M. Guillaume Arnell. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous nous exprimons aujourd’hui sur les crédits de la mission « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2016. À travers ce budget, madame la ministre, le Gouvernement affirme avec la même vigueur dont il fait preuve depuis 2012 son engagement aux côtés des territoires ultramarins, qui se trouvent tous dans une situation d’urgence tant économique que sociale.

Cet attachement, s’il peut être loué, reste indispensable au vu du réel retard économique de nos territoires par rapport à la France métropolitaine.

Aussi, dans un contexte de finances publiques très contraintes, je salue l’une des quelques missions du présent projet de loi de finances dont les crédits sont en très légère augmentation, de 0,3 % par rapport à l’année dernière. Les crédits de paiement s’élèvent à plus de 2 milliards d’euros, répartis entre deux programmes : le programme 123, « Conditions de vie outre-mer » et le programme 138, « Emploi outre-mer ». C’est tout naturellement à ce dernier programme que je consacrerai la majeure partie de mon intervention.

Madame la ministre, vous en êtes consciente, l’emploi est un défi récurrent dans les outre-mer, le taux de chômage y étant presque deux fois supérieur à celui de la métropole. Les causes en sont multiples : isolement des territoires, manque de formation et autres handicaps structurels.

La jeunesse est la principale victime de ce retard économique. Le taux de chômage des 15-24 ans atteint ainsi des records : plus d’un jeune sur deux est sans emploi en Guadeloupe et à Saint-Martin, ce qui constitue le taux le plus élevé des territoires ultra-marins.

À ce titre, cette mission présente tout de même des éléments de satisfaction, notamment, les crédits alloués aux contrats de développement, à la continuité territoriale, à l’insertion dans l’emploi et à la formation des jeunes via la LADOM.

De fait, l’objectif « SMA 6 000 », visant à porter à 6 000 le nombre de volontaires bénéficiaires du service militaire adapté à l’horizon 2017, est significatif. Cette mesure en faveur de la formation professionnelle est déterminante ; elle doit être mise en œuvre le plus rapidement possible, dans un souci constant d’adéquation avec les spécificités des territoires ultramarins.

Par ailleurs, il faut saluer l’effort gouvernemental en faveur d’une évolution du dispositif des aides fiscales à l’investissement au-delà de leur terme actuel, effort qui s’est notamment concrétisé par l’amendement que le Gouvernement a déposé à l’Assemblée nationale sur l’article 43.

Nous prenons acte, madame la ministre, d’un tel engagement, indispensable au soutien du secteur productif ultramarin. Précisons toutefois qu’il doit être nécessairement maintenu sur le long terme.

En effet, si cet effort constitue un message fort en direction des investisseurs, seul un engagement durable de la part de l’exécutif permettra l’aboutissement de projets structurants, générateurs d’emplois.

Les dispositifs de défiscalisation et d’exonérations de charges ne peuvent faire davantage l’objet de nouvelles annonces, au risque de décourager les investisseurs et les entreprises quant à la stabilité du climat économique sur nos territoires. La lisibilité est ici le maître mot. Or il apparaît aujourd’hui que certains dispositifs existants gagneraient à être recentrés plus encore sur les secteurs productifs locaux.

Madame la ministre, votre engagement en faveur d’un « CICE renforcé » va bien entendu dans ce sens. Néanmoins, en tant que représentant d’une collectivité fiscalement autonome, je me dois de vous alerter sur la distorsion concurrentielle entre les entreprises basées à Saint-Martin et celles qui bénéficient du dispositif CICE tout en ayant accès au marché local. Notre capacité budgétaire ne nous permettant pas l’instauration de mécanismes équivalents, seul l’État peut prévoir des dispositifs de compensation afin de contrer le développement de situations discriminantes.

Le tourisme étant le secteur clé de l’économie saint-martinoise, j’ai déposé un amendement visant à élargir la politique de défiscalisation à l’ensemble des investissements réalisés à Saint-Martin dans le secteur du tourisme et de l’hôtellerie, à un taux de 45,9 %, majoré à 53,55 %, sur le modèle de ce qui se pratique à Mayotte ou à Saint-Pierre-et-Miquelon. Cela permettrait de rétablir un certain équilibre de compétitivité entre nos entreprises locales et celles de notre environnement régional.

Madame la ministre, je partage votre position, Saint-Martin doit pleinement assumer les compétences attribuées par la loi organique, et nous nous y attelons. Néanmoins, il est également légitime de notre part d’attendre que les moyens correspondant à la mise en œuvre de notre autonomie fiscale soient justement alloués.

En effet, le rétablissement durable de notre situation financière ne peut se limiter à une seule politique volontariste de hausses d’impôts et de taxes ; elle implique également une participation accrue de l’administration fiscale de l’État à l’amélioration du niveau des recettes fiscales de la collectivité. Ainsi, le cadastre date du début des années soixante-dix et ne correspond plus à aucune réalité.

De telles mesures figurent parmi les engagements du Président de la République formulés à l’occasion de son déplacement dans les collectivités d’outre-mer. Parlementaires ultramarins, nous nous devons de veiller à la bonne exécution des annonces présidentielles.

Concernant Saint-Martin, le Président de la République s’est engagé sur divers points de fiscalité, affirmant notamment qu’il était normal de faire évaluer la fiscalité en la matière.

Par ailleurs, de nombreux dossiers restent en suspens.

Depuis la promulgation du statut actuel, en 2007, la compensation des charges fixée par le législateur n’a toujours pas abouti.

Cependant, madame la ministre, malgré notre inquiétude s’agissant de ces dossiers, dans la conjoncture, les crédits de la mission « Outre-mer » semblent à la hauteur des enjeux propres à nos territoires. Aussi, j’approuverai, et avec moi le groupe du RDSE, les crédits de la mission « Outre-mer ». (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à M. Maurice Antiste.

M. Maurice Antiste. Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, malgré le contexte de forte contrainte budgétaire que connaît notre pays, le Gouvernement a montré une nouvelle fois, s’il en était besoin, son attachement à nos territoires ultramarins et sa pleine conscience des difficultés qu’ils rencontrent au quotidien, en maintenant un budget quasi stable pour la mission « Outre-mer », de l’ordre de 2,093 milliards d'euros, soit une hausse de 0,7 %. C’est pourquoi le parlementaire ultramarin que je suis tient, au nom de nos territoires, à remercier la Nation de cet effort.

Cette enveloppe permettra de continuer à financer le développement économique des collectivités ultramarines à travers plusieurs dispositions, à commencer par les exonérations de charges et les mesures de défiscalisation.

Est-il encore utile de souligner qu’exonérations de charges et mesures de défiscalisation sont des dispositifs indispensables à l’investissement dans les économies d’outre-mer ? Est-il encore utile de souligner qu’encourager l’investissement, c’est encourager la création de richesses, donc la création d’emplois, et qu’en ce sens la défiscalisation constitue un instrument d’aménagement du territoire ?

C’est pourquoi je soutiens indéfectiblement l’initiative du Gouvernement, qui a décidé de maintenir la défiscalisation jusqu’en 2020.

Je note également la décision du Gouvernement de soutenir une politique volontariste en matière de logement, à travers le maintien des crédits de la ligne budgétaire unique à hauteur de 247 millions d’euros en autorisations d’engagement au titre de 2016. Cela montre que les moyens consacrés au logement social sur nos territoires sont importants.

Cependant, afin de pouvoir construire plus de logements sociaux, ne serait-il pas envisageable de faire évoluer la législation en permettant une extension de la délégation du droit de préemption en faveur des organismes privés d’habitations à loyer modéré pour que la société délégataire puisse acheter le bien en lieu et place de la collectivité ?

Cette modification législative permettrait d’améliorer l’exercice du droit de préemption par les communes – petites et moyennes –, en évitant la mobilisation de fonds communaux dans un contexte financier difficile, et favoriserait la promotion de la création de logements. Pour avoir rédigé une proposition de loi dans ce sens, j’aimerais connaître, madame la ministre, votre position sur ce point.

Comme l’a par ailleurs souligné mon collègue Serge Letchimy à l'Assemblée nationale, il faudrait également étendre aux logements privés le dispositif de réhabilitation fonctionnant pour les logements sociaux.

Concernant la politique de continuité territoriale, les crédits sont en augmentation, puisqu’ils passent de 41,1 millions d’euros à 43,2 millions d’euros. Je profite tout particulièrement de cette occasion – je suis sûr que la population ultramarine dans son ensemble s’associe à mon propos – pour vous remercier, madame la ministre : merci d’avoir ôté ce fardeau aux familles déjà meurtries par la disparition d’un être cher en élargissant le champ de la politique de continuité territoriale aux rapatriements des dépouilles de nos concitoyens ultramarins décédés dans l’Hexagone. Cette initiative permettra d’éviter que des difficultés financières ne viennent s’ajouter à la douleur des familles.

Je terminerai en évoquant les dispositions concernant les crédits affectés à la formation professionnelle et à l’apprentissage.

Si les crédits du programme 138 « Emploi outre-mer » connaissent logiquement une diminution, de 26 millions d'euros, par rapport à 2015 – conséquence de la nouvelle réforme prévue par l’article 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 –, l’action Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle bénéficie, en revanche, d’une légère augmentation en crédits de paiement, de l’ordre de 3,67 %. Pour rappel, cette action finance une partie des crédits affectés à LADOM, notamment le « passeport-mobilité formation professionnelle ».

Néanmoins, je souligne, d’une part, que les territoires ultramarins se caractérisent par une plus forte proportion de personnes de plus de 15 ans ne possédant aucun diplôme – entre 35 % et 50 % selon les territoires, contre 17 % dans l’Hexagone –, d’autre part, que le tissu économique de la plupart des territoires ultramarins comprend de très petites entreprises. Ces dernières ne sont pas nécessairement outillées pour accueillir en alternance ou embaucher un jeune, d’autant que leur perception des jeunes, notamment des moins qualifiés, n’est pas toujours positive.

Il faudrait donc à la fois travailler sur l’image des jeunes auprès de ces TPE et vice-versa, sensibiliser les jeunes à une démarche d’embauche citoyenne et les accompagner dans les différentes phases : définition de leurs besoins en termes de qualification, préparation des dossiers pour recevoir les aides éventuelles tout en évitant les effets d’aubaine, suivi dans l’entreprise...

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Maurice Antiste. Dans ce cadre-là, ne pourrait-on pas subordonner certaines exonérations de charges sociales à l’intégration d’apprentis ou à des contrats en alternance aussi bien pour les TPE que les PME ?

Madame la ministre, je souhaite savoir quelles mesures sont envisagées par le Gouvernement pour inciter les entreprises à accueillir beaucoup plus, et plus facilement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à M. Robert Laufoaulu.

M. Robert Laufoaulu. Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, à l’heure où la Nation est en deuil, il peut paraître bien dérisoire de discuter de dotations et de lignes budgétaires. Je voudrais exprimer ici la part prise par Wallis-et-Futuna à la peine des familles de ceux qui ont été tués et à la douleur des blessés ; je voudrais exprimer, une fois encore, notre fierté d’être Français, notre attachement à la patrie, exprimer enfin notre reconnaissance à la Nation pour la solidarité nationale.

En ces temps d’austérité budgétaire, les territoires ultramarins n’ont pas été sacrifiés et cela mérite d’être souligné.

M. Richard Yung. Très bien !

M. Robert Laufoaulu. Que le Gouvernement, Mme la ministre en particulier, en soit remercié.

Madame la ministre, pouvez-vous me confirmer, même si la tutelle n’appartient plus à votre ministère, que le prêt de l’Agence française de développement permettant à l’agence régionale de santé d’apurer sa dette auprès de la Nouvelle-Calédonie sera bientôt versé ?

Par ailleurs, je profite de cette intervention pour redire à quel point il est important que le remboursement de l’emprunt figurant au sein de la même mission soit inscrit sur une ligne budgétaire différente de celle de l’Agence proprement dite.

Concernant la mission « Outre-mer », quelques points soulèvent notre inquiétude.

Il s’agit tout d’abord du service militaire adapté.

Le SMA a fait ses preuves. On nous a longtemps fait miroiter la possibilité d’en obtenir un à Futuna, notamment dans le cadre du plan SMA 6 000 ; puis on nous a promis des places réservées dans d’autres SMA, notamment à Périgueux ou en Nouvelle-Calédonie. Nous sommes au regret de constater qu’actuellement aucun jeune du territoire ne bénéficie de ce formidable tremplin d’intégration et de formation.

Madame la ministre, lors de votre visite sur le territoire, vous avez déclaré que vous alliez trouver une solution pour remédier à cette injustice. Pouvez-vous m’indiquer quelle suite vous comptez donner à cette annonce ?

Il s’agit ensuite du dispositif Cadres de Wallis-et-Futuna inscrit sur la même ligne budgétaire que le dispositif Cadres avenir de la Nouvelle-Calédonie. Cela aboutit souvent à une confusion budgétaire à notre détriment et je pense que c’est un point qu’il faudrait clarifier. Sur le suivi des stagiaires de ce dispositif, le ministère n’a pas encore donné sa réponse à notre demande de son transfert de LADOM à Campus France. Madame la ministre, pourriez-vous nous apporter quelques éclaircissements sur ce point ?

Par ailleurs, pouvez-vous me garantir le montant de 300 000 euros destiné à ce programme, comme entendu dans la convention récemment signée entre l’assemblée territoriale et le ministère ?

Il s’agit encore de l’avenant au contrat de développement 2012-2016. Il était question d’une augmentation des crédits alloués à Wallis-et-Futuna pour 2016. Madame la ministre, un engagement oral a été pris par votre cabinet auprès de M. Polutélé, député de Wallis-et-Futuna ; je souhaite que vous puissiez m’en confirmer le montant.

Il s’agit enfin de l’aide au fret, un dispositif très intéressant pour Wallis-et-Futuna, mais difficilement applicable. Nous en souhaiterions une adaptation pour que son efficacité soit réelle.

Je conclurai en soulignant l’appréciation entendue de la part de pays ayant participé au sommet France-Océanie, nos voisins. Elle témoigne d’une belle considération à notre égard. Sans doute aurai-je l’occasion d’y revenir très prochainement, et plus longuement.

J’en aurai tout à fait terminé quand je vous aurai dit que je voterai les crédits de la mission « Outre-mer ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Richard Yung. Très bien !

Mme la présidente. Je vous remercie d’avoir respecté votre temps de parole, mon cher collègue.

La parole est à Mme la ministre.

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer. Madame la présidente, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, alors que tous les Français sont appelés à consentir des efforts pour que le budget de la Nation puisse être bouclé, le Gouvernement a fait le choix de la réforme pour sauvegarder l’essentiel de la mission « Outre-mer », à savoir les axes prioritaires du programme 123 : le soutien à la commande publique, l’investissement des entreprises, la formation des jeunes, la mobilité.

Je vous remercie non seulement de vos observations, mais aussi du vote que vous allez émettre majoritairement en faveur des crédits de la mission « Outre-mer », conscients que le budget que nous vous présentons aujourd’hui est le meilleur possible dans les circonstances actuelles.

Ainsi, bien que la réduction de 1 milliard d’euros des dépenses prévue dans le présent projet de loi de finances s’applique à l’ensemble des ministères, vous avez pu constater, pour la mission « Outre-mer » plus particulièrement, que nous sommes parvenus à sauvegarder l’essentiel, notamment en crédits de paiement. Le budget du ministère a été intégralement préservé en CP pour 2016, et fait même l’objet d’une progression, certes modeste, puisque les crédits de paiement passent de 2,017 milliards d’euros en 2015 à 2,018 milliards d’euros en 2016.

Nous avons donc fait le choix de préserver les priorités essentielles de notre action en faveur des outre-mer.

À cet égard, le budget pour 2016 est, en premier lieu, celui de la relance de la commande publique. Pour être régulièrement interpellés sur ce thème – je le suis moi-même en Guyane –, nous savons bien que la commande publique joue un rôle primordial dans les outre-mer, pour le secteur du BTP, notamment.

Aussi avons-nous pris des mesures en faveur du logement.

Premièrement, nous avons maintenu les crédits de la LBU à 247 millions d’euros en autorisations d’engagement au titre de 2016.

Deuxièmement, nous avons obtenu l’extension du nouveau crédit d’impôt pour la défiscalisation dans le logement social aux opérations de rénovation des logements locatifs sociaux de plus de vingt ans situés en zone éligible à la politique de la ville. Le champ d’application de cette mesure est vaste, puisqu’il couvre la remise aux normes techniques des bâtiments, la protection antisismique, ainsi que le désamiantage.

Certains d’entre vous ont attiré mon attention sur le plafonnement du crédit d’impôt : aujourd’hui fixée à 20 000 euros, l’aide de l’État serait trop faible. Bien entendu, nous sommes prêts à étudier ce dispositif avant d’envisager toute évolution des curseurs.

Troisièmement, une modification du cadre législatif a été votée à l’Assemblée nationale pour lever l’obligation de financer par la LBU la construction d’immeubles destinés au prêt locatif social : il s’agit de pouvoir désormais utiliser l’aide fiscale à l’investissement pour ces opérations. Autrement dit, nous avons assoupli de manière significative les critères de mobilisation de l’aide fiscale dans le secteur du logement social.

Ensuite, nous avons mis en place en 2015 une réforme importante en matière de continuité territoriale : nous donnons la priorité au passeport-mobilité études et au passeport-mobilité formation professionnelle, face à la progression incontrôlée des dépenses de continuité tout public.

Cette réforme, qui est maintenant entrée en application, est en effet dans l’intérêt des populations. L’exemple de La Réunion n’est pas significatif : si les dépenses de l’État en faveur de la continuité territoriale ont sensiblement diminué là-bas, cela s’explique simplement par la mise en place d’un dispositif beaucoup plus favorable par la région.

Pour sa part, le Gouvernement considère qu’allouer des crédits à la formation professionnelle et aux personnes les plus fragiles est plus judicieux que de permettre à chacun de voyager à sa guise !

Tout cela se fera naturellement sans diminuer l’ensemble des prestations de la continuité territoriale, politique dont les crédits s’élèveront en 2016 à plus de 33 millions d’euros.

Le budget des outre-mer assure aussi le maintien des enveloppes consacrées à la politique contractuelle, avec plus de 260 millions d’euros en autorisations d’engagement. Les contrats de plan État-région, comme vous le savez, ont été signés ou sont en bonne voie de l’être. Je réaffirme ici la volonté du Gouvernement d’accompagner les collectivités dans cette voie. J’en profite pour rassurer les élus de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française : il n’y aura pas d’année blanche dans l’exécution des contrats de développement.

Deux autres outils d’accompagnement des collectivités figurent aujourd’hui dans le programme 123 « Conditions de vie outre-mer » : le Fonds exceptionnel d'investissement, le FEI, et les crédits consacrés à la bonification des prêts accordés par l’AFD, l’Agence française pour le développement. Là encore, nous pouvons nous réjouir d’arbitrages qui ont été favorables à l’outre-mer, avec le maintien des autorisations d’engagement et la progression des crédits de paiement pour ces deux instruments.

Le soutien à la commande publique, c’est également l’appui apporté par l’État à la construction des équipements scolaires. Les enveloppes de crédits pour la Guyane et Mayotte seront là encore maintenues, tout comme seront maintenus les crédits affectés aux constructions scolaires dans le second degré en Nouvelle-Calédonie.

Pour rester dans le Pacifique, j’ai bien entendu les réserves émises par M. Nuihau Laurey. Il faut néanmoins observer que 12 millions d’euros de mesures nouvelles seront consacrés au soutien de la politique de protection sociale en Polynésie française. Ces crédits manifestent un retour de l’État dans un secteur où il n’intervenait plus depuis plusieurs années.

Plusieurs d’entre vous ont abordé le problème du traitement de l’aide fiscale à l’investissement. Nous nous sommes vraiment battus sur ce point, car nous connaissons l’importance de ces dépenses fiscales pour les économies des outre-mer : cette aide contribue en effet au financement d’environ 2 milliards d’euros d’investissements dans les départements et les collectivités d’outre-mer.

Le dispositif est prorogé jusqu’au 31 décembre 2020 dans les départements d’outre-mer et jusqu’en 2025 dans les pays et territoires d’outre-mer. Cette différence de délais entre les PTOM et les DOM tient au fait que seuls les départements d’outre-mer sont dans l’obligation de respecter un règlement communautaire qui n’est applicable que jusqu’en 2020. On peut toujours proposer plus, mais nous devons continuer de nous inscrire dans le strict respect des règlements européens. Aujourd’hui, je considère qu’il s’agit de la bonne formule.

En revanche, nous avons déposé un amendement pour que la prorogation jusqu’à 2025 applicable aux PTOM vaille de façon généralisée pour l’investissement productif et le logement social.

S’agissant des crédits du programme 138 « Emploi outre-mer », nous avons préservé les moyens du service militaire adapté. Tous les élus s’accordent pour se féliciter des bons résultats du SMA sur nos jeunes « décrocheurs ». Je vous indique d’ailleurs, monsieur Laufoaulu, que le Gouvernement a pris des mesures pour réserver un contingent du SMA aux jeunes wallisiens. Vous avez donc été entendu, et votre souhait prouve que ce service est partout plébiscité.

L’année 2016 sera aussi celle du changement de statut de LADOM, l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité : ce changement permettra de mettre en cohérence la forme juridique de LADOM et ses missions. Cette agence est le principal outil pour lutter contre le chômage des jeunes ultramarins, et nous y tenons.

Puisque vous avez évoqué le soutien aux entreprises et défendu la nécessaire stabilité des aides qui leur sont versées, j’insiste sur le fait que le Gouvernement poursuit sa politique d’accompagnement des TPE. En 2016, nous prendrons des initiatives en matière d’aides au premier emploi, grâce à la signature d’une convention avec la Caisse des dépôts et consignations. Nous chercherons également à mobiliser les réseaux au service de la création d’emplois, notamment pour les TPE.

J’en viens maintenant à la réforme des exonérations de charges sociales : il est vrai que l’enveloppe de la compensation de ces exonérations a diminué de 3 % mais, compte tenu des efforts demandés à chacun et de la mise en place du CICE, j’estime que cette très faible baisse peut être largement supportée par les entreprises.

Cela est d’autant plus vrai que le taux du CICE passera à 9 % en 2016 et que les entreprises de moins de 11 salariés conserveront l’intégralité de l’aide pour les salariés qui perçoivent jusqu’à 1,4 SMIC, avec un régime de taux progressivement dégressifs jusqu’à 2,3 SMIC.

Parler, dans ces conditions de « trappe » à bas salaires, c’est porter une appréciation assez originale : un salaire de 3 000 euros n’est pas un bas salaire, mais un salaire raisonnable, qui se situe plutôt dans la fourchette haute des salaires perçus par nos concitoyens. Je récuse donc l’argument.

Comme nous l’avons rappelé, pour les secteurs exposés, nous comptons encore améliorer le dispositif. Ce sont donc au total plus de 200 millions d’euros d’allégements du coût du travail qui profiteront aux entreprises ultramarines en 2016.

J’entends beaucoup plaider pour la stabilité des aides et leur reconduction d’une année sur l’autre. Mais quand on modifie un dispositif pour l’améliorer – comme c’est le cas ici –, les entreprises devraient plutôt se féliciter du changement !

J’ai également entendu les inquiétudes exprimées par plusieurs d’entre vous sur l’évolution de la DGF. Je considère pourtant que nous avons su limiter les dégâts. Aujourd’hui, on demande un effort financier à toutes les collectivités. Or il me semble que la progression sensible de l’enveloppe consacrée à la péréquation, au sein du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC, est de nature à compenser la baisse de la DGF pour les communes ultramarines.

S’appuyant sur le rapport du sénateur Georges Patient, le Gouvernement a par ailleurs décidé d'exclure l’octroi de mer des recettes réelles de fonctionnement des 112 communes des quatre DOM qui supportent la contribution au redressement des finances publiques. Cette mesure représente un allégement de 13 millions d’euros pour ces communes, ce qui est, là encore, une manière d’atténuer l’effort exigé des communes en outre-mer.

Nous ne pouvons pas totalement exclure les départements et collectivités outre-mer de l’effort de solidarité exigé des autres collectivités, même si tout le monde peut comprendre que les outre-mer, compte tenu de leur situation, sont en droit de fournir un effort moins important.

Monsieur Laurey, je partage votre sentiment : il est plus que temps de lutter contre les retards qui perdurent entre les outre-mer et la métropole. C’est d’ailleurs le fil conducteur de la politique que mène mon ministère. Ainsi, monsieur le rapporteur spécial, nous avons tenu compte de la nécessité d’un rattrapage quand nous avons élaboré les contrats de plan État-régions, dont vous avez souligné l’importance pour le développement économique des outre-mer.

Par ailleurs, j’ai bien compris que vous n’étiez pas d’accord avec ma proposition de compenser en gestion l’écart de 4 millions d’euros sur la DGA. Je m’en suis pourtant déjà expliquée plusieurs fois. Votre collègue Lana Tetuanui m’a interrogée ici même sur le sujet, il y a peu.

À ce jour, le Gouvernement a pourtant toujours tenu parole lorsqu’il a été question de prendre en considération la situation de la Polynésie française : nous avons fourni plus d’efforts pour cette collectivité que ne l’ont fait les gouvernements précédents. Nous avons même tenté de rétablir tout ce que ces gouvernements avaient défait !

Je vous l’ai déjà expliqué, monsieur Laurey : si nous prenions ces 4 millions d’euros non pas sur les crédits de la DGA, mais sur ceux du contrat de projets de la Polynésie française, ce ne sont pas 4 millions d’euros en CP qui seraient supprimés, mais 16 millions d’euros en AE ! Il n’est pas dans l’intérêt de la Polynésie française de choisir cette option : ce serait pour elle renoncer à un certain nombre d’opérations qui lui seraient pourtant utiles.

Cela étant dit, monsieur le rapporteur spécial, si vous tenez absolument à procéder ainsi, faites-le ! Seulement, vous perdrez 16 millions d’euros. La solution préconisée par le Gouvernement, je le répète, est dans votre intérêt. Si vous n’êtes pas d’accord avec cela, supprimons 16 millions d’euros de crédit et n’en parlons plus ! (Exclamations amusées sur certaines travées.)

Monsieur Patient, je me félicite du vote de la commission des finances en faveur du budget des outre-mer. Vous avez regretté le recentrage des aides aux entreprises sur les bas salaires. Vous savez ce que je pense de ces bas salaires à 3 000 euros et je n’y reviens pas, sinon pour dire qu’il me semble au contraire normal de concentrer les efforts sur les salaires vraiment les moins élevés.

S’agissant du pacte d’avenir pour la Guyane, je vous confirme, monsieur Patient, que les discussions interministérielles se poursuivent et que nous progressons. Je réunirai les parlementaires et les grands élus au début de l’année 2016 sur la base d’un document arbitré.

Vous avez enfin évoqué, monsieur le rapporteur spécial, l’idée d’une zone franche « sociale » au profit de la Guyane. Nous avons déjà pris en compte la situation particulière de la Guyane ou des Hauts à La Réunion, puisque ces territoires bénéficient d’un niveau supplémentaire d’abattement pour leurs zones franches d’activité. Vous le savez, nous allons devoir retravailler ce dispositif.

Je remercie également M. Serge Larcher, rapporteur pour avis, d’avoir annoncé que la commission des affaires économiques était favorable à ce budget. Je ne répéterai pas ce que j’ai dit sur les exonérations de charges, sinon pour souligner le caractère progressif de la diminution.

Quant à l’idée d’une dotation spécifique d’amorçage, et bien que consciente des difficultés rencontrées pour la mise en place d’une collectivité unique, je fais remarquer que les crédits de l’outre-mer ne sont pas extensibles. J’ajoute qu’outre la Guyane et la Martinique d’autres collectivités sont concernées, et confrontées aux mêmes problèmes.

Le Gouvernement va donc regarder les mesures qu’il pourrait adopter pour être au plus près des difficultés réellement rencontrées. La création de collectivités uniques est l’une des solutions pour rationaliser la gestion des outre-mer. Il faudra donc que les outre-mer y viennent.

Monsieur Lemoyne, vous avez souligné, au nom de M. Didier Robert, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, l’importance des attentes de nos concitoyens en matière d’emploi, de logement et de santé : ce sont autant de priorités pour mon ministère.

Vous avez proposé que l’on travaille davantage sur le plan Santé. Nous avons mené un travail approfondi avec le ministère de la santé et je me tiens à la disposition de M. Robert pour échanger avec lui, lors d’une séance de travail dédiée à ce sujet.

Monsieur Thani Mohamed Soilihi, je ne partage pas totalement votre interprétation des chiffres. Contrairement à vous, je ne pense pas que Mayotte soit lésée. Le montant de la dotation forfaitaire est de 152 euros à Mayotte, contre 197 euros à La Réunion. À Mayotte, les besoins sont extrêmement importants, c’est pourquoi nous consentons actuellement, pour ce département, des efforts considérables en termes de rattrapage. Il faut même être vigilant et faire en sorte que la société mahoraise puisse supporter les évolutions rapides que nous lui imposons.

J’ajoute que, sur la question de la sécurité, une mission d’inspection est prévue à Mayotte prochainement.

Madame Assassi, vous avez évoqué les ports. Aujourd'hui, un gros travail est effectué afin de permettre aux collectivités ultramarines de profiter des évolutions du transport maritime, que ce soit Panama, que ce soit la route du Nord. Nous y travaillons et nous aménageons les ports afin d’intégrer ce mouvement planétaire.

Sur le réchauffement climatique, vous savez que nous avons organisé des réunions particulières consacrées à la situation dans les outre-mer. Un sommet France-Océanie a notamment eu lieu afin de tenir compte des incidences terribles pour les petits États, notamment océaniens, du réchauffement climatique. Nous sommes donc attentifs à cette question et nous nous efforçons d’accompagner, notamment par la défiscalisation, ceux qui ont le plus de besoins en ce domaine.

Monsieur Gattolin, je partage votre préoccupation devant un certain nombre de déséquilibres commerciaux. Je salue le travail qui a été réalisé par Mme Archimbaud sur les populations de la Guyane. S’agissant du sucre, le décret est actuellement notifié à la Commission européenne ; nous espérons qu’il pourra être publié prochainement.

Monsieur Magras, je vous remercie de la tonalité très positive de vos propos sur ce budget, reflet d’un travail que nous avons mené ensemble à Saint-Barthélemy lui-même extrêmement positif. Nous sommes prêts à apporter, en partenariat avec la Banque publique d’investissement, un préfinancement du crédit d’impôt, qui est indispensable.

Madame Tetuanui, vous avez évoqué la signature du RSPF, je n’y reviens pas. Sur la dotation globale d’autonomie, je répondrai de façon plus globale.

En ce qui concerne la prorogation de l’aide fiscale jusqu’en 2025, je pense que nous sommes parvenus à une réponse satisfaisante.

Monsieur Desplan, je ne reviens pas sur le logement, action que vous avez évoquée.

S’agissant des sargasses et de l’incidence sur le tourisme de la prolifération de ces algues, vous savez que l’État a mis sur pied un plan très important. Nous avons consacré 5 millions d'euros à ce dossier cette année. Nous avons pris en charge les frais de paiement des personnels qui sont amenés à ramasser ces algues et nous sommes conscients des désagréments qu’elles occasionnent pour les populations.

Toutefois, les élus doivent être comme nous conscients de la nécessité de s’attaquer tous ensemble au problème du ramassage de ces sargasses. Si elles sont ramassées régulièrement, grâce aux personnels que nous payons – et grâce aux entreprises que nous sommes prêts à payer –, il n’y a pas de dégagement d’odeurs nauséabondes, et la saison touristique est sauvée. Par conséquent, il n’y a pas de raison que ces sargasses ne soient pas ramassées aujourd'hui. Les moyens sont là !

J’ai entendu les observations formulées par M. Doligé. Sur la question des sucres spéciaux, je travaille sur la base des conditions dont j’ai hérité. Au moment où l’accord a été négocié, notamment avec le Vietnam, l’actuel gouvernement n’était pas encore en place. Apparemment, le précédent gouvernement n’a pas préparé les évolutions et personne n’a fait le nécessaire pour prendre en compte le sucre dans les accords internationaux. Je me bats, mais, bien évidemment, je ne peux pas renégocier un traité qui a été négocié avant que je prenne mes fonctions. Nous y travaillons, mais, malheureusement, il n’est pas toujours possible de rattraper ce qui n’a pas été fait en temps utile.

Monsieur Karam, je souscris à un grand nombre de vos propos. Je vous précise simplement que, s’agissant de l’OIN, nous allons aboutir très prochainement ; nous réunirons les élus pour en discuter avec eux.

Monsieur Arnell, je vous remercie d’avoir annoncé que vous alliez voter les crédits de la mission « Outre-mer ».

Pour ce qui est de l’emploi, nous y travaillons. Nous mettons en place un certain nombre d’aides. Toutefois, votre soutien est également nécessaire, car certains de ces dispositifs de contrats aidés ne sont malheureusement pas suffisamment utilisés.

Monsieur Laufoaulu, je vous remercie également de votre vote.

Nous avons récemment réglé une crise assez grave à Wallis, et je m’en félicite.

Nous travaillons sur le dispositif Cadres, ainsi que sur l’aide au fret. S’agissant du cofinancement, nous serons attentifs à ce que le taux, plafonné par le décret d’application de la loi de 2009, demeure adapté aux besoins exprimés.

Monsieur Antiste, je vous remercie de vos encouragements. Je partage votre avis sur l’importance des besoins en matière de logement, sur le travail à mener avec les petites entreprises qui, souvent, sont celles qui pourvoient à l’emploi des jeunes. J’ai bien noté dans vos propos un engagement moral de tous les élus à travailler de concert avec nous pour remédier à ce véritable cancer qu’est le chômage, notamment le chômage des jeunes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)