M. le président. L’amendement n° 223, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a déjà été défendu et la commission a émis un avis défavorable.

Je le mets aux voix.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 369, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

A. – Alinéa 1

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

I. – L’article L. 234-1 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Aux première et troisième phrases du deuxième alinéa et à la première phrase de l’avant-dernier alinéa, les mots : « de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires économiques » :

2° À la dernière phrase du deuxième alinéa et à la seconde phrase de l’avant-dernier alinéa, le mot : « second » est remplacé par le mot : « deuxième ».

B. – Après l’alinéa 13

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Au dernier alinéa de l’article L. 640-5, les mots : « de grande instance » sont supprimés ;

C. – Alinéa 33

Remplacer la première occurrence des mots :

à la première phrase

par les mots :

aux première et seconde phrases

D. – Alinéa 59

Remplacer la référence :

L. 2325-55

par la référence :

L. 2315-74

La parole est à M. le corapporteur.

M. François-Noël Buffet, corapporteur. C’est un amendement de coordination, que je vous demande de voter avec enthousiasme ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 369.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 19 ter, modifié.

(Larticle 19 ter est adopté.)

Article 19 ter (nouveau)
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Article additionnel avant l'article 20 - Amendement n° 52 rectifié ter

Article 19 quater (nouveau)

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° À l’article L. 145-56, les mots : « de compétence et » sont supprimés ;

2° Après l’article L. 622-14, il est inséré un article L. 622-14-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 622-14-1. – Le tribunal statue sur toute contestation relative au bail des immeubles donnés à bail au débiteur. » ;

3° Après l’article L. 721-3-1, il est inséré un article L. 721-3-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 721-3-2. – Les tribunaux de commerce connaissent des contestations relatives aux baux commerciaux, aux baux professionnels et aux conventions d’occupation précaire conclus entre les personnes mentionnées à l’article L. 721-3. »

M. le président. L’amendement n° 224, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a déjà été défendu et la commission a émis un avis défavorable.

Je le mets aux voix.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 19 quater.

(Larticle 19 quater est adopté.)

TITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES AUX JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES

Chapitre Ier

Alléger la charge des juridictions administratives

Article 19 quater (nouveau)
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Article 20

Article additionnel avant l’article 20

M. le président. L’amendement n° 52 rectifié ter, présenté par Mme M. Jourda, MM. Allizard, Bascher et Bazin, Mmes Berthet et A.M. Bertrand, MM. Bizet, Bonhomme et Bonne, Mme Bories, M. Bouchet, Mme Boulay-Espéronnier, MM. J.M. Boyer et Brisson, Mme Bruguière, MM. Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon et Chatillon, Mme Chauvin, MM. Chevrollier, Courtial, Cuypers, Dallier et Danesi, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mme Delmont-Koropoulis, M. Dériot, Mmes Deroche, Deromedi, Deseyne, Di Folco, Dumas et Duranton, M. Émorine, Mmes Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. B. Fournier et Frassa, Mme F. Gerbaud, M. Gilles, Mme Giudicelli, M. Gremillet, Mme Gruny, MM. Guené, Houpert, Hugonet, Huré et Husson, Mme Imbert, MM. Joyandet, Karoutchi, Kennel et Laménie, Mmes Lamure, Lanfranchi Dorgal et Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge et H. Leroy, Mme Lherbier, M. Magras, Mme Malet, M. Mandelli, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Milon, de Montgolfier, Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pemezec, Perrin, Piednoir, Pierre, Pillet, Pointereau et Poniatowski, Mme Primas, M. Priou, Mmes Procaccia et Raimond-Pavero, MM. Rapin, Retailleau, Revet, Savary, Savin, Segouin, Sido et Sol, Mmes Thomas et Troendlé et MM. Vogel, Vaspart, Laufoaulu, Le Gleut et Paccaud, est ainsi libellé :

Avant l’article 20

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant l’article 54 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions juridiques et judiciaires, il est inséré un article 54 … ainsi rédigé :

« Art. 54 … – La consultation juridique consiste en une prestation intellectuelle personnalisée tendant à fournir un avis ou un conseil sur une question de droit en vue d’une éventuelle prise de décision. »

La parole est à Mme Muriel Jourda.

Mme Muriel Jourda. Les signataires de cet amendement entendent donner une définition de la consultation juridique, notion très utilisée y compris dans le présent texte, mais qui, pourtant, n’est pas définie sur le plan légal.

Nous avons fait preuve d’assez peu de hardiesse puisque nous avons repris peu ou prou la définition qu’en donne la Cour de cassation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. Le Sénat a, à plusieurs reprises, rejeté des amendements tendant à donner une définition de la consultation juridique. C’est ce qu’a fait, encore récemment, la commission des lois lorsqu’elle a eu à se prononcer sur la première version de cet amendement. C’est pourquoi Muriel Jourda l’a rectifié, afin que sa rédaction soit plus conforme aux souhaits de la commission et de manière à mieux encadrer la définition de ce qu’on qualifie de consultation juridique, en reprenant principalement d’ailleurs la jurisprudence de la Cour de cassation.

Au final, après ces rectifications, la commission émet un avis de sagesse.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Madame la sénatrice, l’avis du Gouvernement sur votre amendement est défavorable.

Comme vient de le dire M. le rapporteur, et comme vous l’avez dit vous-même, vous proposez une définition de la consultation juridique qui est assez proche de celle qu’en a donnée la Cour de cassation.

L’actuel article 54 de la loi du 31 décembre 1971 fixe le cadre général d’exercice des activités de consultation en matière juridique et de rédaction d’actes sous seing privé, dans un objectif de protection du justiciable. Ainsi, certaines professions du droit ont la qualité pour délivrer des consultations juridiques, ce qui est le cas des membres des professions judiciaires et juridiques réglementées, notamment les avocats, les notaires ou encore les huissiers de justice.

D’autres professions réglementées, par exemple les experts-comptables, peuvent également délivrer des consultations juridiques, mais uniquement dans les strictes limites qui sont autorisées par la réglementation et dans les domaines qui relèvent de leur activité principale.

Pour d’autres personnes ou organismes, telles les associations, par exemple, la délivrance de consultations juridiques est au contraire subordonnée à un agrément qui permet la pratique du droit à titre accessoire, qui est accordé par un arrêté et qui fixe, le cas échéant, des conditions de qualification ou d’expérience juridique.

Ce dispositif, qui est protecteur et qui est parfaitement délimité, est encore renforcé par l’article 66-2 de de la loi de 1971, qui sanctionne pénalement la pratique d’une activité juridique qui n’est pas autorisée.

Il n’existe pas aujourd’hui de définition légale de la consultation juridique, mais en réalité il y a une définition stabilisée qui résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation.

Il nous semble que l’introduction dans la loi, comme vous le proposez, d’une définition de la consultation juridique qui reprendrait les critères dégagés par la Cour de cassation et les précisions qu’elle a pu apporter au fil de sa jurisprudence ne modifierait pas le sens de cette jurisprudence et, dès lors, elle nous apparaîtrait assez inutile. L’introduction de cette définition pourrait même s’avérer contre-productive dans la mesure où, face à des technologies toujours plus innovantes et diverses, il est nécessaire que la Cour de cassation puisse disposer d’un peu de souplesse dans la mise en œuvre de cette définition.

Par ailleurs, le dernier alinéa de l’amendement, tel que vous l’aviez rédigé, semblait réserver aux seules professions réglementées du droit l’exploitation d’un traitement numérique aux fins de délivrance d’une consultation juridique ou de rédaction d’un acte sous seing privé. Or les personnes qui sont habilitées à exercer ces activités au titre de la loi de 1971, comme je vous l’ai rappelé récemment, vont bien au-delà des seules professions juridiques et judiciaires.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 52 rectifié ter.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l’article 20.

Article additionnel avant l'article 20 - Amendement n° 52 rectifié ter
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Article 21

Article 20

Au IV de l’article 5 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, les mots : « pour une durée de quatre ans à compter de la promulgation de la présente loi » sont remplacés par les mots : « au plus tard jusqu’au 31 décembre 2021 ». – (Adopté.)

Article 20
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Article 22

Article 21

Le code de justice administrative est ainsi modifié :

1° L’article L. 222-2-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 222-2-1. – Le président du tribunal administratif peut désigner des magistrats administratifs honoraires choisis parmi les magistrats inscrits, pour une durée de trois ans renouvelable, sur une liste arrêtée par le vice-président du Conseil d’État, pour exercer les fonctions de rapporteur en formation collégiale dans la limite d’un magistrat honoraire par formation de jugement.

« Les magistrats honoraires peuvent également statuer :

« 1° Sur les recours relevant de la compétence du juge statuant seul ;

« 2° Sur les référés présentés sur le fondement du livre V du présent code ;

« 3° Sur les recours en annulation dont le tribunal est saisi en application des III et IV de l’article L. 512-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. » ;

2° La section 2 du chapitre II du titre II du livre II est complétée par deux articles L. 222-2-2 et L. 222-2-3 ainsi rédigés :

« Art. L. 222-2-2. – Les magistrats honoraires mentionnés à l’article L. 222-2-1 sont soumis aux dispositions des articles L. 231-1 à L. 231-9. Pour l’application de l’article L. 231-4-1, ils remettent leur déclaration d’intérêts aux présidents des juridictions où ils exercent leurs fonctions. Ils ne peuvent ni être membres du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, ni participer à la désignation des membres de cette instance.

« Les magistrats honoraires peuvent exercer une activité professionnelle concomitamment à leurs fonctions juridictionnelles, sous réserve qu’elle ne soit pas de nature à porter atteinte à la dignité ou à l’indépendance des fonctions. Toutefois, ils ne peuvent exercer aucune activité d’agent public, à l’exception de celles de professeur des universités ou de maître de conférences.

« Dans le ressort de la juridiction où ils sont désignés, les magistrats honoraires ne peuvent ni exercer une profession libérale juridique et judiciaire soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, ni être salariés d’un membre d’une telle profession, ni effectuer aucun acte d’une telle profession.

« Les magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles ne peuvent mentionner cette qualité ni en faire état dans les documents relatifs à l’exercice de leur activité professionnelle, tant pendant la durée de l’exercice de leurs fonctions qu’à l’issue de celles-ci.

« Le pouvoir disciplinaire à l’égard des magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles est mis en œuvre dans les conditions définies au chapitre VI du titre III du présent livre. Outre le blâme et l’avertissement prévus à l’article L. 236-1, peut seule être prononcée, à titre de sanction disciplinaire, la cessation des fonctions.

« Les magistrats honoraires ne peuvent exercer de fonctions juridictionnelles au-delà de l’âge de soixante-quinze ans. Il ne peut être mis fin à leurs fonctions qu’à leur demande ou pour un motif disciplinaire.

« Les activités accomplies en application du présent article sont indemnisées dans les conditions prévues par décret.

« Art. L. 222-2-3. – Sur leur demande, le président du tribunal administratif peut désigner des magistrats honoraires inscrits sur la liste prévue à l’article L. 222-2-1 pour exercer des fonctions d’aide à la décision au profit des magistrats. L’exercice de ces fonctions est incompatible avec celui des activités juridictionnelles prévues au même article L. 222-2-1.

« Les magistrats honoraires exerçant les fonctions mentionnées au premier alinéa du présent article ne peuvent ni exercer de profession libérale juridique ou judiciaire soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, ni être salariés d’un membre d’une telle profession, ni effectuer aucun acte de leur profession dans le ressort de la juridiction à laquelle ils sont affectés.

« Les magistrats honoraires exerçant les fonctions mentionnées au même premier alinéa sont tenus au secret professionnel. Ils ne peuvent exercer ces fonctions au-delà de l’âge de soixante-quinze ans.

« Les activités accomplies en application du présent article sont indemnisées dans les conditions prévues par décret. » ;

3° La section 3 du chapitre II du titre II du livre II est complétée par un article L. 222-5 ainsi rétabli et un article L. 222-6 ainsi rédigé :

« Art. L. 222-5. – Le président de la cour administrative d’appel peut désigner des magistrats honoraires inscrits sur la liste prévue à l’article L. 222-2-1 pour exercer les fonctions de rapporteur en formation collégiale ou pour statuer sur les référés présentés sur le fondement du livre V.

« L’article L. 222-2-2 est applicable.

« Art. L. 222-6. – Le président de la cour administrative d’appel peut désigner des magistrats honoraires inscrits sur la liste prévue à l’article L. 222-2-1 pour exercer des fonctions d’aide à la décision au profit des magistrats.

« L’article L. 222-2-3 est applicable. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 23 est présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 285 rectifié est présenté par Mme Costes, MM. Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Collin, Gabouty, Guérini et Guillaume, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier, Roux, Vall et Dantec.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour présenter l’amendement n° 23.

Mme Michelle Gréaume. L’article 21 étend le champ d’application du recours aux magistrats honoraires dans les juridictions administratives.

Il est clair que le recours aux magistrats honoraires pour venir en appui de juridictions en sous-effectif ou qui se trouvent en tension en matière de traitement des requêtes n’est pas une mauvaise chose en soi, à condition d’en user de manière ponctuelle.

Bien entendu, ce dispositif ne saurait effectivement pas remplacer le recrutement nécessaire de magistrats supplémentaires, l’apport de magistrats expérimentés poursuivant une activité juridictionnelle dans le cadre de l’honorariat ne pouvant être que subsidiaire.

Il est évident que permettre aux chefs de juridiction de confier à un magistrat honoraire des fonctions d’aide à la décision apparaît comme une possibilité symboliquement désastreuse pour des magistrats par nature très expérimentés, qui se retrouveraient ainsi, dans le cadre de l’honorariat, dans une situation d’infériorité par rapport à leurs collègues en activité.

Une telle possibilité ne pourrait d’ailleurs que dissuader d’éventuels volontaires.

Je ne m’aventurerai pas non plus dans le détail des dispositions de cet article, mais je relève qu’une fois encore l’objectif du Gouvernement est clair : à entendre les professionnels de la justice administrative, si ce genre de mesure est prise, cela n’est ni dans le but d’améliorer les conditions de travail des magistrats ni dans celui d’améliorer la qualité de traitement des requêtes d’administrés, mais bien dans le but de faire des économies sur le dos des uns et des autres.

C’est pourquoi, une fois encore, nous nous opposons à cette logique purement comptable dans laquelle le service public de la justice ne saurait rester cantonné.

M. le président. La parole est à Mme Josiane Costes, pour présenter l’amendement n° 285 rectifié.

Mme Josiane Costes. L’article 21 tend à allonger la durée effective de service des magistrats honoraires dans les juridictions administratives. Cette disposition risque de produire des tensions au sein des chambres : le positionnement de ces magistrats très expérimentés comme soutien à des magistrats plus jeunes peut s’avérer délicat en pratique, ces magistrats devenant en quelque sorte des vacataires.

Pourquoi ne pas rallonger quelque peu leur carrière de manière transitoire, sachant que cela ne sera plus nécessaire lorsque les recrutements suffisants auront porté leurs fruits ?

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. La commission émet un avis défavorable.

L’article 40 de la loi du 8 août 2016 prévoit déjà cette possibilité pour l’ordre judiciaire. Aussi, il a paru cohérent à la commission que l’ordre administratif puisse bénéficier également de cette possibilité, qui permet ainsi aux juridictions d’avoir des renforts ponctuels de gens compétents qui peuvent aider à faire face à un surcroît de dossiers, selon le contentieux.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. L’avis est également défavorable.

En effet, mesdames les sénatrices, vos amendements visent à supprimer l’article 21 du projet de loi, qui, pourtant, a pour objet de définir des règles juridiques permettant de mieux encadrer les fonctions de magistrat honoraire.

Il prévoit ainsi d’élargir le recours aux magistrats honoraires à la fois pour qu’ils puissent intégrer les formations collégiales, ou bien en tant que juges uniques, ou bien pour qu’ils puissent exercer des fonctions d’aide à la décision.

Ces magistrats honoraires sont extrêmement précieux, tant pour les juridictions judiciaires que pour les juridictions administratives. Je dois également préciser que ces magistrats honoraires sont très demandeurs de pouvoir intégrer ce type de fonction, et leur expérience nous est extrêmement utile.

L’extension du recours aux magistrats honoraires apparaît comme une solution parmi d’autres qui permet d’accélérer le traitement des requêtes aussi bien par les tribunaux administratifs – objet de l’article 21 – que par les cours administratives d’appel.

Ce recours accru aux magistrats honoraires implique bien sûr de clarifier et de renforcer les règles déontologiques et disciplinaires qui s’appliquent spécifiquement à cette catégorie de magistrats ; c’est ce que nous vous proposons de faire.

Leur appui est vraiment essentiel, surtout par leur expérience. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons promouvoir ce recours aux magistrats honoraires.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 23 et 285 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 257, présenté par MM. Richard, Mohamed Soilihi, de Belenet, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Compléter cet article par quatre alinéas ainsi rédigés :

…° L’article L. 231-5 est ainsi modifié :

a) Au 2°, les mots : « ou de directeur régional ou départemental d’une administration publique de l’État » sont supprimés ;

b) Au quatrième alinéa, les mots : « direction dans l’administration » sont remplacés par les mots : « directeur général des services » ;

c) Au quatrième alinéa, après le mot : « territoriale », sont insérés les mots : « de plus de 100 000 habitants ».

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

M. Thani Mohamed Soilihi. Le code de justice administrative interdit la nomination au sein d’une juridiction administrative d’un conseiller qui aurait préalablement occupé certaines fonctions depuis moins de trois ans dans le ressort de celle-ci. Ce régime apparaît trop sévère et crée des contraintes excessives à la mobilité des magistrats.

Un tel constat appelle à trouver un nouveau point d’équilibre entre la volonté de prévenir les conflits d’intérêts et le souhait de voir les magistrats enrichir leur connaissance de l’administration.

L’amendement envisagé ne touche pas aux incompatibilités électives ; il tend juste à supprimer certaines fonctions prohibées et à limiter aux collectivités territoriales de plus de 100 000 habitants celles pour lesquelles les fonctions de direction générale des services entraînent l’interdiction de nomination au sein des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. Nos collègues Alain Richard et Thani Mohamed Soilihi, avec les autres cosignataires, ont déposé là un amendement important, qui pose sincèrement problème à la commission des lois, moins sans doute sur le fond que sur la forme.

En effet, il vise à supprimer certaines incompatibilités de fonctions actuellement prévues par le code de justice administrative. Si l’amendement devait être voté et prospérer tout au long de la procédure, serait ainsi possible la nomination dans une juridiction d’un magistrat qui aurait occupé depuis moins de trois ans, dans le ressort de cette juridiction, la fonction de directeur régional ou départemental d’une administration publique de l’État, des fonctions de direction dans l’administration d’une collectivité territoriale et des fonctions de directeur général des services d’une collectivité territoriale de moins de 100 000 habitants.

On comprend évidemment la logique : il s’agit d’introduire de la souplesse, de permettre de la mobilité, peut-être même, sur certains points, de l’efficacité. Cela dit, à ce jour, une telle évolution, qui ne va pas de soi, n’a pas été évaluée. Vous comprenez bien qu’être « projeté » magistrat dans une juridiction administrative ayant dans son ressort le siège d’une collectivité locale dans laquelle on a occupé des fonctions importantes et avoir donc à connaître de possibles contentieux concernant celle-ci, cela peut poser quand même quelques questionnements.

C’est la raison pour laquelle la commission, en l’état, faute d’évaluation, a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Contrairement à la commission, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.

Pourquoi ? Parce que cet amendement introduit pour les conseillers des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel de la souplesse en leur permettant le passage en administration déconcentrée ou dans les collectivités territoriales, puis le retour en juridiction.

Je rappelle à M. le rapporteur qu’il existe de manière traditionnelle dans les juridictions administratives une pratique : celle du déport. Ainsi, un magistrat administratif qui aurait à connaître d’un dossier dont il aurait lui-même eu à connaître auparavant dans des fonctions administratives se déporterait nécessairement. Cette pratique est couramment utilisée dans les juridictions administratives et même au Conseil constitutionnel.

Monsieur le président, si vous me le permettez, j’en profite pour saluer cordialement, au nom du Gouvernement, les jeunes élus présents en ce moment dans les tribunes.

M. le président. Je les salue également au nom du Sénat. (Mmes et MM. les sénateurs se tournent vers les tribunes et applaudissent.)

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour explication de vote.

M. Thani Mohamed Soilihi. J’ai bien entendu les explications de M. le rapporteur et je les comprends. Sans minimiser leur portée, j’ai presque envie de dire que ce ne serait pas la première fois que nous voterions une disposition souffrant d’une insuffisance d’évaluation.

Aussi, nous pourrions aujourd’hui voter cet amendement et approfondir la réflexion au cours de la navette parlementaire pour en améliorer la rédaction.

Mes chers collègues, je vous invite donc à le voter.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 257.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 256, présenté par MM. Mohamed Soilihi, de Belenet, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Compléter cet article par des II, III et IV ainsi rédigés :

II. – L’article L. 732-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les présidents de formation de jugement nommés sur le fondement du 1° du présent article ne peuvent exercer leurs fonctions au-delà de l’âge de soixante-quinze ans. »

III. – L’ordonnance n° 2016-1365 du 13 octobre 2016 portant dispositions statutaires concernant le Conseil d’État est ratifiée.

IV. – L’ordonnance n° 2016-1366 du 13 octobre 2016 portant dispositions statutaires concernant les magistrats des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel est ratifiée.

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

M. Thani Mohamed Soilihi. L’article 21 prévoit notamment que les magistrats honoraires exerçant dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel ne peuvent exercer leurs fonctions au-delà de l’âge de soixante-quinze ans.

En vertu d’un certain parallélisme des formes, il apparaît opportun d’appliquer cette règle également pour les membres honoraires du Conseil d’État et les magistrats honoraires des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes, et de l’ordre judiciaire.

Par ailleurs, à travers cet amendement, nous proposons de ratifier l’ordonnance du 13 octobre 2016 portant dispositions statutaires concernant le Conseil d’État, ainsi que l’ordonnance du 13 octobre 2016 portant dispositions statutaires concernant les magistrats des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel.