M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Pascale Gruny, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer l’article 38, lequel comporte diverses dispositions relatives aux cultes.

En premier lieu, madame Delattre, je ne comprends ni ne partage votre opposition à la mesure autorisant les associations cultuelles à posséder et administrer un immeuble acquis à titre gratuit. Comme pour le don par SMS, il s’agit de mettre fin à une différence de traitement injustifiée entre associations, qui n’existait pas avant 2014.

Sans remettre en cause l’objet exclusivement cultuel de ces associations, prévu par la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État, cette mesure permettrait de mettre fin au contournement de la législation actuelle via des libéralités consenties soit directement à des personnes physiques, soit à des associations relevant du régime de la loi de 1901 créées à la seule fin de recevoir à titre gratuit des immeubles de rapport et d’en tirer des revenus locatifs.

En deuxième lieu, la commission spéciale a souscrit à l’exclusion des associations cultuelles du champ d’application des obligations imposées aux représentants d’intérêts par la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique. Je rappelle qu’elles en étaient déjà partiellement exclues. Cette position s’inscrit dans la continuité de celle qui a été exprimée par le Sénat lors de l’examen du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

En troisième et dernier lieu, l’exclusion des élus locaux et des fonctionnaires concernés du champ du répertoire numérique des représentants d’intérêts, introduite dans cet article sur l’initiative de la commission spéciale, tient au caractère quasi inapplicable de la loi en la matière.

À mon sens, l’application de ces dispositions aux élus locaux n’apporterait qu’une faible valeur ajoutée. En effet, la finalité première du répertoire numérique est de faire la transparence sur l’influence des représentants d’intérêts sur l’élaboration de la loi et du règlement à l’échelle nationale : des relations quotidiennes qui se nouent au sein des territoires ne relèvent assurément pas de cette problématique.

D’ailleurs, c’est également l’avis de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, la HATVP, qui m’a alertée sur ce sujet, confirmant des inquiétudes déjà exprimées quant à son incapacité à faire face à ce surcroît d’activité à compter du 1er juillet 2018. Nous en reparlerons probablement au titre d’un prochain amendement.

La commission spéciale émet un avis défavorable sur le présent amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement est attaché à la rédaction des articles 25 et 38 telle qu’issue des débats à l’Assemblée nationale.

Un certain nombre de modifications au projet de loi initial ont été introduites par l’Assemblée nationale. Le Gouvernement y a apporté son soutien à l’occasion de l’examen du texte par les députés en séance.

L’obligation de fournir des comptes certifiés, qui figurait à l’article 38 dans la version initiale du projet de loi, a été déplacée à l’article 25, pour accompagner l’ouverture de la possibilité, pour les associations cultuelles, de bénéficier de dons par SMS.

Pour ce qui restait de l’article 38, les dispositions permettant aux associations cultuelles de bénéficier des revenus liés à des immeubles de rapport ont été supprimées par l’Assemblée nationale, avec le soutien du Gouvernement. Les dispositions subsistant au sein de cet article ont, quant à elles, un caractère technique qui nous a paru tout à fait acceptable.

Madame Delattre, je ne peux donc être favorable à la suppression totale de l’article 38. Je tiens à redire combien le Gouvernement est attaché à la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale. Les amendements suivants, qui peuvent être considérés comme des amendements de repli mais sont néanmoins d’une grande portée, me donneront l’occasion de confirmer et d’illustrer cette position.

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Pascale Gruny, rapporteur. Monsieur le secrétaire d’État, je suis très étonnée de l’avis du Gouvernement. La disposition dont il s’agit figurait dans le projet de loi initial : comment pouvez-vous raisonnablement justifier ce changement de pied soudain ?

Par ailleurs, je n’ai pas l’impression que l’exécutif parle d’une seule voix sur cette question. Les différents représentants du Gouvernement que j’ai entendus pour préparer le rapport de la commission spéciale m’ont tous affirmé être favorables au rétablissement du texte initial, ce qui semble assez logique.

J’espère que vous vous mettrez d’accord, au sein du Gouvernement, en vue de la commission mixte paritaire, dont M. Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics, nous a dit souhaiter qu’elle soit conclusive.

En tout cas, je confirme l’avis défavorable de la commission spéciale.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Madame la rapporteur, qu’il n’y ait aucune ambiguïté : vous avez raison, ces dispositions figuraient dans le projet de loi déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale.

Toutefois, les discussions menées sur cette question avec les députés ont conduit le Gouvernement à revoir sa position et, comme je l’ai indiqué, à accompagner les initiatives parlementaires, pour aboutir à la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 172 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission spéciale.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 69 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l’adoption 113
Contre 231

Le Sénat n’a pas adopté.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 189 rectifié, présenté par Mmes N. Delattre et Costes, MM. Requier et Arnell, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Laborde, MM. Menonville, Vall, Artano, A. Bertrand, Collin et Corbisez, Mme Guillotin et MM. Labbé et Léonhardt, est ainsi libellé :

Alinéas 1 et 2

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Mme Nathalie Delattre. Les alinéas 1 et 2 ont pour objet d’autoriser les associations cultuelles à posséder et à administrer des immeubles de rapport.

M. le président. L’amendement n° 187 rectifié, présenté par Mmes N. Delattre et Costes, MM. Requier et Arnell, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Laborde, MM. Menonville, Vall, Artano, A. Bertrand, Collin et Corbisez, Mme Guillotin et MM. Labbé et Léonhardt, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

, sous réserve de la non-utilisation de ces immeubles à des fins commerciales

La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Mme Nathalie Delattre. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport au précédent.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Pascale Gruny, rapporteur. Pour les raisons que j’ai exposées au sujet du premier point de l’amendement n° 172 rectifié, la commission spéciale émet un avis défavorable sur l’amendement n° 189 rectifié.

L’amendement n° 187 rectifié tend à préciser que les associations cultuelles peuvent posséder et administrer des immeubles à titre gratuit, mais qu’elles ne peuvent pas les exploiter directement à des fins commerciales.

Comme je l’ai indiqué, l’octroi aux associations cultuelles de la possibilité de posséder ou d’administrer tout immeuble acquis à titre gratuit n’aurait pour conséquence ni de modifier leur objet exclusivement cultuel ni de remettre en cause le principe de spécialité auquel elles sont soumises en application des lois de 1905 et de 1901.

En conséquence, les associations cultuelles ne pourront pas acquérir à titre onéreux d’immeubles de rapport ni exploiter directement un immeuble reçu à titre gratuit pour une activité sans lien avec l’exercice du culte. Il s’agit uniquement de leur permettre de disposer d’une nouvelle ressource, qui devra être utilisée pour « subvenir aux frais, à l’entretien et à l’exercice public d’un culte », conformément à l’article 18 de la loi de 1905.

Ces dispositions ne constituent donc en aucun cas un bouleversement de la loi de 1905.

Mes chers collègues, vous le savez très bien, il arrive que des personnes n’ayant pas de descendants fassent des legs à des associations cultuelles. Pour l’heure, on interdit à ces dernières d’utiliser les immeubles qui leur sont légués : elles ne peuvent en faire que des lieux de réunion, alors qu’elles disposent certainement d’autres locaux à cet usage. Il s’agit simplement de leur permettre de louer ces immeubles. À l’instar d’autres ressources, comme les dons, les recettes ainsi dégagées viendraient financer l’objet des associations cultuelles. Cela n’a rien à voir avec la loi de 1905 ou avec la laïcité.

Mme Catherine Deroche. Tout à fait !

Mme Pascale Gruny, rapporteur. J’émets également un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je l’ai déjà dit il y a quelques instants, le Gouvernement est attaché à la rédaction de l’article 38 telle qu’issue des travaux de l’Assemblée nationale, c’est-à-dire sans la disposition permettant aux associations cultuelles de disposer d’immeubles de rapport acquis à titre gracieux.

Je considère par ailleurs – j’espère que Mme la rapporteur me pardonnera – qu’il y a un lien avec la loi de 1905 et les conditions de financement du culte, y compris dans ses aspects qui pourraient être lucratifs. (Marques dapprobation sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur les amendements de Mme Delattre.

M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.

M. Alain Richard. À mon sens, un élément est absent des observations formulées par Mme la rapporteur : avec cette disposition, on franchit la limite du caractère non lucratif de l’activité de ces associations.

M. Alain Richard. D’une certaine façon, Mme la rapporteur le reconnaît d’ailleurs elle-même, puisqu’elle parle bien de recettes, c’est-à-dire, en réalité, d’un profit.

Au regard de l’argumentation développée par Mme Delattre, fondée sur la distinction entre les associations relevant de la loi de 1901 et celles relevant de la loi de 1905, il y a là une différenciation que nous avons du mal à accepter : à l’écart de leur objet, certaines de ces associations pourraient réaliser des plus-values, des profits d’exploitation d’un bien leur ayant été légué, alors que d’autres ne pourraient pas le faire en respectant leur caractère non lucratif.

Il s’agit vraiment là d’un choix discutable. Je veux bien entendre que le Gouvernement a hésité avant d’arrêter sa position, mais il me semble que, sur le plan des principes, il y a une différenciation qui peut choquer.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.

M. Jérôme Durain. Il est vingt-trois heures cinquante. Nous débattons d’un projet de loi dont j’ai déjà eu l’occasion de dire, tout à l’heure, qu’il était assez général, pour ne pas dire attrape-tout. Que l’on prétende modifier la loi de 1905 à la faveur de l’examen d’un tel texte, cela me paraît un peu gros, inapproprié, choquant, malvenu…

On nous explique qu’il s’agit là d’une question périphérique, mais, ce qui est en jeu, c’est tout de même la loi de 1905. La question religieuse est posée à tous les étages de notre société. Elle soulève des problèmes incommensurables à l’échelle planétaire. Que l’on s’amuse avec la loi de 1905, que l’on prenne le risque d’y porter atteinte au travers de ce texte, dans ces termes-là, me paraît totalement déplacé !

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

M. Philippe Mouiller. Pour ma part, je voudrais apporter une précision d’ordre comptable : le caractère lucratif ou non est apprécié non pas objet par objet, mais au regard de l’ensemble de l’activité de l’association. Dès lors, c’est bien au regard du résultat global que l’on peut se prononcer.

M. Alain Richard. Avec une telle mesure, on change le texte !

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Pascale Gruny, rapporteur. Mes chers collègues, j’y insiste, nous n’avons pas inventé cette disposition : elle figurait dans le texte du Gouvernement ! Sinon, nous n’aurions pas pu l’inscrire dans le projet de loi, car elle aurait été considérée comme un cavalier.

Monsieur Richard, il n’y a pas de finalité commerciale, puisque les ressources dégagées seront employées au titre de l’objet de l’association cultuelle.

M. Alain Richard. Vous m’avez mal compris !

Mme Pascale Gruny, rapporteur. Actuellement, des associations cultuelles créent des associations relevant de la loi de 1901 ou des fondations,…

Mme Pascale Gruny, rapporteur. … ce qui aboutit à un déséquilibre avec les autres associations cultuelles.

En l’occurrence, nous cherchons simplement à apporter de la transparence. On invoque sans cesse la transparence, mais, quand on veut la mettre en œuvre, cela soulève toujours des objections.

En définitive, pourquoi cette mesure suscite-t-elle tant de débats ? Simplement parce qu’il s’agit des cultes, parce que l’on évoque la loi de 1905 et que l’on a peur d’aborder ce sujet. Un jour, il faudra pourtant bien mettre les choses au clair.

M. Pierre Ouzoulias. Mais pas comme cela, pas ce soir !

Mme Pascale Gruny, rapporteur. Ce sujet doit être abordé de manière naturelle et dans un esprit de tolérance !

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.

M. Yves Détraigne. Je ne suis pas sûr de bien comprendre le débat : s’agit-il oui ou non de modifier la loi de 1905 ?

M. Jérôme Durain. Eh oui, l’article 19 !

M. Yves Détraigne. Si oui, il ne me semble pas que le moment soit bien choisi. À mon sens, il serait un peu cavalier de procéder ainsi, sans préparation, sans concertation.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour explication de vote.

Mme Nathalie Delattre. Nous modifions l’article 19 de la loi de 1905… Oui, c’est bien à cette loi qu’il s’agit de toucher ! Je ne suis pas d’accord avec Mme la rapporteur : cela n’est pas neutre.

Nous aurions voulu avoir un débat à part entière sur ce point ; pour notre part, nous ne le craignons pas. Vous avez été très virulente à mon encontre, madame la rapporteur, mais je n’ai pas peur d’aborder cette question. J’aurais simplement voulu en parler dans un autre cadre, et non pas lors de l’examen d’un projet de loi fourre-tout, un projet de loi attrape-tout, comme on l’a déjà dit.

Nous aurions voulu avoir ce débat, je le répète, dans le cadre de l’examen d’un texte dédié à cette question : la loi de 1905 est très moderne et peut évoluer ; nous sommes pour l’évolution, mais pas dans ces conditions.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Si la loi de 1905 a prévu un article dédié aux legs, c’est bien parce que le problème se posait : c’est gratuit, et aucun profit n’est tiré de ces legs.

Cet article revient à contourner cette volonté. Pourquoi la loi de 1905 se serait-elle préoccupée de cette question, si ce n’est pour s’assurer qu’il n’y aurait pas de mésusage des legs réalisés ? Je ne vois donc pas pourquoi l’on touche à cette question au détour d’un texte polysémique. J’ai l’impression que l’on ne sait pas où l’on en est…

M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il est minuit. Je vous propose de prolonger notre séance afin de poursuivre l’examen de ce texte, voire de l’achever. Il nous reste une dizaine d’articles à examiner.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

La parole est à M. le président de la commission spéciale.

M. Jean-François Husson, président de la commission spéciale. Mes chers collègues, je vous renvoie à la page 690 du rapport : l’article dont nous débattons en cet instant reprend mot pour mot le texte déposé initialement par le Gouvernement. Les choses sont claires.

Ne tournons pas autour du pot ! Cet article a été adopté en commission ; prononçons-nous maintenant sereinement et démocratiquement.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je veux de nouveau souligner que le Gouvernement a accompagné les initiatives de la majorité présidentielle pour aboutir à la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale.

Ce n’est pas la première fois, ni certainement la dernière d’ailleurs, pendant ce quinquennat comme pendant les autres, que le texte initial proposé par le Gouvernement subit des modifications qu’il a accompagnées ou acceptées. Cela n’ôte rien à la légitimité du Gouvernement de défendre les dispositions ainsi adoptées par l’Assemblée nationale, même si elles sont différentes du texte initial.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 189 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 70 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 340
Pour l’adoption 134
Contre 206

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 187 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 71 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 339
Pour l’adoption 134
Contre 205

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° 68 rectifié, présenté par Mme de la Gontrie, M. Durain, Mme Meunier, M. Cabanel, Mme Espagnac, MM. Lurel et Mazuir, Mmes Préville, Taillé-Polian et Jasmin, M. Fichet, Mme Blondin, MM. Courteau et Sueur, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. L’article 38 prévoit de revenir sur l’accord obtenu lors de l’examen de la loi de 2013 relative à la transparence de la vie publique, qui avait exclu de la liste des représentants d’intérêts les associations cultuelles uniquement lorsqu’elles agissent dans le cadre de leurs relations avec le ministre et les services ministériels chargés des cultes. En dehors de ce cadre, elles entrent dans le périmètre des représentants d’intérêts.

Cette loi définit les représentants d’intérêts comme les associations, les individus, les groupes qui influent sur la vie parlementaire, la vie publique. Qui peut contester que les associations cultuelles entrent dans le champ de la définition légale des représentants d’intérêts ? Je le rappelle, il s’agit de « toute personne morale qui a pour activité d’influer sur la décision publique, notamment sur le contenu d’une loi ou d’un acte réglementaire en entrant en communication avec un membre du Gouvernement ou un parlementaire ».

La loi sur le mariage pour tous ou la loi en faveur des malades et des personnes en fin de vie peuvent témoigner que les associations cultuelles pèsent dans le débat public, sollicitent les parlementaires par l’envoi de pétitions ou d’amendements, interviennent dans le processus de la décision politique. La future révision sur les lois bioéthiques en fera sans nul doute une nouvelle fois la démonstration. Cette intervention n’est pas contestable en soi ; chacun peut intervenir dans le débat public : les associations cultuelles pas moins que les autres.

Toutefois, il est indispensable que ce travail d’influence se fasse en toute transparence. Les associations cultuelles agissent au regard de la loi comme des représentants d’intérêts. Répondre de cette catégorie et des obligations déontologiques qui en découlent ne constitue pas une sanction. C’est la garantie d’une plus grande transparence dans le processus de décision publique. Ce n’est donc ni infamant ni déshonorant !

Concrètement, qu’exige-t-on d’elles ? Principalement, qu’elles déclarent à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, la HATVP, leur identité et le champ de leur activité de représentation d’intérêts. Qui peut affirmer que ces obligations déclaratives sont excessives ? Nous contestons donc la volonté du Sénat d’exclure totalement les associations cultuelles de la liste des représentants d’intérêts.

Vous avez revendiqué précédemment, madame la rapporteur, avec une grande ferveur, l’exigence de transparence. On est au cœur de la transparence : une association cultuelle sur des sujets démocratiques de première importance doit se déclarer comme telle. Il est donc malvenu d’essayer de les faire sortir de ce registre.

Ce n’est pas un laïcard, un antireligieux fervent ou radical qui vous parle ; c’est un citoyen qui revendique la laïcité, comme beaucoup d’autres.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Pascale Gruny, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer la disposition excluant les associations cultuelles du champ d’application des obligations imposées aux représentants d’intérêts par la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique.

Actuellement, cette exclusion n’est que partielle et, comme l’a relevé le Conseil d’État, cette situation ne reflète pas la réalité des relations que les associations entretiennent traditionnellement avec d’autres représentants de l’État que le ministère de l’intérieur dans le domaine de la culture, de la fiscalité, par exemple, ou avec les élus locaux.

La mesure proposée s’inscrit d’ailleurs tout à fait dans la continuité de la position exprimée par le Sénat lors de l’examen du projet de loi dit « Sapin II ». Le Sénat avait alors suivi l’analyse du rapporteur de la commission des lois, notre collègue François Pillet, qui avait considéré comme inopportun de soumettre les représentants des cultes à de telles obligations.

C’est pourquoi la commission spéciale a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Un certain nombre d’avis, notamment celui de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, que Mme la rapporteur a rappelé, ont souligné que les relations classiques des associations cultuelles ne s’arrêtaient pas nécessairement au seul ministère des cultes.

Cela étant, les dispositions adoptées par la commission spéciale visent à sortir totalement du registre des représentants d’intérêts les associations cultuelles ; nous ne pouvons souscrire à cette position.

C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement porté par M. Durain.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour explication de vote.

Mme Nathalie Delattre. Nous soutiendrons cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 68 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 73 rectifié, présenté par M. Durain, Mme Meunier, M. Cabanel, Mme Espagnac, MM. Lurel et Mazuir, Mmes Préville, Taillé-Polian, de la Gontrie et Jasmin, M. Fichet, Mme Blondin, MM. Courteau et Sueur, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

… – Au b du 2° du IV de l’article 25 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, l’année : « 2018 » est remplacée par l’année : « 2021 ».

La parole est à Mme Michelle Meunier.

Mme Michelle Meunier. La commission spéciale a restreint le champ d’application des règles relatives à la transparence des rapports entre les représentants d’intérêts et les pouvoirs publics. Encore une fois, ce détricotage des lois relatives à la transparence de la vie publique est totalement antinomique avec l’objectif de ce texte.

La commission spéciale a soustrait les élus locaux du champ des personnes avec lesquels les représentants entrent en communication, au motif que trop d’élus seraient concernés. Rappelons tout de même que la loi de 2013 a retenu les seuls conseillers régionaux, départementaux, maires d’une commune de plus de 20 000 habitants et adjoints au maire d’une commune de plus de 100 000 habitants, ainsi que les membres de cabinets de ces autorités territoriales.

La commission invoque le caractère trop ambitieux du dispositif. Certes, le chantier est important, mais il est déjà très engagé. Ce serait envoyer un très mauvais signal que d’y renoncer au moment même où le registre des représentants d’intérêts est en train de se mettre en place. Cette phase de mise en œuvre suscite naturellement des interrogations, dont on peut raisonnablement espérer qu’elles s’atténueront rapidement lorsque le dispositif aura atteint son rythme de croisière.

Certaines collectivités ont déjà commencé à anticiper cette extension, en mettant en place des initiatives de transparence des agendas des élus, par exemple. Le rôle du législateur est non pas de stopper cette dynamique, mais de l’encourager, en étant à l’écoute des collectivités.

C’est pourquoi, plutôt que de renoncer au principe d’une transparence des actions de représentants d’intérêts au niveau des collectivités territoriales, nous proposons un temps supplémentaire pour la mise en place de cette extension, en reportant le dispositif à 2021, de sorte qu’il s’applique à compter des prochains scrutins locaux, municipaux, départementaux et régionaux.