M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le président, madame la présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d’abord de saluer chaleureusement la qualité du travail que Mme Françoise Cartron a conduit pendant plusieurs mois, en allant au-devant des élus des petites communes pour comprendre leurs difficultés et leurs attentes, en échangeant avec les enseignants et les animateurs, en écoutant les parents et les enfants eux-mêmes sur cette question des nouveaux rythmes scolaires.

Le rapport que vous avez remis est d’une grande richesse, et il a été salué comme tel par nombre d’observateurs. Il illustre, par-delà la diversité des situations rencontrées sur le terrain, un état de fait que l’on ne peut plus guère contester : cette réforme, qui entre dans sa troisième année de mise en œuvre dans toutes les communes de notre pays, a désormais trouvé son rythme.

Après deux années certes intenses dans le travail d’organisation, il nous faut aujourd'hui en effet concentrer nos efforts pour repérer mieux et plus vite les bonnes pratiques et les rendre accessibles à tous.

Entendons-nous bien. Je ne viens pas devant la Haute Assemblée dans une posture provocatrice, qui nierait qu’il y ait encore ici ou là quelques difficultés. Ces difficultés, je les connais, je les ai entendues.

J’ai à de nombreuses reprises pris le temps d’aller sur le terrain, à la rencontre des élus, pour que nous réfléchissions ensemble aux solutions et pour les voir se dessiner. J’ai pris le temps d’écouter les familles, les enseignants, les animateurs, les associations. Chacun joue un rôle essentiel dans cette réforme, dont je tiens à rappeler qu’elle a été voulue et pensée pour les enfants, pour améliorer leurs apprentissages, pour permettre aussi à beaucoup plus d’enfants d’avoir des activités collectives épanouissantes.

M. Jean-François Husson. Une réforme imposée !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. J’ai agi, depuis plus de deux ans maintenant, avec l’appui de mes collègues chargés des familles et de la jeunesse, pour accompagner cette réforme, ainsi que pour en stabiliser le cadre et le financement.

J’ai également agi pour apporter des réponses concrètes et pour favoriser le dialogue entre des acteurs qui trop souvent œuvraient chacun de leur côté, alors qu’ils ont en partage l’immense responsabilité de participer à l’éducation des enfants, avant, pendant et après la classe.

Vous l’avez dit, madame la sénatrice, cette réforme a été difficile à mettre en œuvre, parce qu’elle a opéré des changements profonds dans notre organisation, parce qu’elle a mobilisé les énergies et les financements des communes, parce qu’elle a demandé un changement de pratiques des enseignants, des animateurs, parce qu’elle a conduit aussi les familles à adapter leurs comportements.

Oui, clairement, cette réforme a demandé beaucoup.

Oui, clairement, cette réforme a provoqué de nombreux débats dans toutes les communes de France. On peut le déplorer, mais on peut aussi relever, et vous n’êtes pas la seule à le faire, madame la sénatrice Françoise Cartron, que cette réforme a redonné à l’école une place essentielle dans les politiques locales,…

M. Jean-François Husson. Ce n’est pas lié à la réforme !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. … tout comme l’école tient une place essentielle dans la politique de la Nation.

J’ai entendu parfois des élus qui me disaient : « Cette réforme, nous ne l’avons pas voulue, les maires ne l’ont pas demandée ». À vrai dire, ce refrain, je ne l’entends plus, mesdames, messieurs les sénateurs. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Daniel Laurent. Sortez un peu !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Je ne l’entends plus, car les maires, que je sais si attachés à leur école, notamment dans les petites communes rurales, ont beaucoup travaillé pour trouver des solutions concrètes, et ils ont souvent fait de cette réforme un levier pour donner une nouvelle ampleur à la politique éducative locale, et même pour l’attractivité de leur commune.

Au moment d’engager ce débat avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais rappeler que la réforme des rythmes scolaires est d’abord une réforme pédagogique inscrite au cœur de la priorité donnée par le Gouvernement à l’école primaire.

J’admets que cette réforme a été difficile à mettre en œuvre par les élus. Mais personne ne peut contester qu’elle devait être faite, pour réparer les gravissimes erreurs qui ont été commises par le passé et qui pèsent encore aujourd’hui sur la réussite de nos enfants. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Daniel Laurent. C’est reparti !

Mme Catherine Troendlé. Quelles erreurs ?

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Je le répéterai autant que de besoin, cette réforme, nous l’avons engagée dès le début du quinquennat, parce que, en 2008, l’instauration de la semaine de quatre jours avait placé notre pays dans une situation ubuesque : les écoliers français avaient le nombre de jours d’école le plus faible de tous les pays de l’OCDE, soit 144 jours, contre 187 jours en moyenne pour les États appartenant à cette organisation.

Cette réforme des rythmes scolaires, nous l’avons faite parce que les écoliers français subissaient des journées plus longues et plus chargées que celles de la plupart des pays qui nous entourent. Les scientifiques spécialistes des rythmes de l’enfant l’avaient dit déjà à M. Chatel : l’extrême concentration du temps imposée par la réforme de 2008 était inadaptée et préjudiciable aux apprentissages ; elle était source de fatigue et de difficultés scolaires.

Que ne vous a-t-on entendu alors nous parler de la fatigue des enfants ! Cela eût été justifié. Ce constat très largement partagé, je voudrais simplement que nous ne l’oubliions pas, par honnêteté.

M. René-Paul Savary. Vous êtes malhonnête ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Pourtant, aujourd’hui, certains voudraient revenir en arrière.

Mesdames, messieurs les sénateurs, cette réforme, nous l’avons installée pour améliorer les apprentissages des élèves, en répartissant mieux les heures de classe sur la semaine et en permettant aux enseignants de programmer les séquences d’enseignement des savoirs fondamentaux – lire, écrire, compter –, à des moments, le matin, où la faculté de concentration des élèves est la plus grande.

Cette réforme, nous l’avons pensée comme un élément solidaire de la priorité au premier degré engagée par la refondation de l’école. Faut-il en rappeler certaines de ses dimensions qui n’ont pas pu vous échapper ? On peut ainsi évoquer la création massive d’emplois – quelque 19 328 créations d’emplois d’enseignants pour le premier degré depuis le début de ce quinquennat.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Nous avons clarifié, défini et inscrit dans la loi le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, rénové les programmes de maternelle et de l’école élémentaire, multiplié le nombre d’enfants de moins de trois ans scolarisés, déployé dans plus d’un millier d’écoles le dispositif « plus de maîtres que de classes ».

C’est dans ce cadre cohérent de la priorité redonnée à l’école primaire que la réforme des rythmes scolaires prend tout son sens et conduit, je vous le confirme, à une nouvelle organisation des apprentissages, mieux adaptée aux besoins de chaque élève.

Évidemment, j’ai demandé au Comité national de suivi de la réforme, installé en 2013, ainsi qu’à l’Inspection générale de l’éducation nationale, de nous accompagner pour que nous puissions tirer les meilleurs bénéfices possible de cette cinquième matinée retrouvée. Monsieur Abate, le comité national de suivi, que préside la rectrice de Lyon, et qui réunit tous les acteurs de la réforme, me remet chaque année son rapport à l’automne. Il s’est encore réuni il y a une semaine à peine et devrait très prochainement émettre ses recommandations au terme de son travail sur l’année scolaire 2015–2016.

Le rapport de l’Inspection générale de l’éducation nationale consacré aux bénéfices pédagogiques de la réforme, que j’ai rendu public en juin dernier, a pour sa part mis en lumière qu’il était trop tôt pour mesurer les effets des nouveaux rythmes, tout en établissant des recommandations et mises en garde précises.

Je puis vous assurer que j’ai pris en compte ces mises en garde et recommandations pour renforcer l’accompagnement pédagogique des enseignants.

Avec la mise en place des nouveaux programmes de maternelle l’an passé, de l’école élémentaire cette année, nous avons produit de très nombreuses ressources pédagogiques concrètes pour accompagner les enseignants dans l’utilisation de la cinquième matinée, laquelle est très appréciée par ces derniers – les retours que nous avons vont tous dans le même sens –, précisément pour les possibilités qu’elle offre sur le plan pédagogique.

Nous avons bâti des parcours de formation permettant de soutenir la réflexion des enseignants sur la construction de nouveaux emplois du temps propices aux apprentissages et la façon de mieux prendre en compte les besoins des enfants.

Aujourd’hui même se sont conclus des regroupements interacadémiques consacrés aux cycles 2 et 3, au cours desquels la question des rythmes et du temps d’apprentissage a été largement abordée.

Enfin, sachez que nous expérimentons avec les enseignants de plusieurs académies des parcours de formation en ligne consacrés aux emplois du temps et aux rythmes d’apprentissage.

Cet accompagnement nous donne aussi l’occasion de renforcer la complémentarité entre les acteurs : j’ai ainsi conclu en 2015 un partenariat avec le Centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT, pour favoriser des formations croisées entre enseignants et animateurs périscolaires ; je rappelle aussi qu’il existe une convention entre les écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, et le Collectif des associations partenaires de la République depuis 2014, laquelle permet à ce dernier de venir alimenter le vivier de formateurs et d’intervenir en appui pour la formation continue des enseignants, ce qui signifie, en bref, davantage de modules de formation, davantage de possibilités pour les enseignants de connaître le champ du périscolaire et davantage de formation à la complémentarité des acteurs au sein des ESPE.

M. Jean-François Husson. Excellent ! Que demande le peuple !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Je sais que c’est notamment une préoccupation de Mme Blandin, et c’est pourquoi je voulais revenir sur cette question.

Nous rendrons aussi disponible dès la fin du mois de novembre, pour les directeurs d’école, un module en autoformation consacré aux complémentarités entre projets d’école et activités périscolaires.

Voilà l’esprit de notre démarche : accompagner les enseignants, favoriser les synergies pour que la complémentarité, qui est au cœur de l’esprit des PEDT – projets éducatifs territoriaux –, vive réellement sur le terrain.

Madame Cartron, vous avez constaté que cela fonctionnait à Liomer, dans la Somme ; je l’ai vu moi aussi à Arras, à Feyzin, dans le réseau rural d’éducation constitué par des petites communes de l’Allier, ou encore à Vernoux-en-Vivarais, en Ardèche.

Et nous devons faire en sorte de le voir partout ailleurs,…

M. Jean-François Husson. Ce serait bien ! On n’y est pas !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. … car cette complémentarité sur le terrain est vraiment dans l’intérêt des enfants.

Ce travail d’accompagnement est bien sûr l’occasion de tirer parti des meilleures pratiques de terrain, car les pratiques de terrain évoluent très vite.

Les communes peuvent d’ailleurs s’entraider, comme le préconise l’Association des maires ruraux de France, très attachée à ces échanges entre grandes et petites communes.

Oui, il y a de nombreuses ressources que nous devons mieux faire connaître, celles des associations en particulier. Nous avons engagé ce travail d’inventaire sur quelques thématiques, comme l’accessibilité des activités périscolaires aux enfants en situation de handicap, ou encore les activités physiques et sportives. Nous allons encore amplifier cette action au cours de cette année.

Je voudrais illustrer mon propos en partant de l’exemple de la maternelle, sur lequel plusieurs d’entre vous ont insisté.

Je le dis d’emblée, je ne crois pas dans un retour en arrière qui isolerait la maternelle de l’école élémentaire. Ce n’est pas une question idéologique, c’est une question d’efficacité :…

M. Jean-François Husson. Vous persistez dans l’erreur !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. … les enseignants nous le disent, la cinquième matinée a permis, avec les nouveaux programmes, de mettre en place une nouvelle et réelle continuité des apprentissages : ces cinq matinées d’enseignement sont consacrées à des apprentissages exigeants en termes d’attention et de concentration.

Ce travail scolaire doit évidemment aller de pair avec la prise en compte des besoins et des rythmes des enfants de maternelle pour éviter la fatigue. C’est pourquoi j’ai donné très tôt, à peine arrivée à la tête de ce ministère, des instructions pour faire respecter une alternance équilibrée entre les temps d’activité et les temps calmes, et adapter les activités aux besoins des enfants les plus jeunes.

Comme vous le soulignez, madame Cartron, les conditions d’organisation de la sieste sont absolument essentielles. Ainsi, pour les enfants qui déjeunent à l’école, j’ai recommandé de les coucher dès la fin du repas, sans attendre la fin de la pause méridienne, de manière à préserver les temps d’apprentissage.

Accompagner cette réforme, cela veut dire aussi se doter d’indicateurs pour l’évaluation des effets de la réforme – nous serons tous d’accord sur ce point, me semble-t-il.

C’est pourquoi j’ai mis en place des outils d’évaluation scientifique : plusieurs enquêtes sont en cours de réalisation et portent, en relation avec les organisations de temps scolaires les plus significatives, aussi bien sur la progression des apprentissages des élèves, la mesure de l’absentéisme potentiellement engendré par certaines organisations et les rythmes chronobiologiques et chronopsychologiques des enfants que sur les pratiques enseignantes et la perception des familles. Ces enquêtes couvrent un champ très vaste, aucun sujet ne nous échappera. Les résultats seront publiés en 2017 et nous reproduirons ce type d’études à échéance régulière.

Ces résultats, nous les partagerons avec les élus, bien entendu, pour leur donner des outils de nature à les aider dans leurs choix d’organisation, qui peuvent évoluer, et surtout pour renforcer la cohérence et la complémentarité des temps de l’enfant.

Ces études scientifiques me paraissent essentielles si l’on veut sortir des débats sans fin, comme celui qui porte sur la fatigue, où l’on a vite fait d’accuser l’école, sans se soucier des heures de coucher des enfants, des usages des médias et de leur influence sur l’attention des élèves, sujet tout aussi essentiel, me semble-t-il.

M. Jean-François Husson. On ne dit pas le contraire !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. J’ai lancé des études scientifiques sur le sujet de la fatigue dans deux académies, celle d’Orléans-Tours et celle de Guadeloupe. Mais d’ores et déjà, l’étude scientifique commandée par le maire d’Arras montre clairement que les nouveaux rythmes n’ont pas créé de troubles du sommeil. Mieux encore, elle donne à voir que l’aménagement du temps scolaire et périscolaire a des effets positifs sur la vigilance en classe. Ce progrès mérite d’être souligné, d’autant qu’il semble encore plus fort pour les enfants scolarisés en réseaux d’éducation prioritaire, les REP, qui bénéficient encore plus de la participation aux ateliers.

Enfin, croyez-le, nous ne sommes pas les seuls à observer les effets de cette réforme. En effet, l’équipe du centre de pédagogie et de sociologie de l’université de Shigakukan mène actuellement, à la demande du gouvernement japonais, une mission d’analyse des rythmes scolaires en France. Elle a eu l’occasion de prendre connaissance du rapport de Mme Cartron et des activités organisées par la commune de Liomer, et nous nous en réjouissons.

Cette réforme, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous disais qu’elle était bien installée et bien suivie, mais je veux aussi rappeler qu’elle produit déjà des résultats positifs concrets.

Vous avez rappelé, dans votre propos liminaire, madame la sénatrice, des chiffres qui témoignent de l’ancrage de ces nouveaux rythmes sur l’ensemble du territoire : oui, 93 % des communes ont mis en place des activités périscolaires inscrites dans le cadre d’un PEDT. L’objectif de généralisation que j’avais soutenu devant vous à l’automne 2014 a donc été tenu, même dans les plus petites communes.

De plus en plus, les communes font le choix de créer des centres d’accueil de loisirs collectifs, ce qui est la garantie d’un meilleur niveau d’accueil des enfants. Et, cela a été rappelé, le nombre de places offertes aux enfants dans ces centres d’accueil de loisirs a augmenté de 2 millions en seulement deux ans, rien de moins !

Aujourd’hui, quelle que soit la source, le sentiment est partagé : les activités périscolaires ont trouvé leur public et satisfont les enfants.

Ainsi, selon les statistiques rapportées par l’Association des maires de France lors de son dernier congrès, 80 % des communes soutiennent que les nouvelles activités périscolaires contribuent à l’enrichissement culturel, à l’épanouissement et au sentiment de vivre ensemble chez les enfants ; 97 % des élus estiment avoir mis en place des ateliers dans lesquels les enfants sont heureux.

Autre enjeu, évidemment essentiel et qui a été évoqué par plusieurs d’entre vous, celui de l’égalité. Je veux tordre ici le cou à cette idée selon laquelle les nouveaux rythmes scolaires auraient accru les inégalités. Soyons sérieux !

Mme Françoise Férat. En effet, soyons sérieux !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. On estimait, avant la réforme, à 20 % la fréquentation des activités périscolaires – je pouvais le constater en tant qu’élue locale (Mme Françoise Férat se montre dubitative.) – ; aujourd’hui, selon les propres estimations de l’AMF, ce sont près de 70 % des enfants de l’école élémentaire qui participent aux activités périscolaires. Comment peut-on parler d’un creusement des inégalités ?

Évidemment, toutes les communes n’ont pas choisi la gratuité.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Oui, il s’agit de choix locaux, de choix politiques et financiers faits par les maires, mais je note que deux tiers des communes ont fait le choix de la gratuité, même si d’autres ont préféré adopter une tarification sociale.

Voilà l’esprit de la réforme : ouvrir l’accès aux activités périscolaires à tous les enfants, parce que cela est bon pour leur développement, bon aussi pour le vivre ensemble, si précieux dans notre société. (M. Jean-François Husson s’exclame.) J’ai vraiment été particulièrement sensible aux propos qui ont été tenus sur l’identité française, considérée positivement grâce aux activités périscolaires relatives au patrimoine des communes.

Oui, ces nouveaux rythmes scolaires servent à corriger les inégalités, et ce qui fait clairement la différence, ce n’est pas la taille de la commune, mais la taille de la volonté politique, comme le montre clairement votre rapport ! (Sourires.)

L’étude des effets des rythmes dans la commune d’Arras, qui s’est beaucoup engagée, montre à quel point on note une amélioration du climat dans les établissements scolaires. Les enseignants, notamment ceux qui exercent en REP, ont témoigné quant à eux de l’amélioration chez les élèves de l’autonomie, de la prise de responsabilité et du sentiment d’estime de soi. Ce ne sont pas de petits sujets ! (M. Jean-François Husson s’exclame.)

Ces progrès que j’évoquais, je le reconnais, nous les devons beaucoup à l’implication des élus locaux. Pour consolider ces progrès, j’ai fait depuis deux ans de l’accompagnement de l’État aux communes une priorité.

Accompagner les élus locaux, cela veut dire d’abord leur assurer un cadre financier et juridique stable.

Je n’ai jamais contesté que cette réforme ait un coût, et c’est précisément pour cela que j’ai fait de la pérennisation de l’accompagnement financier de l’État une priorité. C’est le premier dossier sur lequel je me suis battu en arrivant à la tête de ce ministère, et en obtenant gain de cause.

De fait, depuis 2015, l’accompagnement financier de l’État est pérennisé ; il est annuel, régulier et n’a pas de raison d’être remis en cause, sauf bien sûr si une autre politique devait être conduite à l’avenir. (M. Jean-François Husson s’exclame de nouveau.)

Il a bénéficié à plus de 20 000 communes en 2015–2016, un tiers d’entre elles ayant touché l’aide majorée de 90 euros par élève. Au total, depuis 2013, ce sont près de 830 millions d’euros qui ont été versés à ce titre par l’État.

À ces aides s’ajoutent bien sûr celles de la branche Famille, qui a fait, elle aussi, un effort considérable : depuis 2013, elle a consacré près de 1,2 milliard d’euros, à travers les prestations de service ordinaire, l’aide à la réforme des rythmes éducatifs et les financements au titre des contrats « enfance jeunesse ». En 2016, leurs engagements représenteront près de 539 millions d’euros.

J’ai entendu les demandes de simplification qui ont été exprimées localement. C’est un axe de travail, et soyez assurés, mesdames, messieurs les sénateurs, que les moyens ont été prévus sur la durée de la convention d’objectifs et de gestion de la CNAF pour accompagner la montée en charge des accueils de loisirs déclarés et pouvoir faire face à un taux de fréquentation des activités périscolaires de 100 %.

Plusieurs d’entre vous ont rappelé la demande de l’AMF d’une compensation intégrale des dépenses. Mais la Haute Assemblée le sait bien, ce n’est pas la règle lorsqu’il s’agit d’un service public facultatif mis en place par les communes et les intercommunalités.

Mme Catherine Troendlé. C’est un transfert de charge !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Françoise Cartron dit aussi très bien dans son rapport que les situations sont hétérogènes ; de nombreux élus ont su mettre en place des activités de qualité à moindre coût ; d’autres communes se sont réorganisées, en faisant notamment appel à l’intercommunalité pour mutualiser les dépenses. (M. Jean-François Husson s’exclame.) Il ne faut pas avoir peur de dire que ces organisations intercommunales sont un levier d’efficacité qui ne met nullement en cause l’identité de chaque commune.

Nous ne sommes pas restés sourds non plus aux demandes des élus de leur offrir un cadre souple et adaptable aux situations locales. J’ai ainsi répondu favorablement à toutes les demandes des communes qui n’avaient pas réussi à établir leur PEDT en 2015. Nous attendions ces demandes de la part de petites communes, mais nous avons constaté qu’elles émanaient également de grandes villes qui avaient a priori les moyens d’agir, comme Toulouse. Mais nous les avons aidées !

J’ai décidé l’an dernier, pour les communes les plus fragiles, de neutraliser les effets d’une sortie de l’inscription sur la liste des communes classées en DSU-cible ou en DSR-cible. Comme le dit souvent l’un de mes conseillers, bouchée avalée n’a plus de saveur, mais n’oublions pas que ce sont tout de même des décisions fortes et importantes ! Ces communes peuvent ainsi continuer à bénéficier de l’aide majorée de 90 euros pendant toute la durée de leur PEDT.

Enfin, cet été, j’ai, avec mon collègue ministre de la jeunesse, pérennisé les souplesses permises en matière d’organisation des temps scolaires et de taux d’encadrement des activités, comme je m’y étais engagé auprès des associations d’élus.

Voilà des actes concrets qui disent simplement notre confiance dans le travail des élus et notre volonté de collaborer avec eux de la manière la plus fructueuse possible.

Accompagner les élus locaux, cela veut dire aussi leur apporter le soutien et l’expertise qu’ils sollicitent de l’État. En effet, madame Danielle Michel, nous devons apporter un soutien plus présent aux élus, en nous inspirant de ce qui se fait de bien. Vous avez cité le département des Landes ; je pense aussi au travail réalisé dans la Manche, en Corse-du-Sud (Mme Françoise Cartron opine.) ou encore en Meurthe-et-Moselle.

Avec mon collègue Patrick Kanner, nous avons donné des instructions à nos services pour passer à une deuxième étape de la mobilisation de groupes d’appui départementaux – GAD – pour qu’ils accompagnent les collectivités qui le souhaitent dans l’évaluation de leur PEDT et la préparation de leur renouvellement.

Ce temps de bilan est important et nous devons aider les élus, en leur apportant nos conseils et notre expertise.

Nous avons aussi demandé aux GAD de porter une attention renforcée aux actions visant à favoriser la mutualisation de ressources dans les territoires et la mise en place de formations communes aux personnels d’animation et enseignants, particulièrement utiles pour favoriser une approche transversale de l’organisation des temps scolaires et périscolaires.

Cette instruction a été discutée avec l’Association des maires de France et sera publiée ce jeudi au Bulletin officiel de mon ministère.

Je veux enfin amplifier la production de ressources pour enrichir encore l’offre d’activités périscolaires et leur connaissance. Nous publierons cette année deux nouveaux guides aux élus portant sur les activités artistiques et culturelles et sur l’association des parents à l’élaboration, au suivi et à l’évaluation des PEDT.

Tous les acteurs ont été associés à l’élaboration de ces guides et c’est, je crois, une pratique qui peut inspirer bien d’autres politiques publiques partagées.

En conclusion, mesdames, messieurs les sénateurs, les nouveaux rythmes scolaires sont désormais installés et nous devons, dans la concertation et avec beaucoup de pragmatisme, accompagner ceux qui en sont les acteurs.

Nous n’avons pas besoin de polémique inutile. Nous avons besoin de prolonger la dynamique qui est à l’œuvre sur le terrain et qui a changé la vie de l’école, pour nous permettre de donner encore plus de chances de réussite à tous les enfants. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Françoise Laborde et M. Michel Le Scouarnec applaudissent également.)

M. le président. Nous en avons terminé avec la question orale avec débat sur la mise en œuvre des nouveaux rythmes scolaires dans les petites communes.