d’aiguillage des moyens : ceux-ci seront essentiellement concentrés entre les mains de la région, et les entreprises se trouveront privées d’une grande partie de leur liberté d’affectation pour le financement de certains centres de formation d’apprentis.

Les dispositions sur l’apprentissage constituaient pour nous la principale pierre d’achoppement de ce projet de loi. Elles n’ont pas été amendées dans le sens que nous souhaitions : c’est la raison essentielle qui conduira notre groupe à émettre un vote négatif.

Enfin, j’avais présenté deux amendements de sagesse, visant à relancer le dialogue social dans deux domaines bien particuliers.

S’agissant du temps partiel, tout d’abord, il n’aurait pas été superflu de donner six mois supplémentaires aux partenaires sociaux signataires de l’ANI afin de leur permettre de trouver des solutions pour lisser le dispositif.

S’agissant ensuite des dispositions relatives à la représentativité patronale, dont on sait qu’elle est une cause de conflits entre syndicats patronaux, il eût été là aussi bienvenu d’adopter l’amendement de sagesse que j’avais proposé pour apaiser la situation et relancer la discussion entre les partenaires.

Tels sont les principaux griefs que nous formulons à l’encontre de ce texte, que la majorité du groupe UMP ne votera pas, malgré les éléments positifs issus de l’ANI que j’avais relevés lors de mon intervention dans la discussion générale.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Ce projet de loi très important, qui consacre, pour l’essentiel, le compte personnel de formation, n’a qu’un défaut, mais de taille : celui de mêler des dispositions issues de l’ANI sur la formation professionnelle à d’autres sujets qui auraient pu faire l’objet de textes distincts. Je pense notamment à la représentativité patronale, au financement des organisations syndicales et, surtout, à la réforme de l’inspection du travail.

Quoi qu’il en soit, nous saluons la qualité de votre écoute, monsieur le ministre, et votre courtoisie, monsieur le rapporteur. J’espère que le même climat prévaudra lors de l’étude de prochains textes.

Certes, nos amendements n’ont pas tous été adoptés, mais c’est le jeu ! Quatre d’entre eux l’ont été, au moins partiellement, qui visaient tous à garantir ou à évaluer la qualité de la formation professionnelle ou des organismes qui la dispensent. C’est un point essentiel.

Nous regrettons certes que, sur l’apprentissage, nos amendements n’aient pas été retenus, mais nous nous rangeons volontiers à vos arguments, monsieur le ministre.

L’article 20, relatif à l’inspection du travail, faisait vraiment débat au sein du Sénat, ainsi que de notre groupe. Sa suppression permettra de traiter sereinement cette question plus tard. Soyons clairs : notre groupe ne remet absolument pas en cause l’inspection du travail, non plus que la nécessité d’améliorer le fonctionnement de cet organe de contrôle.

La suppression de cet article est donc bénéfique, en ce qu’elle permettra à la majorité du groupe UDI-UC de voter ce texte qui consacre dans la loi les stipulations de l’ANI sur la formation professionnelle. Nous espérons que ces acquis seront préservés en commission mixte paritaire.

M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès.

Mme Christiane Demontès. Nous voici donc parvenus au terme de l’examen de ce projet de loi sur la formation professionnelle, l’emploi et le dialogue social, qui présente à nos yeux un certain nombre d’avancées tout à fait remarquables : le compte personnel de formation, attaché à la personne et non plus au statut professionnel ; le conseil en évolution professionnelle ; le renforcement des compétences des régions en matière de formation professionnelle et d’apprentissage ; la création d’un service public régional de formation et d’un service public régional d’orientation ; l’amélioration de la gouvernance au niveau national, avec la création du conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles, qui vient remplacer un certain nombre de dispositifs quelque peu épars, et sa déclinaison en conseils régionaux de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles.

Je veux dire aussi l’importance de la simplification du financement de la formation professionnelle. Ce point a fait débat entre nous, certains émettant des doutes sur l’importance des moyens qui seront véritablement consacrés à la formation professionnelle. Pour notre part, nous ne doutons pas qu’il s’agisse d’une amélioration très sensible.

Nos débats ont été sereins et se sont déroulés dans un bon climat. Comme mon collègue Jean-Marie Vanlerenberghe, je tiens à en remercier M. le rapporteur et M. le ministre. L’un et l’autre ont fait preuve de patience et de pédagogie, ce qui a contribué très largement à la sérénité de nos débats.

Le travail sénatorial a permis d’améliorer encore le texte. Je citerai simplement, à cet égard, l’abondement du compte personnel de formation pour les salariés à temps partiel et la priorité donnée, à la suite de l’adoption d’un amendement du groupe UDI-UC, aux salariés les moins qualifiés pour l’accès à la formation. Ce sont des points importants.

Bien sûr, mon groupe regrette la suppression de l’article 20. Nous prenons acte du fait qu’il n’y avait pas de majorité sur cette question.

Nous voterons bien évidemment ce texte, dont nous ne doutons pas qu’il sera efficace.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Je me félicite moi aussi du climat serein et positif dans lequel s’est déroulé notre débat, grâce notamment à la qualité de la présidence.

Monsieur le ministre, vous êtes un ministre non seulement militant, mais également pédagogue. Nous avons tous apprécié que vous exposiez les enjeux de ce texte en les replaçant dans une perspective plus large, sans vous contenter d’apporter des explications techniques sur tel ou tel article. Cela nous a conduits parfois, et même souvent, à retirer nos amendements.

Je vous remercie, monsieur le rapporteur, de nous avoir apporté des explications claires et précises qui ont enrichi notre réflexion.

Sur le fond, nous écologistes étions fermement opposés à la réforme de l’inspection du travail proposée. Cette réforme ayant été supprimée du texte, nous sommes heureux de pouvoir voter celui-ci, car il comporte des avancées très positives, fruits d’un travail de plusieurs années : la création du compte personnel de formation, l’affirmation du rôle de la région, une réforme de la représentativité patronale.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale.

J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public, émanant l'une du groupe UMP, l'autre du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 155 :

Nombre de votants 347
Nombre de suffrages exprimés 322
Pour l’adoption 188
Contre 134

Le Sénat a adopté. (M. Jean Desessard applaudit.)

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai la conviction que ce projet de loi, même amputé de l’article 20, est un texte fondateur, qui comptera dans l’histoire de la formation professionnelle dans notre pays.

À cette heure avancée, je veux vous remercier, monsieur le président, de l’efficacité avec laquelle vous avez su conduire la fin de nos débats.

Je salue la qualité de votre écoute et votre sens du dialogue, monsieur le ministre, et j’adresse mes remerciements à votre équipe, avec laquelle nous avons pu travailler de manière à la fois efficace et agréable.

Je tiens également à remercier chacune et chacun de nos collègues de la qualité de leurs interventions, ainsi que du respect de l’opinion d’autrui et de la hauteur de vues dont ils ont fait preuve au cours de nos échanges.

Enfin, je remercie Mme la présidente de commission des affaires sociales pour sa capacité de médiation, ainsi que nos collaborateurs pour la qualité du travail qu’ils ont fourni afin de nous accompagner dans l’examen de ce texte. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Je veux remercier les présidents qui se sont succédé au plateau depuis mardi après-midi, ainsi que l’ensemble des services du Sénat.

Monsieur le rapporteur, je salue votre grand sens de la pédagogie et votre implication. Nous n’avons certes pas toujours été d’accord, mais c’est le jeu de la démocratie, et l’essentiel est de travailler dans le respect de l’autre !

Je vous remercie de votre écoute, monsieur le ministre, ainsi que votre équipe.

Je salue la qualité de la contribution de l’ensemble de nos collègues à l’examen d’un texte plus complexe qu’il n’y paraissait de prime abord.

Comme vient de le dire M. Vanlerenberghe, nous serons sans doute appelés à nous retrouver très rapidement pour étudier un texte relatif à l’inspection du travail, après que la négociation aura permis, du moins je l’espère, d’aboutir à un accord national interprofessionnel sur le sujet.

Malgré les conditions un peu difficiles qui nous ont été imposées, je crois que le Sénat a, comme à l’habitude, fait du bon travail. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste, du groupe écologiste et de l’UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Michel Sapin, ministre. Je tiens à remercier très sincèrement l’ensemble des participants à ce débat. Nous avons travaillé ensemble à un grand texte, dont la rédaction définitive ne devrait guère différer de celle que vous avez adoptée.

Ce projet de loi introduit une véritable révolution dans le domaine de la formation professionnelle, par la création du compte personnel de formation, et une profonde évolution en matière de formation en alternance, grâce à l’attribution de moyens accrus à l’apprentissage.

Le texte permettra en outre une consolidation du socle de la démocratie sociale, avec la mise en place, au côté de la représentativité syndicale, d’une représentativité patronale, et une clarification du financement des organisations patronales et syndicales, qui me paraît essentielle pour lever définitivement le soupçon, parfois fondé, ayant pu se faire jour par le passé, à l’occasion de tel ou tel feuilleton judiciaire. Tout cela permettra de conforter la légitimité des partenaires sociaux.

L’article 21 renforce les capacités de contrôle de la qualité de la formation professionnelle par mon administration. Il convient de mettre fin à un certain nombre de situations anormales. Les mesures prises en ce sens ont fait l’objet d’un très large consensus et, parfois, de votes unanimes de la part du Sénat.

Il me semble qu’il n’est pas un seul groupe politique dont un amendement au moins n’aura pas contribué à l’amélioration du texte. Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à tous vous remercier de votre participation à ce débat, qui fut de grande qualité ! Même si nous ne nous sommes pas toujours rejoints, il valait la peine de nous écouter les uns les autres jusqu’à cette heure avancée, pour aboutir à un beau texte de démocratie sociale.

Madame la présidente David, monsieur le rapporteur, je vous remercie de la manière dont vous avez animé les travaux de la commission, dans des conditions, en particulier de délais, qui n’étaient pas simples.

Je remercie également la présidence, dont l’efficacité nous permet d’achever l’examen de ce projet de loi à une heure presque raisonnable !

Enfin, je tiens à remercier les membres de mon cabinet, qui ont travaillé dans des délais encore plus contraints que le Parlement, puisqu’ils ont rédigé les nombreux articles de ce texte entre le 14 et le 25 décembre dernier. (Applaudissements.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale
 

13

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, vendredi 21 février 2014, à onze heures :

Nouvelle lecture de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, visant à reconquérir l’économie réelle (n° 372, 2013-2014) ;

Rapport de Mme Anne Emery-Dumas, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 377, 2013-2014) ;

Résultat des travaux de la commission (n° 378, 2013-2014).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le vendredi 21 février 2014, à une heure trente.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART