M. le président. La parole est à M. Vincent Segouin, pour la réplique.

M. Vincent Segouin. Je lisais récemment que l’Union européenne a été soucieuse de négocier des vaccins au meilleur prix et avec le meilleur encadrement juridique. La vérité est donc là !

Notre problème, monsieur le Premier ministre, est que la France est gérée par la peur et la division parce que vous avez vous-même peur de prendre des risques. Avouez que vous avez attendu de voir le résultat des campagnes de vaccination dans les pays n’appartenant pas à l’Union européenne pour juger des effets secondaires et pour, enfin, commander les vaccins et organiser leur administration.

Aujourd’hui, vous nous annoncez que vous allez mettre en place des « vaccinodromes », alors que nos professionnels de santé ont mené une campagne de vaccination contre la grippe de façon remarquable.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. C’est ce que je viens de dire !

M. Vincent Segouin. C’est inutile !

Les Français sont fatigués des effets d’annonce et attendent aujourd’hui des actes. Gouverner un pays, c’est fédérer ses habitants pour lutter et combattre. Ayez la modestie de reconnaître vos erreurs comme l’a fait Angela Merkel, qui disait qu’une erreur doit être reconnue comme telle,…

M. le président. Il faut conclure.

M. Vincent Segouin. … et doit, surtout, être corrigée. C’est la condition pour que votre parole redevienne crédible. Peut-être constaterez-vous alors que la France n’est pas, comme certains le croient, une nation de 66 millions de procureurs. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

situation politique en afghanistan

M. le président. La parole est à M. Jacques Le Nay, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Jacques Le Nay. Ma question s’adresse à M. ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

En tant que président du groupe d’amitié France-Afghanistan, il est de mon devoir d’exprimer notre inquiétude concernant la situation dans ce pays. Le retrait des troupes américaines, prévu au 1er mai, fait craindre une nouvelle déstabilisation et le risque est réel de voir les talibans revenir au pouvoir. C’est ce que nous a confié le fils du commandant Massoud, reçu ce matin par le président Gérard Larcher.

Dans le même temps, monsieur le ministre, vous avez rencontré vos homologues de l’OTAN pour aborder le dossier afghan. Parallèlement, des négociations sont en cours entre les États-Unis, la Chine, la Russie, le Pakistan, l’Inde, le gouvernement afghan et les talibans, négociations dont la France et l’Europe sont exclues. Pourtant, nous serions bien concernés si ce pays sombrait de nouveau dans le chaos.

Lorsqu’ils s’exilent, c’est en Europe que vont la majorité des Afghans. En France, les ressortissants de nationalité afghane constituent le groupe le plus important parmi les demandeurs d’asile adultes.

M. Abdullah Abdullah, suivant les orientations américaines, négocie avec les talibans au nom du gouvernement afghan. Il nous a confié être personnellement favorable à la participation des Européens aux négociations.

Monsieur le secrétaire d’État, la France et l’Europe peuvent-elles intégrer la table des négociations sur le devenir de l’Afghanistan ? Est-ce la position que vous avez défendue à Bruxelles la semaine dernière ? Comment la France peut-elle peser dans cette crise ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.

M. Clément Beaune, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes. Monsieur le sénateur Jacques Le Nay, vous avez tout à fait raison, la situation en Afghanistan est extrêmement préoccupante. La décision de retrait des troupes américaines n’est pas remise en cause, mais sa date reste incertaine, alors même qu’approche l’échéance du 1er mai.

Notre priorité reste, aux côtés des Américains, de parvenir à un cessez-le-feu et à l’instauration d’une paix durable. Comme vous, nous avons réitéré notre engagement aux côtés de l’Afghanistan lors de la cérémonie, à laquelle j’ai assisté au nom du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, donnée samedi matin en hommage au commandant Massoud en présence de son fils et du docteur Abdullah Abdullah.

Lors de la réunion ministérielle de l’OTAN qui s’est tenue la semaine dernière, Jean-Yves Le Drian, qui représentait notre pays, a rappelé qu’un retrait des troupes alliées devait être conditionné aux progrès de la stabilisation de la situation politique et sécuritaire, et très étroitement coordonné entre alliés.

Le ministre de l’Europe et des affaires étrangères a également échangé avec la partie afghane pour essayer de débloquer les négociations interafghanes qui ont très peu progressé depuis leur lancement à Doha en septembre 2020. À l’occasion de ces entretiens avec son homologue M. Atmar et avec M. Abdullah Abdullah, qui préside le Haut Conseil pour la réconciliation nationale, le ministre a rappelé le soutien de la France au processus de paix et a insisté pour que les discussions soient élargies et inclusives. Il a souligné qu’il était dans l’intérêt des parties afghanes, notamment des républicains afghans, que l’Union européenne participe à ces discussions compte tenu de l’importance que nous attachons à la préservation des acquis démocratiques et aux droits de l’homme.

Par ailleurs, notre pays participe aux processus de dialogues régionaux. Nous avons tenu le même discours, hier, lors de la conférence ministérielle.

Nous avons également plaidé à cette occasion pour que les Européens qui – je le rappelle – sont les principaux donateurs et dont la somme des acteurs sur place fournit la majorité des personnels de l’OTAN, soient associés aux discussions interafghanes. Nous portons donc déjà et nous continuerons à porter la revendication au sujet de laquelle vous m’avez interpellé.

Permettez-moi enfin de souligner que notre compatriote Jean Arnault, qui a été nommé mi-mars envoyé personnel du Secrétaire général des Nations unies pour l’Afghanistan et les questions régionales, contribuera aussi à cet effort d’élargissement de la participation européenne.

M. le président. La parole est à M. Jacques Le Nay, pour la réplique.

M. Jacques Le Nay. Un retour des talibans sans élection serait une catastrophe pour la démocratie, les droits fondamentaux et les droits des femmes. La population risque d’être soumise à une charia très dure, comme entre 1996 et 2001. Fawzia Koofi, membre de l’équipe de négociation, a qualifié son pays de « pire pays du monde où naître pour une fille », une déclaration qui en dit long. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

situation des établissements d’enseignement face à la crise sanitaire

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Céline Brulin. Ce soir, l’oracle parlera (Sourires.), mais cet exercice solitaire du pouvoir ne nous fera renoncer ni à notre rôle de parlementaires ni à notre volonté d’associer les Français à la gestion de la crise plutôt que de jouer avec leurs nerfs et de les infantiliser.

Pourquoi en sommes-nous là dans nos écoles, monsieur le ministre ?

M. Jean Castex, Premier ministre. Parce qu’il y a le virus, madame !

Mme Céline Brulin. Parce que seulement 320 000 tests ont été réalisés sur plus de 12 millions d’élèves, mais aussi parce que nous manquons cruellement d’enseignants remplaçants. La situation étant déjà tendue en temps normal, actuellement on brasse des milliers d’enfants en les répartissant dans d’autres classes, au mépris de la distanciation et des conditions d’enseignement.

Nous en sommes là parce que vous avez refusé que les personnels enseignants, les personnels des collectivités, les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) et les assistants d’éducation soient vaccinés. Les équipes sont aujourd’hui épuisées, les élus locaux, désemparés, et les familles, inquiètes.

Quel est le scénario pour les jours à venir ? Comment la continuité pédagogique sera-t-elle assurée, lorsqu’une classe ou une école, voire davantage seront contraintes de fermer ? Quid des collèges, des lycées et de l’université ?

La France va récupérer 2 millions de vaccins dans les prochains jours. Ces doses doivent être destinées prioritairement aux personnels éducatifs, avec un plan précis de vaccination.

Les tests salivaires pour les élèves comme pour les personnels doivent s’amplifier et être répétés chaque semaine. Au passage, abandonnez la franchise médicale d’un euro, absolument déplacée dans le contexte.

Il faut aussi stopper les suppressions de postes et recruter. À la rentrée 2021, aucune classe ne doit être surchargée. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – Mme Esther Benbassa et M. Patrice Joly applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale, de la jeunesse et des sports. Madame la sénatrice, dans tout ce que vous avez dit, un point pourrait faire consensus entre nous : c’est une chance pour la France que d’avoir eu ses écoles ouvertes de septembre jusqu’à aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.) Cela nous singularise dans l’ensemble du monde occidental. En Europe et dans les Amériques, très peu de pays l’ont fait. C’est un gain considérable pour nos élèves.

Vous qui avez une sensibilité humaniste, ayez bien à l’esprit que selon les chiffres de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco), 100 millions d’enfants sont en retard de lecture dans le monde à cause des fermetures d’écoles. Telle est la réalité, et si je suis malheureux pour ces 100 millions d’enfants, je suis heureux pour les enfants français auxquels nous avons permis d’échapper à cela.

Certes, cela ne va pas sans emporter des inconvénients dans la vie quotidienne, mais vous ne trouverez aucun pays où ce n’est pas le cas. En dépit de cela, je constate que les acteurs de l’éducation nationale sont totalement mobilisés, parce qu’ils saisissent parfaitement le sens de ce que nous faisons.

Vous m’avez interpellé au sujet des tests salivaires. Nous en effectuons 300 000 par semaine. On peut certes en demander davantage, mais nous sommes le seul pays d’Europe à réaliser autant de tests salivaires hebdomadaires. (Protestations sur les travées du groupe CRCE.) Le taux d’acceptation de ces tests, qui est de 70 % à cette heure, n’est d’ailleurs pas aussi bon que nous le souhaiterions.

Je pourrais ainsi souligner que sur chacun des points de la politique que nous menons, nous faisons le maximum.

M. Fabien Gay. Et les vaccins ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Il importe aujourd’hui que nous continuions dans cette voie. Quels que soient les éléments de la déclaration que fera le Président de la République ce soir, ils reposeront sur le principe de la priorité donnée à l’enfance et à la jeunesse. Cette priorité doit être française, mais aussi européenne et mondiale, car les enfants et les jeunes peuvent être les premières victimes de cette crise.

Sur ce sujet, de grâce, ayons l’esprit de consensus et d’unité nationale. Les décisions que nous prenons le sont dans l’intérêt des enfants. Si certaines sont sans doute imparfaites – je suis prêt à le reconnaître – soyez assurée qu’elles sont sous-tendues par l’idée partagée par le Premier ministre que l’école est la première des priorités. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour la réplique.

Mme Céline Brulin. Monsieur le ministre, j’ai cru un instant ce midi que le Gouvernement allait reconnaître ses erreurs. Il n’en est rien, et j’en suis vraiment navrée.

Si vous voulez l’unité nationale, accédez à la demande des enseignants et des personnels éducatifs d’être vaccinés. Si vous voulez l’unité nationale, cessez de fermer des classes à la rentrée. Tout le monde vous le demande, tant dans cet hémicycle que dans le pays. Quand allez-vous enfin l’entendre ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

suspension de la ratification par l’allemagne du plan de relance européen

M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Richard Yung. Lorsque le plan de relance européen a été adopté en août ou en septembre 2020, nous avons été très nombreux à nous en réjouir. En effet, l’adoption de ce plan constituait à la fois une action forte pour faire face à la crise du covid et un acte de solidarité entre les pays européens, qui, pour la première fois, s’endettaient ensemble à hauteur de 750 milliards d’euros.

Malheureusement, le calendrier a quelque peu dérapé par la suite. C’était la faute non pas de la France, mais des discussions engagées avec les pays du Nord, un peu radins, qui ne voulaient pas participer, et avec la Pologne et la Hongrie, qui ne voulaient pas que le bénéfice du plan de relance soit conditionné au respect des droits de l’homme.

À la fin de l’année, nous y sommes finalement arrivés : le plan de relance avait été adopté par le Parlement européen, par le Conseil européen, et évidemment, par la Commission. Mais alors que nous entrons dans la phase des ratifications nationales, patatras, il y a une semaine, la Cour constitutionnelle de Karlsruhe en Allemagne a considéré que ce plan était contraire à la Loi fondamentale allemande en ce qu’il créait une dette commune que les Allemands ne souhaitent pas soutenir. Autrement dit, les pays du Nord ne veulent pas payer pour les pays qui chantent le soir dans le Sud.

Mes questions sont donc les suivantes, monsieur le secrétaire d’État. La France n’est pas directement responsable, mais elle subit cette situation. Que peut-elle faire pour accélérer le calendrier ? Si nous ne faisons rien, ce plan de relance arrivera à la fin de la pandémie.

Par ailleurs, si notre pays entretient son amitié avec l’Allemagne – nous sommes des « philo-germaniques » – nous constatons que les relations avec l’Allemagne deviennent plus difficiles.

M. le président. Il faut conclure.

M. Richard Yung. Que pensez-vous de cette situation ? (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Il faut conclure. Je vous prie de vous dépêcher, cher collègue.

M. Richard Yung. Enfin, ne faudrait-il pas augmenter ce plan de relance, actuellement doté de 750 milliards d’euros, comme les Américains l’ont fait ? (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle la nécessité de respecter votre temps de parole.

La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.

M. Clément Beaune, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes. Monsieur le sénateur Richard Yung, je vous remercie de cette question (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.), qui porte sur un sujet extrêmement important.

M. Clément Beaune, secrétaire dÉtat. Vous avez rappelé la célérité avec laquelle la France, après les différentes péripéties que nous avons connues collectivement pour faire avancer ce plan de relance, a permis le vote par ses deux assemblées, au début du mois de février dernier, des ressources permettant son financement, notamment la dette commune qui fait l’originalité de ce plan.

Les ratifications nationales se poursuivent. Je rappelle que d’ordinaire, ce processus dure près de deux ans. Or il s’agit d’une exigence démocratique d’autant plus légitime que sont soumis à ratification, non seulement le plan de relance d’un montant de 750 milliards d’euros, mais aussi le budget européen pour les sept prochaines années, ce qui représente un total de plus de 1 800 milliards d’euros. Sur de telles sommes, le débat démocratique me paraît nécessaire.

J’espère que ce processus pourra être achevé dans les vingt-sept États membres d’ici au mois de mai. Seize pays, dont l’Allemagne, ont achevé leurs procédures parlementaires. C’est un record.

En Allemagne, un recours a effectivement été porté devant la Cour constitutionnelle de Karlsruhe. Je ne dispose pas de davantage d’éléments, car la Cour décidera de manière indépendante, à la fois sur le fond et sur le délai. Néanmoins, les signaux que nous adressent tant les autorités allemandes que les experts juridiques de ces matières sensibles nous portent à l’optimisme quant à la rapidité et à la teneur de la décision qui sera prise. Nous espérons ainsi être en mesure de tenir l’objectif que nous nous sommes fixé, c’est-à-dire de disposer des premiers décaissements de prêts européens dès l’été prochain.

Permettez-moi d’apporter une précision très importante : cela ne ralentit en rien le plan de relance français. D’un montant de 100 milliards d’euros, celui-ci a d’ores et déjà bénéficié d’un effet européen, si je puis dire, puisque nous l’avons construit, en particulier avec Bruno Le Maire et Olivier Dussopt, en misant sur des financements de plus de 40 milliards d’euros venant de l’Union européenne. Sans cette garantie et cette perspective, nous n’aurions pas pu bâtir un plan de relance aussi ambitieux. Comme vous le savez, ce plan de relance a commencé à produire ses effets,…

M. le président. Il faut conclure.

M. Clément Beaune, secrétaire dÉtat. … puisque 26 milliards d’euros sont déjà engagés.

Nous poursuivons donc cette discussion, quitte à adapter notre réponse, mais dans l’immédiat, nous souhaitons d’abord faire fonctionner ce plan de relance. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

nomination du représentant de l’unef au cese

M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Bonhomme. Monsieur le président, il y a peu, l’Union nationale des étudiants de France (UNEF) a confirmé très tranquillement qu’elle organisait bien des réunions réservées aux personnes de couleur. Lorsque des voix se sont élevées pour dénoncer ces réunions selon la couleur de peau, l’UNEF a persisté et a signé.

Non seulement l’UNEF s’obstine, mais des responsables publics n’hésitent pas à justifier une pratique dont on imagine le tollé qu’elle aurait à juste titre suscité si une association ou un syndicat en France avait organisé, à l’inverse, des groupes de parole réservés aux blancs.

Bien sûr, les membres du Gouvernement se sont exprimés sur cette dérive. M. Blanquer et Mme Schiappa y sont allés de leur couplet. La condamnation, chaque fois, s’est voulue ferme, dans les propos en tout cas : « Le Gouvernement ne laissera pas faire », « Tout cela est inacceptable », a-t-on répété à l’envi.

Et pourtant, il n’a été question ni d’engager la moindre procédure de poursuite contre une telle pratique qui à l’évidence relève de la loi pénale, ni de suspendre ou de conditionner la subvention que verse l’État à ce syndicat.

Pis, nous avons appris dernièrement que le Président de la République vient de nommer sur rapport du Premier ministre un représentant de l’UNEF comme membre du Conseil économique, social et environnemental (CESE), tenez-vous bien, mes chers collègues, « au nom de la cohésion sociale », (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Madame la ministre, comment pouvez-vous afficher une position de fermeté impeccable en façade, et en même temps refuser toute action contre un syndicat qui porte atteinte de manière si claire et si délibérée aux valeurs de notre République ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement et de la participation citoyenne.

M. Marc Fesneau, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement et de la participation citoyenne. Monsieur le sénateur Bonhomme, vous interrogez le Gouvernement sur la nomination d’un représentant de l’UNEF au sein du Conseil économique, social et environnemental. Au-delà de cette nomination, ce que vous remettez en cause, au fond, c’est la réalité de la reconnaissance de la représentativité de l’UNEF.

Le Gouvernement – vous l’avez d’ailleurs fort justement rappelé – a eu l’opportunité de s’exprimer par la voix de nombre de ses représentants pour condamner sans la moindre obscurité ni la moindre ambiguïté les propositions de l’UNEF. Notre position comme notre fermeté sont restées constantes depuis lors.

Toutefois, monsieur le sénateur, l’on peut, comme nous le faisons, condamner ces pratiques, tout en reconnaissant la place d’une organisation élue par les étudiants et celle de ses représentants au sein d’institutions expressément prévues par les textes. Aux termes de la loi, est dite représentative une organisation étudiante qui dispose d’au moins un représentant dans les conseils nationaux à l’issue des élections étudiantes. C’est le cas de l’UNEF, qui, selon les résultats des dernières élections, est la deuxième organisation représentative étudiante après la Fédération des associations générales étudiantes (FAGE).

M. Philippe Pemezec. C’est incroyable !

M. Marc Fesneau, ministre délégué. C’est la démocratie, monsieur le sénateur !

La présence de l’UNEF au sein du CESE découle de la réforme constitutionnelle de 2018, qui prévoit que les organisations de jeunes et d’étudiants sont représentées au Conseil. La réforme du 15 janvier a maintenu cette présence qui se justifie par leurs résultats aux élections.

Le CESE est la chambre de la société civile organisée et de la participation citoyenne. La société civile organisée, présente au CESE, est nécessaire à la vitalité de notre démocratie. Cette nouvelle répartition des sièges fait suite au rapport Combrexelle, remis le 5 mars au Premier ministre par un comité indépendant prévu par la loi et composé, entre autres – j’attire votre attention sur ce point, monsieur le sénateur –, de trois sénateurs et de trois députés. Le Gouvernement s’est strictement conformé aux préconisations du rapport Combrexelle.

En conclusion, permettez-moi de saluer les membres sortants du CESE qui ont fait un travail remarquable et fort utile pour nous tous. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour la réplique.

M. François Bonhomme. Monsieur le ministre, mesurez-vous la portée de ce qu’indiquent vos fiches ? Je me pose la question. Vous parlez de représentativité ; or il s’agit non pas de représentativité, mais d’un syndicat qui a tenu des propos justifiant des réunions selon la couleur de peau. De tels propos tombent sous le coup de la loi pénale. Vous persistez pourtant à ne pas vouloir enclencher l’action publique ; c’est votre droit, mais ne me répondez pas à côté ! Vous nous livrez le prêchi-prêcha habituel sur les valeurs de la République. Cela n’a aucun sens ! C’est à l’État qu’il revient d’intervenir, et de manière forte ; pourtant, vous ne le faites pas ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP.)

situation sanitaire dans les écoles

M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Jacques-Bernard Magner. Monsieur le ministre de l’éducation nationale, vous avez affirmé récemment que 94 % des enseignants absents étaient remplacés, mais la réalité est tout autre. Il semble bien que le chiffre que vous citez ne prenne pas en compte toutes les absences liées à la covid, celles-ci augmentant malheureusement tous les jours.

En effet, dans bien des établissements du primaire comme du secondaire, des enseignants absents ne sont pas remplacés, et cela désormais sur de longues périodes. Face à cela, les professeurs des écoles organisent au mieux le service, surchargeant parfois les classes pour accueillir des élèves des maîtres absents et provoquant ainsi un brassage favorable à la propagation du virus.

Nous pouvons comprendre que la pandémie actuelle complique les conditions de recrutement d’enseignants supplémentaires pour faire face à la situation de plus en plus préoccupante. Mais, monsieur le ministre, le manque chronique d’enseignants remplaçants était déjà connu et ne pouvait qu’être aggravé par la crise sanitaire. Nous l’avions dit lors du vote du budget 2021 : il fallait créer plus de postes pour assurer le remplacement des enseignants dont on pouvait aisément prévoir qu’ils seraient malheureusement frappés eux aussi par la contamination.

Puisque la doctrine du Gouvernement est de maintenir les écoles ouvertes coûte que coûte, pourquoi ne pas avoir anticipé des moyens nécessaires lors de la préparation de la rentrée 2020 ? D’ailleurs, nous vous demandons de publier les vrais chiffres du taux de remplacement dans chaque académie, car il semble bien qu’une certaine opacité règne dans ce domaine.

Aujourd’hui, la situation est difficile pour les enseignants, et elle se complique considérablement pour les enfants qui, du fait du confinement, ont déjà perdu de nombreuses heures de cours et qui sont de plus en plus nombreux à être en situation de décrochage scolaire.

Monsieur le ministre, quelles mesures allez-vous prendre pour pallier dès à présent les absences des enseignants non remplacés ? Comment envisagez-vous la période qui nous sépare de la fin de l’année scolaire ? Enfin, comment préparez-vous la rentrée 2021 dans ce contexte ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur Magner, la question du remplacement est pour partie structurelle et pour partie conjoncturelle.

Nous devons améliorer le remplacement de manière structurelle en France, et ce, indépendamment de la crise sanitaire. Je le dis depuis que je suis en fonction. Nous avons un peu amélioré la situation par la création de postes, en particulier dans le premier degré. Les budgets que vous avez votés ont acté cette augmentation du nombre de postes, notamment de remplacement, dans le premier degré.

Nous atteignons ainsi un taux de remplacement qui, selon les académies, varie de 95 % à 97 %, mais je reconnais qu’il est extrêmement désagréable, y compris pour les parents d’élèves, de faire partie des 2 %, 3 % ou 4 % concernés.

La crise sanitaire a fait baisser ce pourcentage, mais je peux indiquer en toute transparence qu’il reste au-dessus de 90 %. Chacun peut comprendre qu’une crise de cette nature, alors que l’essentiel des classes restent ouvertes – la proportion de classes fermées se situe autour de 0,2 % – entraîne un certain nombre de conséquences, dont des tensions en matière de remplacement.

Du reste, je rappelle que le remplacement n’est pas qu’une question de postes. Dans le second degré, certains postes sont ouverts, mais ne sont pas pourvus, car nous ne trouvons personne pour les occuper, notamment en raison de l’éloignement des classes. Ces sujets techniques complexes appellent des améliorations.

Je vous répondrai en deux temps, monsieur le sénateur.

Premièrement, afin de pallier les difficultés structurelles, par-delà la crise, nous menons actuellement le Grenelle de l’éducation. Le remplacement fait partie des sujets sur lesquels nous travaillons. Dès la rentrée prochaine, nous prévoyons d’améliorer la situation en revoyant notre organisation et les moyens alloués au remplacement.

Deuxièmement, contrairement à ce que vous avez indiqué, nous avons déjà amélioré la situation du remplacement de manière conjoncturelle. Dès la rentrée de septembre, nous avons augmenté les moyens qui lui sont alloués afin de créer de nouveaux postes. Puis, au mois de novembre, nous avons décidé de créer plus de 1 000 supports supplémentaires pour le remplacement. Enfin, la semaine dernière, j’ai annoncé, avec l’autorisation du Premier ministre, le renforcement des moyens alloués au remplacement académie par académie pour pourvoir les postes.

Je reconnais les tensions qui affectent le remplacement. Nous travaillons pour remédier à ce problème, car nous devons nous efforcer de faire en sorte que chaque élève ait un professeur. Pour autant, dans les circonstances exceptionnelles que nous traversons, chacun comprend qu’il puisse y avoir des difficultés. Nous nous organisons pour y répondre.

Permettez-moi de conclure en rendant hommage à l’ensemble des personnels de l’éducation nationale qui, dans ces circonstances si difficiles, nous permettent de tenir là où d’autres n’ont pas tenu. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

problèmes bancaires des « américains accidentels »