M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Pascale Gruny, rapporteur. Le présent amendement inclut à l’article L. 312-1-1 du code des relations entre le public et l’administration les enquêtes de satisfaction des usagers de l’administration parmi les documents devant être rendus publics par cette dernière.

Si j’adhère tout à fait à l’objectif de mesure des résultats de l’administration, notamment grâce à l’évaluation de la satisfaction des usagers – démarche qui nous avait d’ailleurs été présentée par la direction interministérielle de la transformation publique –, cet amendement m’apparaît satisfait par le droit en vigueur.

En effet, les administrations concernées doivent déjà publier ces enquêtes de satisfaction, puisqu’elles rentrent dans le champ d’application du 4° de l’article L. 312-1-1, que l’amendement veut modifier. En effet, il s’agit bien de données « dont la publication présente un intérêt économique, social, sanitaire ou environnemental », catégorie expressément visée par ce 4°.

De plus, il serait incohérent de citer un exemple de document pouvant être publié en omettant les autres, ce à quoi aboutirait in fine cette proposition.

La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement regarde avec beaucoup d’intérêt la proposition de M. Bargeton.

En effet, nous sommes plutôt enclins à partager la piste d’une publication des résultats et des indicateurs de performance. Nous l’avons montré avec le dépôt de deux amendements : l’un sur la stratégie nationale d’orientation pour les services publics, dont nous avons précédemment discuté et qui prévoit cette publication ; l’autre, qui porte sur l’article 15 et selon lequel l’ensemble des services publics devront publier un certain nombre d’indicateurs d’ici à 2021.

Toutefois, la rédaction de cet amendement nous pose une difficulté, puisque, comme le disait Mme la rapporteur à l’instant, l’amendement renvoie essentiellement à des analyses quantitatives ou à des rapports d’enquête ou de satisfaction, alors que nous considérons que la priorité serait plutôt de construire les indicateurs de qualité et de performance à même d’être publiés.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis de sagesse sur cet amendement. Il estime en particulier que la nature des données qui doivent être publiées doit être affinée.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 36 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 2 - Amendement n° 36 rectifié
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Article additionnel après l'article 2 bis A - Amendement n° 98 rectifié

Article 2 bis A (nouveau)

Après le chapitre III du titre unique du livre Ier du code général des collectivités territoriales, il est inséré un chapitre III bis ainsi rédigé :

« CHAPITRE III BIS

« Droit à régularisation en cas derreur

« Art. L. 1113-8. – Par dérogation à l’article L. 100-3 du code des relations entre le public et l’administration, les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent se prévaloir du droit à régularisation en cas d’erreur prévu au chapitre III du titre II du livre Ier du même code, dans leurs relations avec les administrations de l’État, ses établissements publics administratifs ainsi que les organismes et personnes de droit public et de droit privé chargés d’une mission de service public administratif, y compris les organismes de sécurité sociale. »

M. le président. L’amendement n° 37, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Cet amendement vise à supprimer l’article 2 bis A. Tel qu’il est conçu, le droit à l’erreur tend à renforcer la confiance du public dans les administrations ; c’est pourquoi il est inséré dans le code des relations entre le public et l’administration.

En faire bénéficier les collectivités locales au même titre que les usagers brouillerait l’objectif clairement affiché de cette réforme, qui s’adresse aux usagers dans leurs relations avec toutes les administrations, et non aux relations entre administrations elles-mêmes qui ne peuvent pas être mises sur le même plan.

Par ailleurs, on pourrait aussi se demander pourquoi ce droit ne serait étendu qu’aux relations entre l’État, entendu au sens large, et les collectivités territoriales, et pas aux relations entre collectivités territoriales elles-mêmes.

De la même manière, rien ne nous paraît justifier que ce droit à l’erreur ne s’exerce qu’au profit des collectivités territoriales, et non pas également à celui de l’État.

Enfin, il nous paraît concrètement difficile de percevoir quelles situations particulières justifieraient l’extension de ce droit en dehors des relations entre les administrations et les usagers.

Pour ces raisons, le Gouvernement propose et souhaite la suppression de l’article 2 bis A.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Pascale Gruny, rapporteur. Cette disposition a été introduite à l’unanimité par la commission spéciale sur l’initiative de notre collègue Sylvie Vermeillet.

En effet, tout comme les usagers, les collectivités territoriales et leurs groupements ont aussi besoin du regard bienveillant de l’État et des organismes de sécurité sociale dans le cadre des missions qu’ils doivent accomplir au quotidien et des procédures qu’ils doivent engager dans des conditions parfois difficiles.

Je ne considère pas que cette mesure risquerait de diluer le dispositif initial, dans la mesure où elle s’appliquerait dans les mêmes conditions que celles de l’article 2, c’est-à-dire dans les hypothèses où les collectivités territoriales sont, de fait, dans la situation d’usagers de l’administration de l’État ou des organismes de sécurité sociale. Typiquement, je pense aux demandes de subventions.

Par ailleurs, si effectivement le rôle de conseil des préfectures auprès des collectivités territoriales est indispensable, les services de l’État n’ont plus forcément les moyens d’apporter l’appui juridique et l’expertise suffisants, notamment aux plus petites communes, qui sont souvent démunies face à la complexité et à la multiplicité des procédures.

Je rappelle que les petites communes n’ont pas les moyens de recruter des juristes et des agents administratifs suffisamment formés sur toutes ces questions complexes. Il convient donc de les aider.

C’est pourquoi l’avis de la commission est défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je suis tout à fait hostile à cet amendement de suppression. La commission spéciale a très bien fait d’ajouter cet article et, si le Sénat ne protège pas les collectivités, je ne vois pas qui le fera !

Si M. le secrétaire d’État ne voit pas dans quelles circonstances cette disposition pourrait s’appliquer, je l’encourage chaudement à venir dans un département rural comme le mien, où il n’y a plus de trésorerie, où les sous-préfectures ne sont pas ouvertes aux élus, où on règle à peu près tout par téléphone et où on a des problèmes avec la fonction publique territoriale.

Ces difficultés concernent bien sûr les petites communes, mais aussi les intercommunalités, en particulier celles qui ont été mariées de force dans des conditions apocalyptiques. Vous devriez savoir que les processus de fusion ont entraîné des problèmes de fiscalité extrêmement complexes.

Je vois donc très bien comment cet article pourrait s’appliquer aux collectivités territoriales de mon département et je ne suis évidemment pas la seule dans cette situation. En conséquence, je ne voterai sûrement pas cet amendement de suppression !

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour explication de vote.

Mme Nathalie Delattre. Comme je l’ai rappelé tout à l’heure au nom du groupe du RDSE, nous avons salué l’introduction de cette mesure par la commission spéciale et nous ne voterons pas l’amendement de suppression déposé par le Gouvernement.

Comme vient de le dire notre collègue Nathalie Goulet, aujourd’hui, les communes, en particulier les plus petites, ne se sentent pas accompagnées par l’administration, mais simplement sanctionnées. Elles ont besoin d’être entendues, accompagnées, écoutées et de bénéficier aussi d’un droit à l’erreur.

Mme le rapporteur le disait, ces communes manquent d’accompagnement juridique, elles n’ont pas les moyens d’en avoir et c’est à l’administration de mettre tout cela à leur portée, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.

Mme Michelle Meunier. Comme l’a fort justement dit notre rapporteur, le groupe socialiste et républicain s’est montré tout à fait défavorable à cet amendement de suppression en commission spéciale. L’adopter serait un mauvais signal pour les collectivités, notamment les plus petites d’entre elles, mais aussi celles de taille moyenne. Ce projet de loi entend renforcer la confiance dans l’État ; en ce sens, nous ne pouvons pas voter l’amendement du Gouvernement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 37.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 2 bis A.

(Larticle 2 bis A est adopté.)

Article 2 bis A (nouveau)
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Article 2 bis

Article additionnel après l’article 2 bis A

M. le président. L’amendement n° 98 rectifié, présenté par Mme Schillinger et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Après l’article 2 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 5° du I de l’article L. 114-17 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Une personne ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation ne peut faire l’objet d’une sanction pécuniaire ou consistant en la privation de tout ou partie d’une prestation due, si elle a régularisé sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire par le directeur dans le délai que celui-ci lui a indiqué. La sanction peut toutefois être prononcée, sans que la personne en cause ne soit invitée à régulariser sa situation, en cas de mauvaise foi ou de fraude. »

La parole est à Mme Patricia Schillinger.

Mme Patricia Schillinger. Par cet amendement, je souhaite éviter que le droit à régularisation en cas d’erreur soit privé de son effectivité dans le domaine social.

Comme l’a souligné le Défenseur des droits dans son avis sur le présent projet de loi, il existe un risque que le nouvel article L. 123-1 du code des relations entre le public et l’administration ne s’impose pas aux organismes de prestations familiales ou d’assurance vieillesse. Le code de la sécurité sociale prévoit en effet une règle spécifique s’agissant de l’erreur des assurés, une règle d’ailleurs moins favorable puisqu’elle assimile erreur et fraude.

Vous le savez, le code des relations entre le public et les administrations régit les relations entre le public et les administrations, y compris les organismes sociaux, uniquement « en l’absence de dispositions spéciales applicables ».

Le risque est donc réel que les dispositions spéciales du code de la santé publique l’emportent sur la règle générale du droit à la rectification en cas d’erreur.

Pour éviter cette incertitude qui serait gravement préjudiciable à la quasi-totalité de nos concitoyens, je vous propose d’introduire la règle du droit à l’erreur dans l’article L. 114-17 du code de la sécurité sociale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Pascale Gruny, rapporteur. Cet amendement tend à ce que le droit à l’erreur soit appliqué dans les relations entre les organismes de sécurité sociale et les bénéficiaires de prestations, dans les cas où ces derniers s’exposent à des sanctions en raison de déclarations erronées.

J’ai pris l’attache de la Caisse nationale des allocations familiales et de la direction de la sécurité sociale, qui m’ont indiqué que, dans les faits, aucune pénalité n’est aujourd’hui appliquée en cas d’erreur de bonne foi.

L’objectif des auteurs de l’amendement semble donc satisfait, mais la commission spéciale a souhaité demander au Gouvernement son avis sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Cet amendement vise à restreindre le prononcé de pénalités financières aux cas de fraude pour les branches vieillesse et famille. Le Gouvernement partage le souhait des auteurs de l’amendement de limiter les pénalités aux personnes manifestement de mauvaise foi ou qui fraudent. Bien que la situation soit extrêmement rare, comme l’a rappelé Mme la rapporteur, le fait de l’inscrire dans la loi permettra de l’acter de manière définitive et solide. C’est pourquoi l’avis du Gouvernement est favorable sur cet amendement.

M. le président. Madame le rapporteur, quel est maintenant l’avis de la commission spéciale ? Suivez-vous l’avis du Gouvernement ? (Mme le rapporteur acquiesce.)

Je mets aux voix l’amendement n° 98 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2 bis A.

Article additionnel après l'article 2 bis A - Amendement n° 98 rectifié
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Article 3 (Texte non modifié par la commission)

Article 2 bis

(Supprimé)

Article 2 bis
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Article additionnel après l'article 3 - Amendement n° 92 rectifié (début)

Article 3

(Non modifié)

I. – L’article 1727 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le II est ainsi modifié :

a) Le 1 est abrogé ;

b) Les 2, 2 bis et 2 ter deviennent, respectivement, les 1, 2 et 2 bis ;

2° Il est ajouté un V ainsi rédigé :

« V. – Le montant dû au titre de l’intérêt de retard est réduit de 50 % en cas de dépôt spontané par le contribuable, avant l’expiration du délai prévu pour l’exercice par l’administration de son droit de reprise, d’une déclaration rectificative à condition, d’une part, que la régularisation ne concerne pas une infraction exclusive de bonne foi et, d’autre part, que la déclaration soit accompagnée du paiement des droits simples ou, s’agissant des impositions recouvrées par voie de rôle, que le paiement soit effectué au plus tard à la date limite de paiement portée sur l’avis d’imposition.

« À défaut de paiement immédiat des droits simples ou, s’agissant des impositions recouvrées par voie de rôle, de paiement effectué au plus tard à la date limite de paiement portée sur l’avis d’imposition, le bénéfice de la réduction de 50 % de l’intérêt de retard prévu au premier alinéa du présent V est conservé en cas d’acceptation par le comptable public d’un plan de règlement des droits simples. »

II. – Le 2° du I s’applique aux déclarations rectificatives déposées à compter de la publication de la présente loi.

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, sur l’article.

M. Éric Bocquet. Quelques mots rapides pour dire que nous ne voterons pas l’article 3 du projet de loi. Comme beaucoup d’articles de ce texte, il a le défaut de cristalliser une situation largement prise en compte dans la pratique.

En effet, la seule lecture de la partie relative au contrôle fiscal du tome premier de l’évaluation des voies et moyens annexé à la loi de finances laisse apparaître que, même quand une entreprise ou un particulier se trouve engagé dans un processus de redressement fiscal, il n’est pas rare que des allégements soient opérés sur la facture.

Ainsi, l’examen précis des situations concrètes des particuliers comme des entreprises peut fort bien amener l’administration à transiger et à atténuer ici les pénalités, ailleurs les sommes dues au titre de l’intérêt de retard.

Ces comportements de l’administration procèdent de la doctrine fiscale, établie non seulement par la loi, mais aussi par l’importante production réglementaire de ces administrations – décrets, circulaires… –, et veillent, qu’on le croie ou non, à tenir effectivement compte des capacités contributives du redevable. Les recours gracieux, cela existe toujours, sans parler des abandons de pénalité liés au suivi scrupuleux d’un plan d’apurement !

Finalement, l’article 3 a donc tendance à enfoncer des portes ouvertes…

M. le président. Je mets aux voix l’article 3.

(Larticle 3 est adopté.)

Article 3 (Texte non modifié par la commission)
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Article additionnel après l'article 3 - Amendement n° 92 rectifié (interruption de la discussion)

Article additionnel après l’article 3

M. le président. L’amendement n° 92 rectifié, présenté par Mme G. Jourda, M. Durain, Mme Meunier, M. Cabanel, Mme Espagnac, MM. Lurel et Mazuir, Mmes Préville, Taillé-Polian, de la Gontrie et Jasmin, M. Fichet, Mme Blondin, MM. Courteau et Sueur, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les articles 1649 quater B quinquies et 1738 du code général des impôts sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :

« Les contribuables, personnes physiques, qui résident dans des « zones blanches » sont dispensés de l’obligation de télédéclaration de leurs revenus et de télépaiement de leurs impôts jusqu’au 31 décembre 2024. »

La parole est à Mme Gisèle Jourda.

Mme Gisèle Jourda. En 2017, le paiement par prélèvement automatique ou en ligne est devenu obligatoire pour tout avis d’impôt supérieur à 2 000 euros. Le seuil de paiement obligatoire sera abaissé à 1 000 euros en 2018 et à 300 euros en 2019.

Cependant, nul n’ignore sur ces travées que la couverture internet de notre territoire reste partielle et est absente des communes situées en zone blanche.

Ainsi, en plus de nuire considérablement à l’attrait et au développement de ces territoires souvent ruraux, il se trouve – vous en conviendrez – que plusieurs des habitants de ces zones ne peuvent bénéficier d’une connexion suffisante pour procéder à la gestion de leurs impôts par internet. Vous me direz que, s’ils en informent l’administration, ils peuvent toujours utiliser la déclaration papier.

Je vous réponds que, si on peut protéger en amont nos concitoyens de toute sanction injuste de l’administration qui viendrait pénaliser ceux qui vivent dans ces zones, en reportant l’obligation de télédéclaration et surtout celle de télépaiement à 2025, c’est beaucoup mieux.

Évitons-leur la double peine et ne leur faisons pas payer l’erreur d’une non-couverture de ces zones, souvent défavorisées, par les opérateurs !

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Pascale Gruny, rapporteur. Ma chère collègue, votre amendement, dont je comprends tout à fait l’objet, me semble satisfait, du moins dans son esprit, par le droit existant.

Premièrement, l’obligation de déclarer l’impôt sur le revenu en ligne n’est pas applicable aux contribuables qui ne disposent pas d’un accès à internet.

Deuxièmement, les contribuables qui estiment ne pas être en mesure de faire leur déclaration en ligne, pour une raison ou une autre et pourvu qu’ils en informent l’administration, peuvent toujours utiliser la déclaration papier.

Il est toujours possible d’aller plus loin, mais se pose alors la question du critère à retenir. Or il n’existe pas de définition de la « zone blanche » : s’agit-il de la 4G ou du très haut débit ? Comment définir strictement ces zones, sachant qu’elles évoluent en permanence et qu’elles sont différentes en fonction des opérateurs ?

Pour mémoire, la déclaration en ligne de l’impôt sur le revenu est maintenant obligatoire pour tous les contribuables dont le revenu dépasse 15 000 euros et deviendra obligatoire en 2019 pour l’ensemble des contribuables disposant d’un accès à internet. À défaut, une amende de 15 euros par déclaration est appliquée.

En conclusion, la commission émet un avis de sagesse sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Madame la sénatrice, votre amendement va me permettre d’apporter un certain nombre de précisions, comme je l’ai pu le faire pour les députés animés des mêmes inquiétudes et qui visaient les mêmes objectifs que vous.

L’obligation de déclaration en ligne des revenus doit être mise en œuvre de façon progressive jusqu’en 2019, en fonction du montant du revenu fiscal de référence : 40 000 euros en 2016 ; 28 000 euros en 2017 ; 15 000 euros en 2018 ; enfin, pour tous les revenus fiscaux de référence en 2019, dès lors, et seulement dès lors, j’y insiste, que la résidence principale des contribuables est équipée d’un accès à internet.

Dans ce cadre, le dispositif législatif comporte déjà une exemption de l’obligation de déclarer en ligne pour les usagers dont la situation, l’âge, le handicap, l’accès au numérique, soit par non-équipement, soit par mauvaise maîtrise du numérique ou par couverture insuffisante, ne leur permettent pas de déclarer en ligne.

Ainsi, l’article 1649 quater B quinquies du code général des impôts prévoit que ceux qui estiment ne pas être en capacité de déclarer en ligne peuvent utiliser une déclaration papier, sans autre démarche spécifique. La direction générale des finances publiques informe et rassure les usagers quant à cette exemption au moyen d’une mention visible sur la première page de la déclaration des revenus.

S’agissant de l’amende forfaitaire de 15 euros en cas de non-respect de l’article mentionné ci-dessus, elle ne s’applique qu’aux usagers visés par l’obligation et donc, en aucun cas, à ceux dont la résidence n’est pas équipée d’internet ou qui estiment ne pas être capables de déclarer en ligne, que je viens de définir à l’instant.

En outre, l’adhésion au prélèvement à l’échéance mensuelle peut être faite par courrier, mail ou téléphone auprès des centres prélèvement service.

Ces modes de souscription répondent complètement aux difficultés que pourraient rencontrer certains usagers, notamment la fracture numérique, le grand âge ou des situations de handicap.

Enfin, les services territoriaux de la DGFiP ont pour consigne d’accompagner les usagers en difficulté qui se présenteraient aux guichets pour faciliter leurs démarches de paiement dématérialisé.

Compte tenu de toutes les dispositions prises pour favoriser l’inclusion de tous les publics, votre amendement nous paraît donc satisfait. Les exceptions déjà prévues par le droit vont au-delà des seuls besoins des habitants des zones blanches que vous mentionnez dans votre amendement et prennent en considération d’autres obstacles à la télédéclaration que la seule non-couverture.

Espérant vous avoir convaincue et, surtout, vous avoir rassurée, madame la sénatrice, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.

M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, pour explication de vote.

M. Patrick Chaize. Je pense que nous devons être cohérents, notamment sur le sujet du numérique. Je rappelle que le plan France Très haut débit porté par ce gouvernement, mais également par les gouvernements précédents, prévoit que 100 % du territoire soit couvert en très haut débit fibre optique d’ici à 2025 et que 100 % des habitants devront être raccordés au très haut débit en 2022. Par ailleurs, comme le Président de la République l’a annoncé en décembre dernier lors de la conférence nationale des territoires, 100 % des Français devraient pouvoir disposer, en 2020, d’un débit suffisant pour pouvoir accéder à ce type de service.

Globalement, nous enverrions un mauvais signal en votant cet amendement, qui part du principe que l’accès ne sera pas généralisé en 2025. En plus, il faut savoir que le très haut débit n’est pas nécessaire pour pouvoir remplir une déclaration de ce type. À mon sens, il serait plus utile de nous interroger sur la formation à l’accès aux services, par l’intermédiaire, peut-être, des maisons de services au public. Ces dernières n’ont pas dans leurs attributions les démarches auprès des services fiscaux, les directions départementales des finances publiques n’étant pas partenaires, la plupart du temps, des maisons de services au public. La clé du problème est peut-être là.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je ne veux pas ruiner l’ambiance, mais je voterai cet amendement s’il est maintenu. En effet, voilà quelques jours, nous avons encore voté un texte sur la couverture numérique pour tirer les conséquences des promesses non tenues en la matière depuis des années.

J’entends bien ce que vous dites, monsieur le secrétaire d’État, mais une grande confiance n’exclut pas une petite méfiance. Je puis vous dire que nous avons quand même un certain nombre de problèmes de couverture.

Tant mieux si l’administration prend en compte les difficultés d’accès, et ce que vous avez dit nous rassure, mais je pense que notre maison doit continuer à émettre des signaux forts concernant les carences de couverture.

Le problème va bien au-delà, il concerne le principe même de la dématérialisation. Vous dites qu’il y a d’autres façons de remplir sa déclaration, mais, parfois, se procurer le support papier d’un document dématérialisé n’est pas aussi simple que vous semblez le penser, surtout pour des personnes âgées, dont on a bien compris qu’elles étaient concernées par le dispositif d’exception.

Par principe, je voterai cette proposition pour souligner la nécessité de respecter les promesses faites, ce qui n’a pas été le cas ces dernières années. Je le répète, une grande confiance n’excluant pas une petite méfiance, j’apporterai ma voix à cet amendement, qui ne résistera sûrement pas à la navette. Tant que l’occasion nous en est donnée, défendons des amendements de bon sens !

M. le président. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Monsieur le secrétaire d’État, lorsque vous venez devant nous présenter un projet de loi qui vise à développer la confiance entre l’État et les usagers, comment pouvez-vous mettre en avant l’idée, inculquée par la technocratie qui vous entoure, que des possibilités d’exonération sont prévues ? En effet, cela veut dire que le contribuable devra prouver l’impossibilité dans laquelle il est de faire de manière correcte une télédéclaration !

Cet amendement tend à établir le principe inverse : si l’État n’est pas en mesure d’assurer une couverture de haut débit, il doit accepter de ne pas imposer la télédéclaration. C’est ce que nous vous demandons, en même temps que de rétablir la confiance, laquelle passe par la capacité qui nous est offerte, à nous élus, de dire à la technocratie qui veut nous gouverner que les choses ne se passent pas ainsi.

Je suis élu d’une zone urbaine et je sais que, dès que la wifi ne fonctionne pas bien, comme c’est parfois le cas aussi au Sénat, je râle. La télédéclaration, le prélèvement et tout ce qui passe par internet supposent d’avoir une connexion rapide et suffisante. Or, tant que cela n’est pas garanti dans les zones blanches, la confiance, c’est de voter notre amendement ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)