M. Gérald Darmanin, ministre. Le Gouvernement est défavorable à tous les amendements, à l’exception de l’amendement n° I-954 de M. Bargeton. À ce sujet, je vous confirme de nouveau que les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » augmenteront de 5 millions d’euros.

Je veux revenir sur les nombreuses thématiques abordées à l’occasion de cette discussion commune.

Sur la DGF, on ne fera pas le procès des précédents gouvernements. Tout le monde a vu que le montant de la DGF avait énormément baissé sous le gouvernement précédent.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Oui !

M. Gérald Darmanin, ministre. Chacun a pu constater que l’on avait étranglé les collectivités locales.

Aujourd’hui, nous nous engageons à stabiliser la DGF, voire même un peu mieux, puisque les concours financiers de l’État aux collectivités locales augmentent de 600 millions d’euros dans le présent PLF.

Alors, c’est vrai, monsieur Savoldelli, on est loin des milliards d’euros que le précédent gouvernement n’a pas versés. J’attire quand même l’attention de chacun d’entre vous, et je le dis d’autant plus que vous avez le souci de la constance, que le pacte budgétaire européen, que les présidents Sarkozy puis Hollande ont fait voter avec l’aide de Mme Merkel, incluait bien les dépenses des collectivités locales. Il était bien prévu que celles-ci concourent à la réduction des dépenses publiques. Personnellement, je n’ai pas voté le projet de loi autorisant la ratification du traité quand j’étais député, et je sais que les communistes ne l’ont pas voté non plus.

Je dis simplement à tous ceux qui me disent aujourd’hui qu’il faut remettre de l’argent dans l’enveloppe de la DGF qu’il leur faut rester cohérents par rapport à leurs votes passés, n’est-ce pas, monsieur le rapporteur général ?

En partant du principe que les collectivités locales représentent près de 20 % de la dépense publique, si on considère qu’il ne faut toucher ni à la santé, parce que la santé, c’est important, ni aux retraites, parce que les retraites, ça l’est aussi, ni aux collectivités locales, à la fin, il ne reste plus que 30 % de la dépense publique, celle de l’État.

Or, comme une partie de l’argent de l’État – je parle de dizaines de milliards d’euros – est versée aux collectivités locales, il fallait avoir en tête que le fait de voter ce traité européen aurait des conséquences sur les budgets suivants.

Monsieur Savoldelli, je ne peux évidemment pas émettre un avis favorable sur votre amendement n° I-1082, puisqu’il tend à augmenter la DGF de 15 milliards d’euros, ce qui représente 0,6 point de PIB. Ce ne serait pas raisonnable, mais je reconnais que vous avez une certaine constance intellectuelle, ce que je tiens à saluer.

Le Gouvernement garantit la stabilité d’un certain nombre de dotations. Je signale notamment qu’il a maintenu le montant de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) et celui de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) à un niveau très élevé, alors que le précédent gouvernement conditionnait le maintien d’une DSIL et d’une DETR à un niveau élevé à une forte baisse de la DGF. Celui-ci expliquait en quelque sorte qu’il fallait troquer des dépenses d’investissement contre des dépenses de fonctionnement. Le Gouvernement stabilise ces dotations à un niveau extrêmement élevé, et c’est à mettre à son crédit.

Mme Lavarde nous explique que le système est devenu un peu fou – elle n’a pas tort d’ailleurs – et que, par le jeu des prélèvements sur recettes, certaines communes ne perçoivent pas de DGF, voire subissent parfois une DGF négative.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Merci de le reconnaître !

M. Gérald Darmanin, ministre. Je suis tout à fait d’accord avec ce constat.

Pour répondre à la question posée par M. Carcenac, je suis très favorable à l’idée de revoir le fonctionnement de la DGF. Simplement, je constate que les maires de France sont très divisés sur le sujet. On attend que l’AMF nous dise qu’elle souhaite travailler sur une réforme de la DGF qui soit équilibrée. (M. Philippe Dallier opine.)

Dès que l’on entre dans le détail, cela se complique. Ainsi, M. Dallier – si je puis me permettre – opine du non-chef, lorsque le président du groupe RDSE affirme que la ruralité est importante. Je fais plutôt partie de ceux qui considèrent qu’il existe aussi beaucoup de pauvreté dans les quartiers et beaucoup de services publics.

M. Jean-François Husson. Il y a davantage de pauvreté en ville qu’à la campagne !

M. Gérald Darmanin, ministre. Sans doute, c’est statistique. En même temps, les services publics sont peut-être plus éloignés des citoyens à la campagne qu’à la ville !

M. Gérald Darmanin, ministre. J’attends le jour où les membres de la Haute Assemblée se mettront d’accord et voteront unanimement une réforme de la DGF, afin que l’on cesse de dire que le Gouvernement prend dans les poches des uns pour donner aux autres. Ce serait intéressant. Je constate que, par deux fois, on a évoqué une réforme de la DGF avant de l’enterrer. C’est plus facile d’en parler que de la faire, même s’il faudra bien se pencher sur le sujet un jour.

Là où je suis un peu moins d’accord avec Mme Lavarde, c’est que le Gouvernement prévoit des mécanismes de péréquation. Ainsi, depuis 2017, le Parlement a chaque fois voté la revalorisation de 90 millions d’euros de la DSU et de la DSR.

Cette péréquation se voit : on aide davantage les villes où l’on trouve des quartiers en difficulté. Les maires des communes éligibles à la DSU ont pu constater que celle-ci avait augmenté de manière extrêmement significative ces dernières années, bien plus d’ailleurs que dans les années Borloo.

M. Philippe Dallier. Pour les 250 communes ciblées, oui !

M. Gérald Darmanin, ministre. Tout à fait, je parle des communes qui sont confrontées à des difficultés sociales extrêmement fortes. Dans ces villes, la péréquation – on peut y être hostile – est très forte, davantage qu’à l’époque où Jean-Louis Borloo était ministre, alors qu’elle était déjà très élevée. Même chose pour la DSR.

Alors, c’est vrai, il y a un « marais » qui souffre d’une sorte d’effet de ciseaux. C’est dans ces communes que la DGF, avec ses quarante variables, pose un certain nombre de problèmes.

Il y a près d’un an, je me suis rendu au congrès de l’assemblée des maires de Haute-Garonne.

D’un côté, j’y ai entendu, et c’est logique, que les communes rurales perdaient des habitants et, donc, des crédits au titre de la DGF – comme vous le savez, le facteur démographique est l’une des principales variables du calcul de la dotation – et que, de ce fait, elles ne disposaient pas des marges de manœuvre pour faire revenir des médecins et des habitants. On a conclu en accusant le ministre que je suis de les étrangler.

De l’autre, le maire de Toulouse m’a soutenu que son agglomération gagnait 10 000 habitants par an et que, par conséquent, il avait besoin de davantage de DGF pour les accueillir, notamment pour construire cinq nouvelles écoles.

Si on doit donner plus à ceux qui perdent des habitants et plus à ceux qui en gagnent, à la fin, c’est plus d’argent public dépensé ! Et vous ne manquerez pas de me faire remarquer que la dépense publique n’est pas maîtrisée.

En tout cas, la DGF est sans doute un sujet trop subtil pour que l’on annonce purement et simplement sa réforme.

S’agissant des impôts, je ne reviendrai pas sur le débat que vous avez sûrement déjà eu samedi. Le Gouvernement a accepté la hausse souhaitée par le rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale. Je dirai simplement que nous allons revaloriser un impôt et que cette augmentation sera payée à 80 % par l’État. Après tout, c’est cela le sujet.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. On n’était pas demandeur de la réforme !

M. Gérald Darmanin, ministre. Peut-être, mais je constate que vous n’avez pas proposé de supprimer cette mesure. Au contraire, vous avez demandé à la décaler, à l’exception des communistes, je le précise. (M. le rapporteur général sagace.) Il faut essayer de maintenir un système qui respecte tout le monde, y compris d’ailleurs le contribuable national ou le budget de l’État.

Concernant les indemnités des maires de communes de moins de 1 000 habitants, je dirai d’abord un mot de la TVA. En effet, l’affectation d’une partie dynamique de la TVA aux régions, qui avait été annoncée par le gouvernement de Manuel Valls et que nous avons mise en œuvre l’an dernier, représente 400 millions d’euros de recettes de plus que les 4 milliards d’euros prévus.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Tant mieux !

M. Gérald Darmanin, ministre. D’une certaine façon, parce que je rappelle quand même que, il y a deux ans et demi, tout le monde m’avait expliqué, y compris dans cet hémicycle, qu’avec l’attribution d’une fraction de TVA c’était un peu la République que l’on assassinait !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Jamais de la vie !

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est ce que disait l’AMF ou M. Morin à ce propos. Maintenant, plus personne ne dit rien. (M. le rapporteur général proteste.)

Je suis moi-même élu régional : chacun peut constater combien cette ressource est dynamique pour les régions. On a remplacé des dotations, dont le précédent gouvernement baissait le montant, par une part de TVA – une forme d’intéressement national, si j’ose dire – dont l’évolution est très dynamique, puisque notre économie ne va pas si mal que cela.

Alors, effectivement, on prélève 14 millions d’euros sur ces 400 millions d’euros pour organiser une péréquation interne. C’est vrai que, par la même occasion, on fait attention aux comptes publics. L’amendement du Gouvernement, à cet égard, me semble tout à fait respectable.

Sur les indemnités de conseil aux comptables publics, madame Guidez, il faut mettre fin à un système qui laissait les élus libres de voter ou non l’indemnité. Cela mettait peut-être une sorte de pression – c’est le mot que vous avez employé.

M. Gérald Darmanin, ministre. En tout cas, cela n’était pas tout à fait correct. C’était vieux comme l’Antique ! (M. le président de la commission des finances rit.)

La DGF a été inventée dans les années 1970 par le gouvernement de Raymond Barre, afin de remplacer toutes les petites dotations versées à l’époque aux collectivités par une « grosse » dotation. Aujourd’hui, cependant, on sait qu’il existe des exceptions puisque, à côté de la DGF, on a créé tout un tas de petites dotations. Il nous faudra donc sans doute recréer une autre DGF.

En tout cas, à l’époque, l’indemnité de conseil aux comptables publics était incluse dans la DGF. Si on est tout à fait honnête, madame la sénatrice, l’État a donc bien accordé cette indemnité à toutes les collectivités, indemnité qui a d’ailleurs été revalorisée depuis lors, et certains élus – c’est leur choix le plus souverain – ont décidé de ne pas la verser et de ne pas la voter en conseil municipal.

En annonçant et en mettant en œuvre une réforme du réseau de la direction générale des finances publiques, l’État met donc fin à ce qui pourrait effectivement apparaître comme une pression, dans la mesure où ne pas voter cette indemnité pourrait occasionner des représailles pour telle ou telle commune. Personnellement, je ne crois pas en cette éventuelle pression de la part des agents des finances publiques, mais je comprends que la question puisse se poser sur le plan théorique.

Le Gouvernement assume que l’État, puisqu’il fait disparaître une dotation qui existait, prenne dorénavant directement en charge une telle indemnité. Il est tout à fait logique et normal que le Gouvernement reprenne cette charge, puisque cette indemnité était prévue dans la « grande » DGF mise en place dans les années 1970. Il n’est qu’à voir les travaux parlementaires de l’époque. Il ne s’agit donc pas d’un scandale ; au contraire, l’indemnité de conseil sera désormais appliquée de manière égalitaire dans toutes les collectivités.

Je le répète, le Gouvernement est défavorable à tous les amendements, à l’exception du sien, évidemment, et de l’amendement n° I-954 de M. Bargeton, qui répond en partie à la question posée par M. Delcros.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Eu égard aux explications du ministre, je ne reprendrai finalement pas l’amendement n° I-925 rectifié. En effet, celui-ci serait incompatible avec l’amendement n° I-954, auquel la commission est favorable, le Gouvernement nous ayant confirmé la majoration de 5 millions d’euros de crédits de la mission RCT.

M. le président. L’amendement n° I-1265 est retiré.

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La réponse du ministre sur la TVA aurait dû nous rassurer. Or elle m’inquiète.

Comme Vincent Éblé, j’ai moi-même été président de département, et ce durant vingt ans. Pourtant, je ne conteste pas la légitimité de l’affectation d’une fraction de TVA en lieu et place des dotations versées par l’État. Je trouve cela normal. D’ailleurs, la commission n’a pas déposé d’amendement de suppression de cette mesure.

Je considère pour ma part, je le dis clairement, que, compte tenu de la nature sociale des dépenses des départements, le pouvoir de taux est un sujet un peu secondaire – je suis d’accord avec le Gouvernement sur ce point –, et que la TVA est plutôt un impôt dynamique.

Mais, à partir du moment où l’on décide d’attribuer une fraction de TVA aux régions, demain aux départements ou aux EPCI, il faut l’assumer. On ne peut pas soutenir que l’État reprendra une part de ces recettes, sous prétexte que l’impôt a connu une évolution plus dynamique que prévu : ce raisonnement est plus que gênant, il est inquiétant.

Les régions ont perçu davantage de recettes de TVA que prévu. Oui, évidemment, puisqu’elles s’en sont vu affecter une quote-part. À partir de là, il faut accepter que la taxe soit dynamique certaines années, et moins d’autres.

Monsieur le ministre, qui nous dit que, demain, vous ne signifierez pas aux départements ou aux EPCI que, compte tenu du dynamisme inattendu de l’évolution de la TVA, l’État récupérera le différentiel entre ce qu’ils auront perçu et ce qui était prévu pour financer des choux, des carottes, ou je ne sais quelle indemnité ?

Cela ne va pas : soit on accepte le risque lié au transfert d’une quote-part de cette fiscalité et on l’assume, soit on ne la transfère pas. Encore une fois, je suis favorable à cette disposition et je suis assez d’accord avec le Gouvernement sur le fait que le pouvoir de taux, pour les départements, est un faux sujet. D’ailleurs, je suis en désaccord sur ce point, vous le savez, avec beaucoup d’élus, bien que j’aie été longtemps président de département. Et je pense que Vincent Éblé partage mon point de vue. (M. le président de la commission des finances opine.)

Les départements assument une mission de solidarité nationale : cela ne me choque pas qu’ils aient une quote-part de fiscalité nationale. J’étais un président de département qui n’augmentait jamais les impôts : le pouvoir de taux, je m’en moquais ! J’essayais d’appliquer à l’échelon local ce que je revendiquais au niveau national.

Votre propos, monsieur le ministre, m’inquiète, je le répète. J’espère que cela ne créera pas un précédent. C’est pourquoi la commission est défavorable à l’amendement du Gouvernement. Le Premier ministre a annoncé une revalorisation des indemnités des élus. De fait, elle sera financée par les départements et les régions.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Ce débat est intéressant, monsieur le rapporteur général. Je sais que vous n’étiez pas défavorable à l’idée d’attribuer une part de TVA aux départements. Je ne vous ferai donc pas ce procès.

D’abord, je rappelle qu’il s’agit d’une autorisation parlementaire. La fiscalité locale, la taxe d’habitation (TH) ou la taxe foncière (TF), par exemple, connaît aussi des variables d’ajustement. Après tout, une imposition locale est aussi une imposition nationale : le chèque que vous remplissez pour régler votre taxe d’habitation ou votre taxe foncière, vous l’adressez au Trésor public. Et c’est le Trésor public qui remet ensuite ce chèque aux collectivités locales !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Vous oubliez le pouvoir de taux !

M. Gérald Darmanin, ministre. Je pourrais aussi vous proposer une variable d’ajustement pour la taxe d’habitation. Certains gouvernements l’ont fait, comme le précédent gouvernement socialiste dans le dernier budget qu’il a présenté au Parlement. On prélèverait des ressources aux départements et aux communes directement dans les recettes qu’ils tirent de la TH. Je l’ai vécu en tant que maire : rien de nouveau sous le soleil !

Après tout, la TVA est une recette fiscale comme toutes les autres. D’ailleurs, c’est la raison pour laquelle la phrase de M. Baroin selon laquelle nous voulons supprimer un impôt qui ne nous appartient pas est fausse.

Ensuite, a contrario de ce que l’on a fait pour les régions, nous avons accepté, à la demande du président Bussereau, de mettre un place un montant plancher pour la TVA. Cela pourrait d’ailleurs donner des idées à certains ici.

Le Gouvernement s’engage à verser un minimum de TVA aux collectivités, plancher en deçà duquel il n’est pas possible d’aller. Si le Gouvernement ou le Parlement décide de réduire le taux de TVA sur la restauration à 5,5 % ou à 10 % – cela pourrait arriver –, ce qui représenterait 2 à 3 milliards d’euros, cela n’aurait donc aucune répercussion pour les collectivités. Cet effet plancher empêche que certaines décisions votées fassent baisser les ressources des collectivités locales.

Je trouve tous ces interventions très intéressantes. En effet, entre la semaine dernière et aujourd’hui, on est passé d’un discours selon lequel on étranglerait les départements avec la TVA à un discours selon lequel la TVA est tellement dynamique qu’il ne faut surtout pas que l’État en prélève une partie. Comme quoi on progresse !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La commission étant favorable à l’amendement n° I-954, elle ne peut pas l’être à l’amendement n° I-289 rectifié bis, car ces deux amendements sont incompatibles. Ce n’est pas « fromage et dessert » !

Par conséquent, monsieur Delcros, nous vous demandons de retirer votre amendement, éventuellement, si vous le désirez, au profit de l’amendement n° I-954, faute de quoi nous y serons défavorables.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Monsieur le ministre, cela fait deux fois que, me concernant, vous utilisez l’expression « opiner du non-chef ». Je ne sais pas ce que vous mettez derrière ces termes mais, à mon avis, vous les avez employés au moins une fois de trop.

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est pourtant français, non ?

M. Philippe Dallier. Je ferme la parenthèse.

M. Jean-François Husson. Cela ne veut rien dire !

M. Philippe Dallier. Je ne sais pas ce que cela veut dire, mais on va laisser ce sujet de côté, parce que ce n’est pas le fond de l’affaire.

M. Gérald Darmanin, ministre. On a l’impression que vous le prenez mal !

M. Philippe Dallier. Oui, je ne le prends pas très bien. Je connais l’expression « opiner du chef », mais pas celle-là ; peut-être me l’expliquerez-vous un jour…

Après ce que je considère comme un rappel au règlement, venons-en au fond, monsieur le ministre, c’est-à-dire la question de la confiance entre l’État et les collectivités locales. Le Gouvernement et le Président de la République font des efforts pour essayer de retisser le lien avec les collectivités.

Dans ce contexte, j’aimerais que vous changiez de discours sur un point : je veux que vous réaffirmiez que vous continuez à demander aux collectivités locales de faire des efforts.

Ce n’est en effet pas le discours que l’on entend aujourd’hui. Vous dites, ce qui est vrai, que la présidence Hollande s’est soldée par 11 milliards d’euros de ressources en moins : très bien, tout le monde est d’accord.

Ensuite, vous affirmez avoir « gelé », si je puis dire, les dotations aux collectivités locales. C’est vrai sauf que, quand on entre dans le détail, on s’aperçoit que l’on a perdu près de 6 % ou 7 % de recettes en raison de l’inflation en un seul quinquennat, ce qui n’est pas une paille eu égard aux sommes en jeu.

Après, il faut regarder les choses précisément : pour certaines collectivités locales, celles qui bénéficient de la péréquation, les baisses sont compensées ou les recettes augmentent encore un peu, mais il y a aussi toutes les collectivités qui voient leurs ressources diminuer !

Il faut ajouter à cela les tours de passe-passe du Gouvernement. On a d’abord une mesure qui tombe comme cela : les 75 millions d’euros prélevés sur les départements d’Île-de-France – on en reparlera – pour financer la Société du Grand Paris (SGP). On a ensuite la moitié de la revalorisation des indemnités des élus locaux que vous allez, en fait, faire payer aux régions et aux départements. Il y a plein de dispositions comme celles-là.

Je comprends que le Gouvernement demande encore des efforts aux collectivités locales. Je voudrais simplement qu’il le dise ! Rien que l’inflation, c’est demander un effort aux collectivités locales.

M. Gérald Darmanin, ministre. Oui, c’est vrai.

M. Philippe Dallier. Je ne dis pas que c’est illégitime, monsieur le ministre, je dis qu’il s’agit d’un effort, surtout quand toutes les dépenses des collectivités augmentent. Il est facile de se rendre compte que la plupart de nos dépenses de fonctionnement sont sous contrainte. On nous demande d’ajuster nos budgets en réduisant les dépenses de personnel ; c’est ce que l’on essaie de faire. Mais, la réalité, c’est que vous continuez à nous demander des efforts.

Dans le cadre du rétablissement de relations correctes avec les collectivités, j’aimerais que, vis-à-vis de l’opinion et de nos concitoyens, vous assumiez de demander aux collectivités territoriales de poursuivre leur effort.

Je termine en disant que celles-ci sont plutôt les bons élèves. Quand on examine ce qui s’est passé les années précédentes, on constate qu’elles contribuent à l’amélioration du solde public. Alors, dites-le, cela ne peut faire de mal à personne !

M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour explication de vote.

Mme Jocelyne Guidez. Monsieur le ministre, je suis un peu embêtée par votre réponse sur les indemnités de conseil aux comptables publics.

Quand j’étais maire ou présidente de communauté de communes, je trouvais injuste et anormal que l’on soit obligé de verser une indemnité à ces comptables, alors qu’ils faisaient simplement leur travail et que, parfois, on n’avait même pas affaire à eux.

Aujourd’hui, vous supprimez ces indemnités, mais l’État prélèvera automatiquement l’équivalent de ce qu’elles coûtaient sur les budgets des communes et des intercommunalités. Je peux vous dire que les élus m’en ont parlé et qu’ils ne sont pas contents de cette décision, parce que c’est pire qu’avant !

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Tous ces amendements montrent que l’article 21 suscite beaucoup d’interrogations. Tous les articles sont importants, mais celui-ci l’est particulièrement, compte tenu de l’enjeu financier qu’il représente. En effet, il s’agit de voter les transferts financiers aux collectivités territoriales, soit plus de 115 milliards d’euros, et les concours financiers de l’État aux collectivités territoriales – 49 milliards d’euros –, dont la DGF – 26,8 milliards d’euros.

Vous l’avez indiqué, monsieur le ministre, on en revient à une relative stabilité de la DGF, alors que, ces dernières années, c’est vrai, les communes avaient vu le montant de leur DGF diminuer de façon significative.

Un grand nombre d’entre nous ont été maires. Reconnaissons que le mode de calcul de la DGF est très compliqué. Les préfets nous envoyaient régulièrement une fiche sur le mode de calcul de cette dotation. Cela tenait sur une page : c’était complexe et néanmoins pédagogique. Désormais, ce document n’est plus transmis, alors qu’il avait toute son importance dans la mesure où de nombreux maires s’interrogent sur ce point.

Par ailleurs, quand j’étais maire de ma commune de 160 habitants, je faisais verser la totalité de l’indemnité de conseil aux comptables publics – cela représentait une somme modique – pour tenir compte du travail de ces comptables, qui sont quand même les interlocuteurs des élus et qui ont, en tant que tels, un rôle important à jouer.

Cela étant, on s’interroge sur la réforme que vous annoncez, monsieur le ministre. Vous envisagez une baisse du nombre de trésoreries. Je sais que le sujet n’est pas simple, mais il faut savoir que cette mesure réduira le nombre des interlocuteurs au service des élus.

Je voterai néanmoins les amendements qui ont reçu un avis favorable de la commission des finances.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Pour ma part, j’interviendrai une fois pour toutes et ne reprendrai pas la parole pour défendre chaque amendement. Je considère en effet que l’on a le débat politique.

J’observe que le Gouvernement, mais aussi la majorité sénatoriale – parce qu’il y a collusion, excusez-moi de le dire, mes chers collègues –, ont décidé que l’on ne tiendrait pas compte de l’inflation, qui est de 1,2 %, pour le calcul des dotations aux collectivités territoriales (M. le rapporteur général proteste.), ni même de l’évolution démographique, qui représente pourtant +0,3 %. Alors évidemment, dans ce dernier domaine, il existe des disparités entre les départements, ainsi qu’entre les communes, donc la démographie ne sera pas prise en compte. Il n’y aura pas non plus de compensation en matière de transport pour les collectivités territoriales.

Voilà ce qui nous attend, mes chers collègues. C’est ce que je comprends des avis défavorables émis, non seulement sur les amendements déposés par le groupe communiste républicain citoyen et écologiste, mais aussi sur tous les autres.

Monsieur le ministre, vous avez raison, les membres de notre groupe ont une certaine honnêteté intellectuelle et il nous faut être respectueux les uns des autres : oui, il y a un problème avec le pacte budgétaire européen ! Ce traité a inclus les dépenses des collectivités territoriales, et on nous fait payer l’addition aujourd’hui ! (M. le ministre opine.)

Les collectivités territoriales représentent environ 7 % ou 8 % du déficit, et on nous fait payer l’ardoise que l’État, lui, ne veut pas payer !

On veut nous diviser, mes chers collègues. On a déjà essayé de le faire plusieurs fois depuis le début de la discussion : on oppose le Cantal et le Val-de-Marne, par exemple ; on oppose aussi les départements prétendument hyper-riches et les autres.

Personnellement, j’ai un problème : dans mon département de 1,4 million d’habitants, quand je fais les comptes, et ce quels que soient les gouvernements, les dépenses liées aux quatre allocations de solidarité – RSA, APA, PCH et ASE – représentent un budget annuel. L’ardoise laissée par les différents gouvernements qui se sont succédé représente un budget annuel !

Alors, quand j’entends qu’il faudra aussi mettre à contribution les départements et les régions pour payer les indemnités des maires, franchement, ce n’est pas admissible !

Vous nous avez collé le contrat de Cahors, la contractualisation, tout en nous disant qu’il ne faut pas augmenter les dépenses de plus de 1,2 %, alors même que vous ne tenez pas compte de l’inflation, qui s’élève justement à 1,2 % et que, en plus, vous allez taper dans les caisses des collectivités !

Le seul objectif que vous visez au travers de la baisse de la dépense publique, c’est l’affaiblissement de la réponse des services publics locaux, qu’ils soient communaux, départementaux ou régionaux. Vous voulez qu’une grande partie de ce que l’on réalise dans nos villes, départements et régions soit captée par le privé. Voilà l’objectif ! Il faudrait l’annoncer : au moins, ce serait clair !