M. le président. Monsieur Requier, l’amendement n° 21 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Claude Requier. Je ne pensais pas soulever un tel problème juridique avec un fromage… Je retire donc mon amendement, tout en disant que le fromage n’est pas mort : il sent simplement un peu trop fort ! (Rires et applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste. – M. Joël Labbé applaudit également.)

M. le président. L’amendement n° 21 rectifié est retiré.

Madame Lamure, l’amendement n° 48 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Élisabeth Lamure. Non, je le retire également, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 48 rectifié ter est retiré.

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 31 rectifié quater, présenté par Mme Férat, MM. Détraigne, J. Boyer, J.L. Dupont, Roche, Merceron, Amoudry, Guerriau, Dubois, Marseille et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 29

1° Première phrase

Supprimer les mots :

dirigeants sociaux des

et le mot :

indépendante

2° Seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

, après concertation des organisations représentatives des métiers d’art et du ministère de la culture réunis dans un groupe de travail ad hoc

La parole est à Mme Muguette Dini.

Mme Muguette Dini. Cet amendement vise à corriger la rédaction du présent alinéa, qui exclut de nombreuses personnes des métiers d’art. Trop restrictive, sa rédaction dénature le véritable caractère de l’activité de milliers de professionnels qui concourent au rayonnement du savoir-faire français.

En se limitant aux personnes physiques et aux dirigeants de personnes morales exerçant une activité indépendante, on oublie de prendre en compte les milliers de salariés œuvrant dans les entreprises de ces métiers d’art. Par exemple, les entreprises et les salariés de la cristallerie de Baccarat ou de la maroquinerie Hermès seraient exclus du périmètre des métiers d’art au motif qu’ils n’entrent pas dans le champ retenu par le projet de loi.

Cet amendement tend à insérer ces professionnels dans le dispositif et donc à leur rendre justice. Nul ne peut nier qu’ils sont, eux aussi, des ouvriers d’art. Avant de fixer un arrêté ministériel pour établir la liste des métiers d’art, il nous semble utile qu’une large concertation entre toutes les parties prenantes de cette catégorie professionnelle puisse être menée, grâce à la réunion d’un groupe de travail. Une telle concertation est jugée particulièrement nécessaire par les professionnels du secteur, qui nous ont vivement alertés sur le sujet.

M. le président. L'amendement n° 54, présenté par Mme Lamure, M. César et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 29, première phrase

1° Supprimer les mots :

dirigeants sociaux des

2° Supprimer le mot :

indépendante

La parole est à Mme Élisabeth Lamure.

Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement tend à supprimer les termes « dirigeants sociaux » et « indépendante ». Ces modifications n’empêcheront pas les artisans d’être considérés comme exerçant un métier d’art, si tel est le cas. En revanche, elles permettront aux salariés et aux entreprises de rester dans le périmètre des métiers d’art.

M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Marie, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :

Alinéa 29

Après les mots :

de transformation

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

ou de reconstitution, de réparation et de restauration du patrimoine, caractérisée par la maîtrise de gestes et de techniques en vue du travail de la matière et nécessitant un apport artistique. La liste des métiers d’art est fixée par arrêté conjoint des ministres chargés de l’artisanat et de la culture.

La parole est à M. Didier Marie, rapporteur pour avis.

M. Didier Marie, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. L’article 9 du présent texte modifie à la marge les articles 19, 20 et 21 de la loi de 1996, qui forment un ensemble indissociable au sein duquel est appréhendée la question des artisans d’art.

Mes chers collègues, le droit en vigueur définit déjà les artisans, en désignant les personnes physiques ainsi que les dirigeants sociaux des personnes morales immatriculées au répertoire des métiers dont l’activité est définie comme indépendante. Supprimer les termes « dirigeants sociaux » et « indépendante » reviendrait à dissocier les artisans d’art des artisans et à créer une nouvelle catégorie juridique. Vous en conviendrez, cette mesure susciterait une grande instabilité juridique, ce qui n’est pas l’objectif visé.

L’alinéa 29 du présent article ne définit pas les métiers d’art en tant que tels. Il précise qui, parmi les artisans, relève des métiers d’art.

Concernant la définition de ces métiers, Mme Dini fait référence au décret Dutreil, qui doit être révisé. Cette modification nécessitera évidemment une concertation. Je note néanmoins que celle-ci ne relève pas de la loi mais d’un décret. Au reste, Mme Pinel l’a confirmé lors de l’adoption de cette disposition à l’Assemblée nationale.

J’invite donc le Sénat à ne pas adopter ces amendements.

L’amendement n° 4, quant à lui, tend à modifier la définition des entreprises de l’artisanat d’art relevant des métiers d’art afin d’éviter toute confusion avec les métiers de la conservation et le code du patrimoine. Je le précise, nous attendons de M. le ministre qu’il nous confirme bien cette dissociation. Les représentants des professions concernées sont assez sensibles à cette question.

Cet amendement vise également à mentionner la maîtrise des gestes et techniques spécifiques des artisans d’art et à consacrer leur apport artistique, que la rédaction actuelle du présent article ne rend pas systématique.

Enfin, en réponse au problème que je viens d’évoquer, il tend à ce que la liste des métiers d’art soit dorénavant arrêtée conjointement par les ministres chargés de l’artisanat et de la culture, et non exclusivement par le premier. Cette mesure permettrait, lors du toilettage de la liste des 217 métiers concernés, d’élargir la réflexion à tous les métiers de ce domaine et non aux seuls artisans d’art.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yannick Vaugrenard, rapporteur. Les amendements nos 31 rectifié quater et 54 sont pour ainsi dire identiques. M. le rapporteur pour avis de la commission de la culture a développé, à leur propos, les arguments qu’il convenait d’invoquer.

Dans la loi de 1996, l’article 20, qui définit les métiers d’art, est étroitement lié à l’article 21, qui définit la qualité d’artisan. Or l’adoption de ces amendements introduirait une incohérence entre ces deux dispositions, en donnant une définition de la qualité d’artisan d’art ne correspondant pas à la qualité d’artisan. Il y a donc là un problème juridique.

Je le souligne à mon tour, le présent article ne définit pas les métiers d’art mais les métiers relevant des métiers d’art, ce qui n’est pas la même chose. Je rejoins donc M. Marie, et j’émets un avis défavorable sur ces deux amendements.

En revanche, j’émets un avis favorable sur l’amendement n° 4.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Arnaud Montebourg, ministre. Le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable sur les amendements nos 31 rectifié quater et 54.

L’amendement n° 4 tend à modifier la définition des entreprises d’artisanat d’art. À mon sens, les artisans concernés comme les auteurs de ces différents amendements peuvent se reconnaître dans cette rédaction. Je souligne que les professionnels sont très sensibles à ce que nous agissions précautionneusement en la matière.

Mme Muguette Dini. Je retire mon amendement.

M. le président. L’amendement n° 31 rectifié quater est retiré.

Madame Lamure, l’amendement n° 54 est-il maintenu ?

Mme Élisabeth Lamure. Non, je le retire également, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 54 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 123 rectifié, présenté par Mme Dini et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 40

Rétablir le 6° bis dans la rédaction suivante :

bis Après l'article 22-1, il est inséré un article 22-… ainsi rédigé :

« Art. 22-… – Les personnes immatriculées au répertoire des métiers ou au registre des entreprises mentionné au IV de l'article 19 de la présente loi relevant du secteur de l'artisanat ainsi que les entrepreneurs relevant du régime prévu à l'article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale indiquent, sur chacun de leurs devis et sur chacune de leurs factures, l'assurance professionnelle, dans le cas où elle est obligatoire pour l'exercice de leur métier, qu'ils ont souscrite au titre de leur activité, les coordonnées de l'assureur et du garant, ainsi que la couverture géographique de leur contrat ou de leur garantie. » ;

La parole est à Mme Muguette Dini.

Mme Muguette Dini. Cet amendement vise à rétablir la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, instaurant une obligation d’information quant aux assurances professionnelles des artisans.

A été introduite dans le présent texte l’obligation faite à tout professionnel relevant du statut d’artisan ou d’auto-entrepreneur de souscrire une assurance professionnelle et de l’indiquer clairement et officiellement sur tout devis et toute facture établis par ses soins, et ce dans le cas où cette assurance est obligatoire pour l’exercice de leur métier.

Cette mesure va incontestablement dans le sens d’une meilleure protection du consommateur. Surtout, elle contribue à unifier les règles applicables aux artisans et aux auto-entrepreneurs, ce qui s’inscrit dans la logique suivie par le projet de loi. Au demeurant, cette disposition rejoint l’une des préoccupations de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois. Celle-ci avait recommandé de rendre obligatoire la souscription d’une assurance en responsabilité civile professionnelle ainsi que des assurances professionnelles requises, notamment pour l’exercice des professions réglementées.

L’obligation d’information ne saurait se limiter à un seul secteur d’activité et à la seule souscription de la garantie décennale dans le domaine de la construction.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yannick Vaugrenard, rapporteur. Madame Dini, l’amendement que le Gouvernement s’apprête à présenter tend précisément à répondre à votre préoccupation. Aussi, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, qui sera satisfait par l’adoption de l’amendement n° 188.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Arnaud Montebourg, ministre. Pour apporter une réponse plus complète, monsieur le président, pourriez-vous appeler en discussion l’amendement n° 188, déposé par le Gouvernement ? S’ils diffèrent quant à leur rédaction, ces deux amendements visent exactement le même but.

M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 188, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :

Alinéas 46 et 47

Rédiger ainsi ces alinéas :

bis. – Le deuxième alinéa de l’article L. 241-1 du code des assurances est ainsi rédigé :

« À l’ouverture de tout chantier, elle doit présenter l’attestation d’assurance justifiant qu’elle a souscrit un contrat d’assurance la couvrant pour cette responsabilité. Elle mentionne sur chacune de ses factures et, le cas échéant, sur chacun de ses devis les coordonnées de l’assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique de leur contrat ou garantie. »

Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.

M. Arnaud Montebourg, ministre. Je tiens à rendre hommage à l’initiative de Mme Dini. Il s’agit là en effet d’une question régulièrement posée sur le terrain et cela n’a pas échappé à sa sagacité.

Améliorer l’information du consommateur ne doit pas simplement se résumer à lui fournir une attestation d’assurance en début de chantier. Il convient aussi de préciser quelle est la police d’assurance, quels sont les risques qu’elle couvre et de permettre au client de se renseigner, d’obtenir certains détails, bref de poser des questions. Un chantier peut changer une vie, en bien ou en mal. Cela peut tourner vinaigre comme ça peut être le bonheur absolu – je pense notamment à la construction individuelle. Il est donc très important d’apporter une sécurité au consommateur, notamment à travers l’assurance décennale.

Madame Dini, la rédaction de l’amendement n° 188 me paraît beaucoup plus adaptée. Aussi, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. Nous ferons de la sorte cause commune.

M. le président. Madame Dini, l’amendement n° 123 rectifié est-il maintenu ?

Mme Muguette Dini. Monsieur le ministre, j’ai bien entendu vos propos : le client doit avoir la certitude que les assurances, notamment la garantie décennale, ont bien été souscrites.

Cela étant, ces deux amendements ne sont pas tout à fait similaires. Le mien va plus loin : il vise à étendre cette obligation d’information aux auto-entrepreneurs, qui n’appartiennent pas au secteur du bâtiment stricto sensu. En outre, pour des travaux de réparation ou de peinture, les entrepreneurs ne sont pas soumis à la garantie décennale.

Contrairement à l’amendement du Gouvernement, mon amendement tend à garantir une assurance pour l’ensemble des travaux. Voilà pourquoi je le maintiens.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Arnaud Montebourg, ministre. À nos yeux, la présentation de l’attestation de la garantie décennale repose sur un fait générateur qui n’est pas la qualité de la personne en cause, mais l’existence et la nature du chantier.

Il me semble que la rédaction du Gouvernement, certes sous réserve de vérification et du travail qui sera mené par la direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services, est conforme à cet objectif. J’aimerais donc que vous nous offriez au moins le bénéfice du doute, madame Dini.

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

M. André Reichardt. J’ai eu l’occasion, sur l’initiative de M. Frédéric Lefebvre, lorsque celui-ci était secrétaire d’État chargé du commerce, de commettre un rapport sur la qualification professionnelle dans l’artisanat. Je connais donc bien ce dossier.

Je souhaiterais tout d’abord, pour avoir fait un certain nombre de préconisations qui n’ont pas eu l’heur d’être retenues à cette époque, rendre hommage – une fois n’est pas coutume ! – à la volonté de l’actuel gouvernement de répondre à des attentes légitimes et de bon sens en matière de qualification professionnelle dans ce secteur.

Dans ce texte, on reconnaît enfin la notion de métier, à la place de celle d’activité, pour répondre aux conditions de qualification. Il est vrai que l’activité dans l’agroalimentaire est plurielle : elle peut concerner, par exemple, le boulanger, le pâtissier,…

M. Jean-Claude Lenoir. Le fromager ! (Sourires.)

M. André Reichardt. … le tripier, ou d’autres encore.

Il est certain que pour s’établir à son compte dans l’un de ces métiers, il n’est pas équivalent d’user d’une qualification globale dans l’agroalimentaire ou d’avoir une expérience professionnelle ou un diplôme dans le métier concerné. Il s’agit là d’un point quelque peu technique, mais qui est fondamental : il est important d’avoir enfin reconnu l’exigence minimale d’une qualification dans le cadre d’un métier, et non dans une activité qui globalise plusieurs métiers.

Ensuite, la qualification, ce n’est pas simplement la qualification professionnelle, c’est aussi la gestion et la réponse à un certain nombre d’exigences. Sur ce dernier point, le Conseil constitutionnel a pris une position tout à fait claire : seuls les métiers réglementés, qui présentent un certain nombre de risques pour la santé et la sécurité du consommateur, ou du travailleur d'ailleurs, peuvent prétendre à un certain nombre d’exigences liées à cette réglementation, parmi lesquelles figure naturellement le cas de l’assurance dans un chantier du bâtiment.

Dans le bâtiment, il est évident qu’il est nécessaire d’avoir une responsabilité civile et une responsabilité décennale. Toutefois, dans d’autres secteurs aussi, comme vient de le souligner Mme Dini, il peut y avoir, sans que l’on parle de responsabilité décennale, et dès lors que le métier est réglementé, l’obligation d’avoir des assurances, pour aller dans le sens de la santé et de la sécurité du consommateur et du travailleur.

Je souhaite une nouvelle fois rendre hommage à cette volonté du Gouvernement, qui est nouvelle par rapport aux gouvernements qui l’ont précédé, d’aller enfin dans le sens d’une qualification qui répond aux besoins du secteur.

Toutefois, je préférerais que l’amendement de Mme Dini soit adopté, parce que cette disposition permet d’aller plus loin que l'amendement du Gouvernement, sauf à modifier celui-ci, dans la mesure où elle ne s’en tient pas au bâtiment, mais s’étend aussi à l’entretien et à la réparation automobiles et à bien d’autres métiers encore.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. Je voudrais éviter que l’on ne commette des confusions.

En effet, les deux amendements ne sont pas les mêmes, tout d’abord par leur champ d’application, et ensuite parce que l’amendement du Gouvernement tend à préciser que c’est « à l’ouverture de tout chantier » que la société doit présenter l’attestation d’assurance justifiant qu’elle a souscrit un contrat d’assurance la couvrant pour cette responsabilité.

Juridiquement, la définition de l’ouverture d’un chantier n’est pas tout à fait évidente. Certes, il existe des déclarations d’ouverture de chantier, mais elles nécessitent d’être précisées, car elles nous font entrer dans un champ d’application très précis lorsqu’il y a des contentieux.

Monsieur le ministre, l’amendement que vous proposez, si je l’ai bien compris et d’après ce qui est formulé dans l’objet, vise la souscription de l’assurance de responsabilité civile décennale. Or la disposition proposée par Mme Muguette Dini permet, me semble-t-il, d’aller au-delà de l’assurance. C’est important, car avec ce type de problèmes, il peut être question d’une assurance dommage-ouvrage, d’une assurance biennale, d’une assurance décennale, voire de la responsabilité civile.

Certes, les intentions des rédacteurs de l’amendement n° 188 sont excellentes. Toutefois, lorsqu’il faudra plaider ou discuter sur des questions d’assurance, il est possible que cette disposition donne lieu à une approche imprécise, qui ne fera que compliquer la situation.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je soutiendrai moi aussi l’amendement de Mme Muguette Dini, mais pour une autre raison.

Lorsque Élisabeth Lamure était rapporteur du texte que nous avons voté ici, le problème de la concurrence déloyale entre, notamment, les auto-entrepreneurs et les autres artisans était déjà apparu et avait donné lieu à de nombreux débats, qui se sont à nouveau présentés par la suite. La question de l’assurance fait partie des paramètres qui peuvent également poser un problème de concurrence entre les auto-entrepreneurs et les autres acteurs du terrain.

Je pense que l’adoption de l’amendement de Mme Dini permettrait de régler aussi ce problème d’assurance et de justificatif, en dehors du secteur du bâtiment et quel que soit le domaine d’intervention de ces acteurs.

C’est la raison pour laquelle je soutiendrai cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Arnaud Montebourg, ministre. Je souhaiterais apporter une précision à tous ceux qui, dans leur analyse, ont fait remarquer la présence d’une certaine incertitude juridique liée à la rédaction gouvernementale. Le Gouvernement a beaucoup de défauts, mais il sait encore rédiger ce genre de textes !

La mention « l’ouverture du chantier » est un renvoi explicite au code des assurances, qui dispose, dans son article L. 241-1, que l’attestation d’assurance décennale peut être demandée à l’ouverture du chantier. L’article est donc parfaitement coordonné avec les règles relatives à l’assurance décennale, et les objections qui nous sont faites à cet égard ne sont pas recevables.

Mme Dini soulève, en revanche, une autre question à laquelle il faut prêter attention, à savoir le problème de l’égalité entre l’auto-entrepreneur et l’artisan travaillant habituellement dans le secteur.

Pour cette raison, je rends les armes ! Je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée pour ce qui concerne l'amendement n° 123 rectifié et je retire l’amendement n° 188, monsieur le président. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. L’amendement n° 188 est retiré.

La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote sur l'amendement n° 123 rectifié.

M. Jean-Claude Lenoir. Je voulais intervenir à propos de l’amendement n° 188. Ses dispositions semblent tout à fait pertinentes et j’y adhère pleinement. Cependant, comme l’a souligné M. Mézard, la notion d’« ouverture du chantier » pose problème.

En fait, je pense que le problème serait résolu s’il était indiqué « avant l’ouverture du chantier », car « l’ouverture du chantier » ne signifie rien de précis. En effet, l’artisan, le jour où il souhaite commencer son travail, doit avoir présenté un tel document.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Arnaud Montebourg, ministre. La commission mixte paritaire, éclairée par les débats à l’Assemblée nationale et au Sénat, saura trouver une bonne synthèse.

Les remarques formulées par M. Jacques Mézard et M. Jean-Claude Lenoir sont parfaitement recevables et compréhensibles. Le projet de Mme Muguette Dini nous intéresse, et nous pouvons parvenir à trouver une solution. J’invite donc les parlementaires à s’emparer de cette difficulté et à nous aider à la résoudre.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 123 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 9, modifié.

(L'article 9 est adopté.)

Article 9
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises
Article 10

Articles additionnels après l’article 9

L'amendement n° 17 rectifié, présenté par MM. Mézard, Barbier, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Lorsqu’une personne exerce, en qualité de salarié à temps plein, une activité professionnelle qui nécessite pour son exercice une qualification au sens de l’article 21 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l’artisanat, elle ne peut exercer une activité identique en tant qu’entrepreneur bénéficiant du régime prévu à l’article L.133-6-8 du code de la sécurité sociale.

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Je souhaite revenir sur le régime de l’auto-entrepreneur, contre lequel nous avons mené nombre de combats.

Ce régime est fortement modifié par le chapitre II du titre II de ce projet de loi, et nous nous en réjouissons. En effet, il était devenu indispensable de mettre fin aux distorsions de concurrence et aux inégalités qui découlaient des imperfections de ce régime. Nous sommes donc satisfaits par l’article 12, qui va dans le sens d’un nouveau régime simplifié de la micro-entreprise, ce qui permettra plus de justice et d’égalité et apportera une simplicité essentielle pour des centaines de milliers d’entrepreneurs individuels.

Toutefois, malgré la refonte de cet article, il nous semble nécessaire d’ajouter une précision afin d’éviter la concurrence qui peut encore être exercée par des salariés vis-à-vis de leur propre entreprise. Ce point a souvent été soulevé par les représentants de l’artisanat du bâtiment, tant sont nombreuses les petites entreprises artisanales concurrencées par leurs propres salariés.

C’est la raison pour laquelle le présent amendement vise à interdire qu’une personne qui exerce en tant que salarié à temps plein une activité qualifiée relevant de l’artisanat n’exerce la même activité en tant qu’auto-entrepreneur, et cela y compris avec le nouveau régime simplifié prévu à l’article 12 du projet de loi, qui a réécrit l’article L. 133-68 du code de la sécurité sociale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yannick Vaugrenard, rapporteur. Même si l’intention des auteurs de cet amendement nous paraît légitime, puisqu’il s’agit de protéger les entreprises artisanales d’une concurrence déloyale, la mesure d’interdiction proposée ici nous paraît excessive.

En effet, un salarié est toujours tenu à une obligation de loyauté à l’égard de son employeur, sans compter que la requalification ainsi que la sanction d’un salariat déguisé sont tout à fait possibles en utilisant les outils du droit en vigueur.

L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Arnaud Montebourg, ministre. L’avis du Gouvernement est le même que celui de la commission. En effet, on ne peut porter atteinte à la liberté du travail, à la pluriactivité, aux choix individuels, au désir de vivre et de survivre dans une période telle que nous la connaissons.

Les dispositions de cet amendement me paraissent excessives. C'est pourquoi j’y suis très défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. Il est tout de même important de se rendre compte de ce qui se passe sur le terrain : des centaines de milliers d’artisans sont confrontées à ce type de problèmes et ne le supportent plus.

Considérer que la liberté d’entreprendre permet au salarié d’un artisan du bâtiment d’exercer aussi en tant qu’auto-entrepreneur dans le même secteur, cela dépasse l’entendement. Nous devons entendre les artisans confrontés à ce problème, qui est tout à fait réel dans l’artisanat du bâtiment !

De quoi souffrent nos artisans du bâtiment ? Ils pâtissent beaucoup des normes, des contraintes administratives, des charges. Et en sus de ces difficultés, ils se retrouvent face à des citoyens qui travaillent au noir ! Il suffit d’ailleurs de se promener dans nos campagnes le samedi et le dimanche pour croiser un certain nombre de véhicules transportant des matériels divers…

Je n’ai pas l’impression qu’un combat terrible soit mené contre ce travail au noir… Et en plus, certains de ces artisans subissent une concurrence tout à fait déloyale par rapport à leurs propres salariés.

Dans ces conditions, dire que les règles juridiques en vigueur permettent à ces artisans de lutter contre ce genre de comportement, c’est tout de même être assez coupé de la réalité du terrain. Voilà pourquoi j’insiste sur cette proposition, qui correspond à une vraie demande de la profession du bâtiment.