M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. Ma chère collègue, vous dites n’avoir pas bien compris la conclusion de mon propos : j’essaye tout simplement de ne pas tromper mon monde, j’essaye d’être honnête. C’est dans cet état d’esprit que j’agis.

Vous proposez, avec Cédric Perrin, qu’aucune éolienne ne puisse être implantée à une distance des habitations inférieure à dix fois sa hauteur. Pourquoi dix fois ? Je ne parle même pas de l’amendement de repli, qui prévoit, lui, une distance égale à huit fois la hauteur. Et pourquoi pas douze fois ?

Nous avons bien compris que l’installation d’éoliennes pose des problèmes dans certaines zones – mais pas dans toutes.

Alors, pourquoi, me direz-vous, cette distance de 500 mètres ? Elle correspond au périmètre de protection des monuments historiques fixé par une loi de février 1943. Ce seuil ne me paraît pas plus pertinent que celui de trois fois la hauteur de l’installation, en vigueur au Danemark, ou un autre seuil en vigueur ailleurs.

Si nous décidons ce soir de fixer comme norme une distance de huit fois, dix fois la hauteur de l’installation ou bien de 1 500 mètres et que l’ANSES, dans le rapport qu’elle rendra dans huit mois, préconise une distance au moins égale à douze fois la hauteur de l’installation, que ferons-nous ? Dirons-nous alors que nous avons pris position comme de grands garçons que nous sommes parce que nous, nous savons ?

Peut-être les éoliennes qui actuellement posent problème ne sont-elles même pas implantées à 500 mètres des habitations. Si je vous écoute bien, elles sont probablement plus proches. Que faire alors ? Les démonter demain matin ? C’est sans doute possible.

Mes chers collègues, nous nous apprêtons à écrire la loi, je vous le rappelle. Il ne faudrait pas que, dans huit mois, l’ANSES nous dise que nous nous sommes trompés !

C’est pourquoi la commission du développement durable vous propose que nous attendions la publication dans huit mois de ce rapport afin que nous disposions d’une appréciation scientifique. En tant que législateur, nous pouvons tout faire, tout dire, mais c’est mieux de s’appuyer sur des arguments scientifiques. Nous ne nous en porterons que mieux !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 335 rectifié quinquies.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 38 bis A, et les amendements nos 75 rectifié quinquies et 217 rectifié bis n'ont plus d'objet.

Monsieur Germain, l'amendement n° 219 rectifié quinquies est-il maintenu ?

M. Jean Germain. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 219 rectifié quinquies est retiré.

L'amendement n° 220 rectifié quinquies, présenté par MM. Germain et F. Marc, Mmes Bonnefoy et Jourda et MM. Yung, Raoul, Delebarre, Tourenne, Sutour, Madrelle, Chiron, Lalande, Berson, Boulard et Antiste, est ainsi libellé :

Après l’article 38 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 553-1 du code de l’environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La promesse de bail relative à l’implantation d’une installation terrestre de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent dont la hauteur du mât dépasse 50 mètres est rétractable dans un délai de trente jours. À peine de nullité, cette promesse est précédée de la communication, de manière lisible et compréhensible, d’une information sur les avantages et les inconvénients des installations terrestres de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent dont la hauteur des mâts dépasse 50 mètres. Le contenu de cette information est fixé par décret en Conseil d’État. »

La parole est à M. Jean Germain.

M. Jean Germain. Cet amendement vise à combler un vide juridique en faisant bénéficier le particulier, propriétaire foncier ou locataire, auprès duquel les représentants de commerce des promoteurs d’éoliennes géantes sollicitent une promesse de bail, d’un véritable devoir de mise en garde et d’un délai de rétractation porté à trente jours.

Cet amendement vise à protéger le débiteur de la promesse de bail, souvent un agriculteur contractant avec les représentants d’une multinationale, qui se retrouve dans un rapport totalement déséquilibré pour faire valoir ses droits.

Il ressort des remontées très négatives des territoires que beaucoup de particuliers signent des promesses de bail sans réaliser que ce document les engage définitivement et ne laisse d’option qu’au promoteur.

On voit aussi que beaucoup de signataires ne mesurent pas concrètement l’impact sur le cadre de vie des éoliennes géantes que les promoteurs entendent installer, se représentant des pylônes un peu plus grands que ceux qu’ils connaissent et n’entendant que la promesse d’argent facile qui leur est habilement présentée par des professionnels.

Dans le vide juridique actuel, la signature d’un simple particulier a des répercussions considérables sur la qualité de vie de communautés rurales entières.

Dans certains cas, les promesses de bail sont signées par des propriétaires terriens qui n’habitent pas sur place, ayant hérité de terres ou ayant déménagé, et qui ne songent pas aux conséquences locales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission du développement durable ?

M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. La commission émet un avis favorable sur cet amendement, qui vise à mettre en place un devoir d’information et un délai de réflexion préalable à l’implantation d’une éolienne de plus de 50 mètres.

Il est utile que les bailleurs potentiels soient correctement informés sur les effets environnementaux des éoliennes avant de s’engager dans une démarche contractuelle.

C’est un sujet que j’ai évoqué avec le président de la commission du développement durable. J’ai entendu les uns et les autres : allez sur place, allez voir, nous disent-ils. Certes, dans le Pas-de-Calais, les choses se passent bien a priori. Néanmoins, il semblerait qu’il en soit différemment ailleurs.

Par conséquent, je suggérerai que la commission du développement durable se penche de la manière la plus objective qui soit sur cette question, en essayant de comprendre les enjeux exacts du problème, notamment sur le plan de l’acceptabilité sociale. Cette réflexion est très importante pour les énergies renouvelables en France. On ne peut pas faire tout et n’importe quoi !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Je vous le rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs, la réglementation impose que les éoliennes soumises à autorisation fassent l’objet d’une enquête publique. À entendre certains d’entre vous, on a l’impression que, du jour au lendemain, on peut se réveiller avec une éolienne sous sa fenêtre. C’est impossible !

M. Jean Desessard. Il arrive effectivement à certains d’entre nous de découvrir une éolienne dans leur champ ! (Sourires.)

Mme Ségolène Royal, ministre. Non, cela n’existe pas ! Sinon, cela signifie qu’elles ont été installées illégalement ou que les maires n’ont pas assez contrôlé ce qui se passait sur leur commune, ou encore que les préfets n’ont pas fait leur devoir.

Je suis quelque peu étonnée, car, et pas seulement dans le Pas-de-Calais, les commissions fonctionnent correctement, les maires sont au courant de ce qui se passe et aucune autorisation n’est donnée sans que les élus locaux en soient informés. Où sont donc ceux de nos concitoyens qui subissent l’implantation d’éoliennes « au petit bonheur la chance » à 500 mètres de leur habitation – il faudrait d’ailleurs contrôler le respect de cette distance –, installations par ailleurs bruyantes et ne correspondant pas aux normes imposées ?

En résumé, il faudrait s’assurer, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous ne légiférez pas sur la foi de cas d’éoliennes érigées en violation de la réglementation.

J’ajoute que l’évaluation de la distance de 500 mètres doit obligatoirement être accompagnée, en vertu des textes actuels, d’une étude d’impact sur le bruit. Si celui-ci dépasse les seuils imposés, l’éolienne devra être implantée plus loin. Un recadrage précis et un rappel des normes en vigueur seraient donc souhaitables.

Permettez-moi d’établir un bref état des lieux de la législation actuelle concernant les éoliennes.

Celles-ci sont soumises à une autorisation, requièrent la délivrance d’un permis de construire et font l’objet d’une enquête publique qui dure de un à deux mois. Il est impératif que la procédure de consultation du public permette une complète information sur les projets en cours d’instruction, en direction non seulement des riverains immédiats, ce qui est déjà très important, mais de la totalité des habitants d’une commune.

Je ne suis pas opposée à un délai de rétractation, mais, ce qu’il faut éviter à tout prix, c’est que des individus isolés donnent une autorisation d’implantation sur leur terrain, puisque, de toute façon, il y aura une enquête publique et un arrêté préfectoral.

Je ne sais pas dans quelles conditions ont été implantées les éoliennes que vous évoquez. Je comprends que le préjudice lié aux nuisances sonores et visuelles puisse être insupportable, mais je m’interroge sur la légalité de ces installations. En tout état de cause, il faudra examiner de près cette question.

En ce qui me concerne, dès que le rapport de l’ANSES sera publié, je pourrai préciser le dispositif, puisque c’est un arrêté ministériel qui fixe la réglementation relative aux bruits émis. Nous pourrons ainsi, à la lumière de ce rapport, faire en sorte que les normes de bruit soient respectées et resserrer le cadre normatif en élaborant des règles beaucoup plus claires et précises pour la protection des riverains contre les nuisances sonores des éoliennes.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission du développement durable.

M. Hervé Maurey, président de la commission du développement durable. Madame la ministre, je suis très heureux d’apprendre que tout va bien dans le Pas-de-Calais. Toutefois, les choses sont autrement plus compliquées dans d’autres départements. Même à cette heure tardive, il convient de ne pas perdre de vue la réalité.

Tout d’abord, madame la ministre, c’est le préfet qui donne l’autorisation d’implanter les éoliennes. Certes, une enquête publique est réalisée, mais celle-ci ne lie pas le préfet. À cet égard, dans mon département, je pourrais vous citer nombre d’exemples d’éoliennes qui ont été imposées – et je pèse mes mots – par le préfet. Vous êtes bien placée pour savoir que les préfets ont des instructions pour développer l’éolien, qu’ils sont soumis à une certaine pression en ce sens, et qu’ils sont même parfois contraints d’agir contre l’avis des élus.

Encore une fois, je suis tout à fait favorable au développement de l’éolien, mais je le suis tout autant au respect de l’avis des élus, et il ne me semble pas normal qu’un projet s’impose à eux quand ils y sont fermement opposés.

Il faut trouver le juste équilibre, car, comme le disait M. le rapporteur pour avis, à vouloir trop imposer, on peut parfois produire l’effet contraire en termes d’acceptabilité. Il faut, certes, développer l’éolien, mais pas au mépris des aspirations des populations ou à l’encontre de l’avis des élus, qui ont tout de même pour mission de représenter leur territoire et sa population.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Ségolène Royal, ministre. Je suis un peu étonnée. Si la situation dans certains départements est telle que vous la décrivez, je vais la regarder de près, redonner des instructions aux préfets pour que l’avis des élus soit pris en considération et que le modèle du Pas-de-Calais soit généralisé sur l’ensemble du territoire. En effet, la procédure prévoit systématiquement l’avis du maire, l’enquête publique, l’avis de la commission des sites, et après seulement, l’arrêté du préfet. Donc, les préfets doivent respecter, c’est la moindre des choses, l’avis des personnes consultées.

M. Hervé Maurey, président de la commission du développement durable. Je vous donnerai par écrit des exemples précis !

Mme Ségolène Royal, ministre. Je les attends, car c’est tout à fait anormal. Il ne faut pas que les particuliers puissent décider tout seuls, après avoir été payés pour cela, de l’implantation d’une éolienne dont les effets sur l’environnement et la qualité de vie d’autres riverains sont importants.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de m’avoir signalé ce phénomène. Le Gouvernement pourra ainsi mettre à plat les pratiques, très différentes les unes des autres, ayant cours au sein des départements, et rappeler aux préfets l’obligation de prendre en considération l’avis des élus.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.

M. Jean-François Husson. Madame la ministre, je voudrais juste donner un éclairage complémentaire, puisque vous vous ralliez à la position de M. le rapporteur pour avis, toute de sagesse et parfaitement éclairée.

Madame la ministre, vous venez de dire que la façon d’élaborer et de conduire les projets peut varier d’un département à l’autre. C’est parfois à ce niveau que réside la difficulté. Je m’explique : lors de la mise en œuvre d’un projet d’installation d’éoliennes dans un département, il arrive que, du fait des « frontières » départementales, les riverains les plus proches du parc éolien ne soient pratiquement pas consultés, puisque c’est le département voisin qui conduit le projet d’implantation, et qu’ils soient à peine associés à la démarche engagée. Ils seront pourtant les principales victimes de l’implantation projetée.

Je vous transmettrai avec plaisir cet élément supplémentaire, madame la ministre, de telle manière que la population de mon département, la Meurthe-et-Moselle, évidemment le plus beau de France (Sourires.),

M. Hervé Maurey, président de la commission du développement durable. Cela se discute !

M. Jean-François Husson. … n’ait pas le sentiment d’être moins bien considérée. Après tout, la Moselle n’est que la Moselle ! (Nouveaux sourires.)

M. Jean Desessard. Dans mon département, tout se passe bien ! (Mêmes mouvements.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Jarlier, pour explication de vote.

M. Pierre Jarlier. J’en reviens à l’amendement n° 220 rectifié quinquies de notre collègue Jean Germain, parce nous nous sommes un peu éloignés du sujet.

Que se passe-t-il vraiment sur le terrain ? On assiste à une surenchère de la part des opérateurs, puisqu’ils se rendent chez les propriétaires et leur promettent monts et merveilles en échange de la location de leur terrain. Or ces bailleurs potentiels ne disposent pas toujours des informations nécessaires sur les conséquences de l’implantation des éoliennes.

Il est important que les propriétaires puissent bénéficier d’un délai de rétractation suffisant, similaire à celui qui accompagne la signature d’un bail, car ils engagent le territoire pour des années, avec les effets environnementaux que l’on connaît.

L’amendement de M. Germain me semble tout à fait justifié, dans la mesure où il permettra de protéger le propriétaire qui méconnaît les conséquences de la location de son terrain. Il s’agit d’une décision de sagesse.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 220 rectifié quinquies.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 38 bis A.

Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 133 est présenté par MM. Rachline et Ravier.

L'amendement n° 696 rectifié bis est présenté par M. Husson, Mmes Deseyne et Garriaud-Maylam, MM. Karoutchi, de Raincourt et Vogel, Mmes Canayer et Deromedi, MM. Laménie, de Nicolaÿ, P. Leroy et Houel et Mmes Deroche et Mélot.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 38 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 553-1 du code de l’environnement est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Les installations terrestres de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent, lorsqu’elles sont visibles depuis un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques ou visibles en même temps que lui et situées dans un périmètre déterminé par une distance de 10 000 mètres de l’immeuble concerné, ne peuvent être implantées que sur avis conforme de l’architecte des Bâtiments de France rendu dans les conditions prévues au I de l’article L. 621-32 du code du patrimoine.

« Les installations terrestres de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent ne peuvent être implantées dans une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager ou une aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine visée aux articles L. 642-1 et L. 642-8 du code du patrimoine, dans un site inscrit ou classé en application des articles L. 341-1 et L. 341-2 du présent code, à l’intérieur d’un parc national délimité en application de l’article L. 331-3 du même code ou d’un parc naturel régional délimité en application de l’article L. 333-1 dudit code, dans une réserve naturelle délimitée en application de l’article L. 332-1 du même code, dans la zone littorale définie à l’article L. 321-2 du même code, dans une zone de montagne définie aux articles 3 et 4 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, dans une zone inscrite sur la liste du patrimoine mondial en application de la convention de l’Organisation des nations unies pour l’éducation, la science et la culture du 16 novembre 1972 et dans sa zone tampon.

« Les installations terrestres de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent ne peuvent être implantées dans des périmètres délimités, qu'après accord de l’architecte des Bâtiments de France, par délibération du conseil municipal ou de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d’urbanisme motivée par la protection du patrimoine bâti ou non bâti, des paysages ou des perspectives monumentales et urbaines. Le projet de délibération est mis à la disposition du public en vue de recueillir ses observations pendant une durée d’un mois avant la réunion du conseil municipal ou de l’organe délibérant de l’établissement public. Après accord du conseil municipal ou de l’organe délibérant de l’établissement public, le préfet crée le périmètre sur avis de la commission départementale de la nature du patrimoine et des sites. Son abrogation ou sa modification sont soumises aux mêmes formes. Les périmètres prévus au sixième alinéa du présent article sont suspendus dans leurs effets par la délimitation du présent périmètre. »

L’amendement n° 133 n'est pas soutenu.

La parole est à M. Jean-François Husson, pour présenter l'amendement n° 696 rectifié bis.

M. Jean-François Husson. À l’issue des débats intéressants que nous avons eus, j’ai le sentiment d’être un peu en décalage.

Je veux simplement, au travers de cet amendement, attirer l’attention de chacun d’entre nous sur la difficulté d’implantation de parcs éoliens, eu égard à l’éloignement imposé, notamment par rapport aux monuments historiques, aux sites classés, à des zones classées au patrimoine mondiale de l’UNESCO ou aux parcs naturels.

Le présent amendement prévoit une distance minimum de 10 000 mètres du bâtiment concerné. J’ai bien entendu les propos de M. le rapporteur pour avis et j’attends avec intérêt les quelques compléments à ce sujet, car j’ai aussi compris que quelques centaines de mètres ne pouvaient suffire.

La question est difficile, mais va bien au-delà du rapport de l’ANSES. Nous avons des sites exceptionnels, et je puis vous dire, pour avoir présidé un schéma de cohérence territoriale, que la situation est alors tout à fait différente. En l’espèce, nous sommes confrontés à de vrais enjeux, car il s’agit de préserver non seulement la qualité des paysages et du patrimoine naturel, mais aussi le patrimoine bâti.

Sur cette question, vous allez sans doute me donner tellement d’éclaircissements que je pourrai être sans doute plus indulgent. (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission du développement durable ?

M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. J’espère que notre collègue sera indulgent,…

M. Jean-François Husson. Ce n’est pas sûr !

M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. … sinon la commission émettra un avis défavorable ! (Nouveaux sourires.)

Cet amendement, qui a été adopté par la commission de la culture, vise à interdire la construction d’éoliennes terrestres dans toutes les zones sensibles au regard du patrimoine naturel ou culturel, qu’il s’agisse par exemple des zones inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO, des zones de protection du patrimoine architectural urbain et paysager, ou des aires de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine.

Il prévoit également un deuxième niveau de protection dans un périmètre de 10 000 mètres autour des monuments historiques, pour lequel un avis conforme de l’architecte des Bâtiments de France serait obligatoire avant l’implantation de toute éolienne et en covisibilité avec le monument concerné.

Enfin, il prévoit un troisième niveau de protection sur la base de périmètres ad hoc motivés par la protection du patrimoine et des paysages et créés par le préfet, sur proposition des communes, et après avis de la commission départementale de la nature.

Les éoliennes ne pourront être implantées qu’après accord de l’architecte des Bâtiments de France.

À la relecture des débats de la commission de la culture, nous comprenons qu’il s’agit d’un amendement d’appel. Les interdictions posées sont en effet beaucoup trop étendues pour être réalistes. Elles sont même parfois contradictoires avec d’autres articles du projet de loi, comme l’article 38 bis A, qui prévoit précisément d’autoriser dans une certaine mesure l’implantation d’éoliennes sur le territoire de communes littorales.

Je suis sensible à l’esprit de cet amendement. Je me suis notamment interrogé sur la situation des sites inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO. On en compte trente-huit en France, dont certains s’étendent, je l’ai découvert, sur plus de 200 kilomètres, comme le Val-de-Loire, entre Sully-sur-Loire et Chalonnes.

Il est vrai qu’il n’existe pas à l’heure actuelle de protection spécifique pour ces sites, dont l’État est garant de la valeur universelle exceptionnelle au titre de la convention du 16 novembre 1972. Cependant, aucun schéma régional et éolien n’envisage aujourd’hui une implantation à proximité d’un site UNESCO ou de sa zone tampon.

De plus, la procédure d’autorisation, au titre des installations classées en faveur de la protection de l’environnement, pour la construction des grandes éoliennes permet globalement d’assurer une solide protection de notre patrimoine, puisqu’elle suppose notamment la consultation de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites dans sa formation spécialisée « Sites et paysages ».

En réalité, les seuls problèmes éventuels concernent les zones tampons qui ont été délimitées avant l’invention des éoliennes. On rencontre ces difficultés, par exemple, pour le Mont-Saint-Michel, la Saline Royale d’Arc-et-Senans ou l’abbatiale de Saint-Savin-sur-Gartempe – chez vous, madame la ministre ! (Mme la ministre sourit.)

Ces zones tampons ont été définies à une époque où l’on n’imaginait pas que des éoliennes hautes de 200 mètres pourraient un jour être en covisibilité avec les sites concernés.

Les services du ministère de la culture travaillent actuellement à la redéfinition des zones tampons, en prenant minutieusement en compte le relief environnant. Ce travail, long, et fastidieux, est en cours pour le Mont-Saint-Michel. Je dispose d’un tableau présentant l’état d’avancement des travaux pour chaque site concerné.

Dans ces conditions, il me semble préférable de traiter les situations problématiques au cas par cas et en fonction des réalités du terrain, plutôt que d’énoncer des principes généraux d’interdiction, qui sont beaucoup trop contraignants et, en définitive, peu efficaces.

En conséquence, je suggère le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. Jean Desessard. Merci de ce tour de France ! (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Je confirme que nous avons engagé un travail avec le ministère de la culture sur ce sujet. Des textes sont en préparation pour protéger les grands sites.

Certes, on n’a pas vu implanter d’éoliennes auprès des grands sites classés au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO, mais je partage le souci de protection architecturale du Sénat.

L’année dernière, les Journées du patrimoine avaient pour thème « patrimoine naturel, patrimoine culturel ». Cette année, elles porteront sur le patrimoine et les paysages de la transition énergétique. Il faut insister sur la nécessité qu’il y a à protéger les alentours des monuments.

J’ajoute que, pour les petits monuments, l’étude d’impact doit inclure l’enjeu de l’insertion paysagère, ce que prévoit la législation en vigueur. Mais nous pouvons encore renforcer notre vigilance !

Cela étant, je demande, comme M. le rapporteur, le retrait de cet amendement.

M. le président. Monsieur Husson, l'amendement n° 696 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jean-François Husson. Je le retire volontiers, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 696 rectifié bis est retiré.

L'amendement n° 343 rectifié bis, présenté par M. de Nicolaÿ, Mme Procaccia et MM. Cambon, de Raincourt et Husson, est ainsi libellé :

Après l’article 38 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 111-1-6 du code de l’urbanisme, il est inséré un article L. 111-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 111-1-… – Les installations utilisant l’énergie mécanique du vent dont le mât excède douze mètres de hauteur ne peuvent être implantées :

« 1° en un lieu d’où elles seraient visibles d’un bien inscrit au patrimoine mondial par l’organisation des nations unies pour la science, l’éducation et la culture, à moins que ce bien ne soit une zone industrielle ou minière ;

« 2° dans un parc naturel national ou régional, ni sur une commune limitrophe d’un tel parc. »

La parole est à M. Louis-Jean de Nicolaÿ.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ. Compte tenu des explications claires que viennent de nous apporter M. le rapporteur pour avis et Mme la ministre, je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 343 rectifié bis est retiré.

L'amendement n° 221 rectifié quinquies, présenté par MM. Germain, F. Marc et Cazeau, Mmes Bonnefoy et Jourda et MM. Yung, Raoul, Delebarre, Tourenne, Sutour, Madrelle, Chiron, Lalande, Berson, Boulard et Antiste, est ainsi libellé :

Après l’article 38 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l’article L. 553-1 du code de l’environnement est complété par les mots : « et des impératifs de préservation de la sécurité publique, des commodités de voisinage, des paysages, de la biodiversité, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés ainsi que du patrimoine archéologique ».

La parole est à M. Jean Germain.

M. Jean Germain. Mme la ministre vient de nous indiquer que des travaux communs aux différents ministères étaient en cours sur ce sujet. Quant à M. le rapporteur pour avis, il a, lui aussi, apporté diverses explications. De surcroît, M. Jarlier va présenter dans un instant un amendement assez proche de celui-ci.

En conséquence, je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 221 rectifié quinquies est retiré.

L'amendement n° 553 rectifié quater, présenté par M. Jarlier, Mme Loisier, MM. Kern, Guerriau et Bockel, Mme Morin-Desailly et MM. Canevet, Détraigne, Tandonnet, D. Dubois et Gabouty, est ainsi libellé :

Après l’article 38 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 3° du I de l’article L. 111-1-2 du code de l’urbanisme est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Durant la phase d'élaboration du plan local d'urbanisme intercommunal ou du plan local d'urbanisme, l’implantation des ouvrages nécessaires à la production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent incompatibles avec le voisinage des zones habitées est soumise à délibération favorable de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d’urbanisme ou, à défaut, du conseil municipal de la commune concernée par l’ouvrage. »

La parole est à M. Pierre Jarlier.