Mme la présidente. L'amendement n° 106 rectifié, présenté par Mmes Schillinger, Bricq et Emery-Dumas, MM. Bérit-Débat et Caffet, Mmes Campion, Claireaux et Génisson, MM. Daudigny, Durain, Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Yonnet, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Lepage et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 2122-6 du code du travail, il est inséré un article L. 2122-6-… ainsi rédigé :

« Art. L. 2122-6-… – Pour les personnels mentionnés à l’article L. 123-2 du code de la sécurité sociale au sein des branches du régime social des indépendants et de la mutualité sociale agricole, le seuil fixé au 3° de l’article L. 2122-5 du présent code est apprécié au regard des suffrages exprimés à l’élection des membres représentant les salariés aux commissions paritaires nationales instituées par leur convention collective nationale spécifique.

« Un décret en Conseil d’État définit les modalités d’application du présent article. »

Cet amendement a déjà été défendu.

L'amendement n° 122 rectifié, présenté par Mme Laborde et MM. Mézard, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Requier, est ainsi libellé :

Après l'article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 2122-6 du code du travail, il est inséré un article L. 2122-6-… ainsi rédigé :

« Art. L. 2122-6-… – Dans les branches concernant les activités exercées à l'article L. 123-2 du code de la sécurité sociale, le seuil fixé au 3° de l'article L. 2122-5 du présent code est apprécié au regard des suffrages exprimés à l'élection des membres représentant les salariés aux commissions paritaires nationales instituées par leur convention collective nationale spécifique.

« Un décret en Conseil d'État définit les modalités d'application du présent article. »

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Cet amendement prévoit la mise en place d'un dispositif électoral spécifique pour permettre aux agents de direction des organismes de protection sociale d'être représentés dans le cadre des commissions paritaires nationales instituées par les conventions collectives spéciales prévues par l'article L. 123-2 du code de la sécurité sociale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La convention collective des agents de direction des organismes de protection sociale comme la Mutuelle sociale agricole ou le régime social des indépendants est un problème très spécifique. Je connais bien la MSA, mais moins le RSI. Je demande donc l’avis du Gouvernement sur ces quatre amendements qui sont presque identiques, même si l’amendement n° 106 rectifié diffère légèrement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Ces quatre amendements sont quasiment identiques, les uns ayant simplement une sensibilité un peu plus MSA, les autres un peu plus RSI.

La question posée ici est de savoir s’il faut adapter la mesure de représentativité syndicale pour certains personnels de la MSA ou du RSI, qui, actuellement, pour partie, ne peuvent pas voter aux élections professionnelles. C’est une vraie question, qui mérite d’être examinée. Néanmoins, je le dis clairement, il n’y a pas de réponse évidente. C’est pourquoi j’ai demandé aux services de la Direction générale du travail – j’en profite pour saluer la présence parmi nous ce soir du directeur général du travail – d’expertiser cette question, en lien avec le ministère des affaires sociales, car le ministère du travail n’est pas le seul concerné.

Comment permettre la représentativité et la représentation de ces personnels ? La prochaine mesure de représentativité aura lieu en 2017. Nous avons donc le temps d’ici là de trouver une solution appropriée, négociée et concertée avec l’ensemble des organisations syndicales. Il est indispensable d’associer à cette démarche le Haut Conseil du dialogue social. Le Sénat sera bien évidemment tenu informé des résultats de ces réflexions.

À ce stade, je demande donc le retrait de ces amendements, étant entendu que je prends l’engagement formel devant vous d’étudier la question.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur les amendements nos 105 rectifié et 185 rectifié bis.

Mme Nicole Bricq. Je remercie M. le ministre d’avoir pris l’engagement d’étudier le sujet de façon précise. J’accepte donc de retirer l’amendement n° 105 rectifié.

Quoi qu’il en soit, nous avons été sensibles, comme les autres groupes dans cet hémicycle, à la situation des agents de direction, d’autant que nous avions cru comprendre qu’il y avait urgence. Puisque le Gouvernement nous assure que la question peut attendre 2017, cela nous laisse un peu de temps pour régler le problème.

Monsieur Cardoux, vous avez dit que le RSI était attaqué de toutes parts. Pas par nous ! Le RSI, qui a été voulu par les indépendants, est aujourd'hui en grande difficulté. Étant conscients des problèmes que rencontrent ces professionnels, certains pensent qu’ils doivent revenir dans le giron du régime général. En tout cas, il n’est pas possible de laisser les indépendants sans solution. Ce n’est pas parce qu’une erreur a été commise dans le passé qu’aucune rémission n’est possible…

Je le répète, le RSI n’est pas du tout attaqué, au contraire, nous sommes très sensibles aux difficultés des indépendants que nous avons d’ailleurs reçus récemment. Nous avons bien compris qu’ils rencontraient un problème et nous souhaitons le régler.

Mme la présidente. L'amendement n° 105 rectifié est retiré.

La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote sur l’amendement n° 185 rectifié bis.

M. Alain Vasselle. J’ai bien entendu la réponse de M. le ministre. Simplement, à partir du moment où l’on renvoie le dispositif à un décret d’application, c’est le Gouvernement qui est maître du temps puisque c’est lui qui décidera du moment où le décret sera publié. Puisque le Gouvernement aura la main et qu’il choisira le moment venu, lorsqu’il aura mené à bien l’ensemble de la concertation qu’il souhaite engager avec les professionnels, l’instant où il publiera le texte, pourquoi ne pas adopter l’amendement en l’état ? Il s’agit ici uniquement de poser les conditions devant être réunies pour permettre la représentation syndicale. N’attendons pas un prochain texte pour mettre en place cette mesure !

Mme la présidente. Monsieur Cardoux, l'amendement n° 185 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jean-Noël Cardoux. Je maintiens bien évidemment cet amendement.

Je remercie notre collègue Nicole Bricq pour le cours magistral qu’elle vient de nous donner.

Mme Nicole Bricq. Pas du tout, c’est du vécu !

M. Jean-Noël Cardoux. Je vous invite, ma chère collègue, à prendre connaissance du rapport que j’ai rédigé conjointement avec Jean-Pierre Godefroy : vous pourriez en tirer certains enseignements !

Je n’ai jamais dit que vous attaquiez le RSI, mais il suffit de lire la presse pour s’apercevoir que le RSI est attaqué de toutes parts, à tort ou à raison,…

Mme Nicole Bricq. Pas par nous !

M. Jean-Noël Cardoux. Je n’ai rien affirmé de tel, pourquoi vous sentez-vous visée ? Je maintiens simplement que le RSI est attaqué !

Je suis d’accord avec Alain Vasselle. Il est important d’envoyer aux agents de direction des organismes de protection sociale, qui sont en souffrance et se posent de nombreuses questions, un signal fort de notre volonté qu’ils soient représentés lors des discussions, surtout au vu des futures turbulences auxquelles ils seront confrontés. C’est le rôle du Parlement d’envoyer de tels signaux. Comme l’a également souligné Alain Vasselle, il appartiendra ensuite au Gouvernement de prendre la main et de consulter les hautes autorités, qui ne manquent pas dans ce secteur. Il en sortira quelque chose qui, je l’espère, satisfera ceux qui nous ont sollicités.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 185 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17, et les amendements nos 106 rectifié et 122 rectifié n'ont plus d'objet.

Articles additionnels après l'article 17
Dossier législatif : projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi
Article 19

Article 18

I A. – (Non modifié) Après le deuxième alinéa de l’article L. 2135-7 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les éventuelles indemnités de fonction payées par l’organisation syndicale sont assimilées à des salaires. Les cotisations et charges afférentes sont acquittées par l’organisation syndicale. »

I. – Au 2° de l’article L. 2135-11 du code du travail, après les mots : « notamment par », sont insérés les mots : « l’animation et la gestion d’organismes dont les recherches portent sur ces politiques publiques, ».

II. – (Non modifié) L’article L. 3142-8 du code du travail est ainsi rétabli :

« Art. L. 3142-8. – Une convention conclue entre un ou plusieurs employeurs et une organisation syndicale de salariés peut prévoir le maintien de la rémunération du salarié bénéficiant du congé de formation économique et sociale et de formation syndicale. Cette convention peut également prévoir le maintien des cotisations et des contributions sociales afférentes.

« La convention peut prévoir que le coût de ce maintien est supporté par l’employeur, par l’organisation syndicale ou réparti entre eux.

« Elle fixe les conditions et les modalités selon lesquelles :

« 1° L’employeur procède au maintien de la rémunération et des cotisations et contributions sociales afférentes ;

« 2° L’organisation syndicale procède, s’il y a lieu, au remboursement de l’employeur ;

« 3° En cas de non-remboursement, l’employeur peut procéder à une retenue sur le salaire du bénéficiaire, dans des limites fixées par décret en Conseil d’État. »

Mme la présidente. L'amendement n° 107, présenté par Mmes Schillinger, Bricq et Emery-Dumas, MM. Bérit-Débat et Caffet, Mmes Campion, Claireaux et Génisson, MM. Daudigny, Durain, Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Yonnet, MM. Tourenne, Vergoz et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

dont les recherches portent sur ces politiques publiques

par les mots :

de recherche

La parole est à Mme Catherine Génisson.

Mme Catherine Génisson. Les organisations syndicales et patronales mentionnées dans le 2° de l’article L. 2135-11 ont pour mission de participer à la conception, à la mise en œuvre et au suivi des politiques publiques.

L’article L. 2135-11 précise, par ailleurs, que ces activités constituent des missions d’intérêt général, ce qui justifie leur financement par le fonds paritaire.

Il est donc logique que les organismes de recherche qui travaillent dans le même domaine bénéficient des mêmes droits, sans qu’il soit besoin de le répéter. Certains pourraient voir dans cette répétition une forme de défiance à l’encontre des organisations syndicales et des organismes qui leur sont liés. Au contraire, il convient de souligner la qualité de leurs travaux, notamment ceux de l’Institut de recherche en sciences sociales.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La commission des affaires sociales a souhaité indiquer que le fonds paritaire de financement des partenaires sociaux pourra uniquement financer l’animation et la gestion des organismes dont les recherches portent sur les politiques publiques relevant de la compétence de l’État telles que mentionnées à l’article L. 2135-11 du code du travail.

L’expression « organisme de recherche » nous paraissait floue d’un point de vue juridique. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Nous avons une divergence d’analyse avec Mme la rapporteur.

L’objet des crédits du fonds paritaire étant bien de financer la participation des organisations syndicales à la conception et à la mise en œuvre de politiques publiques, la précision introduite par la commission me semble donc inutile.

Il n’y a pas non plus de raison d’imposer que ces recherches portent uniquement sur des politiques publiques ; ce serait trop restrictif et difficile à déterminer. Un travail de recherches et d’études scientifiques peut concourir à une politique publique sans porter sur elle.

Pour ces raisons, le Gouvernement est favorable à l’amendement présenté par le groupe socialiste.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La commission souhaitait apporter une précision juridique. Si celle-ci vous semble inutile, monsieur le ministre, à titre personnel, je m’en remets à la sagesse du Sénat.

Mmes Nicole Bricq et Catherine Génisson. Merci !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 107.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 317, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 3

Insérer deux paragraphes ainsi rédigés :

… – La seconde phrase du 1° de l’article L. 2135-13 du même code est ainsi modifiée :

1° Les mots : « par voie réglementaire » sont remplacés par les mots : « par décret en Conseil d’État » ;

2° Les mots : « et en fonction de l’audience » sont remplacés par les mots : « et, pour les organisations professionnelles d’employeurs, en fonction du nombre de salariés employés par leurs entreprises adhérentes » ;

3° Les mots : « pour les organisations professionnelles d’employeurs » sont supprimés.

… – Après le premier alinéa de l’article L. 2135-15 dudit code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les sièges attribués aux organisations professionnelles d’employeurs sont répartis entre elles en fonction du nombre de salariés employés par leurs entreprises adhérentes. »

La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Ça va se corser !

M. François Rebsamen, ministre. Cet amendement vise à préciser que les sièges des organisations professionnelles d’employeurs et les crédits seront répartis entre elles, à partir de 2017, en tenant compte du nombre de salariés employés par les entreprises adhérentes.

Je rappelle que la loi du 5 mars 2014, que vous avez adoptée il y a un peu plus d’un an, a réformé en profondeur les règles en matière de représentativité patronale et a créé un fonds paritaire de financement des organisations syndicales et patronales.

Cet amendement vise à rectifier une imprécision : pour le nombre de sièges comme pour la répartition des crédits, il faut prendre en compte le nombre d’adhérents pondéré par le nombre de salariés. Autrement dit, un employeur ayant un ou deux salariés ne peut pas peser autant qu’une grande entreprise qui compte des milliers de salariés. Cette mesure va dans le sens des objectifs de la loi du 5 mars 2014, à savoir des règles transparentes, claires, équitables, pour une gouvernance équilibrée d’un fonds démocratique. Je tiens à préciser qu’elle ne touche pas aux règles en matière de représentativité.

Telle est la nature de l’amendement gouvernemental, qui vise à apporter une précision indispensable s’agissant des mesures de représentativité pour 2017.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La commission a eu des difficultés à émettre un avis sur cet amendement, qui ne lui a été transmis que quelques heures, pour le dire de façon aimable, avant qu’elle ne mette la dernière main à son texte. De surcroît, il lui a paru difficile d’en mesurer les conséquences financières en l’absence d’étude d’impact.

M. François Rebsamen, ministre. C’est vrai !

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Il y aura forcément des perdants et des gagnants, car le droit en vigueur prévoit que la répartition des crédits se fait uniquement en fonction de l’audience des organisations patronales, sans que celle-ci soit pondérée par le nombre de salariés employés par les entreprises adhérentes.

Le critère du nombre de salariés avait été écarté par le Gouvernement l’année dernière lors de l’examen de la réforme de la représentativité patronale. Il semble difficile de retenir ce critère de pondération pour le fonds paritaire et de l’écarter pour la mesure de la représentativité patronale. Il y aurait une certaine incohérence à appliquer deux systèmes différents.

Depuis hier, nous avons reçu, les uns et les autres, de nombreux mails montrant que cet amendement est très important et que sa portée pourrait dépasser largement celle des dispositions de l’actuel article 18. Même si, sur le fond, il paraît de bon sens de pondérer l’audience en fonction du nombre de salariés, pourquoi appliquer un tel critère pour le fonds de financement et pas pour la représentativité ?

Pour l’ensemble de ces raisons, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. La commission ayant été saisie tardivement de cet amendement extrêmement important, nous n’avons pas pu en mesurer les implications. Je rappelle à mon tour que beaucoup d’entre nous ont reçu de nombreux mails et SMS nous demandant de regarder de près les dispositions introduites par cet amendement.

Monsieur le ministre, il faudrait arrêter de modifier des lois votées par le Parlement – en l’espèce, une loi datant de mars 2014 – au détour d’amendements déposés sur d’autres textes. Cela s’est déjà produit à plusieurs reprises ! L’examen du projet de loi de modernisation de notre système de santé, où l’on introduit le tiers payant sans demander à la population ni même aux professionnels s’ils sont d’accord, en sera encore l’exemple. La loi sur l’IVG est ainsi modifiée au détour d’une loi ou bien encore le don d’organes, etc.

Une telle pratique est un déni de démocratie qui ne va pas dans le sens de la revalorisation du Parlement.

Mme Catherine Deroche. Tout à fait !

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Voilà pourquoi je demande à mes collègues parlementaires de rejeter cet amendement. Mieux vaut l’examiner ultérieurement dans le cadre d’une loi concernant véritablement les entreprises et après avoir consulté l’ensemble des organisations professionnelles d’employeurs. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour explication de vote.

M. Jean-Marc Gabouty. Lorsque je lis « répartis entre elles en fonction du nombre de salariés » dans le texte de votre amendement, monsieur le ministre, je ne vois pas où est la pondération dont vous parlez. Il s’agit d’une totale proportionnalité !

La loi du 5 mars 2014, complétée par le récent décret de juin 2015 relatif à la mise en œuvre de la réforme de la représentativité patronale, est effectivement venue préciser les modalités de cette représentativité. Les critères sont fondés sur le nombre d’entreprises adhérentes, étant précisé que le nombre de salariés est également pris en compte sous forme d’opposition possible aux accords interprofessionnels.

En 2017, cette représentativité devait être mesurée à l’aune du nombre d’adhérents, ce qui devait déterminer le nombre de mandats dans les instances paritaires et les crédits afférents. Cet amendement vient rompre cet équilibre et changer la loi précédente avant même qu’elle ne soit applicable. Outre la méthode et, semble-t-il, l’absence totale de concertation avec l’ensemble des organisations patronales, à l’exception peut-être d’une seule,…

Mme Nicole Bricq. On va en parler !

M. Jean-Marc Gabouty. … cet amendement risque de marginaliser la plus grande partie des TPE, PME voire ETI, qui représentent, pour les moins de 50 salariés, 98 % des entreprises, celles qui créent des emplois, celles qui ne délocalisent pas ou très peu. Sans compter que toutes les organisations qui les représentent sont opposées à cette mesure.

Je suis étonné que vous ayez pris cette initiative. En caricaturant un peu, vous organisez une forme de monopole de la représentation patronale par les entreprises du CAC 40. Je n’aurais jamais imaginé que le Gouvernement puisse se transformer en bras armé du MEDEF !

Mme Nicole Bricq. Le MEDEF, ce n’est pas le CAC 40 !

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Kern, pour explication de vote.

M. Claude Kern. Quelle surprise n’avons-nous pas eue hier en découvrant votre amendement n° 317, monsieur le ministre : surprise et incompréhension absolue face à la position que vous avez ici l’audace de tenir ! Oui, car il faut de l’audace pour présenter un amendement qui va à l’encontre de l’intitulé et de l’esprit du texte que vous défendez, en revenant sans la moindre concertation sur un équilibre trouvé par le dialogue entre les organisations patronales !

Cet équilibre est assis sur une démarche engagée il y a une dizaine d’années par l’ensemble de ces organisations, qui ont accepté, dans un souci de transparence, de mesurer leur représentativité. À compter de 2017, c’est cette représentativité qui fondera la représentation de chacune des organisations patronales, le nombre de leurs mandats dans les instances paritaires et les crédits afférents.

Des critères très clairs ont été mis au point pour évaluer la représentativité des organisations patronales, notamment celui du nombre d’entreprises adhérentes, avec une prise en compte du nombre de salariés sous forme d’opposition possible aux accords interprofessionnels. Ces critères ainsi que leur pondération sont le fruit de négociations parfois longues avec l’ensemble des partenaires concernés. C’est d’ailleurs, et je sais que vous en conviendrez, cette concertation qui garantit à la fois la bonne acceptation de la réglementation par les publics visés et la légitimité de chaque organisation patronale.

Cet équilibre, contrairement à vos explications, vous le remettez brutalement en cause en proposant que les sièges au sein du collège employeur ainsi que les crédits visant à financer la gestion des organismes paritaires soient répartis uniquement sur la base du nombre de salariés employés par les entreprises adhérentes de chaque organisation patronale. Autrement dit, vous privilégiez très nettement les grandes entreprises et les multinationales, au détriment des associations, des mutuelles, des coopératives, des artisans, des professions libérales, des TPE, des PME et des ETI, qui font pourtant la richesse de notre tissu économique.

Monsieur le ministre, que le MEDEF fasse du lobbying, soit, mais que vous cédiez à ce lobbying, les bras m’en tombent ! Il ne s’agit pas d’opposer les organisations patronales entre elles, mais bien d’en assurer la meilleure représentation possible, dans la complémentarité. Les grandes entreprises et les multinationales ont, de fait, un poids important dans les négociations. Alors, pourquoi vouloir fragiliser les entreprises à taille humaine, non délocalisables et qui sont à l’origine de la plupart des créations d’emplois ? C’est selon moi un non-sens.

Voilà pourquoi je voterai contre cet amendement. J’appelle mes collègues à en faire de même. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.

M. Jean-Noël Cardoux. La plupart des propos qui ont été tenus sont entièrement fondés ; j’y souscris totalement.

Je voudrais opérer un petit retour en arrière, monsieur le ministre. Lors de l’examen du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, notre groupe – j’étais l’un de ses chefs de file sur le texte – avait procédé à de nombreuses auditions et entendu toutes les organisations patronales représentatives. Le sujet n’était pas facile puisqu’il s’agissait de modifier les critères de représentativité en tenant compte notamment des doubles appartenances, qui constituent l’un des aspects du problème. Certaines entreprises adhèrent en effet à plusieurs organisations. Nous étions parvenus, sinon à un bon accord, du moins à un équilibre à peu près stable qui, sans satisfaire tout le monde, n’avait pas déclenché de déclaration de guerre. À telle enseigne que, face à la grogne de certaines organisations, notre groupe avait présenté un amendement, que j’avais défendu, visant à instaurer un délai supplémentaire de réflexion pour que les partenaires sociaux se mettent autour de la table et essaient d’avancer sur ces critères de représentativité.

Là, tout à coup, vous sortez du chapeau une disposition absente du texte d’origine qui va, je le crains, déclencher la foudre dans le milieu des organisations patronales représentatives et raviver la guerre que nous avions, avec un peu de doigté, réussi à éteindre. Pourquoi décidez-vous de déposer cet amendement au Sénat ? Pourquoi n’aviez-vous pas inclus cette disposition dans le projet de loi initial ? Quel est le motif de cette précipitation ? Pourquoi n’existe-t-il pas d’étude d’impact ? Pourquoi aucune concertation n’a-t-elle été conduite avec l’ensemble des organisations patronales ? Pourquoi n’avez-vous pas fait réaliser d’analyse des conséquences financières de cette mesure sur les entreprises ?

J’ai écouté attentivement les propos que vous avez tenus pour défendre votre amendement. Vous avez dit qu’il est tout à fait logique qu’une entreprise de plusieurs milliers de salariés soit plus représentative qu’une entreprise comptant un ou deux salariés. Pour aller dans le sens de l’intervention de notre collègue Kern, je vous invite à faire le total du nombre d’emplois que représentent toutes ces petites entreprises. Une TPE ne compte certes que quelques salariés, mais multipliez ce chiffre par le nombre d’entreprises qui constituent ce tissu économique qui draine toute la France et vous obtiendrez des représentations autrement plus significatives que celles des grandes entreprises.

Je ne veux pas entrer dans le jeu de nos collègues du groupe CRC, mais comparez également la situation d’une grande entreprise qui n’hésite pas à « dégraisser », comme on dit vulgairement, en licenciant 100 à 150 salariés, à celle d’une TPE qui doit se séparer d’un ou de deux salariés parce que les carnets de commandes sont vides et pour qui c’est un drame !

La vitalité de ces TPE et l’apport économique qu’elles représentent pour notre pays font que, s’agissant de leur représentativité, elles mériteraient davantage de considération qu’un simple amendement sorti au débotté à l’occasion d’une discussion sur le dialogue social. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)