M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.

M. Alain Milon. En ce qui me concerne, je suivrai l’avis de la commission des lois.

Je vous demande surtout de bien réfléchir à certaines données importantes : faciliter d’une façon ou d’une autre le transfert ou le voyage du virus d’une personne à une autre conduit obligatoirement, à un moment ou à un autre, à la mise en place d’un nouveau confinement. C’est extrêmement dangereux pour notre pays, et je ne le souhaite pas.

J’ai entendu et lu un peu partout, dans la presse en particulier, que le variant delta, celui qui est en cause actuellement, ne serait pas dangereux mais qu’il serait hypercontagieux. Or c’est précisément parce qu’il est hypercontagieux qu’il est dangereux !

Si vous regardez bien ce qui se passe actuellement au niveau des hospitalisations, en particulier dans les services de réanimation, vous verrez que des jeunes de moins de 45 ans sont actuellement entre la vie et la mort, en réanimation, en particulier à Paris, alors même qu’ils n’avaient pas un profil de comorbidité et qu’il s’agissait de patients extrêmement sains jusqu’alors. Ces cas ne sont pas encore très nombreux, mais ils le seront beaucoup plus dans trois semaines.

La contagiosité d’un virus, même s’il n’est pas dangereux pour la plupart d’entre nous, le rend obligatoirement dangereux.

Enfin, accepter la possibilité que des individus se transmettent le virus, même de loin, en terrasse ou ailleurs, revient à permettre à ce dernier de fabriquer des variants, donc d’échapper aux vaccins. À terme, ce sont les personnes vaccinées, donc nous-mêmes, que nous mettons en danger.

Ne votez pas ces amendements, mes chers collègues. Suivez la commission des lois qui, sagement, vous demande de respecter non pas le confinement, mais la distanciation, le masque et le passe sanitaire.

La situation ne pourra s’améliorer que dans ces conditions. À défaut, les conséquences virales finiront par être bien plus graves. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.

M. Alain Houpert. J’ai beaucoup de respect pour mes confrères médecins.

M. Antoine Lefèvre. Cela commence bien !

M. Alain Houpert. J’aurais aimé que ce débat ne se tienne pas dans la précipitation et que l’on écoute justement nos confrères. J’ai d’ailleurs discuté un peu plus tôt par téléphone avec certains d’entre eux, qui pratiquent à l’Hôtel-Dieu.

Je ne suis pas d’accord avec les propos qui viennent d’être tenus et je suis triste d’entendre des discours à la Diafoirus selon lesquels il faudrait interdire à nos enfants la fréquentation des terrasses s’ils n’ont pas le passe sanitaire, alors qu’ils prennent longuement le RER et le métro.

Comme vous l’avez dit, monsieur le rapporteur, une telle mesure vise à éviter les contaminations par voie de postillons. Mais dans le métro, la contamination par les mains est bien plus importante ! Si le masque est obligatoire, allons plus loin et demandons à tous les usagers de porter des gants dans le métro… Cette maladie est grave, mais il ne faut pas la comparer à la peste !

Les Français sont dans la rue pour manifester. Ils nous écoutent et nous regardent.

M. Philippe Bas, rapporteur. Et ils nous approuvent !

M. Alain Houpert. Je n’en suis pas si sûr…

Revenons au bon sens, mes chers collègues. Nos enfants ont souffert de l’isolement et continuent d’en souffrir. Ils ont besoin de se retrouver. Et, en terrasse, la promiscuité est moindre que dans le métro. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur les travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Je voudrais dire à mes collègues qui nous alertent que personne ici ne veut être victime d’un nouveau confinement demain. Épargnons-nous donc de tels arguments.

Je ne comprends pas la cohérence du dispositif qui nous est soumis. Les 12-18 ans, par exemple, ne pourront pas se rendre dans des lieux de loisirs, notamment dans les centres aérés et les colonies de vacances – même si Christian Estrosi semble être revenu sur sa position, d’autres en auront certainement l’idée –, mais le 1er septembre, ils retourneront au lycée et à l’université.

Ainsi, un jeune ne pourra fréquenter ni les terrasses des cafés ni les restaurants des plages pendant l’été, mais, la semaine suivante, il pourra aller au lycée sans passe sanitaire et sans être vacciné. Je ne comprends pas la cohérence qui sous-tend un tel dispositif.

De même, en vertu de quelle cohérence les restaurants d’entreprise sont-ils exclus ? Pour le coup, je comprends bien la cohérence d’une telle mesure, mes chers collègues : c’est l’activité l’économique versus la protection sanitaire.

M. Vincent Segouin. Pas du tout !

Mme Laurence Rossignol. Le Gouvernement fait des choix, qui sont non pas seulement sanitaires, mais aussi économiques. Et si nous pouvons être attentifs à cet aspect des choses, considérons qu’il est tout de même problématique d’imposer le passe sanitaire aux enfants de 12 à 18 ans, alors qu’ils ne sont pas en mesure de décider pour eux-mêmes de leur statut vaccinal et qu’ils dépendent encore pour cela de leurs parents.

C’est pourquoi j’espère que tous nos collègues qui ont proposé des amendements visant à supprimer l’obligation de passe sanitaire pour les 12-18 ans voteront notre amendement tendant à permettre aux jeunes de 16 à 18 ans de décider tout seuls de se faire vacciner.

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Je reviendrai sur trois points.

Le premier est l’aspect scientifique. Bien que celui-ci soit tout à fait essentiel pour notre discussion, nous manquons absolument de critères fiables et d’une instance de validation des avis scientifiques.

Votre gouvernement a créé plusieurs instances scientifiques, monsieur le secrétaire d’État, mais nous ignorons si leurs avis sont suivis, ou non, et dans quelles conditions.

De notre riche discussion, je retiens que nous reconnaissons tous ici que le virus a passé un stade qualitatif et qu’il est désormais bien plus infectieux que ses précédentes formes.

En toute honnêteté, je reconnais que cela valide la position du rapporteur : nous ne sommes plus dans un processus législatif tel que celui que vous nous aviez pu nous présenter, monsieur le secrétaire d’État, mais de nouveau dans un dispositif de sécurité sanitaire généralisé. Il faut que le Gouvernement le reconnaisse et assume cette situation.

Le deuxième point est que nous voulons imposer au Gouvernement par notre vote non pas une obligation au Gouvernement, mais des mesures qui peuvent être ajustées en fonction de conditions épidémiologiques devant être analysées au cas par cas, en fonction de l’évolution de la situation dans les territoires. Comme M. le rapporteur l’a justement indiqué, le juge administratif pourra se saisir de chacune de ces applications.

Or cela pose une difficulté majeure, car il reviendra au juge administratif d’interpréter le dispositif que nous votons, en fonction de critères sanitaires et scientifiques dont nous ne disposons pas et dont nous n’avons donc pas débattu.

J’en viens enfin au troisième point. Monsieur le secrétaire d’État, vous êtes chargé de l’enfance et des familles. Il vous reviendra donc de répondre, et j’ai bien compris que vous alliez le faire, à cette question de droit majeure : comment peut-on obliger un mineur à disposer d’un passe sanitaire, alors que ses parents peuvent lui refuser la vaccination ?

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !

M. Pierre Ouzoulias. Le passe sanitaire a vocation à inciter à la vaccination, mais, dans ce cas, il s’agit d’une injonction contradictoire.

M. le président. Je vous remercie de bien respecter votre temps de parole, mes chers collègues.

La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.

M. Cédric Vial. Je n’ai pas voté l’amendement de suppression de l’article 1er présenté par mes collègues précédemment. En effet, j’attendais l’issue de ce débat pour juger si cet article, qui, malgré les améliorations considérables apportées par la commission, n’était pas acceptable de mon point de vue, pouvait le devenir.

Je regrette que ce débat n’ait pas eu lieu, et je souhaite relever deux contradictions.

La première est que l’on reproche régulièrement au Gouvernement dans cette enceinte de vouloir absolument imposer ses textes sans prendre en contre les évolutions que les parlementaires que nous sommes pourraient y apporter. Or j’ai le sentiment que la commission des lois adopte aujourd’hui un comportement similaire en voulant absolument imposer son texte, sans prendre en compte des évolutions qui sont pourtant proposées par des sénateurs siégeant sur toutes les travées et qui vont à peu près dans les mêmes directions.

Sur les deux ou trois lignes de force de cette série d’amendements, nous pourrions pourtant trouver un consensus qui permettrait à nombre d’entre nous d’être à l’aise avec le vote de cet article.

La seconde contradiction que je souhaite relever, avec tout le respect que j’ai pour le travail des commissaires aux lois, est que nous avons assisté ce matin à un changement de dogme sanitaire sur l’aérosolisation, sur la volatilité des postillons et sur la contamination en plein air ou en espace clos. Il s’agit d’un véritable retournement !

Je veux bien que les choses aient évolué depuis le départ de M. Salomon (Sourires sur des travées du groupe Les Républicains.), mais on nous affirme exactement l’inverse de ce qui a fondé les mesures que nous avons prises pendant des mois…

Accepter le passe sanitaire dans les conditions que l’on veut nous imposer aujourd’hui, notamment en extérieur et dans les petits sites, c’est accepter l’idée que, depuis des mois, on nous raconte des carabistouilles !

Si nous acceptons ce changement de dogme, nous devrons retourner dans nos départements respectifs et expliquer à nos électeurs que nous nous trompons totalement depuis des mois et que nous leur avons raconté n’importe quoi, mais que cette fois, nous en sommes convaincus, nous avons raison.

M. le président. C’est terminé, monsieur Vial !

M. Cédric Vial. J’estime que ce n’est pas tenable. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)

M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.

Mme Nadia Sollogoub. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez indiqué que le plus important était que les mesures soient opérationnelles et que nous recherchions ensemble l’efficacité.

Or s’il y a bien un public auprès duquel le passe sanitaire ne sera pas opérationnel, c’est celui des jeunes de 12 à 18 ans. Comme l’a indiqué Mme Rossignol, ces derniers vont retourner au lycée.

Nous savons tous que les jeunes n’ont pas les mêmes barrières physiques que les adultes. Les jeunes filles se parlent dans le creux de l’oreille et se touchent en permanence, et filles et garçons font un truc vieux comme le monde : ils se bécotent ! (Sourires.) Comment empêcher cela avec le passe sanitaire ? En tout état de cause, ce passe ne sera pas opérationnel pour les 12-18 ans. Ce n’est simplement pas possible.

Le passe sanitaire est compliqué à mettre en œuvre dans ses différents domaines d’application. C’est pourquoi je voterai toutes les mesures d’assouplissement.

Nous devons nous donner pour cap – cela nous a été redit par le ministre et par M. Delfraissy –, d’une part, de remettre d’actualité les mesures barrières, de les pratiquer de nouveau et de les renforcer, et, d’autre part, de parvenir à un taux de 95 % de vaccinés.

Or les annonces relatives au passe sanitaire ont eu pour effet de saturer tous les centres de vaccination. Si, comme l’indiquait notre collègue Nathalie Goulet, nous n’avons pas de visibilité quant à l’approvisionnement en vaccins, les annonces ont suffi, à elles seules, à provoquer une sorte d’électrochoc positif.

Un collègue indiquait que les cinémas sont vides actuellement. Est-ce l’effet des annonces relatives au passe sanitaire ou du variant delta ?

Peut-être que, finalement, tous ces effets d’annonce conjugués suffiront pour tendre vers ces deux buts, à savoir que chacun recommence à utiliser du gel hydroalcoolique et que chacun se fasse vacciner. Dans ces conditions, il n’est sans doute pas utile d’instaurer un passe sanitaire qui, de toute manière, ne sera pas opérationnel dans nombre de ses dimensions. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

M. Patrick Kanner. Monsieur le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles, je souhaite revenir sur l’amendement n° 105 rectifié – j’indique d’ailleurs à mes collègues du groupe Les Républicains que son objet conforte celui de l’amendement n° 33 de M. Savin, dont ils sont cosignataires : durant le mois d’août, des centaines de milliers d’enfants qui fréquentent les camps scouts, les centres aérés ou les colonies de vacances ne pourront accéder à des lieux culturels divers et variés, parce que les animateurs ne pourront pas présenter un passe sanitaire.

Vous m’avez indiqué que cet amendement était satisfait, monsieur le rapporteur. Mesurant mon ignorance en la matière, je vous prie de bien vouloir m’indiquer en quoi, à ce stade, c’est vraiment le cas.

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

M. Philippe Mouiller. Mes chers collègues, je souhaite vous faire part de mon inquiétude quant à notre capacité à mettre en œuvre les mesures proposées, notamment auprès des adolescents et des jeunes adultes.

Nous entrons dans la période estivale. Or nous savons que, du fait du calendrier de vaccination, un certain nombre de jeunes ne pourront pas bénéficier du passe sanitaire dans les délais impartis. Pourtant, ces jeunes cherchent aujourd’hui à faire des rencontres, à avoir des échanges et à prendre du bon temps. Durant cette période estivale, ils souhaiteront participer à un certain nombre de manifestations.

Or je crains que ces mesures ne les poussent à se retrouver dans la rue, dans les espaces publics et sur les plages, c’est-à-dire dans des lieux que nous ne maîtrisons pas du tout sur le plan sanitaire.

Par ailleurs, cette génération portera un regard extrêmement critique sur les mesures que nous prenons. Si, d’une manière générale, la population française est favorable au passe, ce n’est pas forcément le cas de cette génération, qui est déjà fortement marquée par ce que nous vivons. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Je m’inquiète donc de notre capacité réelle à mettre en œuvre de telles mesures.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Cette série d’amendements montre toute la complexité et le flou qui caractérisent la mise en œuvre de ce passe sanitaire, alors même que M. le ministre nous a indiqué que la seule chose qui comptait était l’efficacité.

On peut légitimement avoir quelques doutes en la matière : on nous dit que, pour les jeunes, le passe sanitaire ne sera pas mis en œuvre avant le 30 septembre prochain. Il me semble pourtant que, s’il y a un risque, c’est maintenant, pendant les vacances.

On nous dit également qu’on ne le mettrait pas en place dans le cadre scolaire, et ce malgré la promiscuité qui y règne. Cela ne me paraît ni logique ni efficace.

Par ailleurs, plusieurs de nos collègues et vous-même, monsieur le secrétaire d’État, avez souligné que ce passe sanitaire permettrait de maintenir un certain nombre de lieux ouverts et de vivre plus normalement. J’estime pour ma part que nous sommes en train d’oublier le principal, c’est-à-dire les gestes barrières, le port du masque, le lavage des mains, etc. Or nous ne devons pas reculer en la matière.

Monsieur le rapporteur, vous avez indiqué que l’obligation du passe sanitaire pour les jeunes dépendrait des conditions de promiscuité. Mais comment définira-t-on ces dernières ?

Enfin, comme l’a relevé Pierre Ouzoulias, les 12-18 ans doivent être autorisés par leurs deux parents à se faire vacciner. Mais comment peut-on imposer un passe sanitaire à des personnes qui ne peuvent décider par elles-mêmes de se faire vacciner ?

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Mes chers collègues, je m’inquiète de l’image que nous donnons au travers de ce débat.

Monsieur le rapporteur de la commission des lois, madame le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, vous avez mis autant de cohérence que vous avez pu dans un texte qui, parfois, en manque. Mais, chaque fois que l’on souligne les failles du dispositif ou des contradictions telles que « oui au métro, non à la terrasse », cela affaiblit l’acceptabilité des mesures que nous sommes en train de voter.

Dans un contexte où la population se pose des questions et où des nuages de complotisme surgissent ici et là, cela contribue à affaiblir ce que nous voulons tous, c’est-à-dire une défense massive contre ce variant delta.

L’une des failles du dispositif est précisément que nous y travaillons dans des conditions si hâtives que nous ne pouvons pas vraiment ajuster tous les dispositions. J’en appelle donc à un maximum de cohérence.

Si l’on comprend que l’évolution du virus interdise l’assouplissement pour certaines activités en plein air, les terrasses, les zoos, les parcs, etc., on ne peut faire deux poids deux mesures de façon aussi manifeste sans que l’acceptabilité des mesures que nous sommes en train de voter soit proche de zéro.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Je suis quelque peu surpris par l’harmonie, pour ne pas dire par la connivence, que je constate entre la commission et le Gouvernement. J’ai cru comprendre – le président Retailleau le disait – que, moyennant l’adoption de quelques amendements, la majorité sénatoriale pourrait adopter ce texte.

À ce stade du débat, le Gouvernement refuse toute proposition, en tandem avec la commission. Je n’irai pas jusqu’à dire que notre indépendance est en cause, mais je suis quelque peu étonné par un tel alignement.

Le Gouvernement a refusé de lever le gage, comme Laurence Rossignol le demandait afin que nous ayons dans cet hémicycle un débat libre, permettant d’examiner toutes les options possibles, y compris l’obligation vaccinale, et ne se bornant pas à étendre le champ du passe sanitaire à de nombreux secteurs d’activité.

À présent, ce sont des amendements présentés par des sénateurs issus de tous les groupes qui sont refusés, un consensus se dessinant entre la commission et le Gouvernement pour leur opposer un véto.

Par ailleurs, je souhaiterais avoir des précisions quant à la situation de la Guadeloupe. Ces amendements visent à accorder un délai supplémentaire pour les adolescents, pour favoriser l’acceptabilité de ces mesures et permettre leur entrée en vigueur.

Or, sitôt ce texte voté, il sera appliqué en Guadeloupe, un territoire qui, à l’instar de la Martinique, de la Guyane et de La Réunion, est sorti du régime de sortie de la crise sanitaire pour entrer de nouveau dans l’état d’urgence sanitaire. La situation dans ces territoires est donc très différente de celle de l’Hexagone.

Monsieur le secrétaire d’État, la Guadeloupe dispose de onze centres de vaccination ; la population y est primo-vaccinée à 25 % ; le variant delta ne représente que 20 % des cas, le variant alpha ou anglais restant majoritaire, et il se transmet de manière communautaire, c’est-à-dire entre nous, si j’ose dire.

M. le président. Il faut conclure, monsieur Lurel.

M. Victorin Lurel. Vous pouvez invoquer la cinétique, mais je ne comprends pas que, malgré cette dynamique, vous décidiez de…

M. le président. C’est terminé, monsieur Lurel !

Mes chers collègues, seize ou dix-sept orateurs se sont inscrits pour une explication de vote. Ce débat précipité me déplaît autant qu’à vous, mais je dois vous indiquer que, si nous ne terminons pas l’examen de ce texte ce soir, la CMP ne pourra avoir lieu demain matin. Dans ce cas, elle se réunira demain soir ou lundi matin, ce qui veut dire que nous siégerons lundi.

Mme Éliane Assassi. Et alors ? S’il le faut, nous y sommes prêts !

M. le président. Cela ne me pose aucun problème – je présiderai d’ailleurs la séance si nous siégeons lundi après-midi –, mais je vous le signale, car c’est mon rôle de le faire.

La parole est à Mme Nassimah Dindar, pour explication de vote.

Mme Nassimah Dindar. Comme certains de mes collègues avant moi, je souhaite insister sur la vraie difficulté que ces obligations poseraient pour les jeunes. En effet, dans mon territoire, La Réunion, il faudra mettre cette exigence en cohérence avec une population de jeunes et de très jeunes.

Comme vous le savez, monsieur le secrétaire d’État, 2 500 enfants sont placés à La Réunion. L’aide sociale à l’enfance, ou ASE, aura donc à gérer le dispositif qui sera adopté avec le département. Quid des assistants familiaux ? Le vaccin sera-t-il obligatoire pour eux ? Qui vaccinera les enfants placés, et à la demande de qui ? De plus, le transfert des enfants pris en charge par l’ASE posera des difficultés si le délai du 30 septembre est maintenu pour la vaccination de ces jeunes.

Il faut également prendre en compte notre jeunesse désœuvrée et nos étudiants précaires. Quand une famille nombreuse vit dans un logement social de 20 ou 30 mètres carrés, les jeunes vivent dehors. Imposer le passe sanitaire dans les lieux de rencontre n’ira pas sans poser de grandes difficultés pour ces jeunes. Peut-être iront-ils d’ailleurs jusqu’à se révolter.

M. le président. La parole est à M. Vincent Segouin, pour explication de vote.

M. Vincent Segouin. Tous les arguments exposés sont sûrement fondés, mais je rejoins M. le rapporteur : nous ne pouvons déroger au dispositif sans menacer le bénéfice recherché, qui, je le rappelle, est l’augmentation du taux de vaccination de la population.

Je crains que, comme c’est souvent le cas, de telles dérogations ne rendent le texte incompréhensible, ce qui susciterait davantage de scepticisme. (Marques dironie sur les travées des groupes SER et CRCE.)

Mme Monique Lubin. C’est déjà le cas !

M. Vincent Segouin. De grâce, ne mettons pas le doigt dans cet engrenage.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Nous avons bien entendu votre réponse, monsieur le secrétaire d’État : à présent que le principe du passe sanitaire est adopté, nous débattons de ses modalités et des exemptions.

Avant d’entamer le débat relatif au calendrier de mise en œuvre de ce passe sanitaire, je souhaite toutefois vous poser une question, monsieur le secrétaire d’État ; du reste, depuis ce matin, un certain nombre de sénatrices et de sénateurs vous l’ont déjà posée. Comme ils n’ont pas obtenu de réponse, je me permets de vous la poser de nouveau. De combien de doses disposons-nous ? Combien de commandes ont-elles été passées ? Celles et ceux qui souhaitent se faire vacciner pourront-ils le faire à temps, avant la mise en place du passe sanitaire ?

Si Mme Pannier-Runacher nous a régulièrement donné un certain nombre d’informations dans le passé, nous n’en disposons pas aujourd’hui. Or plusieurs de mes collègues vous ont indiqué que, dans certains territoires, des rendez-vous étaient décommandés, faute de doses. De plus, au mois d’août, une partie des personnels – c’est bien légitime, après l’année qu’ils ont vécue – sera en congés.

Il faudrait donc que le Sénat dispose d’informations solides avant de débattre du calendrier de mise en œuvre du passe sanitaire.

Par ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, vous avez répondu longuement, et nous vous en remercions, sur la question des mineurs, mais vous n’avez pas indiqué si la vaccination serait mise en place au collège, au lycée et à l’université. Cela permettrait certes d’accélérer la vaccination, mais cela nécessiterait de s’appuyer sur une médecine scolaire qui est bien mal en point et à laquelle il faudrait donner des moyens.

Aucune réponse n’a été apportée à cette question à l’Assemblée nationale, alors qu’un certain nombre d’étudiantes et d’étudiants se la posent.

Monsieur le secrétaire d’État, le passe sanitaire sera-t-il demandé à l’université à la rentrée, et si oui, comment sera-t-il mis en œuvre ? La vaccination sera-t-elle proposée à l’université ?

M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon, pour explication de vote.

M. Laurent Lafon. Je formulerai deux remarques de nature différente.

La première porte sur la question de la cohérence des présentes dispositions et des autorisations ou exemptions qu’elles emportent. Au fond, nous nous posons cette question depuis le début de la crise sanitaire, car, chaque fois que nous avons dû prendre des mesures, on a noté de-ci de-là des incohérences dans leur application.

Ces incohérences doivent-elles remettre en cause le schéma global, à savoir la mise en place du passe sanitaire ? Je partage la position de la commission des lois. Celle-ci, certes, considère qu’il y a des incohérences et qu’il convient, dès lors qu’on les a constatées, de les corriger, mais elle estime que, en tout état de cause, ces incohérences ne sont pas de nature à remettre en cause le passe sanitaire tel qu’il est prévu par l’article 1er.

Ma seconde remarque concerne les jeunes, dont la position quant au vaccin est relativement peu connue, pour une raison très simple : dans l’ordre de priorité des vaccinations, ils ont été placés en dernier. Si l’on constate aujourd’hui qu’ils sont peu vaccinés, on ne sait pas si c’est dû au calendrier de la vaccination ou si cela relève d’une volonté de leur part, ou plus exactement de celle de leurs parents.

Monsieur le secrétaire d’État, pour avancer dans ce débat, nous devons disposer d’éléments de réponse précis.

Qu’indiquent les données statistiques relatives aux vaccinations et aux prises de rendez-vous effectuées par les jeunes ces derniers jours, notamment depuis les annonces du Président de la République ? Constatez-vous une augmentation des vaccinations ? (M. le secrétaire dÉtat acquiesce.) Compte tenu du retard pris du fait du calendrier, leur rythme de vaccination est-il comparable à celui des adultes ?

Les réponses à ces questions sont d’autant plus importantes que nous devrons trancher la question de la date d’entrée en vigueur du passe sanitaire pour les jeunes – au 15 septembre ou au 30 septembre.

Afin de ne pas pénaliser les jeunes, il importe que nous connaissions leur rythme de vaccination actuel.

M. le président. La parole est à M. Sébastien Meurant, pour explication de vote.

M. Sébastien Meurant. La France est un vaste pays, présent sur toutes les mers du globe. C’est une chance et cela nous permet de constater que l’incidence et les effets de cette maladie sont complètement différents dans nos territoires d’outre-mer.

En Nouvelle-Calédonie, il y a très peu de personnes contaminées, car ce territoire a adopté une stratégie « zéro covid importé ». Celle-ci fonctionne, mais elle suppose que l’on contrôle les frontières, que l’on impose une quarantaine et que l’on soit extrêmement strict.

Mon collègue Lurel évoquait précédemment le cas de La Réunion, où l’épidémie repart. Étrangement, dans le territoire voisin de Mayotte, elle ne repart pas, alors que la population, contrairement à celle de La Réunion, n’y est pas vaccinée.

Poussons la curiosité jusqu’à considérer la situation d’autres pays que la France, par exemple celle du Paraguay et de l’Uruguay, que j’ai la chance de connaître. Le taux de vaccination du premier est de 2 %, alors que celui du second est de 60 %. Pourtant, les courbes de contamination évoluent de la même façon. Autrement dit, le vaccin pour tout le monde est une erreur : il faut vacciner les personnes qui sont à risque. Il n’y a pas d’autre choix.

Pour les enfants, pour les jeunes âgés de 12 à 18 ans et pour les autres jeunes, il n’est pas prouvé, et vous ne parviendrez pas à le faire, que la balance bénéfice-risque est positive.

En outre, la loi que vous êtes en train de faire passer est concrètement inapplicable sur le terrain. Comment voulez-vous que les Français comprennent qu’ils doivent avoir un passe sanitaire pour le TGV, mais pas pour le métro ou le RER ?

Comment voulez-vous qu’ils comprennent que l’on revienne entièrement sur ce qui a été déclamé à longueur de temps s’agissant de la différence de traitement entre les terrasses et l’intérieur ?

Comment voulez-vous qu’ils comprennent qu’un pays situé à nos portes – je pense au Royaume-Uni – lève toute contrainte sanitaire ?

C’est incohérent, et nous poursuivons dans l’incohérence !