Mme le président. Madame la ministre, je vous prie également de respecter votre temps de parole, notamment par égard pour vos collègues qui prendront part aux débats suivants.

La parole est à Mme Viviane Artigalas. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Viviane Artigalas. Il y a trois ans, le Président de la République annonçait à Tourcoing son ambition de changer le visage de nos quartiers d’ici à la fin du quinquennat.

Or cette ambition n’a jamais vu le jour, d’abord en raison d’un désengagement manifeste de l’État envers une politique pourtant essentielle pour la cohésion nationale.

Il suffit de rappeler que l’initiative Cœur de quartier, annoncée au mois de juillet 2018 n’a jamais vu le jour alors qu’elle était censée répondre au rapport Borloo. Mieux : interrogé par des maires à ce sujet cet automne, le Premier ministre n’en avait jamais entendu parler !

Seules des mesures éparses ont pu être engagées, très souvent sur l’initiative des villes et sans accompagnement de l’État. Le système des appels à projets pèche par son manque d’efficacité. La méconnaissance des procédures et les retards dans la constitution des dossiers entraînent une précarité des financements et des inégalités entre les communes. C’est souvent « premier arrivé, premier servi » !

Madame la ministre, nous ne pouvons que constater l’absence totale d’une vision gouvernementale de la politique de la ville. La sanctuarisation des crédits fait chaque année l’objet d’angoisses de la part des élus et des acteurs de la rénovation urbaine, comme d’âpres négociations au Parlement.

Certes, les crédits du plan de relance sont arrivés dans ces territoires, mais de façon très inégale et toujours précaire. Quel avenir pour des dispositifs efficaces comme Quartiers d’été et Vacances apprenantes ? Quel avenir pour les postes créés, par exemple pour la mise en place des bataillons de la prévention ?

Madame la ministre, malgré le plan de relance et le budget 2022, les maires dénoncent une non-assistance à territoires en danger et un décrochage de la République. Qu’avez-vous à répondre à cela ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nadia Hai, ministre déléguée auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargée de la ville. Madame la sénatrice Viviane Artigalas, j’ai beaucoup de choses à répondre à cela. Il ne m’est donné que deux minutes, mais nous aurons l’occasion de poursuivre nos échanges et je le ferai toujours avec un immense plaisir.

Sur la question de l’engagement de l’État, du Président de la République et du Gouvernement dans les quartiers, je ne peux que vous contredire. En effet, nous avons mobilisé 131 millions d’euros supplémentaires pour mettre fin à dix années d’hémorragie dans les budgets de la politique de la ville – dix années ! Nous y avons mis fin en augmentant ces budgets de 131 millions d’euros.

De même, les 3,3 milliards d’euros annoncés par le Premier ministre lors d’un comité interministériel des villes sont-ils le signe d’un désengagement de l’État ? Je ne le crois pas !

Ce ne sont pas des milliards d’euros lancés en l’air. Ils correspondent à 78 propositions directes et concrètes dirigées vers nos territoires.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous êtes en lien avec les élus. Je le suis tout autant que vous, au sein du ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Que nous disent les élus ? Ils nous disent que nous avons inventé des dispositifs qu’ils attendaient depuis longtemps (Mme Marie-Noëlle Lienemann proteste.) :…

M. Laurent Burgoa. Ce n’est pas vrai !

Mme Nadia Hai, ministre déléguée. … les cités éducatives, les cités de l’emploi, Action cœur de ville, Cœur de quartier. Vous avez évoqué cette dernière initiative, mais elle porte un autre nom, celui de Quartiers productifs.

Nous avons également mis en œuvre les tiers-lieux, les maisons France Services. Oui, madame la sénatrice, le visage de nos quartiers change, et il change avec les élus locaux !

Ce à quoi nous travaillons avec eux, ce sont non seulement des dispositifs, mais aussi une nouvelle manière de faire, une nouvelle forme de contractualisation qui permet à l’action de l’État de gagner en agilité et en efficacité, en lien avec les collectivités locales.

Ne vous en déplaise : oui, l’État est engagé ; oui, le Président de la République a respecté sa promesse d’engagement en faveur des quartiers. Mesdames, messieurs les sénateurs, soyez assurés que nous continuerons ce travail, je l’espère avec vous, en tout cas aux côtés des élus locaux. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour la réplique.

Mme Viviane Artigalas. Madame la ministre, c’est étonnant, car vous semblez croire ce que vous dites. Les informations qui nous parviennent des quartiers font pourtant état d’une tout autre réalité.

Dans de nombreux quartiers, les maires nous parlent de situations catastrophiques dues à la crise et aux difficultés qu’ils rencontrent. Or vous n’avez pas de stratégie globale pour y répondre. Les dispositifs que vous mettez en œuvre ne sont pas pérennes : ils ne restent pas et bénéficient de peu de financements.

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nadia Hai, ministre déléguée. Vous avez raison de le souligner, la question de la non-pérennité des dispositifs se pose. La commission sur la nouvelle génération des contrats de ville, que j’ai installée voilà quelques semaines et au sein de laquelle siègent d’ailleurs certains sénateurs, vise précisément à réfléchir à la pérennisation de ces dispositifs qui sont, rappelons-le et reconnaissons-le tous, plébiscités par les élus locaux.

Oui, nous réfléchissons à leur pérennisation. Nous aurions pu remettre à plus tard et nous désengager de cette responsabilité en la laissant au nouvel exécutif qui se mettra en place en 2022, mais nous avons pris nos responsabilités : nous avons ouvert une concertation à grande échelle impliquant les associations d’élus et les associations présentes sur le terrain, pour pérenniser ces dispositifs et réfléchir à la meilleure façon d’intervenir dans nos quartiers, particulièrement dans les territoires les plus fragiles.

Mme le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas.

Mme Viviane Artigalas. Je suis d’accord avec vous sur le fait que les budgets ont augmenté, mais je rappelle tout de même que l’État ne finance toujours pas l’Agence nationale pour la rénovation urbaine à la hauteur de ses engagements.

Sur cinq ans, on comptabilise 80 millions d’euros versés, contre 200 millions d’euros annoncés. Peu de financements sont en outre assurés en 2022, comme je l’ai déjà dit.

Vous avez déployé des dispositifs de droit commun sous forme d’appels à projets, alors que les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) auraient besoin de plus de crédits territorialisés en fonction de leurs besoins spécifiques et de plus de concertation.

Vous avez mentionné les bataillons de la prévention. Vous semblez oublier que l’éducation spécialisée était une compétence des départements.

Mme Nadia Hai, ministre déléguée. Elle l’est toujours !

Mme Viviane Artigalas. Dans les Yvelines, vous avez mis en place des postes, alors que le département en avait déjà créé, sans aucune concertation avec ses élus !

Mme Nadia Hai, ministre déléguée. Ce n’est pas vrai !

Mme Viviane Artigalas. Votre bilan n’est pas bon, madame la ministre. Vous n’avez aucune ambition pour la politique de la ville. Les dernières réponses non pérennes apportées en la matière n’y changeront rien. (M. François Patriat proteste.)

Mme le président. La parole est à M. Frédéric Marchand.

M. Frédéric Marchand. Madame la ministre, jusqu’à la fin de l’année 2017, j’étais maire d’une commune de plus de 18 000 habitants, Hellemmes, en périphérie immédiate de la ville de Lille, commune qui compte deux quartiers inscrits en géographie prioritaire de la politique de la ville.

Comme nombre de mes collègues, j’ai été régulièrement confronté à une équation impossible à résoudre – elle n’est d’ailleurs toujours pas résolue –, celle du nombre de demandes de logements face au taux de vacance dans le patrimoine locatif, notamment dans celui des bailleurs sociaux.

La construction de logements est bien évidemment une réponse à ce problème. La commission pour la relance durable de la construction de logements, sous la présidence de M. François Rebsamen, a remis les deux tomes de son rapport, lequel formule nombre de propositions visant à simplifier l’acte de construire et à accélérer les procédures d’urbanisme.

Il me semble cependant qu’une partie de la réponse aurait pu et pourrait encore être apportée si un véritable travail d’inventaire était effectué et si des moyens étaient mis en place pour régler, ou tenter de régler, le sujet de la concordance entre typologie du logement et composition de la cellule familiale.

Pour préparer ce débat, je me suis rapproché d’un bailleur social nordiste, aujourd’hui propriétaire de près de 73 000 logements et qui loge 171 000 personnes – soit un ratio de 2,1 personnes par logement, ce qui est fort peu au regard de la typologie des logements proposés.

Combien d’exemples avons-nous dans nos communes et dans nos QPV de logements de type 4 ou 5, hier encore occupés par une famille de quatre ou cinq, voire six personnes, et qui, au fil des années, ont vu leurs occupants partir en raison des aléas de la vie, pour ne plus compter finalement qu’un seul occupant ? Dans le même temps, combien de familles voyons-nous passer dans nos permanences à la recherche d’un logement abordable ?

Nous, bailleurs sociaux et élus, sommes totalement démunis face à ces situations. Nous pouvons seulement inciter les occupants à changer de logement pour une typologie plus adaptée, mais chacun sait bien qu’il est plus que difficile de quitter son logement, voire son quartier, dans lequel toute une vie a pu s’écrire.

Madame la ministre, vous savez comme moi que les bailleurs sociaux ont bien des missions à remplir, notamment pour faire du vivre ensemble une réalité dans nos QPV, et que la question de l’adéquation du logement avec le nombre d’occupants ne peut être résolue faute de moyens et de dispositifs financiers, ces derniers restant à imaginer.

Madame la ministre, ma question est simple : pouvez-vous me dire si cette piste est aujourd’hui à l’agenda ?

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nadia Hai, ministre déléguée auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargée de la ville. Monsieur le sénateur Frédéric Marchand, vous avez raison : améliorer la fluidité et la mobilité au sein du parc social et optimiser l’occupation sont autant de moyens d’améliorer également l’accès au logement social pour les demandeurs.

La loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite ÉLAN, comporte plusieurs avancées visant à favoriser davantage la mobilité au sein du parc social.

Tout d’abord, elle a généralisé la gestion en flux des contingents de réservataires dans le parc social pour les bailleurs. Cette disposition vise à améliorer l’adéquation entre l’offre et la demande et à élargir la palette de choix pour les ménages, en fonction de leurs besoins.

Cette loi a également instauré dans les territoires tendus une révision régulière, tous les trois ans, de certaines situations, en particulier des situations de sous-occupation dans le parc social, par la commission d’attribution des logements et d’examen de l’occupation des logements, la Caleol. Cet examen cible notamment les situations de sous-occupation, sur la base de l’avis émis par la commission. Le bailleur procède ensuite, avec le locataire, à un examen de sa situation et des possibilités d’évolution de son parcours résidentiel.

Toutefois, la situation de nos QPV mérite une attention particulière, vous l’avez souligné, monsieur le sénateur. Il est important de maintenir dans ces parcs sociaux des occupants historiques aux revenus plus élevés que ceux des nouveaux entrants, afin de favoriser le vivre ensemble. C’est pourquoi les dispositions législatives qui suppriment le bénéfice du maintien dans les lieux pour les locataires en situation de sous-occupation dans les zones tendues ne s’appliquent pas dans les QPV.

L’enjeu est plutôt de stabiliser l’occupation et de redonner de l’attractivité à ces quartiers et au patrimoine social, en le réhabilitant. Cela permettra aussi de répondre au nombre parfois important de refus dont font l’objet les propositions de logement dans certains QPV.

Afin de faciliter la mobilité dans le parc social, nous continuons à encourager les bonnes pratiques et les démarches proactives. Je pense à des actions à l’initiative des organismes de logement social ou de réservataires, par exemple dans le cadre de démarches interbailleurs, à l’instar de la bourse Échanger Habiter en Île-de-France.

Vous le voyez, monsieur le sénateur : le Gouvernement est pleinement disposé à étudier toutes les solutions possibles afin de rendre toujours plus adéquate l’offre de logement.

Mme le président. La parole est à M. Dany Wattebled.

M. Dany Wattebled. Madame la ministre, en économie, il est une loi intangible : la rareté crée la valeur. Quand il y a abondance, les prix baissent ; quand il y a carence, les prix augmentent.

Le foncier n’échappe pas cette règle. Cependant, il se distingue par une spécificité notable : ce sont les pouvoirs publics qui décident de sa disponibilité sur le marché.

En l’occurrence, la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite Climat et résilience, que le Parlement a adoptée l’été dernier, a changé la donne.

À travers l’objectif affiché de « zéro artificialisation nette » des sols en 2050, le Gouvernement a organisé la rareté chronique du foncier. En effet, la stratégie que le Gouvernement a adoptée restreindra drastiquement les surfaces constructibles. Mécaniquement, il est facile d’anticiper une hausse spectaculaire des prix dans les prochaines années.

Cette donnée est évidemment clé pour rebâtir une politique du logement ambitieuse.

Comment faciliter l’accès au logement, que ce soit par l’offre de logements sociaux ou par l’accès à la propriété, dès lors qu’une pénurie s’annonce sur la première des matières, à savoir le foncier disponible ?

Il faut ajouter à cela toutes les contraintes légales qui s’accumulent pour les constructeurs. Je pense évidemment aux obligations environnementales, notamment à la loi sur l’eau et les milieux aquatiques qui complique les initiatives de nos entrepreneurs.

Il faut également ajouter à cela l’augmentation des coûts liée à la réglementation thermique 2020, à laquelle les entrepreneurs peinent encore à s’adapter. Dans le même temps, la main-d’œuvre demeure très chère et les prix des matériaux s’envolent.

Madame la ministre, comment le Gouvernement compte-t-il enrayer cette mécanique implacable du renchérissement ? Comment garantir aux Français des logements abordables ?

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nadia Hai, ministre déléguée auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargée de la ville. Monsieur le sénateur Dany Wattebled, comme je le soulignais précédemment, notre politique du logement repose sur un double impératif : l’accès de tous les Français au logement abordable et la transition écologique du parc.

Nous avons choisi de cibler de front ces deux objectifs, car il est essentiel de réduire le rythme auquel nous bétonnons nos sols tout en construisant mieux, là où se trouve le besoin de logements.

Je rappelle que l’objectif « zéro artificialisation nette » doit être atteint en 2050, de façon progressive, et non pas dès à présent. La loi Climat et résilience, qui fixe la trajectoire de réduction du rythme d’artificialisation des sols, permet, en l’état, d’avoir 140 000 hectares constructibles pour les dix prochaines années sur le territoire national. Cela est très important, vous en conviendrez.

Vous mentionnez également les coûts supplémentaires qu’induirait la nouvelle réglementation environnementale 2020 et le temps d’adaptation nécessaire pour les entrepreneurs.

Je rappelle que cette réglementation a fait l’objet d’une concertation intense avec l’ensemble des professionnels. Les coûts induits sont très faibles : environ 3 % pour le jalon 2022. Ils sont en outre à mettre en regard des économies générées sur les factures d’énergie des ménages.

Enfin, l’accès au logement abordable est une priorité du Gouvernement. Nous avons pris plusieurs mesures historiques afin d’accompagner le secteur du logement, à court terme face à la crise sanitaire, mais aussi à moyen terme, comme je l’ai évoqué au début de ce débat. Je ne les détaillerai pas de nouveau.

En définitive, nous luttons contre l’étalement urbain, la disparition des terres agricoles, des forêts et des espaces naturels. En même temps, nous favorisons l’accès de tous à un logement de qualité et abordable.

Mme le président. La parole est à M. Dany Wattebled, pour la réplique.

M. Dany Wattebled. Madame la ministre, vos réponses me conviennent à moitié. Je vous donne rendez-vous dans quelques années : nous verrons le nombre de logements construits. Je pense que le logement fera l’objet d’une véritable inflation. Nous le constatons d’ailleurs déjà aujourd’hui.

Mme le président. La parole est à Mme Marta de Cidrac. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marta de Cidrac. Madame la ministre, la crise du logement est une crise tout aussi quantitative que qualitative.

Il y a six mois, vous avez lancé « Mieux habiter demain en ville », dont l’un des axes de travail était consacré à la qualité du logement.

À cette occasion, les résultats de l’enquête Qualitel ont été publiés. Cette enquête pointe une baisse des hauteurs sous plafond, le manque de rangements et le manque d’espaces extérieurs.

Une table ronde sur la qualité du logement a donné lieu à la présentation d’un référentiel, qui met en avant un critère essentiel : une surface minimale par type de logement. Ce référentiel souligne également les questions de volume, d’accès à un espace extérieur et de qualité de ventilation – preuve que la qualité du logement est un sujet multifactoriel.

Au-delà de la qualité du neuf, l’amélioration de l’existant reste un véritable problème. Plusieurs mesures ont été prises, mais il manque un mouvement global allant au-delà des efforts individuels. Récemment, plusieurs instances ont fait des propositions pour mutualiser les efforts de rénovation à l’échelle des copropriétés, voire des quartiers, afin de diminuer les coûts et de massifier les gains des rénovations – propositions que vous regardez, je l’espère, avec intérêt.

Aussi, madame la ministre, quelles suites comptez-vous donner au référentiel du logement de qualité ? Comment faciliter les dynamiques collectives de rénovation de l’existant ?

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nadia Hai, ministre déléguée auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargée de la ville. Madame la sénatrice Marta de Cidrac, vous l’avez justement rappelé, la crise sanitaire a renforcé la dimension essentielle du logement pour l’ensemble de nos concitoyens.

Se sentir bien chez soi, alors que l’on est amené à y passer de plus en plus de temps, à y travailler, à y vivre différemment, doit être un enjeu majeur pour nos politiques publiques.

C’est pour cela que la ministre Emmanuelle Wargon a confié à François Leclercq et Laurent Girometti la mission de construire un référentiel de la qualité d’usage du logement, mue par la conviction que nous devions nous intéresser à la vie dans les logements, mais qu’il fallait le faire de façon différente, sans imposer de nouvelles normes réglementaires.

L’État a choisi d’accompagner concrètement cette démarche. Certains critères du référentiel seront ainsi utilisés pour le paramétrage du dispositif Pinel à compter de 2023, notamment la présence systématique d’un espace extérieur ou la double exposition à partir du T3.

Les critères de qualité doivent également trouver une traduction opérationnelle dans nos projets.

La qualité du logement, c’est aussi l’affaire des maires. Le ministère du logement est ainsi plutôt favorable aux chartes locales de qualité mises en œuvre par certaines collectivités, à condition de construire plus, de construire mieux, et non de construire moins.

Nous voyons beaucoup d’exemples vertueux dans certaines villes, comme la charte récemment signée par la ville de Nice. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Il est nécessaire d’engager un travail de fond sur ces solutions locales, afin d’identifier les bonnes pratiques, mais aussi de pointer leurs écueils. Le référentiel sur la qualité d’usage du logement pose aussi les bases de ce travail.

Vous le voyez, madame la sénatrice, le Gouvernement soutient l’amélioration de la qualité des logements, car il s’agit de l’un des leviers à actionner pour relancer la construction et rendre l’habitat collectif désirable.

Le Gouvernement s’attache particulièrement à créer les conditions nécessaires pour que ce logement durable, de qualité, soit construit en quantité suffisante.

Mme le président. La parole est à Mme Marta de Cidrac, pour la réplique.

Mme Marta de Cidrac. Madame la ministre, ma question portait essentiellement sur l’habitat existant, c’est-à-dire les logements qui existent déjà, et sur les efforts prévus pour l’améliorer.

À travers la table ronde que j’ai citée tout à l’heure et l’étude Qualitel, plusieurs sujets sont clairement pointés du doigt. Au-delà des rapports annoncés – vous avez évoqué une nouvelle commission, qui donnera lieu à des conclusions et des rapports nouveaux –, je souhaite savoir quelles actions vous comptez entreprendre, là, maintenant, tout de suite, pour y répondre.

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nadia Hai, ministre déléguée. Pour ne pas vous laisser sans réponse, madame la sénatrice, je précise qu’Emmanuelle Wargon a lancé un certain nombre de travaux et de rapports qui seront rendus dans les semaines à venir. Je ne doute pas que ce sujet sera abordé avec elle.

En attendant, s’agissant de ce que nous faisons pour le parc existant, j’ai mentionné plusieurs mesures dans mon propos liminaire ainsi que dans certaines de mes précédentes réponses. Nous y travaillons également dans le cadre du plan de relance, à travers les investissements destinés à l’entretien du parc existant.

Mme le président. La parole est à Mme Marta de Cidrac.

Mme Marta de Cidrac. Je lirai avec beaucoup d’attention le rapport dont vous parlez, madame la ministre, mais, là encore, il s’agit d’un rapport. J’espère vraiment qu’à un moment donné nous nous attellerons aux actions, sur ce sujet qui concerne énormément de Français.

Nous sommes en période de pandémie. Tout le monde parle du télétravail ; or nous savons que nous ne sommes pas égaux en la matière, notamment dans cette conjoncture sanitaire particulière. Nous comptons sur vous malgré tout !

Mme le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

Mme Sophie Taillé-Polian. Madame la ministre, je tiens à revenir sur l’utilisation du plan de relance pour les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Il n’aura pas fallu moins qu’un appel très solennel de nombreux maires pour qu’une petite partie du plan de relance soit fléchée vers ces quartiers. Il aura aussi fallu, d’ailleurs, dès le début du quinquennat, en 2017, un appel de maires sur l’initiative du maire de Grigny dénonçant la fin des contrats aidés, qui a fait beaucoup de mal dans les QPV.

À l’adresse du 14 novembre 2020 lancée par des maires de villes en situation difficile, demandant qu’une partie du plan de relance leur soit destinée, une réponse positive a été apportée par le Premier ministre. Des crédits leur ont donc été alloués.

Cependant, si l’on regarde la nature de ces crédits, l’on s’aperçoit que, si un milliard d’euros a bien été mobilisé, il est venu financer un certain nombre de projets qui répondaient à toutes les autres ambitions du plan de relance.

L’objectif de réhabilitation des quartiers prioritaires de la politique de la ville ne figure d’ailleurs pas parmi les grands objectifs affichés dans le tableau de bord du plan de relance figurant sur le site du Gouvernement. Il n’est pas question non plus de leur faire reprendre le train de la République, comme certains voudraient le faire – je précise qu’ils sont à mon sens pleinement au cœur de la République.

L’objectif de réhabilitation des quartiers prioritaires n’est donc pas clair et net : il n’existe pas en tant que tel. C’est au fur et à mesure des financements des différents autres projets que ce milliard d’euros a été déployé.

Il n’existe donc pas d’ambition en la matière. Ce financement est simplement l’occasion de soutenir d’autres projets, sous prétexte de financer la politique de la ville.

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nadia Hai, ministre déléguée auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargée de la ville. Madame la sénatrice Taillé-Polian, vous évoquez le plan de relance et la promesse tenue par le Premier ministre, lors du comité interministériel des villes, de flécher un milliard d’euros de ce plan vers les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

De quoi parlons-nous lorsque nous parlons de quartiers prioritaires ? Nous parlons de 1 514 quartiers, de 859 communes, à qui nous dédions ce milliard d’euros tiré du plan de relance.

Si nous ne l’avons pas fait, c’est parce que nous savions pertinemment que ces quartiers bénéficieraient de bien plus. Cela s’est d’ailleurs confirmé, puisque plus de 1,2 milliard d’euros ont déjà été engagés, alors que le plan de relance n’est pas terminé.

De plus, quand vous parlez de l’investissement dans les quartiers, vous semblez oublier toute la politique qui est menée parallèlement. La politique du Gouvernement en faveur des quartiers ne se limite absolument pas au plan de relance !

Quand vous parlez de la réhabilitation des quartiers, vous occultez totalement la réhabilitation prévue par l’ANRU, que nous avons portée à 12 milliards d’euros, contre 5 milliards d’euros accordés en 2014 par le précédent gouvernement. (Mmes Sophie Taillé-Polian et Marie-Noëlle Lienemann protestent.)

C’est bien la preuve que le Gouvernement agit pour la réhabilitation des quartiers.

Quand vous parlez du plan de relance, vous omettez également toutes les actions déployées en matière de prévention et d’éducation. Les cités éducatives représentent ainsi 200 millions d’euros investis dans le champ de l’éducation dans ces 1 514 quartiers.

Lorsqu’il est question des investissements et de l’engagement de l’État et du Gouvernement dans les quartiers prioritaires, il convient donc de cibler le sujet et de ne surtout pas occulter toute la politique gouvernementale menée en la matière – je vous en saurai gré.