Sommaire

Présidence de M. Jean-Claude Gaudin

Secrétaires :

MM. François Fortassin, Jean-Pierre Leleux.

1. Procès-verbal

2. Dépôt d’un document

3. Communication relative à une commission mixte paritaire

4. Questions orales

interdiction de stade et accès à la fonction publique

Question n° 1546 de M. Alain Duran. – Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique ; M. Alain Duran.

conséquences pour la pêche de la sortie du royaume-uni de l'union européenne

Question n° 1492 de M. Jean-François Rapin. – Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique ; M. Jean-François Rapin.

appellations d'origine bugey-cerdon et clairette de die

Question n° 1573 de M. Patrick Chaize. – M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement ; M. Patrick Chaize.

arboriculture et brouettes de cueillette

Question n° 1488 de Mme Patricia Morhet-Richaud. – M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement ; Mme Patricia Morhet-Richaud.

procédure de permis de construire pour les exploitations agricoles

Question n° 1497 de M. Alain Vasselle. – M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement ; M. Alain Vasselle.

suspicion jetée sur la qualité sanitaire des produits alimentaires français

Question n° 1487 de M. Gérard Bailly. – M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement ; M. Gérard Bailly.

situation des éleveurs de bovins allaitants

Question n° 1505 de M. Philippe Mouiller. – M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement ; M. Philippe Mouiller.

mesures de régulation aux fins de lutte contre les « déserts médicaux »

Question n° 1528 de M. Louis-Jean de Nicolaÿ. – Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie ; M. Louis-Jean de Nicolaÿ.

statut des médecins en haute montagne

Question n° 1544 de M. Jean-Yves Roux. – Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie ; M. Jean-Yves Roux.

désertification médicale et aggravation de la fracture sanitaire

Question n° 1516 de M. Olivier Cigolotti. – Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie ; M. Olivier Cigolotti.

stage obligatoire dans une petite entreprise pour les étudiants des grandes écoles

Question n° 1548 de M. Yannick Vaugrenard. – M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche ; M. Yannick Vaugrenard.

auxiliaires de vie scolaire

Question n° 1553 de M. Jean-Louis Tourenne. – M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche ; M. Jean-Louis Tourenne.

élèves français de l'étranger et option sport de haut niveau au baccalauréat

Question n° 1559 de M. Yannick Vaugrenard, en remplacement de Mme Claudine Lepage. – M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche ; M. Yannick Vaugrenard.

régénération des huiles noires

Question n° 1537 de Mme Agnès Canayer. – M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche ; Mme Agnès Canayer.

fermeture du poste de police d'oissel

Question n° 1575 de M. Thierry Foucaud. – M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche ; M. Thierry Foucaud.

accueil des enfants placés dans le calvados

Question n° 1568 de M. Jean-Léonce Dupont. – Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes ; M. Jean-Léonce Dupont.

élargissement de l'attribution de la carte professionnelle de guide-conférencier

Question n° 1549 de Mme Gisèle Jourda. – Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes ; Mme Gisèle Jourda.

conséquences de l'allongement de la durée de validité des cartes nationales d'identité

Question n° 1560 de M. Richard Yung, en remplacement de M. Jean-Yves Leconte. – Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes ; M. Richard Yung.

couverture numérique du territoire en très haut débit

Question n° 1522 de M. Daniel Gremillet. – Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation ; M. Daniel Gremillet.

rémunération de l'innovation

Question n° 1554 de M. Richard Yung. – Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation ; M. Richard Yung.

réforme du code minier

Question n° 1520 de M. Daniel Reiner. – Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation ; M. Daniel Reiner.

accord transfrontalier entre la france et le luxembourg en matière de fiscalité

Question n° 1536 de M. Patrick Abate. – Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation ; M. Patrick Abate.

dégradation du service de la poste

Question n° 1547 de Mme Marie-France Beaufils. – Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation ; Mme Marie-France Beaufils.

conduite de tracteurs communaux

Question n° 1502 de M. René Danesi. – Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation.

zones de revitalisation rurale

Question n° 1511 de M. Jean-François Longeot. – Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales ; M. Jean-François Longeot.

financement des groupements d’associations syndicales de propriétaires par les collectivités territoriales

Question n° 1499 de M. Daniel Laurent. – Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales ; M. Daniel Laurent.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

5. Éloge funèbre de Louis Pinton, sénateur de l’Indre

M. le président ; M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Claude Bérit-Débat

6. Liaison ferroviaire Paris-aéroport Charles-de-Gaulle. – Adoption des conclusions d’une commission mixte paritaire

Discussion générale :

M. Louis Nègre, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger

M. Jean Desessard

Mme Nicole Bonnefoy

Mme Éliane Assassi

M. Robert Hue

M. Vincent Capo-Canellas

M. Christian Manable

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État

Texte de la commission mixte paritaire

Adoption définitive du projet de loi dans le texte de la commission mixte paritaire

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

7. Hommage aux victimes d'un attentat à Berlin

M. le président ; M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre.

8. Questions d'actualité au Gouvernement

politique du gouverneur de la banque de france

M. Pierre-Yves Collombat ; M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre ; M. Pierre-Yves Collombat.

calendrier de mise en œuvre des plans d’action pour les espèces menacées

M. Ronan Dantec ; M. André Vallini, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement ; M. Ronan Dantec.

hausse du smic

Mme Laurence Cohen ; Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ; Mme Laurence Cohen.

attentat à berlin et lutte contre le terrorisme (I)

M. Michel Boutant ; M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre.

conséquences sur la santé de la pollution dans la vallée de l’arve

M. Loïc Hervé ; Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion ; M. Loïc Hervé.

attentat à berlin et lutte contre le terrorisme (ii)

M. Bruno Retailleau ; M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre.

politique fiscale

M. Vincent Éblé ; Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire.

situation sociale

M. Jean-François Rapin ; M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre ; M. Jean-François Rapin.

décrochage économique de la france

Mme Élisabeth Lamure ; Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire ; Mme Élisabeth Lamure.

situation à uber

M. Jean-Yves Roux ; M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin

9. Sapeurs-pompiers professionnels et volontaires. – Adoption définitive en procédure accéléré d’une proposition de loi dans le texte de la commission

Discussion générale :

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique

Mme Catherine Troendlé, rapporteur de la commission des lois

M. Roger Madec

Mme Éliane Assassi

Mme Hermeline Malherbe

M. Olivier Cigolotti

M. Jean Desessard

M. Cyril Pellevat

Clôture de la discussion générale.

Articles 1er A, 1er, 2, 2 bis, 3 et 4 – Adoption.

Articles additionnels après l'article 4

Amendement n° 3 rectifié de M. Alain Marc. – Retrait.

Amendement n° 4 rectifié bis de M. Alain Marc. – Retrait.

Article 4 bis – Adoption.

Article additionnel après l'article 4 bis

Amendement n° 5 rectifié bis de M. Alain Marc. – Retrait.

Articles 5 à 11 – Adoption.

Article additionnel après l'article 11

Amendements identiques nos 1 rectifié bis de M. Maurice Antiste et 2 rectifié bis de Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. – Retrait des deux amendements.

Articles 12 et 12 bis – Adoption.

Article 13 (suppression maintenue)

Article 14 – Adoption.

Vote sur l'ensemble

M. Jean-Claude Requier

M. Guy-Dominique Kennel

M. Franck Montaugé

M. Claude Kern

M. Yves Daudigny

M. le président

Adoption définitive de la proposition de loi dans le texte de la commission.

Mme Annick Girardin, ministre

10. Prise d’effet de nominations à une commission mixte paritaire

11. Ordre du jour

COMPTE RENDU INTÉGRAL

Présidence de M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

Secrétaires :

M. François Fortassin,

M. Jean-Pierre Leleux.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Dépôt d’un document

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le tableau de programmation des mesures d’application de la loi n° 2016–1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle.

Acte est donné du dépôt de ce document.

Il a été transmis à la commission des lois.

3

Communication relative à une commission mixte paritaire

M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne est parvenue à un texte commun.

4

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

interdiction de stade et accès à la fonction publique

M. le président. La parole est à M. Alain Duran, auteur de la question n° 1546, adressée à Mme la ministre de la fonction publique.

M. Alain Duran. Madame la ministre de la fonction publique, je souhaitais appeler votre attention sur les éventuelles implications des mesures d’interdiction administrative ou judiciaire de stade pouvant être prises à l’encontre de supporters de clubs sportifs.

J’ai été saisi récemment du cas d’un supporter qui s’est vu retirer le bénéfice d’un concours de la fonction publique pour avoir, par le passé, fait l’objet de mesures d’interdiction administrative de stade, lesquelles n’ont pas été suivies d’une confirmation par l’autorité judiciaire. J’ajoute que ces faits n’étaient pas empreints de violence.

L’article 5 de la loi portant droits et obligations des fonctionnaires, en vigueur, dispose : « Nul ne peut avoir la qualité de fonctionnaire […] si les mentions portées au bulletin n° 2 de son casier judiciaire sont incompatibles avec l’exercice des fonctions ».

Au regard de ce cas particulier, et sans nullement viser à porter une quelconque appréciation sur les fondements et la justesse des décisions des autorités administratives et judiciaires, je souhaite vous interroger, madame la ministre, en vue de savoir, d’une part, si le prononcé d’une ou plusieurs interdictions administratives ou judiciaires de stade est inscrit au casier judiciaire et, d’autre part, s’il est susceptible d’interdire aux personnes concernées d’intégrer la fonction publique au titre de l’article 5 de la loi précitée ou de l’enquête de moralité accompagnant l’accès à certains métiers publics.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question. En effet, l’article 5 de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires précise que « nul ne peut avoir la qualité de fonctionnaire si les mentions portées au bulletin n° 2 de son casier judiciaire sont incompatibles avec l’exercice des fonctions ».

Toutefois, le juge administratif rejette tout caractère automatique au refus de nomination fondé exclusivement sur la seule mention au bulletin n° 2.

Il incombe en effet à l’administration, sous le contrôle du juge, d’apprécier, au cas par cas, et selon une approche de proportionnalité, si les faits à l’origine de la condamnation mentionnée au bulletin n° 2 sont compatibles ou non avec la nature des fonctions auxquelles prétend l’intéressé.

Le cas sur lequel vous m’interpellez concerne un lauréat d’un concours de la fonction publique ayant fait l’objet d’une mesure préventive d’interdiction administrative de stade et non de la peine complémentaire d’interdiction de stade.

Faute d’inscription au bulletin n° 2 du casier judiciaire, l’interdiction administrative de stade n’est pas un motif qui entre dans le champ des dispositions précitées de l’article 5 de la loi du 13 juillet 1983.

Au-delà de l’incompatibilité prévue à l’article 5 et qui est examinée au regard des fonctions que le candidat à un emploi public est amené à exercer, l’administration peut exiger davantage des candidats à des emplois publics dont la déontologie est renforcée ; c’est le cas, par exemple, des corps de police ou des métiers de la justice.

Et, dans ce cadre, elle peut vérifier, sous le contrôle du juge, si l’intéressé présente les garanties requises pour exercer les fonctions auxquelles il prétend.

L’administration peut, à cet effet, prendre en compte des faits matériellement établis dont elle a connaissance, alors même qu’ils n’ont pas fait l’objet d’une inscription au bulletin n° 2.

En l’absence de précisions sur le corps auquel ce lauréat pouvait accéder, il m’est difficile de vous en dire plus.

En effet, c’est au regard de la nature des fonctions à occuper que le comportement passé du lauréat, le cas échéant révélé lors d’une enquête de moralité, peut fonder la décision de refus de nomination, en dehors des motifs de refus énumérés à l’article 5 de la loi du 13 juillet 1983.

M. le président. La parole est à M. Alain Duran.

M. Alain Duran. Je vous remercie, madame la ministre, de cette réponse, qui apporte un éclairage utile sur un point de droit qui, force est de le constater, peut avoir des conséquences dramatiques pour certains jeunes susceptibles de se trouver dans cette situation.

conséquences pour la pêche de la sortie du royaume-uni de l'union européenne

M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, auteur de la question n° 1492, adressée à M. le secrétaire d’État auprès de la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Jean-François Rapin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nos discussions de ce matin peuvent paraître futiles au regard des événements de cette nuit. Il me paraît important de le rappeler mais la vie continue…

Ma question s’adressait à M. Vidalies. Depuis le 23 juin dernier, date du référendum actant la volonté des Britanniques de sortir de l’Union européenne, les pêcheurs français sont inquiets, et parmi eux, les pêcheurs des Hauts-de-France le sont plus particulièrement. Cette décision, qui a des incidences sur de nombreux secteurs de notre économie, les inquiète à plusieurs titres.

En effet, si l’Union européenne a incontestablement des défauts et des lourdeurs bureaucratiques, elle a néanmoins instauré la communautarisation des zones économiques exclusives de ses États membres, ainsi que la négociation des totaux admissibles de capture, les TAC, et des quotas annuels.

La politique commune des pêches engendre d’âpres discussions chaque année, mais elle constitue un cadre connu, déterminé, pour une activité qui dépasse bien souvent les frontières nationales : 60 % de l’activité de la flottille régionale française se situent dans les eaux anglaises. Ce chiffre monte à 80 % pour les navires hauturiers qui pêchent au large de l’Écosse.

Les milliers d’emplois directs et indirects engendrés par la pêche doivent être protégés, et les professionnels méritent une lisibilité dans l’exercice de leur activité.

Alors que le gouvernement britannique a annoncé son intention d’activer la clause de sortie de l’Union européenne avant la fin du mois de mars prochain, les négociations seront rudes, et le rôle de la Commission sera primordial.

Qu’adviendra-t-il de l’accès des navires français aux eaux anglaises ? Qu’en sera-t-il de l’accès au marché unique pour les produits britanniques ? Et, enfin, les droits historiques des pêcheurs français, bien antérieurs à la création de l’Union européenne, puisqu’ils existent depuis la fin du XlXe siècle avec les pays riverains de la Manche, seront-ils également remis en cause ?

Même si les négociations à Bruxelles ont permis de maintenir un niveau de capture de pêche acceptable, comment le Gouvernement compte-t-il s’assurer que les intérêts français seront bien défendus à Bruxelles dans le cadre de l’aboutissement du Brexit ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser mon collègue Alain Vidalies, qui n’a pas pu être présent ce matin.

Vous attirez l’attention du Gouvernement sur les conséquences de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne pour les entreprises françaises de pêche exerçant dans la zone économique exclusive, la ZEE, de cet État, ainsi que sur le marché des produits de la mer. Sachez que cette inquiétude, nous la partageons. Elle est légitime.

Le peuple britannique a exprimé, à l’occasion du référendum du 23 juin 2016, le choix de ne plus être membre de l’Union européenne. Ce choix démocratique doit être respecté.

Les implications du retrait du Royaume-Uni pourraient être importantes pour de nombreux secteurs économiques français, dont la pêche maritime, bien sûr.

Le Gouvernement, lors du dernier comité interministériel à la mer auquel j’ai participé, et le Président de la République, durant les Assises de la mer, ont affirmé que les intérêts français en matière de pêche maritime seraient âprement défendus durant les discussions qui s’ouvriront le moment venu.

Le Premier ministre Bernard Cazeneuve l’a d’ailleurs confirmé lors de sa déclaration de politique générale le 13 décembre à l’Assemblée nationale.

Vous soulignez, à juste titre, la forte dépendance de la pêche française aux eaux britanniques, particulièrement dans les Hauts-de-France, en Bretagne ou en Normandie.

À l’heure actuelle, les revendications du Royaume-Uni sur ce sujet ne sont pas connues, mais nous imaginons qu’elles pourraient porter sur l’accès des navires de l’Union à la ZEE britannique dans son ensemble, l’accès aux zones de pêches historiques situées dans les eaux territoriales, ou encore la répartition future des quotas entre l’Union européenne à 27 et le Royaume-Uni.

Comme vous, nous sommes bien conscients que le Royaume-Uni est exportateur de produits de la mer et que son marché principal est aujourd’hui l’Union européenne.

Ces négociations, comme cela a été décidé par les 27 chefs des États membres concernés, ne pourront débuter que lorsque le Royaume-Uni aura formellement notifié le recours à l’article 50 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne qui encadre la procédure de retrait volontaire et prévoit un délai de deux ans pour négocier un accord.

Le Gouvernement est pleinement mobilisé pour défendre les intérêts français dans les négociations à venir et les échanges avec les représentants professionnels du Comité national des pêches maritimes et des élevages marins, le CNPMEM, sur ce sujet sont denses et coordonnés. Je veux vous le redire, monsieur le sénateur, comme à l’ensemble des pêcheurs français concernés par cette question, le Gouvernement est vigilant et mobilisé.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin.

M. Jean-François Rapin. Madame la ministre, si j’ai bien noté l’implication du Gouvernement sur le sujet, je relève qu’il y a beaucoup de « si » et que de nombreuses questions se posent encore. Je préconise que le Parlement soit pleinement associé à ces discussions. (M. Philippe Mouiller opine.)

appellations d'origine bugey-cerdon et clairette de die

M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, auteur de la question n° 1573, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

M. Patrick Chaize. Monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur l’appellation d’origine contrôlée bugey-cerdon, délivrée en 2009.

En effet, dans l’Ain, des générations de producteurs bugistes représentés aujourd’hui par le Syndicat des vins du Bugey, reconnu comme organisme de défense et de gestion, ont œuvré pour faire reconnaître le vin effervescent bugey-cerdon méthode ancestrale.

Le bugey-cerdon représente 50 % de la production des vins du Bugey, pour un total de 15 000 hectolitres par an. Il s’inscrit, comme il se doit, dans le cadre d’un cahier des charges très restrictif.

Or il apparaît que la clairette de Die, historiquement vin effervescent blanc issu de la vallée de la Drôme, a fait l’objet d’une appellation d’origine contrôlée pour un vin effervescent rosé, reconnue par l’Institut national de l’origine et de la qualité, l’INAO, le 7 septembre 2016. Depuis, le cahier des charges de l’appellation d’origine contrôlée « Clairette de Die rosée » a été homologué par un arrêté du 16 novembre 2016 paru au Journal officiel du 26 novembre 2016.

Cette reconnaissance, monsieur le ministre, est étonnante en ce qu’elle concerne la création d’une catégorie jusqu’alors inexistante, puisqu’il s’agit d’une nouvelle couleur de vin et de nouveaux cépages au cahier des charges. Les quelques références historiques ne sauraient donner une légitimité à la clairette de Die rosé.

Cette situation sans précédent constitue un non-sens. En effet, l’AOC bugey-cerdon a elle-même été reconnue sur la base d’us et coutumes, d’une notoriété dûment établie, ainsi que sur une antériorité certaine dans sa propre région de production.

La clairette de Die rosé qui sera produite va disposer d’un potentiel sans commune mesure avec la production de bugey-cerdon. Autrement dit, la typicité du bugey-cerdon se trouvera noyée dans une production plus importante et concurrencée par un vignoble voisin disposant de règles différentes.

La récente décision de l’INAO suscite une inquiétude profonde et légitime, en ce qu’elle constitue une concurrence directe qui risque de mettre à mal toute la production des vins du Bugey et de casser la dynamique existante depuis plusieurs années maintenant.

Les viticulteurs bugistes, leurs représentants, les acteurs de ce territoire et l’ensemble des élus de l’Ain sont tous mobilisés sur ce dossier important.

C’est pourquoi je souhaite, monsieur le ministre, que vous puissiez me donner des explications concernant cette décision. En effet, elle met en cause le concept même de l’appellation, lequel assure une garantie d’origine, de tradition et d’authenticité de tout produit ainsi labellisé.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, vous me posez une question dont je comprends le sens, tout comme je comprends que vous soyez mobilisé sur ce sujet. Le ministre a certes des responsabilités. Toutefois, pour ce qui concerne les signes officiels de la qualité et de l’origine, les fameux SIQO, c’est un institut composé de professionnels, l’INAO, qui décide, en toute connaissance de cause, des appellations. Le ministre a peu de choses à dire sur les décisions qui sont prises. Heureusement qu’il en est ainsi parce que les sujets en cause sont tellement complexes que je me garderais bien de venir donner moi-même des avis qui seraient retenus – ou pas d'ailleurs ! – par le conseil de l’INAO !

Il se trouve que le Syndicat de la clairette de Die a effectivement demandé, en septembre 2013, à l’INAO d’introduire la clairette de Die rosé dans la gamme de ses productions d’appellation contrôlée.

Lors du débat qui a eu lieu, comme c’est toujours le cas, au sein de cette institution, les producteurs de vin de Bugey ont pu faire connaître leur opposition à cette reconnaissance.

M. Didier Guillaume. C’est dommage !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Les experts ont tranché et ont décidé de satisfaire la demande présentée par le Syndicat de la clairette de Die.

Le ministre de l’agriculture respecte les décisions des professionnels.

M. Didier Guillaume. Très bien !

M. Stéphane Le Foll, ministre. D’ailleurs, si je m’avisais de faire l’inverse, j’aurais droit aux protestations des producteurs de clairette de Die rosé qui viendraient me demander pourquoi j’ai refusé cet agrément. Je suis obligé de respecter les règles fixées par les producteurs eux-mêmes et par l’INAO pour être en mesure de juger, apprécier et attribuer des AOC-AOP à un certain nombre de zones de production.

Je comprends votre position. Je sais que la notoriété de cette production de Bugey est parfaitement assise, ce qui n’interdit pas à la clairette de Die rosé d’avoir quelques ambitions ! L’appellation Bugey me semble suffisamment solide…

M. Stéphane Le Foll, ministre. … pour apaiser les craintes de ses producteurs : la reconnaissance obtenue par la clairette de Die rosé ne va pas menacer– au contraire ! – les vins du Bugey,…

M. Stéphane Le Foll, ministre. … qui sont connus et appréciés par les consommateurs.

Me demander de me prononcer sur cette question reviendrait à dire que le ministre de l’agriculture a pouvoir de décision sur les appellations d’origine ! Vous imaginez les problèmes que cela poserait ! Donc, je ne peux pas vous dire autre chose que ceci : je respecte une décision des professionnels.

M. Didier Guillaume. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize.

M. Patrick Chaize. Monsieur le ministre, votre réponse ne me donne pas satisfaction pour une raison simple : c’est vous qui signez l’arrêté.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Oui !

M. Patrick Chaize. Et si l’avis du ministre n’était pas nécessaire, il n’y aurait pas besoin qu’il signe un arrêté ! Quand vous signez un arrêté, vous le faites en votre âme et conscience.

Je vous ai alerté par courrier sur ce point. Je n’ai d'ailleurs pas eu de réponse.

J’aurais apprécié que vous preniez le temps de faire une contre-expertise, ou du moins que vous vous donniez la peine de poser un certain nombre de questions. Quoi qu’il en soit, au vu de votre réponse, monsieur le ministre, je suis très inquiet pour la protection à l’avenir de l’ensemble des produits français historiquement reconnus en AOC. Après cette décision, la copie pourra se faire de façon impunie.

M. Didier Guillaume. Non ! Ce n’est pas une copie !

M. Patrick Chaize. Bien sûr que si, monsieur Guillaume, et vous le savez très bien ! Jusqu’à présent, le label AOC reposait sur des us et coutumes, sur des cépages existants et sur des process existants, ce qui n’est pas le cas pour la clairette de Die rosé, que vous le vouliez ou non ! (M. Didier Guillaume s’exclame.)

arboriculture et brouettes de cueillette

M. le président. La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud, auteur de la question n° 1488, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

Mme Patricia Morhet-Richaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur la réglementation en matière de sécurité des travailleurs de la filière arboricole fruitière.

En France, elle représente 6 % de la totalité des exploitants agricoles, leurs exploitations mobilisent 9 % de la main-d’œuvre totale et 27 % du salariat saisonnier. Plus de 70 % des exploitations fruitières sont pourvoyeuses d’emplois et les exploitations produisant des fruits à pépins sont celles qui emploient le plus. Le premier bassin de production est le Sud-Est.

La prévention du risque de chute des travailleurs est donc une problématique omniprésente. La réglementation en vigueur prévoit de réaliser la cueillette depuis un plan de travail conçu, installé et équipé de manière à garantir la sécurité des personnes. Le décret du 7 mars 2008 impose l’usage d’une plateforme élévatrice et interdit l’utilisation d’échelles, escabeaux et marchepieds.

Sans ignorer la nécessaire protection collective des travailleurs, il est indispensable de préciser les conditions d’utilisation des plateformes et brouettes de cueillette qui ne sont pas adaptées aux caractéristiques des vergers anciens.

En effet, deux mesures dérogatoires peuvent être prises, mais la principale difficulté est liée au fait que les travaux doivent s’effectuer sur une courte durée, sans être répétitifs.

La filière arboricole fruitière traverse une grave crise. Cette mesure est inadaptée. De plus, elle conduirait au doublement du nombre de plateformes de relève, ce qui ne serait pas sans conséquence financière sur les exploitations. Enfin, le temps de cueillette serait rallongé et le travail des saisonniers, mis à mal.

C’est pourquoi je vous demande de suspendre cette mesure et j’attends que les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, les DIRECCTE, accompagnent les professionnels pour une mise en œuvre de mesures adaptées à la réalité d’un secteur agricole en difficulté.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Madame Morhet-Richaud, deux sénateurs viennent de me poser des questions, l’un me demande de suivre l’avis des professionnels, tandis que l’auteur de l’autre m’enjoignait d’aller contre !

Les questions de crises rencontrées par l’arboriculture, je les mesure parfaitement. Je sais aussi que la prévention du risque de chute de hauteur est un enjeu important pour cette filière. Un engagement a été pris – et il est partagé par tous les partenaires sociaux –, il s’agit d’éviter les accidents du travail, principalement dus aux chutes dans les vergers. Ce genre de problème, on doit le solutionner par la négociation.

Vous me demandez de suspendre l’application d’une règle qui vise à éviter des chutes et des accidents du travail. Je vous ai écoutée, c’est ce que vous voulez, madame la sénatrice ! Pour ma part, je suis conscient de mes responsabilités tout en sachant qu’il faut toujours trouver les ajustements nécessaires.

Cet objectif de prévenir les accidents et les chutes dans les vergers, au demeurant partagé par tous, notamment par les partenaires sociaux, doit être un engagement de chacun.

Les préventions des chutes de hauteur dans l’arboriculture figurent en bonne place dans le plan « santé et sécurité au travail de l’agriculture 2016–2020 », négocié et discuté.

Comme vous l’avez dit, certains producteurs de fruits peuvent toutefois rencontrer des difficultés en raison de la configuration de leurs vergers. Il faut être capable de s’adapter à la configuration de chacun des vergers pour mettre en œuvre la réglementation sur la prévention des chutes en hauteur, s’agissant, en particulier, de l’obligation de réaliser des travaux de cueillette depuis une surface plane et horizontale. J’ai bien compris que dans des vergers dont les surfaces ne sont pas planes et pas horizontales, il est en effet plus difficile d’avoir des plateformes elles aussi planes et horizontales.

Mes services, en lien avec le ministère du travail, ont publié en mars 2015 un guide sur le travail en hauteur en arboriculture. Les représentants des professionnels ont été associés, aux côtés des pouvoirs publics, à la rédaction de ce guide technique, garantissant ainsi sa bonne lisibilité par les acteurs sur le terrain.

L’objectif de ce document est d’accompagner les arboriculteurs dans la démarche d’évaluation des risques et de mise en œuvre générale de la réglementation, en s’adaptant, bien sûr. Il ne s’agit pas d’imposer des contraintes à des gens qui sont dans l’impossibilité de les appliquer !

Pour les vergers dans lesquels il n’est pas possible de recourir à des équipements techniques mécanisés de protection, l’utilisation de matériels type brouettes de cueille – que vous avez cités –, escabeaux et traîneaux moins volumineux est possible. Les services de l’État disposent ainsi de l’ensemble des éléments pour répondre à toutes les situations pratiques que l’on peut rencontrer sur le terrain.

Enfin, l’Association française de normalisation, l’AFNOR, travaille depuis cet automne à la rédaction d’un guide qui précisera à l’attention des professionnels et en pleine concertation avec eux les adaptations techniques que doivent comporter ces matériels. Les constructeurs pourront ainsi développer des produits innovants, qui répondent aux configurations des vergers anciens, tout en respectant les conditions de sécurité.

Comment réussir à concilier la sauvegarde de l’activité et la protection des salariés ? Eh bien, en étant capable de s’adapter ! Les règles ne peuvent pas être appliquées de la même manière partout, il faut qu’elles soient adaptées. Et nous cherchons à trouver les voies et les moyens de ces adaptations pour que l’activité nécessaire à l’arboriculture se poursuive tout en protégeant les salariés des accidents du travail.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud.

Mme Patricia Morhet-Richaud. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse. En revanche, Mme la ministre du travail est venue, voilà quelques mois, dans notre territoire et a rencontré à cette occasion une délégation d’arboriculteurs, qui l’ont interrogé sur ces questions. Elle leur a promis une réponse rapide. Or, à ce jour, les agriculteurs de mon département n’ont malheureusement reçu aucune réponse – ils me l’ont confirmé dernièrement – alors même que la cueillette de 2016 est finie depuis bien longtemps.

Le guide que vous avez évoqué ou le fascicule que l’AFNOR a rédigé sur les équipements de travail en arboriculture ont certes le mérite d’exister, mais ils ne résolvent absolument pas le problème d’une réglementation trop coûteuse et contraignante. Il semblerait qu’une norme européenne soit également en projet. J’espère que votre ministère veillera à ce qu’elle n’impose pas de contrainte supplémentaire à l’arboriculture, qui est, je le répète, en grande difficulté.

procédure de permis de construire pour les exploitations agricoles

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, auteur de la question n° 1497, adressée à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

M. Alain Vasselle. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur les difficultés rencontrées notamment par les éleveurs autour de la délivrance de permis de construire. Mon collègue Michel Raison, sénateur de la Haute-Saône, s’associe à ma démarche, car il vit les mêmes préoccupations.

Le code de l’urbanisme prévoit, à son article L. 431–1, que le recours à un architecte pour établir le projet architectural est obligatoire pour l’instruction de la demande de permis de construire. L’exception prévue à l’article L. 431–3 du même code concerne les exploitations agricoles qui modifient elles-mêmes une construction de faible importance, dont la surface maximale est fixée par décret. Or ce décret, modifié le 29 décembre 2011, fixe ce seuil à 800 mètres carrés, ce que l’ensemble de la profession agricole et, notamment, les éleveurs s’accordent à juger trop bas.

Une révision des textes réglementaires nous apparaît donc nécessaire, afin de permettre aux agriculteurs de ne pas souffrir de cette difficulté administrative.

Je crains par ailleurs que l’obligation faite aux éleveurs de faire appel à un architecte n’engendre un surcoût, pour leurs constructions nouvelles, de l’ordre de 5 % à 10 %. Vous admettrez que cela, dans un contexte économique particulièrement difficile, n’est pas propice à leur investissement.

Monsieur le ministre, seriez-vous favorables à un rehaussement de ce seuil à 4 000 mètres carrés de plancher et d’emprise au sol ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je vous rappellerai avant tout que le Gouvernement a mis en place, avec les régions, le plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles, ou PCAE, qui vise à soutenir les investissements dans les bâtiments agricoles. Ces investissements avaient été estimés entre 200 millions et 250 millions d’euros. Or, en deux ans, plus de 450 millions d’euros auront été dépensés, et je reçois encore beaucoup de demandes d’investissements dans les bâtiments. Vous me demandez, comme à l’accoutumée, si la réglementation existante est un frein à l’investissement. Pour ma part, et je m’en félicite d’ailleurs, je ne peux que constater que le PCAE a fonctionné bien au-delà de ce que nous pouvions imaginer.

Vous avez évoqué les règles d’urbanisme qui prévoient le recours obligatoire à un architecte pour les projets de constructions professionnelles au-dessus du seuil de 800 mètres carrés. À n’en pas douter, je ne suis pas opposé à une éventuelle révision de ce seuil pour les bâtiments d’élevage. Peut-être pourrait-on fixer des critères qui, s’ils étaient respectés dans le projet, dispenseraient du recours à l’architecte. Bien d’autres règles mériteraient encore un débat. Il n’en reste pas moins que rehausser le seuil en question de 800 à 4 000 mètres carrés représenterait un changement complet : on peut sûrement faire évoluer la réglementation sans aller aussi loin.

De fait, la question de l’insertion des bâtiments dans les paysages se pose dans d’autres pays européens. Ainsi, aux Pays-Bas, dans les zones de polders, on impose à tous les bâtiments d’élevage des caractéristiques très précises, notamment des couleurs spécifiques. Je ne souhaite pas aller dans ce sens. En revanche, des règles existent. Souvent, pourtant, dans le Limousin par exemple, tous ces bâtiments se ressemblent dans leur forme et leur architecture. On pourrait donc peut-être envisager de faire évoluer le code de l’urbanisme.

En revanche, le Gouvernement ne prévoit pas actuellement de rehausser ce seuil jusqu’à 4 000 mètres carrés. Je comprends bien que les coûts encourus du fait du recours à l’architecte peuvent constituer un frein pour certains éleveurs. Néanmoins, j’ai pu constater l’ampleur des investissements, d’ailleurs nécessaires, réalisés ces deux dernières années dans les bâtiments d’élevage. C’est tout de même la preuve que le système fonctionne. Dès lors, bien que je sois prêt à me pencher sur ce problème, il est clair qu’une vraie dynamique existe aujourd’hui pour l’investissement dans les bâtiments d’élevage.

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.

M. Alain Vasselle. Je vous donne acte, monsieur le ministre, de la volonté du Gouvernement de soutenir les éleveurs par une augmentation des aides à l’investissement. En effet, les crédits qui y sont consacrés ont très nettement progressé.

En revanche, monsieur le ministre, considérez-vous vraiment qu’il est nécessaire, pour les agriculteurs, de faire appel à un architecte pour concevoir des projets qui s’intègrent bien dans le paysage et qui répondent aux normes environnementales ? Vous savez bien que, là où les municipalités produisent des documents d’urbanisme, les contraintes s’imposent déjà naturellement aux agriculteurs. Alors, faut-il retenir le seuil de 4 000 mètres carrés ? Je relève du moins que vous êtes prêt à réviser le décret pour faire évoluer ce seuil, fût-ce pour le fixer à une valeur intermédiaire.

En toute franchise, l’idéal serait de supprimer complètement l’obligation de recours à un architecte. Elle est le fruit des efforts du lobby de cette profession, qui a réussi son opération et fait supporter aux agriculteurs des honoraires d’architectes dont ils pourraient bien se passer !

suspicion jetée sur la qualité sanitaire des produits alimentaires français

M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly, auteur de la question n° 1487, transmise à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

M. Gérard Bailly. Monsieur le ministre de l’agriculture, j’avais adressé ma question à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé. Je ne mets pas pour autant en doute votre parole, loin s’en faut, et je m’adresserai à vous en tant que porte-parole du Gouvernement.

Je souhaitais attirer l’attention de Mme la ministre sur la façon dont certains médias dénigrent sans cesse la qualité des produits alimentaires français, créant ainsi de grandes suspicions et inquiétudes dans l’esprit de nos concitoyens.

En effet, il ne se passe pas une semaine sans que les médias évoquent un problème de santé publique qui serait lié à notre alimentation. À cet égard, il me semble qu’on ne peut laisser dire n’importe quoi sur un sujet aussi important que la santé, a fortiori lorsque les propos tenus sont malveillants et faux. Or, malheureusement, je constate que pratiquement tous nos produits alimentaires ont été ou sont concernés : un jour le lait, un autre jour le pain, les œufs, le sucre, les crustacés, certains fruits et légumes, et surtout la viande, point de mire des critiques depuis le printemps dernier.

De fait, ces derniers mois – j’ai déposé ma question en mai dernier –, la critique se focalise sur la viande : on évoque, pêle-mêle, les gaz entériques des bovins, les conditions d’abattage, le bien-être animal et désormais la consommation d’eau. J’ai ainsi lu dans l’édition du 15 mai 2016 du Progrès de Lyon un article (L’orateur montre une photocopie de cet article.) selon lequel il faudrait 15 500 litres d’eau pour faire un kilo de bœuf, soit 4 650 000 litres, c’est-à-dire 4 650 mètres cubes d’eau par bovin ! Cet article prétendait en outre que 40 % des ressources en eau du pays seraient utilisées pour nourrir le bétail, affirmation complètement fausse et qui, de surcroît, ne tient pas compte du recyclage de l’eau. Outre ces articles de presse, des réunions se tiennent régulièrement où l’agriculture est montrée du doigt.

Aussi, je ne peux que constater et déplorer cette profusion de contrevérités relayées par les médias. Je suis intimement convaincu que l’objectif de leurs auteurs est de pousser le consommateur français à devenir végétarien, voire végétalien : non seulement il ne mangerait plus ni viande ni poisson, mais il supprimerait aussi de son alimentation tous produits ayant une origine animale, comme le lait ou les œufs.

Pour ma part, je pense qu’on ne saurait, par manque de clairvoyance ou simplement par laisser-faire, permettre à ces propos faux et médisants de proliférer. Il conviendrait, au contraire, de prendre enfin toute la mesure du découragement de nos agriculteurs et de nos éleveurs et de les soutenir efficacement, puisque, a contrario, ils se battent pour maintenir leurs exploitations et les modes de travail qui leur permettent d’assurer aux consommateurs français des produits de qualité et une nourriture saine. J’ajoute que, sans culture et sans élevage, nos pâtures et tous nos beaux paysages de montagne seraient rapidement rendus à l’état de friche.

C’est pourquoi, pour clarifier la situation et afin que puisse cesser ce dénigrement quasi constant et injustifié des produits alimentaires français, j’aurais aimé que Mme la ministre de la santé puisse indiquer clairement à la représentation nationale s’il y a un danger pour la santé à manger les produits français et, si tel peut être le cas, quels sont les produits qui poseraient problème. (Mme Patricia Morhet-Richaud applaudit.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, ce n’est pas vraiment une question. Y aurait-il un problème à manger des produits français ? Non ! Le Gouvernement a-t-il engagé, depuis que j’occupe cette fonction, une valorisation de l’origine France des produits et, en particulier, de la viande ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. Oui ! Cela commence-t-il à avoir un impact si sérieux que des investisseurs européens désireux d’obtenir ces labels viennent en France ? Oui ! Il y a donc bien eu des changements.

Par ailleurs, nous continuons de faire des efforts en faveur du bien-être animal. L’utilisation des antibiotiques, par exemple, qui a été dénoncée, a diminué de plus de 20 % en trois ans. Il faut mettre en valeur ces avancées : nous avons rempli plus vite que prévu l’objectif que nous avions fixé. Dans les filières professionnelles, le travail engagé est très important ; tous ceux qui médisent doivent le savoir.

En outre, nous développons à présent des stratégies pour intégrer à l’alimentation animale des éléments favorables à la santé humaine. Ainsi, des élevages bovins et porcins utilisent des aliments riches en lin et en légumineuses, ce qui rend la viande riche en oméga-3, en acides gras polyinsaturés, ce qui est très important pour la santé. Tous ces processus vont dans le même sens : plus de bien-être, de meilleures conditions de production et, dans le même temps, des viandes dont la qualité s’améliore de plus en plus. C’est cela la vérité, voilà ce qu’on doit répondre à ceux qui le contestent !

Cependant, comme vous l’avez rappelé, des offensives très fortes et virulentes sont menées contre la consommation de viande. Les vegans, comme on les appelle, ont un engagement militant en faveur du mode de vie végétarien ou végétalien.

Ce faisant, ils oublient que, si l’on ne consommait plus aucune viande, il n’y aurait plus d’animaux domestiques. Par quoi seraient-ils remplacés ? Peut-être par des animaux sauvages, et encore. Laisser penser que la nature laisserait les choses se faire sans aucune réponse est une erreur, mais ces militants seraient responsables, suivant leur logique, de la disparition massive de toutes les espèces domestiques : ce serait radical ! Il faut donc répéter à tous ceux qui pensent qu’il suffirait d’arrêter de manger de la viande que cela aurait de graves conséquences. Tous les gens qui viennent admirer les magnifiques animaux présents au Salon de l’agriculture doivent savoir que, si l’on entrait dans cette logique, ces animaux disparaîtraient !

Certes, je ne nie pas l’existence d’un débat sur cette question, et je respecte le choix de devenir végétarien ou végétalien. Il faut en revanche s’adresser au grand public. La production et l’élevage français ont fait, font et feront encore des progrès. Cela doit sécuriser nos concitoyens et les consommateurs.

Il faut aussi répéter à quel point la décision prise par les vegans est particulière. Dans l’histoire de l’humanité, les chasseurs-cueilleurs transhumants ont eu une existence stable et durable, pour près de 70 000 ans ! Je crains que certains, aujourd’hui, ne mesurent pas que leurs positions radicales ne nous permettront pas de subsister aussi longtemps. Quant aux chasseurs-cueilleurs, ils cueillaient, mais ils chassaient aussi ! S’ils n’avaient pas de troupeaux domestiques, ils mangeaient du gibier. Tout cela doit être rappelé. Certains veulent changer radicalement le monde, mais il existe depuis des millions d’années, et l’espèce humaine telle qu’elle est aujourd’hui a vécu de la chasse pendant des dizaines de milliers d’années !

M. le président. Il faudrait conclure, monsieur le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Volontiers, monsieur le président. Permettez-moi de conclure en évoquant le fait que la transition du mode de vie de chasseur-cueilleur à l’agriculture a eu lieu très tôt à Marseille ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly.

M. Gérard Bailly. Monsieur le ministre, je ne mets pas en doute votre parole. Nous avons participé ensemble à suffisamment de manifestations de valorisation de la production agricole – je vous en remercie d’ailleurs – pour que vous le sachiez.

En revanche, j’aurais aimé pouvoir obtenir ces assurances de Mme la ministre de la santé, à qui ma question était adressée. On lit des articles selon lesquels la consommation de viande rouge nuit à la santé, la viande est cancérigène, et manger de la viande n’est pas indispensable : ces attaques ne s’arrêtent jamais ! Pour ma part, je voudrais que Mme la ministre, un jour, dise à nos concitoyens que ce n’est pas vrai et que ces attaques doivent cesser, car elles pèsent tout de même lourd.

En outre, s’il n’y avait plus d’agriculteurs en France, on devrait importer nos produits alimentaires d’outre-Atlantique, d’Amérique du Sud, ce qui mettrait dans nos assiettes des organismes génétiquement modifiés et des hormones. Je doute que ces produits auraient la qualité française ! C’est pourquoi, monsieur le ministre, non seulement il faut répéter ces choses, mais il faudrait que ce soit Mme Touraine, en tant que ministre de la santé, qui le dise à l’opinion publique.

situation des éleveurs de bovins allaitants

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, auteur de la question n° 1505, adressée à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

M. Philippe Mouiller. Monsieur le ministre, ma question porte sur la situation économique désastreuse que connaissent, depuis de longs mois, nos éleveurs de bovins allaitants. J’ai déjà eu l’occasion d’évoquer ce sujet lors du débat qui s’est tenu au Sénat, le 23 novembre 2016, sur la sauvegarde et la valorisation de la filière élevage.

En matière d’élevage, nos races et nos savoir-faire, qui constituent l’exemple même du made in France, sont aujourd’hui clairement mis en péril. Plusieurs facteurs contribuent à cette situation.

Tout d’abord, la crise laitière met sévèrement en danger la production de viande de qualité, compte tenu de l’afflux de vaches laitières de réforme dans les abattoirs.

En outre, les éleveurs bovins français croulent sous les charges et les normes, ce qui les empêche de jouer à armes égales avec leurs concurrents, notamment européens.

Par ailleurs, la surtransposition des directives européennes entraîne des surcoûts financiers et la perte de compétitivité dont souffrent nos entreprises agricoles.

Je regrette à ce propos que la proposition de loi en faveur de la compétitivité de l’agriculture et de la filière agroalimentaire n’ait toujours pas été adoptée définitivement. Ce texte, examiné sur l’initiative du Sénat, dispose que, pour chaque norme nouvellement créée dans le domaine agricole, une norme antérieure soit abrogée.

De plus, il n’est pas acceptable que l’élevage allaitant et les territoires qui en vivent soient offerts comme monnaie d’échange de notre positionnement politique international. Ainsi, l’attitude française à l’égard de la Russie cause à nos éleveurs un tort considérable, tout comme les restrictions à l’exportation de bovins vers la Turquie, qui relèvent davantage d’une question de géopolitique que d’une question sanitaire. L’élevage est stratégique pour notre économie et ne doit pas constituer un faire-valoir dans les rapports de force.

Malgré les beaux atouts dont elle est dotée en matière d’élevage, la France semble incapable de porter une réelle stratégie de conquête des marchés d’exportation. La réponse structurelle à la crise que traverse la filière bovine passe pourtant par une stratégie offensive à l’exportation. Accompagner la filière vers ces marchés doit être une des priorités de l’État.

Or aucun comité export n’a été convoqué depuis le mois d’octobre 2015. Il doit être réuni de toute urgence. Il ne suffit pas de créer une plateforme export sans vocation commerciale et de laisser la main, principalement, à des opérateurs industriels.

Je vous remercie, monsieur le ministre, de bien vouloir me préciser les mesures que vous entendez prendre en faveur de l’élevage et de l’exportation.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, la mise en place de la plateforme export que vous avez évoquée, et qui ne se réunit pas suffisamment, s’est faite sur l’initiative du ministre de l’agriculture. Certes, vous êtes dans votre rôle en posant cette question – et chacun pourra la poser à nouveau au prochain ministre – mais si les exportateurs ne s’organisent pas pour faire vivre cette plateforme, le ministre ne peut pas exporter à leur place ! Il faut que tout le monde en ait conscience.

On pourra raconter tout ce qu’on voudra pendant la campagne présidentielle, mais chacun se retrouvera ensuite devant ses responsabilités, même si l’on continuera de laisser penser qu’il suffit de faire ceci ou cela. Pour ma part, j’ai créé une plateforme export qui n’existait pas auparavant. Nous avons cherché à mettre autour de la table tous les opérateurs de l’exportation française, ainsi que les abattoirs, pour qu’ils puissent discuter des objectifs et répondre ensemble à des appels d’offres. Une fois la plateforme créée, je peux bien les réunir dix fois, mais s’ils ne veulent pas coopérer pour répondre aux appels d’offres, que puis-je y faire ?

Puisque vous avez mentionné la Turquie, qui a rouvert le marché turc ? C’est moi, à la suite de la visite du Président de la République dans ce pays, qui s’est bien passée. Peut-être des questions géopolitiques ont-elles joué ; il n’en reste pas moins que ce marché nous avait été fermé à cause de la fièvre catarrhale ovine. C’est pour cette raison que, même si l’on respecte aujourd’hui les critères de l’Organisation mondiale de la santé animale, l’OIE, la Turquie nous a causé des difficultés, alors même que le flux d’exportations vers ce pays avait dépassé les 80 000 têtes en vif entre les sommets de l’élevage de Cournon 2014 et 2015. J’en étais surpris moi-même.

Par ailleurs, nous sommes en train de faire le nécessaire pour ouvrir des perspectives d’exportation vers l’Égypte et les pays du Maghreb, notamment en Algérie. Nous cherchons à signer des contrats, à faire en sorte que les conditions sanitaires soient respectées et, plus largement, à aider les exportateurs chaque fois que nous le pouvons. Mais cela nécessite aussi que des choix stratégiques soient faits par les filières et que les opérateurs travaillent sur ces questions.

J’en viens à la question des normes, qui est elle aussi très politique. Vous laissez penser aux agriculteurs que c’est cela qui pose problème aujourd’hui, mais vous aurez à leur expliquer demain que c’est plus compliqué. Vous allez toutes les supprimer – très bien ! – mais allez-vous régler le problème ? Les prix ont pu baisser jusqu’à 20 % ou 25 %. Trouvez-moi donc des normes dont la suppression ferait gagner 20 % à 25 % en compétitivité ! Il n’y en a pas.

Vous prétendez qu’il suffit de supprimer des normes pour retrouver les prix antérieurs ; il vous faudra donc assumer, devant les agriculteurs, l’absence d’effet de ces suppressions. Que viendront-ils alors vous dire ? Je dis cela avec beaucoup de sérieux et de responsabilité car, pour ma part, j’assume toutes les critiques depuis quatre ans et demi : j’ai battu le record de longévité à la tête de ce ministère, et je connais tout cela par cœur. Je sais donc ce qu’il est possible de faire, et ce que nous devons faire pour améliorer les choses. En revanche, je sais que les discours selon lesquels « il suffit de… » pour tout régler mènent à des lendemains difficiles.

Quant à la gestion du marché de la viande et du lait, nous avons essayé de diminuer la production laitière, ce qui a donné lieu à des abattages. Comme la production est désormais stabilisée à nouveau, les abattages de vaches laitières de réforme ne devraient plus perturber le marché de la viande bovine autant qu’ils l’ont fait récemment.

Par ailleurs, nous essayons de structurer ce marché. Nous allons offrir 150 euros afin de plafonner les carcasses de jeunes bovins à 360 kilos et d’éviter ainsi que trop de kilos de viande ne se retrouvent sur le marché ; ainsi, les prix pourront remonter. Voilà comment on fait !

Quant aux plateformes export, je le répète, nous avons tout fait pour développer des filières d’exportation, mais nous ne pouvons pas exporter à la place des exportateurs !

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller.

M. Philippe Mouiller. J’entends la réponse de M. le ministre. Selon moi, il existe plusieurs niveaux d’intervention.

De manière générale, à l’heure actuelle, on passe notre temps à courir derrière les difficultés pour essayer de les résoudre, alors que, en matière de développement économique et, notamment, d’agriculture, l’anticipation, la prospective et la stratégie sont elles aussi fondamentales : il ne s’agit pas simplement de répondre à une crise conjoncturelle.

Je reviens sur la problématique de l’exportation. Vis-à-vis des marchés que vous avez évoqués, on s’est trouvé face à une difficulté et l’outil a été créé, mais ce n’est pas suffisant ! On ne peut simplement le créer puis en laisser la responsabilité aux agriculteurs et aux entreprises. Une volonté existe pour s’impliquer dans un schéma beaucoup plus large que la simple démarche de marché : cela implique des échanges dans les domaines sanitaire, politique et économique. Voilà ce que les agriculteurs attendent en matière de portage.

Les problèmes s’accumulent. Dans mon département des Deux-Sèvres, les éleveurs subissent maintenant, en plus de leurs problèmes antérieurs, la nouvelle carte des zones défavorisées. On est en train de cumuler les difficultés dans une période où nos éleveurs n’en peuvent plus.

Quant aux normes, c’est extraordinaire ! Selon vous, on ne peut rien faire !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Faites, alors !

M. Philippe Mouiller. Or, si l’on prend le temps de regarder comment le Gouvernement transpose les directives européennes, on s’aperçoit qu’il apporte un niveau de complexité encore bien supérieur. Dire qu’on ne peut rien faire, c’est du fatalisme, et je pense que votre bilan se fondera sur le fatalisme ! (M. Loïc Hervé applaudit. – M. le ministre s’exclame.)

mesures de régulation aux fins de lutte contre les « déserts médicaux »

M. le président. La parole est à M. Louis-Jean de Nicolaÿ, auteur de la question n° 1528, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ. Il n’y a jamais eu autant de médecins en France ; néanmoins, selon un constat établi par le Conseil national de l’ordre des médecins, les déserts médicaux à la campagne et dans les zones périurbaines se développent. C’est ainsi que 49 % des Sarthois ont vu leur accès géographique aux médecins généralistes reculer, et plus encore pour les spécialistes : 84 % en ce qui concerne les pédiatres, 75 % pour les ophtalmologues, 73 % pour les gynécologues.

Le 25 août dernier, une nouvelle convention entre médecins et assurance maladie a été signée, ce qui a officialisé quatre nouvelles mesures pour les zones sous-dotées, mesures qui restent pourtant simplement incitatives.

Ainsi, la signature de contrats visant à séduire les étudiants ou à sécuriser les médecins généralistes pour revigorer les zones sous-dotées n’a pas vraiment permis d’inverser la tendance, et la mise en place des maisons de santé pluriprofessionnelles, qui visent à encourager l’exercice collectif pluridisciplinaire, reste aujourd’hui extrêmement coûteuse et, en pratique, met en exergue des divergences d’approche entre élus et professionnels de santé.

Par ailleurs, augmenter le numerus clausus, comme il est proposé dans les régions déficitaires, reste un moyen à long terme et hypothétique de lutter contre ces zones sous-dotées, puisque le laps de temps entre la formation et l’installation effective de médecins ne permet pas d’apporter une réponse immédiate et, par ailleurs, ne permet pas d’assurer que cette installation se fera dans ces zones.

Il est donc urgent de mettre en place une politique ambitieuse qui garantisse l’accès de tous à des soins de qualité et satisfasse ainsi l’intérêt général.

Nous regrettons que plusieurs mesures qui pouvaient constituer de vraies solutions sur le sujet n’aient pas prospéré lors des débats relatifs au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 ; je pense notamment au conventionnement sélectif, pourtant introduit par votre majorité, ou à la situation des médecins retraités en zones sous-denses, qui avait largement rassemblé le Sénat.

Aussi, je souhaite particulièrement attirer votre attention sur ces mesures de régulation qui pourraient être mises en place en complément de l’arsenal incitatif existant. Peut-être, et avant toute chose, faudrait-il rendre obligatoire, dans le cadre de la convention nationale, les négociations sur le conventionnement afin d’encourager l’installation en zones rurales.

On pourrait aussi, par exemple, revaloriser substantiellement les aides prévues par la convention médicale, dans ses options « démographie » et « santé-solidarité territoriale », au sein des zonages déterminés par les agences régionales de santé, mais également dans les zones de revitalisation rurale, tout en y allégeant les conditions. Ces mesures peuvent évidemment être envisagées sur des périodes transitoires.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l’autonomie. Monsieur le sénateur, nombre de Français éprouvent des inquiétudes légitimes concernant le maintien d’une offre de soins dans les territoires ruraux. Ces inquiétudes ne datent pas d’hier : elles sont le fruit d’années durant lesquelles les pouvoirs publics avaient tout simplement cessé d’inventer. Elles sont aussi la conséquence d’un creux démographique lié aux départs en retraite de la génération du baby-boom, phénomène qui dépasse très largement les seuls médecins.

Pour répondre à cette inquiétude, le Gouvernement poursuit une ambition claire et assumée : inciter les jeunes médecins à s’installer dans les territoires sous-dotés.

Concrètement, il s’agit de faciliter l’installation du médecin en lui assurant une certaine sécurité professionnelle, sociale et financière. Les dispositifs mis en place dans le cadre du pacte territoire-santé connaissent aujourd’hui un vrai succès : 665 praticiens territoriaux de médecine générale se sont installés dans des zones sous-dotées, 1 750 étudiants ont signé un contrat d’engagement de service public, et notre pays compte désormais 830 maisons de santé pluriprofessionnelles.

Pour encourager les jeunes médecins à s’installer dans ces territoires, il fallait aussi revoir en profondeur leur formation pour la rendre mieux adaptée et plus professionnalisante. Nous avons donc augmenté le nombre de maîtres de stage universitaires parmi les professionnels de santé de terrain.

Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, aura très prochainement l’occasion de présenter le bilan du pacte territoire-santé.

En revanche, nous avons la conviction que la mise en place d’une restriction à la liberté d’installation serait inefficace. Un quart des étudiants diplômés en médecine ne s’inscrivent pas à l’Ordre et choisissent des professions sans lien avec le soin. Les autres risquent quant à eux d’opter pour un exercice spécialisé, au détriment de la médecine générale.

Enfin, le conventionnement sélectif inciterait le médecin à opter pour un exercice hors convention, non remboursé par la sécurité sociale, créant ainsi une médecine à deux vitesses.

Instaurer de tels mécanismes remettrait en cause le travail qui est aujourd’hui bien engagé avec l’ensemble des acteurs, sans proposer de solution de remplacement crédible ou durable.

La démographie médicale est un sujet complexe, exigeant. Il doit nous appeler à refuser le mirage du court-termisme et à réformer en profondeur.

M. le président. La parole est à M. Louis-Jean de Nicolaÿ.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ. Madame la secrétaire d’État, je n’ignore pas les efforts accomplis pour essayer de trouver des solutions au problème de démographie médicale dans les territoires. Aujourd’hui, certains territoires souffrent beaucoup plus que d’autres et ont des difficultés à voir des médecins s’installer.

Certes, les décisions générales qui sont prises peuvent être quelquefois assez efficaces, mais des mesures encore plus spécifiques manquent encore pour inciter les médecins à s’installer dans des territoires qui risquent de perdre dans les trois ou quatre prochaines années la totalité de leurs médecins. Une carte de la région des Pays de la Loire a été publiée dernièrement : on y voit de véritables déserts médicaux. Dans ces zones, les mesures, bien qu’elles soient très incitatives, ne sont pas assez puissantes pour obliger les médecins à s’installer.

statut des médecins en haute montagne

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 1544, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Jean-Yves Roux. Madame la secrétaire d’État, ma question concerne les secours en montagne, plus précisément le statut des médecins embarqués lors de missions de sauvetage en territoires de montagne. Les interventions d’urgence en territoires de montagne mobilisent des personnels civils et militaires qui effectuent des missions de haute technicité dans des conditions parfois périlleuses.

La difficulté de leurs missions tient à plusieurs critères.

Ces tâches, spécifiques à la médecine de montagne et à la médecine d’urgence, d’une grande polyvalence, doivent être accomplies dans un temps réduit. Par ailleurs, le lieu même de l’intervention se révèle parfois très difficile d’accès ou peu adapté en cas d’urgence réelle. Il faut en effet souligner qu’en territoires de montagne la distance moyenne pour accéder à un SAMU ou un SMUR est de vingt-sept kilomètres, soit trente à quarante minutes par la route et quinze à trente-cinq minutes par hélicoptère.

À ce jour, on compte environ 150 médecins qui effectuent ces missions de secours embarqué. Ils ne bénéficient pas du même statut, certains étant civils, d’autres militaires. Or certains de ces médecins, qui ne bénéficient pas du statut de fonctionnaires, sont de facto exclus de la bonification des points de retraite, qui est attribuée en compensation de la dangerosité des tâches accomplies. Ces personnels, civils et embarqués, remplissent pourtant de la même manière, avec un niveau équivalent de compétence et de prise de risque, les missions de service public qui leur sont confiées.

Aussi, madame la secrétaire d’État, je souhaite connaître les possibilités permettant à ces médecins de bénéficier de la même bonification des points de retraite.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, je comprends l’importance que cette question revêt pour un territoire de montagne comme le vôtre, dans lequel les hélicoptères de secours ont un rôle majeur pour la population.

La question que vous posez a trait directement aux statuts des différents intervenants des équipes de secours. Ces différences statutaires se traduisent par des modes de rémunérations différents, une sécurité de l’emploi qui n’est pas la même et in fine des avantages de retraite différents.

La comparaison entre les différents régimes de retraite et les avantages qu’ils servent ne peut pas se faire de manière isolée, sur une dimension particulière. Elle nécessite d’apprécier l’ensemble des droits et obligations qui caractérisent chacun des régimes.

En effet, selon le régime de sécurité sociale applicable, les droits à retraite reposent sur une logique différente. Par exemple, si certains services peuvent ouvrir droit à bonification dans les régimes de la fonction publique, à l’inverse, certains avantages familiaux pourront se révéler plus intéressants dans le régime général.

La même approche doit être retenue pour apprécier les situations des différents médecins susceptibles d’intervenir à bord des hélicoptères. Dans ce cas précis, les différences liées à leur statut ne se limitent pas à la seule question des retraites : deux médecins pourront, par exemple, percevoir une rémunération différente pour cette même activité.

Concernant précisément les bonifications pour service aérien, je veux rappeler que celles-ci sont prévues, pour les fonctionnaires, par les articles L. 12 et R. 20 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Un arrêté des ministres chargés de la défense, de l’économie et des finances et des transports de 1971 détaille les coefficients applicables aux différents types de service aérien.

Il s’agit d’un mécanisme propre aux régimes de la fonction publique. Par conséquent, les médecins libéraux, les praticiens hospitaliers et l’ensemble des personnels médicaux des établissements publics de santé, sociaux et médico-sociaux affiliés au régime général, ne peuvent pas en bénéficier.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux.

M. Jean-Yves Roux. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse, mais j’appelle votre attention sur le fait que le nombre de médecins concernés est très faible. Aussi, la pénibilité de ces professions combinée à la prise en compte des particularités territoriales, telles que la montagne, pourrait sans doute permettre de faire évoluer cette situation.

désertification médicale et aggravation de la fracture sanitaire

M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, auteur de la question n° 1516, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Olivier Cigolotti. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur la désertification médicale et l’aggravation de la fracture sanitaire.

Les déserts médicaux se sont agrandis, les dépassements d’honoraires n’ont pas régressé et les refus de soins sont en hausse. Aujourd’hui, jusqu’à un tiers des Français ont des difficultés d’accès géographique à trois spécialités – pédiatrie, gynécologie, ophtalmologie – et un quart aux médecins généralistes.

Dès lors que l’on souhaite se soigner au tarif de la sécurité sociale, pour plus de huit Français sur dix, les gynécologues et ophtalmologistes sans dépassements d’honoraires manquent. Pis, l’offre au tarif opposable pour les trois spécialités étudiées s’est réduite depuis 2012 pour plus d’un Français sur deux.

La première cause est géographique. Malgré les mesures incitatives à destination des médecins, la répartition géographique des professionnels de santé s’est dégradée. En quatre ans, 27 % des Français ont vu leur accès aux généralistes reculer.

La seconde cause est liée aux tarifs. Les dépassements d’honoraires ont continué à croître depuis 2012. Le contrat d’accès aux soins, qui a été mis en œuvre en 2013 et qui devait réguler les dépassements d’honoraires, est un échec. Ainsi, en Haute-Loire, si l’on cherche un spécialiste sans dépassement d’honoraires, l’accès aux soins est difficile et la plupart des bassins de proximité sont en situation de désert médical.

Pour mieux répartir les médecins sur le territoire, pourquoi ne pas envisager un numerus clausus pouvant être décliné régionalement ainsi qu’un conventionnement sélectif permettant aux médecins de s’installer prioritairement en zones sous-denses, afin d’injecter dans ces territoires l’offre à tarif opposable qui y fait paradoxalement défaut aujourd’hui ? Ces zones sous-denses doivent être déterminées par les ARS en concertation avec les élus et non par les caisses d’assurance maladie dont le seul objectif doit être la liquidation de prestations.

Le nouveau « contrat responsable » des complémentaires santé visant à mettre fin à la surenchère inflationniste de certains remboursements se révèle lui aussi un échec. En effet, la mutuelle ne peut entrer en action qu’à condition que le médecin ait signé le « contrat d’accès aux soins » ; il a été décidé à tort, semble-t-il, de lier le remboursement complémentaire au choix du médecin.

Aussi, madame la secrétaire d’État, que compte mettre en place le Gouvernement pour offrir un accès aux soins de qualité sur l’ensemble du territoire national ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, « les dépassements d’honoraires ont continué à croître depuis 2012 », avez-vous affirmé. Voilà une assertion surprenante, puisque les chiffres de la Caisse nationale d’assurance maladie montrent qu’après vingt ans de hausse ininterrompue le taux de dépassement d’honoraires des médecins de secteur 2 a diminué de plus de deux points entre 2012 et 2016.

Cependant, je vous rejoins lorsque vous valorisez l’exercice à tarif opposable. C’est bien pour cela que Marisol Touraine a insisté dès 2012 pour la maîtrise des dépassements d’honoraires. C’est l’objet de l’avenant 8 à la convention médicale qui crée le contrat d’accès aux soins. La nouvelle convention médicale, conclue au mois d’août dernier, poursuit les efforts de valorisation de la maîtrise des dépassements d’honoraires. À ce titre, le contrat d’accès aux soins a été rebaptisé « option pratique tarifaire maîtrisée ».

Selon vous encore, monsieur le sénateur, aujourd'hui, les dépassements d’honoraires sont trop importants. C’est pourquoi vous proposez un conventionnement qui ne pourrait se faire qu’en secteur 1 dans les zones dites « sur-dotées ». Si cette mesure était appliquée, nous aurions à terme dans ces territoires une minorité de médecins à tarif opposable avec des délais d’attente sans commune mesure avec ce que l’on constate actuellement et des médecins déconventionnés, c’est-à-dire non remboursés par la sécurité sociale, avec des dépassements d’honoraires incontrôlés, donc accessibles rapidement pour qui en aurait les moyens.

Monsieur le sénateur, cette proposition, c’est tout simplement la mise en place d’une médecine du « riche » rapide et d’une médecine du « pauvre » avec des délais de consultations inacceptables. Voilà pourquoi le Gouvernement est opposé à cette proposition de conventionnement sélectif.

À l’inverse, les mesures incitatives à l’installation mises en place depuis 2012 ont d’ores et déjà des résultats visibles. Dans votre département, la Haute-Loire, les mesures du pacte territoire-santé ont permis l’installation de trois praticiens territoriaux de médecine générale, de sept médecins correspondant SAMU qui facilitent l’accès aux soins d’urgence. Désormais, sept maisons de santé et trois pôles de santé maillent le territoire.

Pour résoudre cette problématique d’accès aux soins, ce sont des mesures pragmatiques, diverses, allant de la formation aux conditions d’installation qu’il nous faut utiliser. Le Gouvernement reste pleinement mobilisé et convaincu que c’est dans la durée que nous mesurerons la portée de nos efforts !

M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti.

M. Olivier Cigolotti. Madame la secrétaire d’État, j’entends bien vos arguments. Certes, des améliorations ont été apportées, mais elles sont nettement insuffisantes, d’autant que, dans le même temps, les collectivités consentent des efforts importants pour réaliser des maisons de santé pluridisciplinaires. Les mesures d’incitation que vous évoquez ont atteint leurs limites. Il va donc falloir envisager des mesures coercitives si l’on veut mailler le territoire de façon plus cohérente. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC. – Mme Brigitte Micouleau applaudit également.)

M. Loïc Hervé. Très bien !

stage obligatoire dans une petite entreprise pour les étudiants des grandes écoles

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 1548, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Yannick Vaugrenard. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous interroger sur la possibilité de rendre obligatoire un stage dans une PME pour les étudiants des grandes écoles.

En 2015, 63 % des salariés étaient employés dans des PME. Cependant, ces entreprises embauchent beaucoup moins de jeunes diplômés que les grandes entreprises, ce qui leur porte préjudice, car de nombreuses études montrent l’importance de ces profils pour leur développement et leur dynamisme. Même pour les PME françaises les plus performantes, les difficultés à recruter des jeunes diplômés sont réelles.

Cette situation constitue une différence majeure avec l’Allemagne, où le niveau moyen d’encadrement des entreprises est bien meilleur que celui des PME et entreprises de taille intermédiaire françaises, notamment parce que les jeunes diplômés s’y orientent naturellement à la sortie de leurs études. Le Royaume-Uni s’est, quant à lui, saisi du problème et a mis en place des programmes particuliers associant grandes universités et PME, permettant ainsi aux étudiants d’effectuer des stages dans ces entreprises.

Il me semble donc opportun de faire découvrir aux futurs grands décideurs ce qui fait notre richesse économique. Trop souvent, les étudiants des grandes écoles intègrent directement des grandes entreprises, publiques ou privées, ce qui ne leur donne pas une image réelle de la diversité économique de notre pays.

Je souhaite donc que s’engage une réflexion afin d’instaurer un stage obligatoire en PME dans le cursus des étudiants de nos grandes écoles françaises.

Nos entrepreneurs sont très demandeurs de la création de ce type d’initiatives en France ; c’est une volonté forte exprimée par les réseaux de petites et moyennes entreprises. En outre, la Banque publique d’investissement, la BPI, a déjà travaillé sur cette question.

La BPI pourrait donc être, notamment par son programme Bpifrance Excellence et les réseaux Business France, un facilitateur des liens entre les étudiants des grandes écoles et les PME.

Monsieur le secrétaire d’État, quelle est votre position sur cette proposition ? Selon vous, de quelle manière pourrait-elle être mise en œuvre ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, vous insistez sur l’intérêt que trouveraient à la fois les étudiants et les petites et moyennes entreprises si était mis en place un système de stage obligatoire dans le cadre du parcours de scolarité.

Le constat que vous dressez est absolument juste : les PME françaises auraient intérêt à bénéficier de l’expertise des étudiants des grandes écoles, comme d’ailleurs des étudiants issus de l’université, car il n’y a pas de raison de considérer que seuls les premiers devraient être concernés. On peut imaginer un système applicable au niveau master, voire doctorat. Ces échanges sont trop peu nombreux et il serait bon, à la fois pour les étudiants et pour l’économie, qu’ils se développent.

Vous proposez de rendre ce parcours obligatoire et vous vous appuyez, avec raison, sur des expériences étrangères. En Allemagne, les relations entre les entreprises et le système universitaire relèvent d’une tradition particulièrement forte, dont on voit bien l’intérêt.

Monsieur le sénateur, si je partage votre constat, je ne suis pas sûr d’aller aussi loin, notamment en ce qui concerne le caractère obligatoire de ces stages.

En effet, pour qu’une telle mesure soit efficace, il faudrait que le tissu des PME-PMI françaises soit prêt à jouer le jeu, donc à proposer des offres en nombre permettant l’accueil des étudiants des grandes écoles comme de ceux des universités – pourquoi réserver cela aux seuls étudiants des grandes écoles ? Or telle n’est pas la tradition française. Par ailleurs, le caractère obligatoire de ces stages heurterait l’autonomie des écoles dans l’organisation de leur scolarité.

Reste qu’il s’agit là d’une question importante. Nous avons nous-mêmes essayé de mettre en place des relations beaucoup plus étroites, notamment avec les conventions industrielles de formation par la recherche, les CIFRE, qui permettent à des doctorants de faire, d’une certaine manière en alternance, leur apprentissage. D’autres solutions innovantes restent probablement à trouver.

Monsieur le sénateur, je le répète, je partage le constat, mais suis plus réservé sur la réponse à apporter. Je souhaite cependant poursuivre cet échange pour que nous étudiions ensemble les formes que pourrait prendre une disposition non coercitive qui favoriserait des échanges approfondis entre les étudiants des écoles et des universités et les PME-PMI. Cela peut d’ailleurs faire l’objet d’un rapport, si vous le souhaitez.

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard.

M. Yannick Vaugrenard. Monsieur le secrétaire d’État, nous sommes d’accord sur le constat ! Voilà qui constitue un élément de satisfaction.

J’entends bien les difficultés auxquelles nous pouvons nous heurter à partir du moment où le dispositif que je propose serait généralisé du jour au lendemain. C’est pourquoi je saisis au bond votre proposition. Il me semble intéressant d’aller vers une expérimentation, qui donnera ensuite lieu à une évaluation, avant une éventuelle généralisation de ce dispositif.

Je suis convaincu, pour en avoir discuté avec les représentants de la CGPME, la Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises, qui sont d’accord avec cette expérimentation, que nous souffrons du fait que les grands décideurs de demain connaissent moins bien que les autres grands décideurs, par exemple allemands ou britanniques, le tissu des PME-PMI. Nous en pâtissons incontestablement sur le plan économique.

À partir du moment où nous partageons le constat, il faut faire en sorte d’avancer le plus rapidement possible.

auxiliaires de vie scolaire

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, auteur de la question n° 1553, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Jean-Louis Tourenne. Le Gouvernement a inscrit, depuis 2012, dans ses priorités et de façon très concrète, l’accès des personnes en situation de handicap, particulièrement des jeunes, à tous les espaces publics, aux lieux de culture, de loisirs et d’éducation. À l’école, d’importants efforts ont été consentis pour favoriser l’intégration de tous les élèves, quelles que soient leurs différences ou leurs difficultés particulières. Un bon nombre d’enfants en situation de handicap sont maintenant scolarisés avec tous les enfants de leur classe d’âge.

Or le défi que le Gouvernement s’emploie à relever concerne non seulement l’inclusion dans des classes indifférenciées – ce n’est pas qu’une question de nombre –, mais également la réussite de ces élèves en la favorisant. L’environnement matériel et l’accompagnement humain doivent donc être à la hauteur de l’enjeu. Cela a été fait, puisque d’importants efforts ont été accomplis. Je pense au recours amplifié aux outils numériques, aux transports scolaires adaptés, ce qu’ont parfaitement réussis les communes et les départements, au recrutement d’auxiliaires de vie scolaire, les AVS, à leur formation et à la pérennisation de leur emploi.

Parce qu’il s’agit bien d’une activité très spécialisée qui nécessite des connaissances précises, les AVS ne sauraient être, comme cela s’est pratiqué dans les années passées, des personnes en emploi d’insertion sans formation aucune et appelées à n’avoir qu’un passage éphémère en tant qu’accompagnants.

À ce jour, il me semble utile de mesurer le chemin parcouru. Il n’est qu’à citer l’évolution du nombre d’AVS formés, le nombre d’emplois pérennisés, l’écart éventuel entre les besoins exprimés, notamment par décision des maisons départementales des personnes handicapées, et la réalité de la réponse fournie. Il convient également de préciser les mesures envisagées pour mettre demain parfaitement en adéquation l’offre et la demande.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, vous avez raison de rappeler que la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, qui avait pour objectif de prendre en compte la spécificité de chaque élève et de construire une école inclusive, a permis qu’un certain nombre de dispositions soient prises.

Les agents exerçant des missions d’aide humaine, de soutien et d’accompagnement des élèves en situation de handicap ont une place primordiale dans la scolarité. C’est pour mettre fin à la précarité professionnelle et financière dans laquelle ils se trouvaient que le statut des accompagnants des élèves en situation de handicap, les AESH, a été concrétisé par le décret du 27 juin 2014.

Ce statut permet de recruter des auxiliaires de vie scolaire en qualité d’AESH en leur offrant des garanties professionnelles sur le long terme. En effet, ils peuvent accéder à un CDI après six années d’ancienneté, y compris celles qui sont effectuées sous le statut d’assistant d’éducation.

La circulaire du 8 juillet 2014 prévoit également que les personnes ayant acquis de l’expérience dans le domaine de l’inclusion scolaire et étant parvenues au terme de leur contrat unique d’insertion, le CUI, peuvent bénéficier d’un recrutement en CDD et de la dispense de diplôme.

Lors de la dernière Conférence nationale du handicap, le Président de la République a annoncé la création de 32 000 postes d’AESH sur cinq ans par transformation de 56 000 emplois de CUI ou CAE, contrat d’accompagnement dans l’emploi. Ainsi, 6 400 équivalents temps plein AESH ont été créés en 2016.

De plus, depuis 2012, 2 900 équivalents temps plein AESH ont été créés, auxquels s’ajoutent 1 351 emplois pour la rentrée scolaire 2017 prévus dans le projet de loi de finances pour 2017.

À terme, ce seront plus de 60 000 emplois d’AESH formés et stabilisés au sein des équipes pédagogiques qui assureront un accompagnement de qualité.

Ces personnels doivent être formés. À cette fin, ils suivent un module de formation obligatoire de soixante heures sur leur temps de travail.

Par ailleurs, les AESH bénéficient d’une rémunération comprise entre le traitement indiciaire correspondant au salaire minimum interprofessionnel de croissance et celui afférant à l’indice brut 400, ainsi que le prévoit l’arrêté du 27 juin 2014.

En tout, ce sont près de 800 millions d’euros qui sont inscrits au projet de loi de finances pour 2017 pour développer une école encore plus inclusive.

Monsieur le sénateur, vous pouvez le constater : nous souhaitons bien pérenniser des emplois essentiels à l’épanouissement de tous les élèves et offrir des perspectives d’évolution à ceux qui les accompagnent.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.

M. Jean-Louis Tourenne. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de la qualité de votre réponse, qui nous permet de mesurer les impressionnants efforts accomplis au cours des dernières années. L’enjeu le mérite : la politique d’intégration nécessite que des moyens particuliers et suffisants soient déployés.

Il convient d’ajouter qu’émergent aujourd’hui de nouveaux handicaps d’ordre cognitif qui, jusqu’à présent, n’étaient pas décelés. Ils concernent notamment des enfants dont l’intelligence peut être supérieure à la moyenne ou est en tout cas suffisamment normale pour leur permettre de suivre des études correctes. Ces enfants souffrent aujourd’hui de « dys » – dyscalculie, dyslexie, dysorthographie. Jusqu’à présent, ils sont peu pris en charge et on demande souvent aux enseignants et aux directeurs d’école de les accompagner pour qu’ils puissent poursuivre une scolarité normale, ce qu’ils sont incapables de faire, n’ayant pas la formation adéquate.

Aussi, monsieur le secrétaire d’État, au-delà même des efforts qui ont été accomplis, il y a toute une catégorie d’enfants qui mériteraient que l’on s’intéresse à eux et qui ne poursuivent pas les études qu’ils pourraient entreprendre. Cela constitue un gaspillage d’intelligence. C’est pourquoi je souhaite que nous puissions réfléchir et travailler ensemble pour améliorer la situation.

élèves français de l'étranger et option sport de haut niveau au baccalauréat

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, en remplacement de Mme Claudine Lepage, auteur de la question n° 1559, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Yannick Vaugrenard, en remplacement de Mme Claudine Lepage. Monsieur le secrétaire d’État, Mme Lepage, souffrante, m’a demandé de vous poser la question qu’elle avait préparée. Le code de l’éducation indique que les établissements scolaires du second degré permettent la préparation des élèves en vue de la pratique sportive d’excellence et d’accession au haut niveau et la pratique professionnelle d’une discipline sportive lorsqu’ils ont conclu une convention.

Comme vous le savez, ces articles du code de l’éducation sont censés s’appliquer aux établissements scolaires français à l’étranger. Malheureusement, des élèves scolarisés dans le réseau d’enseignement français à l’étranger et qui, au vu de leur talent et de leur situation – ils sont par exemple membres d’un club sportif de haut niveau –, pourraient bénéficier du statut de sportif de haut niveau éprouvent des difficultés à s’inscrire à l’option sport de haut niveau au baccalauréat.

Lors de la discussion du projet de loi visant à protéger les sportifs de haut niveau et professionnels et à sécuriser leur situation juridique et sociale, Claudine Lepage a défendu un amendement visant à mettre fin à ces difficultés, qui n’a pas été adopté, mais le secrétaire d’État au sport avait alors indiqué : « Quoi qu’il en soit, votre amendement est satisfait, madame Lepage, par le code de l’éducation. S’il existe un problème, c’est que le club en question n’a pas passé de convention avec le lycée. Lorsque ce club aura conclu une telle convention, l’article du code de l’éducation qui concerne aussi les établissements français situés à l’étranger pourra s’appliquer. »

Plus d’un an après cette déclaration, les difficultés subsistent. Claudine Lepage souhaite donc savoir si, à l’avenir, un dispositif peut être mis en place entre le ministère de l’éducation nationale, les établissements français de l’étranger et les postes diplomatiques afin que la signature de conventions entre les clubs sportifs locaux et les établissements scolaires soit facilitée et, ainsi, que les élèves français à l’étranger puissent bénéficier réellement du statut de sportif de haut niveau.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, vous remercierez Mme Lepage de cette question très précise qui appelle une réponse de même nature.

Je rappelle le contexte légal, défini par la note de service interministérielle du 30 avril 2014 des ministères des sports et de l’éducation nationale, relative aux avantages d’aménagement de scolarité des élèves sportifs de haut niveau et espoirs. Elle définit le champ des sportifs concernés, précise les aménagements de scolarité et d’examens ainsi que l’organisation et le déroulement des études, et ce pour les élèves de tous les établissements du second degré, qu’ils soient publics ou privés sous contrat, sur le territoire français ou à l’étranger, scolarisés ou non.

Pour permettre à chacun d’atteindre l’excellence, de nombreux dispositifs d’aides aux sportifs de haut niveau ont été mis en place. Pour l’examen au baccalauréat, ces derniers voient leur spécialité valorisée dans l’option facultative EPS, éducation physique et sportive, et sont dispensés de la partie physique de cette épreuve. Ils ont ensuite la possibilité d’effectuer leur premier cycle en trois ans au lieu de deux. Une section sur admission post-bac est d’ailleurs prévue à cet effet.

Ceux qui étudient à l’étranger bénéficient de droit – j’insiste sur ce point – de cet aménagement. Quant à ceux qui pratiqueraient leur discipline dans un club étranger qui ne figure pas sur les listes ministérielles, seule une convention entre la fédération française du sport considéré et le club local pourrait être une solution alternative à la situation actuelle. La convention entre le club sportif local et l’établissement est beaucoup trop longue et trop peu souvent appliquée, cela a été souligné. Cette convention ne suffit donc pas. Si elle était complétée par une convention directe entre la fédération française du sport concerné et le club sportif local, nous pourrions traiter beaucoup plus facilement et plus rapidement ces demandes.

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard.

M. Yannick Vaugrenard. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse et vous soumets une autre solution, suggérée par Mme Lepage, et plus simple selon elle : il s’agirait de donner une délégation au conseiller de coopération et d’action culturelle ou au proviseur afin qu’il puisse signer de lui-même une convention avec un club sportif local.

régénération des huiles noires

M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 1537, adressée à Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.

Mme Agnès Canayer. Ma question porte sur la mise en place d’une filière pérenne de régénération des huiles noires usagées.

La régénération des huiles usagées est le mode le plus abouti en termes d’économie circulaire. Elle assure la préservation des ressources pétrolifères tout en protégeant l’environnement. Malheureusement, en France, ce modèle vertueux de valorisation des déchets par la régénération, par ailleurs fortement encouragé par l’Union européenne, est aujourd’hui remis en cause.

L’arrêté du 28 janvier 1999 relatif aux conditions de ramassage des huiles usagées rendait gratuite la collecte des huiles noires. Il a permis la collecte de 100 % des huiles noires, soit 200 000 tonnes par an. Une filière s’est donc développée. Les deux seules usines françaises de régénération sont aujourd’hui installées en Seine-Maritime.

Or cette gratuité a été remise en cause par l’arrêté du 8 août 2016, qui rend désormais la collecte payante. Les effets ont été immédiats pour les usines Eco Huile et Osilub. Les garages, incités à stocker les huiles de vidange pour réduire les frais de collecte, n’approvisionnent plus suffisamment les deux usines de régénération. La semaine dernière, l’une d’elles a dû cesser le travail pendant une dizaine de jours, faute d’huile à régénérer. L’impact écologique est tout aussi notable.

Aussi, à la suite de la réunion qui s’est tenue le 29 novembre dernier avec l’ensemble des acteurs de la filière, je souhaite interroger le Gouvernement sur trois points, intimement liés.

Tout d’abord, l’arrêté du 8 août dernier impose une réflexion sur le mode de financement de la filière. Dans la réponse à une question écrite de mon collègue Gérard Bailly, vous évoquez la mise en place d’une responsabilité élargie du producteur. Or, lors de la réunion du 29 novembre, vous avez envisagé un crédit de TGAP, la taxe générale sur les activités polluantes, sur les huiles régénérées. Un amendement en ce sens a été déposé dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, mais il a rejeté. Quelle solution sera donc adoptée pour encourager la filière française ? Dans quel délai ?

Ensuite, la filière de régénération bénéficie depuis dix ans d’une subvention de l’ADEME, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie. Cette subvention doit s’éteindre en février 2017. Or rien n’est prévu pour la remplacer. Dans ce contexte fragile et incertain, ne pensez-vous pas qu’il serait opportun de poursuivre le soutien à la filière ?

Enfin, la législation française relative au traitement des déchets découle essentiellement de la réglementation européenne. Or les industries françaises ont développé un savoir-faire. Comment le Gouvernement entend-il soutenir cette filière ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche. Madame la sénatrice, vous interrogez Mme Ségolène Royal, qui connaît mieux que moi le sujet, sur la régénération des huiles usagées. Ne pouvant être présente, elle m’a chargé de vous répondre.

Vous l’avez rappelé, l’arrêté du 8 août 2016 supprime la collecte gratuite des huiles usagées. Cette mesure était fortement attendue par les acteurs de la filière et contribue, au moins à court terme, à lever leurs incertitudes et à rétablir des conditions économiques acceptables. Ainsi les installations de régénération devraient-elles pouvoir prochainement observer une augmentation des volumes d’huiles usagées qui leur sont livrés par les ramasseurs par rapport à leurs niveaux passés.

Par ailleurs, sous l’impulsion de la ministre de l’environnement, les représentants professionnels des ramasseurs d’huiles agréés et des entreprises de régénération ont adopté, le 29 septembre 2016, une charte d’engagements mutuels dans laquelle les acteurs s’engagent à diriger prioritairement les huiles usagées collectées vers la régénération, ce qui est très positif.

Néanmoins, la situation de cette filière reste préoccupante, car la collecte payante n’est pas une solution satisfaisante, certains détenteurs pouvant être tentés de déverser leurs huiles polluantes dans le milieu naturel, malgré les sanctions prévues, plutôt que de payer un collecteur agréé. C’est pourquoi il nous faut continuer de travailler sur des solutions pérennes pour le fonctionnement de la filière des huiles usagées. Les réflexions se poursuivent et plusieurs pistes de solutions ont été identifiées, dont des évolutions de la TGAP, même si c’est compliqué, et la mise en place d’une filière de responsabilité élargie du producteur.

M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer.

Mme Agnès Canayer. Il est urgent d’intervenir, car l’incertitude concernant les solutions fragilise fortement cette filière, qui se détourne aujourd’hui vers les usines situées en Italie ou en Allemagne, lesquelles sont beaucoup mieux soutenues par leur législation nationale.

fermeture du poste de police d'oissel

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, auteur de la question n° 1575, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

M. Thierry Foucaud. Le poste de police d’Oissel, en Seine-Maritime, qui dépend du commissariat de Saint-Étienne-du-Rouvray et de la zone de sécurité publique Rouen-Elbeuf, devait fonctionner avec un effectif de quatre policiers, ce qui est d’ailleurs peu pour une commune de 13 000 habitants. Or ce bureau connaît depuis quelque temps des dysfonctionnements importants de service dus à une insuffisance d’effectifs chronique.

Ce poste de police a d’ailleurs purement et simplement été fermé en 2015, alors même que l’état d’urgence venait d’être instauré. Aujourd'hui, il est ouvert épisodiquement, au mieux uniquement le mardi et le jeudi matin, ce qui prive les habitants de la commune d’un service de sécurité de proximité.

Alors qu’aucune amélioration de la situation n’a été constatée, le ministre de l’intérieur, devenu depuis lors Premier ministre, s’est rendu le 17 novembre dernier dans la ville d’Elbeuf, où il a souligné à juste titre « le courage des policiers qui sont intervenus à Saint-Étienne-du-Rouvray », propos auxquels je m’associe totalement. Saint-Étienne-du-Rouvray est la commune voisine d’Oissel. Dans ces secteurs, les habitants sont évidemment particulièrement meurtris par le souvenir des terribles événements qui s’y sont produits.

Le ministre de l’intérieur, aujourd’hui Premier ministre, lors de sa visite à Elbeuf, a annoncé l’arrivée de gardiens de la paix et de gradés. Le poste de police de la commune d’Oissel, qui fait partie de ce bassin de vie, se verra-t-il attribuer des effectifs suffisants pour assurer la sécurité des biens et des personnes ? Des délits se sont produits dernièrement dans ce secteur.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche. Avant toute chose, il convient de rappeler que 9 000 postes ont été créés durant le quinquennat pour augmenter les effectifs de police.

Le 17 novembre dernier à Elbeuf, Bernard Cazeneuve, alors ministre de l’intérieur, a annoncé le renfort de quinze gradés et gardiens de la paix pour la circonscription de sécurité publique de Rouen au printemps prochain. Cet engagement va bien sûr se concrétiser.

Les effectifs de police en Seine-Maritime vont augmenter dans les mois à venir. À la fin du mois de novembre, la police nationale comptait dans le département 2 682 agents. Elle devrait en compter 2 720 à la fin du mois de mai 2017. La seule sécurité publique, dont les policiers, dans les commissariats et sur le terrain, assurent la « police du quotidien » au plus près de la population et des élus, va bénéficier de 39 agents supplémentaires d’ici au printemps prochain, hors renseignement territorial.

J’en viens maintenant à votre question, monsieur le sénateur, concernant le poste d’Oissel.

La ville bénéficie, vous l’avez rappelé, d’un bureau de police, chargé de l’accueil du public et de l’enregistrement des plaintes, ouvert le mardi et le jeudi matin de neuf heures à douze heures, qui compte trois policiers. Je tiens à vous rassurer : ce bureau de police sera bien évidemment maintenu dans le cadre de la prochaine réorganisation des structures de la sécurité publique qui sera mise en place en février prochain. Il sera même renforcé par un agent supplémentaire. Il est vrai que les horaires d’ouverture que vous évoquez peuvent paraître contraints pour les habitants.

Au-delà des seuls effectifs de police dédiés à ce bureau de police, qui vont être renforcés, il va de soi que des effectifs bien plus importants assurent la sécurisation de la ville, qui relève de la circonscription de sécurité publique de Rouen et bénéficie donc de ses effectifs, voire, en cas de besoin, des renforts départementaux. Au quotidien, la sécurité d’Oissel est ainsi assurée, en particulier par une patrouille rattachée au commissariat de secteur de Saint-Étienne-du-Rouvray, qui compte seize policiers et trois adjoints de sécurité, mais aussi par des patrouilles de divers équipages de la circonscription, par exemple ceux de la BAC de Rouen, laquelle compte une cinquantaine de policiers.

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Je prends acte de l’augmentation des effectifs en Seine-Maritime – je ne peux que m’en réjouir – ainsi que de l’octroi d’un poste supplémentaire à Oissel. Toutefois, ma question portait sur les horaires et les jours d’ouverture du poste de police. Je n’ai pas obtenu de réponse.

Dans une ville comme Oissel, où les délits sont en augmentation, il est impératif d’assurer un service de proximité. Même si des effectifs peuvent venir d’Elbeuf ou de Saint-Étienne-du-Rouvray, il leur faut du temps pour arriver.

J’aimerais que l’on puisse régler cette question d’une ouverture toute la semaine de ce poste de police. Avec un effectif supplémentaire, je pense que cela doit être possible.

accueil des enfants placés dans le calvados

M. le président. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, auteur de la question n° 1568, transmise à Mme la ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes.

M. Jean-Léonce Dupont. Nous restons en Normandie. Ma question porte en effet sur l’accueil des enfants placés dans le département du Calvados.

Madame la ministre, le nombre d’enfants qui nous est confié aujourd’hui est passé à 2 250, soit 15 % de plus que la moyenne nationale. Le système est totalement saturé. La maison départementale de l’enfance et de la famille, la MDEF, ne peut plus remplir son rôle d’accueil d’urgence. Plus aucune place n’est disponible.

Aujourd’hui, 120 décisions judiciaires de placement n’ont toujours pas été exécutées, avec tous les risques de mise en jeu de la responsabilité pénale que cela implique.

Pourquoi en sommes-nous là ?

Le manque de places en institut médico-éducatif, ou IME, et en institut thérapeutique, éducatif et pédagogique, ou ITEP, oblige le département à accueillir, sans plateau technique adapté, des enfants orientés handicap. La fermeture de ces établissements les week-ends et pendant les vacances fait qu’entre 80 et 100 enfants relevant du secteur médico-social sont confiés au département par défaut.

Par ailleurs, la prise en charge des mineurs non accompagnés et des mineurs isolés étrangers est de plus en plus difficile. Au rythme de leur arrivée, il faudra réaliser l’instruction de 500 primo-demandes de mineurs non accompagnés, ou supposés tels, en 2016.

Au-delà du travail considérable d’investigation qui pèse sur la direction de l’enfance et de la famille, ces jeunes, quand ils sont reconnus mineurs – seuls 35 % le sont – et pendant la procédure d’évaluation, sont accueillis à la MDEF et dans les maisons d’enfants à caractère social. Outre leur coût – 6 millions d’euros –, ces prises en charge en constante augmentation paralysent notre dispositif de protection de l’enfance. Il apparaît pourtant évident que cette prise en charge relève de la politique migratoire, qui est de la compétence de l’État, et que les services du conseil départemental du Calvados ne sont pas équipés pour assurer une mission d’évaluation de la minorité. Pour le moins, toute la période de la phase d’investigation et d’évaluation de la minorité devrait être prise en charge par l’État et non pas seulement les cinq premiers jours.

Une batterie de mesures a été mise en place pour faire face à l’asphyxie de notre dispositif de protection de l’enfance, mais le problème reste entier et s’accroît.

Madame la ministre, qu’envisagez-vous de faire pour remédier à cette situation ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes. Comme vous le savez, monsieur le sénateur, j’ai porté la loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant, dont la genèse se situe dans cet hémicycle. Elle a en effet été élaborée à partir d’une proposition de loi déposée par Muguette Dini et Michelle Meunier.

Ce texte conforte certains aspects de la loi de 2007, tire le bilan de celles de ses dispositions qui n’ont pas été réellement appliquées et de ce qui s’est passé depuis son entrée en vigueur. Il permet notamment de faire évoluer la philosophie de la protection de l’enfance, de mieux répondre aux préoccupations des départements, dont je mesure très bien la charge financière, indépendamment de la question des mineurs non accompagnés, et de mettre en place un ensemble de dispositifs. J’invite d’ailleurs les conseils départementaux, ainsi que les juges des enfants, dans leurs relations avec l’aide sociale à l’enfance, à avoir recours par exemple au tiers de confiance, qui permet de moins placer les enfants en établissement ou en famille d’accueil et de recourir davantage à l’environnement de l’enfant.

Je les invite également à utiliser les dispositifs mis en place en faveur de la fin de la prise en charge des jeunes majeurs par l’aide sociale à l’enfance. Cette sortie devra être anticipée par les départements un an à l’avance, en concertation avec les préfets pour les jeunes majeurs d’origine étrangère, afin, par exemple, que puisse leur être délivré un titre de séjour leur permettant de travailler. De nouveaux mineurs non accompagnés entrant dans le dispositif de l’aide sociale à l’enfance, il faut également qu’il en sorte. À cet égard, les conventions qui seront signées entre les préfets et les départements, ainsi que la circulaire du 25 janvier 2016, faciliteront la sortie des jeunes du dispositif.

Enfin, la loi comporte un important volet axé sur la mobilisation pluridisciplinaire et pluri-institutionnelle de la protection de l’enfance. Ce texte, élaboré dans la concertation, a permis la création du Conseil national de la protection de l’enfance chargé d’articuler les dispositifs. Ce conseil permet souvent de réaliser des économies d’échelle importantes, sept ou huit professionnels pouvant intervenir successivement auprès d’un enfant ou d’une famille.

J’invite en outre les départements à réaliser à l’échelon départemental le même travail que celui que nous avons effectué à l’échelle nationale, en réunissant autour de la table tous les acteurs de la protection de l’enfance et de l’accompagnement des familles afin de faire évoluer les dispositifs et de rationaliser une partie de leur travail.

J’en viens à la question des mineurs non accompagnés.

La loi du 14 mars 2016 a donné une base légale à la cellule de répartition entre les départements. Aujourd'hui, cette cellule organise la péréquation, et donc la solidarité, entre les départements en ce qui concerne l’accueil des mineurs non accompagnés. Certains départements, il faut dire la vérité, étaient en effet particulièrement visés par les passeurs. Désormais, tous les départements sont appelés à prendre part à la prise en charge de ces mineurs.

Par ailleurs, nous venons de conclure avec l’Assemblée des départements de France un accord prévoyant une évolution de la participation de l’État à la prise en charge des mineurs non accompagnés, comme je l’avais d’ailleurs moi-même souhaité, afin de soutenir les départements dans cette responsabilité nouvelle.

Les mineurs de Calais sont actuellement pris en charge dans des CAOMI, ou centres d’accueil et d’orientation pour mineurs isolés. Une fois que la Grande-Bretagne aura accueilli ceux d’entre eux qu’elle souhaite accueillir, les autres mineurs seront progressivement réorientés vers le dispositif de droit commun.

Voilà comment nous travaillons avec les départements pour faire évoluer la protection de l’enfance et pour mieux répartir la prise en charge des mineurs non accompagnés entre les départements, mais aussi entre l’État et les départements.

M. le président. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont.

M. Jean-Léonce Dupont. Loin de moi l’idée que vous ne travailliez pas ou que vous n’essayiez pas de prendre des mesures, mais je voudrais que vous ayez bien conscience du fait que le système est totalement embolisé.

Aujourd'hui, ce n’est pas de concertation que nous avons besoin. Vous l’avez bien compris, la situation résulte de l’accumulation d’un certain nombre de paramètres : un nombre de décisions de justice très nettement supérieur à la moyenne dans mon département, l’orientation à tort des enfants handicapés vers nos établissements et, enfin, la problématique tout à fait spécifique des mineurs isolés étrangers.

La situation est décourageante, pour ne pas dire désespérante pour les travailleurs sociaux, qui se sentent inefficaces. À peine ont-ils réussi à trouver une solution pour un cas que dix nouveaux se présentent !

Nous ne sommes plus en état de répondre à certaines obligations, alors que la responsabilité pénale d’un certain nombre d’acteurs peut être engagée.

Madame la ministre, je vous demande vraiment d’aller plus loin que dans les dispositifs que vous avez déjà mis en œuvre, notamment pour les mineurs non accompagnés. Il faut assurer la prise en charge des mineurs au-delà des cinq jours qui sont actuellement prévus, soit jusqu’au moment où l’on sait s’ils sont effectivement mineurs ou majeurs.

Permettez-moi de vous citer un seul chiffre : en cinq ans, la dépense de mon département est passée de 1,5 million d’euros à plus de 6 millions d’euros. Et on m’annonce qu’elle s’élèvera à 7 millions d’euros l’année prochaine ! Il faut que vous ayez conscience de ces chiffres, dans le contexte budgétaire et financier, dont on dit gentiment et de manière élégante qu’il est « contraint », alors qu’il est en réalité extrêmement difficile pour la collectivité départementale ayant en charge la solidarité nationale.

élargissement de l'attribution de la carte professionnelle de guide-conférencier

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda, auteur de la question n° 1549, adressée à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Mme Gisèle Jourda. Nous sommes nombreux dans cet hémicycle à être intervenus pour défendre les guides-conférenciers, une profession qui lutte au quotidien face à la baisse de l’activité touristique et à une concurrence impitoyable. Ainsi avions-nous saisi l’occasion de la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine pour déposer des amendements ayant tous un objectif similaire : garantir aux guides-conférenciers le droit d’être les seuls à exercer leur métier.

Le Gouvernement nous ayant entendus, il a fait adopter un amendement, perfectionné au cours de la navette parlementaire, visant à affirmer dans la loi que les visites guidées dans les musées de France et les monuments historiques ne seraient assurées que par des personnes qualifiées, titulaires d’une carte professionnelle de guide-conférencier. Mieux encore, les opérateurs économiques amenés à commercialiser ce type de prestations devaient avoir recours à des personnes qualifiées, titulaires de la carte professionnelle.

Mais cela, c’était avant la réunion interministérielle au cours de laquelle a été présenté aux syndicats un projet d’arrêté pour janvier 2017 révisant les conditions d’obtention de la carte de guide-conférencier. Alors que nous nous sommes battus pour protéger les guides-conférenciers de la concurrence extérieure, c’est désormais de l’intérieur que vient le péril ! Cet arrêté prévoit en effet l’élargissement de l’attribution de la carte professionnelle à tout titulaire d’un diplôme conférant le grade de master, ayant validé trois unités d’enseignement ou justifiant au minimum d’une expérience professionnelle d’un an cumulé au cours des cinq dernières années dans la médiation orale des patrimoines.

Quel gâchis ! Quel dommage ! Ce nivellement par le bas provoquera l’affaiblissement, voire la disqualification de cette profession qualifiée.

Ma question est donc la suivante : quelles garanties pouvez-vous apporter aux guides-conférenciers que la volonté affichée par la Direction générale des entreprises d’ouvrir cette profession ne se traduira pas par sa disparition ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication, qui, n’ayant pu être présente ce matin, m’a chargée de vous répondre.

Le projet d’arrêté visant à élargir l’accès à la carte de guide-conférencier a provoqué de nombreuses inquiétudes chez les professionnels du secteur lors de sa première présentation au mois de septembre dernier. Il a fait l’objet de différents échanges entre le ministère de la culture et de la communication, le ministère des affaires étrangères, le ministère de l’économie et des finances et le ministère de l’enseignement supérieur. Le projet d’arrêté a, depuis lors, été substantiellement amélioré.

Le premier projet d’arrêté avait inquiété les professionnels, car il ouvrait l’accès à la carte à l’ensemble des diplômés de licence justifiant d’une expérience professionnelle d’un an cumulé au cours des dix années précédentes dans la médiation orale des patrimoines. Cette ouverture était trop large et comportait un risque pour la qualité des visites proposées.

Le nouveau projet d’arrêté a supprimé cette disposition et a remonté le niveau minimum de qualification pour cette troisième voie d’accès à la carte de guide-conférencier. Celle-ci sera ouverte aux titulaires d’un diplôme conférant le grade de master, et non de licence, et justifiant d’une expérience d’un an cumulé au cours des cinq dernières années dans la médiation orale des patrimoines. En outre, la notion de « médiation orale des patrimoines » est désormais explicitée, puisqu’elle est définie en référence aux compétences exigées pour les guides-conférenciers en annexe du même arrêté.

Le projet d’arrêté a été présenté aux organisations professionnelles le 7 novembre. Elles ont constaté que le texte avait été amélioré. Afin de répondre aux attentes des professionnels et de s’assurer que les candidats à la carte professionnelle par cette troisième voie seront traités avec équité sur l’ensemble du territoire, une circulaire et des outils de cadrage seront élaborés avec la Direction générale des entreprises du ministère de l’économie et des finances. Cette troisième voie sera explicitée et l’expérience professionnelle requise dans la médiation orale des patrimoines sera précisée.

Ce projet d’arrêté garantit donc la qualification des guides-conférenciers, tout en ouvrant une voie à des personnes dotées à la fois d’une solide formation initiale et d’une expérience professionnelle avérée. Il s’inscrit également dans le cadre de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, dont l’article 109 a clarifié le cadre du recours aux guides-conférenciers, garants de la qualité et de l’intelligibilité des visites.

Dans ces conditions, cette nouvelle voie d’accès ne constituera aucunement une menace pour les formations qualifiantes de guide-conférencier existantes. Elle permettra de revivifier les territoires en manque de guides-conférenciers et de diversifier les thèmes de visites dans toute la France.

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda.

Mme Gisèle Jourda. Je prends acte des évolutions qui ont fait suite aux inquiétudes exprimées par les guides-conférenciers, une profession à laquelle nous tenons.

Néanmoins, cette troisième voie doit être regardée avec vigilance, car, eu égard aux difficultés qui pèsent sur elles, certaines collectivités territoriales qui comptent dans leur patrimoine des monuments historiques importants pourraient être tentées par la facilité. Il ne faudrait pas que cette troisième voie permette une concurrence déloyale. Ces jeunes ont suivi des études d’un haut niveau dans les filières historiques, culturelles ou architecturales et n’ont pour débouché exclusif que les visites guidées. Or, je le répète, ils ne doivent pas être concurrencés par des jeunes dont le bagage scientifique ne serait pas à la hauteur des monuments visités.

conséquences de l'allongement de la durée de validité des cartes nationales d'identité

M. le président. La parole est à M. Richard Yung, en remplacement de M. Jean-Yves Leconte – bloqué par Uber –, auteur de la question n° 1560, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

M. Richard Yung, en remplacement de M. Jean-Yves Leconte. J’ai cru comprendre que c’était non pas par Uber, mais par les autocars.

M. le président. C’est plus grave, parce que, à l’origine de ça, c’est un ministre !

M. Richard Yung. La question de M. Leconte porte sur l’allongement de la durée de validité des cartes nationales d’identité.

Aucune mention n’ayant été portée sur les cartes elles-mêmes, cet allongement pose un véritable problème de reconnaissance de ces titres dans certains États. Ainsi le gouvernement belge a-t-il récemment signifié qu’il ne reconnaissait plus l’allongement de dix à quinze ans – décidé en 2013 et entrée en vigueur le 1er janvier 2014 – du délai de validité des cartes d’identité françaises des personnes majeures.

Prise au titre de la « simplification », cette mesure, qui a établi un décalage entre les validités réelle et faciale d’une carte nationale d’identité, est en réalité une simple mesure d’économie budgétaire. Elle entraîne des difficultés ou des blocages pour de nombreux Français lors du passage à la frontière, de contrôles d’identité, de l’enregistrement dans les hôtels ou auprès des compagnies aériennes, ou lors de démarches administratives dans un pays de l’Union européenne.

Après la décision de la Belgique, les autorités françaises ne peuvent plus prétendre que l’ensemble de nos partenaires reconnaît systématiquement cet allongement. Cette décision n’est pas une surprise et confirme les difficultés que nous connaissons.

La mesure touche l’ensemble des Français ne disposant pas d’un passeport. En outre, le fait que les autorités françaises refusent, sauf en cas de perte ou de vol, le renouvellement d’une carte d’apparence périmée constitue une atteinte à la liberté de circulation au sein de l’Union européenne.

Madame la ministre, pourriez-vous nous indiquer le nombre de cartes nationales d’identité actuellement en circulation non reconnues par des États étrangers, en particulier par les autorités belges ? En effet, ce qui est inscrit sur ces cartes nationales d’identité conduit à les considérer comme périmées.

Par ailleurs, quel est le risque que cette décision conduise d’autres pays à adopter la même position ?

Enfin, une campagne de sensibilisation sera-t-elle menée auprès des Français se rendant en Belgique afin de leur éviter de s’y trouver en situation irrégulière ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes. Monsieur le sénateur Richard Yung, je vais répondre en lieu et place du ministre de l’intérieur à la question que vous avez posée en lieu et place du sénateur Jean-Yves Leconte. (Sourires.)

Le décret n° 2013-1188 du 18 décembre 2013 relatif à la durée de validité et aux conditions de délivrance et de renouvellement de la carte nationale d’identité, entré en vigueur le 1er janvier 2014, a étendu la durée de validité des CNI sécurisées de dix à quinze ans. Cette mesure est applicable aux cartes nationales d’identité sécurisées délivrées à des personnes majeures et en cours de validité au 1er janvier 2014, c’est-à-dire délivrées entre le 2 janvier 2004 et le 31 décembre 2013.

Cette mesure a conduit à réduire d’environ 30 % le nombre de renouvellements de cartes nationales d’identité : 7 millions de personnes sont actuellement titulaires d’une CNI prorogée et l’on estime qu’environ la moitié dispose par ailleurs d’un passeport valide.

Les autorités des pays qui acceptent à leurs frontières une CNI sécurisée ont été informées de la nouvelle réglementation.

En outre, l’annexe de l’accord européen du 13 décembre 1957 sur le régime de la circulation des personnes entre les pays membres du Conseil de l’Europe a été modifiée pour prendre en compte les cartes d’identité prorogées. Aucune objection n’ayant été formulée, les pays ayant ratifié cet accord sont donc juridiquement tenus de les accepter. Ces démarches, tant juridiques que diplomatiques, ont permis de réduire de manière significative les incidents signalés.

Toutefois, des difficultés persistent pour les usagers titulaires de cartes nationales d’identité facialement périmées qui souhaitent se rendre dans un pays autorisant la carte nationale d’identité comme titre de voyage. Ainsi en est-il, en effet, de la Belgique ou encore de la Norvège. Ces deux pays ont récemment fait part de manière explicite de leur refus d’accepter les CNI facialement périmées.

Aussi deux séries de mesures complémentaires ont-elles été mises en place.

Tout d’abord, le ministère de l’intérieur travaille étroitement avec le ministère des affaires étrangères pour que la rubrique « conseils aux voyageurs », régulièrement mise à jour, précise, pays par pays, si une carte nationale d’identité dont la date de validité est en apparence dépassée est utilisable pour entrer dans le pays. Les personnes qui souhaitent voyager sont donc invitées à vérifier sur le site du ministère des affaires étrangères les conditions d’entrée et de séjour dans le pays choisi.

Ensuite, les usagers qui souhaitent se rendre dans un pays pour lequel aucun refus formel de la part des autorités n’a été signalé peuvent télécharger un document, traduit en plusieurs langues, attestant de la prolongation de la validité de leur carte nationale d’identité.

En toute hypothèse, ils ont la possibilité de se munir de leur passeport. De manière générale, le site du ministère des affaires étrangères recommande de privilégier l’utilisation d’un passeport valide, qui constitue le titre de voyage de droit commun.

Outre ces mesures visant à mieux informer les personnes appelées à se déplacer à l’étranger, des instructions ont récemment été délivrées aux préfectures pour autoriser le renouvellement des cartes prorogées. Deux conditions ont été posées : l’usager ne doit pas être déjà titulaire d’un passeport valide et il doit justifier de son intention de voyager à l’étranger dans un pays acceptant la carte nationale d’identité comme document de voyage.

Des instructions similaires ont été adressées par le ministère des affaires étrangères aux postes consulaires des pays concernés – pays membres de l’Union européenne essentiellement – pour assouplir les conditions de renouvellement des CNI facialement périmées.

Ces instructions doivent permettre de concilier les effets attendus de la réforme sans créer de contraintes nouvelles pour les usagers désireux de voyager ou séjourner à l’étranger munis de leur seule carte d’identité.

M. le président. La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Je vous remercie de ces précisions, madame la ministre. Cela étant, se présenter à une frontière avec le document téléchargé à partir du site du ministère de l’intérieur et qui atteste la prorogation de la carte d’identité ne suffit pas toujours. Le responsable de la police aux frontières peut parfaitement dénier à ce document toute valeur, dire que la carte d’identité est facialement périmée et vous obliger à faire demi-tour. Un certain nombre de personnes se sont ainsi retrouvées dans des situations délicates.

J’ai noté votre propos sur les instructions données aux préfectures. J’espère qu’elles seront suivies d’effet. J’ai moi-même fait l’expérience du contraire, puisque la prorogation de ma carte d’identité – facialement périmée, mais en réalité juridiquement valable – m’a été refusée par la préfecture d’Indre-et-Loire. Heureusement, je possède un passeport, qui me permet de voyager. Mais un certain nombre de personnes qui ne se connectent pas au site dédié aux voyages à l’étranger continuent de rencontrer des problèmes. Cette mesure est donc inadaptée.

M. le président. Pour compléter votre propos, mon cher collègue, je souligne que notre carte d’identité de parlementaire – en ce qui me concerne, je l’ai depuis très longtemps (Sourires.) – nous permettait à Orly d’embarquer. Aujourd’hui, seule la carte nationale d’identité est valable. C’est quand même un comble quand on sait les efforts qu’il faut déployer pour siéger dans cette Haute Assemblée !

couverture numérique du territoire en très haut débit

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, auteur de la question n° 1522, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation.

M. Daniel Gremillet. Lors de l’examen en séance publique au Sénat du volet « investissement » du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, l’amendement déposé par le groupe Les Républicains visant à permettre, avant la fin de 2017, la résorption des zones grises et blanches sur le territoire national avait été retiré au profit d’un amendement présenté par le Gouvernement.

Lors de cette discussion, le Gouvernement avait expliqué que son premier objectif était de couvrir tous les territoires en 2G d’ici au 31 décembre 2016 et en 3G d’ici à la fin du premier semestre de 2017. Au travers de cet amendement, l’engagement avait été pris, d’une part, de définir les projets de convention qui devaient être finalisés dans les deux mois et, d’autre part, de mettre en place un mécanisme permettant à l’ARCEP, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, de sanctionner les opérateurs qui ne respecteraient pas leurs engagements.

Lors de la séance de questions d’actualité au Gouvernement qui a suivi ce débat, l’engagement en faveur des zones blanches « imparfaitement mesurées » a été renouvelé, un cofinancement de l’État et des collectivités territoriales et le bénéfice du Fonds national pour la société numérique ayant été annoncés.

Pour remédier à cette situation, le 24 avril 2015, les patrons des quatre grands opérateurs de télécommunications français ont été reçus pour faire le point sur la couverture du territoire en très haut débit. Les présidents d’Orange, du groupe Bouygues, de Bouygues Telecom et de SFR-Numericable se sont entretenus à Bercy pour faire le point sur le plan France très haut débit. Celui-ci vise à une couverture intégrale du territoire d’ici à 2022, 20 milliards d’euros d’investissements répartis entre acteurs privés et collectivités territoriales étant prévus. Or, un an après cette réunion, les acteurs économiques et les citoyens des territoires ruraux sont encore dans l’incertitude et rencontrent au quotidien des difficultés de connexion, de débit, de coûts exorbitants d’accès.

Aussi, dans un contexte de tension sur les finances des collectivités et de rupture numérique dans les territoires, je souhaite connaître la position du Gouvernement s’agissant de l’investissement des collectivités territoriales dans le développement du très haut débit. En effet, dans le contexte actuel de diminution des dotations de l’État, il est inquiétant que revienne encore aux collectivités territoriales la charge d’investir dans le développement du très haut débit. En fait, madame la secrétaire d’État, la solidarité est inversée puisque ce sont les territoires les plus exposés et les plus pauvres qui doivent financer ces investissements.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation. Je vous remercie d’avoir posé cette question, monsieur le sénateur, qui me permet de faire un point sur l’état d’avancement de la couverture de nos territoires en très haut débit et en mobile.

En 2012, le Président de la République a lancé le plan France très haut débit. Son niveau d’investissement est sans précédent : 3,3 milliards d'euros proviennent exclusivement de l’État, autant des collectivités locales et plus de 10 milliards d'euros des opérateurs privés. L’investissement global représente environ 20 milliards d'euros. Ce ne sont que des chiffres, me direz-vous ! Certes, mais, à titre de comparaison, sachez que le Royaume-Uni n’investit que 500 millions d'euros. C’est vous dire l’ambition de ce plan qui doit faire de la France le pays le mieux connecté d’Europe à l’horizon de 2021.

Je vous entends dire : « Il y a urgence, c’est là que le bât blesse ! » Je suis consciente de cette urgence, dont me font part de nombreux élus locaux de communes rurales. Nous avons accéléré le plan France très haut débit : l’objectif de 50 % de la couverture d’ici à la fin de 2017 sera atteint à la fin de cette année.

Cela ne va pas assez vite, entends-je également. Nous avons pris toutes les mesures réglementaires, législatives et financières possibles pour accélérer la mise en œuvre de ce plan. La France sera connectée. Le déploiement de la fibre progresse.

Ce plan public finance uniquement le déploiement dans les zones rurales. La France se distingue par le choix qu’elle a fait de couvrir ses zones rurales, les zones urbaines étant laissées à la concurrence entre opérateurs privés.

La couverture mobile, c’est une autre histoire. En effet, rien n’avait été fait jusqu’à notre arrivée en 2012. Tous les efforts portaient sur le fixe. Il a fallu réorienter les politiques publiques.

L’urgence absolue était de supprimer les zones blanches, celles qui, même dans les centres-bourgs, ne sont couvertes par aucun opérateur ni aucun équipement. Cela sera fait d’ici à la fin de l’année prochaine.

Nous avons renouvelé les conventions de mutualisation à signer entre opérateurs. Nous avons donné à l’ARCEP, le régulateur des télécommunications, un pouvoir de sanction si ces conventions ne sont pas signées.

La semaine dernière, j’ai lancé le plan France Mobile, qui intègre enfin la partie mobile dans le plan France très haut débit. Il se fonde sur le principe que les élus locaux, qui sont le mieux à même d’identifier les besoins sur leur territoire, expliqueront aux préfets, aux opérateurs, à l’Agence du numérique et à l’ARCEP quelles sont en priorité les zones qu’il faut couvrir parmi les zones grises.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet.

M. Daniel Gremillet. D’un point de vue économique, les territoires ruraux vivent une situation de rupture numérique et sont en train de décrocher. Les chefs d’entreprises artisanales, commerciales, les dirigeants de PME ou de TPE, par exemple, pour répondre aux appels d’offres doivent utiliser des procédures entièrement dématérialisées. Par conséquent, pour continuer d’exercer leur activité, ils délocalisent.

Le pire exemple a été donné en 2016, lorsque le ministère de l’agriculture a rendu obligatoire la déclaration PAC par internet. Dans le texte qu’il a adressé aux agriculteurs à ce sujet, le ministre les enjoignait, s’ils ne disposaient pas de connexion à internet, à aller voir la Direction départementale des territoires pour faire leur déclaration. Le monde paysan se sent totalement rejeté !

Ce sont des réalités que nous vivons au quotidien dans nos territoires.

Obéissant à la loi du marché et profitant du peu d’exigence de l’État, les opérateurs ont, de façon logique, privilégié les zones denses, rentables, ce que vous venez d’expliquer à l’instant, madame la secrétaire d'État, au détriment des zones intermédiaires, dans lesquelles il n’y a eu que des intentions d’investissement.

Pour pallier ces difficultés, les collectivités investissent. Le département des Vosges, par exemple, s’apprête à investir près de 20 millions d'euros. La grande région accompagne les départements à hauteur de 1 milliard d’euros. Bien sûr, l’ARCEP et l’État vont participer à ce financement, mais ce sont bien les collectivités locales, les contribuables locaux qui, là encore, doivent financer ce désengagement en termes de mutualisation dans nos territoires.

Le numérique raccourcit le temps. Quel jeune couple va s’installer, construire dans une zone où il n’y a pas d’accès au numérique ? Quel jeune entrepreneur, quelle entreprise va investir dans une zone où il n’y a pas de couverture ?

Effectivement, 2022, c’est dans six ans, mais le tissu des territoires les plus reculés peut-il encore attendre ? L’absence de couverture numérique s’apparente à un véritable trou noir pour nos territoires !

rémunération de l'innovation

M. le président. La parole est à M. Richard Yung, auteur de la question n° 1554, adressée à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'industrie.

M. Richard Yung. L’institut des ingénieurs électriciens et électroniciens des États-Unis, l’IEEE, est une association professionnelle puissante, qui joue un rôle majeur dans l’établissement des normes internationales dans le domaine des télécommunications. Cette association a récemment modifié ses règles de fonctionnement dans un sens favorable aux grandes entreprises américaines. On pense en particulier aux GAFA, dont l’objectif est de réduire les royalties – les redevances, en français – que doivent payer ces entreprises aux titulaires de brevets. Ces règles ont été approuvées par le département de la justice des États-Unis.

Même si les règles édictées par cette association, qu’on pourrait rapprocher de l’AFNOR, l’Association française de normalisation, sont dépourvues de valeur législative, elles désavantagent, comme vous pouvez facilement l’imaginer, les petites et moyennes entreprises d’une façon générale et font peser un risque lourd sur les entreprises innovantes françaises en particulier. On pense que le niveau moyen de redevance pourrait passer, dans le cas de figure qui est envisagé, de 15 % à 4 %, soit une baisse de plus de 10 points.

Au mois d’avril dernier, le Gouvernement m’avait indiqué « veiller à prévenir l’introduction de telles règles au sein des organismes de normalisation auprès desquelles la France dispose d’un siège ». Il m’avait également affirmé avoir proposé à la Commission européenne d’introduire des « dispositions permettant de garantir l’effectivité des droits des détenteurs de brevets ». Un Conseil « Industrie » s’est d'ailleurs, semble-t-il, réuni à ce sujet. Enfin, le Gouvernement avait annoncé avoir appelé l’attention de la Commission européenne sur le fait que « ces nouvelles règles pourraient constituer des violations de certains accords de l’Organisation mondiale du commerce ».

Sept mois plus tard, madame la secrétaire d'État, je souhaite savoir le premier bilan que vous tirez de ces initiatives prises pour prévenir la « contagion » des règles américaines et garantir une rémunération équitable de l’innovation.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation. Je vous remercie, monsieur le sénateur, d’avoir posé cette question. Elle est importante, et vous avez raison de suivre étroitement ce dossier.

Les normes et standards contribuent à structurer le marché et permettent l’interopérabilité entre les produits et les solutions techniques, en définissant des spécifications communes. À l’heure de l’internet des objets, la normalisation et la standardisation seront de plus en plus importantes.

Pour les acteurs privés à l’origine des développements technologiques, la contribution collective à la normalisation améliore le retour sur les investissements consentis, grâce à une diffusion plus large de l’innovation. En contrepartie, afin de prévenir le risque d’abus des droits attachés aux brevets essentiels à la mise en œuvre des normes, les BEN, les organismes de normalisation exigent de leurs détenteurs un engagement à concéder des licences d’exploitation à des conditions équitables, raisonnables et non discriminatoires.

Ce principe, dit FRAND pour fair, reasonable and non-discriminatory, propose un équilibre permettant aux contributeurs aux travaux de standardisation de bénéficier d’une fraction juste et raisonnable des profits réalisés en aval par les utilisateurs de la norme. Sa pleine application suppose néanmoins que les détenteurs de BEN puissent exercer réellement leurs droits, en particulier celui de demander une injonction, y compris à titre conservatoire, pour interdire la vente de produits contrefaits. Or les nouvelles règles adoptées par l’IEEE non seulement prévoient un mode de calcul des redevances particulièrement défavorable aux détenteurs de BEN, mais remettent également en cause l’exercice de leur pouvoir d’injonction.

Par leur portée mondiale, ces règles portent préjudice à l’industrie européenne des télécommunications, dont le modèle économique est structuré justement par la normalisation. Elles risquent de pénaliser, en priorité, les petites et moyennes entreprises. Elles vont aussi à l’encontre du projet européen de marché unique numérique, car elles favorisent le développement d’écosystèmes propriétaires, c’est-à-dire fermés, nuisant, à terme, au consommateur, qui est obligé de prendre lui-même en charge le coût des interactions.

Le Gouvernement est totalement conscient de l’importance du sujet. Nous veillons à prévenir l’introduction de telles règles au sein des organismes de normalisation dans lesquels la France dispose d’un siège, notamment l’ETSI, l’European Telecommunications Standards Institute, et l’UIT-T, l’Union internationale des télécommunications.

La position française a été communiquée officiellement à la Commission européenne. Nous proposons l’introduction dans le droit européen de dispositions permettant de garantir l’effectivité des droits des détenteurs de BEN, en particulier à l’occasion de la révision de la directive relative au respect des droits de propriété intellectuelle qui a été annoncée pour l’année prochaine.

La Commission européenne a pris acte des positions exprimées par la France. Elle a rappelé, dans sa stratégie pour le marché unique numérique, l’importance d’une politique de propriété intellectuelle pour les BEN qui soit fondée sur une relation équilibrée. Dans le cadre de sa communication récente sur le passage au numérique des entreprises, elle insiste sur l’importance de ces BEN dans le contexte de l’internet des objets ou de la future norme 5G. Elle a ainsi annoncé le lancement d’une concertation sur le sujet avec toutes les parties prenantes concernées.

L’organisme CEN/CENELEC, l’un des principaux organismes européens de standardisation des technologies électroniques avec l’ETSI, a pris position, en septembre 2016, sur la question des BEN, dans le cadre de la concertation lancée par la Commission européenne. Il s’est déclaré opposé à toute initiative visant à introduire un mode de calcul pour la valorisation ou la fixation de prix pour les licences FRAND et a souligné le risque de telles pratiques.

Je vous remercie une fois encore d’avoir posé cette question, dont je m’entretiendrai avec mes homologues européens et avec la Commission européenne. Je lancerai une mission sur la propriété intellectuelle dans le monde du numérique, qui pourrait inclure ce volet. J’en parlerai au président de l’ARCEP, le gendarme des télécoms français, qui présidera, à compter de l’année prochaine, l’organisme européen qui réunit tous les régulateurs.

M. le président. La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Je vous remercie de vos explications, madame la secrétaire d’État. Je me félicite de la position forte que le Gouvernement français entend adopter sur ce dossier.

La dimension européenne est sans doute la bonne, puisqu’elle nous donne le poids suffisant pour résister aux tentatives américaines d’imposer un nouveau modèle qui ne vise, en fait, qu’à favoriser leurs grandes entreprises.

Nous sommes tout à fait prêts à vous suivre sur ce qui nous apparaît comme la bonne voie.

réforme du code minier

M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner, auteur de la question n° 1520, adressée à M. le ministre de l'économie et des finances.

M. Daniel Reiner. Initiée dès 2011, annoncée en 2012 par le Premier ministre, qui avait alors lancé une mission de préfiguration, la réforme du code minier semble aujourd’hui « en panne », alors même que chacun s’accorde à dire qu’elle est absolument nécessaire. Ainsi, les élus appellent à une meilleure répartition des redevances minières, les associations de préservation de l’environnement à une mise en conformité avec la charte de l’environnement et les industriels à des procédures simplifiées et plus rapides.

Pourtant, à la suite du rapport de la mission de préfiguration, en décembre 2013, le Gouvernement avait transmis un premier avant-projet de loi à l’ensemble des acteurs, suivi d’un second qui reprenait certaines de leurs propositions. Mais c’était il y a plus d’un an, en juin 2015. Depuis lors, où en est-on ?

Dans l’attente de cette réforme, les projets stagnent et les industriels s’inquiètent. Pour mener à bien un dossier d’extraction, il est nécessaire d’avoir une lisibilité sur plusieurs années, parfois même des dizaines d’années. Cette attente n’est pas non plus un signe positif envoyé aux associations de protection de l’environnement, alors que Paris a accueilli la 21conférence internationale sur le climat, en décembre 2015. En résumé, on pourrait dire que les industriels doutent, les élus patientent et les associations désespèrent.

Il est bien dommage que le rapport Tuot, qui faisait de nombreuses propositions comme l’établissement d’un schéma national des mines, le groupement momentané d’intérêt, la création d’un haut conseil des mines ou la répartition des redevances minières avec les collectivités territoriales, ne donne lieu à aucune avancée concrète de la part du Gouvernement.

Il est bien dommage également que la mobilisation constructive de l’ensemble des acteurs de la filière minière se heurte à ce qui pourrait s’apparenter à de la mauvaise volonté.

Il serait dommage enfin de donner à penser que les mines sont un vestige du passé glorieux de notre ère industrielle – n’est-ce pas, monsieur Abate ? –,…

M. Patrick Abate. Tout à fait !

M. Daniel Reiner. … alors même que de nombreux projets d’extraction pourraient voir le jour.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, je souhaiterais connaître les intentions du Gouvernement sur ce dossier.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation. Monsieur le sénateur, mon collègue Christophe Sirugue m’a chargée de vous répondre en son nom.

La réforme du code minier est bien un objectif du Gouvernement. L’actualité particulière dont la France a été victime et l’intense programme législatif l’ont cependant conduit à revoir ses priorités et ne lui ont pas permis de porter au Parlement le projet de loi préparé à la suite des travaux du groupe réuni sous la présidence de Thierry Tuot, dont vous avez fait mention.

Toutefois, pour répondre aux attentes que vous relayez, il a été convenu, en accord avec M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale, que les principales innovations que comportait le projet de loi soient reprises sous forme de proposition de loi, de façon à ce qu’elles puissent être examinées et débattues avant la fin de la mandature.

Une telle proposition de loi a été déposée le 23 novembre 2016 par plusieurs députés, auxquels se sont associés les membres du groupe socialiste, écologiste et apparentés. Elle reprend notamment le principe d’une évaluation environnementale de type « stratégique » pour les titres miniers, le recours possible à une procédure renforcée d’information et de concertation, la création d’un haut conseil des mines et l’élaboration d’une politique nationale des ressources et des usages miniers.

L’examen de cette proposition de loi est programmé à l’Assemblée nationale, en séance plénière, les 24 et 25 janvier prochain. Ce calendrier devrait permettre sa transmission au Sénat début février, ce qui vous donnera alors la possibilité d’en débattre. Ainsi les importants travaux conduits par le Gouvernement afin de réformer le code minier pourront-ils être poursuivis au-delà de la fin de l’actuelle mandature.

M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner.

M. Daniel Reiner. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État.

Depuis le dépôt de ma question, il est vrai que le dossier a progressé, ce dont je me réjouis. Le groupe de travail créé à l’Assemblée nationale sur l’initiative de Jean-Paul Chanteguet a déposé à la fin du mois de novembre une proposition de loi, qui sera étudiée par la commission du développement durable à la mi-janvier. Vous m’annoncez qu’elle sera inscrite à l’ordre du jour à la fin du même mois. Cette proposition de loi reprend plusieurs propositions intéressantes qui figuraient dans ce rapport.

Je regrette, je le répète, que cette réforme ait été si lente à voir le jour. Alors qu’elle a été initiée en 2011, je crains qu’elle n’aboutisse pas avant la fin de cette mandature, même si j’accepte l’augure que tel pourrait être le cas. Pourtant, il existait un consensus entre les différents acteurs et un énorme travail d’association et de concertation avec l’ensemble des personnes concernées a été réalisé.

Il me semble bien dommage d’associer la société civile à une réflexion aussi longue et de tant tarder à prendre des décisions. Encore une fois, j’accepte toutefois l’augure que nous aboutissions avant la fin de cette mandature.

accord transfrontalier entre la france et le luxembourg en matière de fiscalité

M. le président. La parole est à M. Patrick Abate, auteur de la question n° 1536, transmise à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Patrick Abate. La France a conclu des accords fiscaux et financiers avec quasiment tous les pays limitrophes qui accueillent des travailleurs français. Cependant, le Luxembourg et la France n’ont toujours pas ratifié d’accord, si ce n’est, il y a près de soixante ans, en 1958. Pourtant, en matière de relations avec les pays frontaliers, le Luxembourg en particulier, les choses ont incontestablement évolué. D’insignifiant en 1958, le nombre de travailleurs frontaliers est passé à 90 000 aujourd’hui. Il pourrait s’élever à 130 000 d’ici à cinq ans selon l’institut de la Grande Région.

Le volet fiscal de notre coopération avec le Luxembourg doit évoluer. Les progrès à effectuer en la matière sont de taille et doivent s’inscrire dans une logique européenne et dans le développement d’un espace transfrontalier, d’une agglomération transfrontalière, que dessinent déjà, côté français, l’établissement public d’aménagement Alzette-Belval, qui s’inscrit dans le cadre d’une opération d’intérêt national, et, côté luxembourgeois, le grand projet Esch-Belval.

Ces développements, pour lesquels nos deux pays ont montré leur intérêt, ne seront pérennes et mutuellement efficaces qu’à la condition d’une plus équitable répartition des charges et des ressources des deux côtés de la frontière, et cela dans une volonté gagnant-gagnant.

Cela passe par la mise en place de mesures de compensation en matière fiscale. Des exemples existent et ont prouvé leur efficacité. Faut-il rappeler l’intérêt de l’accord ratifié entre la France et le canton de Genève signé en 1973, alors même que ce territoire ne se situe pas dans l’Union européenne ? Cet accord se traduit, dans les faits, par le reversement aux départements de l’Ain et de la Savoie de 3,5 % de la masse salariale des travailleurs frontaliers français.

Cette manne financière non négligeable permet surtout aux communes limitrophes de développer des projets qui bénéficient à tous. Il en est ainsi du développement de l’agglomération mixte du Grand Genève. Il s’agit donc bien d’une démarche gagnant-gagnant. Cela contribue, des deux côtés de la frontière, à un accroissement de l’attrait des territoires concernés.

J’ai interpellé, en avril dernier, M. Harlem Désir, secrétaire d’État chargé des affaires européennes, par le biais d’un courrier et d’une question écrite, puis M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics. Je demandais l’inscription à l’ordre du jour de la CIG de cette question. Je n’ai reçu une réponse que le 24 novembre, soit trois jours après le déroulement de cette réunion entre la France et le Luxembourg. La question aurait bien été abordée par M. Harlem Désir, mais en marge de cette réunion du 21 novembre. En tout cas, elle n’a pas été inscrite à l’ordre du jour, le gouvernement luxembourgeois ayant opposé une fin de non-recevoir…

Dans ces conditions, comment le gouvernement français entend-il maintenant faire avancer ce dossier et le présenter comme mutuellement avantageux – je le répète, gagnant-gagnant – à nos amis luxembourgeois, afin de les convaincre de l’intérêt d’entrer dans la discussion ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation. La coopération entre la France et le Luxembourg en matière de fiscalité est matérialisée par la convention fiscale de 1958, qui vise à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative réciproque. Cette convention ne prévoit effectivement pas de clause spécifique concernant les travailleurs frontaliers, contrairement aux accords que nous avons conclus avec l’Allemagne, la Belgique ou la Suisse. Des compensations financières à la charge de la France sont alors prévues.

Le Luxembourg est le seul pays frontalier avec la France et recevant des flux significatifs de travailleurs frontaliers qui ne soit pas lié à notre pays par un accord bilatéral instaurant un mécanisme de partage des recettes fiscales liées directement à ces flux.

Vous l’aurez compris, monsieur le sénateur, ce n’est pas une mauvaise volonté de la part du gouvernement français. Le Luxembourg n’a en effet mis en place ce type de régime qu’avec un seul de ses voisins. Il n’existe pas de volonté du côté luxembourgeois d’avancer sur la piste d’une renégociation de l’accord fiscal bilatéral qui lie nos deux pays.

Voilà pourquoi, tout en portant régulièrement ce sujet lors des commissions intergouvernementales franco-luxembourgeoises pour le renforcement de la coopération transfrontalière – comme cela a été le cas lors de la dernière CIG –, le gouvernement français développe une approche, que vous avez d’ailleurs décrite, qui doit permettre le cofinancement par le Luxembourg de projets réalisés sur notre territoire. Cette approche a porté ses fruits – peut-être pourriez-vous mettre en avant ces réussites ? –, par exemple avec le financement de la ligne à grande vitesse Grand Est, le contournement de Villerupt, des projets portant sur l’autoroute A 31 bis ou la création de parkings relais – aussi dénommés park and ride – dans les villes frontalières françaises.

C’est cette approche pragmatique de négociation projet par projet avec nos partenaires luxembourgeois qui l’emporte dans les circonstances actuelles.

M. le président. La parole est à M. Patrick Abate.

M. Patrick Abate. Pour une bonne part, le Gouvernement cerne les enjeux de la même manière que nous. La problématique étant posée correctement, nous avons une chance d’aboutir à la résolution du problème.

Cependant, pour une autre part, l’enjeu n’est pas nécessairement celui que vous avez mis en avant, madame la secrétaire d’État. Vous avez cité des financements communs pour des projets comme l’A 31 bis, les parkings relais, la ligne à grande vitesse Grand Est ou le contournement de Villerupt. On pourrait ajouter à la liste le rétablissement de postes-frontières destinés non pas à bloquer les voitures, mais à opérer des contrôles sur l’initiative exclusive du gouvernement luxembourgeois. L’enjeu, c’est le fait que les frontaliers, qui sont formés en France, qui y font garder leurs enfants, qui utilisent de manière importante les services publics, créent une richesse au Luxembourg qui ne profite pas, en tout cas pour partie, à notre territoire. Pourtant, entre le Luxembourg et la Belgique, cela ne pose pas de problème, y compris en termes de compétitivité pour les travailleurs belges.

Pour convaincre nos amis luxembourgeois, il faut leur dire que, sans cette équité, les grands projets transfrontaliers ne seront pas pérennes. Proposons qu’un organisme indépendant – par exemple, la Caisse des dépôts et consignations, qui sait porter des projets de nature européenne – récupère cette manne financière et garantisse le financement de projets mutuels. En effet, ne confortons pas l’idée que nos amis luxembourgeois peuvent avoir qu’ils donnent déjà pas mal – ce qui est vrai : ils participent au financement d’infrastructures – et que nous ne serions que des pique-assiettes.

Nous devons donc imaginer une procédure permettant que les fonds, équitablement répartis, servent une démarche qui soit gagnant-gagnant, par exemple dans le cadre d’une grande agglomération transfrontalière, comme ce qui se fait pour le Grand Genève. Ces pistes de travail ne sont pas assez mises en avant. Nous avons trop tendance à nous contenter de ce que répondent les Luxembourgeois, à savoir qu’ils participent aux infrastructures. Or la France aussi participe aux infrastructures !

J’espère que le Gouvernement prendra en compte rapidement ce type de démarche gagnant-gagnant. Les habitants de mon département le ressentent comme une urgence.

dégradation du service de la poste

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, auteur de la question n° 1547, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.

Mme Marie-France Beaufils. En Indre-et-Loire, la liste des bureaux de poste de plein exercice qui disparaissent les uns après les autres est longue. Dans nos villages, il n’en reste plus guère. Aujourd’hui, les villes ne sont plus épargnées : c’est le cas dans quatre quartiers de Tours. Le conseil municipal a voté hier soir, à l’unanimité, un vœu contre ces suppressions.

Les 17 000 points de contact, ce n’est plus La Poste, puisque seuls 9 000 sont en gestion propre. Les employés sont de moins en moins des postiers, car on recourt de plus en plus aux personnes qui travaillent dans les maisons de service au public. Finalement, les fonctionnaires ne représentent plus que 45 % des effectifs.

Les usagers n’acceptent pas ces choix. La mobilisation contre les fermetures est forte. Devant le Sénat, le 8 décembre dernier, plusieurs centaines de manifestants sont venus dire non seulement leur colère, mais aussi leurs propositions. De tels désaccords sont exprimés dans toute la France, comme hier à Tours, à Montlouis ou à Vouvray.

Quant aux salariés, ils sont excédés : 21 000 emplois ont disparu en trois ans, pendant que La Poste recevait près de 1 milliard d’euros de crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi !

Une expertise conduite pour le CHSCT du groupe dénonce publiquement « une situation préoccupante du fait de la rapide dégradation de l’état de santé des agents ».

Le conseil d’administration de La Poste a été informé, jeudi dernier, de deux suicides survenus la veille, mais, selon une source interne à l’entreprise, on atteindrait cinquante suicides cette année. Cela nous rappelle la situation – bien triste – de France Télécom dans les années 2008-2009. Le Gouvernement en a-t-il été informé ? Que compte-t-il faire ? Combien de suicides faudra-t-il encore pour que soit prise réellement en considération la vie des postiers ? J’aimerais une réponse claire à ces questions, alors que les salariés n’en ont encore eu aucune !

Les maires et de nombreux élus sont très inquiets, car beaucoup de territoires deviennent des déserts, sans services publics. Le fonds de péréquation de La Poste va être augmenté de 4 millions d’euros par an, mais pour quoi faire ? Pour moderniser et développer des bureaux de poste ? Il ne semble pas que ce soit la démarche engagée, puisqu’il va servir, à hauteur de 35 %, à fermer des bureaux ou à les transférer à des commerces.

Bien sûr, La Poste doit s’adapter, elle doit se moderniser, mais pas en aggravant les conditions de vie des habitants et les conditions de travail de ses salariés. Pour bien répondre à l’intérêt général en améliorant l’activité sur nos territoires, le service public est un véritable choix de société. C’est pourquoi je demande au Gouvernement d’intervenir pour que cesse enfin cette organisation de la dégradation de La Poste.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation. Madame la sénatrice, M. Christophe Sirugue m’a chargée de vous répondre en son nom, sans savoir que vous évoqueriez un tableau humain si sombre. C’est pourquoi ma réponse sera certainement sèche et technocratique, mais je crois que Christophe Sirugue souhaitera s’entretenir avec vous plus directement pour évoquer ce grave sujet.

Le Gouvernement est attentif au bon accomplissement par La Poste de sa contribution essentielle à la mission d’aménagement du territoire. Aussi, dans le cadre de la préparation du nouveau contrat de présence postale, l’État s’est-il attaché à favoriser des solutions équilibrées pour assurer le maillage territorial le plus dense possible et le plus adapté aux besoins des populations et des territoires. Il l’a fait en prenant en considération la réalité d’aujourd’hui : une concurrence très forte de la part d’autres acteurs économiques, une baisse drastique du volume du courrier – longtemps le cœur de métier de La Poste – et de la fréquentation des guichets, qui a par exemple diminué de 6 % en 2015. Le numérique a naturellement joué un rôle, mais il faut aussi prendre acte du changement des habitudes de consommation de nos concitoyens. Il l’a également fait avec un souci permanent de concertation et de dialogue entre les différents partenaires.

S’inscrivant dans la continuité des trois précédents contrats, le projet en préparation continue à donner la priorité aux actions en faveur des points de contact considérés comme les plus fragiles. Il vise aussi à faciliter la transformation du réseau pour mieux l’adapter aux habitudes de vie et aux attentes des habitants.

En matière de financement, l’État a décidé de consentir un effort accru en faveur de la présence postale dans les territoires. Le Gouvernement a ainsi décidé une augmentation du montant du Fonds postal national de péréquation territoriale de 12 millions d’euros pour pérenniser la participation de l’État au financement des maisons de service au public en bureaux de poste. Ce fonds sera donc abondé à hauteur de 174 millions d’euros par an, soit 522 millions d’euros sur les trois ans du nouveau contrat, contre 510 millions d’euros alloués dans le précédent.

Sur le plan local, les évolutions des points de contact de La Poste dans les départements sont examinées en prenant en compte l’avis de la commission départementale de présence postale territoriale et après un diagnostic partagé avec les municipalités concernées.

Dans le département de l’Indre-et-Loire, La Poste a maintenu un maillage dense de 220 points de contact, dont 97 bureaux de poste, 86 agences postales et 37 relais poste chez des commerçants, pour une population de 600 000 habitants, ce qui permet à 98,9 % de la population du département de se trouver à moins de cinq kilomètres et moins de vingt minutes d’un point de contact. Au quotidien, si l’on voit que le bureau de poste s’éloigne, ces chiffres peuvent éventuellement choquer, mais, lorsqu’on regarde les choix opérés dans d’autres pays européens, on réalise que, sur le territoire français, cette densité du maillage territorial demeure importante.

En ce qui concerne la mission de service universel du courrier, La Poste continue à assurer une qualité de service de haut niveau, reconnue par nos concitoyens. L’entreprise a ainsi atteint, en 2015, quatorze des quinze objectifs de qualité qui lui ont été fixés par l’État et qui sont suivis et contrôlés par le gendarme du secteur, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.

Un comité de suivi de haut niveau du contrat d’entreprise entre l’État et La Poste a eu lieu le 30 novembre dernier. Christophe Sirugue y a rappelé aux participants l’importance que l’État attache à la poursuite d’un dialogue social de qualité dans l’entreprise ; il a aussi salué la décision de La Poste d’ouvrir des négociations sur les métiers et les conditions de travail des facteurs.

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Mme Marie-France Beaufils. Comme je l’ai récemment dit au président de La Poste, si la qualité du service de distribution du courrier se dégrade, c’est évidemment en raison de l’allongement du temps de parcours des postiers, qui vise à répondre au manque d’effectifs.

On nous dit que le volume de courrier diminue. On nous dit aussi que la fréquentation des guichets est en baisse, mais sans préciser que cette baisse est aussi provoquée par la multiplication du nombre d’automates.

On doit donc raisonner non pas activité par activité, mais globalement.

Quoi qu’il en soit, les habitants sont très mobilisés, en particulier dans les secteurs les plus modestes et en zone rurale, où il n’existe plus d’autre activité qui puisse répondre aux besoins de la population.

Enfin, j’insiste sur la dégradation de l’état de santé des personnels, qui me soucie fortement. J’ai fait le parallèle avec France Télécom, car je veux lancer une alerte. Si le nombre des cinquante suicides est atteint en 2016 – c’est une situation que nous avons précédemment connue –, il est important que l’État, qui assure tout de même la tutelle du grand service public qu’est La Poste, soit très attentif à ce qui est en train de se passer.

conduite de tracteurs communaux

M. le président. La parole est à M. René Danesi, auteur de la question n° 1502, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

M. René Danesi. Ma question est très technique.

L’article 27 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, ou loi Macron, a modifié l’article L. 221-2 du code de la route. Cette modification permet aux personnes titulaires d’un permis B de conduire « tous les véhicules et appareils agricoles ou forestiers dont la vitesse n’excède pas 40 kilomètres par heure, ainsi que les véhicules qui peuvent y être assimilés ».

Cette modification, au demeurant issue d’un amendement sénatorial, avait pour but de simplifier la vie des personnes qui peuvent avoir occasionnellement besoin de conduire un engin de type tracteur. À première vue, ce texte paraît couler de source et ne pas poser de problème d’interprétation. Malheureusement, tel n’est pas le cas quand il s’agit de la conduite par les agents communaux de tracteurs appartenant aux communes. En effet, le texte vise expressément les véhicules et appareils agricoles ou forestiers, avec une extension aux véhicules « assimilés ».

Est-ce que ces véhicules « assimilés » doivent être attachés à une exploitation agricole ou forestière, à une entreprise de travaux agricoles ou encore à une coopérative d’utilisation de matériel agricole ? C’est l’interprétation restrictive qui est faite par l’Association des maires de France. En conséquence, elle déconseille à un employé communal conduisant un tracteur appartenant à la commune d’être titulaire du seul permis B et de ne pas détenir un permis correspondant à la catégorie du véhicule.

La question est d’importance, puisque nombre de collectivités locales possèdent des tracteurs qu’elles sont fréquemment amenées à utiliser, par exemple pour le déblaiement ou le déneigement. Celles-ci ont donc besoin de savoir de manière claire si les véhicules « assimilés » comprennent les tracteurs leur appartenant et si elles peuvent les faire conduire par leurs employés municipaux uniquement détenteurs du permis B.

J’ai interrogé le Gouvernement sur ce sujet technique par voie de question écrite le 3 décembre 2015. Cette question a été vainement rappelée le 28 avril 2016. N’ayant obtenu aucune réponse, je suis contraint de poser oralement la question, car je souhaiterais être enfin éclairé. Je préférerais évidemment avoir une réponse claire. Les agents communaux sont-ils oui ou non concernés par la nouvelle rédaction du code de la route et peuvent-ils, en conséquence, se satisfaire d’un permis B lorsqu’ils conduisent un tracteur ou un véhicule assimilé ?

En cas de réponse négative ou évasive, voire alambiquée, comme les services juridiques ont parfois l’art de le faire, il faudrait en conclure à la nécessité de légiférer de nouveau.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation. À votre question technique, monsieur le sénateur, je ferai une réponse qui le sera tout autant, au nom de Bruno Le Roux, ministre de l’intérieur. J’espère qu’elle sera non pas alambiquée, mais juridiquement précise.

Les réglementations française et européenne en matière de conduite de véhicules prévoient que, selon la catégorie de véhicule qu’il conduit, le conducteur soit en possession du permis de conduire adéquat. La catégorie du permis de conduire est définie à l’article R. 221-4 du code de la route. Conformément à ce texte, la catégorie de permis de conduire exigée pour la conduite d’un tracteur, à savoir les permis B, BE, C ou CE, est définie en fonction du poids total autorisé en charge du véhicule, auquel s’ajoute celui de sa remorque éventuelle.

De plus, l’article L. 221-2 du code de la route autorise les conducteurs des véhicules et appareils agricoles ou forestiers attachés à une exploitation agricole ou forestière, à une entreprise de travaux agricoles ou à une coopérative d’utilisation de matériel agricole à conduire ces véhicules ou appareils pendant la durée de leur activité, agricole ou forestière, sans être titulaires du permis de conduire correspondant à la catégorie du véhicule considéré, dès lors qu’ils sont âgés d’au moins seize ans.

Récemment, la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, que vous avez mentionnée, a modifié l’article L. 221-2. Dorénavant, les personnes titulaires du permis de conduire de la catégorie B sont autorisées à conduire tous les véhicules et appareils agricoles ou forestiers dont la vitesse n’excède pas 40 kilomètres par heure, ainsi que les véhicules qui peuvent y être assimilés.

Cette mesure a remplacé les dispositions antérieures. La nouvelle rédaction ne modifie pas les catégories d’engins visés par l’article L. 221-2, à savoir les véhicules et appareils agricoles ou forestiers dont la vitesse n’excède pas 40 kilomètres par heure et les véhicules qui peuvent y être assimilés.

Ces véhicules et appareils agricoles ou forestiers sont définis au point 5 de l’article R. 311-1 du code de la route ; il s’agit des véhicules de catégories T – tracteurs agricoles à roues –, C – tracteurs agricoles à chenilles –, R – remorques ou semi-remorques – et S – machines ou instruments agricoles remorqués –, à l’exclusion des sous-catégories dont la vitesse maximale par construction est supérieure à 40 kilomètres par heure.

Seul un conducteur « attaché à une exploitation agricole ou forestière, à une entreprise de travaux agricoles ou à une coopérative d’utilisation de matériel agricole » est autorisé à conduire ces véhicules sans permis de conduire à partir de seize ans. Les autres conducteurs doivent obligatoirement avoir un permis de conduire de catégorie B, y compris s’ils travaillent pour une collectivité.

Ainsi, la nouvelle rédaction de l’article L. 221-2 du code de la route n’apporte pas de restriction à la précédente, s’agissant des autorisations des agents communaux à conduire des tracteurs agricoles. Il n’est donc pas besoin de légiférer de nouveau.

M. René Danesi. Cette réponse est très claire, merci !

zones de revitalisation rurale

M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, auteur de la question n° 1511, adressée à M. le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

M. Jean-François Longeot. Je souhaite appeler l’attention de M. Baylet sur les conséquences de la loi NOTRe ainsi que de la loi de finances rectificative pour 2015, qui a réformé le régime des zones de revitalisation rurale. En effet, ces deux lois vont affecter les communes de petite taille situées en secteur rural concernées par le dernier classement en ZRR, soit plus de 40 % des communes dans lesquelles vivent 6 millions de Français.

Par la modification des modalités de classement des communes en ZRR, ces lois vont avoir pour conséquence de faire perdre à certaines communes leur classement, alors que leurs caractéristiques n’auront pas changé. Désormais, le niveau de l’intercommunalité sera pris en compte pour l’attribution du classement, sans distinction entre les communes la composant.

La perte du classement en ZRR risque, pour certaines communes, d’avoir un impact négatif sur leur niveau d’activité ainsi que sur leur attractivité économique, ouvrant la porte à une fracture économique et sociale accentuée entre espaces urbains et espaces ruraux, que le dispositif des ZRR tentait justement de réduire. En effet, les ZRR ont été créées pour soutenir le développement économique des territoires ruraux en compensant, par des exonérations, les obstacles logistiques tels que l’éloignement ou l’accès difficile à de nombreux services.

Par conséquent, je souhaiterais savoir si, dans un contexte de baisse sans précédent des dotations aux collectivités, le Gouvernement compte prendre des mesures pour permettre de maintenir l’activité économique de ces territoires et ne pas les laisser face à une désertification de leur tissu économique, désormais inévitable.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d’État auprès du ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence du ministre Jean-Michel Baylet, actuellement en déplacement en Corse.

Le dispositif des zones de revitalisation rurale a été créé, vous l’avez rappelé, dans l’objectif de compenser les difficultés particulières que rencontrent certains espaces ruraux en matière d’attractivité démographique et économique.

La réforme des ZRR, qui a été votée en décembre 2015, fait suite au rapport d’information des députés Alain Calmette et Jean-Pierre Vigier. Elle reprend très largement leurs préconisations, notamment en ce qui concerne les critères devant être pris en compte : la densité démographique et le revenu par habitant. Ces critères permettront de cibler les territoires qui sont à la fois les plus ruraux et les plus en difficulté d’un point de vue social et économique.

Le Gouvernement a également veillé à ce que les futurs critères permettent de maintenir globalement le nombre de communes classées en ZRR, soit environ 14 000 communes, même s’il y aura évidemment des variations importantes à l’intérieur de ce classement.

La nouvelle carte intercommunale est désormais connue. Jean-Michel Baylet a d’ores et déjà demandé à ses services de faire preuve de la plus grande diligence afin que le nouveau classement puisse être connu dans les meilleurs délais, au début d’année prochaine.

Concernant l’impact d’une sortie du dispositif des ZRR pour une commune, je rappelle que l’ensemble des exonérations fiscales et sociales dont bénéficient les entreprises et associations sont maintenues jusqu’à leur terme. Par exemple, l’exonération de l’impôt sur les sociétés pourra aller jusqu’au 31 juillet 2025, terme des huit années d’exonération prévues.

En outre, ces communes bénéficient de l’action conduite par le Gouvernement en faveur des territoires ruraux. Je citerai la tenue de trois comités interministériels aux ruralités avec 104 mesures engagées ; je pourrais aussi parler de l’action réalisée pour le maintien des 1 565 petites stations de carburant qui bénéficie de 12,6 millions d’euros de crédits spécifiques ou de l’action en faveur des services publics, avec la mise en place de 1 000 maisons de services au public.

Par ailleurs, des aides de l’État, comme l’aide à la réindustrialisation ou la prime d’aménagement du territoire, la PAT, favorisent la création d’emplois dans les zones les plus fragiles. En 2016, la PAT a ainsi permis de soutenir 29 projets pour accompagner la création ou le maintien de près de 2 000 emplois.

Enfin, le projet de loi de finances pour 2017, avec l’augmentation de la DETR, la dotation d’équipement des territoires ruraux, qui atteindra, pour la première fois, 1 milliard d’euros, ou le Fonds de soutien à l’investissement local, dont 216 millions d’euros sont réservés aux contrats de ruralité, permettra également de dynamiser les territoires ruraux.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. Je remercie Mme la secrétaire d’État de sa réponse. J’ai bien noté que la DETR augmentait ; c’est effectivement important pour les territoires ruraux.

Je savais que l’exonération en faveur des entreprises installées allait se poursuivre et ma question portait surtout sur le cas des entreprises qui voudraient s’installer aujourd’hui : c’est pour elles que se pose le problème.

En fait, il me semble contre-productif de modifier trop souvent l’ensemble des lois qui concernent les collectivités locales, rurales notamment. En effet, les acteurs locaux fondent leurs projets sur un cadre légal existant et, quand ils commencent à les réaliser, celui-ci n’est déjà plus valable.

La modification du classement en ZRR, de même que la réforme de la carte des cantons, va donc faire perdre leur statut à certaines communes rurales. Par exemple, les anciens chefs-lieux de canton vont perdre le bénéfice d’une part spécifique de leur dotation globale de fonctionnement.

financement des groupements d’associations syndicales de propriétaires par les collectivités territoriales

M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent, auteur de la question n° 1499, adressée à M. le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

M. Daniel Laurent. Ma question porte sur le financement des groupements d’associations syndicales de propriétaires par les collectivités territoriales. Elle est d’importance en Charente-Maritime, qui compte plus de 100 000 hectares de marais.

L’Union des marais de la Charente-Maritime est un syndicat mixte ouvert qui fédère plus de 250 adhérents, apporte conseils et assistance autour des questions de l’eau et de la protection contre les inondations. La mutualisation permet à cette structure d’œuvrer dans un esprit de service public, notamment lors d’événements catastrophiques, comme les tempêtes Martin ou Xynthia.

En pratique, les associations syndicales ont la responsabilité de la gestion hydraulique et de l’entretien des réseaux hydrauliques à l’intérieur de leur périmètre syndical. Ainsi, les services apportés par le syndicat aux territoires ruraux, dans un cadre de solidarité territoriale, ne peuvent être mis en défaut, compte tenu de la fragilité de ces territoires.

Les interventions d’entretien ou d’aménagement nécessitent d’importants moyens et revêtent un intérêt collectif, au vu des enjeux, des conséquences environnementales et socio-économiques pour les milieux, les usagers des territoires et les populations.

La loi MAPTAM rend obligatoire le transfert au « bloc » communal, à compter du 1er janvier 2018, des compétences concernant la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, ou GEMAPI.

Les missions des associations syndicales de propriétaires, sur leur périmètre et dans le cadre de leurs statuts, ont été préservées à l’article 59 de la loi du 27 janvier 2014.

De même, dans le cadre de la loi NOTRe, une disposition a été introduite, à l’article 94, en faveur des associations syndicales de propriétaires pour leur permettre de bénéficier de financements de la part des départements pour l’entretien et l’aménagement de l’espace rural.

Cependant, il conviendrait de préciser que ces mesures s’appliquent plus largement aux besoins d’investissements et de fonctionnement des associations syndicales et d’offrir la possibilité aux groupements des associations syndicales de continuer à bénéficier d’une possibilité d’accompagnement financier des collectivités territoriales, pour leurs actions menées au bénéfice des territoires et de leurs adhérents.

Ainsi, pour des raisons de solidarité territoriale, les départements et les régions doivent pouvoir contribuer au financement du fonctionnement et de l’investissement des associations syndicales de propriétaires régies par l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 et des unions, syndicats mixtes ou fédérations dont elles sont membres.

Madame la secrétaire d’État, quelles précisions pouvez-vous m’apporter sur la question du financement des groupements d’associations syndicales de propriétaires par les collectivités territoriales ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d’État auprès du ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales. Comme vous le savez, monsieur le sénateur, la loi NOTRe a clarifié la répartition des compétences entre collectivités en supprimant la clause de compétence générale des régions et des départements.

Certaines compétences, par nature transversales, restent cependant partagées. Il en est ainsi dans le domaine de l’eau, où l’article L. 211-7 du code de l’environnement permet de maintenir une intervention des différents échelons de collectivités. Ces dernières peuvent donc aujourd’hui contribuer au financement des associations syndicales de propriétaires œuvrant dans ce domaine.

En revanche, à partir du 1er janvier 2018, cette faculté sera réservée aux seules communes et établissements publics de coopération intercommunale, qui auront la compétence en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations.

Régions et départements pourront tout de même continuer à soutenir financièrement les actions des associations syndicales de propriétaires dans le domaine de l’eau, à l’exclusion toutefois de celles portant exclusivement sur le champ de la compétence GEMAPI précitée.

Vous avez également rappelé que la loi NOTRe permet aux départements, pour des raisons de solidarité territoriale et lorsque l’initiative privée est défaillante ou absente, de contribuer au financement des opérations en faveur de l’entretien et de l’aménagement de l’espace rural réalisés par les associations syndicales autorisées. Cependant, le législateur a entendu réserver ce soutien aux seules opérations d’investissement. Il n’apparaît donc pas souhaitable d’étendre cette faculté aux dépenses de fonctionnement, car il convient de préserver l’équilibre et l’esprit de la réforme territoriale, qui a voulu clarifier les interventions des collectivités territoriales.

Le soutien que peuvent apporter les collectivités aux associations syndicales de propriétaires est désormais mieux encadré : il doit s’inscrire dans les limites des compétences de chaque catégorie de collectivité territoriale et respecter les règles relatives aux aides aux entreprises, telles qu’elles ont été voulues par le législateur. Il s’agit là d’un gage d’efficacité de l’action publique. Je vous rappelle, en outre, que la loi NOTRe a été votée par les deux chambres.

M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent.

M. Daniel Laurent. Madame la secrétaire d’État, vous avez compris l’importance de ces syndicats pour les collectivités situées en zone humide ou comportant de nombreux marais.

Vous m’avez répondu que les aides des collectivités locales étaient possibles uniquement pour financer des investissements. Or, dans le cas particulier que j’ai évoqué, le fonctionnement absorbe une grosse part des financements. En effet, l’investissement consiste à créer des fossés ou des ouvrages nouveaux, le fonctionnement correspondant à l’entretien. Si l’entretien n’est pas assuré par ces syndicats de marais, qui l’assumera ? Il risque donc d’être abandonné, ce qui emporte de graves conséquences pour l’environnement.

M. le président. Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

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Éloge funèbre de Louis Pinton, sénateur de l’Indre

M. le président. Monsieur le ministre de l’économie et des finances, monsieur le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement, mes chers collègues, mesdames, messieurs, c’est avec une grande tristesse que j’accomplis une nouvelle fois devant vous le devoir qui revient au président de notre assemblée de saluer solennellement la mémoire d’un collègue disparu. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que les membres du Gouvernement se lèvent.)

Vous vous souvenez de la stupeur qui nous a saisis, le 17 novembre dernier, lorsque nous avons appris la disparition brutale de notre collègue Louis Pinton, à l’ouverture de la séance de questions d’actualité au Gouvernement.

Avec Louis Pinton, c’est une figure majeure de la vie politique de l’Indre au cours de ces dernières décennies et un sénateur de la République estimé de tous qui nous a quittés.

C’est au nom du Sénat que j’ai prononcé, le 24 novembre, l’éloge de Louis Pinton en l’église Saint-André de Châteauroux, où nous lui avons rendu hommage en présence de plusieurs d’entre vous : Mme la présidente Jacqueline Gourault, nos collègues Catherine Deroche, Rémy Pointereau, Éric Doligé et, bien sûr, le sénateur de l’Indre, Jean-François Mayet, ainsi que Mme Frédérique Gerbaud, suppléante de Louis Pinton, qui nous a désormais rejoints dans cet hémicycle.

Cet adieu émouvant au milieu des siens, au milieu de très nombreux maires en écharpe, au côté de son successeur au conseil départemental et de ses collègues conseillers départementaux, dans cette terre de l’Indre, au cœur du Berry, qui lui était si chère et qu’il avait si fidèlement servie, devait trouver son écho au palais du Luxembourg. C’est ce qui nous réunit cet après-midi.

Louis Pinton était particulièrement attaché au Sénat de la République, où il avait succédé le 22 novembre 2007 à Daniel Bernardet. Il croyait profondément au rôle de notre assemblée, au point de renoncer en janvier dernier à la présidence du conseil départemental de l’Indre, à laquelle il s’était dévoué sans compter depuis 1998.

Né à Bonnat, dans la Creuse, où il repose désormais, Louis Pinton avait accompli ses études secondaires aux lycées de Guéret et de Périgueux et au collège Sainte-Barbe à Paris, avant de se former, pour accomplir sa vocation de vétérinaire, à l’École nationale vétérinaire de Toulouse. Il commença à exercer en milieu rural à Argenton-sur-Creuse en 1974, avant de s’installer en 1980 à Orsennes, dans ce département de l’Indre qu’il n’allait plus quitter. Moins de trois ans plus tard, Louis Pinton devint maire d’Orsennes, fonction qu’il occupera durant trois mandats successifs.

C’est en 1998 que Louis Pinton, qui avait été élu conseiller général en 1992, a succédé à la tête de l’assemblée départementale à Daniel Bernardet, qu’il avait connu dès les années 1970, qui fut en quelque sorte son guide en politique et auquel le liait une profonde amitié.

Louis Pinton, comme Daniel Bernardet, était profondément lié aux élus locaux et à son territoire. Il avait conservé de l’exercice de sa profession de vétérinaire en milieu rural un sens du contact et une parfaite connaissance des territoires, dont il porta ici la parole avec force. Il se voulait d’abord homme de terroir, ce qui n’excluait en rien la force de ses convictions.

Il préférait la sincérité vraie entre les hommes et les femmes et savait écouter, sa courtoisie et sa discrétion allant de pair avec une autorité naturelle qu’il mettait au service de ses mandats pour les accomplir avec rigueur.

Louis Pinton présida durant dix-huit ans aux destinées du conseil général, puis du conseil départemental, avec bon sens et rigueur, ce qui passait par une gestion des deniers publics à la fois exigeante et généreuse. Il fit ainsi de l’Indre – ce qui n’est pas rien en ces périodes difficiles – le département le moins endetté de France, cette maîtrise de la dépense publique n’empêchant pas une politique d’investissements dynamique dans le domaine des transports, de l’éducation, de l’environnement ou du numérique.

Louis Pinton voulait faire de l’Indre un département attractif, au cœur de ce Berry qui constitue l’un des plus vieux terroirs agricoles de notre pays.

L’Indre s’est aussi fixé pour objectif, sous sa direction, une politique sociale active à laquelle il était particulièrement attaché. J’ai eu ainsi le bonheur d’inaugurer à ses côtés, le 18 septembre 2015, après une très belle assemblée générale des maires, une réalisation originale du département qui illustre l’attachement de Louis Pinton à la réinsertion sociale et sa générosité : la « ferme thérapeutique » de l’établissement public départemental Blanche-de-Fontarce a pour vocation l’accueil de jeunes adultes rencontrant des difficultés sociales et psychologiques. Ce fut un moment particulièrement chaleureux et très personnel, dont je me souviens avec émotion. Par les témoignages reçus encore très récemment, qu’ils émanent des accueillants et des accueillis, je sais que cette émotion a été partagée.

Lorsqu’il prit l’initiative, en janvier, d’anticiper l’application de la loi sur l’exercice des mandats en décidant de quitter la présidence du conseil départemental, Louis Pinton pouvait légitimement dresser un vrai bilan de son action à la tête du département de l’Indre.

Louis Pinton était depuis neuf ans notre collègue. Il fut, depuis 2007, un de ces élus qui font la richesse du Sénat, défenseur infatigable et vigilant des intérêts de son département et du territoire, tout en exprimant toujours avec conviction et détermination sa vision des sujets engageant l’avenir de notre pays. Je le revois ici, au haut de cet hémicycle, au côté de Jean-François Mayet, légèrement penché, le regard attentif, le cheveu blanc en brosse, suivant avec attention nos débats. Lui, le réservé, s’exclamait parfois, et sa voix portait, quand il entendait ce qui lui paraissait le contraire de la vérité, parce que, son exigence, c’était la vérité !

Membre du groupe Les Républicains, Louis Pinton participa, tout au long de son mandat sénatorial, aux travaux de la commission des affaires sociales qu’il éclairait de ses compétences d’élu de terrain. Il était aussi membre de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation et participait en connaisseur aux travaux du groupe d’études Élevage.

La pondération de Louis Pinton n’empêchait pas la force dans l’expression de ses convictions, lorsqu’il l’estimait nécessaire. Je me souviens – notre collègue Bruno Retailleau était présent – de sa position vigoureuse lors du débat récent sur la déchéance de nationalité qu’il considérait « comme un débat stérile qui détourne l’attention du seul objectif valable dans les circonstances actuelles, à savoir la lutte intensive contre le terrorisme ». Les événements d’hier nous invitent à méditer ces propos.

Mes chers collègues, Louis Pinton a consacré l’essentiel de sa vie publique à ses mandats d’élu local et de parlementaire. Il était un élu exemplaire et une personnalité très attachante.

Il y a quelques semaines, je l’avais chargé d’une mission sur les modes de gestion des collectivités territoriales en ces temps de « rareté » financière, appelés à durer. Notre métier commun de vétérinaire nous avait construit un mode de raisonnement : l’observation pour poser un diagnostic, l’analyse pour formuler un pronostic, la décision pour engager un traitement. Ces « vertus » ne sont pas inutiles dans la vie publique !

Louis Pinton avait une grande sensibilité cachée sous une « carapace » parfois un peu rugueuse. Il était, au fond, un humaniste.

À nos collègues du groupe Les Républicains et à ceux de la commission des affaires sociales, j’exprime à nouveau, au nom du Sénat, toute notre sympathie.

Je souhaite aussi redire à sa famille, à ses enfants, à Jean-François Mayet, à Frédérique Gerbaud, qui nous rejoint dans cet hémicycle où nous avons vu siéger son père François, et à tous leurs proches les condoléances très sincères de chacun des membres du Sénat de la République, ainsi que la part personnelle que je prends à leur peine.

La mémoire de Louis Pinton restera vivante.

Avant de donner la parole à M. André Vallini, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, je tiens à saluer la présence à ses côtés de M. Michel Sapin, ministre de l’économie et des finances, qui n’est pas étranger au département de l’Indre.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, mesdames, messieurs, c’est avec beaucoup de tristesse que nous avons appris, le 17 novembre dernier, que Louis Pinton nous avait brutalement quittés à seulement soixante-huit ans.

Natif de Bonnat, dans la Creuse, où il a été inhumé, Louis Pinton a été durant presque vingt-cinq ans élu de l’Indre voisine. Maire du village d’Orsennes, conseiller général, vice-président, puis président du conseil général de l’Indre de 1992 à 2016, cet homme travailleur, jovial, accessible et toujours animé de la volonté d’aider ses concitoyens, a consacré toute son énergie à son territoire du Berry, auquel il était profondément attaché.

Élu rural par excellence, Louis Pinton était un homme de terrain, proche des habitants et estimé d’eux.

Grand connaisseur du monde agricole, féru de chasse, Louis Pinton s’attachait aussi à construire l’avenir de la ruralité, une ruralité pour laquelle il était convaincu de l’impérieuse nécessité de développer les infrastructures et de maintenir une présence forte des services publics sur tous nos territoires. C’est ainsi qu’il s’est engagé pour le développement des infrastructures ferroviaires et routières de son département, contre la désertification médicale et, plus récemment, pour la promotion et l’installation du haut et du très haut débit dans les villes, mais aussi dans les campagnes de l’Indre. Il entendait ainsi permettre à ce territoire d’entrer pleinement dans l’ère du numérique.

Son action résolue au service des territoires lui a d’ailleurs valu de devenir sénateur de l’Indre en 2007. Dans le cadre de ce mandat national, auquel il avait d’ailleurs décidé de se consacrer pleinement il y a quelques mois en transmettant le flambeau de la présidence du conseil départemental à son collègue Serge Descout, il a poursuivi son combat au service des territoires ruraux.

Ici, au Sénat, sa parole franche et son tempérament pugnace ont fait de lui l’un des grands défenseurs de la ruralité. La lutte contre la fracture territoriale, y compris la fracture numérique, par une politique volontariste d’aménagement du territoire, et le maintien d’une fiscalité locale modérée furent quelques-uns des combats que Louis Pinton a menés au Sénat, fort de son expérience locale et de sa rigueur reconnues de tous.

Homme d’action plus que de discours, homme de conviction et homme de cœur, Louis Pinton laisse un Sénat endeuillé et un territoire attristé, mais un territoire transformé et préparé pour l’avenir grâce à son action tenace et efficace.

À l’ensemble de ses concitoyens, à son épouse, à ses enfants, à ses amis, à ses collaborateurs, Michel Sapin et moi-même adressons, au nom du Gouvernement et en notre nom personnel, nos condoléances les plus attristées.

M. le président. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je vous invite maintenant à partager un moment de recueillement à la mémoire de Louis Pinton. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que les membres du Gouvernement observent une minute de silence.)

Avant de suspendre la séance, en signe d’hommage à Louis Pinton, je souhaite vous informer – nous venons en effet de connaître de terribles semaines – que je prononcerai l’éloge funèbre de Michel Houel le mardi 10 janvier 2017, à quatorze heures trente, et celui de Jean-Claude Frécon le mardi 24 janvier 2017, à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quatorze heures cinquante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Claude Bérit-Débat.)

PRÉSIDENCE DE M. Claude Bérit-Débat

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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Dossier législatif : projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle
Discussion générale (suite)

Liaison ferroviaire Paris-aéroport Charles-de-Gaulle

Adoption des conclusions d’une commission mixte paritaire

M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle (texte de la commission n° 167, rapport n° 166).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle
Article 1er bis

M. Louis Nègre, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, mes chers collègues, la commission mixte paritaire, réunie le 30 novembre dernier pour examiner le projet de loi « Charles-de-Gaulle Express » est parvenue à un accord. Les débats ont permis d’aboutir à trois principaux constats.

Le premier est l’élan nouveau que donne ce texte à l’histoire chaotique du CDG Express. Lancé au début des années 2000, ce projet a en effet connu pendant près d’une décennie le sort réservé aux grands chantiers d’infrastructures dans notre pays : il s’est enlisé !

À force d’atermoiements, nous sommes aujourd’hui contraints d’agir dans l’urgence. La question n’est plus de savoir s’il faut construire ou non le CDG Express : il n’y a pas d’autre option crédible pour absorber la croissance à venir de l’aéroport, répondre aux besoins spécifiques des passagers aériens, s’inscrire dans une démarche de développement durable, ou encore se préparer aux jeux Olympiques et aux manifestations suivantes. Sans ambiguïté, le Sénat et l’Assemblée nationale se sont prononcés en faveur de ce projet d’intérêt général, dont les bénéfices s’apprécieront dans le temps long.

Le deuxième constat concerne la mise en œuvre du projet. S’agissant du montage juridique, qui sépare les missions de construction, d’une part, et d’exploitation, d’autre part, il n’y a pas eu de débat, d’autant, je le rappelle, qu’il a reçu l’aval des autorités européennes. Ce montage est globalement similaire à celui qui a été retenu pour la réalisation du Grand Paris Express. Vous le savez, je me félicite de la mise en concurrence de l’exploitation du service de transport ferroviaire, qui vient compenser l’attribution de gré à gré par l’État de la construction de l’infrastructure à une société de projet, filiale de SNCF Réseau et d’Aéroports de Paris.

Le Sénat a cherché à faciliter la mise en œuvre juridique de ce montage en sécurisant une éventuelle participation de la Caisse des dépôts et consignations au capital de la société de projet. Il a également repoussé le délai permettant de recourir à la procédure spéciale d’extrême urgence pour réaliser des expropriations, et ce afin de favoriser la recherche d’accords amiables, toujours souhaitables quand on cherche à éviter les contentieux. Ces deux évolutions favorables au projet ont été conservées par la commission mixte paritaire.

En ce qui concerne la mise en œuvre opérationnelle du projet, je vous rappelle que nous avions exprimé quelques inquiétudes au regard de son impact pour les usagers du RER B. En dépit de l’enveloppe de 125 millions d’euros destinée à financer les investissements nécessaires à la bonne gestion des situations dégradées, d’inévitables perturbations ne manqueront pas de se déclencher, soit pendant la phase de travaux, soit pendant la phase d’exploitation. Il faudra donc bien veiller les uns et les autres, notamment SNCF Réseau, à respecter les besoins des voyageurs du quotidien.

Le troisième constat a trait au plan de financement, qui est resté flou jusqu’à la dernière minute. Le coût de l’infrastructure est estimé à 1,4 milliard d’euros hors taxe, aux conditions économiques de 2014. Le coût des équipements nécessaires, dont le matériel roulant, est évalué à environ 285 millions d’euros. Cependant, je crains que, pour un tel chantier, ce coût ne soit conduit à augmenter au fil du temps.

Sur la question de la constitution des fonds propres de la société de projet, je me suis personnellement opposé dès l’origine à la proposition de déroger à la règle d’or pour l’endettement de SNCF Réseau, règle que nous avions votée en 2014. Cette « exception exceptionnelle » me paraît inacceptable dans son principe même !

Le Sénat avait malgré tout décidé de conserver cette dérogation, en votant la disposition dans une rédaction la rendant inapplicable. Cette situation a conduit la commission mixte paritaire a adopté le texte proposé par le rapporteur de l’Assemblée nationale, Philippe Duron, qui comporte deux améliorations.

D’une part, le texte préserve l’avis préalable de l'ARAFER, l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, sur chaque projet d’investissement supérieur à un seuil actuellement fixé par décret à 200 millions d’euros. En confirmant l’obligation dans laquelle se trouve le régulateur de se prononcer sur ces dossiers, nous sommes là encore en cohérence avec notre action.

D’autre part, il précise que la participation de SNCF Réseau doit être rémunérée en tenant compte des dépenses de toute nature supportées par la société pour l’exercice des missions qui lui sont confiées par la concession de travaux, ainsi que l’amortissement et la juste rémunération des capitaux investis. Ce dernier point reprend l’esprit de la « rentabilité suffisante », notion qui figurait dans le texte adopté par le Sénat.

Mes chers collègues, en tant que républicain, je ne peux que respecter cette décision même si, à mon sens, la rémunération des capitaux n’est pas au cœur du problème. Je regrette cependant que les annonces faites ces deux dernières semaines ne fassent que donner de la consistance aux inquiétudes que j’avais exprimées, monsieur le secrétaire d'État.

Tout d’abord, la constitution des fonds propres a été en partie précisée : vous avez annoncé un montant de 400 millions d’euros, répartis entre ADP, SNCF Réseau et « probablement la Caisse des dépôts et consignations », ainsi que 100 millions d’euros d’avances remboursables d’ADP.

Je me félicite que, dans l’urgence, cette solution d’avances remboursables, que j’avais suggérée, ait été retenue. Il est dommage que vous ne l’ayez pas arrêtée plus en amont, car elle confirme bien que d’autres mécanismes étaient techniquement envisageables. Cela aurait peut-être changé la vision d’un certain nombre d’entre nous sur l’impérieuse nécessité de déroger à la règle d’or, faute d’alternative.

Surtout, en ce qui concerne la contribution d’équilibre sur les passagers, jugée nécessaire pour lever la dette sur les marchés financiers, vous avez choisi une solution de facilité. Il était évidemment indispensable de la repousser à 2024. Dans le contexte actuel, il n’était pas imaginable de taxer davantage les compagnies aériennes, notamment Air France, pour financer une infrastructure dont elles ne tireraient des bénéfices que dans huit ans !

Néanmoins, je regrette que le montant de cette taxe ait été relevé de 1 euro à 1,40 euro, soit une augmentation de 40 % ! Sur ce point aussi, vous avez obtenu gain de cause dans le cadre du collectif budgétaire. Vous n’avez pas souhaité entendre les appels répétés, y compris au sein de votre propre majorité, en faveur d’une remise à plat de la taxe de solidarité sur les billets d'avion ou a minima d’une affectation du surplus de recettes qui résulte de son écrêtement depuis 2015, et dont profite uniquement Bercy.

Pour conclure, je dirai qu’il est évident que nous aurions pu faire mieux et même beaucoup mieux sur le volet financier. Comme pour chaque grand projet d’infrastructure, vous l’avez compris, je m’inquiète du risque de dérive des coûts. Je redoute déjà le jour où SNCF Réseau sera éventuellement appelé à recapitaliser la société de projet. Maintenant que la dérogation à la règle d’or a été décidée, il n’y a plus de garde-fou. Il faudra donc rester plus que jamais vigilant quant à la dette de la SNCF. Pour autant, je me félicite que le CDG Express en tant que projet de développement économique pour Paris et la région parisienne avance positivement et que le Parlement, quant à lui, ait su œuvrer rapidement pour faciliter sa mise en œuvre. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie de bien vouloir excuser Alain Vidalies, qui n’a pas pu être présent cet après-midi.

M. Jean Desessard. Une panne de RER ?

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. Nous voici réunis pour examiner les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle, dont vous venez de dresser le bilan, monsieur le rapporteur.

Le Charles-de-Gaulle Express est un service indispensable pour améliorer le lien entre le centre de Paris et l’un de ses principaux aéroports, au service du dynamisme de l’agglomération parisienne et, au-delà, de l’ensemble du pays. Il permettra, à la fin de 2023, de relier directement en vingt minutes l’aéroport Charles-de-Gaulle et la gare de l’Est.

Le projet répond à deux enjeux principaux : l’attractivité économique et touristique de l’Île-de-France et le développement durable. Chacun sait qu’il sera aussi un élément important pour les dossiers de candidature de la France aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, d’une part, et à l’Exposition universelle, d’autre part. Enfin, ce projet s’appuie sur une véritable complémentarité avec les projets du Nouveau Grand Paris : la ligne Charles-de-Gaulle Express ne peut pas se faire au détriment des transports du quotidien. Rien ne serait pire, notamment pour les 900 000 voyageurs quotidiens du RER B !

Près de 130 millions d’euros d’engagements pour réaliser des travaux sur les infrastructures existantes – ce sont les voies sur lesquelles circulent le RER B, la ligne K du Transilien et le TER Picardie – figurent dans le projet et témoignent de cette prise en compte indispensable.

Le projet de loi vise à établir les fondements législatifs qui rendront possible ce projet dans le cadre du nouveau montage économique validé par la Commission européenne. Ce nouveau montage, qui prend acte de l’échec de la concession privée en 2011, repose sur la séparation des missions de construction de l’infrastructure et d’exploitation du service de transport ferroviaire.

Le texte tend donc à confier la mission de conception, de construction, de financement et d’entretien de l’infrastructure à une société de projet, future filiale de SNCF Réseau et d’Aéroports de Paris. L’article 1er ratifie l’ordonnance du 18 février 2016 autorisant principalement l’État à signer de gré à gré un contrat de concession de travaux avec la société de projet à créer, associant SNCF Réseau et Aéroports de Paris et, le cas échéant, un tiers investisseur.

Il a en outre pour objet d’attribuer la mission d’exploitation du service de transport ferroviaire à un opérateur ferroviaire. L’article 2 prévoit que l’État désignera l’exploitant par voie d’appel d’offres, selon les mêmes modalités que celles qui ont été retenues pour le réseau de transport du Grand Paris Express.

Avec un tel montage, le financement du projet reposera essentiellement sur la billetterie : celle-ci permettra de payer les coûts d’exploitation du service et les péages ferroviaires au gestionnaire d’infrastructure. Les résultats de la modélisation indiquent toutefois que les ressources financières tirées de la billetterie ne seront pas suffisantes. L’équilibre financier requiert une ressource complémentaire sous la forme d’une taxe sur les voyageurs du transport aérien, comme vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur.

Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement a déposé un amendement dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2016, qui a été adopté par les députés et voté conforme par la Haute Assemblée samedi dernier. Cette taxe ne sera applicable qu’en 2024, une fois la nouvelle liaison mise en service. Elle ne concernera que les seuls passagers de l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle, hors correspondances, pour un montant plafond de 1,40 euro.

Par ailleurs, un engagement des investisseurs de la société de projet – ADP, SNCF Réseau et, probablement, la Caisse des dépôts et consignations –, portant sur un montant total de fonds propres de 400 millions d'euros, auxquels s’ajoutent 100 millions d'euros d’avances remboursables d’ADP, devrait désormais permettre d’assurer la viabilité du projet.

Nous allons donc pouvoir notifier le dossier aux instances communautaires européennes.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement salue l’accord trouvé en commission mixte paritaire sur l’article tendant à autoriser SNCF Réseau à déroger à la règle d’or pour ce projet.

Désormais, la nouvelle version de l’article, élaborée sur le fondement d’un amendement sénatorial, précise bien les conditions dans lesquelles SNCF Réseau sera amené à investir dans cette société de projet, et pour lesquelles les conditions de rémunération des fonds propres investis seront déterminées par l’ordonnance.

Ces précisions explicitent les spécificités de ce projet au regard des objectifs posés par la règle d’or.

Au nom de mon collègue Alain Vidalies et de l’ensemble du Gouvernement, je veux enfin saluer le rapporteur pour la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Je vous remercie, monsieur Nègre, du travail que vous avez accompli, avec tous les sénateurs qui se sont impliqués dans ce dossier.

Ce travail a permis d’enrichir le projet de texte, avec, notamment, l’adoption de deux amendements tendant, d’une part, à permettre qu’un tiers investisseur soit présent dès la création de la société de projet et, d’autre part, à permettre l’application de la procédure d’extrême urgence du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique sur une durée plus longue, c’est-à-dire jusqu’à la fin de la validité de la déclaration d’utilité publique.

C’est donc un travail parlementaire extrêmement positif et efficace que le Gouvernement tient, ici à saluer. En conséquence, il soutient pleinement l’adoption du projet de loi, dans la rédaction issue de l’accord entre les deux assemblées. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour le groupe écologiste.

M. Jean Desessard. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ce projet de loi tend à ratifier l’ordonnance permettant la création d’une ligne de train dédiée pour relier directement, sans arrêt intermédiaire, l’aéroport Paris-Charles de Gaulle au centre de Paris d’ici à 2023.

Touristes et acteurs économiques pourront ainsi rejoindre la capitale en vingt minutes ; en sens inverse, les usagers de l’aéroport pourront s’y rendre depuis Paris sans se préoccuper d’éventuels retards. La ligne B du RER, deuxième ligne la plus empruntée d’Europe avec ses quelque 900 000 passagers quotidiens, ne correspondrait pas aux standards de qualité attendus.

M. Philippe Dallier. C’est le moins que l’on puisse dire !

M. Jean Desessard. Les membres du groupe écologiste ont trois oppositions à formuler à ce projet.

Tout d’abord, s’agissant de la ligne B du RER, malgré un plan de rénovation, annoncé voilà quelques années, de 650 millions d’euros de budget, la situation est toujours aussi insupportable pour les usagers.

M. Jean-Pierre Bosino. C’est un euphémisme !

M. Jean Desessard. L’état des rames est déplorable ; les pannes et les retards sont presque systématiques, tout particulièrement aux heures de pointe.

On nous propose aujourd’hui un très lourd investissement – 1,7 milliard d’euros – pour le projet CDG Express, qui transportera 20 000 voyageurs par jour, et rien, ou très peu, pour améliorer significativement le fonctionnement de la ligne B du RER, qui, elle, transporte quotidiennement 900 000 usagers…

Or toutes les études montrent que des travaux structurels très importants doivent être menés pour que cette ligne fonctionne de nouveau convenablement !

On l’a encore vu récemment avec la mise en œuvre de la circulation alternée : dès qu’il y a une augmentation, même temporaire, du nombre de voyageurs, les caténaires lâchent ! Ce n’est pas acceptable, a fortiori lorsqu’on incite la population, avec raison, à prendre les transports en commun pour lutter contre la pollution.

De plus, le coût prévu de l’aller simple sur cette future ligne – 24 euros –, non pris en charge par le pass Navigo, exclut de fait les usagers franciliens, les salariés de l’aéroport et de nombreux voyageurs. Ainsi, le taux de report prévu, de la ligne B du RER vers le CDG Express, atteint à peine 6 %.

On nous propose de faire coexister deux modes de transport très inégalitaires : pour les plus aisés, une liaison directe, confortable et rapide ; pour tous les autres, des retards, des pannes, des trains annulés et des rames bondées. On est passé des rames de métro de première et deuxième classes aux lignes entières de première et deuxième classes !

Regardons chez nos voisins, comme on nous invite souvent à le faire : à Berlin, le trajet entre l’aéroport et le centre-ville coûte 3 euros, à Rome 14 euros, à Bruxelles 8,5 euros. Nous sommes loin du coût, prohibitif, annoncé pour le CDG Express, et bien plus proche du service aujourd'hui assuré sur la ligne B du RER, quand elle fonctionne normalement.

Notons aussi que, ne s’y arrêtant pas, le nouveau train n’apporterait aucun bénéfice aux habitants et habitantes des villes de Seine-Saint-Denis traversées. En revanche, le passage de 152 rames par jour induirait, pour eux, de nouvelles nuisances visuelles et sonores. Pire encore, un engorgement des voies de la ligne B du RER, en partie utilisées par ce nouveau train, engendrera mécaniquement encore plus de retards sur cette ligne.

Tout cela pour quoi ? Un gain d’à peine dix minutes lorsque le RER fonctionne bien !

Ce projet vient également concurrencer celui de la ligne 17 du Grand Paris Express, qui, en 2023, doit relier l’aéroport Charles-de-Gaulle à la gare de Saint-Denis Pleyel. Cette dernière est censée devenir un lieu d’intermodalité, offrant de nombreuses correspondances. Pourquoi un tel doublon, monsieur le secrétaire d’État ?

Enfin, le rapport issu de l’enquête publique met en exergue d’importantes zones d’ombre au sujet du financement de ce projet – c’est, d’une certaine manière, ce que vous avez énoncé à mots couverts, monsieur le rapporteur.

En particulier, deux réserves sont formulées : outre qu’il est « difficile d’apprécier le bien-fondé des dépenses », la rentabilité du projet ne serait pas forcément suffisante pour atteindre l’équilibre. De surcroît, l’enquête publique déplore « le manque de précision sur le recours aux fonds propres ou à l’emprunt, aux subventions publiques ou européennes ». Nous sommes en plein flou !

Compte tenu de cette opacité du montage financier, nous souhaiterions être sûrs qu’un système de transport aussi inégalitaire – je viens de le montrer – ne sera pas financé par de l’argent public. Ce serait le comble ! Nous n’en sommes qu’au début de la discussion, mais les propos entendus jusqu’à maintenant ne sont pas de nature à nous rassurer.

Par conséquent, le groupe écologiste, dans sa majorité, ne soutient pas ce projet, qui ne permet pas de doter l’Île-de-France d’un système de transport permettant à la fois une desserte aéroportuaire de qualité et des liaisons, directes et omnibus, au bénéfice des Franciliens, des salariés de l’aéroport et des voyageurs. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour le groupe socialiste et républicain.

Mme Nicole Bonnefoy. L’aéroport Roissy-Charles de Gaulle, premier aéroport de France, deuxième d’Europe par sa taille et neuvième à l’échelle mondiale par son trafic, est la principale interface entre la France et le reste du monde, le lieu par lequel transitent la majorité des 15 millions de visiteurs étrangers qui se rendent chaque année à Paris, première destination touristique au monde.

Pourtant, ses accès sont aujourd’hui fortement congestionnés, que ce soit par les autoroutes Al et A3 ou par la ligne B du RER. Les temps de trajet oscillent entre 30 minutes et 1 heure 30, et l’expérience du voyageur, lorsqu’il est dans les embouteillages ou dans le RER bondé, sans espace pour les bagages, en pâtit fortement.

Le projet CDG Express, qui vise à relier directement l’aéroport au centre de Paris en 20 minutes d’ici à 2023, est dès lors nécessaire pour améliorer la qualité du voyage et de l’accueil de nos visiteurs, et donner une image plus moderne de notre pays.

Il s’agit en effet d’un enjeu essentiel pour l’attractivité économique et touristique de l’Île-de-France, d’autant plus que les aéroports européens de même rang en sont déjà tous dotés et que Paris a besoin d’une infrastructure de transport de haut niveau dans la perspective de ses candidatures aux jeux Olympiques de 2024 et à l’Exposition universelle de 2025.

L’enjeu économique est majeur, alors que les projections prévoient un doublement du trafic aérien mondial d’ici quinze à vingt ans et que notre pays s’est donné pour objectif global d’accueillir 100 millions de touristes par an à l’horizon de 2020.

Le secteur du tourisme souffre aujourd’hui énormément du climat lourd que nous connaissons. C’est une donnée que nous avons la responsabilité d’intégrer, puisqu’il s’agit d’un des secteurs clés de notre économie, représentant entre 7 % et 8 % de notre produit intérieur brut et 2 millions d’emplois directs et indirects.

L’amélioration de la qualité de l’accueil des visiteurs est ainsi l’un des axes du travail à accomplir pour soutenir un secteur qui a perdu, en 2016, 1 million de touristes entre les seuls mois de janvier et d’août, et ce malgré l’organisation de l’Euro de football.

Le projet CDG Express s’inscrit en complémentarité avec l’ensemble des autres projets de transports en commun du Grand Paris, notamment la nouvelle ligne 17.

L’amélioration des infrastructures de transports au service des Franciliens des petite et grande couronnes a certes tardé, mais il ne faut pas mettre en concurrence ces deux projets d’infrastructure. Il ne s’agit pas des mêmes financements et ce projet de desserte directe aura également la vertu de soulager le transport routier, ainsi que les transports publics dédiés aux déplacements du quotidien.

Aussi, je tiens à saluer l’accord qui a été trouvé en commission mixte paritaire entre sénateurs et députés pour déboucher sur un texte surmontant, enfin, les difficultés liées aux questions relatives au financement et permettant, enfin, la réalisation de ce projet d’intérêt général.

Je souhaite également ici remercier le secrétaire d’État Alain Vidalies d’avoir accepté, au nom du Gouvernement, de repousser à 2024 – l’annonce en avait été faite au Sénat – la taxe de 1 euro par passager dont devront s’acquitter les compagnies aériennes.

Celui-ci a su entendre les préventions que j’ai formulées sur ce point, en tant que rapporteur pour avis de la mission « Transports aériens », et que nombreux d’autres parlementaires ont tenu à exprimer, parmi lesquels Bruno Le Roux, auteur en 2014 du rapport sur la compétitivité du transport aérien français.

Cette décision est bonne pour aider nos compagnies aériennes à résorber le déficit de compétitivité, coût qui pèse sur elles, et les aider à reconquérir les parts de marché qu’elles méritent au sein de ce marché mondial en forte croissance.

La réalisation du Charles-de-Gaulle Express, couplée à ces importantes mesures, offre ainsi un signal fort en direction de nos compagnies aériennes et de notre secteur touristique, tout en traduisant notre volonté d’améliorer nos infrastructures de transport et l’attractivité de notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour le groupe CRC.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au terme d’une longue procédure législative, les travaux de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle ont été fructueux. Un compromis a été trouvé pour valider ce projet.

Pour notre part, nous considérons celui-ci comme inutile et coûteux.

Ce projet constitue même une véritable provocation, alors que le mois dernier, la galère n’a jamais été aussi pénible pour les usagers de la ligne B du RER et de la gare du Nord. À trois reprises, le 22 novembre, les 6 et 9 décembre, les caténaires ont lâché, plongeant les usagers dans une situation particulièrement inconfortable du fait des retards et annulations de trains. Ces caténaires, paraît-il, dataient de 1946 !

Comment faire comprendre aux populations, aux usagers et aux salariés – les voyageurs du quotidien – que la plus grande urgence serait de financer un projet pharaonique, de l’ordre de 1,69 milliard d’euros, dont ils ne pourraient bénéficier ?

Ce projet CDG Express est conçu et revendiqué pour le seul confort des usagers de l’aérien – enfin, simplement de ceux qui auront les moyens de payer 24 euros un aller simple ! Un tel niveau de tarification, qui se place hors tarification du Syndicat des transports d’Île-de-France, exclut de fait la majorité des Franciliens. Soyons clairs, même lorsqu’ils iront prendre l’avion, ces derniers continueront d’utiliser la ligne B du RER.

Prenons un exemple : ils n’iront pas de la gare de Drancy à la gare du Nord pour prendre, ensuite, le Charles-de-Gaulle Express. Cela leur ferait 15 minutes de la gare RER de Drancy à la gare du Nord, puis 20 minutes jusqu’à l’aéroport Roissy Charles-de-Gaulle par le CDG Express, soit 35 minutes pour 24 euros, au lieu de 25 minutes pour une liaison directe par RER, payée avec le pass Navigo, entre la gare de Drancy et l’aéroport. Telle est la réalité, mes chers collègues.

On nous dit qu’il ne faut pas opposer tous les projets. Mais où sont les financements pour la ligne B du RER, pour la ligne de transport express régional – ou TER – Picardie ou encore pour la ligne K ?

Mme Nicole Bricq. Ils sont inscrits dans les budgets !

Mme Éliane Assassi. Quel pacte d’actionnaires est construit pour, enfin, doubler le tunnel de Châtelet, pour rénover les matériels et les infrastructures – et, donc, les caténaires ?

Chacun se renvoie la balle entre la région et l’État, et les usagers se retrouvent pris en otage de ces règlements de compte politiques.

Nous avons proposé des pistes de financements nouveaux, qui ont été systématiquement refusées au motif qu’ils pesaient sur les entreprises.

Pour autant, nous continuons de penser que l’existence de transports de qualité pour tous est un élément en faveur de notre candidature aux jeux Olympiques. L’attractivité, mes chers collègues, ne se résume effectivement pas à un métro neuf, automatique et direct entre la capitale et l’aéroport.

Nous considérons sur le fond que ce projet, catégorisant les usagers selon leurs destinations et leurs moyens, n’est pas un projet d’intérêt général. Il ne correspond pas à notre conception du service public. Alors que les passagers aériens disposeront d’une offre spécifique sur mesure, les salariés de la plateforme, eux, ne pourront pas, avec leur seul pass Navigo, accéder à cette offre de transport.

Cette situation témoigne d’une vision d’une société à deux vitesses, distinguant les usagers en fonction de leurs moyens de payer ou non le service rendu.

Selon nous, c’est le rôle de l’impôt, sous toutes ses formes, que d’opérer la redistribution nécessaire afin de garantir à chaque citoyen l’exercice de ses droits fondamentaux, dont le droit à la mobilité.

Nous estimons que l’argent public doit servir l’intérêt général. Or l’intérêt général commande de répondre à l’exigence d’une modernisation des conditions de transports des 900 000 usagers de la ligne B du RER.

Inversement, et malgré les assurances données, les travaux engagés pour le Charles-de-Gaulle Express vont clairement détériorer ces conditions déjà pénibles.

Je vous rappelle que, dans son avis rendu public à la fin du mois d’octobre, la commission d’enquête sur ce projet exigeait que soit établie « une grille de circulation confirmant l’absence d’impact sur le fonctionnement des lignes existantes ». Nous ne disposons pas aujourd’hui de ces informations, ce qui nous conduit à confirmer notre opposition à ce projet.

Par ailleurs, le montage du projet, également montré du doigt par la commission d’enquête, reste encore bien opaque et incertain.

Le seul élément nouveau date du 2 novembre dernier et de la discussion du projet de loi de finances rectificative. Il s’agit de la création d’une taxe de 1,40 euro sur chaque billet d’avion, destinée à financer ce projet à l’horizon de 2024. La date d’entrée en vigueur retenue est bien trop tardive pour permettre à cette taxe de remplir l’objectif qui lui a été assigné.

La question du financement de ce projet reste donc entière et devrait nous inciter à la prudence.

Plus globalement, alors qu’aucun financement public ne devait abonder ce projet, selon les termes de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, ou loi Macron, tous les partenaires au pacte d’actionnaires sont des partenaires publics, que ce soit SNCF Réseau, ADP ou encore la Caisse des dépôts et consignations.

La seule question qui a fait débat lors de la commission mixte paritaire était de savoir si ce projet devait s’intégrer, ou non, dans la règle d’or de la trajectoire financière de SNCF Réseau. Un compromis a été trouvé, sur la base du texte du Sénat, qui tente de concilier la réalisation du projet et le respect de la règle d’or.

Pour notre part, nous avons toujours contesté l’existence de cette règle, estimant bien plus urgente la reprise de la dette par l’État plutôt que l’édiction de règles ne visant qu’à autoriser le financement d’infrastructures rentables.

Nos réserves sont encore au moins de trois ordres.

Sous l’angle de l’environnement, à l’heure où l’on fête le premier anniversaire de l’accord de Paris, la préservation des terres agricoles doit être un objectif prioritaire. Pour cette raison, nous ne sommes pas favorables aux procédures d’expulsion d’extrême urgence facilitées par ce projet de loi, qui concernent 25 hectares sur le territoire de la commune de Mitry-Mory.

Par ailleurs les nouveaux tronçons passeront au cœur d’une zone Natura 2000, le parc de la Poudrerie.

Enfin, les habitants de la porte de la Chapelle vont voir leur environnement urbain dégradé.

Ce sont autant de nuisances fortes, qui ont été insuffisamment prises en compte.

D’un point de vue purement économique, pourquoi investir autant alors que ce projet est redondant avec la nouvelle ligne 17 du Grand Paris Express, destinée à relier Pleyel à Roissy ?

Enfin, pourquoi persévérer dans un projet qui n’est pas accepté par les populations ? En effet, lors de l’enquête publique de cet été, seulement 9 % des 705 avis déposés étaient favorables au projet. Tous les élus dont les territoires sont concernés se prononcent contre cette liaison.

Toutes ces raisons nous conduisent une nouvelle fois à voter contre ce projet, qui ne prend pas en compte les besoins prioritaires des Franciliens en matière de fiabilité, de ponctualité, de qualité et de confort des transports.

Ces qualificatifs doivent, non pas évoquer un luxe réservé aux seuls passagers de l’aérien, mais bien rester les attributs du service public pour tous ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Robert Hue, pour le groupe du RDSE.

M. Robert Hue. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les décisions en matière d’infrastructures de transport ne sont pas aisées, notamment lorsqu’il s’agit d’engager de grands chantiers, nécessairement coûteux. Mais une fois son opportunité établie, le projet arrêté doit suivre son cours.

Depuis 1974, l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle connaît une forte croissance de son trafic. Devenu le deuxième aéroport d’Europe, près de 65 millions de passagers y ont transité en 2015. Avec l’aéroport d’Orly, il constitue la porte d’entrée vers d’autres destinations françaises.

Outre les retombées économiques engendrées par l’implantation d’entreprises étrangères, l’aéroport de Roissy Charles-de-Gaulle revêt dès lors un caractère stratégique, la France demeurant en 2015 le pays le plus visité au monde. Cette année-là, le tourisme représentait 7,3 % de notre PIB.

Paris s’étant portée candidate à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et de l’Exposition universelle de 2025, il est impératif d’anticiper la gestion des flux, alors que les transports publics de la région capitale sont déjà saturés.

Aussi, le présent projet de loi ne prétendait pas engager un nouveau débat sur l’opportunité de la future liaison ferroviaire Charles-de-Gaulle Express qui doit relier la gare de l’Est à l’aéroport de Roissy en vingt minutes, toutes les quinze minutes, ce gain de temps et de fiabilité étant considérable.

Il est désormais urgent de fixer le cadre juridique visant à relancer, enfin, la création de cette ligne, dont l’entrée en service est prévue pour 2023. Tel est l’objet du présent projet de loi, que nous examinons une nouvelle fois.

Toutefois rien n’empêche, pendant le temps long de la construction, d’améliorer l’information des usagers, qui est loin d’être suffisante pour des personnes n’ayant jamais pris la ligne B du RER.

Report modal vers le transport ferroviaire, meilleure image de la capitale, confort accru et, surtout, une gestion des flux plus rationnelle, dans un contexte de hausse permanente de la fréquentation de la ligne B du RER : je ne reviendrai pas sur les bénéfices de ce projet, qui ont longuement été débattus.

En première lecture, nous avons regretté l’existence d’une équation à deux inconnues.

Ces deux écueils persistent ou, du moins, les problématiques n’ont pas été totalement résolues. Je veux parler, d’une part, de l’impact de la mise en service de la nouvelle ligne sur les usagers des trains du quotidien et, d’autre part, du financement, que la commission chargée de l’enquête publique a qualifié de « lacunaire ».

S’agissant de la coexistence de deux usages différents sur un même tronçon de la ligne CDG Express, il faut comprendre les craintes rationnelles des usagers de la ligne B du RER.

Aujourd’hui, 870 000 personnes fréquentent quotidiennement cette ligne, et nous connaissons bien les nombreux incidents – quasi quotidiens – survenant toute l’année. Ils sont le résultat direct du sous-investissement chronique, dont les conséquences ont été désastreuses pour notre réseau ferroviaire depuis plus de 30 ans.

En outre, le prix du billet fixé à 24 euros pour un aller simple risque d’être dissuasif, et constitue une réelle préoccupation. Pour une famille, notons-le, il pourrait demeurer plus économique de prendre un taxi. Pour les plus patients, il leur suffirait de payer 10 euros par personne avec la ligne de RER B.

Cela pose donc le problème, à la fois, des effets réels du Charles-de-Gaulle Express sur le désengorgement de la ligne B du RER et du modèle économique de l’exploitation, bien qu’il soit considéré comme rentable.

Comment rendre ce projet plus acceptable ?

Premièrement, il faut s’engager financièrement et durablement dans l’investissement des trains du quotidien, partout en France, mais aussi, et surtout, en région parisienne. C’est une priorité revendiquée par le Gouvernement.

Deuxièmement, il faut être le plus clair possible sur le financement.

Le projet de loi tend à créer une dérogation à la fameuse règle d’or instaurée lors de la réforme de 2014 et visant à maîtriser la dette du gestionnaire du réseau ferré national, qui s’élève à plus de 40 milliards d’euros. Le Sénat s’est vivement inquiété de cette mesure très contestable, adoptée au prétexte que le projet serait rentable.

Le Gouvernement semble avoir entendu une partie de ces préoccupations, notamment celles qui ont été exprimées par les compagnies aériennes, opposées à la taxe sur les billets d’avion de 1,40 euro – auparavant 1 euro – qui a été repoussée à 2024.

Des précisions ont été apportées quant à la répartition du capital de la société de projet : aux 400 millions d’euros prévus pour SNCF Réseau et Aéroports de Paris s’ajoutent désormais 100 millions d’euros d’avances remboursables de la part de ce dernier. Il aurait été souhaitable de connaître, à ce stade, la participation non confirmée, mais néanmoins décisive, de la Caisse des dépôts et consignations.

Mes chers collègues, sans vouloir donner un blanc-seing et conscient, je viens de le dire, des difficultés qu’il reste à surmonter, le groupe du RDSE votera les conclusions de la commission mixte paritaire et permettra ainsi l’adoption de ce projet de loi, très attendu pour le territoire francilien.

M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour le groupe UDI-UC.

M. Vincent Capo-Canellas. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’examen de ce projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle, à l’issue de la commission mixte paritaire, intervient quelques jours après le vote, ici même, au Sénat, d’un article du projet de loi de finances rectificative constatant un accord intervenu sur le financement de ce projet.

L’instauration de cette fameuse taxe sur les billets d’avion, à compter de 2024, a donné lieu à un débat fouillé dans cet hémicycle, et le Sénat a choisi de voter conforme la proposition gouvernementale introduite à l’Assemblée nationale.

Nous avons agi en responsabilité, mes chers collègues, considérant qu’il était temps de mettre un terme au parcours législatif de ce texte et de permettre à ce projet CDG Express, vital pour la France et l’économie francilienne, déterminant en termes d’emplois et d’attractivité pour notre pays, de se concrétiser enfin.

L’heure est venue de bâtir et de trouver une solution à un très vieux problème, pour lequel notre pays est montré du doigt dans le monde entier. La France est effectivement considérée comme l’un des pays les plus difficiles d’accès et le fait que la capitale de notre pays ne soit pas reliée dans de bonnes conditions à son principal aéroport est vécu comme un handicap international.

Nous voici donc parvenus, en tout cas si nous en décidons ainsi – et je le souhaite –, au terme du parcours législatif de ce projet de loi, avec une ratification qui interviendra dans les conditions très clairement rappelées par M. le rapporteur.

L’apport du Sénat a été véritable : en commission, d’abord, Louis Nègre a proposé des amendements sur la durée des expropriations et permis qu’un tiers, en l’occurrence la Caisse des Dépôts et Consignations, puisse intégrer la société de projet ; puis, la commission mixte paritaire, comme l’a très bien rappelé notre rapporteur, a retravaillé un amendement adopté au Sénat, sur ma proposition.

Ce travail d’amélioration, sur l’initiative, notamment, de notre collègue député Philippe Duron, nous a sortis d’un débat financier, certes légitime et complexe, mais qui devait être dépassé afin que l’infrastructure puisse voir le jour.

Je souhaite maintenant que l’on arrive à donner l’impulsion définitive et qu’un très vieux projet, ayant connu de nombreuses vicissitudes, puisse se concrétiser. Ce sera une bonne réforme pour l’attractivité du pays et pour le transport aérien qui, comme cela a déjà été évoqué, traverse une période compliquée, et ce sera aussi une contribution utile du Sénat.

Je tiens à remercier M. le rapporteur, qui a travaillé avec beaucoup d’efficacité et de rectitude. Il a accepté que la commission mixte paritaire aboutisse à des conclusions qui n’étaient pas nécessairement les plus simples, compte tenu de la règle d’or s’imposant à SNCF Réseau. Un débat complexe a dû être mené. Je salue toute l’élégance dont Louis Nègre a fait preuve, et qui a permis le consensus. Il n’est pas si courant qu’un rapporteur sache si bien privilégier l’intérêt général.

M. Antoine Lefèvre. C’est vrai !

M. Vincent Capo-Canellas. Après le vote du Sénat, il faudra entrer dans le concret. Avec la création d’une taxe dédiée en 2024, avec les apports l’ADP et de SNCF Réseau, qui ont été bien calculés, on arrivera, demain, à franchir une étape attendue depuis longtemps.

Bien sûr, tous les problèmes ne sont pas résolus. Demain, il faudra redoubler d’attention pour les transports du quotidien. Le CDG Express accroîtra la robustesse du RER B. Cet apport sera-t-il suffisant ? C’est toute la question. Il y a quelques instants, Éliane Assassi a évoqué les grandes difficultés auxquelles les Franciliens, les usagers du RER B et ceux de la gare du Nord notamment, ont fait face une nouvelle fois il y a une dizaine de jours. Nous devrons faire preuve de la même attention et de la même inventivité pour franchir, au sujet des transports du quotidien, des étapes désormais indispensables : ce réseau ne peut pas rester dans l’état où il se trouve.

Néanmoins, nous avons opté pour la logique suivante : ne pas diviser nos efforts, afin de ne pas empêcher ce projet d’avancer, ce qui aurait été bien dommage.

Certains ont avancé que le CDG Express entrerait en concurrence avec la ligne 17. Toutefois, pour se rendre à Roissy depuis la ligne 17, il faudra changer de quai à Saint-Denis-Pleyel, puis attendre neuf stations. Les deux infrastructures ne se concurrenceront donc pas l’une l’autre : elles n’ont pas du tout le même objet. Le CDG Express permet une liaison directe de point à point en vingt minutes.

Nous vivons dans un monde de compétition, marqué par une grande complexité sur les plans administratif et financier. C’est une chance pour la France de relever ces défis. La construction de cette infrastructure mettra fin à « une anomalie » – je cite le rapport initial rédigé par Louis Nègre. M. le rapporteur l’a très bien expliqué : il était impératif de surmonter tous les handicaps auxquels ce projet pouvait se heurter.

L’un de ces handicaps était tout à fait singulier : l’article 2 de la loi relative au Grand Paris disposait que ce chantier ne ferait pas l’objet de financements publics. C’est là qu’a résidé toute la difficulté du montage financier.

De plus – Louis Nègre l’a très clairement rappelé –, il fallait tenir compte des spécificités de SNCF Réseau.

Toutefois, ces différentes difficultés ont pu être surmontées. Pour ma part, je m’en réjouis.

La contribution d’Aéroports de Paris et celle, demain, de la Caisse des dépôts méritent d’être saluées, de même que celle de SNCF Réseau. L’ensemble de ces ressources doit permettre de financer un projet qui s’établira, peu ou prou, à 1,4 milliard d’euros. Sur ce front, une étape reste à franchir : permettre la mobilisation des financements bancaires.

À cette fin, il fallait que le projet soit valide au regard de l’ordonnance, ce qui sera le cas si le Sénat vote conforme les conclusions de la commission mixte paritaire. Il fallait également que ce texte soit valide au titre du financement.

La conjonction du présent texte et du projet de loi de finances rectificative, dont le Sénat a achevé l’examen samedi, est tout à fait positive : nous allons ainsi – je l’espère –, résoudre le problème du véhicule législatif et celui du financement.

Hier, l’Assemblée nationale a voté conforme les conclusions de la présente commission mixte paritaire. Je souhaite que le Sénat en fasse de même. Au cours des prochains jours, nous verrons quel est le destin du collectif budgétaire. Nous convergeons d’ores et déjà avec nos collègues députés sur ce point. Il faut maintenant que l’Assemblée nationale vote l’ensemble du projet de loi de finances rectificative.

Mes chers collègues, au titre de ce collectif budgétaire, le Sénat a voté diverses dispositions relatives à la taxe de solidarité, en particulier à propos du fameux écrêtement permettant d’abonder le budget de l’État. D’autres mesures de compétitivité devront s’y ajouter demain. C’est là un travail qui nous attend.

Quoi qu’il en soit, je tiens à remercier de nouveau M. le rapporteur et les autres membres de la commission mixte paritaire d’avoir permis ces avancées ! (M. Loïc Hervé applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Christian Manable, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Christian Manable. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, dans le prolongement immédiat de nos débats relatifs au CDG Express, chantier dont je souligne à mon tour l’urgence et l’intérêt, j’attire votre attention sur l’opportunité de la nouvelle liaison ferroviaire entre Roissy et Creil, et, au-delà, vers Amiens et la Picardie. Je rappelle que, parmi les capitales des anciennes régions françaises, Amiens était la seule à ne pas être desservie par le TGV.

Avant la déclaration d’utilité publique modificative du CDG Express, et dans le cadre de la prochaine enquête publique du projet Picardie-Roissy, je tiens à vous soumettre quelques propositions et quelques questions sur ces deux sujets qui sont nécessairement liés, ne serait-ce que géographiquement.

La liaison Picardie-Roissy est d’intérêt stratégique pour notre région des Hauts-de-France. Pour la Picardie, la côte d’Opale et le Boulonnais, l’enjeu est d’être relié à la gare de Roissy, qui est un nœud de transports essentiel. Il s’agit là d’un carrefour national, européen et même international des liaisons rapides.

Un autre enjeu réside dans l’influence de la zone d’activité de Roissy, qui s’étend sur le sud de la Picardie et sur l’est du Val-d’Oise. Ce projet de liaison ferroviaire permettrait d’offrir, à l’automobile, une solution de substitution solide au titre des trajets domicile-travail.

Je suggère donc que l’enquête publique Picardie-Roissy traite de la question de la desserte intermodale de la zone d’activité de Roissy à partir de la Picardie et du Val-d’Oise. Je souhaite également que ce document aborde les possibilités d’accès à Paris via le hub ferroviaire de Roissy, notamment en tenant compte de la liaison directe Roissy-Paris, dont nous nous apprêtons à confirmer la réalité juridique.

Mes chers collègues, il s’agit donc d’étudier l’opportunité de la coordination du barreau Creil-Roissy, avec la liaison du CDG Express, en éclairant son impact sur les déplacements pendulaires et sur l’accès à Paris intra-muros.

Dans ce cadre, plusieurs questions se posent.

Tout d’abord, comment inclure le CDG Express et la ligne Picardie-Roissy dans une démarche plus globale de la desserte de la plateforme aéroportuaire pour les transports collectifs ?

Ensuite, le CDG Express peut-il constituer une nouvelle entrée ferroviaire de Paris pour les usagers des autres modes de transport collectif ?

De plus, comment assurer une interface entre la future liaison Picardie-Roissy et le CDG Express ?

Enfin, le CDG Express ne peut-il pas être un second et nouvel accès des TER picards à Paris, tout en offrant une desserte rapide de l’aéroport et en soulageant le RER B ?

À ma connaissance, ces questions n’ont été ni posées ni traitées dans le cadre de l’enquête publique qui vient de s’achever au titre du CDG Express.

La construction d’une voie nouvelle entre Creil et Roissy vise trois cibles : accéder à la gare TGV, desservir la zone d’activités à partir de la Picardie et du Val-d’Oise et desserrer les accès à la gare du Nord, à Paris.

Aussi, au nom du collectif transpartisan d’élus picards, que j’anime dans le département de la Somme, je demande que soient étudiées, de manière urgente, la complémentarité et la coopération entre le CDG Express et la voie nouvelle Picardie-Roissy. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Yves Daudigny. Très bien ! Merci pour la Picardie !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je serai très bref, car je ne tiens pas à prolonger nos débats outre mesure.

Tout d’abord, je salue la qualité des diverses interventions, qui témoigne de l’importance du travail parlementaire mené par les membres de la Haute Assemblée, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent.

Ensuite, je tiens à vous apporter quelques éléments de réponse en complément de mon propos liminaire.

Au cours de la discussion générale, plusieurs orateurs sont revenus sur les modalités de ce projet. Je vous en ai déjà indiqué les principaux aspects. Je n’y reviens donc pas.

Les problèmes qu’a connus le RER B les 6 et 7 décembre dernier ont été mentionnés.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des transports, a demandé à la SNCF qu’une enquête soit menée afin que toute la lumière soit faite sur ces incidents.

Mme Éliane Assassi. C’est pourtant simple, il faut remplacer les caténaires !

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. Les conclusions de cette enquête ont été rendues publiques le 16 décembre dernier. Il apparaît que les trois incidents survenus sont indépendants les uns des autres. Selon toute vraisemblance, ils ne seraient pas liés à un défaut de maintenance.

Mme Éliane Assassi. Des caténaires de 1946 !

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. Tel est, en l’état actuel, le résultat des investigations menées.

Une autre interrogation a porté sur la liaison Picardie-Roissy. Elle ne relève pas directement du présent texte, et je ne m’y attarderai donc pas.

Toutefois, monsieur Manable, je connais l’attention toute particulière que vous portez à ce dossier. Bien sûr, M. le secrétaire d’État aux transports est à votre disposition, pour continuer à travailler la question avec vous et avec les membres du collectif que vous animez.

En outre, de nombreuses interventions ont appelé l’attention sur le lien entre le CDG Express et les trains du quotidien. Il s’agit là d’une question majeure et absolument légitime.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je le répète au nom du Gouvernement : ce projet ne doit rien ôter aux trains du quotidien ni aux usagers qui les empruntent. Des investissements sont d’ailleurs déployés sur l’ensemble du réseau.

Le projet spécifique du Charles-de-Gaulle Express, qui est essentiel, en particulier pour l’attractivité touristique et le rayonnement de notre pays, représente un enjeu majeur pour les infrastructures globales de la région d’Île-de-France.

Cela étant, les trains du quotidien constituent la priorité du Gouvernement, et ce ne sont pas que des mots : à preuve les engagements financiers qui ont été pris et que nombre d’entre vous ont appuyés de leur vote.

À l’été 2013, le RER B a bénéficié d’un premier investissement 500 millions d’euros. Les gains de ponctualité sont déjà observés, …

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. … même s’ils sont encore insuffisants.

Le travail se poursuit, en lien avec le STIF et l’ensemble des collectivités territoriales concernées, dans le cadre d’un nouveau schéma directeur. Ce document fixe des investissements à hauteur de 1 milliard d’euros en faveur des infrastructures et de plus de 1,5 milliard d’euros pour le renouvellement des rames. Le contrat de plan État-région 2015-2020 assure déjà le financement des premiers projets conçus dans ce cadre.

Enfin, en cas de perturbations, l’engagement du Gouvernement est clair : les trains du quotidien seront prioritaires.

Une nouvelle fois, je salue la qualité du travail accompli au sein de la Haute Assemblée, que ce soit par M. le rapporteur ou par les sénatrices et sénateurs qui se sont impliqués sur ce dossier. Comme le laissent supposer les propos des uns et des autres, ce projet bénéficiera, à défaut de l’unanimité, d’un vaste consensus ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La discussion générale est close.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, le Sénat, lorsqu’il examine après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :

projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre paris et l’aéroport paris-charles de gaulle

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Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle
Article 1er ter

Article 1er bis

(Texte de la commission mixte paritaire)

Après le premier alinéa du I de l’article L. 2111-3 du code des transports, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les troisième à cinquième alinéas de l’article L. 2111-10-1 ne sont pas applicables à la participation de SNCF Réseau au financement de la société mentionnée au premier alinéa du présent I, dès lors que cette participation est rémunérée dans les conditions définies au VI du présent article. »

Article 1er bis
Dossier législatif : projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle
Article 1er quater (début)

Article 1er ter

(Texte du Sénat)

Le 3° du IV de l’article L. 2111-3 du code des transports est abrogé.

Article 1er ter
Dossier législatif : projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle
Article 1er quater (fin)

Article 1er quater

(Texte du Sénat)

Au second alinéa de l’article 2 de l’ordonnance n° 2016-157 du 18 février 2016 relative à la réalisation d’une infrastructure ferroviaire entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle, les mots : « au plus tard le 31 décembre 2017 » sont remplacés par les mots : « dans le délai de validité de l’acte déclarant d’utilité publique la réalisation de cette infrastructure ferroviaire ».

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M. le président. Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je vais mettre aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle.

(Le projet loi est adopté définitivement.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

Article 1er quater (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle
 

7

Hommage aux victimes d'un attentat à Berlin

M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les membres du Gouvernement, mes chers collègues, Berlin a été frappé hier par une terrible attaque meurtrière, dont le caractère d’attentat terroriste a été confirmé par Mme la chancelière Angela Merkel. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le Premier ministre et Mmes et MM. les membres du Gouvernement, se lèvent.)

Au cours de la soirée d’hier, un camion a fondu sur la foule d’un marché de Noël du centre-ville de Berlin. Le bilan humain est très lourd : douze morts et quarante-huit blessés.

Au nom du Sénat de la République française, je souhaite, en votre nom à tous, exprimer notre solidarité aux victimes ainsi qu’à leurs familles, et présenter nos très sincères condoléances au peuple allemand, qui est durement éprouvé.

Après les attentats qui ont frappé de nombreuses villes en Europe et dans le monde – Paris, Bruxelles, Ankara, ou encore Nice –, l’attaque d’hier nous rappelle une nouvelle fois que le terrorisme ne connaît pas de frontières. Il menace en particulier l’Europe dans ses valeurs de liberté et de tolérance, de même que dans ses traditions. Les marchés de Noël sont le symbole des cultures allemande et alsacienne, qui sont au cœur de la construction européenne.

Afin de préserver leurs valeurs, la France, l’Allemagne et l’Europe doivent, ensemble, poursuivre sans relâche la lutte contre le terrorisme. Les événements d’hier nous rappellent à notre devoir de vigilance, d’unité et de détermination.

La parole est à M. le Premier ministre.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, M. le président du Sénat vient de le rappeler : hier soir, l’Allemagne a été frappée au cœur par un attentat terroriste qui, comme tous ceux qui l’ont précédé, s’est caractérisé par sa violence, son abjection et sa lâcheté.

Au nom du gouvernement français, je tiens à dire à mon tour toute la solidarité de notre pays, de notre nation rassemblée, envers les victimes et leurs familles.

Au gouvernement allemand qui, comme le nôtre, est en première ligne dans la lutte antiterroriste, j’exprime notre solidarité et notre compassion. Je réaffirme également notre détermination à agir en Europe, notamment avec lui, pour lutter avec la plus grande fermeté contre le terrorisme.

Notre pays lui-même – chacun l’a bien à l’esprit –, a été frappé au cours des derniers mois. Nous avons pleuré nos morts. Nous avons vécu des moments d’intense recueillement. Aujourd’hui, c’est l’Allemagne qui est plongée dans le chagrin.

Lorsque la France a été touchée, la chancelière allemande et ses ministres se sont rendus à Paris pour nous témoigner leur solidarité. Ils nous ont rappelé que, dans l’épreuve, nous étions frères, et que rien ne pouvait altérer notre détermination à gagner la guerre contre le terrorisme. Par leurs gestes et par leurs paroles, ils ont été présents à nos côtés.

Aujourd’hui, nous devons au gouvernement allemand cette présence, cette fraternité et cette solidarité.

M. le président du Sénat l’a dit avec beaucoup de justesse : nous devons également faire en sorte que la relation franco-allemande, qui compte tant quand l’essentiel est en jeu en Europe – et la lutte contre le terrorisme renvoie à l’essentiel –, soit plus forte qu’elle ne l’a jamais été, ce qui est d’ores et déjà le cas.

Nous devons multiplier les initiatives, dans la continuité de celles que nous avons déjà prises, pour que le continent européen soit mieux protégé ; pour que les frontières extérieures de l’Union européenne soient davantage contrôlées ; pour que l’agence FRONTEX monte en puissance ; pour que les fichiers criminels soient connectés les uns avec les autres et alimentés par l’ensemble des services de renseignement ; et pour que nous puissions lutter efficacement contre le trafic d’armes. Je me réjouis qu’un accord ait été conclu entre les différentes institutions de l’Union européenne, afin que, face à ce fléau, l’Europe instaure un contrôle beaucoup plus efficace.

Lorsque l’essentiel est en jeu en Europe, la France et l’Allemagne sont ensemble. Les frontières nous ont longtemps séparés. S’y sont souvent adossées des guerres qui ont opposé et endeuillé nos deux nations. Mais ces conflits renvoient à une histoire lointaine.

Désormais, lorsque les épreuves frappent, la France et l’Allemagne ne forment plus qu’un seul et même pays. Elles sont ensemble, en Europe, pour défendre les valeurs de solidarité et de fraternité, qui sont précisément celles des pères fondateurs de l’Union européenne.

M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les membres du Gouvernement, mes chers collègues, je vous invite à présent à observer un instant de recueillement, en hommage aux victimes de cette tragédie et par solidarité envers nos amis allemands.

(Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le Premier ministre et Mmes et MM. les membres du Gouvernement, observent une minute de silence.)

8

Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat, ainsi que sur le site internet du Sénat.

Je rappelle que l'auteur de la question dispose de deux minutes, de même que la ou le ministre pour sa réponse.

J’invite les uns et les autres à bien vouloir respecter leur temps de parole.

politique du gouverneur de la banque de france

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour le groupe du RDSE.

M. Pierre-Yves Collombat. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, après vos paroles, mes propos vous sembleront peut-être un peu légers. Néanmoins, à y regarder de près, tout se tient.

Il y a quelques jours, M. Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, s’est invité dans la campagne présidentielle pour rappeler aux candidats que « l’accélération de la croissance française ne pouvait venir d’une relance budgétaire, et que ce serait bercer les électeurs d’illusions que de le laisser croire ».

Ma question est la suivante : selon vous, entre-t-il dans les missions du gouverneur de la Banque de France, autorité en principe indépendante, de monter sur les tréteaux électoraux ? Est-il normal qu’il définisse, en lieu et place des électeurs, les programmes économiques qui seraient bons pour la France et ceux qui ne le seraient pas ? (Applaudissements sur quelques travées du RDSE et sur les travées du groupe CRC. – M. André Gattolin applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Monsieur le sénateur, on peut toujours porter une appréciation sur de tels sujets. Toutefois, le goût du débat, de la confrontation des points de vue, et l’opportunité que donne toujours la parole d’une autorité éminente pour justifier une réponse qui doit avoir une précision absolue doivent l’emporter sur toute autre considération.

Vous évoquez les propos qu’a tenus le gouverneur de la Banque de France. À ce sujet, permettez-moi de rappeler quelques éléments simples.

Tout d’abord, en vertu de l’article 20 de la Constitution, c’est le Gouvernement qui conduit la politique de la Nation. En conséquence, c’est lui qui définit les politiques budgétaire et économique.

Bien entendu, nous agissons dans un cadre européen, dont nous tenons grand compte et qui nous lie à nos partenaires. Ce cadre permet de renforcer les atouts du marché intérieur soient renforcés. Toutefois, il n’annihile pas toute liberté, pour un gouvernement, de déterminer le chemin qu’il souhaite pour l’économie de son pays et de fixer les objectifs qu’il entend voir prévaloir en matière de croissance.

Notre politique est très claire. Son premier but est que l’assainissement des comptes puisse se poursuivre. Voilà maintenant plusieurs années que notre pays connaît une diminution de son déficit budgétaire. Cette baisse fait l’objet de discussions, au sein de la Haute Assemblée, lors des débats budgétaires.

La majorité sénatoriale, et c’est son rôle – je ne le conteste pas –, estime que la réduction des déficits n’est pas assez rapide au regard des objectifs que nous devrions nous assigner. De notre côté, nous rappelons que les déficits baissent de manière incontestable. Ils reculent à un rythme que nous déterminons nous-mêmes, de sorte que l’assainissement des comptes ne remette pas en cause les objectifs de croissance.

À cet égard, quels sont les résultats ? Le déficit budgétaire s’élevait à un peu plus de 5 % : pour 2017, nous l’avons réduit à un peu moins de 3 %. Le déficit du régime général de la sécurité sociale est passé de 17 milliards d’euros à environ 400 millions d’euros.

Mme Pascale Gruny. Et le Fonds de solidarité vieillesse ?

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Parallèlement, le taux de croissance a progressivement repris un peu de vigueur,…

Mme Catherine Troendlé. Bref, tout va bien !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. … même si nous devons encore conforter les atouts de notre économie.

Nous avons fait des efforts considérables en faveur des entreprises ; leur taux de marge a gagné deux points ; le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, a permis 40 milliards d’euros d’efforts pour le rétablissement de la compétitivité des entreprises ; l’investissement industriel augmente de 3,4 % et affiche ainsi une progression trois fois plus forte qu’il y a trois ans ; dans le secteur industriel, 240 000 emplois ont été créés au cours des dix-huit derniers mois. (Brouhaha sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

Nous avons l’intention de poursuivre ces efforts pour que l’économie de notre pays continue à se redresser.

Monsieur le sénateur, voilà qui devrait être de nature à rassurer…

M. François Grosdidier. Mais bien sûr !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. … tous ceux dont vous venez d’évoquer la pensée noble et élevée ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour la réplique.

M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le Premier ministre, c’est donc le Gouvernement qui mène la politique économique de la France. Me voilà rassuré ! Mais là n’était pas ma question… (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. En tout cas, c’était ma réponse ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Pierre-Yves Collombat. Certes ! Mais on observe de plus en plus souvent que des autorités nommées, dépourvues de toute légitimité démocratique, s’arrogent le droit de dire aux représentants du peuple, voire au peuple lui-même, ce qu’il faut faire ou ne pas faire. Les propos que j’ai cités précédemment se résument ainsi : « Mesdames les électrices, messieurs les électeurs, surtout, ne croyez pas que l’on puisse faire une autre politique que la politique de restrictions menée depuis des années. »

M. Pierre-Yves Collombat. Or, pour paraphraser Clemenceau, j’estime que l’économie est une chose trop grave pour être confiée à des financiers ! (Très bien ! et applaudissements sur plusieurs travées du RDSE, sur quelques travées du groupe écologiste et sur les travées du groupe CRC.)

calendrier de mise en œuvre des plans d’action pour les espèces menacées

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour le groupe écologiste.

M. Ronan Dantec. Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement.

Chaque année, BirdLife International actualise la liste rouge des oiseaux menacés dans le monde (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.). En 2016, 1 460 espèces sont concernées, soit 13 % de l’avifaune mondiale.

La France figure parmi les pays qui comptent le plus d’espèces d’oiseaux mondialement menacées. Onze nouvelles espèces y sont désormais menacées, quatorze sont en danger critique d’extinction, dont – vous le savez tous ! – le râle de Lafresnaye ou le martin-chasseur des Gambier. Vingt-six autres sont en danger.

La loi du 9 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité prévoit – c’est une avancée ! – que, pour les espèces endémiques identifiées comme étant en danger critique ou en danger dans la liste rouge nationale des espèces menacées établie selon les critères de l’Union internationale pour la conservation de la nature, les plans nationaux d’action pour la conservation ou le rétablissement des espèces seront élaborés avant le 1er janvier 2020.

Monsieur le secrétaire d’État, six mois après l’adoption de la loi sur la biodiversité, et alors que les scientifiques nous alertent maintenant sur l’extrême urgence d’une action concertée pour sauver ces espèces, pouvez-vous nous indiquer précisément le calendrier d’élaboration et de mise en œuvre des plans d’action arrêtés par l’État pour les espèces concernées ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement.

M. André Vallini, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur Dantec, l’état de conservation de certaines espèces nécessite des actions spécifiques pour restaurer leur population et leurs habitats. Les plans nationaux d’action ont donc quatre objectifs : organiser le suivi de ces populations ; définir des actions coordonnées favorables à la restauration de l’espèce ou de son habitat ; prévoir l’information des acteurs et du public ; faciliter l’intégration de la protection des espèces dans les activités humaines et dans les politiques publiques.

Une soixantaine de plans sont actuellement mis en œuvre, au bénéfice de plus de 200 espèces parmi les plus menacées. Certains sont déjà achevés et ont obtenu de très bons résultats. De nouveaux plans ont été lancés récemment ou sont en cours d’élaboration, notamment ceux qui concernent le milan royal ou le vautour fauve. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)

La loi pour la reconquête de la biodiversité de la nature et des paysages de 2016 prévoit l’établissement, d’ici à 2020, de plans nationaux d’action pour les espèces endémiques sauvages en danger critique ou en danger, selon les critères de l’Union internationale pour la conservation de la nature. Une première tranche débutera dès 2017.

L’État intervient dans la mise en œuvre de ces plans par des actions d’initiation de coordination et de financement, en partenariat avec les collectivités locales et les fonds européens.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, le Gouvernement accorde la plus grande importance à ces espèces menacées de disparition et nous faisons tout pour les protéger. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour la réplique.

M. Ronan Dantec. En ce qui concerne le calendrier précis, il me semble qu’un certain flou subsiste…

Vous avez cité deux espèces métropolitaines. J’insiste, l’un des grands enjeux de cette question concerne les espèces endémiques des territoires ultramarins, pour lesquelles il n’existe pas encore de plan d’action. (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)

J’espère que ce message est passé et que vous le transmettrez au ministère de l’environnement.

J’entends quelques grondements dans les travées de droite. Un certain nombre d’espèces endémiques, comme des batraciens, dans le nord de la France, sont aujourd’hui menacées par de très fortes baisses de subventions pour les associations de protection de l’environnement dans les régions tenues par la droite. C’est aussi un enjeu de biodiversité ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

hausse du smic

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour le groupe CRC.

Mme Laurence Cohen. Ma question s’adresse à Mme la ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

À la veille de Noël, madame la ministre, pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous ne voulez pas augmenter le SMIC, alors que des pays voisins comme l’Allemagne, la Grande-Bretagne ou l’Espagne l’ont fait ?

Les faits sont têtus : vous avez décidé seulement d’une progression mécanique de 9 centimes du SMIC horaire. C’est lamentable ! On sait que le dernier coup de pouce donné au SMIC remonte à juillet 2012, c’est-à-dire au lendemain de l’élection de François Hollande. Pouvez-vous justifier une telle position ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail.

Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Cohen, en effet, hier, devant Commission nationale de négociation collective, ou CNNC, après avoir pris l’avis de l’ensemble des organisations syndicales et patronales, le Gouvernement a décidé de mettre en œuvre la revalorisation légale du SMIC, de 0,93 %, comme cela était préconisé par le groupe des experts.

Nous avons pris cette décision parce que nous avons choisi une autre voie pour améliorer la situation des travailleurs les plus précaires de notre pays, ceux dont les revenus sont les plus modestes. Nous avons privilégié deux leviers. Le premier est fiscal ; c’est le sens de la politique de baisse massive de la fiscalité des travailleurs les plus modestes que nous avons menée. Elle concernera près de 5 millions de foyers l’an prochain.

Mme Annie David. Ces foyers ne paient pas d’impôt !

Mme Myriam El Khomri, ministre. Le deuxième levier essentiel est la prime d’activité. Nous avons fait le choix de ce dispositif, qui permet d’améliorer concrètement le pouvoir d’achat des salariés au SMIC. Dans le secteur privé, cela concerne 1,6 million de travailleurs.

Nous avons reconduit ce dispositif, car nous sommes attentifs à la situation des entreprises. Nous savons qu’une revalorisation du SMIC concerne à 45 % des travailleurs dans de toutes petites entreprises. Nous avons donc pris en compte cette réalité.

Depuis la mise en place de la prime d’activité au 1er janvier 2016, une personne touche en moyenne 165 euros par mois. Pour un célibataire, cela représente presque un treizième mois net d’impôt, pour un parent isolé près de 300 euros par mois.

J’ai tout à fait conscience d’une difficulté concernant le taux de recours. Toutefois, alors que le taux de recours au RSA activité n’est que de 30 %, il atteint 60 % pour la prime d’activité. Quatre personnes sur dix pourraient en bénéficier et la percevoir.

Telle est la politique que nous avons menée pour améliorer, notamment, le pouvoir d’achat des travailleurs les plus modestes.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la réplique.

Mme Laurence Cohen. Comme à votre habitude, madame la ministre, vous répondez à côté de la question, et vous argumentez comme vous le faisiez quand vous cassiez le droit du travail, en vous plaçant dans un autre monde !

Pour rappel, le SMIC est fixé à 1 153 euros par mois. Comment se loger, se nourrir, éduquer ses enfants, avoir des loisirs, se déplacer avec un tel revenu ? Au total, toutes tailles d’entreprise confondues, 12 % des salariés, soit deux millions de personnes, sont rémunérés au SMIC. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Annie David. Eh oui ! C’est la vérité !

Mme Laurence Cohen. Cette population regroupe des personnes fortement fragilisées, notamment beaucoup de femmes, et des jeunes.

De l’autre côté, les rémunérations des dirigeants du CAC 40 galopent ! (Exclamation sur les travées du groupe Les Républicains.) Ils gagnent des milliards d’euros. Ces montants sont indécents et votre refus d’augmenter le SMIC l’est tout autant.

Depuis le début de ce quinquennat, vous avez dilapidé des milliards d’euros en crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, ou CICE, en crédit impôt recherche, ou CIR., sans effet.

Alors, madame la ministre, permettez-moi, de vous donner un conseil sous la forme d’une proposition susceptible de permettre une augmentation du SMIC : mettez un terme à ces dispositifs inefficaces et luttez contre l’évasion fiscale, vous pourrez ainsi augmenter le SMIC de 23 %, c’est-à-dire le porter à 1 400 euros par mois, puis, dans un second temps, à 1 700 euros. C’est la proposition de notre groupe et de notre famille politique et je suis convaincue qu’elle est partagée par la majorité des Françaises et des Français.

M. Philippe Dallier. C’est pour cela que vous êtes majoritaires…

Mme Laurence Cohen. C’est cela, une vraie politique de gauche, efficace et sociale ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

attentat à berlin et lutte contre le terrorisme (I)

M. le président. La parole est à M. Michel Boutant, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Michel Boutant. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, l’attentat commis hier soir à Berlin est un événement tragique. Je veux dire ici l’horreur qu’il m’inspire et la tristesse que nous partageons avec nos amis allemands.

Après Madrid, Londres, Bruxelles, Paris, Nice, mais aussi Ankara, Djakarta et bien d’autres villes encore, c’est le cœur de l’Allemagne, sa capitale, qui a été visé sur un marché de l’avent, cette période durant laquelle on fête le retour espéré de la lumière.

C’est l’obscurantisme qui a frappé, avec un mode opératoire rappelant l’attentat de Nice du 14 juillet dernier – survenu un jour de fête, également – : un camion lancé dans la foule pour tuer et s’en prendre à des symboles.

Dans le climat de tension que connaît l’Allemagne à propos de la question des réfugiés, cet attentat a une portée considérable. Après avoir provoqué de la stupéfaction, du chagrin et de l’indignation, il soulève beaucoup de questions, en Allemagne, mais aussi chez nous, où se déroulent de nombreuses manifestations avant les fêtes de Noël et de fin d’année.

Nous savons tous ici, monsieur le Premier ministre, les mesures que vous avez prises comme ministre de l’intérieur à la suite des attentats de janvier et de novembre 2015 et de juillet 2016 : le recrutement de gendarmes et de policiers ; le renforcement de Vigipirate ; le déploiement de l’armée, avec l’opération sentinelle ; la constitution d’une garde nationale ; et toutes les opérations lancées par le chef de l’État à l’extérieur du pays.

Pouvez-vous nous dire, monsieur le Premier ministre, si les mesures prises dans notre pays permettent à toutes les manifestations en cours ou prévues de se tenir ou si celles-ci doivent être annulées ?

Dans la mesure où c’est l’Europe de l’Ouest tout entière, et même davantage, qui est dans le viseur des intégristes, le travail de coopération entre les services de sécurité et de renseignement de tous ces pays donne-t-il aujourd’hui satisfaction ? Est-il efficacement et sincèrement organisé ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Monsieur le sénateur Boutant, vous m’interrogez sur les mesures qui doivent être prises, qui ont été prises, qui pourraient être prises, compte tenu du très haut niveau de menace auquel notre pays et l’Union européenne se trouvent confrontés. La tragédie de Berlin doit nous amener à en faire un constat lucide.

Avec le Président de la République, nous avons souvent évoqué le niveau de menace très élevé auquel la France doit faire face. Il se traduit d’ailleurs par l’intensité de l’activité des services de renseignement. Depuis le début de l’année, près de 430 personnes ont été interpellées et fait l’objet d’une procédure judiciaire en raison des liens qu’elles entretenaient avec des réseaux terroristes et en raison du risque qu’elles représentaient pour la sécurité de notre pays.

Dix-sept attentats ont été évités depuis le début de l’année 2016. En 2013, un attentat avait été évité, quatre en 2014, sept en 2015. On voit bien la progression considérable de la menace et de l’activité des services de renseignement pour y faire face.

Je veux rendre hommage à ces services, comme à l’ensemble de nos forces de sécurité intérieure pour leur mobilisation exceptionnelle pour protéger nos concitoyens du risque terroriste.

Que devons-nous faire ? Nous devons d’abord conforter ce que nous avons déjà engagé. Nous avons voté plusieurs lois antiterroristes et une loi sur le renseignement, qui contiennent des mesures que nous n’avions pas à notre disposition, pour nous permettre d’être efficaces face à la menace terroriste. Il s’agit de l’interdiction administrative des sites internet qui appellent ou provoquent au terrorisme ; de l’interdiction de sortie du territoire ; de l’interdiction de retour sur le territoire pour ceux de nos compatriotes qui ont été engagés dans les zones de combats dès lors qu’ils disposent de la double nationalité. Bref, nous faisons tout cela.

Nous avons également décidé de mettre en place l’incrimination pour entreprise individuelle terroriste, de manière à mieux cibler ceux qui ne sont pas en lien avec des groupes, mais peuvent passer à l’acte tous seuls. C’est ce que l’on appelle la menace endogène.

Nous avons aussi conforté considérablement les moyens de nos services de renseignement. Avec l’Allemagne, nous avons multiplié les chantiers européens : nous avons fait aboutir le PNR, ou Passenger Name Record ; nous avons engagé la réforme du code Schengen avec l’article 7–2 du code frontière ; nous avons fait monter en puissance FRONTEX ; nous avons décidé de réformer le système d’information Schengen, le SIS, que nous avons demandé aux services de renseignement d’alimenter afin de garantir le bon échange des informations entre les services de l’Union européenne ; nous avons connecté les fichiers criminels. Nous avons donc multiplié les initiatives sur le plan européen pour être davantage efficaces.

Tout cela doit s’amplifier et s’approfondir. Nous devons chaque jour aller plus loin en Europe, parce que l’Europe n’est pas un problème dans la lutte antiterroriste, c’est une solution ! Pour aboutir, l’axe franco-allemand doit jouer un rôle déterminant.

Au moment où se déroulent les marchés de Noël, les fêtes de fin d’année, il faut que les Français sachent que, depuis de nombreux mois, des instructions été données pour que la mobilisation des forces sécurité intérieure soit totale.

Aujourd’hui, presque tous les effectifs de sécurité publique sont, dans les villes, mobilisés dans la lutte contre les organisations criminelles et le terrorisme. Soixante-dix unités de forces mobiles assurent chaque jour le contrôle aux frontières et la protection des marchés de Noël et des grands événements, qui doivent susciter la plus grande vigilance de la part des autorités locales de l’État, notamment des préfets de zone et des préfets de département et de région, mais aussi des collectivités locales.

J’ai demandé au ministre de l’intérieur, qui l’a fait dès hier, de rappeler par circulaire que toutes les mesures que nous avons déjà prises et qui nous mettent à haut niveau d’engagement nos forces doivent être confortées, que la vigilance doit être absolue et l’attention constante, pour assurer dans cette période particulière la protection de nos concitoyens.

Cette mobilisation, si elle est totale, ne garantit pas le risque zéro. On connaît les modalités de passage à l’acte et nous devons rester conscients et lucides. L’absence de mobilisation ouvrirait notre pays à tous les risques, mais toute la mobilisation ne garantit jamais le risque zéro. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)

conséquences sur la santé de la pollution dans la vallée de l’arve

M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour le groupe UDI-UC.

M. Loïc Hervé. Ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Madame la ministre, cet après-midi, je vous parle d’un territoire qui étouffe, qui suffoque et qui s’inquiète.

Chaque année, la vallée de l’Arve, en Haute-Savoie, connaît un épisode de pollution de l’air. Depuis la fin du mois de novembre, cet épisode dure et il est particulièrement long et aigu.

Dans plusieurs écoles, les enfants ne sortent plus en récréation et sont interdits de toute activité sportive. Les parents d’élève et les enseignants, inquiets, ne savent plus quel moyen employer pour faire connaître leur inquiétude et leur ras-le-bol. Les médias ont relayé certaines de leurs initiatives ce week-end.

Les élus locaux, femmes et hommes de bonne volonté, sont mis en cause, car aucune des actions lancées ne semble produire d’effets suffisants.

Madame la ministre, je vous lance un cri d’alarme au nom des habitants. Il faut déclarer l’état d’urgence contre la pollution de l’air dans la vallée de l’Arve. Il faut lancer un plan Marshall pour cartographier et modifier les moyens de chauffage individuel et collectif, favoriser les transports propres – en premier lieu le ferroviaire et les transports en commun – et accompagner les entreprises.

La vallée de l’Arve apporte tant à notre pays par son travail, par la puissance de son industrie et par son attractivité touristique, qu’elle mérite que le Gouvernement se penche une bonne fois pour toutes sur une situation qui n’a que trop duré.

Madame la ministre, quelles sont les initiatives interministérielles qu’entend prendre le Gouvernement dans le domaine du logement, du transport, de l’industrie pour résoudre cette crise sanitaire majeure ? (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion. Monsieur le sénateur Loïc Hervé, vous avez raison de vous préoccuper des questions liées à la pollution de l’air, car c’est essentiel pour la santé des Français, lesquels sont très attachés à ces questions comme à celles qui touchent à l’environnement. Le Gouvernement l’est également.

Les études qui existent montrent très bien que la pollution de l’air est responsable de décès prématurés. C’est vrai en France comme dans le monde entier, où elle cause 7 millions de décès prématurés chaque année. En France, ce chiffre est estimé à 40 000.

Il est vrai que dans la vallée de l’Arve, les seuils français et européens de qualité de l’air sont régulièrement dépassés. Les autorités sanitaires de la région Rhône-Alpes sont donc en alerte sur ses sujets et diffusent leurs recommandations.

M. Alain Gournac. Ah ! Tout va bien.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’État. La priorité est évidemment de lutter contre tous les facteurs qui créent cette pollution. Un plan spécifique à votre région a donc été élaboré. Il prévoit notamment de réduire la vitesse de circulation en période hivernale, mais également, en cas de pic de pollution, des mesures exceptionnelles.

Ainsi, le passage des poids lourds les plus polluants est désormais interdit dans la vallée de l’Arve durant les pics de pollution…

M. Michel Bouvard. Et par où vont-ils passer ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. … et des valeurs limites ont été fixées pour les émissions de poussières par les installations de combustion. Vous le savez, les installations de chauffage peuvent également polluer l’air.

Je sais que vous êtes élu local. Les collectivités locales ont également un rôle à jouer. Certaines d’entre elles mettent en place des aides pour permettre aux particuliers de remplacer leurs installations de chauffage vétustes et limiter la pollution.

Ce plan prévoit également l’interdiction du brûlage des résidus des cultures et des déchets verts.

Monsieur le sénateur, mesdames, messieurs les sénateurs, lutter contre la pollution et préserver la qualité de l’air est un combat citoyen exigeant que chacun doit mener avec l’ensemble des élus de son territoire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour la réplique.

M. Loïc Hervé. Madame la secrétaire d'État, j’ai entendu, dans votre réponse, la liste des actions déjà en cours ; je n’y ai rien appris !

Je vous parle d’une situation actuelle, qui existe, vous répondez à la place de Mme la ministre de la santé qui n’est pas parmi nous cet après-midi et dont j’attendais des réponses concrètes !

Vous ne mesurez pas la colère de l’opinion publique dans la vallée de l’Arve ! Cette situation va se retourner contre les élus et contre l’État. C’est d’ailleurs valable dans tout le pays. Il faut agir, madame la secrétaire d'État, il faut agir ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)

attentat à berlin et lutte contre le terrorisme (ii)

M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Retailleau. Monsieur le président, mes chers collègues, monsieur le Premier ministre, à mon tour, et au nom du groupe Les Républicains, je voudrais dire au peuple allemand notre compassion et notre solidarité après ce qui s’est passé. Parce que la France a subi le même drame, avec les mêmes modalités qu’aujourd’hui, nous nous sentons tous un peu berlinois.

À nouveau, la barbarie islamiste a frappé. Ce terrorisme qui vient du fond de la nuit sans âge des violences barbares a de nouveau frappé des pays. La cruauté de ces crimes nous rappelle que cette violence est implacable, et qu’elle a deux formes, mondiale et totale.

Mondiale, puisque, durant le premier semestre de cette année seulement, on a dénombré pas moins de 550 attentats, soit trois par jour, faisant des milliers de victimes sur les cinq continents. Sa forme est aussi totale, parce qu’il y a les deux fronts. Le front extérieur, sur lequel opèrent nos soldats, auxquels je veux rendre hommage, et le front intérieur, sur lequel opèrent toutes les forces de l’ordre, auxquelles je veux aussi rendre hommage.

À chaque fois, ces frappes touchent des symboles de ce que nous sommes. Le président du Sénat et notre collègue Michel Boutant ont évoqué l’exemple allemand des marchés de Noël. Nous avons été touchés dans notre fête nationale, donc dans les valeurs de notre République. Nous avons été touchés aussi dans nos racines spirituelles (Murmures sur les travées du groupe socialiste et républicain.), avec un prêtre égorgé.

Ce totalitarisme vise ce que nous sommes et nous devons lui répondre.

Monsieur le Premier ministre, nous avons une certitude : quand nous aurons vaincu l’État islamique, tout cela ne s’arrêtera pas. C’est beaucoup plus difficile que cela, et nous partageons la conviction qu’une idéologie vit au-delà d’un territoire.

La France doit être implacable. Au moment où des djihadistes vont revenir de Mossoul et, demain, peut-être de Raqqa, quel dispositif comptez-vous mettre en place pour protéger les Français ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Monsieur le président Retailleau, merci pour vos mots de solidarité à l’égard du peuple allemand dans l’épreuve terrible à laquelle il se trouve confronté, qui fait écho à la tragédie à laquelle notre propre peuple a dû faire face. Je pense, notamment, au tragique attentat de Nice, le jour de notre fête nationale.

Vous avez eu raison de rappeler que toutes nos forces sont mobilisées et que nous avons jeté toute notre énergie dans cette bataille contre le terrorisme. Nous sommes présents à l’extérieur, dans la coalition en Irak et en Syrie, où nous avons frappé le terrorisme avec la détermination de la coalition.

Nous l’avons fait également en dehors de l’Irak et de la Syrie, lorsque les valeurs essentielles auxquelles notre pays est attaché et qui font civilisation ont été mises en cause par des terroristes, avec l’abjection et les exactions que l’on sait.

C’était notamment le cas au Mali, où le Président de la République a décidé de l’intervention de nos militaires.

Je veux leur rendre hommage pour le travail qu’ils accomplissent, pour la parole de la France qu’ils portent à travers leur engagement sur le théâtre des opérations extérieures. À travers l’engagement de nos soldats, c’est la détermination de la France à gagner la guerre contre le terrorisme qui s’exprime, avec une résolution et une fermeté absolues.

Le deuxième point sur lequel je voudrais insister, c’est le fait que, face à l’islamisme radical, face à la barbarie, face à la volonté de s’en prendre à ce qu’est l’Europe, à ce que sont les peuples d’Europe dans leurs modes de vie, c’est-à-dire la liberté, la fraternité, le plaisir d’être ensemble dans la concorde et la tolérance, il n’y a qu’une réponse, monsieur le président Retailleau, c’est une fermeté absolue.

C’est elle qui nous conduit à fermer des lieux de culte lorsqu’en leur sein est proférée une conception de l’islam orthogonale de ce que sont tous les principes de la République. Nous en avons fermé une vingtaine au cours des derniers mois.

Elle signifie expulser ceux qui, étrangers, portent une parole complètement contraire à toutes les valeurs qui nous rassemblent par-delà ce qui peut nous différencier dans cet hémicycle. Nous avons expulsé en quelques mois 80 personnes qui avaient appelé au terrorisme ou à la haine dans leurs interventions dans des lieux de culte, dans l’espace public ou sur internet.

C’est la fermeture résolue des sites qui provoquent et appellent au terrorisme, ainsi que le travail que nous avons engagé au sein du réseau de sensibilisation à la radicalisation, ou RAN selon son acronyme anglophone, ou avec les opérateurs internet, pour faire en sorte que tous les messages qui peuvent influencer les plus vulnérables de nos compatriotes en les conduisant à commettre des crimes abjects soient immédiatement retirés de la toile. Il s’agit, par un travail de sensibilisation et de développement du contre-discours, de nous armer face à la propagande pernicieuse des terroristes.

C’est ce que nous avons fait également, monsieur le président, en redonnant beaucoup de moyens aux forces de sécurité. Si le Président de la République et mon prédécesseur Manuel Valls ont décidé de créer près de 9 000 emplois dans les forces de sécurité intérieure, dont 2 000 ont été affectés aux services de renseignement, c’est bien parce que nous ressentions la nécessité de réarmer la République face à cette menace terroriste.

Si nous avons décidé d’augmenter de 18 % les moyens d’investissement de ces forces pour qu’elles disposent de véhicules, de moyens numériques, de moyens d’investigation qui leur faisaient défaut, c’est précisément parce que nous sommes conscients de la nécessité de rehausser les moyens de la République face au risque terroriste.

Si nous avons voté un certain nombre de textes, que vous avez soutenus – je pense à la loi sur le renseignement ou à l’état d’urgence –, c’est précisément parce que nous partagions la conscience que la menace terroriste appelait des mesures dans le rassemblement de toutes les forces de la République. La capacité de résilience de la Nation dépend aussi de notre capacité à nous rassembler lorsque l’essentiel est en jeu.

Il faut évoquer aussi le déploiement de toutes ces forces sur le territoire national pour assurer la protection des Français, pour leur permettre de continuer à vivre comme ils ont le plaisir et l’habitude de vivre, parce que la France doit demeurer la France.

Vous évoquiez ce à quoi les terroristes s’en prennent. En France, plus que partout ailleurs, ils s’en prennent à la belle idée de République, avec les valeurs qu’elle porte. Ils s’en prennent, notamment, à la laïcité, c’est-à-dire à la possibilité de croire ou de ne pas croire, et, dès lors que l’on a fait le choix de sa croyance, d’être garanti par la République que l’on pourra l’exercer librement. À ce titre, la contrepartie de la liberté d’exercice de chaque culte suppose que chacun reconnaisse les valeurs de la République comme transcendante de sa croyance et s’engage à ne jamais les remettre en cause, parce qu’alors, ce serait tout l’équilibre républicain qui se trouverait compromis.

C’est cela, la République dans son indivisibilité ; (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.) c’est cela la belle idée de la République ; c’est cela que nous devons porter pour nos concitoyens, afin que ceux qui veulent semer la division en France trouvent face à eux la puissance de l’humanisme, des relations humaines, de la fraternité et de la concorde ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

politique fiscale

M. le président. La parole est à M. Vincent Éblé, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Vincent Éblé. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie et des finances.

Sous le quinquennat du président Sarkozy, la politique menée par le gouvernement Fillon avait fait augmenter la dette de la France de 600 milliards d’euros, soit plus de 40 %. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Depuis notre arrivée au pouvoir, nous travaillons à sa réduction. Le déficit a été ramené à son niveau le plus bas depuis 2008. Cet assainissement budgétaire n’a de sens que si l’ensemble des Français en profite, notamment les classes moyennes, souvent mises à contribution et ressentant vivement la pression fiscale.

Dès juin 2014, nous avons baissé l’impôt sur le revenu pour les contribuables en bas de barème. Un milliard d’euros ont été consacrés aux ménages les plus modestes. Puis, en 2015, la première tranche du barème a été supprimée. C’est la lutte contre la fraude fiscale qui a permis de financer cette mesure.

Au total, près de 9,4 millions de foyers fiscaux ont vu leur contribution fiscale allégée par rapport à 2013. Trois millions ont évité d’entrer ou sont sortis de l’imposition sur le revenu. Les bénéficiaires ont principalement été des salariés et des retraités modestes, qui ont très souvent du mal à finir le mois. Nous avons le devoir et l’obligation de soutenir leur pouvoir d’achat.

Le Gouvernement a proposé la continuité du mouvement de cette baisse d’impôts. Elle concernera 7 millions de foyers fiscaux l’an prochain.

M. Philippe Dallier. C’est Noël !

M. Vincent Éblé. À titre d’exemple, ces mesures du projet de loi de finances pour 2017 vont permettre à un couple de salariés avec deux enfants percevant près de 4 000 euros de revenus par mois de voir son impôt baisser de plus de 300 euros l’an prochain.

Toutes ces mesures s’inscrivent donc dans la durée. Elles doivent redonner confiance en l’avenir, pour que chaque Français puisse participer à hauteur de ses moyens réels au redressement de la France.

M. Didier Guillaume. Très bien ! Il faut s’en réjouir !

M. Vincent Éblé. Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous nous donner des précisions sur les perspectives de cette baisse de l’impôt sur le revenu pour les ménages qui s’appliquera dès le 1er janvier prochain ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire.

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur, l’Assemblée nationale a adopté la semaine dernière en nouvelle lecture le projet de loi de finances pour 2017. Comme vous l’avez indiqué, celui-ci prévoit notamment une nouvelle baisse de l’impôt sur le revenu de 1 milliard d’euros en 2017, au profit notamment des ménages modestes et moyens.

Au total, les baisses d’impôt sur le revenu décidées par le Gouvernement depuis 2014 atteindront 6 milliards d’euros, soit 1 milliard d’euros de plus que les 5 milliards d’euros prévus dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité.

Cette mesure, qui prend la forme d’une réduction d’impôt de 20 % sous condition du revenu fiscal de référence, bénéficiera à plus de 5 millions de foyers fiscaux, avec un gain moyen de près de 200 euros par foyer.

M. Didier Guillaume. C’est beaucoup !

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Cette baisse d’impôts va redonner du pouvoir d’achat aux Français, et ce dès le mois de janvier 2017, et non à la fin de l’été comme c’est habituellement le cas. Elle sera intégrée automatiquement dans les mensualités ou bien dans les tiers provisionnels en fonction du dernier revenu fiscal de référence connu.

Par exemple, pour les contribuables bénéficiant de la réduction d’impôt, chaque mensualité ou tiers provisionnel sera diminué automatiquement de 20 %, et ce, dès le mois de janvier.

M. Didier Guillaume. Ce sont de bonnes mesures !

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Bien sûr, comme d’habitude, les contribuables dont la situation a évolué conserveront toujours la possibilité de moduler en ligne leurs mensualités ou leurs tiers provisionnels pour limiter les régularisations en fin d’année.

Tel est l’engagement du Gouvernement en faveur des ménages les plus modestes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)

M. Philippe Dallier. C’est beau !

situation sociale

M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Rapin. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, l’heure est au bilan.

Ce que l’on retiendra de ce quinquennat, c’est que, malgré des discours qui ont l’apparence de la générosité, à force de renoncement et d’entêtement, ce gouvernement est responsable d’une « casse sociale » sans précédent.

Une politique se juge à l’aune de ses résultats. Elle ne se juge pas à l’aune d’une vision de la société qui tourne le dos à la réalité.

Quel est le vrai bilan de la gauche ?

Depuis 2012, le chômage a explosé. Nous sommes passés du quatorzième au vingt-deuxième rang en Europe. Notre école est parmi les plus inégalitaires. L’abandon de nos campagnes a créé des zones en totale déréliction. Enfin, l’autorité de l’État vacillante a laissé se développer ce que l’on appelle pudiquement des zones de non-droit.

Derrière le chômage qui a explosé, derrière l’école qui ne remplit pas sa mission, derrière les territoires abandonnés, derrière la violence et la délinquance non réprimées, il y a des Français qui souffrent et pour qui ce quinquennat illustre ce qu’est la « casse sociale ».

Votre politique produit ses pires effets sur les plus faibles. Ce sont les plus faibles qui sont au chômage, qui décrochent à l’école, qui vivent dans nos régions abandonnées, qui subissent la violence au quotidien.

Ne pensez-vous pas, monsieur le Premier ministre, qu’il est temps que vous regardiez les faits en face ? L’heure n’est-elle pas venue de vous poser la question de l’échec de tous ces choix depuis cinq ans ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Monsieur le sénateur, je pense qu’il n’a pas dû échapper à votre sagacité que nous étions dans une période électorale, pour poser une question aussi nuancée. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Nous sommes depuis le début de cette séance dans la recherche du rassemblement et de la mesure, et j’ai bien senti que pour une minorité d’entre vous, cela constituait un effort extrêmement important, dont je ne savais pas s’il pourrait se poursuivre jusqu’au terme de la séance.

Votre question nous ramène à la réalité de la politique dans ses affrontements les plus classiques.

Je fais face à la réalité à laquelle notre pays est confronté et je vous répondrai avec un souci d’honnêteté dans la démonstration, mais aussi de vérité, de pondération et d’équilibre.

Certes, il est possible que nous n’ayons pas tout réussi, mais de là à considérer comme le sous-entend votre question que nous aurions tout raté, il y a la frontière qui sépare la bonne foi de la mauvaise foi.

Permettez-moi d’en prendre un certain nombre d’exemples.

Vous vous inquiétez de la situation de l’école, mais que vous ne vous en êtes-vous inquiété lorsque 80 000 emplois ont été supprimés (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.), que la formation des enseignants était remise en cause, et que l’échec scolaire en résultait ?

Pourquoi ne reconnaissez-vous pas que nous avons recréé des postes et redonné des moyens à l’école, notamment dans des zones qui étaient très défavorisées, par exemple la Seine-Saint-Denis ?

Comme le montre l’enquête PISA, si l’on veut lutter efficacement contre l’échec scolaire, si l’on veut restaurer l’égalité des chances, il faut plus d’enseignants pour donner la possibilité à ceux qui ont peu d’avoir plus dans le face-à-face pédagogique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.)

Quand vous parlez de l’école, j’ai envie de vous rappeler ce qu’est votre bilan afin de faire la différence avec ce qu’a été notre action. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Vous parlez de l’autorité de l’État et de la sécurité, mais pourquoi est-ce que vous ne vous réjouissez pas, monsieur le sénateur, de voir ce gouvernement créer 9 000 emplois quand la majorité que vous souteniez en a supprimé 13 000 ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.- Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Au moment où nous abordons la campagne en vue de l’élection présidentielle, ce serait un signe d’honnêteté intellectuelle.

Pourquoi ne reconnaissez-vous pas que grâce aux moyens que nous avons mobilisés pour la sécurité, en particulier pour rétablir des forces de sécurité là où il n’y en avait pas, nous avons pu, dans votre département, procéder à l’évacuation de Calais dans des conditions totalement humaines et absolument exemplaires, auxquelles, du reste, une partie de vos amis politiques ne nous invitaient pas ? (Protestations renouvelées sur les travées du groupe Les Républicains.) Puisque vos amis politiques sur place le reconnaissent, pourquoi ne pas l’avoir évoqué comme une réussite de ce gouvernement dans votre question ?

M. le président. Il faut conclure, monsieur le Premier ministre.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Pourquoi ne reconnaissez-vous pas que les dispositifs destinés à restaurer la compétitivité des entreprises que nous avons mis en place leur ont permis de gagner deux points de marge et de retrouver leurs marges d’avant la crise économique du milieu des années 2000 ?

Pourquoi ne reconnaissez-vous pas que cette politique a permis à l’investissement industriel de progresser de 3,4 %, soit trois fois plus qu’au cours des dernières années ?

M. François Grosdidier. Ça va tellement mieux que le Président ne se représente pas !

M. le président. Je vous remercie de bien vouloir conclure, monsieur le Premier ministre.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Monsieur le sénateur, je pourrais multiplier les exemples, égrener les éléments, mais je comprends que cela vous contrarie beaucoup. Comme je suis bon garçon et que je n’ai pas vocation à contrarier l’opposition, je m’arrêterai là, de manière à ne pas gâcher votre soirée. (Applaudissements prolongés sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour la réplique.

M. Jean-François Rapin. Monsieur le Premier ministre, je ne suis pas contrarié, et je suis heureux de constater que vous avez encore un auditoire. (Rires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Vous dites souvent qu’il faut réformer sans détruire : je pense que vous avez détruit sans réformer ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

décrochage économique de la france

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour le groupe Les Républicains, pour deux minutes. Cette règle fait figure de vœu pieux, mais je vous préviens : à partir de janvier prochain, la règle ne souffrira plus aucune exception ! (Sourires.)

Mme Élisabeth Lamure. Ma question s'adressait à M. le ministre de l’économie et des finances.

Monsieur le ministre, l’INSEE vient d’annoncer que la croissance française n’atteindrait que 1,2 % en 2016. C’est malheureusement très en deçà de vos prévisions.

Cette croissance illustre le décalage entre la France et ses voisins européens, car de 1,2 % pour la France, cette prévision passe à 1,7 % pour l’ensemble des pays de la zone euro, et à 1,9 % pour l’Allemagne.

Monsieur le ministre, comment expliquez-vous le décrochage général de la France, constaté par tous les organismes officiels internationaux ?

Notre taux de prélèvements obligatoires atteindra 44,5 % du PIB en 2016. Notre déficit budgétaire est de 3,6 % cette année, soit 970 milliards d’euros. La dette publique, avec 2 200 milliards d’euros, atteindra bientôt 100 % du PIB. Cette dette a progressé de 15 % en France au cours de ces dernières années, quand celle de l’Allemagne reculait de 10 %.

Autant de chiffres qui montrent que vos choix en matière économique ont fait reculer le pays.

Pourquoi des pays comme l’Allemagne, l’Espagne ou l’Irlande ont-ils réussi à résorber leur chômage quand le nôtre continuait d’augmenter ?

Monsieur le ministre, êtes-vous conscient de l’ampleur de l’échec de votre politique ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire.

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Madame la sénatrice, permettez-moi de citer quelques chiffres précis.

La reprise de l’activité économique dont vous semblez douter se confirme depuis un an et demi. Après une croissance de l’ordre de 0,5 % entre 2012 et 2014, l’activité croît désormais à un rythme compris entre 1,2 % et 1,5 % depuis l’année dernière. Vous devriez vous en réjouir.

Cette reprise est portée par la croissance de l’investissement et la consommation des ménages, qui progressent nettement.

Par ailleurs, on peut noter la franche reprise du marché immobilier, qui se confirme après avoir négativement pesé sur la croissance au début du quinquennat.

M. François Grosdidier. C’est Noël !

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Pour 2017, les dernières enquêtes de conjoncture, tant du côté de la confiance des ménages que de celle des chefs d’entreprise, se situent également à des niveaux très élevés, historiquement associés à une croissance trimestrielle de l’ordre de 0,4 à 0,5 %. Tout indique donc que la croissance s’accélérera l’an prochain.

Surtout, l’économie crée à nouveau des emplois dans le secteur marchand à un rythme élevé, plus de 180 000 emplois sur une année. Cela nous permet de revenir à un niveau d’emplois marchands que nous n’avions plus connu depuis 2009.

M. François Bonhomme. Et les 60 000 chômeurs de plus ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Il est donc faux de dire, madame la sénatrice, que l’économie française décroche. Depuis 2008, nous avons connu une croissance totale de notre PIB par habitant supérieure à celle de la zone euro. Si notre reprise a été légèrement plus faible que chez nos voisins ces dernières années, c’est principalement parce que nous avons mieux résisté que les autres au plus fort de la crise.

M. le président. Il faut conclure, madame la secrétaire d'État.

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Si l’on se place dans un temps plus long, le PIB a autant crû en France qu’en Allemagne depuis le début des années 2000.

M. Philippe Dallier. Depuis 2012, c’est moins vrai !

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Le Président de la République et le Gouvernement ont tout mis en œuvre pour redresser le pays, et nous en voyons les résultats. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour la réplique.

Mme Élisabeth Lamure. Madame la secrétaire d'État, votre réponse est peu convaincante et cache mal votre embarras. Les chiffres ont parlé, et ce sont bien les chiffres d’aujourd'hui qui attestent du décrochage de la France.

En matière de décrochage, je crois que c’est ce gouvernement qui depuis des années décroche. Ce quinquennat fait du mal à la France ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

situation à uber

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Jean-Yves Roux. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Depuis maintenant une semaine, nous assistons à un mouvement de grève particulièrement difficile opposant des chauffeurs de VTC à certaines plateformes internationales.

Depuis une semaine surtout, nous entendons des témoignages de chauffeurs qui décrivent l’évolution de leur quotidien de travail.

Au départ, le chant des sirènes était mélodieux : la perspective d’un emploi – et on les comprend –, d’un travail indépendant, intéressant et valorisant. Au final, en peu de temps, le registre a changé et ces chauffeurs ont fait entendre une tout autre complainte, dans un silence parfois assourdissant : des changements de rémunération au gré du vent, des rémunérations minimales tendant au travail à perte, un temps de travail considérablement allongé pour espérer compenser le revenu final et payer les crédits engagés.

Ce mouvement de chauffeurs, nous devons en être conscients, est tout à fait révélateur de ce qui pourrait dans un avenir proche se généraliser, faire modèle.

Ce modèle-là, c’est la paupérisation légalisée, avec des femmes et des hommes qui ne peuvent s’en sortir. Ce modèle-là, c’est la négation de la régulation la plus élémentaire, du droit du travail, du dialogue social préalable. Ce modèle-là, c’est la loi du plus fort.

Mes chers collègues, ce n’est pas une loi que notre République peut cautionner.

Monsieur le Premier ministre, depuis plusieurs jours et plusieurs nuits, vous avez proposé votre médiation dans ce conflit. Vous avez souhaité avant tout engager un dialogue social. Preuve si l’en est que l’État n’est pas que l’empêcheur de faire vivre un secteur en plein essor. Preuve si l’en est que la puissance publique est très utile, surtout quand il s’agit d’organiser un secteur en pleine expansion.

Monsieur le Premier ministre, où en sont ces négociations ? Quel signal le Gouvernement entend-il donner au secteur des VTC, à ces chauffeurs qui veulent continuer à travailler dans des conditions décentes ? À celles et ceux qui voudront embrasser, et à juste titre, ces carrières ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Monsieur le sénateur, votre question appelle une réponse très claire sur le conflit entre la plateforme Uber et les VTC.

Tout d’abord, le développement de l’économie numérique est une chance extraordinaire pour notre économie. Quelque 30 000 entreprises ont été créées au cours de cette année – ce qui correspond à une augmentation de plus de 5 % du taux de création des entreprises –, dont beaucoup dans le secteur numérique.

Ce secteur a attiré près de 1 milliard d’euros d’investissements privés, ce qui place la France en situation de recueillir près de 16 % des fonds de l’Union européenne.

Cela montre le dynamisme de ce secteur.

Mais la numérisation de l’économie ne peut rimer avec dérégulation, recul des droits sociaux, régression de la protection sociale et mépris des salariés. Je le dis très clairement, ce n’est tout simplement pas possible. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.)

Au travers du mouvement engagé par les VTC, – pour une minorité d'entre eux, celui-ci s’est manifesté avec une violence que nous avons condamnée –, ces derniers expriment des revendications qui doivent être entendues concernant le droit à la formation, la nécessaire protection sociale et les conditions de rémunération de la plateforme face au travail extrêmement difficile qu’ils accomplissent.

C’est la raison pour laquelle j’ai demandé au secrétaire d'État Alain Vidalies de réunir hier l’ensemble des parties pour engager une discussion sur toutes ces questions. Il a fait un travail remarquable, dont nous souhaitons ardemment qu’il permette d’aboutir à un bon compromis d’ici à la fin du mois de janvier.

Nous y travaillons, et cela suppose que la plateforme comprenne que si elle ne s’engage pas dans la voie du progrès, elle aura face à elle un gouvernement absolument déterminé.

La proposition de loi relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification dans le secteur du transport public particulier de personnes du député Grandguillaume doit permettre de créer les conditions d’une concurrence plus équitable entre les différents acteurs et de régler un certain nombre de questions qui ont été longtemps sur le métier sans trouver de réponse, notamment celle de la formation.

Enfin, permettez-moi d’insister en réponse à votre question sur mon refus absolu des modes modernes d’exploitation. Mon gouvernement sera en première ligne, y compris sur le plan européen dans le cadre de la renégociation de la directive de 1996 sur le détachement des travailleurs, pour défendre les droits de ces travailleurs.

Nous prendrons des initiatives sur ce sujet de manière extrêmement forte, parce que la protection sociale, la protection de ceux qui donnent le meilleur d’eux-mêmes dans leur travail ne doit donner lieu à aucune exploitation. Le gouvernement que je conduis sera sur ce sujet intraitable. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu le jeudi 12 janvier 2017, à quinze heures, et seront retransmises en direct par France 3 et Public Sénat, ainsi que sur le site internet du Sénat.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante, est reprise à dix-huit heures, sous la présidence de M. Jean-Claude Gaudin.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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Dossier législatif : proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires
Discussion générale (suite)

Sapeurs-pompiers professionnels et volontaires

Adoption définitive en procédure accéléré d’une proposition de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires (proposition n° 160, texte de la commission n° 197, rapport n° 196).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires
Article 1er A

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique. Monsieur le président, madame la rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les événements de Berlin témoignent, si besoin était, de la nécessité de disposer d’un haut niveau de sécurité civile dans nos démocraties, qui sont en guerre contre le terrorisme.

L’adoption de cette proposition de loi est donc particulièrement importante, car elle nous permettra de consolider notre modèle de sécurité civile en répondant à plusieurs attentes des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, des attentes qui datent pour certaines d’entre elles de près de quinze ans.

Ce texte constitue une occasion de témoigner l’attachement et la reconnaissance de la Nation à ces hommes et à ces femmes, toujours en première ligne. Ceux-ci incarnent, à eux seuls, l’égalité, la solidarité, la fraternité et l’engagement, sans lesquels notre système, largement fondé sur le volontariat, ne pourrait pas fonctionner.

Les sapeurs-pompiers interviennent toutes les sept secondes, avec près de 3,5 millions de personnes secourues en cette fin d’année : un Français sur trois aura composé au moins une fois le 18 au cours de l’année. Ces chiffres prouvent l’importance de l’intervention des sapeurs-pompiers dans le quotidien de nos compatriotes. Ils attestent de leur total dévouement, pouvant aller jusqu’au sacrifice de leur vie.

Le Gouvernement tient donc de nouveau à rendre hommage aux sapeurs-pompiers morts ou blessés en service. Saluons, notamment, la mémoire de Vincent Gérard, Bruno Collard, Boris Gemet et Jérémy Beier, qui, cette année, sont décédés en opération au service de nos concitoyens. Le Gouvernement tient à assurer à leurs familles, à leurs proches et à leurs camarades le soutien indéfectible de la nation.

Au-delà des sensibilités politiques, la représentation nationale sait, quand la cause est juste, se rassembler pour faire preuve d’unité et de responsabilité, comme en témoigne le consensus qui se dégage autour de ce texte, lequel n’aurait pu aboutir sans les travaux et l’engagement de Mme la rapporteur Catherine Troendlé, du rapporteur Jean-Paul Bacquet à l’Assemblée nationale et du député Pierre Morel-A-L’huissier.

Comme l’a souhaité le Premier ministre Bernard Cazeneuve, qui a accompagné et soutenu cette proposition de loi à l’Assemblée nationale, l’objet de ce texte est non pas de réformer l’ensemble de la sécurité civile, mais d’engranger des réformes significatives, qui, agrégées entre elles, permettent de conforter notre modèle de sécurité civile.

Ce texte comprend ainsi deux réformes importantes pour les sapeurs-pompiers volontaires et professionnels.

La première concerne l’évolution du régime de la prestation de fidélisation et de reconnaissance, la PFR, servie aux sapeurs-pompiers volontaires après vingt années de service. Cette prestation a été créée en 2004 sur la base d’un système par capitalisation, auquel l’État et les collectivités contribuent chaque année. Avec cette proposition de loi, la PFR passe d’un système par capitalisation à un dispositif reposant sur le principe d’un flux budgétaire direct, à l’attention des bénéficiaires. Ce dispositif ne modifie ni les modalités de calcul des droits, ni leur montant, ni les conditions d’éligibilité.

L’État s’engage par ailleurs à contribuer à hauteur de 50 % au financement de la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance. Pour les collectivités, ce dispositif rénové présente l’avantage de dégager d’importantes économies budgétaires, de l’ordre de 35 millions d’euros par an sur leurs ressources propres, sans, toutefois, dégrader la qualité du service rendu aux sapeurs-pompiers volontaires.

L’État a fait le choix de réinvestir en faveur de la sécurité civile l’intégralité des sommes économisées au titre de sa propre contribution au financement de la prestation de fidélisation et de reconnaissance, soit 32 millions d’euros. La loi de finances a inscrit les crédits correspondants dans le budget du programme « Sécurité civile », porté par le ministère de l’intérieur.

Ces crédits permettront notamment de financer la création d’une nouvelle dotation d’investissements pour les projets structurants en matière de sécurité civile, abondée à hauteur de 25 millions d’euros en 2017.

Alors que notre pays est confronté à de nouveaux risques, à de nouvelles menaces, l’enjeu pour l’État est d’accompagner les services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS, dans les adaptations organisationnelles, technologiques et matérielles nécessaires pour relever ces défis. C’est grâce à tous ces dispositifs que l’État continuera à jouer le rôle attendu de lui, à savoir garantir une sécurité civile de qualité sur l’ensemble du territoire.

La seconde réforme majeure introduite par la proposition de loi concerne les sapeurs-pompiers professionnels.

Depuis près de quinze ans, les sapeurs-pompiers se voient promettre la création d’une catégorie A+ pour leur encadrement supérieur, afin de reconnaître pleinement les responsabilités particulières qui leur incombent. Les directeurs et directeurs adjoints des services d’incendie et de secours sont en effet à la fois des managers, qui gèrent des établissements publics comprenant plusieurs centaines de personnes, des chefs de corps, qui dirigent leurs troupes au quotidien et en opération, et des commandants départementaux des opérations de secours, à qui l’on confie la vie de nos concitoyens. Par ailleurs, ils sont également les conseillers techniques des préfets en matière de sécurité civile.

Cette polyvalence, cette disponibilité et la diversité de leurs responsabilités n’étaient pas pleinement reconnues jusqu’à ce jour. Dorénavant, grâce, je l’espère, à votre vote, mesdames, messieurs les sénateurs, les directeurs et directeurs adjoints pourront envisager des déroulés de carrière conformes à leurs compétences. Ils pourront également bénéficier d’une mobilité dans le corps des administrateurs civils, celui des sous-préfets ou encore au sein d’une inspection générale.

Les dix-neuf textes réglementaires qui composent cette réforme ont d’ores et déjà été validés par les instances consultatives, et plusieurs d’entre eux ont été examinés ce matin même par le Conseil d’État. Les autres dispositions de cette proposition de loi corrigent des situations qui se sont révélées, au fil du temps, problématiques pour le développement de notre modèle de sécurité civile.

Pour ne prendre qu’un exemple, ce texte supprime enfin l’interdiction faite à certains militaires retraités de poursuivre leur engagement de sapeur-pompier volontaire, au motif qu’ils ne pouvaient cumuler cette indemnisation avec leur pension.

Ce texte contribuera également, grâce à un amendement de Pierre Morel-A-L’huissier, à la prise en compte des formations des sapeurs-pompiers volontaires dans le compte personnel d’engagement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, cette proposition de loi n’épuise pas bien sûr à elle seule les réformes nécessaires à la bonne marche de notre modèle de sécurité civile. Mais, si elle est adoptée, nous ferons là un grand pas, très attendu des sapeurs-pompiers bénévoles et professionnels. Des amendements ont été déposés, qui visent à enrichir encore ce texte, pour ce qui concerne, notamment, l’intégration des agents administratifs et techniques dans les instances de gouvernance des SDIS ou encore les modalités de valorisation du volontariat.

Toutes ces propositions méritent bien sûr d’être analysées. Nous n’y sommes d’ailleurs pas totalement défavorables sur le fond. Mais nous souhaitons respecter les délais et aboutir à un vote conforme, ce qui permettrait de promulguer la loi rapidement. (M. Jean Desessard s’exclame.) Dans ces conditions, il est préférable que nous nous en tenions au texte qui vous est aujourd'hui proposé.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement soutient sans réserve la proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires, et je sais que, sur l’ensemble des travées, vous aurez à cœur de saisir l’occasion qui nous est donnée de témoigner aux sapeurs-pompiers la reconnaissance de la nation. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Hermeline Malherbe applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

Mme Catherine Troendlé, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi, en ma qualité de présidente du groupe d’amitié France-Allemagne, d’exprimer toute notre sympathie, notre solidarité et notre soutien au peuple allemand et aux familles des victimes.

La spécificité du modèle français de sécurité civile et sa force tiennent particulièrement à la dualité de la nature des sapeurs-pompiers, avec, d’une part, 40 800 professionnels relevant de la fonction publique territoriale et, d’autre part, 193 000 volontaires, les quatre cinquièmes des effectifs ayant souscrit un engagement bénévole au service du bien commun. Ceux-ci œuvrent au quotidien au service de nos concitoyens.

Leurs missions, en urgence, sont en croissance constante : on dénombrait, en 2014, 4,3 millions d’interventions. Or on constate parallèlement une diminution significative des effectifs chez les volontaires, une tendance qui trouve quelques éléments d’explication dans la diminution du nombre de casernes. À ce titre, je vous invite à prendre connaissance de l’excellent rapport sur le maillage territorial de M. Bacquet, président du Conseil national des sapeurs-pompiers volontaires, le CNSPV, présent dans les tribunes. Cette diminution est également liée à une insuffisance de reconnaissance et de valorisation des sapeurs-pompiers.

Je tiens également à vous signaler que nous fêtons cette année les quarante ans de l’intégration des femmes chez les sapeurs-pompiers. Mais elles ne représentent encore que 17 % de l’effectif et 27 % des jeunes sapeurs-pompiers.

Un plan national d’accompagnement des femmes qui souhaitent s’engager a été dévoilé voilà quelques semaines par le ministre de l’intérieur, et j’ai la faiblesse de penser que nos travaux de réflexion et nos propositions au sein du CNSPV y ont contribué.

Mais j’en viens à la proposition de loi soumise à notre examen, qui comporte deux volets.

Un volet est consacré aux sapeurs-pompiers volontaires : il s’agit de réformer le dispositif de cessation définitive de l’engagement des sapeurs-pompiers volontaires, la prestation de fidélisation et de reconnaissance, la PFR, au terme d’une réflexion conduite par l’Assemblée des départements de France avec l’État et les pompiers.

Ce volet doit être impérativement adopté avant la fin de la présente année, pour une entrée en vigueur rétroactive au 1er janvier 2016, alors que le contrat d’assurance souscrit pour gérer ce dispositif est échu depuis le 31 décembre 2015.

Je rappelle que la PFR a remplacé au 1er janvier 2005 l’allocation de vétérance. Ce régime est cofinancé par l’État, les SDIS et les sapeurs-pompiers volontaires.

Alors que les contributions sont importantes, force est de constater qu’un décalage résulte mécaniquement du système de la capitalisation, entre les sommes provisionnées et le nombre de bénéficiaires, qui, certes, je vous l’accorde, devrait croître chaque année par la constitution de nouveaux droits.

Je voudrais également pointer le caractère onéreux de la gestion administrative et financière du dispositif, qui s’élève aujourd'hui annuellement à 6,5 millions d’euros.

Dans leur globalité, ces coûts très importants ont conduit les représentants des SDIS à ouvrir, à l’automne 2012, un débat sur l’avenir de ce régime, dans la perspective de la conclusion d’un nouveau contrat d’assurance à compter du 1er janvier 2016. Une solution consensuelle a été formalisée par la signature d’un pacte le 6 avril 2016 entre les élus, l’État et la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France : les modalités du régime de la PFR sont redéfinies, tout en préservant entièrement les droits des bénéficiaires.

Je retiendrai de cette réforme deux novations importantes.

Tout d’abord, le régime sera désormais assis sur un mécanisme de répartition, financé par flux budgétaires : le montant des contributions annuelles des SDIS sera fixé en fonction des besoins et donc du montant des prestations à verser.

Ensuite, l’APFR, l’association nationale chargée de la surveillance de la PFR, procédera à un contrôle renforcé. En effet, le ministre chargé de la sécurité civile sera de droit représenté aux séances du conseil d’administration de l’association. Le rapport annuel d’activité lui sera transmis, et il pourra exiger toute information nécessaire pour s’assurer de la bonne gestion des régimes, ce qui me semble très important.

Le second volet de la proposition de loi porte sur la réforme de l’encadrement supérieur des SDIS. Il s’articule avec un ensemble de décrets en préparation. La revalorisation de la carrière des officiers de sapeurs-pompiers de catégorie A, concrétisée par la création d’un cadre d’emplois de catégorie A+, mérite d’être approuvée. Elle ouvrira de meilleures perspectives de carrière aux pompiers professionnels, en leur permettant aussi d’exercer leurs fonctions dans l’État.

Le cœur de la réforme réside dans la fonctionnalisation, par l’article 7 de la proposition de loi, des emplois de directeur et directeur adjoint de SDIS.

Le détachement sur un emploi fonctionnel sera prononcé pour une durée de cinq ans au plus, renouvelables une fois, ce qui permettra une plus grande rotation des titulaires de ces postes. Ce dispositif, qui sera profitable aux professionnels comme aux services, est aussi conçu pour remédier aux difficultés rencontrées dans les nominations aux emplois de direction des SDIS, avec de très longues et trop fréquentes vacances de ces postes.

L’article 6 de la proposition de loi met ainsi en place un système de contribution financière à la charge des SDIS qui n’auraient pas pourvu l’un des postes de direction à l’issue d’une double période de trois mois chacune et le rejet de six candidatures.

J’évoquerai maintenant deux autres dispositions de la proposition de loi qui me tiennent à cœur.

Permettez-moi tout d’abord de me réjouir, avec le colonel Faure, très préoccupé par ce sujet, également présent, de la suppression, par l’article 4 de la proposition de loi, de l’interdiction, pour les anciens militaires bénéficiaires d’une pension afférente au grade supérieur, de souscrire un engagement de sapeur-pompier volontaire, ce qui apparaissait, à tout le moins, curieux, puisque celui-ci n’exerce pas une activité professionnelle. Cette question, dont les conséquences sont particulièrement injustes pour un volontaire au service du bien commun, sera donc réglée.

Par ailleurs, l’article 14 concrétise un nouveau fonds d’aide de l’État aux SDIS, alors que le FAI, le Fonds d’aide à l’investissement, a été mis en extinction en 2013.

Il crée une dotation de soutien aux investissements structurants des SDIS, qui devrait être crédité de 20 millions d’euros pour 2017.

Comme je l’ai souligné dans mon avis budgétaire sur les crédits de la sécurité civile, cette enveloppe financière ne signifie pas un effort supplémentaire de l’État. Elle correspond au montant des économies attendues de la réforme de la PFR.

Par ailleurs, j’ai relevé avec intérêt le fléchage de ce nouveau fonds vers la mise en place d’un système de gestion opérationnelle unifié au niveau national pour uniformiser les logiciels équipant les centres de traitement des appels et les centres opérationnels des SDIS. Mais, à mon sens, ce projet ne doit qu’être une première étape vers une mutualisation physique des plateformes d’appel « 15/18 », comme nous l’avons proposé avec mon collègue Pierre-Yves Collombat dans notre récent rapport d’information consacré à l’évolution croissante du secours à personne dans l’activité des SDIS.

Pour préparer mon rapport, j’ai procédé à une large consultation, et compte tenu de l’urgence de l’adoption de cette proposition de loi, j’ai également excellemment travaillé, bien en amont du débat à l’Assemblée nationale, avec l’auteur du texte, Jean-Paul Bacquet, ainsi qu’avec Laurent Prévost, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, qui, je souhaite le souligner, est un homme d’une grande qualité d’écoute : son expérience et sa grande compétence font de lui un soutien incontestable à la bonne organisation de la sécurité civile. Je tiens à les remercier tous, ainsi que le colonel Éric Faure, président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France.

Je tiens également à remercier tous mes collègues sénateurs, auteurs de propositions de loi relatives aux sapeurs-pompiers : Roland Courteau, Olivier Cigolotti, et aussi notre défunt collègue, Louis Pinton, à qui je rends hommage, ainsi que le député Pierre Morel-A-Lhuissier. Tous ces collègues ont accepté que nous ouvrions l’année prochaine un nouveau chantier législatif plus large pour compléter plus globalement les mesures en faveur de la promotion du volontariat notamment. Merci à eux pour leur compréhension.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, en raison de la nécessité de réformer la PFR avant la fin de cette présente année, je vous propose, au nom de la commission des lois, d’adopter sans modification cette proposition de loi. Cela ne signifie nullement que le Sénat se résume à une chambre d’enregistrement. Non ! Au regard de mes propos, le Sénat saura faire preuve de grande sagesse, dépassant tout clivage politique pour servir la grande et noble cause de nos sapeurs-pompiers, à qui je rends un hommage vibrant, au nom de tous les sénateurs. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC, ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain. – M. Jean Desessard applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Roger Madec.

M. Roger Madec. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à quelques jours de l’interruption des travaux parlementaires pour les fêtes de fin d’année, le Sénat examine cet après-midi la proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires, déposée par notre collègue député et président du Conseil national des sapeurs-pompiers volontaires, Jean-Paul Bacquet.

Cette proposition de loi présente la particularité d’avoir été demandée tant par les sapeurs-pompiers professionnels que par les sapeurs-pompiers volontaires. Elle a, en outre, reçu l’assentiment de l’Assemblée des départements de France et celles des maires.

Selon son auteur, cette proposition doit être efficace – c’est le moins que l’on puisse attendre ! – et s’appliquer de façon rétroactive au 1er janvier 2016. En effet, la prestation de fidélisation et de reconnaissance a pris fin le 31 décembre 2015 sans qu’aucun autre dispositif vienne prendre le relais. Il revient donc au Parlement de légiférer rapidement.

Ce texte fait l’objet d’un large consensus, et je tiens à saluer l’état d’esprit constructif qui a présidé à son examen tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat. À cet égard, je remercie la rapporteur Catherine Troendlé, qui a su présenter avec son collègue député un texte consensuel. C’est un symbole très fort en direction de nos sapeurs-pompiers.

Comment pouvait-il en être autrement ? En France, les soldats du feu bénéficient de la part des populations d’un taux de confiance moyen de 90 %. Ce taux record peut s’expliquer par leur disponibilité et le service rendu aux habitants dans des situations de grande détresse. Les sapeurs-pompiers participent ainsi à la sécurité des Français, aux côtés des forces de police, de gendarmerie, de l’armée et de l’administration pénitentiaire.

Au travers de la diversité de leurs missions, l’engagement au quotidien des pompiers et leur dévouement aux services de nos concitoyens ne sont plus à démontrer. Avec la menace terroriste, le travail et le courage dont ils font preuve doivent être salués.

La France compte aujourd’hui 193 656 sapeurs-pompiers volontaires et 40 966 sapeurs-pompiers professionnels. Rappelons-le, la création du premier bataillon de sapeurs-pompiers remonte à 1811, qui succèdent aux gardes-pompes créés en 1716, un corps civil devenu militaire et professionnel. De nombreuses lois sont intervenues au XIXe siècle pour améliorer l’efficience des services d’incendie et de secours, et la loi de 1996 a mis en place la départementalisation de ce service.

La création, par la loi du 13 août 2004, de la prime de fidélité et de reconnaissance, versée aux sapeurs-pompiers volontaires, fut le premier acte de la reconnaissance qui leur est due.

Pourtant, la situation des sapeurs-pompiers n’est pas au beau fixe. Nos soldats du feu sont épuisés, subissant la baisse d’effectifs corrélée à une augmentation exponentielle de leurs interventions au service des plus fragiles.

Les difficultés des missions exercées parfois au péril de leur vie et le manque de reconnaissance ont peut-être conduit à la baisse du nombre de volontaires constatée ces dernières années. Cette diminution inquiétante obligeait les pouvoirs publics à réagir. Car, il faut le rappeler, sans l’engagement de nos 193 000 volontaires, c’est tout notre système de secours, si envié par nos voisins européens, qui s’effondrerait.

M. Charles Revet. C’est vrai !

M. Roger Madec. Cette baisse constante des effectifs des sapeurs-pompiers volontaires a été mise en évidence par de nombreux travaux, rapports d’études et missions parlementaires dès 2003. Le récent rapport d’information sénatorial de nos collègues Pierre-Yves Collombat et Catherine Troendlé sur l’évolution de l’activité des SDIS en matière de secours à personne l’a confirmé. Depuis quelques années, des mesures ont été mises en place pour promouvoir le volontariat et contrer cette diminution des effectifs. On peut se réjouir que la tendance se soit – enfin ! – inversée récemment, puisque le nombre de sapeurs-pompiers volontaires a augmenté d’un peu plus d’un millier depuis 2014.

La création des sections de jeunes sapeurs-pompiers est une formidable école pour de nombreux Français. Celles-ci constituent un recrutement privilégié pour de futurs sapeurs-pompiers professionnels et volontaires. En outre, l’expérimentation des cadets de la sécurité civile participe à la volonté de rompre avec les pertes d’effectifs. Enfin, le développement du service civique dans les SDIS, créé par la future loi Égalité et citoyenneté, permettra sans nul doute à de nouveaux jeunes de s’engager.

C’est dans le prolongement de toutes ces mesures que la présente proposition de loi a été déposée.

Tout d’abord, cette proposition de loi s’attache à apporter la reconnaissance qu’il convient d’adresser à des personnels volontaires qui s’engagent, parfois et pour le pire, au péril de leur vie, et souvent au détriment de leur vie familiale et professionnelle, pour assurer la sécurité de la population en métropole comme outre-mer.

Ensuite, elle préserve le modèle de sécurité civile sur une base identique pour assurer l’égalité entre les territoires, avec l’implication des collectivités territoriales, dont les services de secours sont le prolongement de leurs obligations en termes de sécurité publique.

En outre, elle traduit un engagement du Président de la République et du Gouvernement pour agir, sensibiliser et parvenir à renverser la courbe de la déflation des engagements. Ainsi, les principaux actes de la réforme pour les sapeurs-pompiers volontaires portent sur l’indexation des vacations sur le coût de la vie, la réforme de la prestation de fidélisation et de reconnaissance après vingt années de service.

Enfin, elle contribue au renforcement des effectifs des sapeurs-pompiers, en rendant cette vocation plus attractive pour les anciens militaires, comme vient de le rappeler Mme le rapporteur. Ainsi, ces derniers, lorsqu’ils partiront à la retraite avec la pension du grade supérieur pourront, à l’avenir, rejoindre les rangs des sapeurs-pompiers volontaires en étant indemnisés au même titre que leurs camarades, tout en gardant le bénéfice de leur retraite.

En ce qui concerne les sapeurs-pompiers professionnels, la proposition de loi répond à un objectif d’harmonisation des différents statuts de la fonction publique et de modernisation de la catégorie A, une demande portée par la profession depuis de nombreuses années. Ainsi, le texte crée des emplois fonctionnels de catégorie A+ chez les sapeurs-pompiers professionnels et vise à offrir aux officiers supérieurs un accès possible à la haute fonction publique.

Enfin, la création de la future inspection générale de la sécurité civile est une bonne chose, car elle permet de tenir compte des nouvelles missions dévolues à celle-ci.

Au travers de ce texte, le Parlement entend faire évoluer le statut des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels. Je n’ignore pas que d’autres questions peuvent se poser et pour lesquelles des réponses ne sont pas encore apportées. Je pense en particulier à la reconnaissance matérielle des sapeurs-pompiers volontaires. Nombre d’entre eux éprouvent des difficultés à concilier leur mission et les contraintes de leur vie professionnelle. Trop souvent encore, les employeurs estiment que les pompiers volontaires constituent une charge financière. Des mesures doivent être envisagées à l’avenir, surtout pour les petites communes, les petites entreprises, les artisans ou les commerçants. Les dépenses d’investissement des SDIS constituent un frein au renouvellement de matériel et au besoin urgent de remplacement de véhicules.

Même si cette proposition de loi est imparfaite, elle constitue néanmoins une grande avancée. Il ne s’agit pas là que d’un texte technique. C’est un texte important, que le Parlement doit adopter. Il a fait l’objet d’un vote unanime à l’Assemblée nationale et d’un vote consensuel au sein de la commission des lois du Sénat ; j’espère qu’il en sera de même ce soir en séance publique.

En donnant force de loi à ces mesures, le Parlement permettra de poursuivre cette démarche d’encouragement de l’engagement volontaire, de valoriser l’emploi de direction et prendra acte des nouvelles réalités auxquelles sont confrontées ces professions.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe socialiste, républicain et citoyen soutient avec force ce texte, qui, je le répète, constitue une avancée remarquable pour les sapeurs-pompiers de France. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme la rapporteur, M. Jean Desessard et M. Olivier Cigolotti applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons cet après-midi fait consensus.

Avant tout, nous tenons à saluer ces femmes et ces hommes qui ont joué un rôle de premier ordre dans l’immense élan de solidarité qui a traversé le pays à la suite des drames que nous avons vécus en 2015 et 2016. Leur humanité et leur dévouement au service de tous ont été reconnus unanimement. Cette unanimité devrait, selon nous, être un moteur pour l’amélioration de leur statut.

Le présent texte contribuerait-il à cette amélioration ? Il fait suite à un accord conclu au mois d’avril dernier entre les différents acteurs de la sécurité civile : les collectivités territoriales, l’État, et les représentants des sapeurs-pompiers. Une des principales mesures qu’il comporte est la rénovation du dispositif de l’indemnité de fin de service pour les sapeurs-pompiers volontaires. Plus précisément, la proposition de loi instaure une nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance, financée par répartition. Il s’agit là d’une mesure urgente, le contrat d’assurance sur lequel reposait l’ancien dispositif étant arrivé à échéance le 31 décembre dernier. Nous reconnaissons donc la nécessité de ce texte.

Par ailleurs, les autres dispositions qu’il comprend, comme la possibilité donnée aux anciens officiers et sous-officiers de carrière de la défense et de la sécurité nationale de pratiquer une activité de sapeur-pompier volontaire sans perdre le bénéfice de leur pension de retraite, mais aussi les précisions sur le statut d’emploi des directeurs et directeurs adjoints des services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS, et la mesure relative à la transparence des transferts de la fraction du taux de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance pour le financement des SDIS, ne nous semblent pas préjudiciables au bon fonctionnement du service public de la sécurité civile.

Il n’en reste pas moins que celui-ci est menacé par d’autres problèmes, que la présente proposition de loi n’aborde pas. De ce point de vue, les manifestations de nombreux sapeurs-pompiers le mois dernier ne doivent pas, à notre sens, rester sans réponse.

Il est par conséquent nécessaire de prendre la mesure de la situation plus que dégradée des services d’incendie et de secours de notre pays. Le modèle français fonctionne sur une organisation territoriale qui répond à un schéma départemental d’analyse et de couverture des risques. C’est donc logiquement que, dans 82 % des cas, les centres d’incendie et de secours sont placés sous l’autorité des départements.

Les sapeurs-pompiers volontaires, qui représentent les quatre cinquièmes de l’ensemble des effectifs, sont passés, en dix ans, de 207 000 à 193 700 engagés. Ils doivent pourtant assumer 70 % des interventions de secours et d’incendie, dont le nombre s’est accru sur la même période, passant de 3,6 millions en 2004 à 4,45 millions en 2015. Or les volontaires continuent à ne représenter que 15 % de la masse salariale des SDIS, alors qu’ils éprouvent de plus en plus de difficultés à concilier leur vie professionnelle avec leur mission de sapeur qui leur demande un investissement croissant.

La proposition de loi élude cette question de la condition matérielle des sapeurs-pompiers volontaires, qu’il conviendrait pourtant de sécuriser davantage, afin d’endiguer la diminution de leurs effectifs.

Nous nous devons de soulever aussi un autre enjeu : la fermeture des casernes. Relevons que, entre 2002 et 2015, pas moins de 1 700 centres ont fermé, dont 121 pour la seule année 2015 ! Le milieu rural est touché à titre principal par ce phénomène. Ainsi, faute de moyens, de nombreux centres sont supprimés, ce qui entraîne une extension des périmètres d’intervention, au détriment de la garantie d’un service public de qualité et, là encore, des conditions de travail et de la santé des personnels des centres d’incendie. De fortes inégalités territoriales se creusent d’année en année, sans que soient menées des politiques publiques propres à endiguer ce phénomène.

Le vrai problème, c’est que la politique de sécurité civile subit les mêmes recettes d’austérité que celle qui concerne les autres services publics. Ainsi, la baisse continue des dotations aux collectivités territoriales a fait des services d’incendie et de secours une autre variable d’ajustement des budgets départementaux, qui sont passés de 928 millions d’euros en 2010 à 761 millions d’euros en 2015. Cette austérité aggrave le creusement des inégalités territoriales, le budget par habitant et par an au profit d’un SDIS pouvant varier du simple au double selon le département.

Par ailleurs, les réductions budgétaires contribuent à l’épuisement des sapeurs-pompiers, volontaires comme professionnels, qui, de plus en plus, sont mobilisés en substitution d’autres services publics, comme le SAMU ou le SMUR.

Remarquons que les conditions générales dans lesquelles se trouve la société française n’aident pas non plus. Ainsi, les pompiers sont de plus en plus confrontés à la souffrance et à la misère sociale, sans formation préalable. Dès lors, on ne peut que comprendre que, désormais, 40 % environ des volontaires arrêtent leur activité au bout de cinq ans d’engagement.

S’ajoute à cela le manque de moyens matériels de nombreux centres, lié au non-renouvellement des équipements ou à la vétusté des véhicules.

Enfin, alors que les pompiers sont de plus en plus mobilisés, notamment pour des missions qui relèvent du secours à la personne, l’orientation sécuritaire ne contribue pas, loin de là, à alléger leur quotidien. Aussi, les personnels doivent assumer des missions au spectre de plus en plus large. C’est ainsi qu’on les a vus s’affairer dans le cadre des évacuations de camps de migrants. Et que dire de leur participation active lors des tristes événements qui ont frappé la France à partir de 2015 ? Or, en période d’état d’urgence, et alors que les risques de nouvel attentat sont élevés, aucun moyen supplémentaire n’est alloué aux SDIS.

L’article 14 de la présente proposition de loi instaure une dotation de soutien aux investissements structurants des services d’incendie et de secours. Certes, la nouvelle peut paraître bonne ; mais il convient tout de même de signaler qu’il s’agit d’un redéploiement de crédits correspondant au montant de l’économie attendue de la réforme de la prestation de fidélisation et de reconnaissance. En d’autres termes, il ne s’agit pas vraiment d’une nouvelle aide, d’autant que, rappelons-le, le fonds d’aide à l’investissement des SDIS avait été mis en extinction en 2013.

M. Bernard Vera. Très juste !

Mme Éliane Assassi. Il semble donc plus que nécessaire de nous interroger sur la viabilité de notre modèle de sécurité civile qui repose désormais sur des investissements départementaux en constante diminution et sur le système du volontariat, qu’il conviendrait de valoriser tout en renforçant aussi les effectifs des sapeurs-pompiers professionnels, garants de la continuité de ce service public. En somme, il s’agit d’assurer l’égalité des citoyens face aux risques en garantissant l’engagement de l’État dans ce service public auquel les Français sont très attachés.

Cela étant, nous voterons la proposition de loi soumise à notre examen, mais nous tenons à réaffirmer que de gros progrès sont encore à faire pour assurer des conditions de travail décentes aux femmes et aux hommes qui s’engagent pour protéger et secourir leurs concitoyens et pour pallier les inégalités territoriales grandissantes dans le domaine de la sécurité civile ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur certaines travées du groupe socialiste et républicain. – M. Jean Desessard et Mme la rapporteur, applaudissent également.)

M. Bernard Vera. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Hermeline Malherbe.

Mme Hermeline Malherbe. Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, l’originalité de notre sécurité civile est de faire appel à une force mixte, composée d’un peu plus de 40 800 sapeurs-pompiers professionnels et de près de 194 000 sapeurs-pompiers volontaires, soit environ quatre cinquièmes de l’effectif total. Les pompiers volontaires exercent une activité bénévole indemnisée dont je rappelle qu’elle reste sous la menace de l’Europe libérale : nous avons échappé aux difficultés pour l’instant, mais un important combat reste à mener.

Les sapeurs-pompiers, avec les policiers et les gendarmes, sont au service de la sécurité de nos concitoyens, parfois au péril de leur vie, comme l’actualité nous l’a rappelé cette année dans notre pays et nous le rappelle depuis hier soir à Berlin ; je pense également à ce qui s’est passé l’été dernier dans mon département, les Pyrénées-Orientales.

Pour les missions qu’ils assurent, je tiens à les remercier chaleureusement toutes et tous. Je sais pouvoir associer l’ensemble de mes collègues du groupe du RDSE et, plus généralement, chacune et chacun d’entre vous, mes chers collègues, à ce témoignage de gratitude et de reconnaissance.

En ce 20 décembre, entre la récente célébration de sainte Barbe, patronne des pompiers, qui nous rappelle des valeurs fortes comme l’abnégation et le courage, et les vœux de la nouvelle année qui s’annoncent avec leur lot de bonnes intentions, il s’agit, à la faveur de l’examen de cette proposition de loi, de dresser un état des lieux.

Je commencerai par rappeler que c’est à la fin du Moyen Âge qu’a été créé le premier corps de sapeurs-pompiers volontaires, dans la province du Roussillon, par l’intendant Louis Raymond de Saint-Sauveur, qui fournit à ces hommes 120 seaux en cuir cerclés d’osier… Les pompiers d’aujourd’hui sont heureusement bien mieux équipés : ils disposent de véhicules de secours et d’équipements plus adaptés, d’une meilleure protection en termes d’habillement, d’outils plus maniables, de centres d’appel beaucoup plus performants, même s’il n’y en a pas partout, et de communications internes elles aussi plus performantes. De grands progrès ont été réalisés depuis la départementalisation, même si nous devons bien évidemment poursuivre les efforts.

Les interventions sont donc facilitées, mais elles sont aussi beaucoup plus nombreuses et, surtout, évoluent avec notre société.

Ainsi, nos collègues du groupe socialiste, écologiste et républicain de l’Assemblée nationale, emmenés par Jean-Paul Bacquet, ont présenté cette proposition de loi, qui a été adoptée en séance le 29 novembre dernier, puis, sans modification, par la commission des lois du Sénat, le 7 décembre dernier. Nous vous félicitons, madame la rapporteur, pour votre implication sur cette question et pour le travail que vous avez mené avec Pierre-Yves Collombat.

La mesure principale de ce texte est la refonte de la prestation de fidélisation et de reconnaissance, la PFR, qui est, en quelque sorte, la retraite des sapeurs-pompiers volontaires. Cette prestation concerne les sapeurs-pompiers volontaires âgés de plus de cinquante-cinq ans et ayant plus de vingt ans de service : ils bénéficient d’une rente viagère, dont le régime méritait assurément clarification.

L’optimisation de gestion de ce nouveau dispositif doit permettre un service plus lisible pour les sapeurs-pompiers volontaires bénéficiaires. La lisibilité sera améliorée également pour les financeurs de l’allocation, en particulier les départements et le bloc communal.

Une autre avancée notable du texte tient à la revalorisation plus régulière et plus souple de l’indemnité de vacation. Cette nouvelle formule correspond mieux aux réalités des évolutions de notre société ; elle va ainsi dans le bon sens.

Il en va de même pour la possibilité d’intégrer dans le compte personnel d’activité les durées de service en tant que sapeur-pompier volontaire. Il s’agit là d’une meilleure reconnaissance de nos sapeurs-pompiers volontaires et de leur activité au service de tous.

Le second volet de cette proposition de loi concerne les sapeurs-pompiers professionnels. Il prévoit la création d’emplois fonctionnels pour les postes de direction dans les services départementaux d’incendie et de secours en garantissant le maintien des avantages spécifiques de la catégorie active. Est aussi prévue la création d’un nouveau cadre d’emplois, de catégorie A+.

Ces mesures parachèvent le dispositif réglementaire de revalorisation des grilles indiciaires des sapeurs-pompiers dans leur ensemble. Dix-neuf décrets au total sont en cours de rédaction. N’oublions pas toutes les autres catégories, pour lesquelles les négociations se poursuivent.

Cette proposition de loi améliore la situation actuelle en prenant en compte, en partie, l’évolution de la fonction de pompier dans la société d’aujourd’hui. Elle ne rencontre pas d’opposition notable. Je profiterai toutefois de ma présence à la tribune pour faire état de certaines difficultés.

Madame la ministre, je donne acte au gouvernement dont vous faites partie d’avoir œuvré pour prendre en considération l’évolution des besoins en termes de sécurité civile sur le territoire national, en particulier l’augmentation des interventions de secours à la personne et des départs de feu, accidentels ou criminels. Pourtant, nous constatons plus de prévention, menée avec les élus locaux ou les associations, en liaison avec le préfet.

Vous avez engagé au mois d’octobre 2013 un pacte de vingt-cinq mesures destinées à développer le volontariat, avec pour objectif 200 000 sapeurs-pompiers volontaires en 2017. Si des progrès ont été accomplis, il nous faut poursuivre les efforts. Il nous faut aller encore plus loin et faire preuve d’audace pour rassurer les employeurs publics et privés qui embauchent des sapeurs-pompiers volontaires. Nous devons également miser sur la féminisation de la filière ; les chiffres à cet égard ont été précédemment indiqués. Pour pérenniser et développer le volontariat malgré les évolutions sociétales, nous avons besoin d’un élan citoyen !

Tout le monde apprécie les pompiers, tout le monde loue la bravoure de ces femmes et de ces hommes dont la devise républicaine est : « Courage et dévouement ». Si donc nous voulons réellement garder notre système de sécurité civile, envié dans le monde entier, il nous faut trouver des solutions à l’organisation des secours sur l’ensemble du territoire et au financement des services départementaux d’incendie et de secours.

Étudions ensemble les pistes de nouveaux outils de financement, à partir – pourquoi pas ? – d’une ressource nationale. Là aussi, rien ne nous interdit d’être audacieux ! Trouvons un nouvel équilibre entre les communes, les EPCI et les départements. Confirmons la gestion des pompiers dans les départements, au plus près des besoins, avec une part de fiscalité nationale garantissant une juste répartition des ressources sur l’ensemble du territoire.

Tout cela, mes chers collègues, dans l’intérêt des pompiers, pour la sécurité de nos populations ! (Applaudissements sur les travées du RDSE. – M. Jean Desessard et Mme la rapporteur applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC. – M. Cyril Pellevat applaudit également.)

M. Olivier Cigolotti. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en ayant une pensée pour nos amis allemands, nous examinons cet après-midi une proposition de loi relative à nos sapeurs-pompiers, qui sont souvent en première ligne lors d’horribles attentats, comme celui qui a été commis hier à Berlin.

Notre modèle français de sapeurs-pompiers constitue un modèle unique de protection civile. Il permet d’associer des sapeurs-pompiers professionnels, rémunérés et bénéficiant d’un régime de retraite, et des sapeurs-pompiers volontaires, indemnisés sous forme de vacation et bénéficiant, après vingt ans de service accompli, non pas d’une retraite, mais d’une rente annuelle appelée prestation de fidélisation et de reconnaissance, ou PFR.

Nos sapeurs-pompiers représentent aussi et surtout l’une des plus grandes forces associatives de notre pays, avec près de 247 000 adhérents au sein de 98 unions départementales.

En 2015, plus de 4 millions d’interventions ont été assurées, soit près de 12 200 par jour. Les sapeurs-pompiers s’inscrivent dans notre vie quotidienne en assurant la sécurité de tous, grâce à un service performant et de grande qualité. Par leur courage, leur rigueur, leur dévouement, leur engagement volontaire et désintéressé, ces hommes et ces femmes incarnent, à plus d’un titre, les valeurs de notre République.

L’État doit continuer à accompagner, encourager et pérenniser notre système, avec l’aide des communes, des communautés de communes et des conseils départementaux, principaux financeurs des services départementaux d’incendie et de secours.

À tous les niveaux, nous devons témoigner notre reconnaissance envers ceux et celles qui consacrent du temps, voire qui prennent des risques, pour servir les autres, au sens le plus noble du terme.

Entre 2004 et 2014, les effectifs de sapeurs-pompiers volontaires n’ont cessé de diminuer, en dépit de la charte nationale du sapeur-pompier volontaire, préconisée par la commission Ambition volontariat, puis de l’engagement national pour le volontariat signé le 11 octobre 2013. Il est important de conserver la volonté de créer et de développer une réserve de sapeurs-pompiers volontaires : cela doit être une priorité pour l’ensemble des élus.

Le volontariat est tout à la fois une histoire, une tradition et une forme moderne d’engagement dans notre société. Notre jeunesse y est particulièrement sensible. Il suffit pour s’en convaincre d’observer la multiplication des demandes pour intégrer la réserve militaire depuis le 13 novembre 2015.

À l’échelon national, c’est tout notre système de secours qui est mis en danger par un manque de volontaires, plus particulièrement dans les zones rurales. Dans certains secteurs isolés, en raison notamment de la désertification médicale, les sapeurs-pompiers restent la seule réponse. Ils constituent un fort réseau de solidarité et de proximité. Ce maillage territorial, il faut à tout prix le préserver !

La France compte environ 7 000 casernes ou centres, mais, en six ans, près de 750 ont fermé. Il faut pourtant préserver ce réseau, parce qu’il est irremplaçable pour l’efficacité même du service public. La fermeture des centres d’incendie et de secours en milieu rural affecte négativement la qualité des secours, et la fermeture de centres n’incite pas au recrutement de sapeurs-pompiers.

Par ailleurs, l’allongement des délais d’intervention est synonyme de diminution des chances de survie et de moindre capacité à réagir à des risques exceptionnels : attentat, catastrophe naturelle ou technologique, accident de grande ampleur.

Les services départementaux d’incendie et de secours sont les maillons indispensables pour garantir une égalité d’accès au secours sur l’ensemble du territoire et pour préserver la proximité et la qualité de ce service public de la sécurité civile.

Notre priorité aujourd’hui est de favoriser le volontariat, dans les zones rurales comme dans les territoires plus urbains.

La proposition de loi soumise à notre examen, adoptée par l’Assemblée nationale le 29 novembre dernier, comporte des mesures simples et efficaces, qui inciteront de nombreux jeunes à rejoindre ce tissu associatif, cette structure de solidarité que constitue le corps des sapeurs-pompiers, témoin d’une culture de l’entraide, de la générosité et de l’abnégation. La protection de nos populations et la pérennité de notre modèle unique de sécurité civile en dépendent.

En particulier, la proposition de loi réforme l’indemnité de fin de service des sapeurs-pompiers, la prestation de fidélisation et de reconnaissance, ou PFR. À cet égard, un problème doit être évoqué : organisée par capitalisation, la PFR a été collectée à hauteur de 70 millions d’euros en 2015 pour seulement 30 millions d’euros reversés. Le régime de la PFR assure une rente annuelle aux anciens sapeurs-pompiers volontaires et leur apporte un complément de couverture sociale. Cette rente complémentaire est versée une fois par an aux anciens sapeurs-pompiers volontaires ayant accompli au moins vingt ans de services effectifs. La présente proposition de loi abaisse ce seuil à quinze ans dans certaines conditions. La PFR n’est ni imposable ni soumise aux prélèvements sociaux ; elle est cumulable avec tout revenu ou prestation sociale.

Conformément au pacte signé le 6 avril dernier par les acteurs de la gouvernance, cette réforme préservera intégralement les droits des sapeurs-pompiers volontaires, supprimera leurs cotisations et s’effectuera sans rupture ni discontinuité, dans un cadre cohérent avec les actuelles prestations de fin de service.

De même, la participation de l’État sera fixée par décret et prendra la forme d’un fonds de soutien à l’investissement et à l’innovation ; elle servira à accompagner des projets structurants, innovants ou d’intérêt national dans le domaine de la sécurité civile.

Différentes mesures contenues dans la proposition de loi visent à favoriser l’exercice du volontariat. Ainsi de la simplification du mode de revalorisation annuelle des indemnités allouées aux sapeurs-pompiers volontaires qui s’effectuera par voie d’arrêté conjoint des ministres de l’intérieur et du budget.

Je pense aussi à la possibilité donnée aux anciens militaires exerçant l’activité de sapeur-pompier volontaire de poursuivre celle-ci en continuant à percevoir leur pension d’accès au grade supérieur.

Songeons également à la reconnaissance de l’éligibilité des actions de formation des sapeurs-pompiers volontaires à la formation professionnelle et à l’intégration du volontariat des sapeurs-pompiers parmi les activités bénévoles ou de volontariat permettant d’acquérir des heures inscrites au compte d’engagement citoyen créé par la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

Le second volet de cette proposition de loi touche à la revalorisation de la carrière des officiers sapeurs-pompiers professionnels de catégorie A.

Dans le prolongement des dix-neuf textes réglementaires d’ores et déjà approuvés par les instances consultatives, la proposition de loi institue un statut d’emploi fonctionnel pour les directeurs et les directeurs adjoints des services départementaux d’incendie et de secours, dans le cadre maintenu du principe de conomination par l’État et le conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours et avec la conservation des dispositions propres au statut de sapeur-pompier professionnel. Ce statut d’emploi fonctionnel doit être mis en œuvre très rapidement.

Afin de traduire les engagements pris au mois de septembre dernier à Tours lors du dernier congrès de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, plusieurs amendements ont été adoptés par l’Assemblée nationale.

Ainsi, à la demande de nos collègues députés, un rapport devra être remis par le Gouvernement au Parlement dans un délai maximal de trois ans après la promulgation de la loi, afin d’évaluer, notamment, le coût de l’abaissement à quinze ans de l’éligibilité à la PFR et de la revalorisation de 10 % des rentes existantes.

La réforme de la PFR nous impose une réactivité immédiate, pour une entrée en vigueur rétroactive au 1er janvier 2016.

Auteur d’une proposition de loi tendant à favoriser le recrutement des sapeurs-pompiers volontaires, élaborée en collaboration avec plusieurs de mes collègues, dont Cyril Pellevat, et cosignée par plus de cent parlementaires de notre assemblée, j’aurais souhaité, comme eux, que le texte soit plus complet. Ce dernier n’en constitue pas moins une réelle avancée. Au demeurant, madame la rapporteur, j’ai bien entendu les propositions que vous avez présentées au début de la discussion générale.

Le groupe UDI-UC votera sans réserve cette proposition de loi, qui améliore incontestablement la situation des sapeurs-pompiers et facilite le fonctionnement opérationnel des services d’incendie et de secours ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, nous examinons cet après-midi en urgence la proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires.

Mon discours ressemblera à celui des orateurs précédents, mais les sapeurs-pompiers ne se lasseront pas, puisqu’il s’agit de leur adresser des félicitations et des paroles de reconnaissance pour leur travail social très utile.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Les paroles, c’est bien, mais les actes c’est mieux !

M. Jean Desessard. En préambule, je salue donc, comme l’ensemble de mes collègues, le travail remarquable accompli au quotidien par les quelque 41 000 sapeurs-pompiers professionnels et les 194 000 sapeurs-pompiers volontaires, qui ont réalisé en 2015 près de 4,5 millions d’interventions, dont 4 374 pour départ de feu.

Il est de notre rôle de législateur, spécialement de sénateurs, représentants des territoires, de nous assurer que ce service public puisse être exercé dans les meilleures conditions.

La présente proposition de loi répond à des défis majeurs, et nous en saluons le triple objectif : enrayer la diminution des effectifs de sapeurs-pompiers volontaires, passés de 207 000 à 194 000 au cours des dix dernières années ; résorber les zones blanches apparues dans le maillage territorial ; lutter contre la faiblesse des investissements dans les services départementaux d’incendie et de secours.

Le 6 avril dernier, un groupe de travail comprenant des représentants de l’État, des élus locaux et des sapeurs-pompiers a présenté de grandes orientations dans le cadre du pacte relatif à la réforme de la prestation de fidélisation et de reconnaissance, la PFR. Cette proposition de loi en est la traduction législative. Elle instaure une nouvelle PFR, désormais financée de manière pérenne par les contributions des services départementaux d’incendie et de secours, épaulés par une aide financière de l’État.

L’urgence de ce texte se justifie par la présence en son sein de dispositions rétroactives, applicables au 1er janvier 2016, comme Mme la rapporteur l’a expliqué. Il s’agit d’assurer la continuité des versements de la PFR, dont les sources de financement par capitalisation, instaurées par la loi du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, se sont taries le 31 décembre 2015. Ainsi, les sapeurs-pompiers volontaires qui bénéficieront de ce nouveau régime, ceux qui n’auront pas encore atteint vingt ans de services au 1er janvier 2016, n’auront plus besoin de cotiser pour le versement de leur PFR. Nous nous en félicitons.

Ce texte présente d’autres avantages, que nous tenons à souligner.

Je pense d’abord à la modification de la procédure de revalorisation des indemnités allouées aux sapeurs-pompiers volontaires pour tenir compte de l’évolution de l’indice des prix à la consommation.

Je pense ensuite à la prise en compte des activités de sapeur-pompier volontaire dans le compte personnel d’activité et, plus précisément, le compte d’engagement citoyen.

Je pense enfin à la possibilité désormais ouverte à un ancien militaire de s’engager comme sapeur-pompier volontaire en conservant son grade et sa pension.

Un bémol, toutefois, concernant la gestion des versements de la PFR par l’Association nationale pour la prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires : si l’Assemblée nationale a judicieusement amendé le texte pour obtenir de cette association la publication d’un rapport annuel, des problèmes de transparence, nous dit-on, subsistent, qui inquiètent les syndicats.

En réalité, les chiffres sont très difficilement accessibles, et les pompiers volontaires qui cessent leur activité ne sont pas toujours informés de leurs éventuels droits. Cette situation entre en contradiction avec le principe d’accessibilité des données énoncé par la loi pour une République numérique. Nous invitons donc le Gouvernement à nous préciser comment il compte garantir la transparence du dispositif.

S’agissant des sapeurs-pompiers professionnels, la réforme se concentre sur le fonctionnement des services départementaux d’incendie et de secours, en particulier de leur direction. Au regard de l’importance que revêtent ces missions, il nous paraît opportun, comme le prévoit le texte, d’octroyer aux personnels de direction de ces structures le statut d’emploi fonctionnel, dont bénéficient la majorité des personnels de direction des collectivités territoriales. Cette mesure aura pour double effet de valoriser ces personnels et de remédier au problème récurrent de vacance de ces postes de direction et d’adjoint de direction de service départemental d’incendie et de secours.

Pour toutes ces raisons, le groupe écologiste votera en faveur de la proposition de loi, fruit d’un large compromis. (Exclamations amusées sur plusieurs travées de l’UDI-UC et du groupe Les Républicains.) Mes chers collègues, puisque vous semblez apprécier la formule, je vais la répéter… (Sourires.) Pour toutes ces raisons, le groupe écologiste votera la proposition de loi ! (Rires et applaudissements.) En effet, ce texte nous semble répondre aux défis auxquels fait face aujourd’hui l’engagement professionnel ou bénévole de sapeur-pompier. Espérons qu’il contribue à maintenir et à créer des vocations dont notre pays est si fier ! (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Cyril Pellevat. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteur, mes chers collègues, je tiens avant tout à saluer la présence dans nos tribunes du colonel Éric Faure, président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France. Je remercie la Fédération de son action quotidienne. J’ai aussi une pensée pour son secrétaire général adjoint, le Haut-Savoyard Jean-Paul Bosland, avec qui j’ai des liens très réguliers.

M. Loïc Hervé. Une référence !

M. Cyril Pellevat. La proposition de loi qui nous réunit ce jour, déposée par le groupe socialiste, écologiste et républicain à l’Assemblée nationale et soutenue par l’ensemble des groupes parlementaires de l’Assemblée, vise à apporter des modifications au droit actuel encadrant le statut des sapeurs-pompiers, afin de répondre aux difficultés rencontrées par ce corps.

Notre modèle de sécurité civile combine un pilotage centralisé, une gestion départementale des services d’incendie et de secours et l’action conjointe et complémentaire des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels. Or, dans leur rapport d’information sur l’évolution de l’activité des services départementaux d’incendie et de secours en matière de secours à la personne, nos collègues Catherine Troendlé et Pierre-Yves Collombat avaient fait remarquer que ce modèle de sécurité civile était aujourd’hui en partie remis en cause, du fait de la diminution des effectifs de sapeurs-pompiers volontaires, de l’apparition de zones blanches dans le maillage territorial et de la faiblesse des investissements dans les SDIS.

La proposition de loi s’articule ainsi autour de deux axes, qui permettent d’apporter des améliorations concrètes aux sapeurs-pompiers, tant professionnels que volontaires, afin de répondre à la baisse des effectifs.

Concernant les sapeurs-pompiers professionnels, le texte tire les conséquences de la création d’une catégorie A+ et de la fonctionnalisation des emplois de direction dans le cadre de la réforme des emplois supérieurs de direction, pour valoriser les sapeurs-pompiers professionnels.

La proposition de loi crée ainsi des emplois fonctionnels pour les officiers supérieurs de sapeurs-pompiers professionnels. Ces dispositions permettront de conforter la relation de confiance nécessaire entre le titulaire du poste et son autorité d’emploi, tout en favorisant une plus grande mobilité au sein du corps.

Concernant les sapeurs-pompiers volontaires, le texte introduit un nouveau dispositif d’indemnité de fin de service, la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance, ou NPFR. Cette prestation présente des modalités de financement considérablement transformées, sans que soient modifiés les droits des sapeurs-pompiers volontaires bénéficiaires. Elle doit entrer en vigueur de manière rétroactive au 1er janvier 2016.

La réforme de cette prestation résulte d’une demande des conseils départementaux et des représentants des sapeurs-pompiers volontaires. En 2015, un groupe de travail de l’Assemblée des départements de France a conduit une étude soulignant le décalage entre les sommes versées à l’organisme assureur et celles qui sont allouées aux anciens sapeurs-pompiers volontaires bénéficiaires.

Le Gouvernement, les élus et les représentants des sapeurs-pompiers volontaires sont parvenus à un consensus sur les modifications à apporter au régime de la prestation. Ce consensus a été formalisé par un pacte signé le 6 avril 2016, qui est concrétisé dans la présente proposition de loi.

La nouvelle prestation doit être financée uniquement par la contribution annuelle obligatoire versée par chaque SDIS. Son montant sera fixé en fonction de celui des prestations devant être versées aux sapeurs-pompiers volontaires bénéficiaires.

Le texte simplifie également les modalités de revalorisation des indemnités horaires pour les sapeurs-pompiers volontaires, afin d’encourager l’engagement de ceux-ci, lequel diminue, et de prendre en compte les spécificités de leur statut de volontaire.

Je souhaite préciser que, à titre personnel, je soutenais les amendements de mon collègue Alain Marc qui visent à prioriser le traitement des demandes de mutation pour les fonctionnaires sapeurs-pompiers volontaires, par l’instauration d’une bonification de points d’ancienneté. Vie professionnelle et engagement au sein des sapeurs-pompiers volontaires pourraient ainsi être mieux conciliés. Nous avons néanmoins compris que, au vu de l’urgence de l’adoption de ce texte, ces amendements devraient être retirés. (Protestations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.) Bien entendu, il reviendra à leur auteur d’en décider !

Je suis également favorable à un allégement général des cotisations patronales pour les entreprises employant des sapeurs-pompiers volontaires. Une telle mesure récompenserait les entreprises qui encouragent leurs salariés à mener à bien leur engagement de sapeur-pompier volontaire et inciterait d’autres employeurs à recruter des personnes ainsi engagées.

J’ai d’ailleurs déposé, avec mon collègue Olivier Cigolotti, une proposition de loi tendant à favoriser le recrutement des sapeurs-pompiers volontaires et qui comporte des dispositions similaires. Je suis convaincu que ce bénévolat est précieux et que nous devons intervenir en urgence pour le préserver.

Madame la ministre, je souhaite profiter de cette occasion pour vous interpeller sur un point précis lié à la réforme de 2013 sur le statut particulier du cadre d’emploi des sous-officiers de sapeurs-pompiers. Le président du conseil départemental de Haute-Savoie a déjà fait part de ce problème au ministre de l’intérieur.

Il est prévu que les chefs d’agrès devront être titulaires du grade d’adjudant et que les sapeurs-pompiers volontaires titulaires du grade de sergent devront attendre six ans pour accéder au grade d’adjudant. Or tout véhicule doit être dirigé par un chef d’agrès avant de quitter la caserne. Dans les petits centres de zones rurales, les chefs d’agrès sont pour beaucoup des volontaires, titulaires du grade de sergent.

Selon le patron des sapeurs-pompiers de mon département, avec cette réforme, il faudrait au minimum 12 ans pour atteindre le grade d’adjudant, soit plus que la durée moyenne d’engagement des volontaires, qui est de 11,8 ans en Haute-Savoie. Il faut absolument éviter une pénurie de chefs d’agrès, en particulier dans les petits centres. Les zones rurales vont être fortement affectées.

M. Loïc Hervé. Absolument !

M. Cyril Pellevat. Que pouvez-vous m’indiquer à ce sujet, madame la ministre ? Allez-vous réduire la durée d’accession au grade d’adjudant, ou adopter un moratoire permettant à tous les chefs d’agrès sergents d’être nommés adjudants ?

Enfin, comme vous, mes chers collègues, je tiens à saluer tous ces bénévoles et professionnels que sont les sapeurs-pompiers, pour lesquels nous nous accordons à éprouver un fort sentiment de reconnaissance. Nous les remercions vivement de leur engagement.

Malheureusement, ils doivent faire face à de plus en plus d’actes d’incivilité ; je pense notamment à trois sapeurs-pompiers de La Roche-sur-Foron, commune située dans mon département, qui ont été agressés le 2 décembre dernier.

En conclusion, la proposition de loi examinée ce jour aurait pu être plus large et plus complète. Il sera selon moi nécessaire de revenir sur les sujets concernant ce secteur lors de la prochaine législature, pour assurer un plus ample encouragement au volontariat, et améliorer le maillage territorial et la gouvernance face à l’inégalité des départements, notamment.

En tout cas, c’est un vrai travail de concertation qui a permis l’élaboration du texte qui nous est soumis aujourd’hui. Cette proposition de loi est transpartisane. Consensuelle, elle est attendue par les sapeurs-pompiers. Il y a notamment urgence pour l’adoption de la réforme de la prestation de fidélisation et de reconnaissance. Le groupe Les Républicains votera en faveur de ce texte. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC. – Mme Hermeline Malherbe applaudit également.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires

TITRE Ier

Dispositions relatives aux sapeurs-pompiers volontaires

Chapitre Ier

Prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires
Article 1er

Article 1er A

(Non modifié)

Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard trois mois après la promulgation de la présente loi, un rapport qui permet de déterminer :

1° Le coût pour l’État et pour les services départementaux d’incendie et de secours, en 2015 et 2016, de la prestation de fidélisation et de reconnaissance créée par la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile et modifiée par la présente loi ;

2° Le coût que représenterait un abaissement à quinze ans de volontariat de l’éligibilité au dispositif de la prestation de fidélisation et de reconnaissance prévu aux articles 15-1 à 15-14 de la loi n°96-370 du 3 mai 1996 relative au développement du volontariat dans les corps de sapeurs-pompiers, dans sa rédaction résultant de la présente loi ;

3° Le coût que représenterait une revalorisation de 10 % des rentes existantes ;

4° Les conditions de l’inscription dans le compte personnel d’activité ouvert aux sapeurs-pompiers volontaires de la prestation de fidélisation et de reconnaissance. –

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er A.

(L'article 1er A est adopté.)

Article 1er A
Dossier législatif : proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires
Article 2

Article 1er

(Non modifié)

I. – Le titre III de la loi n° 96-370 du 3 mai 1996 relative au développement du volontariat dans les corps de sapeurs-pompiers est ainsi modifié :

1° À la fin de l’intitulé, les mots : « et la prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires » sont remplacés par les mots : « , la prestation de fidélisation et de reconnaissance et la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance » ;

2° L’article 12 est ainsi modifié :

a) La seconde phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « dans des conditions fixées par décret » ;

b) Sont ajoutés quatre alinéas ainsi rédigés :

« Le présent article ne s’applique pas :

« 1° Aux sapeurs-pompiers volontaires des corps départementaux qui cessent définitivement le service à compter du 1er janvier 2004 ;

« 2° Aux sapeurs-pompiers des corps communaux ou intercommunaux mentionnés au deuxième alinéa de l’article 15-2 qui cessent définitivement le service à compter de la date d’adhésion de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale qui les gère au régime de la prestation de fidélisation et de reconnaissance prévu à l’article 15-1 ;

« 3° Aux sapeurs-pompiers des corps communaux ou intercommunaux mentionnés au deuxième alinéa de l’article 15-11 qui cessent définitivement le service à compter de la date d’adhésion de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale qui les gère au régime de la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance prévu à l’article 15-10. » ;

3° À la première phrase du premier alinéa de l’article 14, les mots : « d’emploi » sont remplacés par les mots : « de gestion » ;

4° L’article 15-1 est ainsi rédigé :

« Art. 15-1. – La prestation de fidélisation et de reconnaissance permet aux sapeurs-pompiers volontaires d’acquérir des droits à pension exprimés en points et versés sous forme de rente viagère.

« Les engagements pris par le régime sont considérés comme intégralement garantis par les provisions techniques constituées avant le 1er janvier 2016, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. » ;

5° L’article 15-2 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « surveillance », sont insérés les mots : « et du contrôle » ;

b) Après le mot : « sapeurs-pompiers », la fin du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « qui ont adhéré au régime de la prestation de fidélisation et de reconnaissance avant le 1er janvier 2016 adhèrent au contrat mentionné à l’avant dernier alinéa du présent article. » ;

c) Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Le conseil d’administration de l’association est composé de représentants des conseils d’administration des services départementaux d’incendie et de secours, de représentants des communes ou établissements mentionnés aux 1° et 2° de l’article 15-11 et de représentants des sapeurs-pompiers volontaires. Un représentant du ministre chargé de la sécurité civile assiste de droit aux séances du conseil d’administration. L’association nationale établit chaque année un rapport sur son activité et sur les perspectives financières des régimes de la prestation de fidélisation et de reconnaissance et de la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance. Ce rapport est remis au ministre chargé de la sécurité civile et présenté à la Conférence nationale des services d’incendie et de secours. L’association transmet au ministre chargé de la sécurité civile toutes les informations que celui-ci estime nécessaires pour s’assurer de la bonne gestion de ces régimes. » ;

d) L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :

– à la première phrase, après le mot : « assurance », sont insérés les mots : « limité à la gestion des droits acquis au titre du régime mentionné à l’article 15-1 par les sapeurs-pompiers volontaires avant le 1er janvier 2016. Ce contrat peut être souscrit » ;

– après le mot : « confie », la fin de la seconde phrase est ainsi rédigée : « à cet organisme, sous sa surveillance, la gestion des engagements pris par le régime, des provisions techniques et des prestations à servir. » ;

e) Au dernier alinéa, après le mot : « régime », sont insérés les mots : « de la prestation de fidélisation et de reconnaissance » ;

6° L’article 15-3 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « financée », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « par les provisions techniques mentionnées au second alinéa de l’article 15-1. » ;

b) Les a et b sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé ;

« Les sapeurs-pompiers volontaires affiliés au régime de la prestation de fidélisation et de reconnaissance reçoivent le remboursement, par l’organisme mentionné à l’avant-dernier alinéa de l’article 15-2, du montant des cotisations obligatoires et facultatives qu’ils ont versées avant le 1er janvier 2016. » ;

7° L’article 15-4 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi modifié :

– après le mot : « adhérent », sont insérés les mots : « au titre de la prestation de fidélisation et de reconnaissance » ;

– sont ajoutés les mots : « mentionné à l’avant-dernier alinéa de l’article 15-2 » ;

b) Le troisième alinéa est ainsi modifié :

– la première phrase est complétée par les mots : « entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2015 » ;

– la seconde phrase est supprimée ;

c) La seconde phrase du quatrième alinéa est ainsi modifiée :

– après la première occurrence du mot : « droit », sont insérés les mots : « définis par le décret en Conseil d’État prévu à l’article 15-14 » ;

– le mot : « prestation » est remplacé, deux fois, par le mot : « rente » ;

d) Le cinquième alinéa est ainsi modifié :

– à la fin de la première phrase, les mots : « , est versée au conjoint survivant » sont remplacés par les mots : « mentionné à l’avant-dernier alinéa de l’article 15-2, est versée aux ayants droit définis par le décret en Conseil d’État prévu à l’article 15-14 » ;

– la seconde phrase est supprimée ;

e) L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :

– le mot : « prestation » est remplacé par les mots : « rente viagère » ;

– après le mot : « contrat », sont insérés les mots : « mentionné à l’avant dernier alinéa de l’article 15-2 » ;

– à la fin, les mots : « son conjoint » sont remplacés par les mots : « ses ayants droit définis par le décret en Conseil d’État prévu à l’article 15-14 » ;

8° L’article 15-5 est abrogé ;

9° L’article 15-6 est ainsi modifié :

a) Les premier et deuxième alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« Les sapeurs-pompiers volontaires des corps départementaux ayant cessé définitivement le service entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2004, après avoir accompli, à la date de leur départ, en une ou plusieurs fractions, au moins vingt ans de service en qualité de sapeur-pompier volontaire, ont droit à une allocation de fidélité, dans des conditions fixées par décret. » ;

b) L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :

– à la première phrase, après le mot : « allocation », sont insérés les mots : « de fidélité » ;

– à la seconde phrase, les mots : « du ministre chargé de la sécurité civile et du ministre chargé du budget » sont remplacés par les mots : « des ministres chargés de la sécurité civile et du budget » ;

c) Le dernier alinéa est ainsi modifié :

– La première phrase est ainsi rédigée :

« Les modalités de versement et de financement de l’allocation de fidélité sont les mêmes que celles prévues pour l’allocation de vétérance définie aux articles 12 à 15. » ;

– à la seconde phrase, les mots : « à l’avant-dernier » sont remplacés par les mots : « au troisième » et les mots : « au troisième alinéa du même article » sont remplacés par les mots : « à l’avant-dernier alinéa du même article 15-2 » ;

d) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les sapeurs-pompiers volontaires des corps départementaux et des corps communaux ou intercommunaux mentionnés au deuxième alinéa de l’article 15-2 ont droit, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, à l’intégralité du montant annuel de l’allocation de fidélité au titre des services accomplis avant le 1er janvier 2005 s’ils étaient encore en service au 1er janvier 2005, s’ils ont accompli au moins vingt ans de service, en une ou plusieurs fractions, avant cette date et s’ils ont été affiliés au régime de la prestation de fidélisation et de reconnaissance avant le 1er janvier 2016. » ;

10° Les articles 15-7 et 15-8 sont abrogés.

II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2016. – (Adopté.)

Article 1er
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Article 2 bis

Article 2

(Non modifié)

I. – Le titre III de la loi n° 96-370 du 3 mai 1996 précitée est complété par des articles 15-10 à 15-14 ainsi rédigés :

« Art. 15-10. – Sous réserve des deuxième à avant-dernier alinéas de l’article 15-11, les sapeurs-pompiers volontaires qui ont accompli, en une ou plusieurs fractions, au moins vingt ans de service en cette qualité et qui cessent définitivement le service à compter du 1er janvier 2016 ont droit à une prestation nommée “nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance”. La condition de durée de service est ramenée à quinze ans pour le sapeur-pompier volontaire dont l’incapacité opérationnelle est reconnue médicalement dans des conditions fixées par le décret en Conseil d’État prévu à l’article 15-14.

« Art. 15-11. – L’association nationale mentionnée à l’article 15-2 est chargée de la surveillance et du contrôle de la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires.

« Dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, adhèrent au régime de la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance auprès de l’organisme national de gestion mentionné au dernier alinéa du présent article :

« 1° A À titre obligatoire, les services départementaux d’incendie et de secours ;

« 1° À titre obligatoire, les communes et établissements publics de coopération intercommunale mentionnés au deuxième alinéa de l’article 15-2 ;

« 2° À titre facultatif, les autres communes ou établissements publics de coopération intercommunale assurant la gestion d’un corps communal ou intercommunal de sapeurs-pompiers.

« L’association souscrit un contrat auprès d’un organisme national de gestion de son choix, afin de lui confier la gestion administrative et financière du régime de la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance.

« Art. 15-12. – Pour les sapeurs-pompiers volontaires appartenant à des corps départementaux, la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance est financée par une contribution annuelle obligatoire versée par chaque service départemental d’incendie et de secours, autorité de gestion des sapeurs-pompiers volontaires. Le montant de cette contribution est fixé en fonction du montant des prestations à verser aux sapeurs-pompiers qui remplissent les conditions fixées aux articles 15-10 et 15-13. L’aide apportée par l’État au financement des charges résultant pour les services départementaux d’incendie et de secours de l’application du présent alinéa est définie dans des conditions fixées en loi de finances.

« Pour les sapeurs-pompiers volontaires appartenant aux corps communaux ou intercommunaux mentionnés aux 1° et 2° de l’article 15-11, la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance est financée par une contribution annuelle obligatoire versée par chaque commune ou établissement public de coopération intercommunale, autorité de gestion des sapeurs-pompiers volontaires. Le montant de cette contribution est fixé en fonction du montant des prestations à verser aux sapeurs-pompiers qui remplissent les conditions mentionnées aux articles 15-10 et 15-13. L’État n’apporte pas d’aide au financement des charges résultant pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale de l’application du présent alinéa.

« Art. 15-13. – Le montant de la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires ainsi que ses modalités de revalorisation sont déterminés par décret en Conseil d’État.

« La nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance est servie au sapeur-pompier volontaire à compter de la date à laquelle il cesse définitivement son engagement, dès lors qu’il est âgé d’au moins cinquante-cinq ans.

« Dans le cas où la durée de service définie à l’article 15-10 a été accomplie dans plusieurs corps de sapeurs-pompiers, la répartition du versement dû par chacun de ces corps est définie par le décret en Conseil d’État prévu à l’article 15-14.

« La condition de durée de service mentionnée à l’article 15-10 n’est pas applicable au sapeur-pompier volontaire lorsque l’interruption de son engagement est consécutive à un accident survenu ou à une maladie contractée en service dans les conditions fixées par la loi n° 91-1389 du 31 décembre 1991 relative à la protection sociale des sapeurs-pompiers volontaires en cas d’accident survenu ou de maladie contractée en service. Dans ce cas, le sapeur-pompier volontaire concerné ou, le cas échéant, ses ayants droit définis par le décret en Conseil d’État prévu à l’article 15-14 perçoivent de plein droit la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance qu’il aurait dû percevoir s’il avait accompli vingt ans de service ou, s’il a déjà accompli plus de vingt ans de service, la nouvelle prestation qu’il aurait dû percevoir s’il avait achevé son engagement en cours.

« Si le sapeur-pompier volontaire décède en service commandé, quelle qu’ait été la durée des services accomplis, une allocation annuelle, dont les critères de calcul sont fixés par le décret en Conseil d’État prévu à l’article 15-14, est versée aux ayants droit définis par le même décret.

« En cas de décès du sapeur-pompier volontaire avant ou après la date de liquidation, la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance peut être versée, dans des conditions déterminées par le décret en Conseil d’État prévu à l’article 15-14, à un bénéficiaire expressément désigné par ce sapeur-pompier volontaire ou, à défaut, à ses ayants droit définis par le même décret.

« La nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires n’est assujettie à aucun impôt ni prélèvement prévu par la législation sociale. Elle est incessible et insaisissable. Elle est cumulable avec tout revenu ou prestation sociale.

« Art. 15-14. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application des articles 15-1 à 15-13. »

II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2016. – (Adopté.)

Article 2
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Article 3

Article 2 bis

(Non modifié)

I. – L’article 27 de la loi n° 96-370 du 3 mai 1996 précitée est ainsi modifié :

1° Au 1°, les références : « 15, 15-5, 15-7 et 15-9 » sont remplacées par les références : « 15-9 et 16 » ;

2° Les 10° à 14° sont abrogés.

II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2016. – (Adopté.)

Chapitre II

Dispositions relatives à la revalorisation des indemnités allouées aux sapeurs-pompiers volontaires

Article 2 bis
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Article 4

Article 3

(Non modifié)

À la fin du premier alinéa de l’article 11 de la loi n° 96-370 du 3 mai 1996 précitée, les mots : « décret en Conseil d’État » sont remplacés par les mots : « arrêté conjoint du ministre de l’intérieur et du ministre chargé du budget ». – (Adopté.)

Chapitre III

Dispositions applicables aux bénéficiaires de la pension afférente au grade supérieur

Article 3
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Articles additionnels après l'article 4

Article 4

(Non modifié)

Après le premier alinéa du III de l’article 36 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le premier alinéa du présent III ne s’applique pas au bénéficiaire de la pension qui s’engage en qualité de sapeur-pompier volontaire. » – (Adopté.)

Article 4
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Article 4 bis

Articles additionnels après l'article 4

M. le président. L’amendement n° 3 rectifié, présenté par MM. A. Marc et Magras, Mme Cayeux, MM. Fouché, Doligé, Pellevat, Soilihi, Chasseing, B. Fournier, Masclet, Longuet, Vasselle, G. Bailly et Calvet, Mme Deromedi, M. de Raincourt, Mmes Morhet-Richaud et Hummel et MM. Dufaut, Laménie, Carle, Morisset et Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Tout fonctionnaire, qu’il soit d’État ou territorial, sapeur-pompier volontaire actif, faisant une demande de mutation liée à l’exercice de son activité bénévole de sapeur-pompier volontaire, bénéficie d’une prise en compte prioritaire de sa demande de mutation.

La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Madame la ministre, mes chers collègues, soyez tranquilles : je vais retirer les amendements que j’ai déposés sur cette proposition de loi !

Néanmoins, leur présentation me donne l’occasion de saluer la présence dans nos tribunes du colonel Éric Florès, directeur du SDIS de l’Aveyron. (M. Olivier Cigolotti applaudit.) Je veux dire combien le travail qu’il effectue avec ses subordonnés est utile, particulièrement dans le domaine du volontariat. En Aveyron, ça ne se passe pas trop mal ! Ailleurs, en revanche, aux dires de certains collègues, ce n’est pas toujours le cas.

Je ne sais pas si ce qui est proposé dans ce texte – prestation de fidélisation et de reconnaissance et création de la catégorie A+ pour les officiers supérieurs – sera suffisant, notamment pour les sapeurs-pompiers volontaires. Cet amendement ainsi que les deux autres que j’ai déposés sont en quelque sorte des amendements d’appel. Il me semble en effet que, en dépit de l’importance des dispositions contenues dans cette proposition de loi, nous devons aller beaucoup plus loin pour les volontaires. Tel est également l’objet de la proposition de loi déposée par mes collègues Olivier Cigolotti et Cyril Pellevat.

Effectivement, si nous n’allons pas beaucoup plus loin, on verra s’aggraver l’érosion que subissent déjà, dans certains départements, les effectifs de sapeurs-pompiers volontaires. Comme je l’avais d’ailleurs proposé, lors d’une question orale, à M. le ministre de l’intérieur, il faudrait offrir une meilleure reconnaissance à ces personnes qui donnent beaucoup pour la Nation. Cela est possible, notamment, dans le domaine des retraites : pourquoi ne pas accorder des trimestres supplémentaires à ceux qui ont consenti un effort particulier pour la Nation ? Bien d’autres mesures sont encore envisageables : nous aurons l’occasion, dès la rentrée ou lors d’une prochaine législature, de les aborder, en relation avec les associations de sapeurs-pompiers.

Cela dit, je retire le présent amendement, monsieur le président. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. le président. L’amendement n° 3 rectifié est retiré.

L’amendement n° 4 rectifié bis, présenté par MM. A. Marc et Magras, Mme Cayeux, MM. Fouché, Doligé, Pellevat, Soilihi, Chasseing, B. Fournier, Longuet, Vasselle, G. Bailly et Calvet, Mme Deromedi, M. de Raincourt, Mmes Morhet-Richaud et Hummel et MM. Laménie, Carle, Morisset, Vogel et Rapin, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Une bonification relative au calcul du droit à la mutation est instaurée pour les sapeurs-pompiers volontaires.

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 4 rectifié bis est retiré.

Articles additionnels après l'article 4
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Article additionnel après l'article 4 bis

Article 4 bis

(Non modifié)

I. – (Supprimé)

II. – Le code du travail, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, est ainsi modifié :

1° Après le 7° de l’article L. 5151-9, il est inséré un 8° ainsi rédigé :

« 8° Le volontariat dans les corps de sapeurs-pompiers mentionné aux articles L. 723-3 à L. 726-20 du code de la sécurité intérieure et dans la loi n° 96-370 du 3 mai 1996 relative au développement du volontariat dans les corps de sapeurs-pompiers. » ;

2° L’article L. 5151-11 est complété par un 4° ainsi rédigé :

« 4° Par l’autorité de gestion du sapeur-pompier volontaire, soit l’État, le service d’incendie et de secours, la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale, pour l’activité mentionnée au 8° du même article L. 5151-9. » ;

3° La première phrase du 4° du III de l’article L. 6323-6 est complétée par les mots : « , ainsi que celles destinées à permettre aux sapeurs-pompiers volontaires d’acquérir des compétences nécessaires à l’exercice des missions mentionnées à l’article L. 1424-2 du code général des collectivités territoriales ».

II bis. – Le VI de l’article 39 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels est abrogé.

III et IV. – (Supprimés) – (Adopté.)

Article 4 bis
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Article 5

Article additionnel après l'article 4 bis

M. le président. L’amendement n° 5 rectifié bis, présenté par MM. A. Marc, Magras, Fouché, Doligé, Pellevat, Soilihi, Chasseing, B. Fournier, Masclet, Longuet, Vasselle, G. Bailly et Calvet, Mme Deromedi, M. de Raincourt, Mmes Morhet-Richaud et Hummel et MM. Laménie, Carle, Morisset, Vogel et Rapin, est ainsi libellé :

Après l’article 4 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le IV de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Aux salariés exerçant une activité de sapeur-pompier volontaire. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Je retire également cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 5 rectifié bis est retiré.

TITRE II

Dispositions relatives aux sapeurs-pompiers professionnels

Article additionnel après l'article 4 bis
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Article 6

Article 5

(Non modifié)

La loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi modifiée :

1° À l’avant-dernière phrase du septième alinéa de l’article 12, le mot : « dernier » est remplacé par le mot : « avant-dernier » ;

2° L’article 12-1 est complété par un III ainsi rédigé :

« III. – Le Centre national de la fonction publique territoriale prend en charge, dans les conditions fixées aux articles 97 et 97 bis de la présente loi, les colonels, colonels hors classe et contrôleurs généraux de sapeurs-pompiers professionnels momentanément privés d’emploi. Le ministère chargé de la sécurité civile est associé à la gestion des carrières de ces officiers de sapeurs-pompiers professionnels. » – (Adopté.)

Article 5
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Article 7

Article 6

(Non modifié)

Après l’article 12-2-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, il est inséré un article 12-2-2 ainsi rédigé :

« Article 12-2-2. – Les services départementaux d’incendie et de secours qui ne pourvoient pas, à deux reprises, dans un délai de trois mois à compter de la transmission des candidatures, soit à l’emploi vacant de directeur départemental des services d’incendie et de secours, soit à l’emploi vacant de directeur départemental adjoint, dans les conditions définies par décret en Conseil d’État, versent au Centre national de la fonction publique territoriale une contribution financière dont le montant est égal à une fois le montant constitué par le traitement indiciaire moyen relatif à l’emploi fonctionnel en cause augmenté des cotisations sociales afférentes à ce traitement. » – (Adopté.)

Article 6
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Article 8

Article 7

(Non modifié)

I. – L’article 53 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée est ainsi modifié :

1° A Au début des troisième et avant-dernier alinéas, il est inséré le signe : « – » ;

1° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« – de directeur départemental, directeur départemental adjoint des services d’incendie et de secours. » ;

2° À la seconde phrase du dernier alinéa, les mots : « de ces agents » sont remplacés par les mots : « des agents mentionnés aux troisième à huitième alinéas » ;

3° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Il ne peut être mis fin aux fonctions des directeurs départementaux et des directeurs départementaux adjoints des services d’incendie et de secours qu’après un délai de six mois à compter soit de leur nomination dans l’emploi, soit de la désignation de l’autorité territoriale. La fin des fonctions des directeurs départementaux et des directeurs départementaux adjoints des services d’incendie et de secours est précédée d’un entretien de l’autorité territoriale et du représentant de l’État dans le département avec les intéressés et fait l’objet d’une information du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours, du Centre national de la fonction publique territoriale et du ministre de l’intérieur ; elle prend effet le premier jour du troisième mois suivant l’information du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours. La décision mettant fin aux fonctions des directeurs départementaux et des directeurs départementaux adjoints des services d’incendie et de secours est motivée et prise dans les conditions définies par décret en Conseil d’État.

« Le premier alinéa du présent article est également applicable aux directeurs départementaux et directeurs départementaux adjoints des services d’incendie et de secours parvenus au terme de leur détachement et ne pouvant le renouveler. Toutefois, par dérogation, ces derniers ne bénéficient pas du congé spécial mentionné à l’article 99. »

II. – Le titre Ier du livre II de la cinquième partie du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Au dernier alinéa de l’article L. 5218-8-8, le mot : « dernier » est remplacé par le mot : « dixième » ;

2° À l’avant dernier alinéa du IV de l’article L. 5219-10, le mot : « dernier » est remplacé par le mot : « dixième ».

III. – Au septième alinéa du V et à l’avant dernier alinéa des VIII et IX de l’article 114 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, le mot : « dernier » est remplacé par le mot : « dixième ».

IV. – Au premier alinéa du IV de l’article 2 de l’ordonnance n° 2012-1398 du 13 décembre 2012 relative au transfert des personnels et des biens et obligations des départements et des régions aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique, le mot : « dernier » est remplacé par le mot : « dixième ». – (Adopté.)

Article 7
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Article 9

Article 8

(Non modifié)

L’article L. 1424-32 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« Art. L. 1424-32. – Chaque service départemental d’incendie et de secours est placé sous l’autorité d’un directeur assisté d’un directeur départemental adjoint.

« Nonobstant les dispositions de l’article L. 1424-9, le directeur départemental et le directeur départemental adjoint des services d’incendie et de secours sont nommés dans leur emploi par arrêté conjoint du ministre chargé de la sécurité civile et du président du conseil d’administration du service d’incendie et de secours et, dans les départements d’outre-mer, après avis du ministre chargé de l’outre-mer. – (Adopté.)

Article 8
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Article 10

Article 9

(Non modifié)

L’avant-dernier alinéa de l’article L. 1424-33 du code général des collectivités territoriales est complété par les mots : « nommés dans les conditions prévues à l’article L. 1424-32 ou, en cas d’absence ou d’empêchement du directeur départemental ou du directeur départemental adjoint, et dans la limite de leurs attributions, aux sapeurs-pompiers professionnels occupant un emploi de chef de groupement ». – (Adopté.)

Article 9
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Article 11

Article 10

(Non modifié)

L’article 17 de la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990 relative à la fonction publique territoriale et portant modification de certains articles du code des communes est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après le mot : « professionnels », sont insérés les mots : « , y compris ceux occupant ou ayant occupé les emplois de directeurs départementaux et directeurs départementaux adjoints des services d’incendie et de secours, » ;

2° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

a) À la première phrase, après le mot : « professionnel », sont insérés les mots : « , y compris la durée accomplie sur les emplois de directeur départemental et de directeur départemental adjoint des services d’incendie et de secours, » ;

b) À la seconde phrase, après le mot : « professionnel », sont insérés les mots : « , y compris les services accomplis sur les emplois de directeur départemental et de directeur départemental adjoint des services d’incendie et de secours, ». – (Adopté.)

Article 10
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Article additionnel après l'article 11

Article 11

(Non modifié)

Au premier alinéa du III de l’article 125 de la loi n° 83-1179 du 29 décembre 1983 de finances pour 1984, après le mot : « professionnel », sont insérés les mots : « , y compris la durée de services accomplis sur les emplois de directeur départemental et de directeur départemental adjoint des services d’incendie et de secours, ». – (Adopté.)

Article 11
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Article 12

Article additionnel après l'article 11

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 1 rectifié bis est présenté par MM. Antiste, Cornano, Karam, Desplan et J. Gillot.

L’amendement n° 2 rectifié bis est présenté par Mme Des Esgaulx et MM. B. Fournier et D. Laurent.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le 2° de l’article L. 1424-24-5 est complété par les mots : « et des représentants des personnels administratifs et techniques spécialisés » ;

2° Le troisième alinéa de l’article L. 1424-31 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Elle comprend également des représentants des personnels administratifs et techniques spécialisés. »

La parole est à M. Maurice Antiste, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié bis.

M. Maurice Antiste. J’ai bien compris, monsieur le président, quel sort devrait être réservé à mon amendement, puisque l’urgence appelle à la clairvoyance. Je tiens néanmoins à le présenter.

L’urgence de ce texte est patente : celui-ci doit absolument être adopté avant le 31 décembre prochain pour ne pas remettre en cause la prestation de fidélisation et de reconnaissance des personnels des services d’incendie et de secours de France, au titre de 2016.

Les SDIS concentrent une diversité de métiers étendue, ce afin de rendre plus efficaces les interventions des sapeurs-pompiers sur le terrain. Parmi ces métiers, on trouve celui des personnels administratifs et techniques spécialisés, qui assurent des missions d’appui variées, mais essentielles dans des domaines tels que les services financiers, administratifs ou opérationnels. On retrouve par ailleurs ces métiers à la direction départementale, dans les groupements et dans les centres de secours principaux.

Ces personnels œuvrent quotidiennement au sein des SDIS, mais, contrairement aux sapeurs-pompiers, ils ne disposent pas de pouvoir de vote à la commission administrative et technique, la CATSIS, ou au conseil d’administration, le CASDIS. Ils ne sont présents dans ces instances qu’à titre consultatif. Leur présence est néanmoins indispensable au fonctionnement des SDIS.

Cet amendement, s’il était adopté, n’aurait aucune incidence ni budgétaire ni politique. Il vise simplement à reconnaître la place essentielle de ces personnels dans les missions des SDIS en les intégrant à la CATSIS et au CASDIS. Cette mesure serait d’autant plus bienvenue que la majorité de ces personnels sont des femmes : cette intégration contribuerait donc à instaurer la parité entre femmes et hommes dans ces instances.

C’est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir soutenir mon amendement.

M. Charles Revet. Même si c’est juste, le soutenir sera difficile !

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier, pour présenter l'amendement n° 2 rectifié bis.

M. Bernard Fournier. Les personnels administratifs et techniques spécialisés qui œuvrent quotidiennement au sein des SDIS ne siègent ni à la commission administrative et technique ni au conseil d’administration de ceux-ci, où siègent entre autres les personnels élus à la CATSIS. Le présent amendement vise à reconnaître la place essentielle de ces personnels dans les missions des SDIS en les intégrant à la CATSIS et au CASDIS.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Troendlé, rapporteur. Je pense que les auteurs de ces amendements identiques ont compris l’enjeu du texte qui nous est soumis. Ils proposent que les représentants des personnels administratifs et techniques spécialisés assistent, avec voix consultative, aux réunions du conseil d’administration des SDIS. Ils souhaitent également la représentation de ces personnels aux commissions administratives et techniques de ces services.

Sur le fond, ces amendements, par leur objet, méritent à l’évidence d’être examinés. En revanche, très honnêtement, cet examen doit être effectué dans un autre cadre que le texte que nous examinons aujourd’hui. Le lien entre ces dispositions et la présente proposition de loi est à mes yeux assez ténu, et il importerait de mesurer leurs conséquences sur la composition des CASDIS.

Je veux également relater à cette occasion mon expérience à la CNSIS, la Conférence nationale des services d’incendie et de secours. Nous y avons abordé ce sujet : si celui-ci pouvait sembler très consensuel, il n’en est rien ! La mise en place de ce dispositif, en l’état des choses, n’a rien d’évident.

Je vous demande donc, mes chers collègues, de bien vouloir retirer vos amendements, faute de quoi l’avis de la commission sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annick Girardin, ministre. Les personnels administratifs et techniques spécialisés des SDIS, lesquels constituent les effectifs non sapeurs-pompiers de ces services, étaient au nombre de 11 263 en 2015, dont 10 800 titulaires. Ils représentent en moyenne 4,8 % de l’effectif total de ces services.

Monsieur Antiste, monsieur Fournier, vous proposez que ces personnels soient représentés aux conseils d’administration des SDIS, ainsi qu’aux commissions administratives et techniques de ces derniers. Si l’objectif général que vous vous fixez peut être partagé par le Gouvernement, cette problématique devrait être tranchée – je rejoins sur ce point l’avis de Mme la rapporteur – dans le cadre d’une réflexion plus approfondie, qui inclue un dialogue social – le Gouvernement le souhaite large – avec l’ensemble des partenaires concernés. Il faudrait aussi trouver un vecteur plus approprié que cette proposition de loi.

Je vous demande donc de bien vouloir retirer vos amendements, afin de préserver l’unanimité qui règne autour de ce texte.

M. le président. Monsieur Antiste, l’amendement n° 1 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Maurice Antiste. J’ai compris, à l’écoute de Mme la ministre, qu’il n’y avait pas le feu ! (Sourires.) J’ai aussi entendu sa sourde promesse de tenir compte de mon amendement, puisqu’il a été annoncé qu’il conviendrait d’approfondir de nouveau ce texte. Par conséquent, tout en prenant bonne note de cet engagement, et me tenant prêt à répondre à la première sonnerie, je retire cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 1 rectifié bis est retiré.

Monsieur Fournier, l’amendement n° 2 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Bernard Fournier. J’ai moi aussi bien entendu Mme la ministre et Mme le rapporteur : il s’agit d’un amendement intéressant, mais qui mérite d’être traité dans le cadre d’un autre texte. J’en prends note, et je retire l’amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 2 rectifié bis est retiré.

TITRE III

Diverses dispositions relatives à la sécurité civile

Article additionnel après l'article 11
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Article 12 bis

Article 12

(Non modifié)

Au premier alinéa de l’article L. 751-2 et à l’article L. 752-1 du code de la sécurité intérieure, les mots : « de la défense et de la sécurité civiles » sont remplacés par les mots : « générale de la sécurité civile ». – (Adopté.)

Article 12
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Article 13

Article 12 bis

(Non modifié)

La ventilation par département du montant de la fraction de taxe spéciale sur les conventions d’assurance afférente aux véhicules terrestres à moteur, versée au conseil départemental sur la base du cinquième alinéa du I de l’article 53 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005, fait l’objet d’une publication annuelle annexée au projet de loi de finances. Cette publication précise, pour chaque département, le montant estimé pour l’exercice au titre duquel le projet de loi de finances est présenté ainsi que pour l’exercice en cours, et le montant définitivement versé au titre de l’exercice précédant l’exercice en cours. – (Adopté.)

Article 12 bis
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Article 14

Article 13

(Suppression maintenue)

Article 13
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 14

(Non modifié)

La section 2 du chapitre IV du titre II du livre IV de la première partie du code général des collectivités territoriales est complétée par des sous-sections 6 et 7 ainsi rédigées :

« Sous-section 6

« Dotation de soutien aux investissements structurants des services d’incendie et de secours

« Art. L. 1424-36-2. – I. – La dotation de soutien aux investissements structurants des services d’incendie et de secours est attribuée par le ministre chargé de la sécurité civile pour une dépense d’investissement intervenant dans le champ de la sécurité civile et concourant à la mise en œuvre de projets présentant un caractère structurant, innovant ou d’intérêt national.

« II. – Les crédits de cette dotation peuvent être versés aux services d’incendie et de secours, aux services de l’État et à toute collectivité ou tout organisme public auquel un ou plusieurs services d’incendie et de secours seraient partie, porteurs d’un projet structurant, innovant ou d’intérêt national dans le champ de la sécurité civile.

« Sous-section 7

« Contribution de l’État à la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires

« Art. L. 1424-36-3. – Pour l’application de l’article L. 723-9 du code de la sécurité intérieure, la contribution de l’État au coût de la nouvelle prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires fait l’objet d’un arrêté annuel du ministre chargé de la sécurité civile. » – (Adopté.)

Vote sur l'ensemble

Article 14
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Requier. Ce texte tombe au bon moment, puisque nous venons de célébrer la Sainte-Barbe. Les parlementaires que nous sommes sont invités à de nombreuses festivités à cette occasion – ce fut encore le cas pour moi samedi dernier. Je tiens à préciser que nous n’assistons pas aux banquets ! (Rires.) Cela ferait beaucoup, surtout lorsque nous sommes conviés à plusieurs célébrations à la fois ! (M. Charles Revet s’exclame.)

Je salue cette proposition de loi, qui rend hommage aux sapeurs-pompiers et leur apporte la reconnaissance que nous leur devons, à eux qui assurent la sécurité civile dans nos territoires et auxquels nous sommes très attachés.

Le colonel Faure est le président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France. Un tel poste peut mener loin ! Ainsi, Richard Vignon, son prédécesseur, est devenu préfet du Cantal, puis du Jura. On peut donc être à la tête d’un SDIS et devenir ensuite préfet. C’est d’ailleurs ce que je souhaite aux directeurs de SDIS présents dans les tribunes, ainsi qu’au directeur du SDIS de mon département.

Cela étant, je voterai ce texte des deux mains et me réjouis qu’il soit adopté conforme. Ainsi, la navette parlementaire sera inutile et ce texte entrera en vigueur beaucoup plus rapidement. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur certaines travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Guy-Dominique Kennel.

M. Guy-Dominique Kennel. Bien évidemment, je voterai en faveur de ce texte sans réserve aucune. Pour avoir été président du conseil d’administration d’un SDIS pendant plusieurs décennies, je souhaite apporter un certain nombre de rectifications aux propos qui ont été tenus au cours de ce débat.

Pour ne prendre que l’exemple de mon département, avant, l’investissement s’élevait à 50 millions de francs ; aujourd'hui, il est de 85 millions d’euros. Je ne peux donc pas laisser dire qu’il n’y a pas eu d’investissement dans les SDIS.

Je regrette la gestion déplorable de la prestation de fidélisation et de reconnaissance, la PFR. Le Bas-Rhin en a été le premier département financeur : chaque année, le conseil général versait une somme de l’ordre de 2,5 millions d’euros, avec un retour sur investissement quasi nul. En tout état de cause, je me félicite qu’une autre solution ait été trouvée, car celle qui existait jusqu’à présent pénalisait non seulement les SDIS, mais également les sapeurs-pompiers volontaires.

Là aussi, je tiens à préciser qu’il s’agit non de sapeurs-pompiers bénévoles, mais de sapeurs-pompiers volontaires. Dans le SDIS de mon département, le conseil général versait 13 millions d’euros au titre des vacations. Ce n’est pas rien !

En quelque sorte, les SDIS assurent au nom de l’État une prestation – la sécurité civile –, qui relève du pouvoir régalien. Pour ma part, je déplore la non-participation de l’État. Celui-ci dicte en effet un certain nombre de règles du jeu – il n’est là que pour cela –, mais n’apporte aucun financement aux SDIS. Il laisse l’autorité opérationnelle au préfet et non au président du conseil d’administration du SDIS.

À l’instar de nombre d’entre vous, mes chers collègues, je souhaite une évolution et une clarification de cette situation, de sorte que les SDIS reçoivent une participation de l’État. Si le financement incombe in fine exclusivement aux collectivités locales, à mon sens, le payeur doit être le décideur et il ne doit y avoir qu’un seul décideur.

Je regrette également que les personnels administratifs et techniques n’aient pas été évoqués dans ce texte. Un SDIS fonctionne avec des professionnels, avec des volontaires, mais aussi avec des personnels administratifs et techniques. Je souhaite que, dans ce domaine également, la situation évolue.

Aujourd’hui, un premier pas a été franchi. Il est certes très utile, malheureusement, il ne saurait suffire.

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé.

M. Franck Montaugé. Au terme de ce bref débat, je tiens à saluer l’initiative des députés du groupe socialiste, écologiste et républicain.

M. le président. Ce n’est pas parce qu’ils sont socialistes qu’ils l’ont fait ! (Rires.)

M. Franck Montaugé. Il se trouve que des députés socialistes sont à l’origine de ce texte. Vous me permettrez de mettre ce fait en valeur et je vous remercie, monsieur le président, de le souligner avec moi, car ces parlementaires ont accompli un travail tout à fait remarquable.

Alors que nous sommes sur le point d’adopter ce texte de façon consensuelle, je tiens à mon tour à m’associer aux propos qui ont été tenus au cours de la discussion générale. Je salue en particulier les sapeurs-pompiers du Gers, département éminemment rural, et, plus généralement l’action des sapeurs-pompiers dans les territoires ruraux qui est essentielle.

À la suite de Maurice Antiste, je veux rendre hommage aux personnels administratifs et techniques, qui jouent un rôle différent, mais tout aussi important et essentiel. (M. Jean Desessard applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Claude Kern.

M. Claude Kern. Tout le monde l’a souligné : cette proposition de loi était très attendue, même si de nombreuses questions restent encore en suspens. Cependant, bien que ce texte ne réponde pas à tout, un vote conforme est nécessaire.

Je me réjouis que cette proposition de loi prenne en compte un certain nombre de besoins des sapeurs-pompiers professionnels et des sapeurs-pompiers volontaires. Nous savons en effet combien les sapeurs-pompiers volontaires sont indispensables au bon fonctionnement des SDIS. Je précise d’ailleurs que je suis cosignataire de la proposition de loi tendant à favoriser le recrutement des sapeurs-pompiers volontaires présentée par Olivier Cigolotti.

Cela a été rappelé : les sapeurs-pompiers volontaires participent également à la vie locale. C’est encore plus vrai dans les petites communes où, souvent, l’amicale des sapeurs-pompiers est la seule association qui existe.

Par conséquent, nous devons tout faire pour encourager le recrutement des sapeurs-pompiers volontaires et endiguer la désertification. Même si ce texte ne répond pas à toutes les attentes, je le répète, à l’instar de mes collègues, je le voterai. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC. – M. Jean Desessard applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Yves Daudigny. Je suis à mon tour heureux de saluer les sapeurs-pompiers de mon département, l’Aisne, et de souligner combien, dans ce territoire qui comporte plus de 800 communes, leur réseau est absolument indispensable et essentiel à la sécurité de l’ensemble des habitants et des activités économiques.

Je me félicite que nous participions collectivement, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, non seulement à la concrétisation de plusieurs engagements forts pris par le Président de la République et le Gouvernement à l’égard des sapeurs-pompiers de France, mais surtout à la consolidation de notre modèle de sécurité civile. Je le répète à mon tour : l’examen de ce texte est l’occasion de mettre en lumière le dévouement, la force de l’engagement, la passion, oserais-je dire, et les compétences acquises au cours de formations de ces femmes et de ces hommes qui, souvent au détriment de leur vie personnelle et familiale, s’engagent au service de leurs concitoyens. C’est le moment de leur témoigner notre gratitude et notre reconnaissance.

De jour comme de nuit, du 1er janvier au 31 décembre, 4,3 millions d’interventions sont effectuées en moyenne par les sapeurs-pompiers, soit 40 800 professionnels, 193 800 volontaires et 12 300 militaires.

Améliorer les dispositifs visant à mieux faire connaître et reconnaître les sapeurs-pompiers volontaires et professionnels tout au long de leur carrière et après leurs années de service n’est donc que justice. Dans le même temps, il nous appartient de soutenir, de sauvegarder, de consolider et de promouvoir notre modèle de sécurité civile bâti sur la proximité, la continuité et l’efficacité.

Je ne rappellerai pas les différentes mesures de ce texte ; elles ont déjà été évoquées. C’est sans réserve que je soutiens cette proposition de loi, à l’instar de l’ensemble des membres du groupe socialiste et républicain.

M. le président. Je tiens à mon tour à mentionner le SDIS de mon département, les Bouches-du-Rhône, qui est également très efficace ! (Rires.) Toutefois, la deuxième ville de France, qui compte 860 000 habitants, est aussi protégée par un bataillon de marins-pompiers. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. Guy-Dominique Kennel. Payé par l’État !

M. le président. Michel Mercier acquiescera sans doute à ce propos : qu’il soit marin-pompier ou sapeur-pompier, lorsque l’un d’eux meurt au feu, la couleur du sang versé est la même.

M. Michel Mercier. Exactement !

M. le président. Par conséquent, notre reconnaissance à l’égard des sapeurs-pompiers est totale, tout comme, dans la deuxième ville de France, elle l’est à l’égard des marins-pompiers, au nombre de 2 400, dont le coût, monsieur Kennel, est beaucoup plus élevé que celui que vous avez mentionné pour le Bas-Rhin. (Applaudissements.)

Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l'ensemble de la proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires.

(La proposition de loi est adoptée définitivement.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annick Girardin, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de ce débat tout aussi consensuel que celui qui a eu lieu à l’Assemblée nationale. Je tiens à remercier la rapporteur de la commission des lois du Sénat, ainsi que le député Jean-Paul Bacquet, présent dans les tribunes, qui est à l’origine de cette proposition de loi et en était le rapporteur à l’Assemblée nationale.

Le ministre de l’intérieur, Bruno Le Roux, aurait voulu être présent, mais il a dû se rendre en Vendée où, vous le savez, un drame de la route s’est produit ce matin. Je tiens à souligner en son nom combien le Gouvernement reconnaît – la reconnaissance est importante – le travail, l’engagement de ces femmes et de ces hommes, volontaires ou professionnels, chaque jour, sur le terrain aux côtés de leurs concitoyens, au péril de leur vie. Je veux leur assurer que le Gouvernement, en particulier le ministre de l’intérieur, est très engagé à leurs côtés.

Ce texte était attendu depuis longtemps – quinze ans pour certains. Tout le monde se réjouit que ce moment arrive enfin.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez posé un certain nombre de questions. Le ministre de l’intérieur apportera à chacun d’entre vous des réponses par écrit. (Applaudissements.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires
 

10

Prise d’effet de nominations à une commission mixte paritaire

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de réunion d’une commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain.

En conséquence, les nominations intervenues lors de la séance du jeudi 15 décembre dernier prennent effet.

11

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mercredi 21 décembre 2016, à quatorze heures trente et le soir :

Cinq conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié :

- Projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse concernant la modernisation et l’exploitation de la ligne ferroviaire d’Annemasse à Genève (n° 847, 2015-2016) ;

Rapport de M. Cédric Perrin, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 223, 2016-2017) ;

Texte de la commission (n° 225, 2016-2017).

- Projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relative aux travaux et au cofinancement par la Suisse de l’opération de réactivation du trafic ferroviaire sur la ligne Belfort-Delle ainsi qu’à l’exploitation de la ligne Belfort-Delle-Delémont (n° 154, 2016-2017) ;

Rapport de M. Cédric Perrin, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 223, 2016-2017) ;

Texte de la commission (n° 224, 2016-2017).

- Projet de loi autorisant l’approbation de la convention d’extradition signée le 2 mai 2007 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l’État des Émirats arabes unis (n° 448, 2014-2015) ;

Rapport de Mme Nathalie Goulet, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 200, 2016-2017) ;

Texte de la commission (n° 201, 2016-2017).

- Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’avenant portant première modification à l’entente en matière de sécurité sociale du 17 décembre 2003 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec et de l’avenant portant seconde modification au protocole d’entente du 19 décembre 1998 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec relatif à la protection sociale des élèves et étudiants et des participants à la coopération (n° 135, 2016-2017) ;

Rapport de Mme Hélène Conway-Mouret, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 226, 2016-2017) ;

Texte de la commission (n° 227, 2016-2017).

- Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Tadjikistan relatif à la construction d’une tour de contrôle sur l’aéroport de Douchanbé (n° 136, 2016-2017) ;

Rapport de M. Jacques Gautier, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 198, 2016-2017) ;

Texte de la commission (n° 199, 2016-2017).

Nouvelle lecture du projet de loi de finances rectificative pour 2016 (n° 250, 2016-2017).

Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant les ordonnances n° 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation et n° 2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation et simplifiant le dispositif de mise en œuvre des obligations en matière de conformité et de sécurité des produits et services (n° 16, 2016-2017) ;

Rapport de M. Martial Bourquin, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 189, 2016-2017) ;

Texte de la commission (n° 190, 2016-2017).

Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification dans le secteur du transport public particulier de personnes (n° 169, 2016-2017) ;

Rapport de MM. Jean-François Rapin, sénateur et Laurent Grandguillaume, député, fait au nom de la commission mixte paritaire (n° 168, 2016-2017) ;

Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne (n° 245, 2016-2017) ;

Rapport de M. Cyril Pellevat, sénateur, Mmes Bernadette Laclais et Annie Genevard, députées, fait au nom de la commission mixte paritaire (n° 244, 2016-2017).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures trente-cinq.)

Direction des comptes rendus

GISÈLE GODARD