M. le président. L’amendement n° 699 rectifié, présenté par MM. Revet, Commeinhes, Magras et Houel, est ainsi libellé :

Après l’article 26

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un décret en Conseil d’État précise les conditions dans lesquelles les cours administratives d’appel sont compétentes, en premier et dernier ressort, à titre expérimental, pour connaître des recours dirigés contre les autorisations délivrées en application de l’ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 relative à l’expérimentation d’une autorisation unique en matière d’installations classées pour la protection de l’environnement.

La parole est à M. Charles Revet.

M. Charles Revet. Nous venons de gagner du temps en adoptant l’amendement n° 1561 du Gouvernement, puisque six amendements sont devenus sans objet. Le présent amendement vise également à nous faire gagner du temps. (Sourires.) Dès lors que l’amendement du Gouvernement a été adopté, je souhaitais apporter cette précision complémentaire.

(Mme Françoise Cartron remplace M. Claude Bérit-Débat au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE Mme Françoise Cartron

vice-présidente

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. À moins que j’aie mal compris, mon cher collègue, il ne me semble pas que votre amendement ait le même objet que celui dont nous venons de discuter longuement.

La commission spéciale a émis un avis défavorable sur cet amendement de repli, qui vise à diminuer, à titre expérimental, le nombre des juridictions devant lesquelles sont exercés les recours contre les installations de production d’énergies renouvelables.

Cet amendement soulève une difficulté : le principe du droit d’appel est garanti à nos concitoyens par la création des cours administratives d’appel depuis 1987. Or le contentieux des installations de production d’énergies renouvelables, si important soit-il, ne justifie pas une dérogation aux procédures habituelles.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. L’avis du Gouvernement est le même que celui de la commission spéciale.

Monsieur le sénateur, vous cherchez à régler le problème des délais de recours. Or, pour des raisons juridiques évidentes, la cour administrative d’appel ne peut être compétente en premier et dernier ressort, eu égard au respect du droit au recours et du principe d’égalité de traitement. En effet, rien ne justifie que la cour administrative d’appel exerce cette compétence spéciale pour le contentieux des installations classées pour la protection de l’environnement, mais par pour d’autres types de contentieux.

En revanche, nous allons examiner des amendements visant à réduire les délais de recours et le Gouvernement lui-même ira en ce sens. Je vous invite donc, dans cette attente, à retirer votre amendement.

Mme la présidente. Monsieur Revet, l’amendement n° 699 rectifié est-il maintenu ?

M. Charles Revet. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 699 rectifié est retiré.

Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers amendements sont identiques.

L’amendement n° 534 rectifié est présenté par M. Raison.

L’amendement n° 850 rectifié ter est présenté par MM. Bizet et G. Bailly, Mme Bouchart, M. Calvet, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Commeinhes et de Nicolaÿ, Mme Deromedi, MM. Doligé et Gremillet, Mme Gruny, MM. Houel, Laménie, Lefèvre, Longuet, P. Leroy et Mayet, Mme Mélot, MM. Milon, Morisset et Pierre, Mmes Primas et Troendlé et M. Vogel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 26

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l’article L. 515-27 du code de l’environnement, les mots : « d’un an » sont remplacés par les mots : « de deux mois ».

La parole est à M. Michel Raison, pour présenter l’amendement n° 534 rectifié.

M. Michel Raison. Cet amendement est extrêmement important. Nous discutons d’un projet de loi « pour l’égalité des chances économiques », si j’en crois son titre. Je propose que le délai de recours à l’encontre des arrêtés autorisant l’exploitation des installations classées soit aligné sur le délai de recours de droit commun en contentieux administratif.

Imaginez le titulaire d’une autorisation d’exploitation d’une installation classée qui attend un an avant de savoir s’il va être visé par un recours. En général, les associations dont vous avez parlé, monsieur le ministre, les fameuses ONG, qui ne sont pas toujours positives pour l’économie, attendent le dernier moment pour contester l’installation classée devant le tribunal administratif. Ce n’est plus vivable !

Si nous voulons rétablir un peu d’égalité des chances en faveur de la croissance, il faut absolument adopter cet amendement, et je sais que M. le ministre ne pourra qu’y souscrire ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Bizet, pour présenter l’amendement n° 850 rectifié ter.

M. Jean Bizet. Cet amendement étant rigoureusement identique au précédent, je ne reprendrai pas l’argumentaire de notre collègue Michel Raison. Nous avons besoin d’aller plus vite et de ne pas laisser les pétitionnaires dans l’expectative sur un certain nombre de projets. Un délai de recours de deux mois semble suffisant.

Mme la présidente. L’amendement n° 1703, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 26

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l’article L. 515-27 du code de l’environnement, les mots : « d’un an » sont remplacés par les mots : « de quatre mois ».

La parole est à M. le ministre, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis du Gouvernement sur les amendements identiques nos 534 rectifié et 850 rectifié ter.

M. Emmanuel Macron, ministre. Il s’agit du même sujet, mais pas du même délai. (Sourires.)

Aujourd’hui, le délai de recours total est de dix-huit mois. En effet, le code de l’environnement prévoit un délai d’un an pour les recours à l’encontre des autorisations d’exploitation d’installation classée pour la protection de l’environnement. Nous avons simplifié la procédure, mais le délai d’un an subsiste, complété par un délai de six mois à compter de la mise en service de l’exploitation.

Dans le cadre de l’expérimentation qui aura vocation à s’étendre d’ici à dix-huit mois – je vous remercie d’avoir voté en ce sens –, ce délai de recours est ramené à deux mois, sans délai complémentaire après la mise en service. Les premiers retours d’expérience sur ces expérimentations, ainsi que les travaux du groupe de travail multipartite sur le sujet – je parle sous le contrôle de celles et de ceux d’entre vous qui ont pu en voir les effets – ont montré qu’il est pertinent de réduire le délai d’un an, mais aussi qu’un délai de deux mois est légèrement insuffisant.

Telles sont les informations qui me sont revenues, mais vous disposez d’une expérience in vivo que vous nous ferez peut-être partager sur ce sujet.

Je souscris totalement aux prémisses du raisonnement figurant dans l’exposé des motifs de ces amendements, cependant il est apparu, à la lumière des expérimentations en cours, que le délai de recours de deux mois que vous proposez était un peu court.

Le Gouvernement propose donc de réduire le délai de recours à quatre mois, pour laisser le temps aux recours de s’exprimer, sans pour autant exposer les exploitants à une trop forte insécurité juridique, puisque le délai de recours actuel est divisé par trois. Ce délai a été négocié avec les parties prenantes dans le cadre des groupes de travail sur la simplification du droit de l’environnement.

Ce délai de quatre mois a également été annoncé par le ministre de l’agriculture dans une communication en conseil des ministres en date du 18 février 2015, au cours de laquelle le ministre a fait le bilan des groupes de travail sur l’agriculture demandé par M. le Premier ministre.

À la lumière de ces travaux, je vous propose de réduire le délai de recours pour le passer de un an à quatre mois, et non à deux mois. Je précise que nous parlons ici de tous les arrêtés autorisant l’exploitation d’installations classées d’élevage.

C’est pourquoi je demande le retrait des amendements nos 534 rectifié et 850 rectifié ter au profit de l’amendement n° 1703 du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission spéciale émet un avis défavorable sur l’amendement n° 1703 du Gouvernement et s’en remet à la sagesse du Sénat - une sagesse très positive - sur les amendements nos 534 rectifié et 850 rectifié ter, qui visent à aligner le délai de recours ouvert aux tiers en matière d’installations d’élevage sur le délai de droit commun, à savoir deux mois.

Il faut vraiment lutter contre les recours abusifs et le droit à un recours effectif, que l’on ne peut contester, ouvre malheureusement la porte à certaines dérives en la matière.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 534 rectifié et 850 rectifié ter.

M. Daniel Gremillet. Monsieur le ministre, faites un effort ! Je souscris entièrement à l’avis de la commission spéciale.

Nous avons la possibilité de faire preuve de clairvoyance et de regagner en efficacité. Une large majorité de sénatrices et de sénateurs ont adopté l’amendement du Gouvernement. Maintenant, il faut voter le raccourcissement du délai de recours à deux mois, par souci de cohérence, d’autant plus, monsieur le ministre, et vous avez omis de le préciser, que le délai de recours de six mois à compter de la mise en activité de l’installation existe toujours, il ne faut pas l’oublier !

Je remercie la commission spéciale d’avoir eu le courage de soutenir notre amendement, qui vise à garantir plus de cohérence et d’efficacité sur le terrain. Je peux vous assurer, monsieur le ministre, que cette mesure est, là encore, attendue par l’ensemble des acteurs économiques.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour explication de vote.

M. Jean-Marc Gabouty. On nous a dit qu’en ramenant ce délai de recours à deux mois, c'est-à-dire le délai de droit commun, il n’y aurait plus de différence entre un arrêté autorisant l’exploitation d’une installation classée et un simple permis de construire. Cette comparaison n’est pas judicieuse, puisque la procédure applicable aux installations classées prévoit une information et des publicités préalables, contrairement au permis de construire. Les personnes qui sont amenées à former un recours sont donc informées non pas au moment de la délivrance de l’autorisation, mais beaucoup plus tôt, par voie d’affichage ou d’enquête publique, suivant le type de procédure.

Compte tenu, donc, de cette information préalable, le délai de recours de deux mois me paraît largement suffisant ; c’est pourquoi je soutiens l’amendement de M. Raison.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.

M. Alain Richard. Mes chers collègues, je voudrais attirer votre attention sur une autre dimension de ce problème.

La législation des installations classées, qui vise à protéger l’environnement et les zones d’habitation périphériques, est très ancienne. Elle fait l’objet d’une attention particulière de toutes les associations de défense de l’environnement.

Depuis le Grenelle de l’environnement, on fait l’effort, dans tous les domaines qui touchent à la législation de l’environnement, de rapprocher les points de vue des parties prenantes. Il me semble que c’est une bonne méthode. J’ai l’occasion de m’y consacrer en votre nom, puisque je suis l’un des trois représentants du Sénat qui siègent au Conseil national de la transition écologique. Dans ce cadre, Mme la ministre de l’écologie m’a demandé de piloter une commission restreinte qui s’efforce, avant qu’une mesure de ce type ne soit adoptée, de rapprocher les points de vue.

Je tiens à vous dire que nous sommes parvenus à faire accepter par les associations de défense de l’environnement une bonne partie des mesures de simplification, qui ne seront donc pas remises en cause. En revanche, le raccourcissement du délai de recours à deux mois se heurtera à de sérieuses objections.

Ce délai de recours n’est pas un fétiche. En effet, il faut prendre en compte le fait qu’une multitude d’installations classées sont autorisées et qu’une grande majorité d’entre elles le sont désormais sans enquête, après un simple enregistrement. La connaissance réelle de ces projets par le public est donc très incomplète et très inégale. (M. Roger Karoutchi proteste.)

Cher collègue, le Grenelle de l’environnement était une idée formidable, mais il ne faut pas qu’elle débouche sur de fausses promesses ! Tout le monde s’est assis autour de la table et on a décidé de rechercher un consensus entre les parties prenantes : si on l’oublie ensuite, les conséquences peuvent être négatives.

Je me permets donc de vous suggérer de prendre en compte cet équilibre entre les différentes préoccupations. Franchement, un délai de recours de quatre mois ne provoquera pas de réactions, un délai de deux mois en provoquera !

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. La raison commande d’aller vers un délai de deux mois. (Marques d’assentiment sur les travées de l’UMP.)

Cela présenterait l’avantage d’harmoniser les délais de procédure. Dans ce pays, nous avons beaucoup trop de délais différents, que ce soit en procédure pénale, en procédure civile ou en procédure administrative. En général, le délai de recours est de deux mois en droit administratif.

Il appartient au législateur de prendre ses responsabilités. Nous ne pouvons pas vivre sous la dictature de certaines associations ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UDI-UC.) Il en est qui jouent un rôle utile et nécessaire, mais d’autres n’ont pour objet que de tout bloquer ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UDI-UC.)

Puisque vous avez voulu faire passer ce texte en procédure accélérée, monsieur le ministre, vous ne pouvez pas être contre l’accélération des procédures ! (Rires et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Jacques Mézard. Faites un geste, je vous assure que nous y serons tous sensibles ! Nous en avons assez de ces délais et de ces recours qui s’accumulent...

En matière d’urbanisme et d’environnement, les délais sont parfois de sept, huit, neuf ou dix ans. Voilà comment on bloque le développement de l’économie ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Bizet, pour explication de vote.

M. Jean Bizet. Il est vrai que le débat n’avance pas bien vite,...

Mme Nicole Bricq. Pas vraiment, non !

M. Jean Bizet. ... mais ces questions sont éminemment importantes.

Je tiens, tout d’abord, à remercier la commission spéciale et Mme le rapporteur de l’avis de sagesse très appuyé qu’elle a émis sur ces deux amendements identiques, celui de Michel Raison et le mien.

Pour reprendre l’analyse du président Mézard, je crois qu’il faut s’efforcer d’harmoniser l’ensemble des délais de recours.

J’ai bien entendu les remarques et les précisions formulées par Alain Richard, mais je vous rappelle que deux plus six égale huit ! (M. Roger Karoutchi opine.)

M. François Pillet, corapporteur de la commission spéciale. À peu près... (Sourires.)

M. Jean Bizet. Le délai total est donc de huit mois.

Voilà mon principal argument : nous avons pour objectif d’approfondir ce que l’on appelle le marché intérieur, lequel désigne, selon l’approche communautaire, l’ensemble des vingt-huit États membres, et essentiellement la France et l’Allemagne.

Or, quand on regarde du côté de nos amis allemands, on s’aperçoit que le différentiel de réactivité est à leur avantage. La conséquence en est une compétitivité de l’industrie et de l’agriculture bien supérieure à celle de la France.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Raison, pour explication de vote.

M. Michel Raison. Je ne retirerai pas mon amendement, et ce d’autant moins qu’il a reçu un soutien appuyé de Mme le rapporteur.

Monsieur le ministre, vous étiez moins frileux en début de séance, et j’aurais pu moi-même déposer cet amendement, au demeurant bien timide, si j’avais eu peur que le mien ne soit rejeté.

M. Jean-Claude Lenoir. Un amendement « petit bras » !

M. Michel Raison. Ces « bonnes » associations, monsieur Richard, je les respecte ! Étant de bonne humeur, j’ai décidé, vous le voyez, d’être diplomate (Sourires.),…

M. Alain Richard. Ce n’est pas moi qui ai fait le Grenelle !

M. Michel Raison. ... mais je remarque que le respect en la matière est rarement réciproque !

À de nombreuses occasions en effet, dans mon département et ailleurs, j’ai pu constater que certaines associations ne respectaient pas les chefs d’entreprise.

M. Alain Richard. Il faut le dire à Jean-Louis Borloo !

M. Michel Raison. Je pense aux chefs d’entreprise qui ont du mal à s’endormir le soir parce qu’ils ne sont pas certains de pouvoir honorer leurs échéances, qui hypothèquent parfois leur maison et qui prennent des risques !

Et ces associations, qui bénéficient de diverses subventions versées par les collectivités, se permettent de les assigner devant le tribunal administratif, les plongeant ainsi dans les difficultés et l’angoisse !

Je veux bien que l’on soit gentil, mais il y a tout de même des limites ! (Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. Jean-Louis Carrère. Ce que vous voulez dire, en fait, c’est que vous vous êtes trompés !

Mme la présidente. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.

Mme Évelyne Didier. Une fois n’est pas coutume, monsieur le ministre, je plaiderai pour le délai de quatre mois. Deux mois sont certes suffisants pour que des associations, d’ores et déjà mobilisées, fassent un recours. Elles sont prêtes ! (M. Roger Karoutchi opine.) Pour la population, en revanche, c’est différent. (M. Roger Karoutchi fait une moue dubitative.) Je vous fais part de mon expérience, monsieur Karoutchi ! Elle vaut ce qu’elle vaut, mais c’est mon témoignage.

Pour des projets d’urbanisme lourds ou du type de ceux dont nous débattons – une autorisation pour une installation ICPE n’est pas aussi ordinaire qu’un permis de construire ! –, on s’aperçoit que le délai est vite passé, notamment dans les collectivités qui souhaitent procéder à une information la plus large possible. Il faut le temps de recevoir le dossier, de diffuser une information municipale aux habitants, d’organiser éventuellement une réunion d’information...

Je ne crois pas que monter un projet dans la précipitation pour éviter les contestations de ceux qui « posent problème » soit la bonne méthode pour le faire accepter et adopter.

Tout compte fait, dans ce cas, deux mois, c’est trop court. Quatre mois, en revanche, c’est équilibré.

Que cette position soit de repli ou non, peu importe... Par rapport à la situation antérieure, la présente proposition représente un gain de temps et permet de donner satisfaction. Ce juste équilibre permettrait de « mettre dans le coup » toute la population. Encore une fois, je parle non des associations, mais de l’ensemble de nos concitoyennes et de nos concitoyens. (M. Jean Desessard applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. François Patriat, pour explication de vote.

M. François Patriat. J’entends bien les préoccupations essentielles qui s’expriment dans ce débat.

Ainsi, Alain Richard plaide pour l’équilibre. Mais cet équilibre est-il toujours respecté ?

Voilà quinze jours, j’inaugurais chez M. de Raincourt un méthaniseur agricole. Ce projet, qui, je le rappelle, relève de la transition énergétique et des énergies renouvelables, a nécessité 5 millions d’euros d’investissement, et il a fallu six ans pour le réaliser !

Toujours dans le cadre de la transition énergétique, j’essaie actuellement d’installer les 600 éoliennes dont la Bourgogne a, au minimum, besoin. Cela prendra dix ans !

Je ne sais pas pourquoi il faudrait être encore plus magnanime en accordant un délai supplémentaire à des associations qui, elles, ne nous laissent aucun répit et vont jusqu’au bout des limites prévues par la loi. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

Je soutiens ce texte et votre démarche, monsieur le ministre, car il faut faciliter les projets, soutenir l’économie et débloquer les rouages grippés de notre pays. Mais il nous faut aussi envoyer un signe fort aux territoires et aux acteurs du monde rural, pour leur montrer que l’on peut aller plus vite et avoir de meilleurs résultats encore ! Je me prononcerai donc en faveur du délai de deux mois. (Bravo ! et applaudissements sur les mêmes travées.)

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Kern, pour explication de vote.

M. Claude Kern. Je le dis par expérience, le délai de deux mois est suffisant.

M. Claude Kern. En effet, plus les délais sont longs, plus les recours abusifs sont nombreux.

Et ce n’est pas parce que le délai sera de deux mois, madame Didier, que l’on oubliera les habitants : eux aussi auront largement le temps de réagir.

Les maires n’attendent pas d’obtenir le permis pour informer la population : ils le font toujours en amont, pour que les habitants soient associés à des projets qui, à défaut, n’aboutiraient jamais.

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Vous venez de nous expliquer, monsieur le ministre, qu’il fallait raccourcir les délais pour en quelque sorte libérer l’activité et redonner du souffle à notre économie.

En réalité – je le précise à l’attention de Mme Didier –, il s’agit ici d’un délai non pas de deux mois, mais bien de six mois plus deux mois, au lieu de six mois plus quatre mois. Les collectivités auront donc en fait huit mois devant elles.

Si la population et les associations n’ont pas trouvé de base pour un recours dans ce délai de huit mois, pourquoi ne pas alors leur laisser encore deux ou trois ans ?... À un moment, il faut bien fixer une limite !

Si vous deviez soutenir, monsieur le ministre, que votre proposition a davantage de sens que le délai de huit mois, cela signifierait que vous voulez en fait freiner les choses, par opposition à la commission spéciale qui, elle, souhaite encourager la croissance !

À votre place, je retirerais donc mon amendement ou, à défaut, j’émettrais un avis de sagesse sur les amendements soutenus par la commission spéciale. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC. – M. le ministre sourit.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre. (Marques de satisfaction sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. Emmanuel Macron, ministre. Je vous le dis pour éviter tout malentendu : sans le ministre qui vous parle, monsieur Karoutchi, vous cumuleriez encore les procédures et on ne se poserait pas la question des délais !

M. Roger Karoutchi. Nous ferons ériger une statue à votre effigie dans la cour du Sénat ! (Sourires.)

M. Jean Bizet. N’ayez pas peur de Ségolène, monsieur le ministre ! (Nouveaux sourires.)

M. Emmanuel Macron, ministre. Je vous ai indiqué quel était le résultat de l’arbitrage gouvernemental et vous ai invités à retirer ces amendements. Mais si tel ne devait pas être le cas, comme cela semble ressortir du présent débat, je m’en remettrais à la sagesse du Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UDI-UC et du RDSE.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 534 rectifié et 850 rectifié ter.

(Les amendements sont adoptés.) – (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UDI-UC et du RDSE.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 26, et l’amendement n° 1703 n’a plus d’objet.

Articles additionnels après l’article 26
Dossier législatif : projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques
Article 26 ter (Texte non modifié par la commission)

Article 26 bis

(Non modifié)

La seconde phrase de l’article L. 515-27 du code de l’environnement est supprimée. – (Adopté.)

Article 26 bis
Dossier législatif : projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques
Article 27

Article 26 ter

(Non modifié)

L’article L. 515-27 du code de l’environnement est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« L’affichage des avis d’ouverture d’enquête publique, pour les installations d’élevage soumises à autorisation, ou de consultation du public, pour les installations soumises à enregistrement, est réalisé dans les mêmes conditions de forme que celles prévues par le code de l’urbanisme pour l’affichage du permis de construire.

« Pour les installations d’élevage soumises au régime de l’enregistrement, l’affichage est réalisé à partir de la réception du dossier complet et régulièrement constitué. »

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, sur l’article.

M. Michel Le Scouarnec. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 26 ter dont nous allons débattre complète l’article L. 515-27 du code de l’environnement.

Cet article prévoit d’apporter une réponse aux exploitants agricoles qui, lorsqu’ils envisagent de créer une installation d’élevage, sont confrontés à des normes de plus en plus nombreuses.

L’objectif de simplification des autorisations pour les installations d’élevage qui, au demeurant, peut sembler louable, n’est en fait qu’une mesure supplémentaire de libéralisation de l’économie, au détriment de l’environnement.

Si elles sont nombreuses et parfois pénalisantes, les contraintes réglementaires sont aussi issues d’un besoin de régulation des activités agricoles. Les réduire à une somme de contraintes serait pour le moins simpliste.

Permettez-moi de parler de la situation de ma région, la Bretagne.

La filière agricole bretonne représente 7 % de la surface agricole française, mais 50 % des élevages de porcs, 50 % des élevages de volailles et 30 % de ceux de bovins ! Les mesures d’allégement de la réglementation applicable aux agriculteurs sont donc particulièrement attendues dans cette région, mais pas au détriment de la protection de l’environnement.

Les actions menées localement sont souvent source d’enseignement, par la qualité tant de la concertation mise en œuvre que des actions concrètes qui peuvent en découler.

Je profite de cette prise de parole sur l’article 26 ter pour évoquer la réussite d’une réflexion collective en matière de protection d’un écosystème dans le cadre d’une démarche de bassin versant sur la commune de Locoal-Mendon.

La ria d’Etel, bras de mer situé entre Auray et Lorient, dans le Morbihan, est alimentée par un grand versant en eau douce qui fournit les éléments nutritifs nécessaires au plancton. Celui-ci nourrit les 300 tonnes d’huîtres creuses produites, chaque année, par cinquante entreprises conchylicoles.

Ce sont 400 exploitations agricoles à dominante « élevage », des industries agroalimentaires et des entreprises de transformation qui participent à l’activité agricole et agroalimentaire de ce territoire.

Pour toutes ces raisons, la qualité de l’eau est essentielle. En dépendent la qualité sanitaire des coquillages et le classement des zones conchylicoles, car les bactéries peuvent être transmises par les déjections humaines ou animales. La qualité de l’assainissement et des pratiques agricoles est donc fondamentale.

Ce besoin de régulation a donné naissance à un travail de concertation absolument nécessaire entre tous les acteurs – élus, professionnels, consulaires et associations –, piloté par la chambre d’agriculture. Une quarantaine de personnes ont ainsi échangé, afin de concrétiser un plan d’action commun pour la préservation de la qualité de l’eau.

Cet exemple illustre bien la complexité, sur le terrain, de la protection de notre environnement et la nécessité de ne pas précipiter le chantier de la simplification des normes agricoles.

Je suis certain, mes chers collègues, que vous appréciez les huîtres de qualité, avec ou sans vin blanc... (Sourires.)