M. le président. Je mets aux voix l’ensemble constitué de l’article 1er et de l’état A annexé.

(Larticle 1er et létat A annexé sont adoptés.)

Vote sur l’ensemble de la première partie

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2020, je rappelle que, en application de l’article 42 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances et de l’article 47 bis, alinéa 2, du règlement, lorsque le Sénat n’adopte pas la première partie d’un projet de loi de finances rectificative, l’ensemble du projet de loi est considéré comme rejeté.

Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2020.

(La première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2020 est adoptée.)

SECONDE PARTIE

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE Ier

AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2020. – CRÉDITS DES MISSIONS

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2020
Article 3

Article 2

I. – Il est ouvert aux ministres, pour 2020, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement supplémentaires s’élevant respectivement aux montants de 10 816 000 000 € et de 10 816 000 000 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état B annexé à la présente loi.

II. – Il est annulé pour 2020, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement aux montants de 598 000 000 € et de 598 000 000 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état B annexé à la présente loi.

État B

RÉPARTITION DES CRÉDITS POUR 2020 OUVERTS ET ANNULÉS, PAR MISSION ET PROGRAMME, AU TITRE DU BUDGET GÉNÉRAL

BUDGET GÉNÉRAL

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement supplémentaires ouvertes

Crédits de paiement supplémentaires ouverts

Autorisations dengagement annulées

Crédits de paiement annulés

Plan durgence face à la crise sanitaire

6 250 000 000

6 250 000 000

Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire

5 500 000 000

5 500 000 000

Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire

750 000 000

750 000 000

Remboursements et dégrèvements

4 566 000 000

4 566 000 000

598 000 000

598 000 000

Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)

4 566 000 000

4 566 000 000

Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)

598 000 000

598 000 000

Total

10 816 000 000

10 816 000 000

598 000 000

598 000 000

M. le président. L’amendement n° 17, présenté par MM. Savoldelli, Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Mission « Plan d’urgence face à la crise sanitaire »

I. – Créer le programme :

Fonds de compensation des pertes d’exploitation des entreprises

II. – En conséquence, modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

(En euros)

Mission/Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

(majorer l’ouverture de)

-

(minorer l’ouverture de)

+

(majorer l’ouverture de)

-

(minorer l’ouverture de)

Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire

500 000 000

500 000 000

Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire

Fonds de compensation des pertes d’exploitation des entreprises

500 000 000

500 000 000

TOTAL

500 000 000

500 000 000

500 000 000

500 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Il s’agit d’un amendement d’appel. Ce matin, lors de la réunion de la commission des finances, peut-être pour nous faire gagner du temps, vous m’en demandiez le retrait, monsieur le rapporteur général, en me disant, si j’ai bonne mémoire, que cet amendement était un peu léger, non pas sur le fond, mais quant au montant retenu.

Nous proposons l’instauration d’un filet de sécurité pour les TPE et les PME, de manière à garantir une allocation en direction de ces entrepreneurs et dirigeants de TPE-PME. Néanmoins, notre groupe est très humble et modeste : il s’en remet pour l’appréciation de ce dispositif à la commission et au Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Elle souhaite entendre sur cet amendement l’avis du Gouvernement. En effet, la question de la compensation des pertes d’exploitation est à l’évidence tout à fait centrale pour les entreprises. La question de la création d’un fonds de solidarité se pose donc, mais on n’a aujourd’hui aucune idée des montants qui seraient nécessaires. Malheureusement, j’estime que 500 millions d’euros sont sans doute encore bien en deçà de la réalité.

Ce projet de loi d’urgence crée, comme on le rappelait il y a un instant encore, un fonds de solidarité pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 1 million d’euros et a baissé d’au moins 70 % entre mars 2019 et mars 2020 ; chacune de ces entreprises recevrait une aide de 1 500 euros. Je pense que cela aussi n’est pas du tout à la hauteur des enjeux.

S’y ajoute, certes, le mécanisme de garantie des crédits, mais le dispositif reste aujourd’hui, à mon sens, incomplet. La piste assurantielle peut être empruntée pour un certain nombre d’activités, mais d’autres entreprises ne se remettront pas de ce choc ; très clairement, il faudra inventer d’autres mécanismes.

Le sujet n’est donc pas épuisé ce soir. Je viens d’entendre dire qu’il y aurait un autre texte, sans doute assez prochainement, malheureusement, compte tenu de la situation économique. Je souhaite donc entendre le Gouvernement sur la compensation qui pourrait être offerte aux entreprises par un mécanisme complémentaire du fonds de solidarité.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je soulignerai, en guise de réponse, que le dispositif d’aide prévu par le Gouvernement ne s’arrête pas à une aide de 1 500 euros par entreprise : c’est simplement un premier objectif pour aider les entreprises et les indépendants qui auraient rencontré des difficultés fortes entre le mois de mars 2019 et le mois de mars 2020, notamment pour les entreprises réalisant un chiffre d’affaires de moins de 1 million d’euros.

Le dispositif comporte un deuxième étage, qui consiste à aider davantage les entreprises en difficulté, de manière à éviter les faillites. Il faut mettre tout cela en lien avec les 35 milliards d’euros de report d’échéances sociales ou fiscales, avec la prise en charge du chômage partiel à hauteur de 8 milliards d’euros, ou encore avec les garanties d’emprunt apportées tant par Bpifrance que par l’État, à hauteur de 300 milliards d’euros.

Je le répète : ce projet de loi de finances rectificative vise à mettre en place des mesures d’urgence pour répondre à la difficulté présente. Ces outils, une fois mis en place, seront complétés à l’issue du travail que nous devons accomplir sur le plan de relance, mais aussi, très certainement et malheureusement, parce qu’il faudra compléter le dispositif face à la crise que nous vivons.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis sera défavorable. Je le dis tout en rappelant que notre dispositif ne s’arrête pas, heureusement, aux 1 500 euros d’aide annoncés.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Pardonnez-moi, mais votre réponse n’est pas satisfaisante, monsieur le secrétaire d’État. Pour ma part, je suis d’accord avec M. le rapporteur général. Quand une entreprise rencontre des problèmes du fait de pertes d’exploitation, vous n’allez pas lui répondre que l’État garantit ses emprunts auprès de la banque ! Ce n’est pas connaître le monde de l’entreprise ! Cette connaissance n’est pas le privilège de certaines travées de notre hémicycle : toutes les sénatrices et tous les sénateurs la détiennent. Quand se pose un problème de pertes d’exploitation pour une entreprise, ce n’est ni la banque ni la garantie de l’État qui va le régler.

Nous proposons d’y affecter 500 millions d’euros. Si ce n’est pas suffisant, adoptons du moins cet amendement d’appel. Peut-être ne sera-t-il pas retenu par la commission mixte paritaire, mais on aura au moins pris date concernant les gros problèmes de pertes d’exploitation que vont rencontrer nos TPE et nos PME.

Quant aux 1 500 euros que vous offrez, certes, il ne convient pas de tout regretter et critiquer, mais je vous avoue m’être même demandé si ce n’était pas un peu insultant pour un chef d’entreprise, quand on connaît les coûts qu’il doit assumer pour l’énergie ou les loyers. Je connais bon nombre de chefs d’entreprise : eh bien, je ne pourrais pas, pendant la crise financière et économique que nous subissons, les regarder droit dans les yeux et leur affirmer que le Gouvernement est à leurs côtés, avec ce versement unique de 1 500 euros ! Pardonnez l’anglicisme, mais je trouve que c’est un peu borderline !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 17.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 2, présenté par MM. Carcenac, Kanner, Raynal, Éblé et Botrel, Mme Espagnac, MM. Féraud, P. Joly, Lalande et Lurel, Mme Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Mission « Plan d’urgence face à la crise sanitaire »

I. – Créer le programme :

Fonds de soutien aux associations d’aide alimentaire

II. – En conséquence, modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

(En euros)

Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

(majorer l’ouverture de)

-

(minorer l’ouverture de)

+

(majorer l’ouverture de)

-

(minorer l’ouverture de)

Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire

50 000 000

50 000 000

Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire

Fonds de soutien aux associations d’aide alimentaire

50 000 000

50 000 000

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Rémi Féraud.

M. Rémi Féraud. Le groupe socialiste et républicain a déposé cet amendement ainsi que les trois suivants, de manière à créer des fonds de soutien dans quatre domaines qui nous apparaissent absolument prioritaires aujourd’hui.

Celui-ci vise à créer un fonds de soutien doté de 50 millions d’euros à destination des associations d’aide alimentaire.

Chacun sait ici que, dans la crise que nous traversons, l’une des situations les plus dramatiques est celle des personnes les plus précaires, en particulier les sans-abri. Je le constate notamment en tant qu’élu parisien : aujourd’hui, l’une des principales tâches de la Ville de Paris est de mobiliser l’ensemble des acteurs pour venir en soutien aux sans-abri qui errent dans les rues. Ils voient certaines structures fermer et des lieux de distribution alimentaire diminuer leurs prestations ; enfin, ils se trouvent souvent en grande difficulté et peuvent, de ce fait, être d’autant plus victimes de l’épidémie.

Les responsables du Secours populaire nous disaient aujourd’hui qu’il leur faudrait en urgence 10 millions d’euros pour faire face aux besoins immédiats, d’autant plus que les dons sont rendus plus difficiles actuellement.

Nous proposons donc au Gouvernement de dégager un fonds de soutien à l’ensemble des associations qui viennent aujourd’hui en aide aux plus fragiles et aux exclus dans cette situation exceptionnelle, et nous souhaiterions entendre sa réponse sur ce point.

M. le président. Monsieur Féraud, si M. le rapporteur général et le Gouvernement ne s’y opposent pas, pourriez-vous nous présenter dès à présent les trois autres amendements de cette série, de telle manière que le Sénat dispose d’une vue globale de vos propositions ?

M. Rémi Féraud. Volontiers, monsieur le président.

M. le président. J’appelle en discussion ces trois amendements.

L’amendement n° 3, présenté par MM. Carcenac, Kanner, Raynal, Éblé et Botrel, Mme Espagnac, MM. Féraud, P. Joly, Lalande et Lurel, Mme Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Mission « Plan d’urgence face à la crise sanitaire »

I. – Créer le programme :

Fonds de soutien au spectacle vivant

II. – En conséquence, modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

(En euros)

Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

(majorer l’ouverture de)

-

(minorer l’ouverture de)

+

(majorer l’ouverture de)

-

(minorer l’ouverture de)

Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire

50 000 000

50 000 000

Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire

Fonds de soutien au spectacle vivant

50 000 000

50 000 000

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

L’amendement n° 4, présenté par MM. Carcenac, Kanner, Raynal, Éblé et Botrel, Mme Espagnac, MM. Féraud, P. Joly, Lalande et Lurel, Mme Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Mission « Plan d’urgence face à la crise sanitaire »

I. – Créer le programme :

Fonds de soutien aux librairies

II. – En conséquence, modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

(En euros)

Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

(majorer l’ouverture de)

-

(minorer l’ouverture de)

+

(majorer l’ouverture de)

-

(minorer l’ouverture de)

Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire

50 000 000

50 000 000

Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire

Fonds de soutien aux librairies

50 000 000

50 000 000

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

L’amendement n° 5, présenté par M. Carcenac, Mme Taillé-Polian, MM. Kanner, Raynal, Éblé et Botrel, Mme Espagnac, MM. Féraud, P. Joly, Lalande, Lurel et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Mission « Plan d’urgence face à la crise sanitaire »

I. – Créer le programme :

Fonds de soutien aux collectivités territoriales

II. – En conséquence, modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

(En euros)

Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

(majorer l’ouverture de)

-

(minorer l’ouverture de)

+

(majorer l’ouverture de)

-

(minorer l’ouverture de)

Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire

50 000 000

50 000 000

Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire

Fonds de soutien aux collectivités territoriales

50 000 000

50 000 000

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Rémi Féraud, pour présenter ces trois amendements.

M. Rémi Féraud. L’amendement n° 3 vise à créer un fonds de soutien au spectacle vivant, lui aussi doté de 50 millions d’euros. Nous savons que l’ensemble des lieux de culture ont dû fermer leurs portes et que leur équilibre économique est à l’évidence très gravement mis en péril. J’ai entendu le Gouvernement affirmer hier, à l’Assemblée nationale, que les budgets des ministères suffiraient à y faire face. Quand on connaît les crédits du ministère de la culture, on peut en douter. C’est pourquoi nous proposons un tel fonds de soutien.

L’amendement n° 4 vise quant à lui à créer un fonds de soutien aux librairies, notamment aux librairies indépendantes. Nous savons que leur équilibre économique est fragile, que leurs marges sont très réduites, que la crise sanitaire les oblige à fermer et qu’elles sont en grand péril de ce fait. J’ai entendu certains suggérer de rouvrir les librairies. Je reste moi-même très sceptique. S’il y a un commerce où tout le monde touche les produits, c’est bien la librairie ! Du point de vue de la santé publique, cela ne me semble donc pas raisonnable. Cela dit, ces librairies subissent la double concurrence de la livraison par internet et des grandes surfaces : celles-ci n’ouvrent pas seulement leurs rayons alimentaires, mais aussi leurs rayons de librairie, ce qui crée à l’évidence une concurrence tout à fait déloyale. C’est pourquoi nous proposons un fonds de soutien aux librairies de France : nous savons que c’est un enjeu culturel absolument essentiel, dans les grandes villes comme sur le reste du territoire.

Enfin, l’amendement n° 5 vise à créer un fonds de soutien aux collectivités territoriales, qui serait lui aussi doté de 50 millions d’euros. L’État appelle les collectivités, ce qui est tout à fait normal, à être ses partenaires dans la lutte contre le virus et la crise ; elles se trouvent obligées de prendre des mesures tout à fait essentielles. Certaines en ont les moyens, d’autres non. Il serait très grave qu’elles ne mettent pas en œuvre les mesures indispensables, faute des finances requises. C’est pourquoi nous proposons ce quatrième fonds de soutien, après ceux que nous voulons destiner aux associations humanitaires, au spectacle vivant et aux librairies. Ce sont à nos yeux quatre priorités tout à fait essentielles dans la période actuelle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Sur le fond, on ne peut qu’être d’accord. Le secteur de la librairie est une priorité, tout comme le spectacle vivant, et ainsi de suite… Malheureusement, ce ne sont pas les seuls secteurs impactés. Il y a énormément de secteurs touchés : aujourd’hui, si vous sortez du Sénat, ne serait-ce que de quelques mètres, pour essayer de trouver un hébergement ou quelque chose à manger, vous constaterez immédiatement que 98 % des commerces sont fermés.

Mme Éliane Assassi. Mais eux ne subissent pas de concurrence !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. C’est la réalité ! Vous pouvez constater que tous les hôtels sont fermés, comme tous les théâtres et tous les cinémas. On ouvrirait ce fonds pour le spectacle vivant, mais les cinémas aussi sont fermés. Le monde associatif souffre, c’est vrai ; le secteur culturel souffre, c’est vrai : l’ensemble des secteurs souffrent !

Alors, faut-il créer ce soir des fonds sectoriels ? On pourrait les multiplier à l’infini. On nous en propose quatre aujourd’hui, mais on pourrait en créer dix, quinze, ou vingt.

Cette crise est mondiale et systémique. Je prenais connaissance à l’instant des prévisions de croissance de Goldman Sachs pour les États-Unis : c’est une récession énorme qui est annoncée, un recul de près de 4 % du PIB. Cela signifie, malheureusement, que l’ensemble de l’économie est impacté.

Ce travail méritera d’être fait ; il faudra regarder de manière précise comment soutenir tel ou tel secteur. Il est vrai que le spectacle vivant souffre particulièrement, mais nous parlions ce matin – cela peut paraître anecdotique – des parcs zoologiques, qui ont fait l’objet d’un débat sur la TVA cette année. Eh bien, ces parcs sont obligés de garder leurs salariés pour nourrir les animaux alors même qu’ils n’ont aucun client. Il en est de même du secteur hippique, par exemple, où il faut nourrir et entretenir les chevaux alors qu’il n’y a plus de courses. Il y a des secteurs d’activité où, malheureusement, on ne peut pas mettre les salariés au chômage partiel, parce qu’il faut maintenir un certain nombre d’activités, alors même que le chiffre d’affaires est nul. C’est vraiment un problème considérable, qui ne touche pas les seuls secteurs que vous mentionnez.

Je pense que, ce soir, nous n’avons pas les moyens d’expertiser les chiffres. Prenons simplement l’exemple du fonds de solidarité pour les collectivités territoriales ici proposé, qui serait doté de 50 millions d’euros. Pensez-vous, mon cher collègue, que ce serait à la hauteur de l’enjeu ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Les collectivités sont dans une situation difficile, certes moins, sans doute, que les entreprises qui n’ont plus du tout de chiffre d’affaires, mais il faudra en tirer les conséquences sur leurs recettes et sur les dépenses supplémentaires engendrées par la crise, par exemple pour ce qui est du RSA. À l’évidence, la somme de 50 millions d’euros n’est pas à la hauteur des enjeux.

Nous n’avons donc ce soir les moyens ni d’évaluer les sommes nécessaires ni de déterminer quels secteurs, outre ceux qui sont visés par ces quatre amendements, auraient besoin d’un tel soutien.

C’est pourquoi, mon cher collègue, je vous demande le retrait de ces amendements. Nous comprenons bien les difficultés que vous exposez, le secteur culturel est sans doute dans une situation catastrophique, mais c’est aussi le cas du secteur touristique, des hôtels, des restaurants, des transports, et ainsi de suite. Cette demande de retrait n’exprime donc pas un désaccord de fond ; simplement, ce soir, le vecteur proposé ne nous paraît pas être le plus approprié.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je partage l’avis de la commission, pour beaucoup des raisons évoquées par M. le rapporteur général. Il ne s’agit pas de sous-estimer l’impact de la crise que nous subissons sur les secteurs visés par les amendements qu’a présentés M. Féraud, mais simplement de rappeler que d’autres secteurs sont concernés : nous devrons étudier les besoins dans le cadre des dispositions de relance que nous préparons.

Cela dit, je veux essayer de vous rassurer sur quelques points. D’abord, nous mobilisons actuellement tous les crédits disponibles pour accompagner ces secteurs. Des annonces ont été faites en matière d’aide au secteur social : on mobilise des crédits, on ouvre des lits ou des places d’hébergement. On veille aussi, de manière plus prosaïque et pragmatique, mais extrêmement utile, dans le cadre des plans de continuité d’activité, à ce qu’un certain nombre de fonctions soient préservées : je pense notamment aux fonctions de paye, notamment des agents publics, mais aussi des allocations et des minima sociaux. En effet, il serait absolument dramatique qu’un ralentissement de l’activité de nos services se traduise par l’impossibilité de verser telle ou telle allocation.

Le ministre de la culture a fait tout récemment des annonces, comme vous l’avez noté, à propos notamment des intermittents. Nous travaillons dans chaque domaine pour que, dans le cadre des crédits votés dans la loi de finances pour 2020, nous puissions répondre à cette urgence.

Je ferai deux remarques pour finir.

Tout d’abord, je réitère la demande de retrait en soulignant bien qu’il n’y a pas là d’appréciation sur le fond. Nous partageons le constat qu’une aide sera très probablement nécessaire dans les temps qui viennent pour ce secteur, mais nous voulons l’élargir et la maintenir dans les dispositifs du plan de relance.

Ma seconde remarque concerne les collectivités territoriales. Là aussi, il ne s’agit pas de sous-estimer les effets potentiels, et même probables, de la crise sur les collectivités territoriales, mais j’y vois une différence avec les entreprises en ce qui concerne l’urgence. Celles-ci voient leurs chiffres d’affaires s’écrouler, alors que les collectivités locales, pour la période actuelle, perçoivent toujours la dotation globale de fonctionnement (DGF), qui n’est pas remise en cause. Par ailleurs, les rentrées fiscales, notamment les douzièmes, sont assurées de la même manière. Enfin, elles disposent – c’est un chiffre global qui, comme tous les chiffres globaux, ne vaut que pour sa globalité, et non pas collectivité par collectivité – d’une trésorerie de 44 milliards d’euros.

Il y aura certainement des impacts sur les collectivités locales, mais nous pourrons les traiter dans un texte qui ne relève pas de la même urgence que celui que nous examinons.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. J’ai bien entendu la position du Gouvernement. Le sujet mérite que l’on s’y arrête un instant. Je pense notamment à l’amendement sur le fonds de soutien aux librairies. C’est typiquement l’exemple d’un secteur qui subit, si je puis dire, la double peine : il y a d’abord l’absence de chiffre d’affaires, mais, en plus, la concurrence…

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Déloyale ou pas, je ne sais pas !

Ce secteur subit en tout cas la concurrence de la vente par correspondance et du e-commerce, qui peuvent continuer à fonctionner. Le problème est plus grave pour les librairies que pour des secteurs où il n’y a pas de concurrence : pour les restaurants, il peut y avoir la concurrence de la vente à emporter, mais il s’agit souvent des mêmes prestataires ; en revanche, les hôtels, par exemple, n’ont pas de concurrents, et, de toute façon, il n’y a plus de déplacements.

Je le répète, il y a des secteurs qui connaissent une perte totale de clients et de chiffre d’affaires à cause de la fermeture administrative, si je puis dire, quand, dans le même temps, le e-commerce continue à vendre, sauf si, demain, la chaîne logistique s’arrête. Cela cause une vraie difficulté. Pour ces doubles peines, le problème est bien plus grave, puisqu’il y a une concurrence qui va gagner des parts de marché progressivement et qui risque probablement de les étouffer.

Aussi, certains pensent que les librairies devraient rouvrir. Par ailleurs, on a des informations parfois un peu contradictoires selon lesquelles des commerces de proximité se verraient interdire d’organiser des systèmes de livraison à domicile ou de retrait. Je pense que le Gouvernement devrait clarifier la situation, de même que pour le bâtiment, dont nous avons parlé. Peut-être des précisions nous seront-elles apportées, même si j’ai bien conscience que tout cela est très difficile.

À mon sens, il est important que l’activité économique de proximité puisse continuer, dans des conditions de sécurité suffisantes. Il me semble que l’on peut ouvrir une librairie en évitant de multiplier les contacts. On peut aussi assurer des services de livraison de proximité à domicile.

Je le répète, il faut éviter la double peine pour certaines activités. Je pense que l’on n’épuise pas le sujet avec ces amendements, qu’il faut voir comme des amendements d’appel. J’aimerais que le Gouvernement puisse nous donner sa position sur ce problème très grave pour certains commerces de proximité.