M. Richard Yung. Très bien !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, rapporteur spécial. Tant que le Gouvernement n’aura pas assumé l’abandon de l’écotaxe, d’une part, et tant qu’il n’aura pas inscrit dans le budget une ligne de 830 millions d’euros pour financer la résiliation du contrat Ecomouv’, d’autre part, il ne me sera pas possible de considérer que le budget des transports est sincère.

M. Richard Yung. Aïe aïe aïe !

M. Jean Germain. Bonnet rouge !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, rapporteur spécial. La politique de l’autruche conduite jusqu’à présent justifie la décision de la commission des finances de proposer au Sénat le rejet des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial.

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, notre débat de cet après-midi est aussi l’occasion de nous arrêter sur les crédits consacrés au transport aérien et, plus spécifiquement, au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », dont je suis le rapporteur spécial.

Ce budget annexe est, vous le savez, très sensible à la conjoncture. La crise n’a pas épargné le secteur du transport aérien, qui est, de plus, soumis à une rude concurrence de la part des compagnies du Golfe ou du sud-est asiatique.

Dans ce contexte, le député Bruno Le Roux a remis au Premier ministre, le 3 novembre dernier, un rapport sur la compétitivité du transport aérien français, un sujet majeur. Nous avons bien évidemment lu ce document avec attention, d’autant qu’il trouve une première traduction législative aux articles 50 ter et 50 quater du projet de loi de finances, adoptés par l’Assemblée nationale sur l’initiative de Bruno Le Roux.

Le rapport fait le constat d’une compétitivité dégradée, notamment du fait d’une série de prélèvements spécifiques à la France, qu’il s’agisse de taxes ou de redevances. Il y aura donc lieu, dans un avenir proche, de faire évoluer sensiblement le budget annexe. Cependant, nous connaissons tous les contraintes budgétaires actuelles, et il ne serait ni raisonnable ni possible de réduire brutalement ces prélèvements de manière substantielle.

Un premier pas – positif – est néanmoins effectué grâce aux articles 50 ter et 50 quater, que j’évoquais à l’instant et qui visent à exonérer à l’horizon de 2016 les passagers en correspondance de taxe de l’aviation civile, tout en préservant les ressources du budget annexe. Il importe que les compagnies bénéficient d’une incitation pour atterrir en France. Je soutiens ces propositions, car j’estime qu’elles sont très favorables à l’attractivité du hub de Paris.

Nous y reviendrons lors de l’examen des articles, mais je comprends que le Gouvernement, en concertation avec Bruno Le Roux, propose une solution alternative, discutée en ce moment même à l’Assemblée nationale, qui examine le collectif budgétaire. L’exonération des passagers en correspondance serait ainsi de 50 % au 1er avril 2015 et de 100 % au 1er janvier 2016, pour un coût total, compensé par le budget général, d’environ 60 millions d’euros. Il existe donc une légère divergence de forme entre le projet de budget que nous examinons cet après-midi et le dispositif adopté par l’Assemblée nationale, qui est plus favorable.

Pour ma part, je souhaite que le Sénat adopte les articles 50 ter et 50 quater, tels que modifiés par les amendements proposés, pour montrer notre soutien à la mesure de compétitivité qui nous est proposée. La suite de la navette parlementaire permettra de mettre en cohérence les deux textes.

S’agissant toujours de la conjoncture du secteur, et donc des recettes du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », le rapport de Bruno Le Roux contient plusieurs autres préconisations. Je serais heureux, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, si vous pouviez nous présenter les suites que vous comptez donner à ce rapport, notamment les mesures qui pourraient être retenues et celles pour lesquelles vous avez demandé un travail d’expertise complémentaire. Je pense en particulier aux préconisations relatives à la taxe d’aéroport et à la taxe sur les nuisances sonores aériennes, pour lesquelles les recettes restent bien inférieures aux besoins de financement.

Si j’ai débuté mon propos par cette question de la compétitivité, c’est parce que les recettes du budget annexe dépendent exclusivement de la bonne santé du transport aérien.

La DGAC, la Direction générale de l’aviation civile, offre en effet des prestations de services aux acteurs du transport aérien, en contrepartie du paiement de redevances. Il s’agit, à titre principal, du contrôle aérien, essentiel à la sécurité du trafic. En conséquence, et nous l’avons constaté depuis 2008, lorsque la conjoncture est mauvaise et que la croissance s’effondre, le trafic aérien diminue et les comptes du budget annexe s’en ressentent. Les prévisions pour les prochaines années sont, fort heureusement, plus optimistes, puisque, malgré une croissance mondiale encore faible, les différentes évaluations du trafic aérien sont positives, en particulier s’agissant de la France. Les recettes du budget annexe devraient donc augmenter, et ce dès 2015. Au total, en 2015, les crédits du budget annexe devraient donc s’élever à 2,3 milliards d’euros.

La DGAC a mené une politique de maîtrise de ses dépenses. Sa masse salariale se stabilise grâce à la réduction des effectifs engagée depuis 2007 et ses crédits de fonctionnement courant ont également fait l’objet de coupes drastiques, puisqu’ils ont diminué de près d’un quart en quatre ans.

Dès lors, la hausse des recettes couplée à la maîtrise des dépenses permettra à la section d’exploitation du budget annexe de dégager un excédent inédit de 150 millions d’euros en 2015. Cet excédent correspond à une capacité d’autofinancement qui permet au budget annexe de diminuer son recours à l’emprunt et, partant, de réduire son endettement. En effet, les budgets annexes présentent la particularité de permettre un recours à l’emprunt et à l’endettement. Ainsi, la dette du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » diminuerait de 57 millions d’euros en 2015, ce qui n’était pas arrivé depuis 2007, pour s’établir tout de même à 1,2 milliard d’euros.

S’il faut saluer ces bons résultats, il faut également en souligner les faiblesses.

D’abord, ces chiffres reposent sur une hausse très nette des recettes. Or, dans la période qui s’ouvre, la DGAC sera soumise à un plan de performances européen qui la conduira à limiter l’augmentation de ses redevances. Au surplus, comme je le disais à l’instant, nous devons toujours veiller à ce que les prélèvements opérés sur les compagnies aériennes ne freinent pas leur dynamisme. La DGAC appartient à « l’écosystème » du transport aérien – si je puis m’exprimer ainsi – et, à ce titre, n’échappe pas à l’exigence de productivité qui s’applique à tous les autres acteurs.

Ensuite, certaines dépenses apparaissent désormais très contraintes. C’est le cas des dépenses de fonctionnement, dont on voit mal comment elles pourraient encore être réduites, et des dépenses d’investissement, qui sont absolument nécessaires pour faire évoluer les outils technologiques de la DGAC, notamment dans le cadre de la mise en œuvre du Ciel unique européen.

En réalité, la seule ligne de dépense sur laquelle il est possible de faire un effort correspond aux dépenses de personnel, qui représentent près de la moitié des dépenses totales.

Jusqu’à présent, les efforts consentis en termes de diminution des effectifs ont été assez largement « recyclés » dans des mesures catégorielles, négociées dans le cadre de protocoles sociaux. C’est le prix du maintien d’une certaine paix sociale dans un contexte d’importante réorganisation, avec la fermeture de plusieurs tours de contrôle. La DGAC doit, cependant, demeurer vigilante sur l’évolution de ce poste si elle veut continuer à maîtriser son équation budgétaire.

Mes chers collègues, je veux vous faire part de mon inquiétude concernant la recherche aéronautique. Jusqu’à récemment, l’État participait à l’effort de recherche aéronautique par le biais de crédits gérés par la DGAC. Avec le grand emprunt, ces lignes budgétaires ont disparu : elles sont devenues l’un des volets du programme d’investissements d’avenir, le PIA.

Si cette modalité de financement a le mérite d’exister, elle me paraît cependant critiquable. En effet, une fois le PIA 2 achevé, comment ces investissements seront-ils financés ? Qui peut croire que de nouveaux crédits budgétaires seront ouverts ? Je me permets d’appeler votre attention sur la nécessité de ne pas décrocher en matière de recherche par rapport à nos concurrents. Or les programmes s’étalant sur plusieurs années, il est souvent très difficile de rattraper le retard accumulé.

Pour terminer sur l’aérien, je souhaite aborder un sujet d’actualité : la cession de 49,99 % du capital de l’aéroport de Toulouse-Blagnac à un consortium sino-canadien.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, vous le savez, cette opération suscite beaucoup d’émoi parmi les élus locaux. Pouvez-vous nous indiquer les garanties que l’État a prises pour assurer le respect des intérêts publics ? L’État reste actionnaire à hauteur de 10 %. Entend-il céder ses participations à court ou moyen terme ? Plus généralement, nous aimerions connaître la doctrine de l’État en matière de cession des aéroports.

M. Hervé Maurey, président de la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire. Très bien !

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. L’État compte-t-il engager d’autres cessions ? S’agit-il d’opérations dont le but est d’abord financier ou bien l’État considère-t-il qu’il ne lui appartient pas de détenir de telles infrastructures ?

Sous la réserve de ces observations, la commission des finances propose au Sénat d’adopter les crédits du budget annexe.

M. Jean Germain. Excellent !

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. Je précise que ces crédits font l’objet d’un vote spécifique, détaché du vote des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Je veux maintenant, à la suite de mes deux collègues, évoquer cette mission, dont je suis également rapporteur spécial, au titre du programme « Météorologie ».

Ce programme ne fait que porter la principale dotation de l’État à Météo-France, soit une somme de 206 millions d’euros, alors que le budget total de l’établissement s’élève à plus de 400 millions d’euros. Les recettes de Météo-France diminuent depuis plusieurs années, qu’il s’agisse de la dotation de l’État ou des recettes propres de l’établissement, lesquelles sont constituées par des recettes commerciales et par les redevances qu’il perçoit au titre de sa prestation en matière d’aviation civile.

En dépit de cette diminution de recettes, l’établissement a réussi à équilibrer son budget, en diminuant ses dépenses et en opérant des prélèvements sur son fonds de roulement. Les dépenses de fonctionnement, en particulier, ont subi des coupes, puisque cinquante-trois centres départementaux seront fermés sur la période 2008-2016. En outre, les effectifs sont en constante diminution depuis trois ans et continueront à baisser au cours des trois prochaines années, à hauteur d’environ 70 agents par an, sur un effectif total de quelque 3 200 personnes. Les efforts budgétaires réalisés par l’établissement doivent donc être salués.

À compter de 2017, Météo-France souhaite néanmoins retrouver des marges de manœuvre pour réaliser de nouveaux programmes d’investissement, importants pour l’avenir. À cet égard, j’estime que l’établissement peut dégager de nouvelles ressources sans pour autant demander des crédits à l’État. En effet, il peut – et doit – augmenter ses recettes commerciales et profiter du vaste marché des données météorologiques. Son président me disait d’ailleurs que 40 % des entreprises sont « météo-sensibles ». Aujourd’hui, la politique de données publiques oblige Météo-France à mettre gratuitement à disposition des données brutes, que des entreprises concurrentes réutilisent et revendent. Cette situation est tout de même paradoxale.

Bien que ces crédits appellent de ma part une appréciation plutôt positive, ils ne sont pas détachables des autres crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », que la commission des finances vous propose de rejeter, pour les raisons évoquées par mes deux collègues rapporteurs. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Si je partage cet avis, je rappelle que la commission a émis un avis favorable sur les crédits du budget annexe. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, rapporteur pour avis.

M. Bruno Sido, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la commission des affaires économiques s’est saisie pour avis du programme 174, « Énergie, climat et après-mines », qui regroupe les crédits consacrés à l’énergie.

Ce programme étant dédié, à près de 93 %, à la garantie des droits et à l’accompagnement des anciens mineurs après l’arrêt de l’exploitation minière, la baisse globale des crédits – de 8,8 % en crédits de paiement, pour une enveloppe totale de 545 millions d’euros – suit logiquement la diminution structurelle du nombre d’ayants droit et n’appelle, par conséquent, pas de critique de ma part. Le demi-milliard d’euros alloué à cette action permettra, en particulier, de financer les diverses prestations servies par l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs et, ainsi, d’assurer l’indispensable continuité de l’action de l’État à l’égard du monde minier.

L’action 5, Lutte contre le changement climatique, dotée de 31 millions d’euros et majoritairement consacrée au financement du réseau de surveillance de la qualité de l’air, voit, quant à elle, sa dotation baisser de près de 10 %. Si cette contraction s’explique notamment par la fin de l’effort budgétaire particulier consenti depuis 2013 pour accélérer l’adoption des plans pour l’amélioration de la qualité de l’air, elle constitue, à tout le moins, un mauvais signal adressé à nos partenaires, au moment même où l’Union européenne doit adopter sa nouvelle stratégie thématique dite « Paquet air » et où la France accueillera, à la fin de l’année 2015, la Conférence des parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.

Enfin, l’action 1, Politique de l’énergie, malgré la largesse de son intitulé, n’est dotée que de 5 millions d’euros et finance principalement la subvention versée à l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, l’ANDRA, pour l’exercice des deux missions d’intérêt général qui lui sont dévolues : la réalisation de l’inventaire triennal des déchets radioactifs et la reprise des déchets dits « orphelins ».

À ceux qui s’étonneraient de la faiblesse des crédits budgétaires dédiés à la politique de l’énergie, je rappelle que son financement repose très majoritairement sur les consommateurs finals – entreprises et particuliers –, qui acquittent, sur leurs factures, la contribution au service public de l’électricité, la fameuse CSPE, dont le produit s’élèvera, en 2014, à 6,2 milliards d’euros, soit plus de onze fois les crédits du programme. Nous aurons très certainement l’occasion de revenir sur l’évolution préoccupante de cette contribution lors de l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte.

Parmi la quinzaine de dépenses fiscales concourant, à titre principal, à la politique énergétique, pour un montant total de plus de 1,3 milliard d’euros – hors taux réduit de TVA pour la rénovation énergétique des logements, qui relève, dans le découpage du budget, de la mission « Égalité des territoires et logement » –, j’insisterai sur la principale d’entre elles, le crédit d’impôt développement durable, le célèbre CIDD, que le présent projet de budget réforme. Désormais rebaptisé « crédit d’impôt pour la transition énergétique », ou CITE, son taux est porté à 30 %, la condition de « bouquet de travaux » est supprimée et de nouvelles dépenses sont rendues éligibles, le tout pour un coût supplémentaire estimé, en année pleine, à 700 millions d’euros. Même si je regrette l’instabilité d’un dispositif retouché presque chaque année depuis sa création, en 2000, je considère que la simplification – elle est réelle – et le renforcement proposés sont bienvenus.

Il reste que, à l’exception de la réforme du crédit d’impôt, aucune mesure fiscale ou budgétaire majeure ne vient traduire, dans ce projet de budget, l’ambition portée par le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. C’est bien là son principal écueil.

Alors que la même critique vous avait été adressée à l’Assemblée nationale, madame la ministre, vous avez, en guise de réponse, détaillé les différents « éléments d’ingénierie financière » que vous entendiez mobiliser : prêts de la Caisse des dépôts et consignations pour les collectivités locales, fonds national de la transition énergétique, soutien de la Banque publique d’investissement à destination des entreprises, part du programme des investissements d’avenir et du fonds européen consacrés à la transition énergétique. Ne craignez-vous pas que ces moyens ne soient pas à la hauteur des enjeux ?

Malgré cette incertitude globale sur le financement de la transition énergétique et au vu du périmètre d’un programme presque exclusivement consacré à l’après-mines, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur les crédits du programme 174 ainsi que sur ceux du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », dont la dotation est, cette année encore, préservée.

M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, rapporteur pour avis.

M. Michel Le Scouarnec, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, depuis trois ans, la commission des affaires économiques examine les crédits en faveur de la pêche et de l’aquaculture dans un rapport budgétaire dédié. Ces crédits, qui figurent au sein de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sont très modestes : 47,9 millions d’euros pour 2015. Ils sont même en légère baisse – de 1,6 million d’euros, soit 3 % – par rapport aux 49,5 millions d’euros qui leur étaient alloués dans la loi de finances pour 2014.

Ces crédits permettent de financer l’action sociale en faveur des marins-pêcheurs, à travers la participation aux caisses de solidarité chômage intempéries, la collecte de données scientifiques sur l’état des ressources halieutiques ou encore les moyens de contrôle des pêches.

Au sein de cette enveloppe de 47,9 millions d’euros, les crédits d’intervention économique en faveur du secteur de la pêche restent modestes : moins de 25 millions d’euros pour aider à l’installation, financer les scientifiques embarqués ou encore aider au stockage des prises accessoires. En revanche, les plans de sortie de flotte ou encore les contrats bleus disparaîtront en 2015, car ils ne seront plus financés.

En réalité, les crédits budgétaires pèsent peu dans le soutien à la pêche et à l’aquaculture par rapport aux aides européennes. De ce point de vue, le nouveau Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, le FEAMP, a un rôle essentiel à jouer. Nous connaissons, depuis le milieu de l’année 2014, le montant réservé à la France : 588 millions d’euros sur sept ans, dont 369 millions d’euros au titre de l’action économique en faveur de la filière pêche. C’est 70 % de plus qu’avec le Fonds européen pour la pêche, le FEP. Encore faut-il pouvoir utiliser rapidement ces fonds… C’est pourquoi je demande au Gouvernement de nous indiquer le calendrier de mise en œuvre du FEAMP et les priorités que la France entend mettre en avant, sachant qu’une partie de l’enveloppe est régionalisée. De la mise en œuvre rapide du fonds dépend le succès de la politique de soutien à la pêche maritime et à l’aquaculture.

En tout état de cause, il ne faut pas tout attendre des aides européennes. En effet, l’interdiction, depuis 2002, d’apporter des subventions publiques à la construction des navires de pêche empêche d’aider à l’acquisition de nouveaux bateaux, plus modernes, plus adaptés. C’est le souci numéro un, alors que la flotte de pêche est vieillissante – vingt-trois ans en moyenne, et vingt-sept ans pour la seule flotte métropolitaine. Les jeunes n’ont pas les moyens de financer par leurs propres moyens des navires neufs et sont donc condamnés à racheter des navires anciens et gourmands en carburant, poste qui peut représenter jusqu’à 40 % du coût d’exploitation d’un navire.

Un appel à projets a été lancé pour concevoir le navire de pêche du futur. Les solutions techniques existent. Mais la question centrale est celle du financement des investissements. Nous attendons avec impatience les résultats de la mission confiée à l’Inspection générale des finances et à l’Inspection générale des affaires maritimes sur ce sujet.

La pêche doit, en outre, s’adapter en permanence aux évolutions de la réglementation européenne.

La politique commune de la pêche, la PCP, a organisé une gestion de plus en plus stricte des ressources halieutiques. La dernière réforme de la PCP définit de nouvelles contraintes pour les pêcheurs. Les rejets en mer seront progressivement interdits, obligeant les pêcheurs à débarquer toutes les captures. Les quotas de pêche seront fixés de manière à atteindre, dès 2015 et au plus tard en 2020, le rendement maximum durable, le RMD. Cette règle peut conduire à réduire les quotas de manière spectaculaire d’une année sur l’autre.

Pour 2015, les quotas seront fixés dans quelques jours par le Conseil des ministres de l’Union européenne. Dans une communication de juin dernier, la Commission européenne constatait que la surpêche était en baisse : elle concernait 94 % des stocks en 2003 et seulement 41 % en 2012. Dans le même temps, on a progressé dans la connaissance et le suivi de l’état des stocks.

Pourtant, la Commission européenne propose pour 2014 d’importantes baisses de quotas pour certaines pêcheries. En mer Celtique, ces diminutions atteindraient 64 % pour le cabillaud, 41 % pour l’églefin, 30 % pour le hareng. Pour la sole, elles seraient de 60 % en Manche Est et de 38 % dans le golfe de Gascogne.

S’il convient de préserver la ressource, il importe aussi de prendre en compte la situation socio-économique des pêcheurs !

La même recherche d’équilibre doit être mise en œuvre dans le dossier de la pêche en eaux profondes : il faut retenir une approche fondée sur la science, appliquant le principe de précaution, mais sans interdire totalement cette forme de pêche.

Je terminerai en disant quelques mots sur l’aquaculture, qui recèle d’immenses potentialités de développement.

La France est bien cotée dans les domaines de l’ostréiculture et de la mytiliculture. Toutefois, pour ce qui concerne les huîtres, des solutions sont encore à trouver face au problème de surmortalité des naissains.

La pisciculture marine reste bien faible, malgré la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche, qui prévoyait la mise en place de schémas régionaux de développement de l’aquaculture marine. Dans certaines régions, comme sur la façade méditerranéenne, les conflits d’usage du littoral ne permettent pas aux acteurs de se mettre d’accord. Pourtant, il s’agirait là d’une activité créatrice d’emplois, à condition d’en maîtriser les aspects environnementaux.

L’aquaculture mérite donc un peu plus d’attention de la part des pouvoirs publics.

Pour toutes ces raisons, la commission des affaires économiques a émis un avis de sagesse sur les crédits dédiés à la pêche et à l’aquaculture.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis.

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission de la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’avis que je vais présenter au nom de la commission du développement durable concerne les politiques de la biodiversité et de la transition énergétique.

Les crédits correspondants sont regroupés au sein de trois programmes de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » - les programmes 113, 159 et 174 - qui regroupent au total 918 millions d’euros, soit 14 % des 6,65 milliards d’euros de l’ensemble de la mission.

Je ne reviendrai évidemment pas sur la description et la dynamique strictement budgétaire de ces programmes, le rapporteur spécial, Jean-François Husson, l’ayant très bien fait. J’insisterai sur les thématiques qui m’ont semblé les plus importantes et les plus urgentes pour l’année à venir, avec le regard, bien sûr, d’un commissaire du développement durable.

Auparavant, je souhaiterais souligner un point de contexte.

Des rendez-vous importants sont prévus en 2015 en matière de biodiversité et de transition énergétique : le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, qui sera prochainement examiné par notre assemblée, le projet de loi relatif à la biodiversité, mais aussi la quatrième Conférence européenne sur l’eau, le septième Forum mondial de l’eau en Corée du Sud et, bien sûr, la conférence Paris Climat 2015. Nous espérons tous que cette dernière, qui sera préparée à Lima dans quelques jours, aboutira à un nouvel et grand accord international sur le climat.

Dans ce cadre, mes chers collègues, je voudrais attirer votre attention sur trois points.

Le premier point concerne l’ambition qui sera donnée à la future agence française pour la biodiversité et les moyens qui seront mis à son service. L’opération consistera-t-elle en une simple fusion d’établissements existants ? Si oui, lesquels ? La structure disposera-t-elle des moyens de sa politique ?

Sur ces aspects, nous devrons faire preuve de vigilance et être attentifs aux conclusions qui seront rendues par la nouvelle mission de préfiguration nommée par vos soins, madame la ministre, comprenant Gilles Bœuf, Annabelle Jaeger et Olivier Laroussinie, et placée sous le haut patronage d’Hubert Reeves.

Plusieurs éléments seront décisifs : les contours de cette future agence, l’harmonisation des statuts des 1 200 agents qui seront concernés, le budget et aussi, c’est important, la capacité de la structure à donner toute sa place aux milieux marins. J’y insiste, car nous entrons cette année dans une phase déterminante pour la mise en œuvre de la directive du 17 juin 2008 établissant un cadre d’action communautaire dans le domaine de la politique pour le milieu marin : la consultation publique sur les programmes de surveillance vient de prendre fin et la consultation sur les programmes de mesures s’ouvrira le 19 décembre 2014.

Le deuxième point sur lequel je souhaite insister – il a déjà été défloré, si j’ose dire, par l’un de mes prédécesseurs à cette tribune – est celui des moyens consacrés à la politique de l’eau. L’article 16 du projet de loi de finances prévoit, sur le budget des agences de l’eau, un prélèvement de 175 millions d’euros qui sera renouvelé en 2016 et en 2017. Ce prélèvement intervient après celui de 210 millions d’euros, l’année dernière, déjà présenté comme exceptionnel.

Je vous sais informée, madame la ministre, puisque vous avez récemment reçu les présidents de comités de bassin, de la situation difficile dans laquelle les agences de l’eau – pas toutes, mais la plupart – se trouvent.