M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'article unique constituant l’ensemble du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des États-Unis d’Amérique relatif au renforcement de la coopération en matière d’enquêtes judiciaires en vue de prévenir et de lutter contre la criminalité grave et le terrorisme.

(Le projet de loi est adopté.) – (Applaudissements au banc des commissions et sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'État. Je tiens à remercier Mme la rapporteur du travail accompli et de son rapport très complet, ainsi que M. le président de la commission, tous les intervenants et tous les sénateurs présents dans cet hémicycle.

Cet accord constitue un outil véritablement indispensable dans la lutte que nous menons, au-delà de la question de la garantie des visas pour nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des États-Unis d'Amérique relatif au renforcement de la coopération en matière d'enquêtes judiciaires en vue de prévenir et de lutter contre la criminalité grave et le terrorisme
 

4

Nomination de membres d’un organisme extraparlementaire

M. le président. Je rappelle que la commission des lois a proposé des candidatures pour le Conseil national de la mer et des littoraux.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame M. Pierre Frogier membre titulaire du Conseil national de la mer et des littoraux et M. Thani Mohamed Soilihi membre suppléant de cet organisme.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq, est reprise à midi.)

M. le président. La séance est reprise.

5

Article 3 (priorité) (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif au renseignement
Article 3 (priorité)

RENSEIGNEMENT ET NOMINATION DU PRÉSIDENT DE LA COMMISSION NATIONALE DE CONTRÔLE DES TECHNIQUES DE RENSEIGNEMENT

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi et d’une proposition de loi organique dans les textes de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au renseignement (texte n° 424, texte de la commission n° 461, rapport n° 460, avis n° 445), et de la proposition de loi organique relative à la nomination du président de la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (texte n° 430, texte de la commission n° 462, rapport n° 460).

projet de loi relatif au renseignement (suite)

M. le président. Dans la discussion des articles du texte de la commission sur le projet de loi relatif au renseignement, nous avons entamé hier l’examen de l’article 3, appelé en priorité, dont je rappelle les termes :

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi relatif au renseignement
Article 1er (début)

Article 3 (priorité) (suite)

Le titre V du livre VIII du code de la sécurité intérieure, tel qu’il résulte de l’article 2 de la présente loi, est complété par des chapitres III et IV ainsi rédigés :

« CHAPITRE III

« De la sonorisation de certains lieux et véhicules et de la captation d’images et de données informatiques

« Art. L. 853-1. – I. – Dans les conditions prévues au chapitre Ier du titre II du présent livre, peut être autorisée, lorsque les renseignements ne peuvent être recueillis par un autre moyen légalement autorisé, l’utilisation de dispositifs techniques permettant la captation, la fixation, la transmission et l’enregistrement de paroles prononcées à titre privé ou confidentiel, ou d’images dans un lieu privé.

« II. – Par dérogation à l’article L. 821-4, l’autorisation est délivrée pour une durée maximale de deux mois, renouvelable dans les mêmes conditions de durée.

« III. – Les dispositifs techniques mentionnés au I ne peuvent être utilisés que par des agents appartenant à l’un des services mentionnés aux articles L. 811-2 et L. 811-4 dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État.

« IV. – Le service autorisé à recourir à la technique mentionnée au I rend compte à la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement de sa mise en œuvre. La commission peut à tout moment demander que cette opération soit interrompue et que les renseignements collectés soient détruits.

« V. – Si la mise en œuvre de cette technique nécessite l’introduction dans un véhicule ou dans un lieu privé, cette mesure s’effectue selon les modalités définies à l’article L. 853-3.

« Art. L. 853-2. – I. – Dans les conditions prévues au chapitre Ier du titre II du présent livre, peut être autorisée, lorsque les renseignements ne peuvent être recueillis par un autre moyen légalement autorisé, l’utilisation de dispositifs techniques permettant :

« 1° D’accéder à des données informatiques stockées dans un système informatique, les enregistrer, les conserver et les transmettre ;

« 2° D’accéder à des données informatiques, les enregistrer, les conserver et les transmettre, telles qu’elles s’affichent sur un écran pour l’utilisateur d’un système de traitement automatisé de données, telles qu’il les y introduit par saisie de caractères ou telles qu’elles sont reçues et émises par des périphériques audiovisuels.

« II. – Par dérogation à l’article L. 821-4, l’autorisation est délivrée pour une durée maximale de deux mois, renouvelable dans les mêmes conditions de durée.

« III. – Les dispositifs techniques mentionnés au I ne peuvent être utilisés que par des agents appartenant à l’un des services mentionnés aux articles L. 811-2 et L. 811-4 dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État.

« IV. – Le service autorisé à recourir à la technique mentionnée au I rend compte à la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement de sa mise en œuvre. La commission peut à tout moment demander que cette opération soit interrompue et que les renseignements collectés soient détruits.

« V. – Si la mise en œuvre de cette technique nécessite l’introduction dans un véhicule ou dans un lieu privé, cette mesure s’effectue selon les modalités définies à l’article L. 853-3.

« Art. L. 853-3 (nouveau). – I. – Dans les conditions prévues au chapitre Ier du titre II du présent livre, lorsque les renseignements ne peuvent être recueillis par un autre moyen légalement autorisé, l’introduction dans un véhicule ou dans un lieu privé à la seule fin de mettre en place, d’utiliser ou de retirer les dispositifs techniques mentionnés aux articles L. 851-6, L. 853-1 et L. 853-2 peut être autorisée. S’il s’agit d’un lieu d’habitation ou pour l’utilisation de la technique mentionnée au 1° du I de l’article L. 853-2, l’autorisation ne peut être donnée qu’après avis exprès de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, statuant en formation restreinte ou plénière.

« L’introduction dans un véhicule ou un lieu privé ne peut être effectuée que par des agents individuellement désignés et habilités appartenant à l’un des services mentionnés aux articles L. 811-2 et L. 811-4 dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État.

« II. – La demande justifie qu’aucune mesure alternative ne peut être effectuée. Elle mentionne toute indication permettant d’identifier le lieu, son usage et, lorsqu’ils sont connus, son propriétaire ou toute personne bénéficiant d’un droit, ainsi que la nature détaillée du dispositif envisagé.

« III. – Par dérogation à l’article L. 821-4, l’autorisation, spécialement motivée, est délivrée pour une durée maximale de trente jours et est renouvelable dans les mêmes conditions de durée que l’autorisation initiale. Elle ne vaut que pour les actes d’installation, d’utilisation, de maintenance ou de retrait des dispositifs techniques.

« IV. – Le service autorisé à recourir à l’introduction dans un véhicule ou un lieu privé rend compte à la commission de sa mise en œuvre. La commission peut à tout moment demander que cette opération soit interrompue et que les renseignements collectés soient détruits.

« CHAPITRE IV

« Des mesures de surveillance internationale

« Art. L. 854-1. – I. – Le Premier ministre ou les personnes spécialement déléguées par lui peuvent autoriser, aux seules fins de protection des intérêts fondamentaux de la Nation mentionnés à l’article L. 811-3, la surveillance et le contrôle des communications qui sont émises ou reçues à l’étranger. Ces mesures sont exclusivement régies par le présent article.

« L’interception des communications concernées et l’exploitation ultérieure des correspondances sont soumises à autorisation du Premier ministre ou des personnes spécialement déléguées par lui.

« Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, définit les conditions d’exploitation, de conservation et de destruction des renseignements collectés. Ces renseignements ne peuvent être collectés, transcrits ou extraits pour d’autres finalités que celles mentionnées à l’article L. 811-3.

« Un décret en Conseil d’État non publié, pris après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement et porté à la connaissance de la délégation parlementaire au renseignement, précise, en tant que de besoin, les modalités de mise en œuvre de la surveillance et du contrôle des communications prévus au présent I.

« II. – Lorsque les correspondances interceptées renvoient à des numéros d’abonnement ou à des identifiants techniques rattachables au territoire national ou à des personnes qui faisaient l’objet d’une autorisation d’interception de sécurité en application de l’article L. 852-1 à la date à laquelle elles ont quitté le territoire national, celles-ci sont exploitées dans les conditions prévues à l’article L. 852-1 et conservées et détruites dans les conditions prévues aux articles L. 822-2 à L. 822-4, sous le contrôle de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. Le délai de conservation des correspondances court toutefois à compter de leur première exploitation. Les données de connexion associées à ces correspondances sont conservées et détruites dans les conditions prévues aux articles L. 822-2 à L. 822-4.

« III. – De sa propre initiative ou sur réclamation de toute personne y ayant un intérêt direct et personnel, la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement s’assure que les mesures mises en œuvre au titre du présent article respectent les conditions fixées par le présent article, par les décrets pris pour son application et par les décisions d’autorisation du Premier ministre ou de ses délégués. »

M. le président. Je suis saisi de douze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 61, présenté par Mmes Cukierman, Demessine et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéas 2 à 20

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Compte tenu du caractère très intrusif des techniques de sonorisation, de captation d’images et de récupération de données informatiques dans les lieux privés, nous ne pouvons que nous féliciter que la commission des lois les ait soumises à un régime inspiré des dispositions applicables en matière judiciaire et qu’elle ait renforcé les garanties légales applicables. Néanmoins, en dépit de la gravité des atteintes que portent au droit, notamment au principe d’inviolabilité du domicile, ces techniques d’introduction dans un lieu privé, un véhicule ou un système informatique, leur mise en œuvre dans les conditions prévues à l’article 3 du projet de loi n’a pas été placée sous le contrôle du juge judiciaire, alors même que notre droit la prévoit déjà dans le cadre de procédures judiciaires.

Initialement prévue dans le cadre d’une information judiciaire, donc sous le contrôle d’un juge d’instruction, la possibilité d’utiliser ces techniques a été étendue aux enquêtes préliminaires portant sur des faits graves de délinquance, des affaires de criminalité organisée et des actes terroristes, lesquelles sont placées sous le double contrôle du procureur de la République et du juge des libertés et de la détention. De la sorte, la sonorisation et la captation d’images et de données informatiques ne peuvent être mises en œuvre que si une infraction déterminée est soupçonnée. De fait, le recours à ces mesures particulièrement intrusives n’est légitime que lorsqu’il existe des raisons de soupçonner qu’un individu a commis, est sur le point de commettre ou prépare une infraction pénale.

Dans la mesure où l’utilisation de ces techniques est déjà permise dans des conditions très larges, et étant donné qu’il convient, selon nous, de la maintenir sous le contrôle du juge judiciaire, nous invitons le Sénat à supprimer les alinéas 2 à 20 de l’article 3 du projet de loi.

M. le président. L'amendement n° 104, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 4, 9 et 16, première phrase

Après les mots :

les renseignements,

insérer les mots :

relatifs aux finalités prévues aux 1°, 4° et 6° de l’article L. 811–3

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Cet amendement vise à restreindre l’utilisation des techniques de recueil de renseignements les plus intrusives à trois finalités déterminées : l’indépendance nationale, l’intégrité du territoire et la défense nationale ; la prévention du terrorisme ; la prévention de la criminalité et de la délinquance organisées.

M. le président. L’amendement n° 17 rectifié quater n’est pas soutenu.

Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 83 est présenté par M. Hyest.

L'amendement n° 160 rectifié est présenté par MM. Sueur, Delebarre, Boutant, Reiner et Gorce, Mmes S. Robert et Jourda, MM. Bigot, Raynal, Duran, Desplan et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 5

Remplacer les mots :

deux mois

par les mots :

trente jours

La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour présenter l’amendement n° 83.

M. Jean-Jacques Hyest. Il faut bien mesurer que le chapitre III que l’article 3 du projet de loi introduit au titre V du livre VIII du code de la sécurité intérieure s’applique non seulement à la lutte antiterroriste, dont nous avons débattu hier, mais à l’ensemble des cas dans lesquels les techniques de sonorisation et de captation d’images et de données informatiques pourront être mises en œuvre. Sans doute le recours à ces techniques devrait-il rester exceptionnel, puisqu’il supposera de prouver que d’autres méthodes ne peuvent pas être utilisées. Reste que la pose de micros et de caméras dans un lieu ou dans un véhicule privé n’est tout de même pas une mesure anodine !

Pour ma part, je suis convaincu que la mesure la plus protectrice de la vie privée consiste à autoriser l’emploi de telles techniques pour des durées relativement brèves. En effet, la nécessité de solliciter plus fréquemment l’autorisation de poursuivre l’opération contraint le service de renseignement à faire connaître plus rapidement les données utiles qu’il a éventuellement recueillies. Par ailleurs, si rien d’anormal n’a été découvert, la surveillance doit cesser dans un délai raisonnable.

De ce point de vue, la durée de deux mois prévue à l’alinéa 5 de l’article 3 pour l’utilisation des techniques de sonorisation et de captation d’images et de données informatiques n’est pas conforme au principe de proportionnalité dont le projet de loi prévoit l’application, d’autant que ces techniques, à l’instar de la géolocalisation, ont vocation à être efficaces dans un délai bref : si elles n’ont pas donné de résultats au bout de trente jours, elles n’en donneront pas davantage dans le mois qui suit. Sans compter qu’une sonorisation, par exemple, a de bonnes chances d’être découverte assez rapidement par ceux qui veulent échapper à la surveillance que le législateur cherche à organiser.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l'amendement n° 160 rectifié.

M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement, identique à celui qui vient d’être présenté, a été déposé par mon groupe dans le même état d’esprit et pour les mêmes motifs que ceux qui animent M. Hyest. J’ajoute qu’il se fonde sur des considérations d’ordre constitutionnel. Depuis 1999, en effet, le Conseil constitutionnel, auquel le projet de loi sera déféré, considère le droit au respect de la vie privée comme une composante de la liberté personnelle proclamée à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, dont résultent également le droit au secret des correspondances et le principe de l’inviolabilité du domicile.

Ainsi, dans sa décision du 2 mars 2004 relative à la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, le Conseil constitutionnel a invoqué les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789 en considérant qu’« il incombe au législateur d’assurer la conciliation entre, d’une part, la prévention des atteintes à l’ordre public et la recherche des auteurs d’infractions, toutes deux nécessaires à la sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle, et, d’autre part, l’exercice des libertés constitutionnellement garanties ; qu’au nombre de celles-ci figurent la liberté d’aller et venir, l’inviolabilité du domicile privé, le secret des correspondances et le respect de la vie privée, protégés par les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789 ».

Comme M. Hyest vient de le faire observer, la durée de deux mois prévue à l’alinéa 5 de l’article 3 pour l’utilisation de techniques représentant une intrusion effective, certes justifiée par des nécessités impérieuses, notamment de lutte antiterroriste, ne serait pas conforme au principe de proportionnalité, que le projet de loi énonce parmi les principes sur lesquels il se fonde.

M. le président. L’amendement n° 18 rectifié quater n’est pas soutenu.

L'amendement n° 66 rectifié bis, présenté par MM. Malhuret et Commeinhes, Mme Micouleau, MM. B. Fournier, Delattre, Falco et Fouché, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lenoir et de Legge, Mme Morhet-Richaud, MM. Bignon et Milon, Mmes N. Goulet et Cayeux, MM. Vial, Laufoaulu, Cadic et Kern, Mmes Imbert et Deroche et MM. Dériot, Carle et Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« … – Les dispositifs techniques utilisés à cette fin garantissent que les seules informations captées sont celles effectivement échangées lors d'une conversation sortant du lieu privé. Toute information recueillie accidentellement par ces dispositifs hors de ce cadre est détruite immédiatement.

La parole est à M. Claude Malhuret.

M. Claude Malhuret. Le présent amendement est assez différent de ceux qui viennent d’être présentés, mais il porte sur le même thème. Aussi serai-je assez bref.

Un même outil de captation des informations émises et reçues par le clavier et les périphériques audiovisuels d’un système de traitement automatisé de données peut être utilisé pour deux finalités distinctes. La première est la captation des communications passées entre une personne surveillée et son correspondant situé en un autre lieu, avant qu’elles ne soient chiffrées et donc rendues inaccessibles aux agents de renseignement par d’autres moyens. La seconde est la captation de paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ou d’images dans un lieu privé.

MM. Hyest et Sueur viennent d’expliquer les problèmes qui se posent sur le plan juridique, et même constitutionnel.

Le présent amendement vise à empêcher que les outils prévus à l’article L. 853-2 du code de la sécurité intérieure puissent être utilisés pour obtenir des informations qui auraient nécessité la mise en œuvre des dispositions de l’article L. 853-1 du même code, plus protectrices, en restreignant la possibilité d’opérer une captation aux moments où une communication est effectivement en cours.

Cet amendement, ainsi qu’un autre que j’ai présenté hier soir, tend à garantir le principe de « privacy by design », c’est-à-dire de respect intrinsèque de la vie privée par le dispositif lui-même, qui revêtira bientôt le caractère d’une obligation réglementaire au sein de l’Union européenne ; il est énoncé, par exemple, à l’article 23 de la proposition de règlement relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données.

M. le président. L'amendement n° 21 rectifié ter, présenté par MM. Hyest, Allizard, G. Bailly, Béchu, Bignon, Bizet et Bonhomme, Mme Bouchart, MM. Bouchet, Bouvard, Buffet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, MM. Cantegrit et Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Commeinhes, Cornu, Dallier, Danesi, Darnaud et Dassault, Mmes Deroche, Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et di Folco, M. Doligé, Mme Duchêne, M. Dufaut, Mme Duranton, MM. Duvernois et Emorine, Mme Estrosi Sassone, MM. B. Fournier, J.P. Fournier, Frassa et Frogier, Mme Garriaud-Maylam, MM. J.C. Gaudin, J. Gautier, Genest et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Gournac, Grosperrin, Guené, Houel et Houpert, Mme Hummel, MM. Huré et Husson, Mme Imbert, M. Joyandet, Mme Kammermann, MM. Karoutchi et Kennel, Mme Lamure, MM. Laufoaulu, D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Lenoir, P. Leroy et Longuet, Mme Lopez, MM. Magras, Malhuret, Mandelli, A. Marc, Masclet et Mayet, Mme Mélot, MM. Milon et de Montgolfier, Mme Morhet-Richaud et MM. Morisset, Mouiller, Nachbar, Nègre, de Nicolaÿ, Nougein, Paul, Pellevat, Pierre, Pillet, Pointereau, Portelli, Reichardt, Revet, Saugey, Savary, Sido, Vasselle, Vendegou, Vogel, Retailleau et Gremillet, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

« II. – Par dérogation à l’article L. 821-4, l’autorisation de mise en œuvre de la technique mentionnée au 1° du I du présent article est délivrée pour une durée maximale de trente jours et celle mentionnée au 2° du même I pour une durée maximale de deux mois. L’autorisation est renouvelable dans les mêmes conditions de durée.

La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.

M. Jean-Jacques Hyest. Cet amendement vise à opérer, pour des cas différents, la même réduction de délai que l’amendement n° 83.

M. le président. L’amendement n° 40, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

Alinéa 12

1° Remplacer les mots :

de deux

par les mots :

d’un

2° Compléter cet alinéa par les mots :

pour une même durée et après autorisation judiciaire

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement s’inscrit dans la lignée des amendements présentés par MM. Hyest et Sueur relativement à la première partie de l’article 3 du présent projet de loi. Il tend à ramener de deux mois à un seul le délai prévu pour l’autorisation de mesures très graves, en particulier la captation de l’ensemble des données accumulées sur le disque dur d’un ordinateur non pas pendant trente jours, mais depuis le début de son utilisation.

Cette observation m’a remis en mémoire les auditions préparatoires à l’examen du projet de loi dont est issue la loi du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme. Je me souviens que des juges antiterroristes nous ont signalé leur besoin de moyens complémentaires pour recueillir les informations nécessaires à leurs instructions ; ils nous demandaient plus que ce qui était prévu dans le projet de loi et ils avaient des doutes sur ce que la loi leur permettrait. Voilà que, pour les services de renseignement, tout sera possible, sans limite, alors que les juges antiterroristes nous demandaient plus pour pouvoir instruire !

J’ai entendu les arguments présentés en particulier par M. le président de la commission des lois. Assurément, la police administrative est importante, car elle vise à prévenir, ce qui vaut mieux que punir. Toutefois, des limites doivent être fixées. En effet, si les services de renseignement disposent de tous les moyens de recueil d’informations, mais que les magistrats instructeurs n’en bénéficient pas aussi, nous pourrions aller au-devant d’évolutions dangereuses. Mes chers collègues, je ne voudrais pas que les services de renseignement soient plus efficaces que les juges instructeurs !

Je répète que la mesure consistant à recueillir les données stockées sur un disque dur non pas pendant un mois, mais depuis la construction de l’ordinateur, est d’une particulière gravité.

Si, une fois la surveillance menée pendant un mois, rien d’anormal n’a été constaté, il n’est pas nécessaire de la poursuivre. Si des faits anormaux ont été découverts, l’affaire doit être transmise aux autorités judiciaires !

M. le président. L’amendement n° 105, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 15

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ... - Le nombre maximal de sonorisations pouvant être autorisées simultanément est arrêté par le Premier ministre après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. La décision fixant ce contingent et sa répartition entre les ministères mentionnés à l’article L. 821-2 est portée à la connaissance de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. La sonorisation est une technique extrêmement attentatoire aux libertés individuelles, du fait notamment de son caractère totalement non discriminant des personnes surveillées. C’est pourquoi il importe de limiter le nombre des sonorisations autorisées, de même que sont limitées les interceptions de sécurité, en particulier pour connaître leur nombre.

Voici, mes chers collègues, ce qu’a déclaré Jean-Marie Delarue, président de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité : « On dit qu’on va pouvoir sonoriser les appartements : est-ce que c’est 20, est-ce que c’est 200, est-ce que c’est 2 000, est-ce que c’est 20 000 par an ? » M. Delarue estime ainsi que le Gouvernement doit être « un peu précis sur ses intentions ». Comme il le dit lui-même, « une société où il y a 200 appartements sonorisés, on peut penser que c’est pour les criminels et les terroristes. Une société où il y en a 200 000, c’est ″La Vie des autres″ ! »