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Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur le site internet du Sénat.

Mes chers collègues, comme à chaque fois, j’appelle chacun de vous à observer au cours de nos échanges l’une des valeurs essentielles du Sénat : le respect et l’écoute des uns et des autres.

Je demande également à chaque intervenant de respecter le temps de parole qui lui est imparti.

Au cours de cette séance de questions, M. Jean-Claude Gaudin me remplacera au fauteuil de la présidence, et je l’en remercie.

examen du projet de loi finances pour 2017

M. le président. La parole est à Mme Michèle André, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Yvon Collin applaudit également.)

Mme Michèle André. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce jeudi 24 novembre, le Sénat aurait dû entamer, comme chaque année, l’examen en séance plénière du projet de loi de finances, et ce pour plusieurs semaines, jusqu’au 13 décembre prochain.

Dans ce budget, des choix essentiels ont été faits. Je citerai, entre autres mesures, une nouvelle baisse de l’impôt sur le revenu de 1 milliard d’euros, prévue dans le quantum global, qui ciblera les classes moyennes et touchera 5 millions de foyers fiscaux,…

M. Albéric de Montgolfier. Mesure non financée !

Mme Michèle André. … la réforme du prélèvement à la source, qui bénéficiera à tous les Français et leur permettra de mieux faire face aux différents événements de la vie, ou la poursuite de la diminution des dépenses de l’État, associée au financement de nos priorités, au premier rang desquelles l’emploi, l’éducation et la protection des Français, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de nos frontières.

La commission des finances a accompli un travail de qualité. Notons que sur la quasi-totalité des missions budgétaires examinées, la plupart ont été adoptées. Toutefois, pour un certain nombre d’entre celles qui ont été rejetées, il nous a semblé que la majorité ne savait pas s’il y avait trop de crédits ou pas assez…

La droite déposera donc une motion tendant à opposer la question préalable. De ce fait, et pour la première fois depuis vingt-quatre ans, le Sénat n’examinera pas le budget !

M. Simon Sutour. C’est scandaleux !

Mme Michèle André. Je m’étonne, lorsque l’on prétend incarner l’alternance, que l’on ne soit pas en mesure de présenter un budget alternatif ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur quelques travées du groupe écologiste.)

Hasard du calendrier sans doute, la Commission européenne vient justement de faire savoir à la France qu’elle validait son projet de budget et qu’elle considère que l’objectif d’un déficit sous les 3 % du PIB sera respecté l’année prochaine, n’en déplaise à certains…

Monsieur le Premier ministre, puisque la majorité sénatoriale a choisi de ne pas examiner le budget pour 2017, pourriez-vous présenter dans cet hémicycle les grandes mesures concrètes (Exclamations amusées sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.) qui contribueront à améliorer la vie des Français l’an prochain et dont la majorité sénatoriale ne veut pas débattre ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. François Fortassin applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Madame la présidente Michèle André, vous l’avez dit, et je le constate, la majorité sénatoriale a annoncé qu’elle rejetterait le budget de la France pour 2017 sans même véritablement l’examiner ou le discuter (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Louis Carrère. Regardez-moi ces démocrates !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Je réponds à Mme la présidente Michèle André, qui m’invite à vous donner un certain nombre d’informations.

Je regrette profondément le choix de la droite sénatoriale.

Mme Catherine Troendlé. Il s’agit d’un choix responsable !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Je le regrette pour l’institution sénatoriale. Je suis d’autant plus surpris par cette décision que le président du Sénat, que je respecte évidemment infiniment (Exclamations amusées sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.), avait déclaré à la fin du mois de septembre qu’il souhaitait que le Sénat examine le budget. Il avait même affirmé – j’imagine qu’un grand nombre de sénateurs partageait cette position – que ce serait l’occasion pour le Sénat, en tout cas pour sa majorité, de construire un budget d’alternance. Il s’agit donc d’une occasion manquée, notamment devant les Français. (Exclamations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)

Je regrette également ce choix pour la qualité du débat public : l’examen du budget de la Nation est l’un des temps forts, sinon le moment le plus important d’une session parlementaire,…

M. Manuel Valls, Premier ministre. … et compte parmi les missions essentielles des parlementaires, députés ou sénateurs. Il s’agit en outre d’un moment de confrontation politique utile, surtout au Sénat, où les débats sont courtois, où chacun peut avancer ses idées pour le pays, projet contre projet !

M. Hubert Falco. Le débat aura lieu, ne vous inquiétez pas !

M. Manuel Valls, Premier ministre. J’ai l’impression qu’il a d’abord lieu cette semaine et qu’il aura lieu ensuite !

Ce débat est d’autant plus important que nous nous trouvons à un moment décisif pour l’avenir du pays : la Nation va choisir son destin.

Pourquoi refuser le débat et ne pas exposer clairement son projet ? En réalité, ce choix s’explique très simplement : la majorité sénatoriale refuse de présenter un budget alternatif, car je ne la crois pas capable de le faire ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Ce n’est pas que vous n’en soyez pas capables sur le plan technique – je n’en doute pas un seul instant –,…

M. Jean-Louis Carrère. Ce n’est pas sûr ! Ils ne savent pas compter !

M. Manuel Valls, Premier ministre. … mais vous en êtes incapables sur le plan politique ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.) Si vous avez pris une telle décision à ce moment clé, c’est pour masquer les divisions qui existent. (Exclamations sur mêmes travées.)

Vous allez refuser le débat, alors que les Français veulent savoir comment le plan d’économies de 100 milliards à 150 milliards d’euros que vous annoncez sera réalisé. Il faut dire clairement au pays comment vous comptez faire pour supprimer 300 000 à 500 000 emplois publics.

Mesdames, messieurs les membres de la majorité sénatoriale, assumez votre programme devant les Français : l’augmentation de la TVA, la baisse de l’impôt sur les sociétés, la suppression de l’ISF, la fin des trente-cinq heures… Faites-le, votez-le, vous en avez le pouvoir, ici, au Sénat !

Et surtout, dites-nous – puisque j’ai souvent entendu parler de sérieux budgétaire – comment l’un de vos candidats, François Fillon, aujourd’hui, me semble-t-il, favori – même s’il faut bien sûr respecter le vote des électeurs dimanche prochain –, fera pour assumer la hausse du déficit à 4,7 % du PIB en 2018,…

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. On fera comme vous !

M. Manuel Valls, Premier ministre. … en proposant des mesures particulièrement injustes pour les classes moyennes et les couches populaires tout en ne permettant pas de préparer l’avenir du pays et en faisant peser cet avenir sur notre jeunesse. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Madame la présidente de la commission des finances, et j’en termine, le budget que nous présentons est un budget sérieux,…

M. Manuel Valls, Premier ministre. … et qui respecte bien sûr nos engagements européens : notre déficit s’établira à moins de 3 % en 2017 ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.) C’est important pour l’indépendance et la souveraineté de la France ; c’est important pour la crédibilité de sa parole ; c’est important, évidemment, pour la relation que nous avons avec nos principaux partenaires. (Marques d’impatience sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)

Enfin, nous assumons le financement de nos priorités, que ce soit la sécurité des Français – il y en a qui assument moins de policiers et moins de gendarmes pour protéger nos compatriotes (Nouvelles marques d’impatience sur les mêmes travées.) –, l’éducation et la jeunesse, ou la volonté de sauvegarder notre modèle de protection sociale.

Voilà ce qui sera au cœur d’un débat, projet contre projet, un débat essentiel pour l’avenir de la Nation ! J’aurais souhaité que ce débat ait lieu ici, au Sénat ; il aura bien sûr lieu devant nos compatriotes. (Applaudissements prolongés sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Mireille Jouve et M. Alain Bertrand applaudissent également. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

la réforme du statut de la polynésie française

M. le président. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour le groupe UDI-UC. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.)

Mme Lana Tetuanui. Monsieur le Premier ministre, le gouvernement de la Polynésie française sollicite une réforme de son statut depuis le début de l’année 2015.

Les principales orientations de cette réforme ont été exposées à la fin du mois de février 2015 au président de la commission des lois de l’Assemblée nationale, puis le 9 mars 2015 à Mme George Pau-Langevin, ancienne ministre des outre-mer.

Ces modifications statutaires ont été examinées par les représentants du pays et le Haut-Commissaire de la République en Polynésie française.

En février 2016, le Président de la République a solennellement reconnu dans son discours de Papeete la contribution de la Polynésie française à la constitution de la force nucléaire française et les impacts des essais nucléaires sur la vie des Polynésiens dans les domaines sanitaires, environnementaux, économiques et sociaux.

En mai 2016, il avait été convenu entre Paris et la Polynésie française d’inscrire la reconnaissance du fait nucléaire et les principaux engagements de l’État, complétés par les accords de Papeete, dans le statut de la Polynésie française. Cette réforme statutaire devait être intégrée à un projet de loi organique, dont la discussion devait débuter au Sénat au mois d’octobre dernier.

Or, à ce jour, force est de constater que le projet de loi organique n’a toujours pas été soumis à l’examen du Conseil d’État ni à la consultation de l’Assemblée de la Polynésie française.

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous confirmer que le Gouvernement a bien l’intention de faire adopter cette loi organique, tant attendue par les Polynésiens ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.

Mme Ericka Bareigts, ministre des outre-mer. Madame la sénatrice, je vous remercie pour cette question. Comme vous l’avez indiqué, un très important travail a été réalisé localement au cours de l’année 2015. Le Haut-Commissaire de la République en Polynésie française et les services de la présidence ont identifié conjointement des pistes d’amélioration du statut de la Polynésie française. Le pays a remis trois rapports à mon ministère pour présenter les modifications nécessaires.

Tout au long des semaines qui ont suivi, le ministère des outre-mer et la présidence de la Polynésie française ont mené un important travail de concertation afin de mieux cibler les priorités. Certaines modifications nécessitaient une expertise particulière, plus fine, qui a mobilisé d’autres ministères, entraînant par conséquent l’organisation de réunions interministérielles.

Les avancées qui figurent aujourd’hui dans le projet de loi organique sont majeures et reprennent, madame la sénatrice, les engagements du Président de la République annoncés à Papeete au mois de février 2016, que ce soit au sujet de la dotation globale d’autonomie ou de la reconnaissance du fait nucléaire en Polynésie française.

Le texte préparé conjointement avec la Polynésie française est fidèle à ce qui a été annoncé. Je salue d’ailleurs l’excellent travail qui a été réalisé en concertation étroite et quasi quotidienne entre l’État et la Polynésie française sur ce sujet. Nous avons franchi chaque étape ensemble, du début à la fin. Ce projet de loi organique a été mûri en totale coconstruction.

D’ultimes ajustements sont néanmoins encore nécessaires, avant que le projet puisse être soumis à la consultation du pays et à l’examen du Conseil d’État.

Je vous l’annonce, madame la sénatrice, notre ambition est de présenter ce texte en conseil des ministres au mois de janvier 2017. Vous le voyez, le Gouvernement, comme il s’y est engagé, met tout en œuvre pour que ce projet de loi organique puisse aboutir dans les meilleurs délais. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour la réplique.

Mme Lana Tetuanui. Merci, madame la ministre. Mais, franchement, me dire que le projet de loi organique sera présenté en conseil des ministres en janvier 2017, cela signifie que ce sont d’autres qui finiront le travail engagé par certains ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)

M. Roger Karoutchi. C’est vrai !

voies sur berges à paris

M. le président. La parole est à M. Pierre Charon, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)

M. Pierre Charon. Ma question s'adressait à M. le ministre de l’intérieur, que je salue.

Je vais trahir un secret, mais je vous informe que l’on m’a téléphoné pendant le déjeuner pour me dire que ce serait Mme Ségolène Royal qui me répondrait. On m’a ensuite dit que ce serait M. Vidalies. Finalement, c’est Mme Pompili – je la salue également – qui répondra à ma question ! (Sourires et exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Le 9 septembre dernier, Anne Hidalgo a décidé de fermer les voies sur berges de la rive droite de la Seine. (Exclamations amusées sur les mêmes travées.) Au mépris de la concertation, la maire de Paris a passé outre le refus des riverains et l’avis défavorable de la commission d’enquête. Drôle de conception de la démocratie !

Le comité régional de suivi et d’évaluation des impacts de la piétonnisation des voies sur berges rive droite a rendu un deuxième rapport d’étape.

M. Roger Karoutchi. Très bien !

M. Pierre Charon. Ses conclusions sont cinglantes :…

M. Alain Fouché. Absolument !

M. Pierre Charon. … la fermeture des voies sur berges vise à diminuer le trafic automobile, mais elle le renforce sur les quais et les rues situées aux alentours !

M. Alain Néri. On n’est pas au Conseil de Paris ici !

M. Pierre Charon. Depuis quinze ans, on constatait une baisse régulière du trafic dans Paris intra-muros. Aujourd’hui, la circulation augmente de nouveau, entraînant des embouteillages supplémentaires :…

M. Simon Sutour. C’est une question du mardi matin !

M. Pierre Charon. … sous prétexte de libérer les berges, on encombre la voirie !

M. Jean-Louis Carrère. Vous n’avez qu’à venir en province !

M. Pierre Charon. On observe également une hausse significative du niveau de bruit, bruit que vous faites allégrement, mes chers collègues ! (M. Alain Néri s’exclame.)

L’environnement n’en sort pas indemne. Sachant qu’un véhicule à l’arrêt, c’est davantage de pollution, les reports de circulation consécutifs aux fermetures de voies augmentent le taux de dioxyde d’azote.

Cette opération de communication se transforme en enfer pour tout le monde : les riverains et les automobilistes, les Parisiens comme les Franciliens ! Même le préfet de police a prudemment demandé une expérimentation de six mois. Et cette mesure doit être réversible, monsieur Cazeneuve. Or Mme Hidalgo encourage des constructions qui ne font que présager un aménagement définitif des voies sur berges !

On veut imposer par la force une mesure qui pénalise Paris et toute l’Île-de-France ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.) Je demande au ministre de l’intérieur, par la voix de Mme Pompili, de me dire ce qu’il envisage de faire dans un dossier géré de manière irresponsable et sectaire du début à la fin. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées de l’UDI-UC. – M. David Assouline proteste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Cette semaine est pleine de grandes surprises, monsieur Charon : c’est donc moi qui vais vous répondre. (Marques de désapprobation sur les travées du groupe Les Républicains.)

Au fond, la question que vous évoquez, à savoir la congestion des grandes métropoles par les véhicules automobiles et ses conséquences sur la santé publique, avec des milliers de morts chaque année, se pose partout dans le monde. Nul ne peut s’exonérer d’y répondre, mais les réponses sont différentes.

Certaines sont beaucoup plus abruptes que celle que vous abordez, puisqu’elles visent tantôt des péages urbains, tantôt des interdictions. Notre responsabilité collective est évidemment, en face, de développer le transport collectif, qui est une réponse nécessaire.

Ce débat fait partie de l’affrontement démocratique. Mme Hidalgo et la liste qui a obtenu la confiance des Parisiens n’ont pris personne par surprise, puisque, vous le savez, cette proposition figurait parmi celles que la majorité des habitants de la capitale ont acceptées. (Mme Annie Guillemot applaudit. – Mme Catherine Procaccia et M. Pierre Charon s’exclament.)

Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable. Eh oui !

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Mme Hidalgo et la majorité n’ont fait que mettre en œuvre ce à quoi elles s’étaient engagées ; cela mérite d’être rappelé.

Depuis se déroule un débat au cours duquel chacun veut désigner ses propres experts et prendre des initiatives qui sont parfois singulières. Ainsi, je tiens à le rappeler pour que le dossier soit complet, un amendement a tout simplement visé, pour répondre à cette situation, à transférer la compétence voirie à la présidence de la région.

M. Roger Karoutchi. C’est normal !

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. On pourrait expliquer au maire de Bordeaux que c’est le président Rousset qui va exercer cette compétence, ou au maire de Toulouse que ce sera la présidente de la région. Tout cela n’est pas sérieux ! (M. Roger Karoutchi s’exclame.)

Le sérieux, c’est la garantie que l’État doit apporter. Pendant six mois aura lieu une observation, il y a une expertise, qui doit être non pas partisane, mais partagée. Je vous le répète, l’ensemble des éléments d’information que le préfet détient seront communiqués à tous. À l’issue de cette phase, une décision sera prise.

L’inertie n’était pas une option ; la démocratie est au rendez-vous de ce qui a été fait. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Jean Desessard applaudit également.)

fermeture des commissariats

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour le groupe du RDSE.

M. Michel Amiel. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Elle concerne la gestion des effectifs de police et des horaires d’ouverture des commissariats, en particulier dans mon département.

Monsieur le ministre, je tiens tout d’abord à saluer votre action ainsi que celle de la police en général dans le contexte actuel particulièrement difficile. Comme on dit, la critique est aisée, mais l’art est difficile.

Au moment où la grogne des policiers ces derniers mois a interpellé l’ensemble de nos concitoyens sur les difficultés de nos forces de l’ordre, je ne vous cache pas mon inquiétude face à des informations révélées par le journal La Provence faisant part d’une restructuration dans tout le département des Bouches-du-Rhône, sans concertation avec les élus ni même les syndicats.

Deux secteurs en particulier seraient concernés : pour Marseille, des commissariats fonctionnant vingt-quatre heures sur vingt-quatre avec des brigades de roulement risquent de se voir transformés en simples guichets, fermés à dix-neuf heures ; pour Vitrolles-Marignane, il s’agit d’un jumelage qui regroupe en fait six communes, soit environ 100 000 personnes, en une seule circonscription, sans parler de la zone de Plan de campagne.

Si je ne peux que saluer vos annonces sur la généralisation des patrouilles à trois et me réjouir de la mise en place d’une réforme des cycles horaires visant à améliorer le confort de travail des policiers, notamment en leur garantissant de plus longues périodes de repos, de onze heures, je crains que toute réorganisation prétendument sur l’ouverture nocturne des commissariats ne mène, lentement mais sûrement, à la fermeture définitive de ces commissariats, qui représentent pourtant des éléments essentiels pour la sécurité et la vie de nos territoires, même si nous sommes d’accord sur la nécessité de la présence de policiers sur le terrain.

Aussi, monsieur le ministre, je me dois de vous demander quelle est, au-delà de la posture convenue d’appel au dialogue, votre position sur cette réflexion qui dépasse largement l’inquiétude de mon département et s’étend de manière plus générale au maillage territorial des forces de l’ordre, y compris des gendarmeries en zone rurale. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur plusieurs travées de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, puisque nous avons déjà échangé sur ce sujet ce week-end, vous savez très exactement quelle est ma position. Je vais la réexposer devant le Sénat de façon très claire.

D’abord, le Gouvernement a la volonté de mettre plus de policiers dans des quartiers justifiant une intervention plus forte de la police – cela vaut également en milieu rural avec la gendarmerie. Pour cela, il faut que des policiers sortent des écoles de police pour que l’on puisse les déployer partout sur le territoire national.

Il faut augmenter les effectifs et les répartir là où la délinquance est la plus forte afin d’obtenir les meilleurs résultats. Près de 450 élèves sortaient des écoles de police voilà cinq ans, ils seront 4 600 cette année – je viens d’achever la tournée des écoles de police –, c’est-à-dire dix fois plus. Cela me permettra, aux Pennes-Mirabeau comme à Marseille, de poursuivre l’augmentation des effectifs. C’est là l’essentiel pour continuer à obtenir, comme c’est actuellement le cas, de bons résultats en matière de lutte contre la drogue (M. Michel Amiel opine.), les atteintes aux biens ou les organisations criminelles. (M. Michel Amiel opine de nouveau.)

La préfecture de police de Marseille a la volonté d’obtenir des résultats meilleurs en mettant plus de policiers sur la voie publique, jour et nuit. J’ai demandé au préfet de police de ne pas mettre en œuvre cette réforme aussi longtemps que la discussion avec les élus n’aura pas eu lieu et que nous n’aurons pas trouvé un accord avec eux. En effet, les maires étant notamment des acteurs déterminants de la lutte contre la délinquance, une réforme ne peut pas être bonne si elle ne les associe pas étroitement à cette lutte.

À Marseille, je vous le confirme, il y a des propositions, mais il n’y a pas une réforme qui sera mise en œuvre sans l’accord des élus. (M. Bruno Gilles s’exclame.) Si, au terme de la discussion, l’accord n’est pas trouvé ou si d’autres propositions émergent, nous ferons en sorte d’en tenir compte. Car dans cette ville comme ailleurs, l’objectif est simple : plus de policiers dans la rue – c’est pourquoi plus de policiers sortent des écoles – pour lutter contre la délinquance, faire reculer le crime organisé en France et permettre que la République affirme partout ses prérogatives. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur plusieurs travées du RDSE.)

(M. Jean-Claude Gaudin remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.)