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Rappel au règlement

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour un rappel au règlement.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Le groupe CRC souhaite saluer l’action de collectifs féministes qui appelaient les femmes à cesser le travail aujourd'hui à 16 heures 34, pendant vingt-sept secondes, afin de dénoncer les discriminations et les inégalités salariales dont elles font toujours l’objet. (Exclamations amusées sur certaines travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.) Cela fait sourire certains, mais je leur rappelle que l’écart salarial entre hommes et femmes est encore de 19 % !

Mme Catherine Procaccia. Ce ne sont pas les inégalités qui nous font sourire, mais les vingt-sept secondes !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous devons nous associer à toute initiative permettant de faire connaître et de soutenir ce combat pour l’égalité. (Applaudissements sur la plupart des travées.)

M. le président. Ma chère collègue, acte vous est donné de ce rappel au règlement.

Pour nous associer à cette initiative, je propose, avant que nous abordions l’examen du second texte inscrit à l’ordre du jour, de suspendre la séance, et pour un peu plus longtemps que vingt-sept secondes ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste et républicain.)

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Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle
Article 1er (Texte non modifié par la commission)

Liaison ferroviaire Paris-aéroport Charles-de-Gaulle

Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle.

Je rappelle que la discussion générale a été close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre paris et l’aéroport paris-charles de gaulle

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle
Article 1er bis (supprimé)

Article 1er

(Non modifié)

L’ordonnance n° 2016-157 du 18 février 2016 relative à la réalisation d’une infrastructure ferroviaire entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle est ratifiée.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l'article.

Mme Laurence Cohen. Le CDG Express coûtera davantage que l’ensemble des investissements prévus pour le réseau des transports d’Île-de-France sur la période 2015-2020. Ce n’est pas sérieux !

Les élus franciliens connaissent bien ce projet. Cela fait des années que nous en entendons parler. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est loin de faire l’unanimité. Pour qui connaît les vrais besoins des usagers des transports franciliens aujourd'hui, il apparaît bien éloigné des réalités…

Si l’on consultait les Franciliens sur l’opportunité de réaliser cette ligne au coût exorbitant, je ne donnerais pas cher de son avenir… Vous me direz que cela s’explique, puisque ce projet n’est pas conçu pour eux ! Sa mise en œuvre risquerait juste de dégrader encore un peu plus leurs conditions de transport, puisque le CDG Express est censé emprunter, sur une bonne partie de son parcours, les voies du RER B.

Comme l’a souligné Pierre Laurent en mai dernier à l’occasion d’une question orale, les créneaux horaires réservés aux rames du CDG Express sur la ligne reliant Paris à Hirson ne pourraient plus servir à la circulation d’autres trains – je pense à la recréation de rames RER reliant directement l’aéroport de Roissy et la gare du Nord ou à de nouveaux TER.

À ce sujet, je rappelle que, en 1976, les trains du RER B assuraient la liaison directe entre Paris et l’aéroport Charles-de-Gaulle en seulement dix-neuf minutes !

Mme Éliane Assassi. C’est vrai !

Mme Laurence Cohen. De plus, il ne sera pas possible, avec un billet vendu au prix très élevé de 24 euros, d’utiliser le réseau du métro une fois arrivé à la gare de l’Est, et le CDG Express ne sera pas accessible aux usagers titulaires d’un pass navigo.

Ainsi, la création de cette ligne ne contribuera pas à une relance économique indispensable à notre pays, ni au renforcement de l’attractivité du territoire. En effet, la nécessaire modernisation du réseau ferroviaire exige davantage que la mise en service d’une ligne réservée à une poignée de personnes.

Ce n’est pas là une affirmation gratuite : le potentiel de transport du CDG Express est de seulement 22 000 passagers par jour, alors que, aujourd’hui, 900 000 passagers bien réels empruntent le RER B ! Je parle en connaissance de cause, car, comme d’autres ici, je fréquente cette ligne.

Le Gouvernement fait preuve du même mépris à l’égard des habitants des Hauts-de-France, en manœuvrant pour repousser aux calendes grecques l’échéance de la réalisation du barreau Creil-Roissy, laquelle, outre qu’elle améliorerait grandement les conditions de transport des milliers de salariés travaillant à Roissy, contribuerait à soulager le trafic sur la ligne B du RER.

En résumé, comme Éliane Assassi l’a indiqué, nous nous prononçons contre ce projet du CDG Express et pour la promotion de moyens de transport collectif qui permettent à toutes et à tous de disposer du droit à la mobilité à un tarif accessible.

Mme Éliane Assassi. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Yonnet, sur l'article.

Mme Évelyne Yonnet. Le Charles-de-Gaulle Express représente pour Paris un fabuleux projet d’avenir. Sa réalisation permettra de répondre aux enjeux de développement économique, d’attractivité et d’accessibilité de Paris via son hub international.

De plus, ce mode de transport moderne, rapide et propre permettra de relier l’aéroport Charles-de-Gaulle et la capitale dans le temps record de vingt minutes.

La mise en œuvre de ce projet dotera Paris et son aéroport d’une infrastructure de haute qualité, similaire à celles dont bénéficient les autres grandes capitales européennes et internationales. Cette ligne sera un atout déterminant pour le développement et la compétitivité de Paris dans un monde de plus en globalisé et interconnecté. Le statut de ville-monde de Paris se trouvera confirmé.

Cette infrastructure sera également un atout majeur pour l’image de notre pays et la qualité de l’accueil des touristes en France. L’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle a accueilli plus de 65 millions de passagers en 2015 et ce chiffre devrait atteindre 80 millions d’ici à 2025. Le développement touristique et le caractère de pôle d’attractivité de Paris se trouveront donc accentués.

Néanmoins, après toutes ces constatations positives et partagées, je mettrai l’accent sur plusieurs points qui méritent d’être soulignés, car ils sont très importants pour le territoire de la Seine-Saint-Denis.

Plusieurs de mes collègues sont déjà intervenus à propos de la ligne B du RER. Quelques améliorations ont été apportées à ses infrastructures ces dernières années, grâce à la mobilisation des usagers et du conseil départemental, mais le devenir de cet équipement, qui demeure très vétuste, reste un sujet d’inquiétude.

Le centre de certaines villes de mon département limitrophes de Paris n’accueillera le métro qu’en 2019. Une amélioration des lignes de tramway T4 et T8 est certes en cours en Seine-Saint-Denis. Nous avons également obtenu un nombre plus important d’autobus. Le rattrapage des transports en commun que les élus appellent de leurs vœux a commencé.

Je salue le travail qu’a mené Jean-Paul Huchon, tout au long de son mandat de président de la région, pour compenser tous les retards accumulés depuis de nombreuses années sur le territoire de la Seine-Saint-Denis. Ils creusaient les inégalités en matière d’accès à l’emploi, grevaient le développement économique et l’attractivité de ce département.

Comment penser la ville de demain si des retards subsistent et s’aggravent ? Paris ne pourra se développer sans une prise en considération de ses territoires annexes.

M. Philippe Dallier. Territoires annexes ? Ce n’est pas très respectueux !

M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Évelyne Yonnet. Des questions se posent, s’agissant notamment du tarif de ce nouveau mode de transport, de son accessibilité pour les usagers, particulièrement ceux qui travaillent à l’aéroport de Roissy. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez répondu en partie aux questions légitimes de nos concitoyens.

M. le président. L'amendement n° 2, présenté par Mme Assassi, MM. Billout, Bosino, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. La concomitance du CDG Express avec d’autres projets de transport, comme la ligne 17 du Grand Paris Express, le rend redondant.

Il met en danger la réalisation de la ligne 17 du futur métro du Grand Paris Express, qui reliera Roissy et le carrefour Pleyel, à Saint-Denis, et est considérée par beaucoup d’élus comme la clé du développement futur de la Seine-Saint-Denis.

Les trains du CDG Express emprunteraient les voies de la ligne K, du TER Picardie et du fret, qui sont aussi les voies de report du RER B en situation perturbée. Leur circulation aurait aussi un impact sur les lignes D et E du RER.

Autrement dit, pour transporter à peine 22 000 passagers par jour à l’horizon 2025, on dégraderait les conditions de transport de 2 millions d’autres usagers ! Encore ce chiffre de 22 000 passagers est-il généreux, puisque les études démontrent que la mise en service de la ligne 17 réduira de 15 % la fréquentation envisagée pour le CDG Express.

De plus, le montage de ce projet ne garantit pas l’exploitation par SNCF Mobilités et comporte ainsi un grand risque de privatisation de l’offre de transport public.

Même si ce risque devait ne pas se réaliser, force est de constater que l’État possède 51 % d’ADP et 100 % de SNCF Réseau. Ce dernier acteur est un établissement public, portant une dette, publique elle aussi, de près de 40 milliards d’euros. Or, le projet CDG Express, même avec un prix du billet fixé à 24 euros, n’est pas rentable.

Le Gouvernement prévoit donc d’instaurer une taxe sur les compagnies aériennes pour combler le déficit, taxe qui sera compensée par une réduction d’impôts pour les compagnies aériennes… Y a-t-il donc, dans ce montage, une part du financement qui ne provienne pas des pouvoirs publics ?

Nous vous invitons, mes chers collègues, à voter cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. L’avis de la commission est défavorable.

Le CDG Express est un service commercial destiné aux passagers aériens de Paris-Charles-de-Gaulle qui souhaitent rejoindre rapidement le cœur de la capitale. Il est indissociable du service offert par l’aéroport et ne répond pas aux mêmes objectifs que la future ligne 17 reliant Saint-Denis-Pleyel au Mesnil-Amelot, qui desservira, sur son passage, l’aéroport du Bourget et le terminal 2 de Paris-CDG.

De manière générale, il ne faut pas confondre le CDG Express avec une liaison de service public classique dédiée aux transports du quotidien. Ce projet répond à un autre objectif d’intérêt général, à savoir le soutien à l’attractivité économique de notre pays et au développement de notre principal aéroport, plus globalement à notre développement touristique et économique à l’échelle nationale.

Il ne faut donc pas opposer ce projet d’intérêt général à des missions d’intérêt général comme le transport des Franciliens : il faut les concilier. Une enveloppe de 125 millions d’euros a d’ailleurs été ajoutée au projet pour financer les investissements nécessaires au bon fonctionnement du RER B, dont la situation est dégradée.

Enfin, la dérogation au monopole attribué en droit interne à SNCF Mobilités pour l’exploitation des lignes du réseau ferré national compense le choix d’une attribution directe de gré à gré pour la construction de l’infrastructure: C’est la seule manière de rendre ce projet compatible avec le droit européen de la concurrence.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Il n’est pas raisonnable d’opposer ce projet aux transports du quotidien.

Permettez-moi d’insister sur une autre dimension de ce projet, qui n’a pas été évoquée ce soir, sans doute parce qu’elle fait l’objet d’un large consensus : son inscription dans une démarche de développement durable. La liaison CDG Express permettra de décongestionner les autoroutes A1 et A3 et de ramener la part des trajets routiers de 60 % à 40 %.

Ce projet sera réalisé sans recourir à des financements publics, contribuera à renforcer l’attractivité touristique de Paris et s’inscrit dans une démarche de développement durable : je m’étonne donc d’une prise de position aussi définitive contre sa mise en œuvre.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Cette liaison ferroviaire directe entre Paris et l’aéroport Charles-de-Gaulle est-elle nécessaire ? Dans l’affirmative, comment la financer ? Telles sont les deux questions auxquelles nous devons répondre.

Élu de ce territoire si particulier qu’est la Seine-Saint-Denis, je suis moi aussi très attentif aux conditions de transport sur la ligne B du RER.

Le projet de liaison directe remonte à l’an 2000. J’en garde un souvenir très précis en tant que maire, puisque, cette année-là, les porteurs du projet initial étaient venus m’annoncer que c’est aux Pavillons-sous-Bois que serait installée la base du chantier de construction d’un tunnel de treize kilomètres entre La Villette et Sevran, où circuleraient des navettes ne marquant aucun arrêt sur le trajet jusqu’à l’aéroport. Le projet, m’assurait-on, était financièrement équilibré. On connaît la suite…

Dans le cadre du débat public qui a suivi, un bureau d’études suisse indépendant a démontré l’existence d’une autre solution technique : dégager des créneaux sur les voies du RER B, tout en préservant celui-ci.

Chers collègues du groupe CRC, je comprends vos réticences, mais nous ne pouvons plus différer la réalisation d’un projet nécessaire pour l’attractivité de la région d’Île-de-France et qui, par contrecoup, profitera au pays tout entier. Il faut maintenant franchir le pas ! Je n’ai pas le moindre doute à cet égard.

Songeons un instant à l’image que donne de notre pays le trajet entre Paris et l’aéroport de Roissy par les autoroutes A3 ou A1 ! Pour emprunter la première tous les soirs et la seconde plusieurs fois par mois, je puis vous dire que cette image est catastrophique ! Je ne parle pas seulement des embouteillages, mais aussi, monsieur le secrétaire d’État, de l’état des abords : les candélabres ne fonctionnent plus, les murs sont recouverts de tags et l’herbe n’est même plus coupée le long de la route… C’est honteux ! Celui qui arrive à Paris a l’impression d’être n’importe tout, sauf au cœur de l’Europe ! Je pense qu’il faut régler ces problèmes-là aussi,…

Mme Évelyne Yonnet. Absolument !

M. Philippe Dallier. … mais réaliser la liaison directe est nécessaire. Je suis donc résolument contre l’amendement. (M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Je me réjouis d’entendre le Gouvernement et l’ensemble de nos collègues défendre le développement du transport ferroviaire pour préserver l’environnement. Nous étions pourtant bien seuls à combattre les cars Macron… Au groupe CRC, nous ne tenons pas de double langage : nous défendons l’environnement partout, en Île-de-France, en Europe et dans le monde !

Par ailleurs, ancienne présidente de la commission de la démocratisation du STIF, je rappelle que ce projet est loin d’être soutenu par les populations. De fait, comment imaginer qu’il sera sans conséquence sur les transports du quotidien quand on connaît les galères du RER B ? Prétendre cela, c’est faire insulte à notre intelligence ! Les conditions de transport sur la ligne B du RER se dégraderont de toute évidence encore davantage.

Mme Laurence Cohen. Le projet initial présenté par Christian Blanc consistait à desservir les pôles d’affaires, les fameux pôles d’excellence. Les Franciliennes et les Franciliens s’y sont opposés au cours des enquêtes publiques, car ils ne voulaient pas regarder passer les trains sans pouvoir y monter. On réintroduit par la fenêtre un projet qui avait été jeté par la porte…

Notre amendement de suppression est cohérent avec les positions que nous avons toujours défendues, mais surtout avec l’intérêt des populations ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme Éliane Assassi. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.

M. Vincent Capo-Canellas. Mme Cohen a insisté à juste titre sur la galère du RER B. Usager régulier de cette ligne, je tiens à souligner l’espoir que représente, pour les voyageurs, la perspective d’une séparation des flux. En effet, il n’y a rien de pire que de se retrouver à l’heure de pointe à côté de voyageurs chargés de bagages !

M. Philippe Dallier. Exactement !

Mme Nicole Bricq. C’est évident : le RER n’est pas conçu pour le transport de bagages !

M. Vincent Capo-Canellas. Certaines estimations font espérer une baisse de trafic sur le RER B pouvant atteindre 30 %. Il faut rester prudent, mais il est sûr qu’une partie des flux vont se reporter sur le CDG Express.

Par ailleurs, l’enveloppe du projet contient aussi une enveloppe destinée à financer le renforcement et la modernisation du RER B, sur la nécessité desquels nous nous accordons tous.

Je rappelle également que le CDG Express ne sera pas financé sur crédits publics ; rien, donc, ne sera enlevé au RER B, comme M. le secrétaire d’État l’a encore répété voilà quelques instants.

Enfin, d’après les travaux de la direction régionale et interdépartementale de l’équipement et de l’aménagement d’Île-de-France, l’autoroute A1 sera totalement thrombosée à l’horizon de 2030. Il faut donc construire une liaison directe, qui sera en outre bénéfique pour l’emploi.

Sous tous les gouvernements, on essaie d’améliorer les transports en Île-de-France. Comme on part de très loin, chaque fois qu’on met l’accent sur l’un des modes, les utilisateurs des autres redoutent d’être lésés. À cet égard, il me semble que le dispositif prévu comporte un certain nombre de garanties. N’opposons pas l’amélioration des transports du quotidien et la desserte directe : il faut mener les deux chantiers de front !

M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour explication de vote.

Mme Aline Archimbaud. Je suis moi aussi élue de Seine-Saint-Denis et utilisatrice du RER B. Nous sommes tous d’accord pour renforcer l’attractivité économique et touristique de l’Île-de-France, selon une démarche de développement durable.

Monsieur le secrétaire d’État, vous avez appelé à l’apaisement et demandé que l’on n’oppose pas l’amélioration du fonctionnement du RER B et le projet CDG Express. À ce stade, je me pose trois séries de questions.

D’abord, en ce qui concerne les financements, à quoi la somme de 125 millions d’euros qui a été évoquée correspond-elle exactement ? Tous gouvernements confondus, on a trop longtemps laissé se dégrader les infrastructures ; je pense en particulier au tunnel de Châtelet. Voilà des dizaines d’années que nous attendons, en Seine-Saint-Denis ! Quand donc des travaux seront-ils enfin entrepris ? Je ne suis pas sûre que 125 millions d’euros suffisent pour tout faire…

Ensuite, le montant de 32 milliards d’euros a été mentionné pour le Grand Paris Express, dont la ligne 17 ira jusqu’à l’aéroport Charles-de-Gaulle : pourquoi les investissements très importants réalisés dans ce cadre ne permettraient-ils pas de répondre à l’objectif de créer une liaison rapide et efficace ?

Enfin, je suis assez troublée par le débat sur la séparation des flux. D’après les estimations que j’ai pu consulter, la mise en service de la liaison directe entraînerait une réduction de 6 % du nombre de voyageurs sur la ligne B du RER, ce qui n’est pas considérable. D’ailleurs, que signifie cette volonté de séparer les publics ? Les habitants de la Seine-Saint-Denis peuvent très bien voyager au contact des utilisateurs de l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle !

Je ne vois pas pourquoi une amélioration significative et structurelle du fonctionnement du RER B et la création d’une ligne 17 rapide et efficace ne permettraient pas de relever tous les défis auxquels nous devons faire face !

Mme Éliane Assassi. Tout à fait !

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.

M. Philippe Dominati. Monsieur le secrétaire d’État, dans le propos que vous avez tenu à l’issue de la discussion générale, je n’ai pas entendu de réponses aux questions que je vous avais posées sur l’équilibre financier du projet. J’y reviens donc.

Premièrement, je voudrais savoir si Air France, principal utilisateur de la plateforme aéroportuaire de Roissy-Charles-de-Gaulle, considère la création de cette liaison directe comme utile. À ma connaissance, deux dirigeants de cette compagnie se sont déjà exprimés, pour dire qu’ils n’étaient pas favorables à ce projet, au motif que sa réalisation pèserait sur la compétitivité de l’aéroport Charles-de-Gaulle. Pouvez-vous nous apporter des éclaircissements sur cette question précise ?

Deuxièmement, qu’est-ce qui a justifié le revirement de la position d’Aéroports de Paris, dont le président actuel est favorable au CDG Express, tandis que son prédécesseur y était hostile ? Par ailleurs, pourquoi cette entreprise ne contribue-t-elle pas au financement de ce projet ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. En ce qui concerne la séparation des flux, madame Archimbaud, on peut comprendre que la présence, dans un même train, de voyageurs chargés de bagages et d’usagers du quotidien est source de difficultés pour les uns comme pour les autres.

Mme Nicole Bricq. C’est évident !

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Diffuser des annonces multilingues sur le CDG Express me semble tout aussi compréhensible. Veut-on que les touristes aient pour seule option de prendre un taxi ou un VTC, alors que l’encombrement des autoroutes A1 et A3 est une évidence ? La séparation des flux n’est pas l’objet principal du projet, mais un moyen d’améliorer la situation.

Ces détails ne sont pas forcément du niveau du débat parlementaire, mais je vous indique, madame Archimbaud, que l’enveloppe de 125 millions d’euros servira au financement d’installations de retournement et d’aiguillages supplémentaires destinés à faciliter la cohabitation des deux services sur la fraction de voies qui leur sera commune. Ces informations sont au demeurant déjà connues et publiques.

Il s’agit aussi de définir les règles de priorité de circulation, qui s’appliqueront seulement en cas de difficulté. À cet égard, les consignes que nous avons données sont très claires : c’est le transport du quotidien, c’est-à-dire le RER B, qui sera prioritaire, parce que l’on peut considérer que les usagers du quotidien sont soumis à des contraintes horaires plus fortes.

Monsieur Dominati, je regrette de ne pas pouvoir répondre complètement à vos questions. Je ne sais pas quelle était la position des anciens dirigeants d’Aéroports de Paris. Par ailleurs, vous croyez savoir, apparemment, quel sera le mode de financement alternatif, alors que j’ai seulement dit, à ce propos, que nous avions renoncé à instaurer une taxe sur les passagers du transport aérien avant 2024, compte tenu des enjeux en matière de compétitivité. Vous ne pouvez pas préjuger quelles solutions le Gouvernement proposera, car, pour l’heure, nous n’en avons écarté aucune. Nous continuons à travailler sur le sujet.

Vous m’interrogez sur l’équilibre du projet. La tentative de concession privée ayant échoué, il faut trouver des recettes complémentaires et apporter des fonds propres. Nous avons pris le taureau par les cornes et fait le nécessaire pour que le projet réussisse.

En ce qui concerne Air France, il n’est pas surprenant que ses dirigeants n’aient pas montré d’enthousiasme à l’idée de contribuer immédiatement au financement du projet. En revanche, les responsables d’Aéroports de Paris et d’Air France, qui sont de grands chefs d’entreprise, sont évidemment intéressés par la construction d’un équipement qui confortera l’attractivité de l’aéroport Charles-de-Gaulle, et donc leur activité.

Il faut bien voir que le CDG Express est un projet de développement économique avant d’être un projet de transport. (Mme Nicole Bricq opine.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Mme Éliane Assassi. Je sais bien que pragmatique ne rime pas toujours avec politique, mais j’aimerais tout de même comprendre, monsieur le secrétaire d’État, comment la circulation de trains directs et d’omnibus sur les mêmes voies pourra être sans incidence sur le cadencement des rames du RER B…

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. C’est évidemment impossible !

Mme Éliane Assassi. Je reviens sur la question du fret, faute d’avoir obtenu une réponse sur ce sujet, que j’avais soulevé en intervenant dans la discussion générale. Aux termes du rapport de l’enquête publique, « les voies ferrées existantes qui seraient empruntées par le CDG Express sont utilisées aujourd’hui par différentes circulations : des trains de passagers, mais aussi des trains de fret qui entrent ou sortent de l’Île-de-France depuis et vers les territoires situés à son nord-est ». Ce rapport évoque le risque que le CDG Express provoque des perturbations de ces trafics : je n’invente rien ! Veut-on donc que les marchandises soient davantage encore transportées par voie routière ?

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle
Article 1er ter (nouveau)

Article 1er bis

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 3, présenté par M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

La réalisation de l'infrastructure ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle prévue par l'ordonnance n° 2016-157 du 18 février 2016 précitée ne peut faire l’objet d’aucun financement direct de l’État hormis les seuls frais déjà ordonnancés et ceux relatifs à la rupture des relations contractuelles afférentes audit projet, dans le respect des règles de droit commun.

Toute clause contraire est réputée non écrite.

La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.

M. Yves Pozzo di Borgo. En avril 2010, lors de l’examen du projet de loi relatif au Grand Paris, j’avais déjà présenté un amendement visant à prévoir que le projet du CDG Express ne pourrait bénéficier d’aucun financement direct de l’État. Il avait été adopté à l’unanimité de notre assemblée, contre l’avis du Gouvernement, mais avec le soutien implicite du secrétaire d’État Christian Blanc. J’avais fait valoir deux arguments.

D’abord, j’avais expliqué que le métro automatique comprendrait une liaison Roissy-La Défense-gare Saint-Lazare. À l’époque, on parlait déjà d’une rupture de charge à Saint-Denis Pleyel, en espérant que la RATP et la SNCF trouveraient une solution pour l’éviter.

Ensuite, j’avais souligné que le plan de modernisation de la ligne B du RER annoncé en 2009 par la RATP et la SNCF, avec une échéance fixée à 2012, prévoyait un doublement des voies et un investissement minimal de 250 millions d’euros, coordonné par le STIF.

Aujourd’hui, je suis obligé de constater, d’une part, que le problème de la rupture de charge à Saint-Denis Pleyel n’a pas été résolu, et, d’autre part, que les efforts annoncés en faveur de la modernisation du RER B sont loin d’avoir été faits. Dans ces conditions, je ne puis que retirer cet amendement. Je ne l’aurais pas déposé en 2010 si j’avais su ce que je sais aujourd’hui !

Je soutiens le projet de loi et je souscris aux arguments présentés par plusieurs de nos collègues, en particulier Vincent Capo-Canellas.

Je retire l’amendement, monsieur le président.