M. Jean-Yves Leconte, rapporteur pour avis. … et pour notre manière d’appréhender la question de la protection des données. Il est important que la CNIL dispose des moyens pour cela.

Enfin, je voudrais dire, comme dernière remarque, que la CADA et le Défenseur des droits sont indispensables dans la période actuelle, compte tenu de leur rôle dans la lutte contre les discriminations et en faveur de la transparence de l’État.

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue !

M. Jean-Yves Leconte, rapporteur pour avis. En conclusion, la commission des lois a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission et du budget annexe, tout en déplorant que le Gouvernement ait déposé un amendement pour baisser les crédits de la mission de 6 millions d’euros. Nous souhaitons le rétablissement complet des moyens destinés à l’ANSSI et au GIC et nous le proposerons par la voie d’un amendement. (M. Loïc Hervé applaudit.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jean-Claude Requier. (M. Olivier Léonhardt applaudit.)

M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à la veille d’une réforme constitutionnelle d’importance, les évolutions des crédits des missions « Pouvoirs publics », « Conseil et contrôle de l’État » et « Direction de l’action du Gouvernement » sont suspendues au résultat de nos futurs débats parlementaires.

Dans le budget de l’État, il faut souligner l’extrême stabilité de la mission « Pouvoirs publics », qui rassemble les piliers de notre démocratie.

Les évolutions institutionnelles de la Ve République se sont faites sans à-coups budgétaires, que l’on pense au rééquilibrage de l’initiative législative dans un sens plus respectueux des parlementaires, en particulier des groupes minoritaires et d’opposition, ou au renforcement de l’action du Gouvernement. En réalité, cette démultiplication s’est faite sans une adaptation conséquente des moyens de fonctionnement de nos assemblées.

Ce constat n’est d’ailleurs pas démenti par le projet de réforme constitutionnelle du Gouvernement, qui prévoit, afin d’améliorer les conditions d’exercice des mandats nationaux à budget constant, d’en réduire tout simplement le nombre. Nous sommes appelés à reparler de cette question…

Une autre voie est possible, plus respectueuse du besoin de proximité qui s’exprime violemment dans les rues, en renforçant ce que l’on pourrait appeler les fonctions « support » externes au travail parlementaire. Il s’agirait pour cela de poursuivre le mouvement de coopération des administrations et des institutions centrales avec le Parlement, comme le spécifie l’article 47–2 de la Constitution concernant la Cour des comptes.

De la même manière, on peut s’interroger sur les moyens de fonctionnement dévolus au Conseil constitutionnel qui, depuis l’introduction du mécanisme de la question prioritaire de constitutionnalité, remplit une fonction supplémentaire au service du citoyen.

M. Pierre-Yves Collombat. Au service des avocats plutôt !

M. Jean-Claude Requier. L’importance de ses décisions justifierait que les moyens de la Cour de justice de la République, appelée à disparaître, lui reviennent, tout comme ceux du Haut Conseil des finances publiques, dont l’utilité est régulièrement contestée dans les deux chambres.

En matière de « Conseil et contrôle de l’État », je laisserai volontairement de côté la question de la réforme du Conseil économique, social et environnemental, alors que l’actualité éclaire son incapacité à incarner les corps intermédiaires de la société française malgré les réformes intervenues depuis sa création pour lui permettre d’incarner sa vocation.

En revanche, un examen des contentieux de masse traités par les juridictions administratives devrait nous conduire, il me semble, à interroger la place de ce programme au sein de la mission « Conseil et contrôle de l’État », plutôt qu’au sein de la mission « Justice ». Il en va de même pour le programme « Cour des comptes et autres juridictions financières ».

À l’heure de la redéfinition de la carte judiciaire, ne serait-il pas plus pertinent, dans une logique de maintien de la proximité, de rapprocher budgétairement les moyens de tous les ordres de juridictions, afin de favoriser une approche cohérente du quadrillage du territoire pour le justiciable ? Le bon sens se heurte ici au dualisme juridictionnel.

Certains constats de nos rapporteurs sur la commission d’accès aux documents administratifs et sur le Défenseur des droits mettent également en lumière l’ambivalence de l’outil numérique, qui rationalise une part des activités des administrations, tout comme elle accroît les saisines. C’est le signe d’une appropriation de ces instances par les citoyens.

Justement, parmi l’ensemble des services compris dans la mission « Direction de l’action du Gouvernement », j’insisterai sur l’important effort budgétaire réalisé par la direction de l’information légale et administrative, la DILA, qui en 2018 a versé ses excédents au budget de l’État plutôt que de les réemployer.

Nous considérons que la DILA doit continuer de fournir un service adapté au public visé, et notamment à diffuser une version papier des bulletins électoraux, comme nous l’avons évoqué lors de l’examen de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».

Enfin, la DILA doit poursuivre sereinement sa deuxième mission, qui est d’informer et d’« éclairer le citoyen » – sa devise depuis sa création par le résistant Jean-Louis Crémieux-Brilhac au sortir de la guerre. D’importantes restructurations internes sont en cours. Pourtant, les publications du site service-public.fr et de La Documentation française, qui ont accompagné des générations de professeurs, dont la mienne, devraient constituer la première réponse aux tentatives d’instrumentalisation par de « fausses nouvelles ».

Le Gouvernement devrait s’assurer que cette direction demeure ce puissant relais des idées et de la pensée, en renforçant sa contribution à l’animation du débat public.

En conclusion, le groupe du RDSE votera les crédits de ces missions et de ce budget annexe. (Mme Maryse Carrère, ainsi que MM. Olivier Léonhardt et Jean-Pierre Corbisez applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à M. Emmanuel Capus.

M. Emmanuel Capus. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui les crédits dédiés aux missions « Pouvoirs publics », « Conseil et contrôle de l’État » et « Direction de l’action du Gouvernement ». Ces missions, qui touchent au cœur du fonctionnement des institutions républicaines, sont stratégiques à plus d’un titre.

J’évoquerai tout d’abord la mission « Pouvoirs publics ». Comme l’a indiqué Jean-Pierre Sueur, ses crédits diminuent de 0,04 % entre 2018 et 2019. Le budget des deux assemblées est stabilisé, comme c’est le cas depuis cinq ans : 518 millions d’euros pour l’Assemblée nationale et 323 millions d’euros pour le Sénat, soit plus de 80 % des crédits de la mission. Je note que le Sénat coûte beaucoup moins cher que l’Assemblée nationale…

M. Jean-Pierre Sueur. Nous sommes moins nombreux…

M. Emmanuel Capus. Nous saluons cet effort de participation du Parlement à la maîtrise de la dépense publique, qui ne se fait pas au prix d’une qualité de prestation dégradée dans la fabrique de la loi. Je crois que la qualité et le dévouement des fonctionnaires qui nous accompagnent, ici au Sénat, nous le démontrent au quotidien.

Nous estimons néanmoins que, pour l’avenir, la fin du cumul des mandats et la baisse annoncée du nombre de parlementaires ne devront pas mettre en péril les ressources qui nous sont nécessaires pour agir. Le Parlement ne pourra exercer l’ensemble de ses rôles constitutionnels avec rigueur et efficacité que si on lui conserve les moyens de ses attributions.

En ce qui concerne la mission « Conseil et contrôle de l’État », nous saluons le rôle fondamental du Haut Conseil des finances publiques, de la Cour des comptes et du Conseil d’État dans la définition, le contrôle et l’analyse des politiques publiques.

Nous nous interrogeons toutefois sur le décalage entre les ambitions affichées dans le projet de loi constitutionnelle pour la nouvelle Chambre de la société civile et la stabilité des crédits du programme 126.

Les crédits affectés à ces quatre programmes s’établissent à 680 millions d’euros en autorisations d’engagement et 765 millions d’euros en crédits de paiement. Cela représente une hausse d’environ 2 %.

Cette progression relativement modérée est en continuité avec les lois de finances des années précédentes, mais ne reflète pas à notre sens l’accroissement des missions dont les juridictions administratives, notamment, sont accablées. Le rapport public 2018 du Conseil d’État est à ce titre très instructif. La plus haute juridiction administrative a vu le nombre d’affaires portées devant elle augmenter de 5 % en 2018 par rapport à 2017.

La Cour nationale du droit d’asile a également connu ces dernières années une hausse structurelle de son activité, due à la croissance du contentieux des étrangers. Le Gouvernement a identifié ces points de tension et tente d’y répondre.

La crise des migrants et l’inscription de nombreuses dispositions de l’état d’urgence dans le droit commun nous semblent appeler un renforcement franc et massif de nos institutions juridictionnelles.

J’en viens à la mission « Direction de l’action du Gouvernement ». Dans le contexte politique et social troublé que nous connaissons, je voudrais évoquer un service qui contribue de manière importante, bien que méconnue, à la sécurité des Français.

Je veux parler du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, le SGDSN, qui comprend, entre autres structures, l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, le Centre de transmissions gouvernemental et le Groupement interministériel de contrôle.

La montée en puissance de ces services est réelle, nous la saluons. Néanmoins, ils demeurent en deçà de leurs homologues britanniques ou allemands, en termes tant d’effectifs que de moyens. Nous estimons que notre effort de sécurité et de défense passe également par le renforcement de ces agences, qui nous permettent de mieux combattre les nouveaux types de menaces, en premier lieu la menace cyber.

Sous réserve de ces quelques interrogations, portant surtout sur les crédits dédiés aux juridictions administratives et aux services de défense rattachés au Premier ministre, le groupe Les Indépendants votera les crédits de ces missions. (MM. Loïc Hervé et Philippe Mouiller applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me limiterai à quelques remarques.

S’agissant de la mission « Pouvoirs publics », la charge grandissante du Conseil constitutionnel renvoie en grande partie à l’augmentation des saisines directes au titre de l’article 61 de la Constitution et surtout à l’explosion des questions prioritaires de constitutionnalité, ces QPC qui, selon l’expression de Xavier Dupré de Boulois, sont devenues un « supermarché des droits fondamentaux » : « La configuration actuelle de la QPC, nous dit-il, a permis le développement d’une pratique des sociétés commerciales consistant à soulever des moyens tirés de la violation de droits et libertés constitutionnels, dont elles ne sont pas titulaires, pour obtenir du juge qu’il abroge une disposition législative qui nuit à leurs intérêts économiques. La catégorie des droits constitutionnels devient alors un vaste supermarché, où les opérateurs économiques puisent des ressources argumentatives au gré de leurs besoins. Quitte pour cela à détourner ces droits de leurs finalités initiales. »

Selon d’autres chercheurs, pas moins de 10 000 QPC auraient été déposées en cinq ans, essentiellement par des cabinets d’avocats d’affaires, et entre 60 et 80 d’entre elles finissent par être jugées par le Conseil constitutionnel.

Au palmarès de ces cabinets, en décembre 2016, la censure par le Conseil constitutionnel de l’article 137, anti-évasion fiscale, de la loi Sapin II, qui faisait obligation à certaines sociétés de rendre publics des indicateurs économiques et fiscaux correspondant à leur activité pays par pays.

En décembre 2017, le Conseil constitutionnel censure la « taxe Google », qui entendait obliger les entreprises qui réalisent des activités et des profits en France d’y payer des impôts. Abominable… Cette disposition, paraît-il, violait le principe d’égalité des citoyens devant l’impôt !

Dans la foulée, les « sages » censuraient un autre article de la loi de finances visant la fraude à la TVA, laquelle coûte à l’État entre 20 milliards et 30 milliards d’euros par an.

Ces recours s’accompagnent de pratiques connues sous le nom de « portes étroites » ou « contributions extérieures », elles sont souvent signées d’éminents constitutionnalistes ou de cabinets d’avocats d’affaires. Sur ce point, je suis en désaccord complet avec la position exprimée par Jean-Pierre Sueur : publier ces argumentaires serait un moyen d’équilibrer les forces entre les plaignants qui peuvent recourir à des cabinets d’avocats et à d’éminents universitaires et ceux qui n’ont pas cette possibilité.

Le problème, ici, n’est pas d’arbitrer entre des principes, mais de faire descendre sur terre le principe de l’égalité des citoyens devant la loi. Si la publication de ces « portes étroites » ne résoudra pas tout, elle représenterait un progrès dans la bonne direction.

S’agissant de la mission « Conseil et contrôle de l’État », je constate que les crédits de personnel destinés au Conseil d’État et à la Cour des comptes augmentent. Ces éminentes institutions chargées de surveiller la vertu financière des autres ne s’appliquent donc pas à elles-mêmes un régime identique…

Si le tiers des membres des corps du Conseil d’État et de la Cour des comptes, qui ne sont pas en poste dans leur institution, y étaient, les demandes en personnel seraient peut-être moins importantes…

S’agissant de la mission « Direction de l’action du Gouvernement », je ferai une première remarque concernant la coordination du travail du Gouvernement, qui est de la responsabilité du Secrétariat général du Gouvernement : il n’a pas publié le taux d’application des lois pour 2018. Il plaide le fait que « sa marge d’action n’est pas sans limites en ce domaine »…

Ma deuxième remarque concerne le devenir du programme 333, qui sera absorbé par le programme 307. Monsieur le ministre, plusieurs questions se posent à ce sujet.

Enfin, s’agissant de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, MILDECA, nous ne pouvons que regretter, une fois encore, la baisse des crédits qui lui sont alloués, crédits qui ont déjà baissé de 26 % depuis 2012.

Autre signe du peu d’entrain du Gouvernement en la matière, nous attendons depuis six mois la présentation du plan gouvernemental 2018-2022 de lutte contre les addictions. À croire que les conduites addictives, drogues licites et illicites comprises, avec les conséquences que l’on connaît, sont en régression… À moins qu’après l’intégration par l’INSEE du trafic de drogue dans le calcul du PIB ce ne soit une forme de soutien discret à la croissance économique. Nous vivons une époque formidable !

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi quau banc des commissions.)

Mme Sylvie Vermeillet. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui appelés à nous prononcer sur les crédits des missions « Pouvoirs publics », « Conseil et contrôle de l’État » et « Direction de l’action du Gouvernement » pour l’année 2019.

Les crédits de la mission « Pouvoirs publics » sont exactement au même niveau qu’en 2018. Les dotations de l’État poursuivent la trajectoire zéro augmentation en volume. Nous le saluons !

Voilà cinq ans que le budget des deux assemblées parlementaires est stabilisé : près de 518 millions d’euros pour l’Assemblée nationale et un peu plus de 323 millions pour le Sénat, soit près de 84 % des crédits budgétaires de la mission.

Néanmoins, nous n’oublions pas que l’équilibre de ce budget n’est rendu possible que par des prélèvements sur les réserves. Or une telle situation n’est ni souhaitable ni viable. Elle nous conduit à nous interroger sur la rationalisation des dépenses et la réorganisation effective des services. Tandis que les efforts demandés à nos concitoyens s’accentuent, nous devons montrer l’exemple à travers la bonne gestion des deniers publics de nos deux chambres parlementaires.

Ce sujet devrait, me semble-t-il, retenir davantage notre attention que celui, à maints égards démagogique, de la diminution du nombre de parlementaires, une mesure gadget et un chiffon agité sans effet sur la dépense publique, dès lors que le Gouvernement redéploierait les économies réalisées afin de renforcer la qualité et l’efficacité du travail parlementaire.

Un mot également sur la présidence de la République, qui fait l’objet du programme 501 : sa dotation est certes stabilisée à 103 millions d’euros, mais il faut rappeler qu’elle avait l’an dernier augmenté de 3 millions d’euros. Cette hausse de 3 %, due notamment à une progression des charges de personnels, avait alors succédé à trois exercices de reconduction à l’identique de la dotation. Pourquoi, alors que nous sommes en période de disette, le budget de l’Élysée n’a-t-il pas retrouvé son niveau de 2017 ?

Concernant désormais les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État », les membres du groupe Union Centriste accueillent favorablement l’augmentation des crédits en 2019. Celle-ci devrait opportunément permettre de réduire les délais de traitement des contentieux relatifs à la Cour nationale du droit d’asile, grâce à la création d’emplois et de chambres de jugement.

Je tiens cependant à attirer votre attention sur la faiblesse des dotations du Haut Conseil des finances publiques. Les crédits du programme 340 reculent en effet d’environ 8 % par rapport à l’an dernier. L’essentiel de ses moyens étant déjà issus de la Cour des comptes, pourquoi ne pas y rattacher son programme, comme cela a été suggéré, par le biais d’une nouvelle action ? Monsieur le ministre, la fonte des crédits du programme 340 dans le programme 164 est-elle seulement envisagée par le Gouvernement ? Un tel rattachement répondrait à l’impératif budgétaire de rationalisation, sans qu’il nous exonère de veiller à sauvegarder l’indépendance du Haut Conseil des finances publiques. Sa montée en puissance s’y prêterait, avec la possibilité qui lui est dévolue de rendre des avis plus détaillés quant à l’évolution des dépenses du budget de l’État.

Quant au budget du programme 126 relatif au Conseil économique, social et environnemental, le CESE, il ressort en légère hausse : 1 million d’euros supplémentaires par rapport à 2018. Sans nous en tenir à une lecture strictement comptable, nous aimerions, monsieur le ministre, connaître votre position sur la redéfinition des missions et la valorisation des travaux du CESE, ainsi que sur l’évolution budgétaire : 30,8 millions en 2006 ; 40,2 millions en 2019 ; s’agit-il d’un budget maîtrisé ?

J’en viens à la mission « Direction de l’action du Gouvernement ». La hausse de ses crédits tient essentiellement à l’augmentation des effectifs et, plus marginalement, au dynamisme de certaines dépenses de fonctionnement, en particulier des loyers et des charges immobilières des directions départementales interministérielles, les DDI. Nous aurions préféré, monsieur le ministre, que vous financiez ces priorités exclusivement par des économies budgétaires. Au vu du contexte actuel, il nous semble en effet indispensable que nos concitoyens puissent constater, sinon par eux-mêmes, du moins par l’intermédiaire de leurs représentants, députés ou sénateurs, que les services reliés au Premier ministre sont gérés dans la plus grande rigueur et la plus grande transparence possibles.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, éclairer la Haute Assemblée sur les raisons qui ont motivé le Gouvernement pour supprimer du périmètre de la mission les loyers budgétaires ? Ceux-ci représentaient, je le rappelle, 9 % des crédits dans la loi de finances pour 2018.

Sous réserve de ces quelques observations et interrogations, auxquelles nous aimerions que vous apportiez des réponses, les membres du groupe Union Centriste adopteront les crédits de ces trois missions. (Mme Michèle Vullien, ainsi que MM. Pierre Louault, Roger Karoutchi, Philippe Mouiller et Michel Forissier applaudissent.)

Mme la présidente. Monsieur le ministre, mes chers collègues, il est vingt heures passées. Je vous propose de poursuivre et de terminer l’examen de ce bloc de missions, en nous fixant comme objectif de ne pas dépasser vingt et une heures. (Mme Laurence Harribey applaudit.) Je vous invite donc à la concision et au respect du temps de parole.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Christine Lavarde. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme Christine Lavarde. Madame la présidente, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, si les pouvoirs publics sont soumis à un traitement budgétaire particulier, justifié par l’exigence d’autonomie financière liée à ces institutions, et déterminent eux-mêmes le montant des crédits dont ils ont besoin selon une procédure encadrée, la transparence, la baisse des dépenses publiques et l’exemplarité n’en sont pas moins indispensables dans une période où les efforts imposés à nos concitoyens sont considérables.

C’est dans cet esprit de sagesse que l’Assemblée nationale et le Sénat, en décidant de reconduire leurs demandes de crédits aux mêmes montants que ceux qui leur ont été affectés en 2018, portent à six années consécutives l’absence de hausse. En termes réels, il s’agit donc d’une baisse de 7 % entre 2012 et 2019. Compte tenu de la hausse tendancielle des charges, l’équilibre budgétaire a été atteint grâce à des efforts d’économies et à des prélèvements sur les fonds de roulement. Le Parlement témoigne ainsi de sa volonté de participer pleinement à l’effort de redressement des comptes publics. Je ne peux manquer de remarquer, avec malice, qu’en évitant de réunir le Congrès à Versailles pour ce qui s’apparente à un discours annuel de politique générale, il serait même possible de dégager 285 000 euros d’économies par an. (Mme Frédérique Puissat sourit.)

Il eût été heureux que l’Élysée adopte la même rigueur et la même sagesse. C’est à juste titre que, lors des débats en première lecture devant l’Assemblée nationale, des élus de plusieurs groupes politiques ont plaidé vigoureusement pour davantage de transparence et de modération de la part de la présidence de la République.

Après avoir augmenté de 3 % son budget en 2018, pour « faire face aux enjeux importants en matière de sécurité », la présidence a sollicité pour 2019 une reconduction à l’identique de cette dotation de 103 millions d’euros. Le seuil symbolique des 100 millions d’euros est ainsi dépassé pour la deuxième année consécutive. En réalité, comme cela vient d’être rappelé, le budget pour 2019 est fixé à 106,78 millions d’euros après intégration du prélèvement sur les disponibilités et des recettes propres de l’Élysée, soit une augmentation de 2,4 % à périmètre constant pour couvrir la forte hausse des dépenses de personnel, en augmentation de 3,5 %. Les services de la présidence découvrent concrètement ce que signifie la hausse de la CSG… (Sourires.)

Les dépenses de fonctionnement sont en hausse de 3,6 %. Si la présidence de la République était l’une de 322 grandes collectivités appelées à contractualiser, elle aurait à s’acquitter d’une amende substantielle pour dépassement de l’objectif de réduction de la dépense publique… (Nouveaux sourires.)

La Cour des comptes ne cesse de rappeler depuis plusieurs années, et même de tirer la sonnette d’alarme sur ce point, l’état très dégradé du palais de l’Élysée.

Dans un rapport du 26 juillet 2018, elle rappelle l’urgence de « mener à bien les travaux de la conservation du patrimoine immobilier, au risque que celui-ci continue de se dégrader et que les coûts de sa restauration soient augmentés ». Les Sages de la rue Cambon n’ont pas été lus : les dépenses d’investissement de l’Élysée baissent en 2019 de 20 %. La modique somme de 1 million d’euros sera consacrée à la rénovation du parc immobilier. Il est désormais urgent que la présidence de la République se dote d’une stratégie globale et à long terme en matière immobilière.

Le groupe Les Républicains votera ces crédits pour encourager le comportement responsable des assemblées. Alors que s’annoncent les futurs débats autour d’une loi de financement des collectivités, j’invite la présidence à réfléchir à cette citation de Publilius Syrus du Ier siècle avant Jésus-Christ : « N’exige de personne ce que tu ne pourrais t’imposer à toi-même ». (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Louault applaudit également.)

M. Jean-François Husson. Très bien ! Grande sagesse !

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Richard.

M. Alain Richard. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le vaste paysage des institutions dont nous examinons les crédits, il faut forcément faire des choix pour apporter une appréciation politique. Le mien sera, cette année, centré sur les juridictions administratives.

Une partie substantielle, et, à certains égards, décisive de la mission de la première d’entre elles, c’est-à-dire le Conseil d’État, n’est pas juridictionnelle, mais consultative. Le Conseil d’État est, au fond, l’agent juridique du Gouvernement, et tend à devenir aussi, d’ailleurs, celui du Parlement, depuis que ses formations consultatives peuvent être sollicitées pour apprécier les propositions de loi.

Son activité à cet égard est également en augmentation du fait de la dimension européenne croissante de l’activité législative, qui oblige à un travail d’analyse des conséquences en droit communautaire de beaucoup de projets de loi et de décrets.

Ce travail est une composante spécifique de l’activité du Conseil d’État.

Pour le reste, s’agissant des juridictions administratives globalement, je souhaite souligner leur capacité, avec quelques augmentations de crédits et de ressources humaines, à juguler une croissance massive du contentieux. D’après les chiffres qui figurent dans le bleu, les juridictions administratives ont connu une augmentation de 74 % du nombre de recours entre 2000 et 2017 en première instance, tandis que les cours administratives d’appel voyaient leurs saisines augmenter de 89 %.

Il faut donc se féliciter de ce que les juridictions administratives, sous la direction du Conseil d’État, qui joue le rôle d’administrateur de cet ordre juridictionnel, aient su faire face à cette hausse de contentieux en assurant une réduction des délais de jugement et en développant la numérisation.

J’ouvre une parenthèse souriante pour souligner, à l’adresse des catégories qui se plaignent de la future réforme de la justice en disant qu’elle va être un facteur de déshumanisation, que ce travail de numérisation et de dématérialisation a été mené à bien, presque entièrement, par les juridictions administratives. Or je n’entends personne, y compris parmi les mêmes catégories professionnelles, se plaindre d’une déshumanisation ou d’une baisse de qualité de la justice dans cet ordre juridictionnel.

Dans le projet de loi de finances pour 2019, comme dans le budget 2018, le grand changement réside dans le renforcement massif, qu’a bien souligné le rapporteur pour avis Patrick Kanner, de la Cour nationale du droit d’asile, de manière à mener à bien le rattrapage de ses capacités de traitement face au flux croissant de demandeurs d’asile et à répondre à l’exigence, manifestée par les gouvernements successifs, d’atteindre des délais de jugement inférieurs à six mois.

Il nous faut rendre hommage à l’énorme progrès déjà accompli par la CNDA dans le traitement des demandes, alors que la quasi-totalité des personnes ayant fait l’objet d’un refus de l’OFPRA font un recours. Si l’on fait la comparaison avec l’année 2010, la CNDA juge deux fois plus de dossiers en deux fois et demie moins de temps. Certes, elle a bénéficié d’un accroissement de moyens, mais cela est quand même le signe d’un effort, d’une mobilisation et d’un progrès indéniables dans les méthodes de gestion, et ce dans un contexte humain respectueux, tout le monde pouvant apprécier le scrupule et l’humanité des magistrats de la CNDA, ainsi que des instructeurs de l’OFPRA, dont ils contrôlent le travail. Qui dit mieux ?

Le Conseil d’État, qui administre l’ensemble des ressources humaines de cet ordre juridictionnel a bien fait d’orienter, comme le disait Patrick Kanner, 90 % des créations de postes, c’est-à-dire 122 emplois supplémentaires en 2019, qui viennent s’ajouter aux 100 emplois supplémentaires de 2018, vers la CNDA, pour qu’elle finisse de réussir sa complète transformation.

Il me reste une minute, que je consacrerai à la mission « Direction de l’action du Gouvernement, et plus particulièrement au Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, en soulignant le bien-fondé de l’augmentation de moyens humains en faveur de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, l’ANSSI, dont les missions et les responsabilités continuent de s’accroître avec la numérisation de l’État et la montée d’un certain nombre de menaces de subversion numérique.

Ne vivons pas dans l’illusion, il est très difficile – c’est vrai pour toutes les capitales européennes – de recruter et de fidéliser les techniciens dont on a besoin dans ce domaine. Je rejoins tout à fait ce qu’a dit Rachel Mazuir : il faut aussi que notre outil de formation initiale, que nos universités et nos écoles amènent sur le marché de l’emploi plus de jeunes capables d’assurer ces missions. Le fait qu’il y ait une rotation est bien entendu un facteur de regrets, à certains égards, mais il n’est pas illogique que, dans des matières qui évoluent aussi vite, les gens ne fassent pas toute leur carrière dans la même institution. Au fond, que des agents qui sont passés par l’ANSSI aillent ensuite exercer leurs fonctions dans le marché privé fera aussi diffuser la culture de sécurité, ce qui n’est pas dommage. Madame la présidente, j’ai respecté le temps de parole, ce qui est rare, pour ma part… (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche – Mme Élisabeth Doineau et M. Pierre Louault applaudissent également.)