Sommaire

Présidence de M. Jean-Pierre Bel

Secrétaires :

Mmes Michelle Demessine, Marie-Noëlle Lienemann.

1. Ouverture de la seconde session extraordinaire de 2013-2014

2. Procès-verbal

3. Décès d’un sénateur

4. Décès d’anciens sénateurs

5. Remplacement d’un sénateur décédé

6. Démission et remplacement d’un sénateur

7. Déchéance d’un sénateur

8. Fin de mission d’un sénateur

9. Politique générale. - Lecture d’une déclaration du Gouvernement

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international.

10. Décisions du Conseil constitutionnel

11. Communication d’un avis sur un projet de nomination

12. Demande d’un avis sur un projet de nomination

13. Communication d’avis du Congrès de la Nouvelle-Calédonie

14. Engagement de la procédure accélérée pour l’examen de projets de loi

15. Caducité de questions orales avec débat

16. Dépôt de rapports

17. Ordre du jour

18. Ajournement du Sénat

compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Pierre Bel

Secrétaires :

Mme Michelle Demessine,

Mme Marie-Noëlle Lienemann.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures cinq.)

1

Ouverture de la seconde session extraordinaire de 2013-2014

M. le président. Je vous rappelle que la seconde session extraordinaire de 2013-2014 a été ouverte le 9 septembre.

2

Procès-verbal

M. le président. Le procès-verbal de la séance du 24 juillet 2014 a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?...

Le procès-verbal est adopté.

3

Décès d’un sénateur

M. le président. J’ai le très profond regret de vous faire part du décès de notre ami et collègue Christian Bourquin, survenu le 26 août dernier. (Mmes et MM. les ministres, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.)

Il avait été élu sénateur des Pyrénées-Orientales le 25 septembre 2011.

Son éloge funèbre sera prononcé ultérieurement, mais je tiens d’ores et déjà à saluer sa mémoire.

Au nom du Sénat tout entier, je souhaite exprimer notre sympathie et notre profonde compassion à sa famille, à ses proches et au groupe du RDSE.

Je vous propose d’observer un instant de recueillement. (Mmes et MM. les ministres, Mmes et MM. les sénateurs observent une minute de silence.)

4

Décès d’anciens sénateurs

M. le président. J’ai le regret de vous faire part du décès de nos anciens collègues :

- Jacques Larché, qui fut sénateur de la Seine-et-Marne de 1977 à 2004 et président de la commission des lois de 1983 à 2001 ;

- Pierre Noé, qui fut sénateur de l’Essonne de 1977 à 1986.

- et Francis Cavalier-Benezet, qui fut sénateur du Gard de 1992 à 1998.

5

Remplacement d’un sénateur décédé

M. le président. Conformément aux articles L.O. 325 et L.O. 179 du code électoral, M. le ministre de l’intérieur m’a fait connaître que, en application de l’article L.O. 319 du code électoral, Mme Hermeline Malherbe est appelée à remplacer, en qualité de sénatrice des Pyrénées-Orientales, M. Christian Bourquin, décédé le 26 août 2014.

Son mandat a débuté le mercredi 27 août, à 0 heure.

Au nom du Sénat tout entier, je lui souhaite une cordiale bienvenue.

6

Démission et remplacement d’un sénateur

M. le président. J’ai reçu de Mme Gisèle Printz une lettre par laquelle elle s’est démise de son mandat de sénatrice de la Moselle, à compter du dimanche 31 août, à minuit.

En application de l’article L.O. 320 du code électoral, elle a été remplacée par M. Jean-Pierre Masseret, dont le mandat de sénateur de la Moselle a commencé le lundi 1er septembre, à 0 heure.

Au nom du Sénat tout entier, je lui souhaite une cordiale bienvenue pour son retour au Sénat.

7

Déchéance d’un sénateur

M. le président. J’ai reçu du Conseil constitutionnel une décision en date de ce jour, constatant la déchéance de plein droit de M. Gaston Flosse de sa qualité de membre du Sénat.

Acte est donné de cette communication.

Cette décision sera publiée en annexe au compte rendu intégral de la présente séance.

8

Fin de mission d’un sénateur

M. le président. Par lettre en date du 5 août 2014, M. le Premier ministre a annoncé la fin, à compter du 10 août 2014, de la mission temporaire sur le soutien au développement économique dans les territoires ruraux confiée à M. Alain Bertrand, sénateur de la Lozère, auprès de Mme la ministre du logement et de l’égalité des territoires, dans le cadre des dispositions de l’article L.O. 297 du code électoral.

Acte est donné de cette communication.

9

Politique générale

Lecture d’une déclaration du Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle la lecture de la déclaration de politique générale du Gouvernement.

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

M. Philippe Marini. Il n’y a pas d’applaudissements ?

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international. « Monsieur le président, mesdames, messieurs, il est rare sous la Ve République, à cinq mois d’un précédent vote, de solliciter à nouveau la confiance du Parlement. C’est pourtant ce que je fais, aujourd’hui, en me présentant devant vous.

« Avec le Président de la République, nous avons fait ce choix exigeant, dès la constitution du nouveau gouvernement. Car la clarification apportée au sein de l’exécutif devait trouver sa traduction ici même, à l’Assemblée nationale, par respect à votre égard, par respect pour le peuple français, par respect de l’éthique de responsabilité qui m’anime.

« Dans ce moment de vérité pour la France, je viens, avec mon équipe gouvernementale, rechercher votre confiance pour poursuivre notre action, et cela compte tenu de l’évolution exceptionnelle de la conjoncture économique européenne. Elle se caractérise par une croissance faible et un risque de déflation inquiétant qui remettent en cause nos prévisions les plus raisonnables. J’y reviendrai. Voilà l’exigence que je me suis fixée : la clarté, la cohérence et la vérité vis-à-vis du Parlement et donc des Français.

« Voilà pourquoi le vote de confiance d’aujourd’hui n’est pas un vote banal. C’est un vote déterminant qui engage chacun d’entre nous.

« La gauche gouverne, depuis le 6 mai 2012, depuis que les Français, par leurs suffrages, ont porté à la tête de l’État François Hollande et lui ont donné une majorité, notre majorité. Oui, nous gouvernons ! C’est un honneur. C’est une immense responsabilité. Et l’importance du moment nous oblige, tous ici, à nous hisser à la hauteur des événements.

« Le contexte international est rempli de menaces. La crise en Ukraine et les tensions avec la Russie ramènent l’Europe aux heures de la guerre froide. Cet été, la guerre à Gaza a repoussé encore plus loin les perspectives de paix entre Israéliens et Palestiniens. En Afrique de l’Ouest, les ravages d’Ebola éreintent des États déjà fragiles. Et la Méditerranée est toujours un cimetière pour des milliers de migrants.

« Mais le monde est d’abord confronté à une menace terroriste dont l’ampleur et l'évolution sont inédites. Aujourd'hui même, en Syrie et en Irak, les groupuscules éclatés d'hier sont en passe de s'accaparer des États et l'ensemble des moyens qui vont avec, dans le seul but de démultiplier leur capacité d'action et leur logique de terreur.

« Au moment où je vous parle, 930 Français ou résidents sur notre territoire sont impliqués dans le terrorisme en Syrie et en Irak. Ils représentent, vous le savez, une menace majeure pour la France.

« La France – le chef de l'État, sa diplomatie, ses armées – est pleinement mobilisée pour répondre à ce défi de sécurité, qui est certainement le plus grand de ce début de XXIe siècle. Elle assume totalement ses responsabilités, celles que l'Histoire lui a données, celles d'un membre permanent du Conseil de sécurité. Elle porte assistance aux chrétiens d'Orient et aux minorités victimes de la terreur. Elle travaille à une riposte globale sur le plan intérieur comme sur le plan extérieur. C'est l'enjeu du plan de lutte contre les filières djihadistes qui vous est présenté en ce moment. C'est aussi l'un des enjeux de la conférence sur l'Irak, organisée hier à Paris.

« Et dans ces moments, face à ces menaces, sur ces sujets, l'unité nationale s'impose. Je ne doute pas un seul instant qu'elle sera au rendez-vous.

« Il y a aussi la crise économique, bien sûr, qui frappe l’Europe et la France depuis six ans. Elle brise toutes les certitudes et alimente tous les malaises : malaise social, malaise démocratique, malaise identitaire. La crise économique ne se résume pas à des chiffres ou à des indicateurs : elle tourmente les vies, les quotidiens, les repères, les familles, les quartiers populaires, les territoires ruraux et les liens qui nous unissent.

« Je comprends les impatiences, les doutes, les colères. Ils sont légitimes quand le chômage atteint des niveaux aussi élevés, et depuis si longtemps.

« Mais face à cela, quelle attitude faut-il adopter ? La fébrilité ? Le virage ? Le zigzag ? Le renoncement ? Non !

« Gouverner, c’est résister. Gouverner, c’est tenir. Gouverner, c’est réformer. Gouverner, c’est dire la vérité. Gouverner, mesdames, messieurs, c’est aller chercher la confiance, surtout quand c’est difficile.

« Je sollicite votre confiance afin de poursuivre notre politique économique. Je sollicite votre confiance, car la politique de mon gouvernement est guidée par les valeurs de la République, des valeurs chères à la gauche – la nation, le principe d’égalité et de justice –, qui s’adressent à tous les Français.

« Gouverner, c’est mener une politique économique adaptée à la réalité du pays.

« Personne n’ignore sur ces bancs que la France et la zone euro font face à une situation exceptionnelle. La croissance ne redémarre pas. Et s’ajoute à cela une quasi-absence d’inflation que personne n’avait anticipée.

« Pour 2014, en ce qui nous concerne, l’inflation très faible de 0,5 % et une croissance tout aussi faible de 0,4 % conduiront à des recettes publiques moins élevées qu’attendu.

« Cet été, nous avons fait un choix clair : ni hausse d’impôts ni économies budgétaires supplémentaires. »

M. Laurent Fabius, ministre. « C’est un choix politique. C’est un choix économique, car nous ne voulons pas entrer dans une spirale dépressive. C’est un choix social, parce que les efforts demandés aux Français, et ce depuis des années, sont déjà considérables.

« Nous adaptons donc le rythme de réduction des déficits à cette situation.

« Par conséquent, le déficit des administrations publiques devrait se situer à 4,4 % du PIB cette année. Nous avons comme objectif, vous le savez, de le ramener à 4,3 % en 2015. » (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Claude Lenoir. Quelle ambition !

M. Alain Bertrand. C’est mieux que ce qui a été fait avant !

M. Laurent Fabius, ministre. « Mais rien ne doit nous faire dévier de notre engagement à réaliser 50 milliards d’euros d’économies en trois ans, dont 21 milliards d’euros en 2015. »

M. Joël Billard. Sur le dos des collectivités !

M. Laurent Fabius, ministre. « Il faut maîtriser l’évolution des dépenses publiques. Leur niveau trop élevé a nourri, depuis des années, l’augmentation du déficit et de la dette. Et, nous le savons tous, il y a des marges pour rendre la dépense plus efficace.

« Réduire la dépense, plutôt qu’augmenter les impôts ! Nous baissons la pression fiscale, car les impôts, par leur accumulation depuis 2010, ont atteint un niveau insupportable pour les Français. Un premier pas a été accompli en direction de plus de 4 millions de ménages, dès cette rentrée. Et nous poursuivrons ce mouvement en 2015 : 6 millions de ménages seront ainsi concernés par la baisse de l’impôt sur le revenu. Ce choix tire aussi les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel sur les charges salariales.

« Le rythme de réduction du déficit doit être aussi adapté en Europe. Cela suppose d’utiliser toutes les flexibilités du pacte de stabilité et de croissance.

« Soutenir la croissance en Europe nécessite également une politique monétaire adaptée.

« Il y a cinq mois, à cette même tribune, je dénonçais les conséquences d’un euro trop cher. Les réactions ont été très vives. Mais je constate aujourd’hui que cette idée a fait son chemin. Les choses bougent ! Nous les avons fait bouger ! C’est ce gouvernement qui, en Europe, les a fait bouger !

« Les décisions de la Banque centrale européenne ont permis d’amorcer une baisse de 10 centimes de l’euro par rapport au dollar. Appliquée à toutes nos entreprises exportatrices, cette baisse représente, ne l’oublions pas, des dizaines de milliers d’emplois préservés. Il faut aller plus loin encore, car il y a urgence. La zone euro décroche par rapport au reste du monde.

« Le président de la Banque centrale européenne lui-même, Mario Draghi, a déclaré qu’il était prêt à d’autres types d’intervention pour soutenir la croissance. Il a aussi recommandé que les politiques nationales structurelles soient accompagnées au niveau européen par une politique globale de la demande. Ces positions, ce sont celles que n’a cessé de porter le Président de la République depuis 2012. Le FMI, l’OCDE, de nombreux économistes, les chefs d’entreprise, les syndicats européens ne disent pas autre chose.

« C’est par l’investissement que l’Europe retrouvera une croissance solide et durable. »

M. Éric Doligé. Ça, c’est vrai !

M. Laurent Fabius, ministre. « Jean-Claude Juncker a annoncé un plan de 300 milliards d’euros pour l’investissement en trois ans. Annoncer est une chose ; le concrétiser en est une autre. » (Exclamations ironiques et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Christian Cointat. Vous en savez quelque chose !

M. Roger Karoutchi. Ils ne manquent pas d’humour !

M. Laurent Fabius, ministre. « Nous travaillons donc avec nos partenaires pour obtenir une action puissante de l’Europe en matière d’infrastructures, de grands projets, de numérique, ou encore de formation des jeunes.

« Mesdames, messieurs, mesurons le chemin parcouru !

« Cette action pour réorienter l’Europe est vitale, car, nous le voyons bien, le projet européen est menacé de toutes parts, dans tous les pays, par la défiance, par les populismes, par le rejet de cette grande aventure qui a uni des peuples et qui a garanti la paix.

« L’engagement de l’Europe doit répondre à l’attente des peuples. Cela impose un dialogue sincère et exigeant entre la France et l’Allemagne. Nous ne demandons aucune facilité ; la France décide elle seule de ce qu’elle doit faire. Mais l’accord entre nos deux pays est indispensable pour relancer la croissance et redonner au projet européen sa véritable ambition.

« L’Allemagne est une grande nation que nous respectons. Je rencontrerai la Chancelière Angela Merkel la semaine prochaine. Notre message, le message de la France, celui des peuples européens, doit être entendu. L’Allemagne doit assumer ses responsabilités. Notre responsabilité commune, celle de la France et de l’Allemagne, est donc historique.

« Mesdames, messieurs, la principale faiblesse de notre économie, c’est la perte de compétitivité de nos entreprises. »

M. Christian Poncelet. C’est vrai !

M. Laurent Fabius, ministre. « Comme l’a relevé le rapport Gallois dès novembre 2012, un véritable décrochage est intervenu il y a dix ans : perte de parts de marché à l’export et dégradation continue des marges de nos entreprises industrielles. Ainsi, il n’y a pas eu de créations d’emplois nettes dans l’industrie depuis la fin de 2001. »

M. Francis Delattre. À cause des 35 heures !

M. Laurent Fabius, ministre. « Dire la vérité, c’est assumer ses responsabilités et regarder réellement quelle est la situation. C’est pour cela que, par vos votes, vous avez engagé, dès décembre 2012, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, puis, il y a quelques semaines, le pacte de responsabilité et de solidarité, annoncé par le Président de la République le 14 janvier dernier.

« Ces dispositifs commencent à produire leurs effets. Au 1er janvier prochain, le coût du travail baissera d’environ dix points de cotisations pour de nombreuses entreprises, et il n’y aura plus aucune cotisation de sécurité sociale au niveau du SMIC. Mais, soyons lucides, ces mesures nécessiteront du temps pour porter pleinement leurs fruits.

« Oui, nous devons être aux côtés de toutes nos entreprises, de nos entrepreneurs, nos PME, nos PMI, nos artisans, nos commerçants. Car enfin, ce sont les entreprises qui créent des richesses, et donc de l’emploi ! » (Exclamations et applaudissements sur les travées de l'UMP et sur plusieurs travées de l’UDI-UC.)

M. François Grosdidier. Quelle découverte pour vous !

M. Christian Cointat. Mieux vaut tard que jamais !

M. David Assouline. Mais vous, vous êtes pour les banques !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Et les salariés, ils y sont pour quelque chose ?

M. Laurent Fabius, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, je vous remercie de vos applaudissements ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste et du RDSE.)

« Et dans une concurrence mondiale qui ne fait aucun cadeau, pourquoi serions-nous le seul grand pays à ne pas aider nos entreprises pour qu’elles innovent, qu’elles partent à la conquête de nouveaux marchés ? » (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et sur plusieurs travées de l’UDI-UC.)

Un sénateur du groupe UMP. Absolument !

M. Laurent Fabius, ministre. « Mais les entreprises, ce ne sont pas que des actionnaires. Ce sont des ouvriers, des salariés, des cadres, des ingénieurs qui travaillent ensemble. (Vifs applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste, du groupe écologiste, du RDSE et du groupe UMP.) Aider nos entreprises, ce n’est pas un choix idéologique, c’est un choix stratégique pour la France. Je n’ai jamais cessé de le dire, quel que soit le lieu où je me suis exprimé, parce que ce choix s’impose à tous.

« Oui, la nation consent un effort sans précédent de 40 milliards d’euros sur trois ans. Mais cet effort exige que chacun soit à la hauteur de ses responsabilités. Le pacte, ce n’est pas un moyen d’augmenter les dividendes ou les plus hautes rémunérations. » (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste, du groupe écologiste et du RDSE.)

M. Christian Cointat. Toujours la même rengaine !

M. David Assouline. La droite n’applaudit plus ?

M. Laurent Fabius, ministre. « Le pacte est là pour créer un climat de confiance et pour redonner des marges de manœuvre aux entreprises. Elles en ont besoin. Et il doit se traduire en termes d’investissement, d’embauches, de formation ou d’accueil de jeunes en apprentissage. » (Applaudissements sur les mêmes travées.)

M. Didier Guillaume. Très bien !

M. Laurent Fabius, ministre. « Les partenaires sociaux ont décidé d’en discuter au niveau de chaque branche. Aujourd’hui, la majorité des branches professionnelles a engagé ou va engager les négociations. Mais pour dix-sept grandes branches, les discussions n’ont pas encore démarré. Il faut donc que les choses avancent ! »

M. Pierre Laurent. Dans les entreprises, il ne se passe rien !

M. Laurent Fabius, ministre. « La confiance doit être réciproque. Personne – je le dis clairement au patronat – ne doit prendre le risque d’affaiblir, par je ne sais quelle provocation, par je ne sais quelle surenchère, l’indispensable dialogue social qui est la marque de ce quinquennat. »

Mme Dominique Gillot. Tout à fait !

M. Laurent Fabius, ministre. « Dans ce domaine, comme dans bien d’autres, il faut savoir faire preuve de constance et respecter les règles du jeu.

« Je présiderai dans quelques semaines le nouveau comité de suivi des aides publiques. Il associera partenaires sociaux et parlementaires. Et je souhaite alors que nous fassions ensemble le constat qu’aucune des grandes branches professionnelles ne manque à l’appel, pour nos jeunes, pour l’emploi. Je sais que la représentation nationale est particulièrement engagée et vigilante sur ce point, notamment à travers la mission sur le CICE.

« Redresser notre économie passe aussi par un soutien direct à notre industrie. Moi, je crois en la main visible de l’État. Notre État a son rôle à jouer dans une économie de marché, et c’est ce qu’il a fait dans le cas d’Alstom. »

M. Philippe Marini. Et le redressement productif, qu’est-il devenu ?

M. Laurent Fabius, ministre. « L’État agit en aidant à l’émergence de leaders français, compétitifs au niveau mondial, dans des secteurs stratégiques. Dans les domaines du TGV du futur, des textiles intelligents, de la chimie verte, du big data, la France a des cartes en main.

« C’est vrai pour la transition énergétique, qui est une avancée majeure et impérieuse pour la préservation de notre environnement, mais aussi un formidable relais de croissance pour des emplois durables et non délocalisables. Elle fait l’objet d’un projet de loi que vous examinerez début octobre.

« L’avenir, c’est bien sûr le numérique, pour lequel s’ouvre une grande concertation, elle aussi préalable à un travail législatif.

« Enfin, l’État doit agir en orientant l’épargne des Français vers l’économie réelle et en favorisant le financement de l’innovation. Le crédit d’impôt recherche, le programme d’investissements d’avenir, la BPI ont fait leurs preuves.

« L’investissement, c’est la clef de la reprise. Un pays qui investit moins, ou qui n’investit plus, ne pourra pas trouver sa place dans la mondialisation.

« Redresser notre économie, c’est aider nos entreprises, notre industrie, notre agriculture, notre recherche, notre université, nos scientifiques. C’est favoriser aussi l’économie sociale et solidaire, qui représente un formidable gisement d’emplois. C’est également mener les réformes nécessaires.

« Elles commencent bien entendu par les administrations publiques. Nous venons de lancer un exercice de revue des missions de l’État. Il associera les collectivités locales, »…

M. Laurent Fabius, ministre. …« et les usagers, particuliers et entreprises, sans oublier bien sûr les fonctionnaires eux-mêmes.

« Nous réformons l’État. Nous réformons les entreprises publiques, comme nous venons de le faire avec succès pour la réforme ferroviaire. Nous réformons aussi les collectivités locales. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

« Vous avez déjà voté le passage de vingt-deux à treize régions. » (Protestations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. David Assouline. Ce n’est pas la cour de récré !

M. Christian Cointat. Nous n’avons pas encore voté !

M. Laurent Fabius, ministre. Il s’agit de la représentation nationale !

« Ce qui, hier, c'est-à-dire voilà seulement quelques mois, semblait infaisable est donc en passe d’être accompli aujourd’hui. »

M. Didier Guillaume. L’opposition n’a jamais réussi à le faire !

M. Laurent Fabius, ministre. « Ces nouvelles régions, plus grandes, plus fortes, sont nécessaires pour répondre aux défis de l’aménagement et du développement du territoire. Ces nouvelles régions renforceront notre pays.

« Les intercommunalités seront renforcées, car elles sont à même de mener les politiques publiques de proximité qu’attendent les Français.

« Quant aux départements, vous le savez, »…

M. François Grosdidier. On ne sait plus rien !

M. Laurent Fabius, ministre. …« le pragmatisme nous guide vers trois solutions. (Ah ! sur plusieurs travées de l'UMP.)

« Dans les départements dotés d’une métropole – c’est l’exemple de Lyon –, la fusion des deux structures pourra être retenue.

« Lorsque le département compte des intercommunalités fortes, là, les compétences départementales pourront être assumées par une fédération d’intercommunalités. (Applaudissements sur les travées du RDSE. – M. Daniel Raoul applaudit également.)

« Enfin, dans les départements, notamment ruraux, où les communautés de communes n’atteignent pas la masse critique, le conseil départemental sera maintenu, avec des compétences clarifiées. » (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et du RDSE.)

Mme Éliane Assassi. Et la République ?

M. Laurent Fabius, ministre. « Je ne doute pas que le Parlement apportera toute son expertise dans ce débat. Les Assises des ruralités, que nous venons de lancer, y contribueront également. »

M. Francis Delattre. Il faudra changer la Constitution !

M. Laurent Fabius, ministre. « Dès lors, la concomitance des élections départementales et régionales n’est plus une obligation. Précisons le calendrier : les élections départementales sont maintenues en mars 2015, conformément à la loi votée en 2013. Les élections régionales, avec la nouvelle carte, auront bien lieu fin 2015.

« Mesdames, messieurs, réformer, c’est aussi libérer toutes les énergies créatives de ce pays, simplifier les normes.

« Le projet de loi “croissance” permettra de simplifier les formalités, les procédures et la vie quotidienne des Français. Ce n’est pas une loi qui stigmatise. Elle n’est pas contre les professions réglementées ; elle agit pour leur fournir les outils juridiques pour se moderniser. »

Un sénateur du groupe UMP. Plaisanterie !

M. Laurent Fabius, ministre. « Elle stimulera l’investissement en rendant plus lisible et plus stable l’environnement législatif et réglementaire. Elle contribuera également à l’attractivité de la France dans le monde avec l’ouverture des magasins le dimanche et en soirée dans les zones touristiques, en nous appuyant notamment sur le rapport Bailly. »

M. Éric Doligé. Eh bien !

M. Laurent Fabius, ministre. « Concernant la politique de l’emploi, il est possible de donner de la souplesse et de la visibilité aux entreprises, tout en améliorant les droits réels des salariés. Nous l’avons montré, au cours des deux dernières années, avec plusieurs lois issues d’un accord entre partenaires sociaux. Une nouvelle négociation, vous le savez, vient d’être lancée sur ce que l’on appelle les seuils. Il y a, d’ici à la fin de cette année, un chemin à trouver qui permette d’avoir un véritable dialogue social dans l’entreprise, en fonction de sa taille, sans entraver sa croissance. (M. Pierre Laurent s’exclame.) Progrès économique et progrès social sont intimement liés.

« Une politique de l’emploi plus efficace, c’est aussi un soutien plus fort et un suivi plus personnalisé, exigeant même pour les demandeurs d’emploi, qui, cependant, ne doivent pas être stigmatisés. Personne n’aspire à devenir chômeur ni à le rester ! Une nouvelle convention tripartite État-Unedic-Pôle emploi doit être signée d’ici à la fin de l’année : elle devra améliorer l’action de Pôle emploi pour mieux connaître les besoins des entreprises et utiliser toutes les potentialités du numérique.

« Nous devons aussi impérativement encourager l’apprentissage, qui recule depuis quelques années. » (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur plusieurs travées du RDSE. – Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Éric Doligé. C’est très net !

M. Laurent Fabius, ministre. « La mobilisation des entreprises est essentielle : même lorsqu’il y a moins d’embauches du fait de la crise, il faut former davantage.

« Nous nous retrouverons à la fin de la semaine avec les partenaires sociaux et les régions pour cette relance de l’apprentissage. Et si certains blocages freinent la réussite de notre politique d’apprentissage, nous les lèverons !

« Oui, nous réformons, et nous allons continuer à le faire. »

Un sénateur du groupe UMP. Comment ?

M. Laurent Fabius, ministre. « Mais réformer, ce n’est pas casser. Réformer, ce n’est pas régresser.

« Et comme je l’ai déjà dit, il n’y aura pas de remise en cause des 35 heures ni de la durée légale du travail.

« Réformer, ce n’est pas réduire le SMIC.

« Réformer, ce n’est pas supprimer le CDI.

« Réformer, ce n’est pas diminuer les salaires dans la fonction publique. »

M. François Patriat. Très bien !

M. Laurent Fabius, ministre. « Réformer, ce n’est pas casser notre modèle social. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur plusieurs travées du RDSE.)

« Réformer, c’est affirmer des priorités en refusant l’austérité.

« J’ai déjà eu l’occasion de l’affirmer ici même, quand nous créons 60 000 postes dans l’éducation nationale, près de 5 000 dans la justice, la police et la gendarmerie, nous ne faisons pas de l’austérité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

« Quand nous préservons le budget de la culture pour la création et le spectacle vivant, nous ne faisons pas de l’austérité.

« Quand nous augmentons le RSA de 10 % »...

M. François Grosdidier. C’est le département qui paie !

M. Laurent Fabius, ministre. … « et que nous lançons un grand plan de lutte contre la pauvreté, nous ne faisons pas de l’austérité.

« Quand nous créons les emplois d’avenir et une “garantie jeunes” pour aider à débuter dans la vie, nous ne faisons pas de l’austérité. »

M. Laurent Fabius, ministre. « Quand nous augmentons l’allocation de rentrée scolaire et les bourses pour les étudiants, nous ne faisons pas de l’austérité.

« Quand nous permettons à 150 000 personnes, depuis 2012, de partir à la retraite dès soixante ans, nous ne faisons pas de l’austérité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

« Quand – et je vous l’annonce aujourd’hui – nous revalorisons le minimum vieillesse à 800 euros, et quand, de plus, nous verserons aux retraités qui perçoivent moins de 1 200 euros par mois une prime exceptionnelle, malgré la faible inflation, nous ne faisons pas de l’austérité. »

Mme Éliane Assassi. Les Français n’y comprennent rien !

M. Laurent Fabius, ministre. « En refusant l’austérité, nous protégeons les plus fragiles, les plus modestes. Nous défendons notre modèle de société. »

M. Joël Billard. On attend de voir !

M. Joël Guerriau. C’est de la démagogie !

M. Laurent Fabius, ministre. « Quand nous investissons massivement pour réaliser de grandes infrastructures de transport, avec les collectivités territoriales, nous ne faisons pas de l’austérité : nous préparons l’avenir. Pour cela, oui, il faut des moyens financiers, »...

M. Éric Doligé. Ils ont diminué !

M. Laurent Fabius, ministre. ... « et les contrats de projets État-région 2015-2020 seront signés d’ici à la fin de l’année, engageant ainsi 1,8 milliard d’euros de financement de l’État. Et nous devons tout faire pour préserver la capacité d’investissement des collectivités territoriales »…

M. Joël Billard. En baissant la DGF ?

M. Laurent Fabius, ministre. …« qui jouent un rôle dans l’investissement du pays.

« Au fond, la seule question qui doit nous occuper, c’est mener les réformes indispensables, avec courage, mais sans remettre en cause notre modèle social. Ce modèle, auquel je suis attaché, auquel les Français sont attachés, et qui est même une part de notre identité, l’héritage de deux siècles de conquêtes sociales. Ce modèle, il faut l’adapter, le réinventer, mais il n’a pas vécu, il n’est pas dépassé. Il est au cœur de notre pacte républicain, au cœur de l’identité de la nation.

« Ce débat doit s’ouvrir pleinement, devant les Français, y compris avec un ancien Président de la République.

« Quelle France voulons-nous ?

« Quelle France voulons-nous pour nos enfants ?

« Quel modèle de société défendons-nous ?

« Alors, j’entends les diverses propositions alternatives de l’opposition, notamment celles réclamant 100 ou 150 milliards de coupes budgétaires. Tout est possible... Mais il faut dire la vérité aux Français et leur expliquer à quel prix et pour quels sacrifices ! » (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Bruno Sido. Allons-y !

M. François Grosdidier. Vous, vous avez menti aux Français !

M. Laurent Fabius, ministre. « Combien de suppressions de postes dans l’éducation nationale ? »

M. Christian Cointat. Vous dépensez plus que vous ne gagnez !

M. Laurent Fabius, ministre. « Combien de suppressions de postes dans les hôpitaux ? Combien de suppressions de postes dans la police, la gendarmerie et nos armées ? »

« Ces choix, vous les proposez ! »

M. Didier Guillaume. Eh oui, c’est ça le projet de la droite !

M. Laurent Fabius, ministre. « Ces choix, nous les refusons ! » (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur plusieurs travées du RDSE.)

M. Didier Guillaume. Très bien !

M. Laurent Fabius, ministre. « Il faut donc assumer ce débat. Projet contre projet, chiffrage contre chiffrage. Voilà une vraie confrontation démocratique et utile pour les Français. »

M. Joël Billard. Combien de chômeurs ?

M. Roger Karoutchi. 500 000 chômeurs de plus !

M. Laurent Fabius, ministre. « Mesdames, messieurs, gouverner, c’est agir, c’est affronter les difficultés, y répondre, et regarder la France telle qu’elle est.

« Gouverner, c’est unir autour des valeurs de la République.

« Ce que je ressens profondément, dans le climat actuel – et vous aussi, sans doute –, c’est que nous devons nous rassembler autour des valeurs que nous partageons tous, qui dépassent tous les clivages. Mais chaque mot compte. Je le dis avec gravité : réclamer la dissolution de l’Assemblée nationale, »...

M. Roger Karoutchi. On ne réclame rien !

M. Laurent Fabius, ministre. ... « appeler à la démission du chef de l’État, c’est mettre en cause nos institutions. C’est donc vouloir affaiblir la France. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

« Oui, il y a une crise des valeurs, une impression que les règles qui fondent notre pacte républicain ne sont pas respectées. La société est dure, souvent violente. Elle est marquée par la montée des incivilités, par des défis permanents lancés aux figures de l’autorité : nos enseignants, nos juges, les parents, nos forces de l’ordre. »

M. Joël Guerriau. Les notaires !

M. Laurent Fabius, ministre. « Il y a aussi cette remise en cause de la laïcité et cette montée préoccupante des communautarismes. Le racisme, l’antisémitisme, l’intolérance, les actes anti-musulmans ou anti-chrétiens, l’homophobie gagnent du terrain.

« Lorsque nos valeurs vacillent, c’est la République qui recule.

« Nous sentons bien, également, que notre pays se fragmente entre les gagnants et les perdants de la mondialisation.

« Dans les périphéries, les villes moyennes, les petites villes, les espaces ruraux, la vie de tous les jours se dégrade. Des usines se délocalisent, des exploitations agricoles disparaissent, des emplois sont détruits. Des familles sont obligées d’aller vivre toujours plus loin des centres-villes. Les trajets en voiture s’allongent et coûtent cher. Les opportunités professionnelles se réduisent, alors que la pauvreté, la précarité s’étendent.

« Il y a aussi ces quartiers devenus de véritables ghettos urbains, où l’échec de l’urbanisme dicte bien souvent l’échec social. Très souvent, les trafics, la drogue, les petits caïds, malgré l’engagement des maires, tentent d’y imposer leur loi, en faisant régner la peur.

« Là encore, c’est la République qui recule.

« Oui, des citoyens se sentent abandonnés. Alors, de plus en plus nombreux, ils se replient sur eux-mêmes. Ils se désintéressent du débat public, car ils n’y croient plus.

« Et si certains font le choix du repli, c’est aussi parce que la République n’a pas su tenir ses promesses. »

M. Joël Guerriau. Enfin une vérité !

M. Laurent Fabius, ministre. « C’est parce que trente ans de politique d’intégration, en faisant le choix de se diriger vers des populations en fonction de leurs origines, ont fait en grande partie fausse route.

« Ces abandonnés de la République, tous, essayent, comme ils le peuvent, de trouver la protection que nous ne savons plus leur offrir.

« Et moi, je crois que c’est là que se trouve notre principal combat ! Le combat qui doit tous nous animer, nous mobiliser sur ces bancs, parce que nous aimons la France, et que nous voulons le meilleur pour elle.

« Nous devons retrouver nos valeurs, et notamment la plus essentielle de toutes : l’égalité.

« Retrouver les valeurs de la République, c’est rendre concrète, pour chaque citoyen – peu importe ses origines, sa couleur de peau ou son sexe –, la promesse républicaine. Peu importe aussi qu’il ait ou non une religion. La laïcité, c’est le droit de croire ou de ne pas croire. Et c’est un bien si précieux dans notre République ! Alors, arrêtons de stigmatiser les populations en les ramenant constamment à leurs origines, à leur religion ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Jean-Vincent Placé applaudit également.) Nous ne pouvons plus tolérer ces propos, ces actes, notamment contre l’Islam. Bien sûr, l’Islam doit s’organiser dans le cadre des valeurs républicaines. Mais les musulmans de France sont des citoyens à part entière et la République doit protéger l’ensemble de ses citoyens. » (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. Laurent Fabius, ministre. « C’est cela une politique de citoyenneté qui mobilise, bien sûr, nos politiques de droit commun – l’école, la santé, l’emploi, la nouvelle géographie de la politique de la ville, les investissements pour la rénovation urbaine –, mais qui, d’abord, respecte et fait preuve de considération à l’endroit de tous, que l’on soit Français depuis peu ou depuis des générations. L’immigration, c’est une chance, une opportunité, un dynamisme pour notre pays. Mais pour réussir, elle doit être organisée, régulée. Nous le devons à tous ces nouveaux arrivants. Nous le devons aussi à la France.

« Pour se construire, une nation a besoin de symboles : notre drapeau, notre hymne national. » (Très bien ! sur les travées de l'UMP.)

M. Bruno Sido. Les sportifs doivent chanter l’hymne national !

M. Laurent Fabius, ministre. « Elle a besoin d’ordre et de règles. Car, quand il n’y a ni ordre ni règles, ce sont toujours les plus faibles, les plus modestes, les plus fragiles qui souffrent en premier. Chaque citoyen de la République a les mêmes droits et les mêmes devoirs. Et c’est à nos policiers, à nos gendarmes, à nos juges, de travailler ensemble pour les garantir et les faire respecter.

« Une politique de citoyenneté, c’est aussi une politique qui réaffirme la valeur du travail, de l’effort, du mérite. Et qui reconnaît la créativité et l’innovation. C’est une politique qui défend ceux qui se donnent du mal ; ceux aussi pour qui le travail peut créer des souffrances ; ceux enfin qui aimeraient tant travailler à nouveau.

« Enfin, renouer avec les valeurs de la République, c’est reprendre le combat pour l’égalité.

« Il doit s’appuyer sur nos administrations, sur l’État, qui est l’incarnation de notre modèle social. J’entends ceux qui, sans cesse, demandent “moins d’État”. Mais, moi, je sais que rien n’est possible dans ce pays sans l’État, sans nos services publics, sans nos fonctionnaires engagés chaque jour, avec dévouement et compétences, au service des citoyens – enfants, personnes âgées, habitants des quartiers et des territoires ruraux. Jamais “moins d’État”, toujours “mieux d’État”. Un État qui n’est pas que redistribution par la fiscalité, mais qui sait accompagner et investir dans chaque citoyen. »

M. Éric Doligé. C’est du copié-collé !

M. Laurent Fabius, ministre. « Et je pense à nos outre-mer, qui font face à une situation difficile, marquée par la vie chère, le chômage et les problèmes de logement. Ils peuvent compter sur mon gouvernement pour leur développement économique, social et éducatif. »

M. Christian Cointat. Ils peuvent attendre encore longtemps !

M. Laurent Fabius, ministre. « La République a toujours été le patrimoine de ceux et de celles qui n’ont rien. De ceux à qui la vie n’a rien donné, ou qui ont tout perdu. Et la mission de mon gouvernement sera de remettre pleinement la République au service de tous, pour casser les inégalités. »

Mme Éliane Assassi. « Est » ! Pas « sera » ! C’est sa mission !

M. Laurent Fabius, ministre. « Et d’abord, en agissant avec détermination pour l’égalité entre les hommes et les femmes. C’est le principe même de notre société.

« Lutter contre les inégalités, c’est garantir les droits de tous les Français. C’est lutter avec acharnement pour que les enfants aient la même chance de réussir dans la vie, peu importe le quartier ou le village où ils habitent.

« L’école de la République est notre priorité. Nous en augmentons les moyens avec les créations de postes, la relance de l’éducation prioritaire, la priorité au primaire, ou encore la réforme des métiers de l’éducation et la formation des maîtres. »

M. Jean-Claude Lenoir. Et les rythmes scolaires ?

M. Laurent Fabius, ministre. « Mais augmenter les moyens ne suffit pas, et nous devons avoir une réflexion sur la pédagogie.

« Nous ne pouvons accepter de voir se multiplier ceux qu’on appelle les “décrocheurs”, ces jeunes – 150 000 par an – qui quittent le système scolaire sans avoir obtenu de diplôme. Tout comme nous n’acceptons pas que 15 % des élèves présentent des difficultés sévères en écriture, lecture et mathématiques à l’issue du primaire.

« L’école, c’est là où s’apprennent les valeurs de la République. Ce doit être un lieu d’apaisement, avec pour seul but l’intérêt de nos enfants. Et je crois que, sur ce point, nous pouvons, nous devons – enseignants, parents, élus – nous retrouver.

« Le grand dessein de la République, c’est l’égalité des possibles. Et l’égalité des possibles, c’est pouvoir débuter dans la vie et avoir une deuxième chance lorsque c’est nécessaire. Emploi d’avenir, contrat de génération, relance de l’apprentissage, droit à la formation professionnelle pour tous les salariés et tout au long de la vie : autant de mesures que nous avons prises.

« Renouer avec l’égalité républicaine, c’est faire en sorte que plus aucun de nos concitoyens – parce que c’est trop cher, ou parce c’est trop loin – n’ait de mal à se soigner.

« Nous devons garantir l’accès à des soins de qualité et permettre à chacun de vieillir dignement. Nous le devons à nos personnes âgées, nous le devons à ceux qui souffrent de handicaps. Et, pour les familles modestes, la généralisation du tiers payant prévue dans le projet de loi “Santé” sera une avancée décisive ! (Mme Catherine Procaccia s’exclame.)

« Rendre accessible la justice du quotidien, la faciliter, l’accélérer : voilà également le sens de la réforme en cours. Parce qu’un divorce, une querelle entre bailleur et propriétaire ou un conflit avec son employeur, cela dure toujours trop longtemps. Et cela fragilise toujours les plus modestes.

« Renouer avec l’égalité républicaine, c’est aussi faciliter l’accès au logement. C’est pour cela que j’ai annoncé un grand plan de relance. Construire plus, c’est une priorité sociale pour les familles – et c’est important au regard du dynamisme de notre démographie –, mais c’est aussi un impératif économique ! Sur l’encadrement des loyers, il faut là aussi être pragmatique. Pas de faux débat ! À Paris, en petite couronne, à Lille, si les choses peuvent avancer, tant mieux ! (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

« Ce qui compte aujourd’hui, c’est que l’on construise, que la confiance revienne dans ce secteur comme dans bien d’autres. Ce qui compte, c’est l’efficacité, pas l’idéologie.

« Remettre la République au service de tous, c’est aussi un accès pour chacun à l’émotion, à la création, à la culture, une culture exigeante et populaire.

« La culture, c’est un moteur économique pour notre pays, pour son rayonnement – grâce à notre langue, la francophonie –, pour son attractivité. Mais c’est aussi et surtout l’ouverture aux autres, la construction de l’individu, son émancipation.

« Mon devoir, et notre responsabilité à tous, c’est de convaincre chaque Français que la République ne l’a pas abandonné, que le projet des populistes n’est qu’une impasse. Notre devoir à tous, c’est de cesser de promettre les jours meilleurs et enfin de les construire. (Vives exclamations sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l’UDI-UC.) Et moi, je sais que nous pouvons y arriver, que nous allons y arriver, avec cette majorité, si nous donnons le meilleur de nous-mêmes. »

M. Laurent Fabius, ministre. « Mesdames, messieurs, je suis Premier ministre depuis cinq mois. Je mesure chaque jour l’ampleur de la tâche qui m’a été confiée par le Président de la République et par la majorité.  (Il était temps ! sur plusieurs travées de l’UMP et de l’UDI-UC.)

« Aujourd’hui, je sais qu’en m’adressant à vous je m’adresse à l’ensemble des Français. Je sais que, très souvent, ils n’y croient plus. Ils se disent : “À quoi bon ?”, et ils nous disent : “Ce spectacle de la politique politicienne nous afflige”. Je sais aussi que, pour vous, élus de la République, le climat des dernières semaines, fait d’indignité, de narcissisme, d’irresponsabilité, rend la tâche encore plus lourde. (Exclamations sur certaines travées de l'UMP.)

« La force d’un engagement politique, la force de l’engagement d’une vie, l’exemplarité qu’il impose, je sais ce que cela représente, je sais ce que cela représente pour vous.

« Cette passion que nous avons tous de la France, cette passion de l’engagement, cette passion de servir, c’est ce qui nous fait tenir, c’est ce qui me fait tenir.

« Et, face à la responsabilité qui m’a été confiée, je sais quelle est ma mission. Ma seule mission, c’est d’avancer, avancer contre vents et marées, guidé par une infinie bienveillance pour les Français, guidé par ma passion de la France et le sens de l’État, avancer et gouverner – n’en doutez pas un seul instant – dans la durée.

« Notre mission, notre responsabilité, c’est de ne pas laisser nos concitoyens tourner le dos à la République ; c’est de considérer chacun ; c’est de faire confiance pour redonner confiance.

« C’est de permettre partout, en métropole et dans les outre-mer, ou à l’étranger, à chaque Français, chaque enfant, chaque étudiant, chaque salarié, chaque retraité, de bénéficier concrètement du progrès, cette belle idée du progrès.

« Notre pays est riche de tous ses talents, de sa jeunesse, mais aussi de tous ces bénévoles engagés dans les associations qui font la force de notre tissu social. C’est aussi cela, la générosité et l’optimisme des Français.

« Alors, je vous invite à défier la fatalité, les pronostics, les idées reçues qui, à l’étranger ou dans cet hémicycle même, voudraient que notre pays soit incapable de se réformer et de se redresser.

« La France n’est pas condamnée à être la nation la plus pessimiste pour peu que nous tordions le cou à la mélodie décliniste.

« Questionner, débattre, porter la contradiction, tout cela est légitime. Le dialogue, notamment ici, au Parlement, c’est la démocratie. Et, moi, je veux dire à la majorité que ce qui nous unit est bien plus fort que ce qui nous distingue (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.) : c’est une gauche moderne, qui a le courage de gouverner, le courage de réformer. Soyons-en fiers ! Et je veux dire aussi à l’opposition que je considère l’écoute et le respect comme des principes fondamentaux pour l’accomplissement de notre mission. » 

M. Philippe Marini. Alors, écoutez-nous !

M. Laurent Fabius, ministre. « Et soyons fiers de cette mission que, nous toutes et nous tous, avons reçue des Français !

« Soyons fiers de les représenter et de travailler pour eux !

« Soyons fiers de ce que nous faisons, malgré les difficultés !

« Soyons fiers de relever de grands défis !

« Soyons fiers de redresser notre pays.

« Oui, j’ai besoin de votre confiance. Hier. Aujourd’hui. Encore. Toujours. Car cette confiance, c’est la force que nous allons redonner à la France ! » (Les sénateurs du groupe socialiste, ainsi que plusieurs sénateurs du groupe du RDSE, se lèvent et applaudissent longuement.)

M. le président. Acte est donné de la déclaration de politique générale dont il vient d’être fait lecture au Sénat.

10

Décisions du Conseil constitutionnel

M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat les textes de trois décisions du Conseil constitutionnel qui concernent la conformité à la Constitution :

- le 31 juillet 2014, de la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes ;

- le 6 août 2014, de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 et de la loi de finances rectificative pour 2014 ;

- le 7 août 2014, de la loi relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales.

Acte est donné de ces communications.

11

Communication d’un avis sur un projet de nomination

M. le président. En application de la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, ainsi que de l’article 3 de la loi n° 2002-3 du 3 janvier 2002 et de l’article 2 du décret n° 2004-1317 du 26 novembre 2004, la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, lors de sa réunion du 9 septembre 2014, a émis un vote favorable - huit voix pour, un bulletin blanc - en faveur de la nomination de M. Philippe Duron aux fonctions de président du conseil d’administration de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France.

Acte est donné de cette communication.

12

Demande d’un avis sur un projet de nomination

M. le président. Conformément aux dispositions de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution et en application de l’article R. 542-12 du code de l’environnement, M. le Premier ministre, par lettre en date du 12 septembre 2014, m’a demandé de lui faire connaître l’avis de la commission du Sénat compétente sur le projet de nomination de M. Pierre-Marie Abadie pour exercer les fonctions de directeur général de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs.

Cette demande d’avis a été transmise à la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire.

Acte est donné de cette communication.

13

Communication d’avis du congrès de la Nouvelle-Calédonie

M. le président. J’ai reçu de M. le président du congrès de la Nouvelle-Calédonie les avis formulés par le congrès de la Nouvelle-Calédonie au cours de sa séance publique du mercredi 27 août 2014 sur les projets de loi suivants :

- le projet de loi autorisant la ratification de l’accord relatif aux mesures du ressort de l’État du port visant à prévenir, contrecarrer et éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée ;

- le projet de loi autorisant la ratification de l’accord interne entre les représentants des gouvernements des États membres de l’Union européenne, réunis au sein du Conseil, relatif au financement de l’aide de l’Union européenne au titre du cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020 conformément à l’accord de partenariat ACP-UE et à l’affectation des aides financières destinées aux pays et territoires d’outre-mer auxquels s’appliquent les dispositions de la quatrième partie du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

Ces documents ont été transmis à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

14

Engagement de la procédure accélérée pour l’examen de projets de loi

M. le président. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen :

- du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 30 juillet 2014, 

- et du projet de loi autorisant la ratification de l’accord concernant le transfert et la mutualisation des contributions au Fonds de résolution unique, déposé sur le bureau du Sénat le 10 septembre 2014.

15

Caducité de questions orales avec débat

M. le président. Je rappelle au Sénat que toutes les questions orales avec débat qui avaient été déposées avant le 26 août 2014 sont devenues caduques en raison de la cessation des fonctions du gouvernement auquel elles étaient adressées.

Les auteurs de ces questions ont été informés individuellement de cette caducité.

16

Dépôt de rapports

M. le président. J’ai reçu de M. le Premier ministre :

- en application de l’article 67 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, le rapport sur la mise en application de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale.

Il a été transmis à la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois et, pour information, à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées ;

– en application de l’article 53 de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation des activités bancaires, le rapport sur la tarification des services bancaires dans les départements d’outre-mer et collectivités d’outre-mer.

Ce rapport a été transmis à la commission des finances ainsi qu’à la délégation sénatoriale à l’outre-mer ;

- en application de l’article L. 461-5 du code de commerce, le rapport pour 2013 de l’Autorité de la concurrence.

Ce rapport a été transmis à la commission des affaires économiques ainsi qu’à la commission des finances.

J’ai en outre reçu le rapport faisant état, pour l’année 2013, des actions en responsabilité engagées contre l’État du fait du fonctionnement défectueux du service de la justice, des décisions définitives condamnant l’État à ce titre et du versement des indemnités qui en découlent, ainsi que des suites réservées à ces décisions, rapport établi en application de l’article 22 de la loi organique n° 2007-287 du 5 mars 2007 relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats.

Ce rapport a été transmis à la commission des lois.

J’ai, par ailleurs, reçu de M. le commissaire général à l’investissement, en application de l’article 8 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010 :

- d’une part, l’avenant n° 1 à la convention du 13 janvier 2014 entre l’État et le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives relative au programme d’investissements d’avenir, Action « Maîtrise des technologies nucléaires » ;

- d’autre part, le projet de convention entre l’État et le Centre national d’études spatiales, CNES, Action « Recherche civile et militaire ».

Ces documents ont été transmis à la commission des finances et à la commission des affaires économiques.

J’ai également reçu le rapport annuel d’activité pour 2013 de l’Agence nationale de la recherche.

Ce rapport a été transmis à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.

Acte est donné du dépôt de ces documents.

17

Ordre du jour

M. le président. La prochaine séance aura lieu mercredi 1er octobre, à quinze heures, avec l’ordre du jour suivant :

-Installation du bureau d’âge ;

-Ouverture de la session ordinaire 2014-2015 ;

-Allocution du président d’âge ;

-Scrutin à la tribune pour l’élection du président du Sénat.

18

Ajournement du Sénat

M. le président. Mes chers collègues, je constate que le Sénat a épuisé son ordre du jour pour la seconde session extraordinaire de 2013-2014.

Je prendrai acte de la clôture de cette session lorsque nous aurons reçu le décret de M. le Président de la République portant clôture de la session extraordinaire du Parlement ; cette information sera publiée au Journal officiel et sur le site internet de notre assemblée.

La séance est levée.

(La séance est levée à quinze heures cinquante.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART