compte rendu intégral

Présidence de M. Alain Richard

vice-président

Secrétaires :

Mme Françoise Férat,

M. Joël Guerriau.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Création d’une commission spéciale

M. le président. M. le président du Sénat n’a été saisi d’aucune opposition par le Gouvernement ou le président d’un groupe dans le délai prévu à l’article 16 bis de notre règlement à la demande de création d’une commission spéciale sur la proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie.

En conséquence, cette proposition de loi est renvoyée pour son examen à une commission spéciale.

3

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

mise en œuvre effective de l’assistance médicale à la procréation

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, auteur de la question n° 061, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.

M. Alain Milon. La loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique a ouvert l’assistance médicale à la procréation (AMP) aux couples de femmes et aux femmes célibataires et a institué la possibilité de congeler leurs gamètes sans motif médical.

Ce droit très attendu s’avère difficile à mettre en œuvre.

En effet, le code de la santé publique réserve le droit de procéder au prélèvement, au recueil et à la conservation des gamètes aux seuls établissements publics de santé et établissements de santé privés à but non lucratif habilités.

L’ouverture des techniques d’AMP à toutes les femmes entraîne une forte augmentation de l’activité médicale, et tant mieux ! Elle accroît le nombre de demandes de sperme et une pénurie de dons de gamètes est redoutée, principalement causée par la levée partielle de l’anonymat des donneurs.

De ce fait, les centres d’AMP risquent de ne plus être en mesure de satisfaire l’ensemble des demandes et, d’ores et déjà, les délais d’attente pour la prise en charge des patientes ont largement augmenté, faute de moyens supplémentaires.

Certes, l’article L. 2141-12 du code de la santé publique prévoit que, « par dérogation, si aucun organisme ou établissement de santé public ou privé à but non lucratif n’assure ces activités dans un département, le directeur de l’agence régionale de santé peut autoriser un établissement de santé privé à but lucratif à les pratiquer », sous certaines conditions. Mais cela ne répond nullement aux besoins liés à l’afflux de demandes.

J’aimerais savoir s’il existe une possibilité d’élargir aux établissements de santé privés à but lucratif, en supprimant la condition dérogatoire, le droit de pratiquer prélèvement, recueil et conservation de gamètes, en leur imposant évidemment les mêmes contraintes et obligations qu’aux autres établissements.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de lautonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées. Monsieur le sénateur Milon, le ministre de la santé, François Braun, regrette de ne pouvoir être présent ce matin. Il m’a priée de vous fournir les éléments de réponse suivants.

La loi du 2 août 2021 relative à la bioéthique étend l’accès de l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes et aux femmes non mariées. C’est une avancée sociétale majeure.

Le nombre de demandes émanant de couples de femmes et de femmes non mariées se situe à un niveau très supérieur à ce qui avait été anticipé. Sur le premier semestre 2022, plus de 9 000 demandes ont été enregistrées, alors que l’hypothèse la plus haute envisagée dans l’étude d’impact de la loi s’établissait à 4 000.

Le stock de gamètes fait l’objet d’enquêtes régulières de l’Agence de biomédecine, tout comme le niveau d’activité, les délais de prise en charge et les moyens engagés. Il n’y a, à ce jour, aucune pénurie de spermatozoïdes à déplorer, le nombre de donneurs continuant à s’accroître, à la faveur notamment des campagnes de sensibilisation.

Le Gouvernement a par ailleurs mis en place un financement exceptionnel en aide à la contractualisation de 7,3 millions d’euros en 2021 à destination des centres, pour leur permettre de faire face à l’afflux de demandes. Cet accompagnement financier s’est poursuivi en 2022 et il est pérennisé en 2023 sous la forme d’une mission d’intérêt général AMP.

Ces mesures ont permis de limiter la hausse des délais d’accès à une AMP, ceux-ci étant passés à 13,8 mois fin juin 2022, contre 12 mois en décembre 2021. J’ajoute que le Gouvernement lance actuellement des concertations pour optimiser l’offre, à législation constante, et réduire les délais d’attente.

En ce qui concerne la place du secteur privé lucratif, je rappelle que la structuration du secteur de l’AMP est fondée sur le régime de la gratuité et du volontariat du don. Seuls les établissements publics ou privés non lucratifs peuvent être autorisés à pratiquer le don de gamètes ou d’embryons. Il en est de même pour l’activité d’autoconservation sans motif médical.

Doit-on faire évoluer cette législation ? La question peut se poser, mais il faudra conserver le régime de la gratuité et du volontariat.

conséquences de l’application du décret n° 2022-257 du 22 février 2022 pour les travailleurs en situation de handicap

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, auteur de la question n° 334, adressée à M. le ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées.

M. Philippe Mouiller. Madame la ministre, ma question porte sur les conséquences de l’application du décret n° 2022-257 du 22 février 2022 pour les personnes en situation de handicap qui occupent un emploi.

En effet, les dispositions de ce décret relatif au cumul de la pension d’invalidité avec d’autres revenus et modifiant diverses dispositions relatives aux pensions d’invalidité ont des conséquences particulièrement injustes pour les travailleurs handicapés. Depuis la parution de ma question orale au Journal officiel, je suis assailli de témoignages de personnes dont la situation personnelle est directement impactée par ce texte.

Que prévoit ce décret ? Il introduit une nouvelle méthode de calcul des pensions d’invalidité avec le plafonnement au plafond annuel de la sécurité sociale (Pass) du salaire de comparaison.

Par conséquent, les personnes invalides dont les revenus d’activité dépassent le seuil voient le montant de leur pension d’invalidité suspendu, ce qui entraîne de facto – c’est le point essentiel – la suspension des rentes de prévoyance, puisque ces dernières sont assujetties au versement d’une pension d’invalidité. Pourtant, certains ont cotisé depuis de nombreuses années.

Les travailleurs en situation de handicap concernés, titulaires d’une pension d’invalidité, ont vu le versement de celle-ci suspendue depuis la parution de ce décret, au mois de septembre 2022, et ce sans en avoir été informés en amont.

En raison de la perte totale du versement de leur pension d’invalidité, certains d’entre eux se retrouvent dans une situation financière délicate. D’autres envisagent même de cesser toute activité professionnelle, alors que le travail est synonyme d’émancipation et d’indépendance financière.

Ce texte réglementaire va manifestement à l’encontre de l’esprit de la réforme, qui vise à favoriser le cumul emploi-ressources, et, plus globalement, des politiques de l’emploi pour les personnes handicapées.

Aussi, je vous serai reconnaissant de bien vouloir m’indiquer les mesures que le Gouvernement entend prendre afin de corriger, d’améliorer ce qui est vécu par les intéressés comme une véritable discrimination.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de lautonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées. Monsieur le sénateur, le sujet est très technique et complexe.

Ce décret avait effectivement pour objectif de favoriser la reprise d’activité. Auparavant, la pension d’invalidité, qui compensait la perte de gains ou de capacité de travail, était calculée sur le revenu moyen des dix meilleures années civiles de salaire. Actuellement, elle est calculée en fonction du plafond de la sécurité sociale, qui était de 3 666 euros brut par mois en 2022.

Ce salaire de comparaison est un choix de cohérence qui tient au fait que la pension d’invalidité est une prestation sociale, qui est donc fondée sur la prise en compte d’un revenu plafonné.

Par ailleurs, la réforme n’entraîne plus une réduction systématique et parfois totale du montant du dépassement avec le seuil de comparaison, puisqu’elle permet aujourd’hui un cumul partiel entre le revenu d’activité plafonné et une pension d’invalidité.

Avec ce décret, 60 000 pensionnés pour invalidité ont vu leur revenu s’améliorer, mais il y a effectivement des personnes – environ 7 000, soit un peu moins de 3 % des invalides relevant du régime général et exerçant une activité professionnelle –, qui ont connu une réduction de leur pension, comme souvent avec ce type de réforme.

Les services du ministère de la santé et de la prévention étudient actuellement ces quelques situations particulières qui nous sont remontées afin que nous puissions trouver les meilleures solutions à y apporter. Sur un plan global, le régime adopté est tout de même favorable à la majorité des personnes pensionnées.

moyens pour la généralisation des cours criminelles départementales

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, auteur de la question n° 336, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Guy Benarroche. Ma question s’adresse au garde des sceaux, ministre de la justice, et concerne la généralisation des cours criminelles départementales (CCD).

« Les délais d’audiencement sont beaucoup plus courts […]. En matière de violences sexuelles et sexistes, nous avons mis un terme aux insupportables correctionnalisations. » Telle était la réponse du garde des sceaux, le 13 décembre dernier, à une question de ma collègue écologiste à l’Assemblée nationale, Francesca Pasquini, qui l’interrogeait sur la généralisation des CCD.

Vous connaissez, madame la ministre, notre position sur les jurys populaires. Ils sont plus qu’importants, car ils concrétisent le principe du jugement par ses pairs selon une loi pénale votée par les représentants de la Nation. La généralisation d’une expérimentation non évaluée ne fait qu’aggraver nos craintes de création d’une justice spécialisée dans les violences sexistes et sexuelles qui ne dirait pas son nom, sans aucune formation spécifique.

La loi pour la confiance dans l’institution judiciaire a mis en place un comité d’évaluation, dont j’étais membre pour le Sénat.

Les résultats ne sont pas ceux qui ont été avancés : rien ne vous permet de conclure que cela a mis un terme aux correctionnalisations, que nous regrettons tout autant que vous.

Le directeur des services judiciaires a lui-même indiqué ne pas être en mesure d’établir le nombre de dossiers concernés, et l’Union syndicale des magistrats (USM) a souligné qu’aucune baisse de la charge des audiences correctionnelles n’a été constatée.

Le rapport d’évaluation conclut sur ce point que « le comité partage le constat général d’une difficulté d’évaluation de l’impact des CCD sur la correctionnalisation […] et souhaiterait qu’une étude soit menée à cette fin », proposant « de doter la direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) d’un outil statistique lui permettant d’appréhender les effets du fonctionnement des CCD sur la correctionnalisation ».

Ma question porte plus particulièrement sur un point d’attention constant que j’ai soulevé lors des travaux de ce comité : les besoins en ressources humaines inhérents à cette généralisation.

Le comité a mis en évidence les besoins en matière tant d’immobilier que de personnel, afin de ne pas enlever du temps et l’espace aux autres cours. Par ailleurs, sur la foi d’un retour d’expérimentation révélant que seulement 9 % des affaires se déroulaient devant cinq magistrats de carrière, il a souhaité « qu’une évaluation du nombre de magistrats et de greffiers rendus nécessaires au fonctionnement généralisé des CCD dans les conditions prévues par la loi soit réalisée […] avant la mise en œuvre de cette généralisation ».

La généralisation étant officiellement effective depuis le 1er janvier, pouvez-vous nous donner cette évaluation demandée des besoins en ressources humaines, des chiffres maintes fois réclamés ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de lautonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées. Monsieur le vice-président de la commission des lois, M. le garde des sceaux m’a chargée de vous répondre.

Le Gouvernement est, tout comme vous, particulièrement attaché aux jurés populaires. C’est pourquoi la souveraineté du jury populaire dans les cours d’assises a été renforcée par la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire de décembre 2021, puisqu’il faut désormais une véritable majorité de jurés pour condamner un accusé.

Le rapport du comité d’évaluation, dont vous avez fait partie, et qui a été rendu en octobre 2022, permet de conclure que les objectifs visés par cette expérimentation, notamment la réduction des délais de traitement des procédures criminelles, sont globalement atteints.

L’ensemble des personnes, y compris les plus critiques à l’égard des cours criminelles départementales, se sont accordées pour reconnaître que les principes de l’oralité des débats et du contradictoire avaient été respectés comme en cours d’assises.

Les plaidoiries se déroulent dans un climat moins pesant. Les parties civiles sont plus à l’aise pour s’exprimer devant cette nouvelle juridiction, et les délais d’audiencement sont plus courts : 12 mois contre 18 mois pour une cour d’assises.

La CCD permet, du fait de ces délais beaucoup plus courts, de restituer aux faits de viol, massivement correctionnalisés, leur véritable qualification. En effet, son activité concerne à 81 % des affaires de viol.

Concernant les besoins de magistrats dus à cette généralisation, j’indique que les magistrats honoraires et les magistrats à titre temporaire ont pleinement joué leur rôle : dans 74 % des affaires jugées, le collège de magistrats était composé de deux magistrats honoraires et à titre temporaire, soit le nombre maximum permis par la loi. Ainsi, dans ces cas, les affaires mobilisaient trois magistrats professionnels, soit autant qu’une audience correctionnelle.

Par ailleurs, ces magistrats non professionnels sont renforcés par les avocats honoraires ayant des fonctions juridictionnelles, créés par la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire, et qui peuvent entrer dans la composition de ce collège de magistrats pour les CCD. Ce nouveau statut a rencontré un franc succès chez les avocats.

Le garde des sceaux travaille avec les professionnels du droit et les universités pour intensifier tous ces recrutements.

décision problématique de l’agence régionale de santé

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, auteur de la question n° 310, transmise à M. le ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées.

M. Jean-Marie Mizzon. Madame la ministre, ma question s’adressait initialement à M. le ministre de la santé. La commune de Faulquemont, en Moselle, est prête à lancer un projet innovant et atypique qui consiste à développer un village de l’autonomie et du handicap dans son centre-ville.

Concrètement, des logements adaptés et sécurisés permettraient aux résidents de ce village de bénéficier des services de la ville, dont l’aide à domicile, de continuer à profiter pleinement d’une vie sociale, grâce à la proximité de commerces, ou encore de participer à diverses activités.

L’ensemble comprendrait 24 pavillons pour seniors, 2 pavillons de colocation, pour 16 résidents, une structure de réadaptation pour personnes âgées vieillissantes qui pourrait accueillir 30 personnes, hébergements permanents et temporaires confondus, et, enfin, une maison d’accueil médicalisée de 33 places. Le tout entraînerait la création de 70 emplois, qui favoriseraient la revitalisation de ce bourg, chef-lieu de canton en milieu rural, pour les trente prochaines années.

Or, bien que tout soit réglé sur le plan financier, des difficultés administratives freinent sa réalisation, l’agence régionale de santé (ARS) ne délivrant pas les autorisations nécessaires.

Aussi, madame la ministre, pouvez-vous débloquer ce dossier et le faire enfin aboutir, comme vous en avez le pouvoir ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de lautonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées. Monsieur le sénateur Mizzon, avant de vous répondre sur la situation particulière que vous évoquez, je tiens à rappeler que les autorisations délivrées par les autorités de contrôle et de tarification le sont uniquement lorsque les projets présentés sont de qualité, qu’ils correspondent aux orientations du projet régional de santé et qu’ils répondent à un besoin étayé et priorisé sur le territoire concerné.

Voilà les seuls critères qui guident les éventuelles décisions.

Je souligne également que toute ARS est, par principe, à l’écoute des projets émergents sur les territoires, et les accompagne au regard de ces règles.

Le projet de « Village de l’autonomie et du handicap » de Faulquemont est un projet composite, dont certains éléments ne relèvent d’ailleurs pas de la compétence de l’ARS.

Deux aspects la concernent néanmoins.

D’abord, il y a la construction d’une maison d’accueil médicalisé de 33 places par la Fondation Perce-Neige. Sur ce point, une rencontre a été organisée par l’ARS avec les représentants de la fondation, le 17 mars 2022, en présence du maire de Faulquemont et de représentants du conseil départemental de la Moselle. Il a été indiqué par l’ARS qu’il n’y avait pas de possibilité de financements à cette heure, ceux-ci ne pouvant être attribués qu’à la suite d’un appel à projets, après examen de toutes les candidatures.

Depuis mars 2022, le promoteur ne s’est plus manifesté auprès de l’ARS. Selon mes informations, il semblerait que des engagements aient été anticipés par certains élus du territoire, en dépit de ces réponses apportées par l’ARS.

Une autre partie du projet concerne la construction d’une structure de réadaptation pour personnes handicapées vieillissantes portée par une association gestionnaire, qui sollicite une participation de l’ARS.

Une rencontre avait été envisagée en juillet 2022, mais elle n’a pu avoir lieu. Elle est désormais prévue pour le 2 février 2023 afin de faire avancer ce projet, qui, je le répète, doit répondre au constat d’un besoin territorial partagé par l’ARS, le conseil départemental et les associations gestionnaires. Il faut que des crédits soient disponibles, lesquels ne peuvent être alloués qu’à la suite d’un appel à projets lancé par l’ARS et le conseil départemental. C’est seulement dans ces conditions qu’un tel projet peut être agréé et voir le jour.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour la réplique.

M. Jean-Marie Mizzon. Madame la ministre, nous n’avons manifestement pas le même niveau d’information. Je sais que cette commune travaille depuis quatre ans sur ce projet. À l’heure où tous les secteurs d’activité réclament l’accélération des procédures, l’administration est toujours en retard. À mon sens, sa seule boussole devrait être de prendre en compte les attentes et de rendre service aux porteurs de projets. La commune attend avec impatience qu’un appel à projets soit lancé par l’ARS pour qu’elle puisse y répondre rapidement. Ce dossier est soutenu par de nombreux acteurs, dont les cinq sénateurs du département. Il est de qualité et les besoins sont avérés.

situation de l’hôpital de la roche-guyon

M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, auteur de la question n° 250, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.

M. Pierre Laurent. Madame la ministre, j’attire aujourd’hui votre attention sur la situation de l’hôpital de La Roche-Guyon, dans le Val-d’Oise, établissement spécialisé dans l’accueil du polyhandicap pédiatrique. J’ai été alerté par des syndicalistes à l’automne, lors de ma visite à l’hôpital Trousseau, dont dépend celui de La Roche-Guyon.

Nous relayons régulièrement ici les préoccupations des professionnels sur la situation de l’hôpital, et, plus particulièrement ces derniers temps, sur celle des services de pédiatrie.

À l’hôpital de La Roche-Guyon, la multidisciplinarité des professionnels médicaux et paramédicaux contribue à créer un lieu de vie quotidienne et d’hospitalisation unique, à la hauteur des besoins de soins des enfants polyhandicapés.

Cet hôpital connaît des difficultés structurelles de recrutement, de formation, de conditions de travail, avec des salaires trop bas, ce qui conduit à la fermeture permanente de lits. La difficulté de recrutement est renforcée à La Roche-Guyon par la situation géographique de l’établissement, son isolement en matière de transports publics, et le déficit de logements sociaux abordables à proximité pour le personnel.

Malgré les efforts de la direction et de l’encadrement médical et paramédical, environ 10 lits sur 80 sont fermés depuis plus d’un an et d’autres sont menacés si la situation perdure. Aussi, je vous serai reconnaissant de m’indiquer ce que l’État, en coordination avec tous les acteurs concernés, entend entreprendre en vue de remédier à cette situation extrêmement préjudiciable pour un établissement dont la fonction est unique.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de lautonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées. Monsieur le vice-président Pierre Laurent, vous avez raison, l’hôpital de La Roche-Guyon connaît des difficultés de recrutement, malheureusement comme beaucoup d’établissements sanitaires dans notre pays à l’heure actuelle. Celles-ci ont un impact sur l’activité et ont effectivement conduit à fermer une dizaine de lits temporairement.

Il s’agit pour l’essentiel de difficultés d’attractivité des métiers, comme dans la France entière, et non de fidélisation : la quasi-totalité des agents de l’hôpital habite à proximité de celui-ci, avec un coût de l’immobilier bien inférieur à celui de Paris intra-muros.

Si l’établissement rencontre des difficultés à recruter, il convient toutefois de noter que les agents, une fois qu’ils sont recrutés, restent assez durablement en poste. De plus, tous les agents venant travailler en voiture, la question des transports publics n’est pas vraiment leur priorité.

Un plan de réouverture progressive des lits a été engagé, lequel doit permettre d’ouvrir la totalité des 80 lits de la structure d’ici à l’automne 2023, au fur et à mesure des recrutements d’infirmiers.

Pour ce faire, différentes mesures d’attractivité sont mises en œuvre. L’hôpital propose des contrats d’allocation d’études pour les infirmières et infirmiers, ou met par exemple des logements à disposition. C’est ce qu’il a fait pour recruter quatre masseurs-kinésithérapeutes ces derniers mois, alors qu’il n’y en avait plus aucun à l’été 2022.

Je souligne également l’ouverture, au mois de novembre 2022, d’une nouvelle unité dans une extension de l’hôpital récemment construite. Celle-ci permet d’offrir aux patients de meilleures conditions de prise en charge, et au personnel une meilleure qualité de vie au travail, renforçant ainsi l’attractivité de l’hôpital et sa capacité à fidéliser.

Ces mesures locales viennent s’ajouter à des mesures plus larges portées depuis quatre ans par l’ARS d’Île-de-France sur les ressources humaines en santé sur ce territoire francilien : 50 millions d’euros d’investissement en faveur du logement des soignants ; 400 contrats allocation études ; ou encore 1,5 million d’euros pour financer des formations d’infirmiers en soins généraux (IDE) qui souhaiteraient devenir infirmiers en pratique avancée (IPA).

En conclusion, je dirai que nous devons continuer à travailler sur l’attractivité de ces métiers.

M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour la réplique.

M. Pierre Laurent. Madame la ministre, je vous invite à ne pas minimiser la situation. Vous avez dit qu’elle était temporaire, mais c’est du temporaire qui dure depuis trop longtemps, alors que les besoins sont considérables. Vous pouvez compter sur moi, sur les syndicalistes, qui sont d’ailleurs présents aujourd’hui, pour rester vigilants et suivre les évolutions promises par vous ce matin.

absence de prise en compte des surfaces collectives d’alpage dans le plan stratégique national de la nouvelle politique agricole commune

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, auteur de la question n° 340, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

M. Jean-Michel Arnaud. Depuis le 1er janvier 2023, la nouvelle politique agricole commune (PAC) est entrée en vigueur à travers la mise en œuvre d’un plan stratégique national (PSN). Dans ce cadre, les conditions d’éligibilité aux paiements directs découplés ont été détaillées par les services du ministre de l’agriculture, et je veux attirer son attention sur la mauvaise prise en compte des surfaces collectives d’alpage.

En l’état actuel des critères retenus, seul le gestionnaire pourrait directement toucher l’aide liée à l’écorégime sur les surfaces de l’alpage collectif. C’est contraire au mode de calcul des aides découplées, pour lesquelles des portions de surfaces collectives sont réaffectées à chaque éleveur en fonction du nombre d’animaux conduits sur ladite surface au prorata du temps passé sur l’espace collectif.

Une telle situation conduit à des pertes d’aides importantes pour les éleveurs et va mettre à mal leur trésorerie, tout en provoquant une inégalité de traitement entre les alpages privés et les alpages collectifs, dont la démarche écologique est pourtant plus marquée.

Par ailleurs, une grande partie des alpages collectifs de mon département des Hautes-Alpes sont gérés par des syndicats. Or le plan stratégique national ne les reconnaît pas juridiquement comme gestionnaires éligibles aux aides européennes du premier pilier.

Madame la ministre, vous connaissez l’importance des pratiques pastorales, et plus globalement de l’élevage, dans les Hautes-Alpes. Aussi, je voudrais connaître les mesures correctives qui peuvent être envisagées par le Gouvernement et le ministère de l’agriculture pour faire face à cette problématique. Je vous demande d’être aux côtés de nos éleveurs et de nos agriculteurs.