M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement.

M. Christophe Castaner, secrétaire dÉtat auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice Costes, vous interrogez Mme la garde des sceaux sur les réformes de la justice, notamment sur l’adaptation du réseau de juridictions.

Comme vous le savez – vous l’avez d’ailleurs rappelé –, le Premier ministre et la garde des sceaux ont lancé, au mois d’octobre dernier, cinq chantiers en vue de réformer en profondeur notre justice, pour que la justice soit rendue de façon plus rapide, plus efficace. Nous savons bien qu’aujourd’hui elle a besoin de gagner en rapidité et en efficacité. Parmi ces cinq chantiers, figure l’adaptation de notre réseau judiciaire.

Madame la sénatrice, vous avez raison de souligner l’importance de la justice de proximité.

J’ai moi-même été maire d’une commune qui comptait un tribunal d’instance et j’ai le souvenir d’avoir appris un jour, par la presse, que celui-ci était fermé. À l’époque, une juridiction sur quatre avait été supprimée. Mme Rachida Dati était alors garde des sceaux… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Je ne me souviens pas que la concertation ait été aussi poussée que celle qui a lieu aujourd’hui.

En lançant la consultation sur ce sujet, Mme la garde des sceaux a souhaité explorer toutes les voies possibles qui permettraient d’améliorer la lisibilité et l’efficacité de notre justice, avec pour seul préalable qu’aucun – je dis bien aucun – lieu de justice ne ferme.

Je vous confirme, madame la sénatrice, que, dans votre département – votre question était certes plus large –, aucun tribunal ne sera fermé. Évidemment, le tribunal de grande instance d’Aurillac, dans sa fonction de TGI, sera maintenu (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains), tout comme le seront les deux tribunaux d’instance, à Aurillac et à Saint-Flour.

Toutefois, il est proposé que la juridiction judiciaire puisse décider de spécialiser tel ou tel tribunal d’instance. L’objectif est non de les fermer, non de diminuer le volume d’actions de travail, mais de spécialiser. En effet, nous savons bien qu’aujourd’hui le système de droit implique une spécialisation que n’ont pas forcément tous les magistrats. Nous avons pour objectif que, sous l’autorité des magistrats eux-mêmes, en lien avec les collectivités locales et les différents élus, nous puissions définir les spécialisations de tel ou tel tribunal.

Madame la sénatrice, soyez rassurée : évidemment, la carte judiciaire sera maintenue, parce que la proximité de la justice est un élément déterminant de son efficacité. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

attentat terroriste

M. le président. La parole est à M. Jean Pierre Vogel, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean Pierre Vogel. Ma question s’adresse à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à adresser un message de soutien et de solidarité aux familles des victimes de l’acte terroriste de Trèbes, attentat qui endeuille une nouvelle fois la France, à rendre hommage bien entendu au lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, qui a fait don de sa vie pour sauver celle des autres, et à nos forces de sécurité qui ont fait preuve d’un grand professionnalisme.

Monsieur le ministre d’État, 14 juillet 2016, Nice ; 3 février 2017, rue de Rivoli ; 20 avril 2017, Champs-Élysées ; 23 mars 2018, Trèbes. Quatre dates, quatre attentats qui ont mis en évidence les dysfonctionnements du système d’alerte et d’information des populations, le SAIP. Au mois d’août dernier, mon rapport d’information mettait déjà en lumière les multiples lacunes du SAIP. D’ailleurs, la préfecture de l’Aude ne l’a même pas activé ce vendredi, lui préférant Twitter.

Monsieur le ministre d’État, vous m’aviez indiqué avoir diligenté une enquête de l’Inspection générale de l’administration pour évaluer l’opportunité du recours à cette application : « J’ai compris – disiez-vous – que le procédé mis en place n’était pas optimal. » Nous en attendons encore les conclusions.

Au-delà de l’information des populations, je souhaite évoquer les multiples interrogations de nos concitoyens qui se résument en deux grandes questions.

La question du « comment », d’abord. Comment ce terroriste, connu des services de police depuis plusieurs années, condamné à plusieurs reprises pour des faits de droit commun, puis fiché S pour ses liens avec la mouvance islamiste, a-t-il pu passer à l’acte ?

La question du « pourquoi », ensuite. Pourquoi un individu, français depuis l’âge de douze ans, s’est-il retourné contre la France en tuant des Français ?

Ces deux questions, les Français se les posent, car ce qui est en jeu – et parfois en cause –, c’est la solidité non seulement de nos défenses judiciaires et sécuritaires, défenses qu’il nous faut renforcer dès le premier délit et sans doute compléter, par exemple au moyen du rétablissement de la double peine,…

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Jean Pierre Vogel. … mais également de nos défenses immunitaires et de cette exigence républicaine d’assimilation qui est le meilleur antidote contre le virus islamiste.

M. le président. Il faut vraiment conclure, mon cher collègue !

M. Jean Pierre Vogel. Monsieur le ministre d’État, avez-vous des propositions pour renforcer l’arsenal judiciaire existant ? Êtes-vous, par exemple, favorable au rétablissement de la double peine ? (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme Éliane Assassi. C’est indécent !

M. Jean Pierre Vogel. Que faites-vous en faveur de cette exigence d’assimilation, que nous devons réaffirmer pour casser ce processus infernal, qui mène du communautarisme au salafisme, puis au djihadisme ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat, ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur, vous affirmez que, lors de l’attentat, les moyens d’information et la réaction n’ont pas été à la hauteur. Permettez-moi de vous contredire.

L’alerte fut donnée au supermarché à dix heures quarante-deux ; à dix heures quarante-cinq, le groupement de gendarmerie déclenchait le plan départemental contre le terrorisme et mettait en œuvre le schéma national d’intervention, élaboré pour renforcer l’efficacité de l’action en cas de survenance d’un attentat. La brigade de Trèbes, le peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie de Carcassonne, avec le lieutenant-colonel Beltrame, arrivaient douze minutes plus tard.

Peu de temps ensuite, tous les écoliers étaient confinés dans leurs écoles, car on ignorait alors s’il y avait un ou plusieurs terroristes. On craignait en outre que l’attentat au supermarché ne soit finalement qu’un leurre, deux corps ayant été retrouvés ailleurs, et que d’autres attentats ne soient commis.

Alors oui, les forces de l’ordre ont réagi comme il le fallait.

Comme je l’ai dit tout à l’heure, même si nous avons embauché des effectifs – et nous allons continuer à le faire –, même si nous développons des moyens techniques, le combat sera long et nous devons y faire face tous ensemble. Ce n’est pas avec des mesures telles que celles que vous proposez que nous viendrons à bout du terrorisme. Ces mesures conduiraient au contraire à diviser les Français. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

événements à la faculté de montpellier

M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Éric Kerrouche. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale. Elle porte sur la situation dans les universités françaises, singulièrement celle de Montpellier.

Dans la nuit du 22 au 23 mars, des individus encagoulés ont commis des actes d’une grave violence contre des étudiants qui occupaient un amphithéâtre en signe de protestation. Cette occupation n’est pas isolée, comme en témoignent les cas de Paris, de Bordeaux, de Toulouse, de Lille, où des actes graves semblent avoir été également relevés.

Une telle violence, aux relents rances et aux racines extrémistes, n’a pas sa place à l’université, lieu du savoir et de l’apprentissage. Aucun blocage ne peut justifier de telles exactions. La démission du doyen de la faculté de droit, après des propos douteux, ne peut constituer la seule réponse. Nous attendons le résultat de l’enquête qui a été diligentée.

Vous le voyez, monsieur le ministre, contrairement aux assurances que vous voulez donner, les étudiants sont inquiets concernant la réforme de l’université votée en février 2018, quand ils n’y sont pas opposés, car elle met en place une sélection sociale et géographique qui ne veut pas dire son nom. C’est un nouveau symptôme du bouillonnement social que le Gouvernement ne veut pas voir.

Alors que l’étude Campus Responsables de 2016 a montré combien les universités sont des leviers importants de développement socio-économique, vous vous obstinez à sous-investir.

Officiellement, le budget de l’enseignement supérieur est en hausse dans la loi de finances. Or cette hausse, qui inclut d’ailleurs l’inflation, n’est en rien à la hauteur des défis à venir.

Votre gouvernement a une double responsabilité, s’agissant des croissances d’effectifs d’abord, des choix fiscaux qu’il a réalisés ensuite. Vous savez d’ores et déjà que la création de places supplémentaires ne suffira pas à accueillir les nouveaux bacheliers. Sans la flat tax et la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, qui rapportait 5 milliards d’euros, le budget de l’enseignement supérieur aurait pu augmenter de près de 40 %.

Contrairement à tout ce que prétend le Gouvernement auquel vous appartenez, la France n’est pas une entreprise. C’est une République qui doit privilégier un destin collectif dans lequel il ne saurait être question de favoriser uniquement quelques-uns.

M. le président. Votre question, s’il vous plaît !

M. Éric Kerrouche. Monsieur le ministre, ma question est simple : quand le Gouvernement va-t-il enfin prendre la mesure des besoins de l’université et de la recherche ? Allez-vous enfin répondre aux angoisses d’une génération qui n’entend pas être sacrifiée sur l’autel d’un néo-libéralisme et d’une austérité insensés ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale. Monsieur le sénateur Éric Kerrouche, je réponds à votre question en l’absence de la ministre de l’enseignement supérieur, Frédérique Vidal.

Votre question se compose en réalité de deux parties. Même si je ne vois pas très bien la relation entre elles, je m’efforcerai de répondre à chacune d’elles.

Je ne peux évidemment que condamner, comme vous, ce qui s’est passé à l’université de Montpellier, comme l’a fait tout le Gouvernement par la voix de Frédérique Vidal. Ma collègue a immédiatement diligenté une enquête auprès de l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche. Nous sommes dans l’attente de ses conclusions et nous serons bien entendu inflexibles sur les suites judiciaires à donner à cette affaire.

Comme vous l’avez rappelé, le doyen de la faculté de droit a démissionné à la suite de ces événements.

Mme Esther Benbassa. Heureusement !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. À la demande du président de l’université, le vice-président assure l’intérim du doyen.

J’en viens à la seconde partie de votre question, dont je ne vois absolument pas le rapport avec les événements auxquels vous venez de faire référence, dans la première partie de votre question, ces violences qui ont eu lieu contre des étudiants rassemblés pacifiquement pour protester contre certains aspects de la réforme de l’université.

Je puis vous assurer que la réforme de la plateforme Parcoursup qui a été menée par Frédérique Vidal garantira à tous les étudiants de France de bien meilleurs mois de juin, de juillet et d’août que ceux qu’ont connus leurs prédécesseurs en 2017 sous le régime APB. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.) Cette plateforme est une amélioration indiscutable.

Compte tenu de la modestie des investissements dans l’enseignement supérieur ces dernières années, de ce qui s’est passé avec le système APB – je pense au tirage au sort des étudiants –, il me semble que vous devriez être prudent avant de porter un jugement sur la nouvelle plateforme !

Nous vous donnons donc rendez-vous au mois de septembre, mais vous verrez dès la fin du mois de mai que Parcoursup est nettement meilleur que le système APB. (Marques dapprobation et applaudissements sur les mêmes travées.)

Mme Éliane Assassi. Surtout pour les handicapés !

attentat de trèbes

M. le président. La parole est à M. Stéphane Ravier, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.

M. Stéphane Ravier. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, mes trois années passées au sein de la Haute Assemblée et de l’assemblée municipale de Marseille m’ont convaincu que les hommes et les femmes qui nous gouvernent sont des animaux politiques à sang froid : ils ne rougissent pas - jamais !

Quels que soient l’hémicycle et les circonstances, ils restent – vous restez, mes chers collègues – droits dans leurs bottes, imperturbables ! Cette séance de questions au Gouvernement en aura été la parfaite illustration.

Les élus de gauche et d’extrême gauche ont clamé leur admiration pour les forces de l’ordre lors des louanges, ô combien justifiées, adressées au gendarme Arnaud Beltrame, ce héros français, alors qu’ils n’ont de cesse tout au long de l’année de dénigrer la gendarmerie, jusqu’à tenter de la salir, comme ils l’ont fait lors de l’accident du barrage de Sivens. (Très vives protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme Cécile Cukierman. Ce n’est pas vrai !

M. Stéphane Ravier. Un ex-candidat de la France insoumise s’est même réjoui de la mort d’Arnaud Beltrame.

De même, ils n’ont de cesse de dénigrer la police tout au long de l’année, …

M. Stéphane Ravier. … jusqu’à tenter de la salir, comme ils l’ont fait lors de la pseudo-affaire Théo.

Mme Cécile Cukierman. Vous mélangez tout !

M. Stéphane Ravier. Quelle hypocrisie et quelle indécence !

Du côté de la droite, on désigne enfin l’ennemi : le totalitarisme islamiste. On fait la leçon, on en appelle aujourd’hui à la lucidité et au courage, à l’application de l’arsenal sécuritaire et judiciaire, mais on est manifestement frappé d’amnésie.

Oubliée, l’abolition de la double peine par un certain Nicolas Sarkozy, laquelle a rendu impossible l’expulsion des délinquants étrangers.

Oubliée, la création par ce même Sarkozy du Conseil français du culte musulman, le CFCM, où les islamistes de l’association Musulmans de France, ancienne Union des organisations islamiques de France, l’UOIF, sont devenus majoritaires. Musulmans de France a appelé à voter Macron l’année dernière, soutien que le candidat, devenu président depuis, a alors accepté.

Oubliés, la suppression de 12 500 postes de policiers et de gendarmes, les amours avec le Qatar, et le non-rétablissement de nos frontières.

Oublié, le fait que vous ayez tous refusé, mes chers collègues, de voter à l’Assemblée nationale …

M. le président. Votre question !

M. Stéphane Ravier. … les propositions des députés du Front national d’expulser les étrangers fichés S.

Un front républicain de l’amnésie foudroyante et sélective, en somme ! (Huées sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. Votre question !

M. Stéphane Ravier. J’en viens à ma question, monsieur le président. Merci de m’octroyer les quelques secondes supplémentaires que vous avez accordées aux intervenants précédents.

M. Stéphane Ravier. Monsieur le ministre, alors que vous êtes apparu à Trèbes complètement dépassé par les événements, alors que nous avons compris que, à l’instar d’Emmanuel Macron, vous n’alliez pas « inventer un programme de lutte contre le terrorisme dans la nuit », que, s’il ne s’était rien passé entre l’affaire Merah et l’attaque de la gare Saint- Charles, … (Vives protestations.)

M. le président. Votre question !

M. Stéphane Ravier. … il ne se passerait rien après Trèbes, …

M. le président. Votre question !

M. Stéphane Ravier. … ne pensez-vous pas que, dans ces circonstances, l’heure est venue pour vous de présenter votre démission ? (Exclamations amusées.)

Mme Éliane Assassi. Tout ça pour ça !

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat, ministre de lintérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vois que M. Ravier fait toujours dans la nuance ! Il ne change pas, lui non plus… Je ne sais pas si tous ses collègues sont semblables à ce qu’ils étaient dans le passé, mais en tout cas, lui, il l’est !

Pour notre part, nous ne confondons pas les terroristes, contre lesquels nous luttons avec détermination, avec l’ensemble des Français de confession musulmane, qui sont au nombre de 5 millions en France. Beaucoup d’entre eux aujourd’hui souffrent sans doute de voir que quelqu’un se réclamant de la religion musulmane ait pu commettre un tel acte.

Au regard de son comportement, de musulman, il n’a que le nom, tant son histoire est caractérisée par les délits, le crime. Il n’est donc pas une référence.

Nous préférons celles et ceux, comme le lieutenant-colonel Beltrame, dont vous devriez étudier le parcours d’un peu plus près, qui se réclament d’un humanisme et d’une certaine conception du christianisme altruistes, tournés vers l’autre. Ceux-là n’accablent pas sans cesse les autres, comme vous le faites aujourd’hui, afin de diviser les Français.

Le grand piège qui nous est tendu aujourd’hui, c’est effectivement celui de la division. Ce que veulent, non pas de petits délinquants comme celui-ci, mais les idéologues de Daech, c’est monter les Français les uns contre les autres. Cela, nous ne l’accepterons jamais ! (Vifs applaudissements.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu le jeudi 5 avril, à quinze heures ; elles seront retransmises sur Public Sénat et sur le site internet du Sénat, ainsi que sur Facebook.

5

Modification des horaires de la séance du mercredi 28 mars 2018

M. le président. Mes chers collègues, afin de permettre à ceux d’entre nous qui le souhaiteraient de se rendre au rassemblement en hommage à Mireille Knoll organisé demain, je propose que nous suspendions nos travaux à l’issue du second débat de l’après-midi et que nous les reprenions à vingt et une heures trente, pour l’examen de la proposition de loi relative à l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs.

Il n’y a pas d’observation ?…

Il est en ainsi décidé.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-cinq, est reprise à dix-huit heures quinze, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.)

PRÉSIDENCE DE M. Thani Mohamed Soilihi

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

6

Modification de l’ordre du jour

M. le président. Par lettre en date du 26 mars 2018, le Premier ministre a indiqué au président du Sénat que le Gouvernement, en application de l’article 50-1 de la Constitution, ferait une déclaration, suivie d’un débat, portant sur le projet de programme de stabilité pour 2018-2022 mercredi 18 avril 2018, le soir.

En conséquence, nous pourrons prévoir, à l’issue de ce débat, une suite éventuelle de l’examen de la proposition de loi portant transposition de la directive du Parlement européen et du Conseil sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites.

Acte est donné de cette modification

7

Décès d’un ancien sénateur

M. le président. J’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Hamadou Barkat-Gourat, qui fut sénateur des Affars et des Issas de 1965 à 1980.

8

Article 1er et annexe (interruption de la discussion)
Dossier législatif : proposition de loi d'orientation et de programmation pour une meilleure protection des mineurs victimes d'infractions sexuelles
Article 2

Protection des mineurs victimes d’infractions sexuelles

Suite de la discussion et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

M. le président. Nous reprenons la discussion de la proposition de loi d’orientation et de programmation pour une meilleure protection des mineurs victimes d’infractions sexuelles, présentée par M. Philippe Bas et plusieurs de ses collègues.

Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus à l’article 2.

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi d'orientation et de programmation pour une meilleure protection des mineurs victimes d'infractions sexuelles
Article additionnel après l'article 2 - Amendement n° 10 rectifié quinquies

Article 2

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa de l’article 7 est complété par une phrase ainsi rédigée : « L’action publique des crimes mentionnés aux articles 222-23 à 222-26 du code pénal, lorsqu’ils sont commis sur des mineurs, se prescrit par trente années révolues à compter de la majorité de ces derniers. » ;

2° Aux deuxième et troisième alinéas de l’article 8, la référence : « 222-29-1 » est remplacée par les références : « 222-27 à 222-30 ».

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 5 rectifié septies, présenté par MM. Houpert, Kern et Joyandet, Mme Berthet, M. Paccaud, Mmes Puissat, de Cidrac, Lassarade et Gruny, M. Charon, Mme F. Gerbaud, M. Laménie, Mmes Delmont-Koropoulis et Bories, M. H. Leroy, Mme Loisier, M. Chatillon, Mme Deromedi, M. Le Gleut, Mmes Lopez et Garriaud-Maylam, M. Lefèvre, Mmes Goy-Chavent et Férat et MM. Rapin, Babary et Leleux, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Après les mots :

code pénal

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

dès lors qu’ils ont été commis sur un mineur, est imprescriptible.

II. – Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

2° Les deuxième et troisième alinéas de l’article 8 sont supprimés.

La parole est à M. Alain Houpert.

M. Alain Houpert. Mettons les bons mots sur les maux : les crimes sur mineurs sont des crimes majeurs, dont les êtres en devenir que sont les victimes ne se remettent jamais. Le maître-mot de la proposition de loi est « imprescriptibilité ». L’imprescriptibilité n’est pas définitive, mais aujourd’hui, nous ne parlons pas de la peine.

L’amendement que j’ai l’honneur de présenter vise à rendre imprescriptibles les crimes sexuels dès lors qu’ils sont commis sur des mineurs. La violence sexuelle est la forme de violence la plus destructrice qu’un être humain puisse subir. Les sciences cognitives l’auguraient déjà, les nouvelles découvertes des neurosciences le prouvent : ces violences causent des dégâts irréversibles sur le cerveau, en particulier sur le système limbique. De nombreuses pathologies sont la conséquence de violences sexuelles vécues dans l’enfance et non traitées : le diabète, l’hypertension, certains cancers, des pathologies gynécologiques. Plus l’enfant est jeune, plus les conséquences sont dramatiques.

Les crimes sexuels sur mineurs ne peuvent être traités comme les autres crimes.

L’obstacle le plus fort à la libération de la parole, c’est l’amnésie traumatique, du fait des atteintes du cerveau, en particulier du système limbique et de l’hippocampe, sièges de la mémoire. En effet, le corps, pour se préserver, fait switcher le cerveau et provoque une amnésie, comme une ardoise magique. Cette amnésie peut durer des décennies et cause, lors du retour à la conscience, un véritable cataclysme psychologique et physique.

La récente réforme de la prescription pénale de février 2017 ne prend pas en compte ces aspects spécifiques des crimes sexuels sur mineurs.

Cet amendement a pour objet de rendre ces crimes imprescriptibles, d’une part, pour que les victimes ne puissent plus être déclarées hors délais, ce qui les empêche aujourd’hui de demander justice à tout moment de leur vie, d’autre part, pour que leurs auteurs sachent qu’ils ne sont pas à l’abri d’une sanction, même tardive.

J’évoquerai maintenant les coupables. Rendre imprescriptibles les crimes sexuels sur mineurs, …

M. le président. Le temps qui vous est imparti est écoulé, mon cher collègue.

M. Alain Houpert. … c’est permettre aux auteurs d’avoir accès à des soins.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 4 est présenté par Mme Meunier et M. Jeansannetas.

L’amendement n° 9 rectifié quinquies est présenté par MM. Buffet, Allizard et Babary, Mme Berthet, M. Bizet, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Brisson, Chaize, Chatillon, Dallier et Daubresse, Mmes de Cidrac, Deroche, Deromedi, Di Folco et Dumas, M. Duplomb, Mmes Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. Forissier, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, MM. Houpert et Laménie, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. D. Laurent, Lefèvre, Milon et Piednoir, Mme Puissat, MM. Rapin et Savin, Mmes Thomas et Troendlé et MM. Vial et Wattebled.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

se prescrit par trente années révolues à compter de la majorité de ces derniers

par les mots :

est imprescriptible

La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 4.

Mme Michelle Meunier. Cet amendement a pour objet de rendre imprescriptibles les crimes mentionnés aux articles 222-23 à 222-26 du code pénal lorsqu’ils sont commis sur des mineurs. En raison de l’ampleur des violences sexuelles, il est essentiel de mettre en place une réponse pénale appropriée, à savoir l’imprescriptibilité de ces crimes.

Notre ancienne collègue Muguette Dini avait évoqué des estimations du Conseil de l’Europe selon lesquelles un enfant sur cinq serait confronté à la violence sexuelle sous toutes ses formes – viol, agression sexuelle, pornographie, sollicitation par le biais d’internet, prostitution, corruption, etc. En extrapolant cette donnée à l’échelle de la France, cela représente 2,5 millions d’enfants, soit une belle part de notre humanité.

M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, pour présenter l’amendement n° 9 rectifié quinquies.