M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Concernant les véhicules électriques qui peuvent se recharger seuls, monsieur Genet, rappelons que l’obligation prévue à cet article ne porte que sur la moitié des emplacements des parkings, ce qui laisse la possibilité d’accueillir de tels véhicules dans l’autre moitié. Compte tenu de l’équipement en véhicules électriques que nous prévoyons aujourd’hui, il semble que ce soit tout à fait équilibré à horizon de 2035.

Quant à savoir de quelle manière nous intégrons ces technologies dans les stratégies de décarbonation, à ce stade, comme vous l’imaginez, nous nous appuyons sur les trajectoires élaborées à partir de textes tels que le paquet législatif européen Fit for 55, qui donnent des indications de montée en puissance progressive.

Nous nous en servons pour élaborer des hypothèses, certes un peu frustes au vu de la quantité de paramètres qu’il faut intégrer dans la stratégie nationale bas-carbone, mais qui nous permettent d’avoir une idée des ordres de grandeur, de vérifier si l’ensemble de nos trajectoires peuvent être bouclées et de déterminer où sont les impasses. Voilà comment nous procédons.

On sait qu’un certain nombre de technologies vont connaître un usage propre, mais on ne peut pas aujourd’hui savoir laquelle de ces technologies gagnera, si je puis dire.

J’avais évoqué, dans un autre contexte, la technologie vehicle to grid, autre point intéressant au sein de notre travail sur la décarbonation.

Toutefois, ces technologies n’auront à l’évidence pas d’impact avant 2030. Il faut donc, en premier lieu, élaborer des trajectoires raisonnablement robustes jusqu’à 2030 environ, et, en second lieu, faire preuve autant que possible de neutralité technologique, ce qui n’est pas toujours évident, pour éviter d’injurier l’avenir et de passer à côté d’une technologie qui s’accélérerait et serait en fin de compte la technologie gagnante.

Précisons enfin que nos trajectoires sont révisées tous les cinq ans.

Pour les motifs que j’ai déjà exposés, l’avis du Gouvernement est défavorable sur l’ensemble des amendements en discussion.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 40 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 467 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 366 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 368 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 248 rectifié bis et 476 rectifié bis.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 83 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Corbisez, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :

Alinéas 2, 12 et 14

Remplacer le mot :

gestionnaire

par le mot :

propriétaire

La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez.

M. Jean-Pierre Corbisez. Cet amendement tend à s’inscrire dans le droit fil de la dernière intervention de Mme la ministre. Son examen va me permettre de rassurer notre rapporteur, car c’est un amendement de clarification.

Le présent article crée de nouvelles obligations pour les parcs de stationnement extérieurs, qui devront être équipés d’ombrières photovoltaïques sur au moins la moitié de la surface des emplacements de stationnement.

Le présent amendement vise à désigner le propriétaire du parc de stationnement comme débiteur de ces obligations, la responsabilité lui incombant de fait. Même si, dans les différents cas de figure, c’est in fine le propriétaire qui est compétent ou responsable, il semble utile de le clarifier dans la nouvelle rédaction de l’article.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Mandelli, rapporteur. Je comprends bien l’intention des auteurs de cet amendement, qui vise à faire porter la responsabilité de l’application de l’article sur le propriétaire d’un parc de stationnement, plutôt que sur son gestionnaire.

Toutefois, je ne mesure pas complètement les implications qu’aurait cette modification, notamment pour les collectivités territoriales qui font gérer leurs parcs de stationnement par des tiers, au moyen d’une délégation de service public.

Je souhaite donc entendre l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Je veux expliquer pourquoi nous avons fait figurer ici le gestionnaire, plutôt que le propriétaire.

Selon notre logique, il convient que le coût de la mise en conformité avec les obligations prévues à cet article soit supporté par la personne tirant directement un bénéfice de l’exploitation du parc de stationnement.

Si le parc est géré par un tiers, c’est donc lui qui devra assumer l’obligation prévue, dont le coût sera compensé par les revenus de l’installation. Si le parc n’est pas géré par un tiers, mais directement par son propriétaire, c’est bien sur ce dernier que pèsera l’obligation. Il me semble donc que le terme de gestionnaire est plus précis et moins réducteur que celui de propriétaire.

Le Gouvernement vous invite donc, monsieur le sénateur, à retirer cet amendement.

M. le président. Monsieur Corbisez, l’amendement n° 83 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Corbisez. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 83 rectifié est retiré.

L’amendement n° 536, présenté par M. Houllegatte, Mme M. Filleul, M. Gillé, Mme Préville, MM. Kanner, Montaugé et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Devinaz et Jacquin, Mmes Artigalas et Briquet, M. Cardon, Mmes Conconne et Jasmin, MM. Kerrouche, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, M. Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Supprimer les mots :

, notamment lorsque celui-ci résulte de difficultés d’approvisionnement en procédés de production d’énergies renouvelables

La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte.

M. Jean-Michel Houllegatte. Par cet amendement, nous souhaitons relancer quelque peu le débat sur la filière photovoltaïque.

La commission, dans sa grande lucidité, accorde aux gestionnaires de parkings un délai supplémentaire pour s’acquitter des obligations prévues à cet article dans le cas d’un retard qui ne leur serait pas imputable, « notamment lorsque celui-ci résulte des difficultés d’approvisionnement en procédés de production d’énergies renouvelables ». On est donc là sur une position déjà quelque peu défaitiste !

Cet amendement est un amendement d’appel, madame la ministre, au sens où nous aimerions vous entendre sur ce sujet.

Vous nous avez déjà répondu sur l’éolien offshore, dont nous aurons l’occasion de reparler à l’article 12. Je rejoins complètement votre argumentaire quant à l’existence, dans ce domaine, d’une filière française puissante, qui s’est implantée avec l’appui des collectivités locales. Malheureusement, dans le domaine du photovoltaïque, on en est loin !

Aussi, quels moyens la France se donne-t-elle véritablement pour développer une filière nationale de l’énergie photovoltaïque ?

L’objet de cet amendement d’appel est bien de poser cette question, plutôt que de battre en retraite en admettant d’avance des retards dus à l’impossibilité de fournir ces équipements.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Mandelli, rapporteur. Il est défavorable, car cet amendement tend à supprimer un apport de bon sens adopté par notre commission et par celle des affaires économiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Effectivement, M. Houllegatte soulève un vrai sujet. On a déjà constaté que notre industrie pouvait être dépendante d’un certain nombre de composants et d’équipements ; on l’a encore vu récemment dans la filière automobile avec les semi-conducteurs.

Oui, il faut développer une filière photovoltaïque, il faut qu’elle soit compétitive et il faut a minima qu’elle soit européenne, à défaut d’être française. C’est tout l’enjeu de l’alliance de l’industrie solaire photovoltaïque qu’a lancée, à l’échelle européenne, le commissaire Thierry Breton, mais cela ne va pas se faire du jour au lendemain.

Néanmoins, en attendant, il ne faut pas retarder la mise en œuvre de la décarbonation de notre économie. Je veux redire ici que la question de l’empreinte carbone importée concerne tous les secteurs. Elle doit nous amener à prendre des décisions industrielles fortes, ce que nous essayons de faire depuis plus de cinq ans maintenant, mais elle n’est pas propre au secteur des énergies renouvelables. Il faut donc avoir la même vigilance exigeante dans tous les secteurs.

Pour en revenir à cet amendement, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.

M. Cédric Vial. Je veux ajouter une pierre au débat qui vient d’être lancé sur la filière photovoltaïque.

Nous sommes tous conscients ici des enjeux du développement de cette filière et nous souhaiterions que l’on se donne les moyens d’y arriver, plutôt que de s’en tenir à des incantations.

Je viens d’un département, la Savoie, où est implanté – vous le savez probablement, madame la ministre – l’Ines, l’Institut national de l’énergie solaire, qui a été précurseur dans ce domaine. Non loin de là, à Bourgoin-Jallieu, une entreprise – Photowatt, que M. Gontard a mentionnée tout à l’heure – produisait des panneaux photovoltaïques, mais elle connaît des difficultés depuis plusieurs années. Pour cette entreprise comme pour d’autres, un appui est nécessaire, qui ne peut pas relever de la simple incantation.

La filière du silicium a aussi été mentionnée tout à l’heure. Notre région accueillait une entreprise, la seule productrice de silicium en France et en Europe, Ferropem. Or, madame la ministre, le Gouvernement a été absent lors de la fermeture de cette usine ! Aucune solution n’a été trouvée pour permettre la reprise de ce site, qui est toujours en friche, alors que les fours sont en état de marche et que le prix du silicium s’est envolé. Pourtant, une solution existait pour conserver cette filière.

Pour créer une filière, il faut du temps : trois ans ou cinq ans ne suffiront pas pour en créer une en France. Nous serons donc forcément dépendants, non pas à 34 % ou à 60 %, mais à 100 %, d’approvisionnements étrangers. On a besoin de temps et de visibilité.

Or quand de telles obligations sont imposées dans un délai aussi court, on n’offre pas de visibilité à l’industrie que l’on voudrait mettre en place et structurer ; il y a là un vrai enjeu. L’incantation est importante, mais le souhait politique que nous affirmons tous l’est tout autant, car il y a un véritable enjeu politique dans le développement de ces filières, tant pour la production que pour le retraitement d’équipements photovoltaïques.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Le milliard d’euros prévu dans le plan France 2030, qui a donné lieu à trois appels à projets pour soutenir les différentes filières d’énergies renouvelables, ce n’est pas tout à fait de l’incantation !

Les 9 milliards d’euros investis dans l’hydrogène bas-carbone, ce n’est pas tout à fait de l’incantation ! Ce sont dix projets d’usines qui sont d’ores et déjà financés et soutenus par le Gouvernement. Je ne puis donc vous laisser employer de tels mots.

S’agissant de Ferropem, rappelons que six sites risquaient de fermer en France : on en a sauvé cinq et on a maintenu toutes les productions : la fabrication de différentes qualités de silicium a été reportée sur les cinq autres sites. D’ailleurs – c’est toujours intéressant, la politique énergétique ! –, l’un des leviers qui a permis de sauver Ferropem, c’est l’Arenh, l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique ! (M. Cédric Vial le conteste.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. C’est un sujet important qui est ici évoqué. Je veux compléter le débat sur un point : on parle toujours de la construction, mais l’expérience nous apprend tous les jours qu’il faut aussi parler de la déconstruction. Ainsi des premiers panneaux photovoltaïques qui ont été installés sur nos territoires : à ce que je sache, on ne sait pas les déconstruire.

Quand on imagine un investissement, il faut penser aussi à sa fin. Autant nous devons avoir le souci de produire sur notre territoire, autant nous devons avoir celui du recyclage, en fin de vie de ces équipements : sont-ils recyclables, comment et dans quelles conditions ? C’est un sujet essentiel que personne n’aborde, alors même, je le répète, que l’on ne sait toujours pas aujourd’hui comment déconstruire les premiers panneaux solaires.

Nous nous souvenons tous de l’amiante, dont nous reparlerons tout à l’heure. Au début, tout le monde y a cru. Or, aujourd’hui, qui se retrouve dans la panade, avec des plaques de fibrociment amiantées ? C’est un sujet qu’il faut aborder dès la construction.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Monsieur Gremillet, on sait actuellement aujourd’hui très bien recycler les panneaux photovoltaïques, même les plus anciens. On sait à peu près comment s’y prendre avec le silicium.

Toutefois, revenons sur la question de la filière photovoltaïque dans son ensemble et, en particulier, sur Ferropem et la production de silicium. Madame la ministre, vous nous répondez chaque fois que vous consacrez plusieurs milliards d’euros à l’ouverture de nouvelles usines. C’est très bien, mais il faudrait peut-être déjà sauvegarder celles qui existent !

Concernant Ferropem, je veux bien que la production ait été réorientée, mais il n’empêche que l’on a perdu des sites.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Un site !

M. Guillaume Gontard. On a perdu un site de production ! Et j’espère que les autres tiendront.

La production a été réorientée, mais si l’on se place à l’échelle européenne, voire mondiale, cela a aussi abouti à conforter des sites très gourmands en carbone, du fait de l’utilisation du charbon, alors que, en France, on utilise l’hydroélectricité, une solution décarbonée. Il est important de prendre cet élément en considération.

Quant à la volonté politique, j’évoquais tout à l’heure l’usine Photowatt, à Bourgoin-Jallieu, qui n’a plus que quelque 200 salariés, contre 800 auparavant. Les pertes de compétences sont réelles…

Photowatt est une filiale à 100 % d’EDF. L’État a donc son mot à dire. Le groupe public a justement développé un très gros projet photovoltaïque non loin de là, sur l’ancien site nucléaire de Creys-Malville : 26 000 panneaux ont été installés. Or quel choix a fait EDF pour ce projet ? Elle n’a pas utilisé les panneaux produits par sa filiale, alors qu’elle pouvait totalement le faire, notamment via les marchés publics, mais a choisi des panneaux chinois.

Oui, une volonté politique pourrait s’exprimer ! Oui, madame la ministre, vous avez la main, au travers d’EDF, surtout si la part de l’État dans son capital passe à 100 %. Il y a vraiment là matière à agir rapidement, plutôt que de repousser en permanence la réponse en évoquant de nouvelles installations.

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Ce débat est important. Je suis tout à fait d’accord avec Daniel Gremillet : il faut prévoir les filières de recyclage tout de suite.

Cependant, comme l’a rappelé Guillaume Gontard, c’est déjà le cas pour le photovoltaïque. En revanche, comme j’en ai fait l’expérience dans mon département natal du Finistère, aucune filière à responsabilité élargie du producteur (REP) n’a été mise en place pour les réacteurs nucléaires uranium naturel graphite gaz, et on s’est retrouvé le bec de l’eau ! Le réacteur reste là, après trente-cinq ans, et on ne sait même pas en percer le cœur. Il faut donc bien des filières de démantèlement des productions d’énergie électrique.

Par ailleurs, il me semble que l’on doit avoir une approche prospective. Mme la ministre a évoqué le paquet Fit for 55, l’objectif européen très ambitieux de réduction de 55 % de nos émissions de carbone par rapport à 1990 d’ici à 2030 – en moins de dix ans, la moitié du chemin reste à faire.

Ce que l’on ne dit pas, c’est que ce paquet européen est ce qui va permettre d’instaurer des taxes carbone aux frontières européennes. Sans cela, selon les règles de l’OMC, c’est impossible. Or c’est cette taxe qui va permettre de remettre le coût du carbone dans le prix des importations.

Les panneaux photovoltaïques importés, notamment ceux qui viennent de Chine, ont un coût carbone bien plus important que les panneaux qui sont fabriqués ici. Avec la taxe carbone aux frontières, nos panneaux redeviendront compétitifs. Il faut avoir cela en tête dès maintenant, pour la mise en place de cette filière, qui sera demain compétitive grâce à ces évolutions.

On ne fait pas assez ce lien. J’entends parfois dire dans cet hémicycle que l’on fait un effort démesuré qui va nous affaiblir. Non ! C’est au contraire cet effort de réduction des émissions qui va nous rendre plus compétitifs, demain, sur le marché français et européen.

Enfin, monsieur Genet, même si c’est très bon, n’offrez pas de bouteille de bourgogne à vos enfants à Noël ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. La discussion de cet amendement nous permet d’évoquer cette filière industrielle. En effet, depuis hier, on débat, mais en évitant certains sujets, dont celui-ci… (M. Fabien Genet sexclame.)

Si l’on veut accélérer le développement des énergies renouvelables, il va bien falloir qu’une filière industrielle soit créée pour cela. Aujourd’hui, nous sommes mis en difficulté. Or qui dit filière industrielle dit d’abord savoir-faire et compétences. Il faut dès à présent créer un certain nombre de compétences, que nous n’avons pas. Ainsi, concernant le nucléaire, on est à l’évidence en très grande difficulté pour les savoir-faire en matière de soudure. Aussi, quelle filière professionnelle créons-nous ?

Viennent ensuite les filières industrielles d’aval – la collecte et le traitement des déchets – et, surtout, de fabrication des panneaux photovoltaïques. Il faut savoir faire tout cela. M. Gontard a tout à fait raison d’évoquer Photowatt : il s’agit d’une filiale à 100 % d’EDF, mais cette dernière a fait le choix d’aller acheter des panneaux solaires chinois ! La contradiction est complètement folle.

En matière de bilan carbone, évidemment, nos panneaux solaires sont bien plus compétitifs que ceux qui sont produits ailleurs. Mais on n’en est encore qu’aux prémices de certaines filières industrielles dans tous les secteurs énergétiques. Je ne reviendrai pas sur la vente de General Electric, mais on a fait beaucoup d’erreurs en matière énergétique ! (M. Jean-Michel Houllegatte approuve.)

Madame la ministre, il manque à ce texte une base solide : sur quelle filière industrielle allez-vous vous appuyer pour accélérer le développement des énergies renouvelables ?

M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour explication de vote.

M. Frédéric Marchand. À ce moment du débat, il faudrait arrêter avec cette autoflagellation permanente. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe CRCE.)

Le projet de loi de finances pour 2023 démontrera que la France détient tout de même, dans le domaine de la recherche, quelques fleurons qui nous laissent augurer de beaux jours.

Je veux prendre pour exemple le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), l’université Gustave Eiffel, ou encore l’IFP Énergies nouvelles (Ifpen), qui comptent parmi les instituts les mieux classés au monde en matière de dépôts de brevet. (Mme Sophie Primas sexclame.)

Les pierres existent, il suffit de les assembler ! Évidemment, la nécessité de structurer cette filière se fait sentir, mais nous ne partons pas de rien.

M. Fabien Gay. On ne part pas de rien, mais vous avez tout vendu en cinq ans !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Didier Mandelli, rapporteur. J’ai toute confiance en nos entreprises pour engager, à l’issue de la lecture de ce texte, le déploiement des filières nécessaires.

J’apporterai quelques précisions concernant la filière du recyclage des panneaux photovoltaïques.

En 2018, j’ai assisté dans les Bouches-du-Rhône à l’inauguration d’une unité de démantèlement et de recyclage de panneaux photovoltaïques, conduite par l’organisme PV Cycle – depuis lors devenu Soren. Cette filière s’inscrit dans le cadre des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP). Gérée par Veolia, elle permet de démanteler et de retraiter jusqu’à 95 % du panneau en tant que tel.

J’indique d’ailleurs à notre collègue Gontard, même s’il doit déjà en être informé, qu’une nouvelle unité sera créée en Isère, dans son département, sur la même thématique.

Plus récemment, une entreprise de l’économie sociale et solidaire, Envie 2E Aquitaine, répondant à l’appel à projets d’un éco-organisme de recyclage, a créé une usine – l’une des premières du genre en Europe – en Gironde, qui permettra également de recycler 95 % des panneaux. L’investissement consenti s’élève à 2 millions d’euros, et l’usine pourra traiter 4 000 tonnes de panneaux par an en s’appuyant sur 25 salariés en insertion.

Cette filière de recyclage existe depuis quatre ans ; elle est mature et régie par une REP. Les opérateurs sont donc tenus de financer la collecte, le démantèlement et le recyclage des panneaux, ce qui est plutôt une bonne nouvelle pour la France.

J’ai pu constater de mes propres yeux, en tant que président du groupe d’études sur l’économie circulaire du Sénat, l’émergence de cette filière il y a quatre ans.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Je serai très rapide, car M. le rapporteur a tout dit : la recyclabilité des panneaux photovoltaïques est de l’ordre de 95 %. Un éco-organisme est en charge de la filière depuis 2015, et des entreprises se développent donc sur le territoire : 15 000 tonnes ont déjà été recyclées, ce qui est plutôt une bonne nouvelle.

Je veux rassurer M. Dantec : nous ne sommes pas inactifs s’agissant de l’organisation d’une filière de démantèlement des centrales nucléaires. En effet, certaines d’entre elles sont en cours de démantèlement, avec des activités et une maîtrise qui sont françaises. (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.)

M. Fabien Gay. Tout a été cassé !

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Tout n’est pas terminé, mais des centrales graphite-gaz ont déjà été démantelées ou sont en train de l’être. (M. Ronan Dantec le conteste.)

La question des compétences se pose pour le nucléaire, mais aussi pour les énergies renouvelables. Des contrats stratégiques de filières existent dans ces différents secteurs industriels, pour lesquels nous menons des actions de formation et de montée en compétences. Depuis deux ans, des bourses spéciales sont accordées pour orienter les élèves vers le nucléaire. Nous formons du CAP jusqu’au BAC+5, puisque nous savons que nous aurons besoin de tous les métiers pour relancer un programme nucléaire et pour accompagner les grandes opérations – grand carénage, etc.

Nous sommes pour ces métiers dans une phase de recrutement importante, qui se déroulera au cours des vingt prochaines années.

Enfin, je ne suis pas certaine que Photowatt soit l’alpha et l’oméga de notre stratégie solaire. Dès 2010, au Fonds stratégique d’investissement, j’ai travaillé sur le dossier de sauvetage de cette entreprise ; j’ai fait de même à la Caisse des dépôts et consignations et, par la suite, quand je suis devenue ministre de l’industrie.

Peut-être doit-on se poser une question plus profonde : comment poser des briques technologiques sur la filière solaire afin de disposer de panneaux solaires compétitifs, en tenant compte des caractéristiques du site France en termes de prix de l’énergie, de coût du foncier et de réglementation…

En effet, pour mener nos projets, comme faire venir des investisseurs étrangers – je pense à REC Solar en Moselle –, nous n’avons pas les mêmes procédures d’accueil que d’autres pays. Je vous renvoie notamment à la lecture très intéressante du Inflation Reduction Act, récemment produit par le gouvernement américain, qui, sur le plan du soutien financier, déroule littéralement le tapis rouge aux industriels des énergies renouvelables.

Le commissaire européen Thierry Breton s’est d’ailleurs emparé de cette question, qui soulève, à l’échelle européenne comme au niveau français, de véritables interrogations sur notre stratégie d’accompagnement des industriels. En effet, au-delà de la R&D et de l’innovation, sur lesquelles nous sommes effectivement assez solides, nous devons permettre à ces derniers de construire des sites.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 536.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 296, présenté par M. Dantec, est ainsi libellé :

Alinéa 14

1° Remplacer les mots :

peut prononcer

par le mot :

prononce

2° Remplacer le mot :

année

par le mot :

mois

3° Remplacer les mots :

dans la limite du plafond de 10 000 €

par les mots :

à hauteur de 50 euros par emplacement proposé par ce parc de stationnement

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Nous avons tous compris l’enjeu pour la France d’un développement rapide de la production photovoltaïque et de la nécessaire mise en place de filières industrielle et de formation – nous avons déjà une filière de recyclage.

Le dispositif dont nous discutons comporte une extrême faiblesse : la contrainte prévue pour les exploitants qui refusent d’équiper leur parking n’est pas assez dissuasive, avec, dans la rédaction actuelle du texte, une amende plafonnée à 10 000 euros pour les contrevenants.

Si je n’étais pas opposé à l’amendement visant à autoriser une certaine souplesse pour les très grands parkings des aéroports, il est toutefois évident, vu les enjeux, qu’une amende de 10 000 euros ne fera pas faire à l’exploitant d’un très grand parking ce qu’il n’a pas envie de faire !

Pour remédier à cette très grande faiblesse du texte, nous avons repris la calculette : afin que la somme de l’amende soit liée à la surface – 10 000 euros ne pèsent pas de la même manière sur un petit parking ou sur un immense parking – et que la contrainte soit à peu près calculée selon le coût d’investissement, nous proposons une somme de 50 euros par place de parking, soit environ 10 % du coût de l’investissement par an. Le niveau de contrainte serait alors acceptable.

Par ailleurs, j’invite Mme la ministre à relire le dernier communiqué de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) sur les centrales graphites-gaz : les caissons seront démontés en 2055, lorsque nous disposerons d’un retour d’expérience sur le premier d’entre eux… Nous sommes donc extrêmement loin du démontage de ce type de centrales.