M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Ces amendements visent à imposer que les données contenues dans la BDES soient hébergées soit en France, pour l’amendement n° 5 rectifié quater, soit dans l’Union européenne, pour l’amendement n° 6 rectifié quater.

Leurs auteurs soulèvent un problème intéressant, mais partent du postulat qu’un hébergeur situé à l’étranger serait par nature moins fiable qu’un hébergeur français ou européen. Or ceux-ci peuvent tout autant être les victimes de piratages ou même d’employés indiscrets ou malveillants.

De plus, le dispositif de l’amendement n° 5 rectifié quater est, à mon sens, contraire aux règles européennes en matière de libre circulation des services.

La commission demande donc le retrait de ces amendements, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est du même avis que la commission.

M. le président. Monsieur Chasseing, les amendements nos 5 rectifié quater et 6 rectifié quater sont-ils maintenus ?

M. Daniel Chasseing. Non, je les retire, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos 5 rectifié quater et 6 rectifié quater sont retirés.

L’amendement n° 137, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Au dernier alinéa de l’article L. 2312-19, les mots : « trois ans » sont remplacés par les mots : « un an » ;

La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

Mme Sophie Taillé-Polian. Cet amendement vise à restituer leur rythme antérieur aux consultations de la commission chargée de la santé et de la sécurité au travail. Aux termes de cette ordonnance, ces consultations pourraient avoir lieu tous les trois ans, ce qui n’est pas très favorable au dialogue social.

Nous souhaitons pour notre part que, en l’absence d’accord, des dispositions supplétives prévoient que les consultations soient annuelles, conformément aux anciennes dispositions du code du travail.

C’est justement en cas d’absence d’accord que la non-prise en compte des problématiques de santé au travail et des conditions de travail risque d’être la plus prégnante, ce qui justifie à mon sens de revenir, dans ce cas, à une consultation annuelle obligatoire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur l’une des principales modifications apportées par l’ordonnance n° 2017-1386 aux règles relatives à la consultation récurrente des instances représentatives du personnel – auparavant le comité d’entreprise, désormais le comité social et économique.

Rationalisées en 2015 dans le cadre de la loi Rebsamen, ces consultations concernent trois grands domaines : orientations stratégiques de l’entreprise ; situation économique et financière ; politique sociale, conditions de travail et emploi. Elles doivent en principe avoir lieu tous les ans.

L’ordonnance a ouvert aux partenaires sociaux dans l’entreprise la possibilité de modifier cette périodicité, dans la limite de trois ans. Je ne partage pas les réticences des auteurs de cet amendement, qui estiment que cet élargissement du champ du dialogue social lui serait néfaste ; au contraire, il responsabilise les organisations syndicales et l’employeur.

Par exemple, est-il nécessaire d’examiner tous les ans dans toutes les entreprises leurs orientations stratégiques ? Les entreprises dotées d’un plan pluriannuel de développement et de production ne trouveraient-elles pas intérêt à y procéder tous les deux ou trois ans, pour consacrer dans ce cas, peut-être, plus de temps aux consultations sur la politique sociale et aux enjeux relatifs aux conditions de travail ?

Il ne faut pas restreindre le champ du dialogue social ou considérer que ses acteurs en entreprise ne pèsent pas les conséquences des accords qu’ils concluent.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je souhaite revenir à mon tour sur la question de la pluriannualité des consultations. Dans une entreprise, on compte au minimum dix-sept champs de négociations, auxquels peuvent s’ajouter des sujets spécifiques à l’entreprise. Si tous devaient faire l’objet d’une négociation annuelle, on aboutirait très souvent à une obligation très formelle : on ne négocierait pas grand-chose, mais on cocherait la case.

Souvent, la négociation pluriannuelle représente un outil intéressant de transformation au sein de l’entreprise. Il s’agit non pas de reporter la discussion de trois ans, mais de conclure un accord pour trois ans.

Ainsi, pour en revenir au sujet typique de l’égalité professionnelle, toutes les entreprises où l’on a pu l’atteindre – j’en ai une expérience personnelle – y sont parvenues par la conclusion d’un accord de rattrapage salarial sur deux, trois ou quatre années. En effet, un tel rattrapage est impossible à effectuer en un an : tous les hommes seraient alors grandement affectés, ce qui constitue un frein assez considérable pour la conclusion d’un accord.

Sur d’autres sujets aussi, il peut être intéressant de conclure un accord pour trois ou quatre ans, accord qui peut d’ailleurs comporter une clause de revoyure annuelle. C’est pour nous un moyen de confier aux partenaires sociaux dans l’entreprise la responsabilité d’établir un ordre de priorité au sein des sujets qui, de toute façon, doivent être inscrits à l’ordre du jour, puisque la loi s’impose à tous. Ils pourront décider quels sujets feront l’objet d’accords pluriannuels et lesquels seront examinés tous les ans.

Cela contribue à accroître le grain à moudre de la liberté contractuelle que l’on donne aux partenaires sociaux dans l’entreprise.

Tel est notre esprit, sur ce sujet comme pour les autres. Il faut donc, selon moi, véritablement s’engager dans cette voie, qui obligera à mener, dans l’entreprise, une réflexion et un dialogue sur ce qui est prioritaire. Or vous verrez que les sujets prioritaires seront peut-être justement ceux qui feront l’objet d’un accord pluriannuel, parce qu’ils nécessitent souvent un plan d’action ou de transformation portant sur plusieurs années ou nécessitant plusieurs étapes. C’est la liberté des acteurs.

Encore une fois, aucun sujet ne sera évité ; on ne peut donc pas dire qu’il y aura un dommage ; je crois plutôt qu’il y aura une incitation à établir des priorités sur ce qui est le plus important et, surtout, à réfléchir de façon pluriannuelle, ce qui est peu le cas aujourd’hui encore.

M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.

Mme Sophie Taillé-Polian. Madame la ministre, se voir tous les ans n’exclut pas la réflexion pluriannuelle ! Il s’agit de remettre à plat tous les ans l’accord qui a été passé, d’en évaluer la mise en œuvre et de le recadrer : c’est une négociation annuelle sur la base d’une réflexion pluriannuelle, ce qui oblige à remettre le sujet sur la table et à piloter l’accord.

En revanche, dans le nouveau dispositif, quand il n’y a pas d’accord, c’est pour trois ans. Une telle situation signifie que le dialogue social est médiocre : on n’a pas même réussi à se mettre d’accord sur des règles de fonctionnement.

Si, dans de telles situations, on ne peut pas revenir sur la question avant trois ans, au lieu d’un an, on y perd et on n’est pas dans la situation que vous décrivez, madame la ministre. Au contraire, il s’agit selon moi de diluer les choses. En outre, on sait que, pour bien des sujets, si un suivi annuel est impossible, on perd le fil. C’est une perte tant pour les salariés que pour les entreprises.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 137.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 31, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 6

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° Le quatrième alinéa de l’article L. 2312-21 est complété par les mots : « et, le cas échéant, la stratégie fiscale et notamment les prix de transfert entre les entités du groupe » ;

…° Le premier alinéa du I de l’article L. 2312-25 est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « ainsi que sur les prix de transfert pratiqués entre les entreprises et entités appartenant au même groupe, y compris celles basées ou exerçant à l’étranger. Elle porte également sur les cessions d’actifs, y compris les actifs immatériels et sur la politique fiscale de l’entreprise. » ;

La parole est à Mme Christine Prunaud.

Mme Christine Prunaud. La récente affaire des « Paradise papers » a montré la nécessité de renforcer la législation et de remettre de l’ordre et de la transparence dans les transactions financières internationales. Il convient également d’exiger la transparence des multinationales et la disparition des sociétés-écrans et des prête-noms.

Pour remplir ces objectifs, il faut renforcer les moyens humains et matériels des administrations fiscales, mais aussi renforcer les pouvoirs de contrôle des salariés dans les domaines économiques et financiers et, plus particulièrement, en matière fiscale et sociale.

Nous proposons donc de permettre au comité d’entreprise d’être informé et consulté sur la politique de prix de transferts retenue par l’entreprise et sur les cessions d’actifs réalisées au sein d’un même groupe.

En effet, les salariés sont les premiers concernés par les pratiques et manœuvres fiscales des grandes multinationales ; ils en sont même, souvent, les premières victimes. Face aux politiques fiscales pratiquées par certains de ces grands groupes, il y a lieu d’instaurer un droit leur faisant contrepoids.

Cet amendement tend donc à octroyer aux représentants des salariés un droit de regard sur la politique fiscale de leur entreprise en consolidant la procédure d’information et de consultation sur ce thème et en offrant la possibilité de recourir, dans certains cas, à un expert technique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Je tiens tout d’abord à souligner que cet amendement est partiellement satisfait, puisque la base de données économiques et sociales doit déjà contenir des informations relatives aux « transferts commerciaux et financiers » entre les entités d’un groupe.

S’agissant de la politique fiscale de l’entreprise, elle doit relever exclusivement de l’employeur : il n’appartient pas aux représentants des salariés de connaître de telles décisions financières ou de participer à leur élaboration.

Si, à leurs yeux et selon les informations dont ils disposent, cette politique est de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise, ils peuvent faire usage de leur droit d’alerte en matière économique et saisir de cette question le conseil d’administration ou de surveillance.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre. En complément de ce qu’a indiqué M. le rapporteur, je voudrais rappeler que les instances représentatives du personnel ont vocation à représenter les salariés et non à se substituer à l’administration fiscale, qui doit évaluer si un prix de transfert pose problème dans le cas de cessions d’actifs réalisées au sein d’un même groupe.

Je profiterai par ailleurs de l’examen cet amendement pour compléter la réponse que j’ai faite à Mme Taillé-Polian sur l’amendement précédent, qui portait lui aussi sur la consultation annuelle des représentants des salariés.

J’ai omis de rappeler tout à l’heure un élément très important pour la bonne compréhension du problème : cette ordonnance prévoit que, par accord d’entreprise, on puisse décider que la négociation sera pluriannuelle. Ce sera bien une décision prise par les partenaires s’ils choisissent de ne pas mener cette négociation à nouveau chaque année. Par défaut, en l’absence d’accord, la négociation reste annuelle, ce qui est, selon moi, de nature à rassurer vos inquiétudes, madame la sénatrice.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je soutiens l’amendement n° 31. Nous avons beaucoup réfléchi aux moyens de lutter contre l’évasion fiscale, notamment au sein de la commission d’enquête consacrée à ce problème. Cette commission avait entendu de nombreux salariés de multinationales ; je pense en particulier aux syndicalistes de groupes tels que L’Oréal ou Colgate.

Nous avons constaté à cette occasion l’existence d’une grosse différence dans ce domaine entre la France et l’Allemagne. En Allemagne, les comités d’entreprise et les représentants du personnel peuvent recevoir une explication précise de la manière dont sont calculés les prix de transfert au sein du groupe ; ils ont en outre un droit de saisine de l’administration fiscale allemande.

En France, en revanche, nous sommes très faibles quant aux prix de transfert. Tout d’abord, l’administration n’est pas dotée d’outils performants pour évaluer avec rigueur ces prix de transfert. Ensuite, dans bien des cas, on découvre a posteriori, quand la filiale française est déjà en train de fermer ou est en faillite, que c’est par un mécanisme de prix de transfert que l’on l’a vidée de sa substance pour la mettre artificiellement en déficit. Cela se fait d’ailleurs souvent pour récupérer des brevets et des marques, ou pour réorganiser et délocaliser.

Cette question est centrale, parce que notre outil de production s’en trouve considérablement fragilisé. C’est pourquoi, pour ma part, je crois qu’il est tout à fait sérieux que les représentants du personnel ou les comités d’entreprise puissent avoir clairement connaissance, dans le détail, du mode de calcul de ces prix de transfert, et qu’ils puissent, dans ces situations, saisir l’administration fiscale.

L’amendement de mes collègues communistes va dans ce sens ; je crois que ce dispositif constituerait, de surcroît, une protection contre les délocalisations.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 31.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 32, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° Après le deuxième alinéa de l’article L. 2312-39, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Si le comité estime que l’employeur n’a pas suffisamment pris en considération ses avis ou ses propositions, il peut prendre une délibération contraignant l’employeur à suspendre son projet. Toute décision du chef d’entreprise contraire à cette délibération est nulle et de nul effet. » ;

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Madame la ministre, lors des débats à l’Assemblée nationale, vous avez qualifié l’entreprise de bien commun des salariés et de l’employeur.

L’entreprise est commune aux salariés qui travaillent et aux dirigeants qui prennent les décisions. Malheureusement, la séparation des tâches entre la prise de décision et son application ne permet pas aux salariés de s’impliquer réellement. Pour que ce soit le cas, il faut accorder à ces derniers des droits d’intervention dans les décisions stratégiques.

Tel est le sens de cet amendement. Il vise à associer de manière plus importante les salariés en reconnaissant aux représentants du personnel un droit de vélo suspensif sur les décisions de l’employeur relatives à des projets de restructuration de l’entreprise ou de compressions d’effectifs : délocalisations, licenciements collectifs, transferts de production de moyens de production d’un établissement à un autre, de la même entreprise ou du même groupe.

Il nous semble vital que les salariés, par leurs représentants, puissent non seulement donner leur avis, mais aussi décider lorsque les sujets intéressent directement la gestion de l’entreprise : organisation du travail, formation professionnelle, gestion économique et financière. L’entreprise étant un bien collectif, il paraît nécessaire d’en moderniser la gouvernance.

Si votre projet de loi vise réellement à mieux partager les pouvoirs dans les entreprises, madame la ministre, il n’y a aucune raison d’exclure du nouveau cadre de relations entre salariés et employeurs les choix économiques qui ont trait à la vie de l’entreprise.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Selon les auteurs de cet amendement, l’employeur devrait suspendre ses projets de restructuration sur injonction du CSE, s’il n’a pas suffisamment pris en compte les remarques de ce dernier.

L’objet de cette réforme du droit du travail n’est pas d’instaurer la cogestion des entreprises. Néanmoins, elle ouvre la possibilité, par accord d’entreprise, de transformer le CSE en conseil d’entreprise doté d’un droit de veto dans les domaines que cet accord aura définis. Les restructurations pourraient très bien, dans ce cadre négocié, en faire partie.

C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Dans la gestion d’une entreprise, les responsabilités sont complémentaires et différentes. Sur ce point, je formulerai deux remarques.

Si l’employeur et les syndicats s’entendent, un conseil d’entreprise peut être envisagé et une codécision être décidée dans ce cadre. Il a d’ailleurs été expressément prévu que ce soit systématiquement le cas, au moins sur les questions d’égalité professionnelle et de formation professionnelle. D’autres champs sont toutefois envisageables, qui peuvent faire l’objet d’une négociation. Ce sont des sujets de réflexion sur les questions de gouvernance.

Par ailleurs, comme vous le savez, mes collègues Bruno Le Maire, Nicolas Hulot et Nicole Belloubet et moi-même avons récemment confié une mission à Nicole Notat et Jean-Dominique Sénard pour réfléchir sur les relations entre l’entreprise et l’intérêt général.

Certes, l’entreprise n’a pas pour vocation première l’intérêt général, mais elle a un impact sur celui-ci, par ses incidences sociales, environnementales, économiques. L’articulation entre le rôle de l’entreprise dans la société et son empreinte sociale et environnementale constitue un sujet de réflexion de fond, sur lequel nous aurons l’occasion de revenir devant le Parlement dans les mois qui viennent.

Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 32.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 66, présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. La commission des affaires sociales du Sénat a retiré de l’assiette de calcul de la contribution de l’employeur au financement des activités sociales et culturelles du comité social et économique les sommes versées au titre de la participation et de l’intéressement.

Dans la mesure où ces sommes sont issues de la plus-value réalisée par les salariés, il est normal de les mettre à contribution en faveur des activités sociales et culturelles de l’entreprise.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à rétablir l’intéressement et la participation dans l’assiette de calcul de la contribution de l’employeur aux activités sociales et culturelles gérées par le CSE.

Sur ce point, dans sa rédaction initiale, l’ordonnance rompait avec le droit antérieur en élargissant cette assiette, qui correspondait à la masse salariale, aux sommes versées dans l’année au titre de l’intéressement et de la participation.

Une brève réflexion sur les conséquences néfastes de cette mesure ne peut que nous conduire à la supprimer, ce que nous avons fait en commission. En effet, elle a un caractère désincitatif très fort pour les entreprises en matière de développement de l’intéressement et de la participation.

À l’heure où le Gouvernement a fait part de son intention de développer l’épargne salariale, les entreprises déjà engagées dans ces pratiques seraient sanctionnées par une augmentation potentiellement très importante de leur contribution financière aux activités sociales et culturelles, tandis que celles qui y étaient jusqu’à présent réticentes verraient leurs craintes renforcées.

Il n’est donc pas souhaitable, sur ce point, de revenir au texte d’origine. Je ne doute pas que Mme la ministre sera d’ailleurs de mon avis sur cette question.

Par ailleurs, cet amendement ne vise pas le bon alinéa, et la suppression proposée ne concerne pas le financement du CSE. Dans les faits, son adoption supprimerait la possibilité, insérée par la commission, de prévoir, par accord de groupe, que les informations ponctuelles du CSE pourront avoir lieu à l’échelon du comité de groupe.

Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre. L’ordonnance prévoyait bien cette disposition, mais la commission a proposé de la corriger, avec une certaine sagesse. Entre-temps, un certain nombre de réactions se sont en outre fait entendre, à juste titre d’ailleurs, sur le fait que la fluctuation de l’intéressement et de la participation pouvait déstabiliser de façon sensible le financement des activités sociales et culturelles du CSE.

Par ailleurs, l’ordonnance prévoit l’augmentation de la contribution des salariés au sein des entreprises au budget des CSE, dans les entreprises de plus de 2 000 salariés, en la passant de 0,020 % à 0,022 % de la masse salariale. L’augmentation des ressources est donc bien prévue.

Cependant, le caractère aléatoire de ce dispositif risquait non seulement de pénaliser le CSE, mais aussi d’être dissuasif de nouveaux accords d’intéressement et de participation ambitieux. Or, comme nous avons la volonté d’encourager l’élargissement de ces accords, cela ne nous a pas paru opportun.

C’est pourquoi il faut en revenir à la situation antérieure, où l’intéressement et la participation n’étaient pas inclus dans la base. En revanche, il a été décidé d’augmenter la contribution employeur pour les entreprises de plus de 2 000 salariés.

Enfin, comme M. le rapporteur, je fais remarquer que ce n’est pas le bon alinéa qui est visé.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.

M. Jean-Louis Tourenne. L’une des raisons invoquées par Mme la ministre est le caractère aléatoire de cette recette supplémentaire. Il ne faudrait par conséquent surtout pas élargir l’assiette et donner aux CSE des revenus supplémentaires, dont le montant différerait chaque année, ce qui risquerait de provoquer des déceptions d’une année sur l’autre. Voilà tout de même un drôle de raisonnement !

J’observe également que la participation des entreprises n’augmente pas pour celles qui comptent moins de 2 000 salariés, puisqu’elle est maintenue à 0,020 %.

Toutefois, les ordonnances prévoient, et cela a été voté, que le CSE devrait dorénavant participer pour une bonne part aux expertises – à hauteur de 20 % – dans les domaines que vous avez indiqués, madame la ministre. Il s’agit là d’une économie pour l’entreprise et d’une dépense supplémentaire pour le CSE, qui verra forcément ses activités diminuer.

Il ne serait donc que justice de considérer que l’ensemble des revenus versés aux salariés – salaires, intéressement ou participation – doivent être intégrés dans une assiette sur la base de 0,020 %. Ainsi, les recettes des CSE ne seraient pas diminuées et ces instances pourraient organiser leurs actions comme avant.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 66.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 95, présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.

M. Jean-Louis Tourenne. L’amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Même avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 95.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 13 rectifié, présenté par MM. Forissier et Mouiller, Mmes Di Folco, Lamure, Eustache-Brinio et L. Darcos, MM. Sol et Paccaud, Mmes Lassarade, Deseyne et Morhet-Richaud, MM. Lefèvre, Longuet, Pierre, Savary, Vogel, Daubresse, Chaize et Cuypers, Mmes F. Gerbaud, Garriaud-Maylam et Gruny, MM. Bonne, Bazin, Charon, Kennel, B. Fournier et Gremillet, Mme Deromedi et MM. Mayet, Huré, Paul, Dufaut, Carle, Babary, Raison, Rapin et Perrin, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 14

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

… ° Au second alinéa de l’article L. 2313-1 après le mot : « entreprises» sont insérés les mots : « d’au moins cinquante salariés » ;

La parole est à M. Michel Forissier.

M. Michel Forissier. Il s’agit de préciser que la mise en place d’un comité social et économique central ne s’impose que lorsque les effectifs de l’entreprise à établissements multiples sont au moins égaux à 50 salariés. En effet, la rédaction actuelle de l’article L. 2313-1 du code du travail laisse entendre que, dès lors qu’une entreprise comporte au moins deux établissements distincts, la mise en place d’un CSE central s’impose, peu importe l’effectif de l’entreprise.

En d’autres termes, une instance serait créée, qui serait dépourvue d’attribution, dans la mesure où l’effectif global est inférieur à 50 salariés. Il convient de corriger cette erreur rédactionnelle et d’apporter une telle précision. Voilà qui démontre, s’il le fallait, l’intérêt et l’utilité d’un régime parlementaire basé sur le bicamérisme ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. On ne peut qu’être d’accord, monsieur le président !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je m’incline devant le Sénat ! (Sourires.)

Il est vrai que mettre en place un CSE central est dénué de sens dans les entreprises de moins de cinquante salariés comprenant des établissements distincts. Les articles L. 2316-1 à L. 2316-3 fixent les attributions d’un CSE d’une entreprise d’au moins 50 salariés. Par conséquent, un CSE central dans une entreprise de moins de 50 salariés comportant des établissements ne disposerait pas d’attributions. CQFD !

La vigilance du Sénat est précieuse, et je vous en remercie. (Nouveaux sourires.) Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.