Mme Martine Berthet. L’article L. 6211-3 du code de la santé publique contraint fortement la réalisation des tests, recueils et traitements de signaux biologiques à visée de dépistage, d’orientation diagnostique ou d’adaptation thérapeutique immédiate.

Ces différents tests, recueils et traitements de signaux biologiques ne constituant pas des examens de biologie médicale, ils doivent pouvoir être réalisés par les professionnels de santé ou par des catégories de personnes identifiées, et pour simplifier l’accessibilité des patients à ces tests et renforcer la stratégie de prévention et de dépistage.

La crise sanitaire a démontré que la stratégie de dépistage est efficace lorsque le patient peut accéder facilement à un test réalisé par un professionnel de santé ou une personne habilitée. Le patient peut ensuite plus rapidement être orienté vers un médecin et entrer dans un parcours de soins adapté.

De plus, le coût de ces tests rapides d’orientation diagnostique (Trod) pour l’assurance maladie est beaucoup moins élevé.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise à modifier le régime d’autorisation des professionnels de santé pour la réalisation des tests, recueils et traitements de signaux biologiques qui ne sont pas considérés comme des examens de biologie médicale.

Selon le droit en vigueur, un arrêté doit dresser la liste de tous les tests et actes concernés et déterminer les catégories de personnes autorisées à les réaliser.

Le présent amendement tend à modifier le régime d’autorisation de ces tests : la liste ne sera plus définie positivement par le pouvoir réglementaire, mais les professionnels prévus par arrêté auront la compétence de principe pour réaliser l’ensemble de ces tests, recueils et traitements.

En revanche, un arrêté pris notamment après avis de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) pourra toujours exclure les actes dont la réalisation par ces professionnels de santé ne serait pas opportune.

Tout en maintenant des garanties liées à la formation des professionnels autorisés et aux conditions de réalisation, cet amendement tend à assouplir les contraintes du régime actuel, ce qui est souhaitable pour lever les freins aux efforts de dépistage, comme il était possible de le faire dans le cadre de la crise sanitaire.

L’avis de l’ANSM étant pris en compte, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Braun, ministre. Madame la sénatrice Berthet, vous proposez de modifier la liste des personnes autorisées à réaliser ces tests rapides d’orientation diagnostique, les fameux Trod.

Or le code de la santé publique prévoit déjà que ces tests peuvent être réalisés par des professionnels de santé, mais également « par du personnel ayant reçu une formation adaptée et relevant de structures de prévention et associatives ou du service de santé des armées ».

Ce champ est suffisamment large pour permettre la mobilisation de personnes qui ne sont pas des professionnels de santé, tout en garantissant que celles-ci sont qualifiées pour l’exercice de ces missions.

Je considère que cet amendement est satisfait par le code de la santé publique et je sollicite donc son retrait. À défaut, mon avis serait défavorable.

M. le président. Madame Berthet, l’amendement n° 58 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Martine Berthet. Je prie M. le ministre de m’excuser, mais je fais confiance à la commission…

Je maintiens donc mon amendement, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 58 rectifié ter.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 4 terdecies.

Article additionnel après l'article 4 terdecies - Amendement n° 58 rectifié ter
Dossier législatif : proposition de loi portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 5

(Suppression maintenue)

Vote sur l’ensemble

Article 5
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

M. Philippe Mouiller. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, force est de constater que cette proposition de loi oppose les médecins aux autres professionnels de santé et interroge beaucoup les élus, notamment des zones rurales, sur la coexistence de pratiques différentes en fonction des territoires.

Monsieur le ministre, nous devons dire la vérité aux Français : ce texte ne permettra pas de résoudre les difficultés auxquelles certains de nos concitoyens sont confrontés.

La démographie des médecins ne s’améliorera pas à moyen terme. Les professionnels de santé mettront plusieurs années avant de s’approprier les innovations prévues par ce texte. Les IPA ne sont pas suffisamment nombreuses – elles sont 1 700 sur l’ensemble du territoire – et la grande majorité d’entre elles exercent à l’hôpital. Or la formation d’IPA impose de s’arrêter de travailler pendant deux ans. Qui peut assumer deux années sans revenus ? Il s’agit là d’un point essentiel de réflexion quant aux évolutions futures.

En ce qui concerne la méthode, le Gouvernement profite d’une initiative parlementaire pour insérer diverses dispositions sans étude d’impact ni cohérence d’ensemble, quand il aurait dû présenter une loi de santé. Les maux sont en effet connus, et les constats ont été dressés depuis bien longtemps.

En tout état de cause, je tiens à saluer le travail de notre collègue Corinne Imbert, qui s’est attachée à améliorer ce texte en respectant tous les professionnels – un exercice d’équilibre.

Je pense notamment à la suppression des dispositions relatives à la responsabilité collective des professionnels et à la suppression des communautés professionnelles territoriales de santé parmi les structures autorisant l’accès direct pour les IPA et les kinésithérapeutes.

Pour ces raisons, et malgré les difficultés que j’ai évoquées, la grande majorité du groupe Les Républicains votera en faveur de ce texte ainsi amendé. Comme je l’indiquais précédemment, nous serons très vigilants lors de la commission mixte paritaire.

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.

M. Alain Milon. Je ne fais pas partie de la grande majorité du groupe Les Républicains qui votera ce texte, pour différentes raisons.

Monsieur le ministre, je ne comprends pas pourquoi vous n’avez pas accédé à la demande du président Larcher d’examiner ce texte après la conclusion de la convention médicale.

Vous avez sans doute constaté que je suis peu intervenu dans nos débats. Il y a à cela une raison précise : cette proposition de loi me semble relever du saupoudrage, quand nous aurions besoin d’une véritable colonne vertébrale.

Comme Philippe Mouiller, je m’étonne que le Gouvernement ne nous ait pas soumis un projet de loi embrassant à la fois l’organisation territoriale de la santé, le rôle structurant des médecins et la collaboration entre les professionnels de santé et le corps médical, afin d’organiser, sur un territoire donné, la participation de l’ensemble des professionnels, y compris, lorsque le territoire est doté d’un hôpital, des professionnels hospitaliers.

Je ne pourrai donc pas voter ce texte en l’état – je prie Corinne Imbert de bien vouloir m’en excuser –, tout en constatant, comme Philippe Mouiller, que celui-ci a été nettement amélioré.

J’ai enfin été un peu déçu par votre réponse à nos demandes relatives à la commission mixte paritaire, monsieur le ministre. Les parlementaires de la majorité seront en effet vraisemblablement les plus nombreux en son sein, et il me semble que vous êtes en mesure de leur indiquer ce que vous souhaitez. (M. Jérôme Bascher applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si je suis globalement favorable aux amendements relatifs aux kinésithérapeutes, aux infirmières et aux orthophonistes qui ont été adoptés sur l’initiative de la commission, je considère que les dispositions les plus importantes sont celles qui, au sein de l’article 1er, permettent un accès direct aux IPA.

Je n’y suis pas favorable, car j’estime que cela apportera de la confusion. Le patient pourra certes consulter directement une IPA pour le renouvellement du traitement d’une maladie chronique, mais si celui-ci doit être modifié de manière substantielle ou si le patient contracte une autre pathologie, il devra tout de même consulter un médecin.

Je suis tout à fait favorable au développement des IPA, sous réserve que ces dernières exercent en synergie avec le médecin qui a l’habitude des patients et qui pourra, le cas échéant, les orienter vers l’IPA, tout en restant disponible au sein de la maison de santé, ou par téléphone s’il est en visite au domicile d’un patient.

J’estime que l’accès direct aux IPA, qui ne permet pas une bonne coordination des soins, constitue au fond un mauvais usage de ces professionnels, qui pourraient par ailleurs, par la délégation d’actes, libérer beaucoup de temps médical. Cela étant, l’article 1er a été voté. Je souhaite donc que de nombreuses IPA soient formées et que, en dépit de la loi, le fonctionnement du couple médecin-IPA s’améliore.

En conséquence, le groupe Les Indépendants – République et Territoires s’abstiendra sur cette proposition de loi.

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.

M. Olivier Henno. Monsieur le ministre, malgré les débats de qualité que nous avons eus et les arguments que vous avez développés, de nombreux doutes demeurent quant à cette proposition de loi.

Nous nous interrogeons tout d’abord, cela a été dit, sur le calendrier. Pourquoi ne pas avoir attendu la fin de la négociation de la convention médicale ?

Nous nous interrogeons ensuite sur la forme, qui paraît peu pertinente. Ce texte, que je qualifierai de « Canada Dry » a le goût, l’apparence et l’odeur d’un projet de loi, mais il s’agit bien d’une proposition de loi.

Nous nous interrogeons enfin sur la pertinence même de ce texte, car, à l’issue de nos débats, nous conservons de nombreux doutes. Certes, le statu quo n’est pas possible et il faut pallier la pénurie, mais ne jouons-nous pas aux apprentis sorciers ? Vous n’avez pas levé nos inquiétudes quant au risque de voir se développer une médecine à deux vitesses, quant à l’attractivité de la médecine générale, quant à notre capacité à former des médecins et quant à la notion si importante de responsabilité.

Cela étant, compte tenu de la qualité du travail de Corinne Imbert, tant en commission qu’en séance, le groupe Union Centriste votera ce texte.

Nous avons abordé ce débat en dressant le constat que nous étions arrivés au bout de la logique qui consiste à réformer au moyen de propositions de loi éparses. Plus que jamais, nous avons besoin d’une grande loi santé, afin de remettre à plat notre système de santé gravement en crise.

M. Jérôme Bascher. Hélas, ils n’ont pas de vision !

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.

Mme Annick Billon. Je souhaite à mon tour saluer le travail important qui a été réalisé par Mme la rapporteure pour tenter d’améliorer ce texte.

Comme je l’indiquais précédemment, la proposition de loi ne semblait évidemment pas le bon outil pour avancer sur ce sujet. Nous sommes tous d’accord pour défendre un meilleur accès aux soins et nous sommes tous d’accord pour rendre la médecine générale plus attractive. Or, à l’issue de ces débats, je reste persuadée que ce texte n’y contribue pas.

Je souhaitais que l’amendement n° 78 rectifié bis de notre collègue Daniel Chasseing soit adopté. Cela aurait modifié mon vote sur l’ensemble du texte. Je ne voterai donc pas celui-ci – je souhaite le faire en toute transparence vis-à-vis de Mme la rapporteure et de Mme la présidente de la commission –, tout en saluant le travail qui a été réalisé par la commission et par Mme la rapporteure. En dépit de celui-ci, j’estime que ce texte oppose les professionnels de santé.

Mes collègues qui voteront contre ce texte ou qui s’abstiendront partagent l’objectif de ceux qui voteront pour. C’est ce qui est difficile à accepter ce soir, même si nos débats ont été très respectueux.

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, permettez-moi de revenir sur le contexte.

Ce texte, nous l’avons tous dit, arrive à un très mauvais moment. Nous avons souhaité reporter son examen, ce qui n’est pas été possible. Nous avions dès lors deux solutions : rejeter ce texte, ce qui aurait abouti à l’adoption du texte de l’Assemblée nationale, qui est tout à fait inacceptable, ou travailler à l’améliorer.

J’estime que nous avons trouvé un équilibre, certes fragile, qui permet un accès direct aux IPA et à d’autres professionnels, tout en bordant le rôle du médecin traitant.

En tout état de cause, avec Mme la rapporteure et d’autres collègues, nous ne souhaitions pas laisser le champ libre à la proposition de loi issue des travaux de l’Assemblée nationale, qui à nos yeux était tout à fait inacceptable. Et nous tiendrons nos positions en commission mixte paritaire.

La rédaction issue de nos travaux ne satisfera pas tout le monde. Toutefois, compte tenu des fortes oppositions et des tensions que nous avons perçues entre des professions qui se soupçonnent mutuellement, souvent sans fondement, j’estime que nous avons trouvé un équilibre entre, d’un côté, la reconnaissance des compétences des professionnels de santé et leur exercice et, de l’autre, la place centrale du médecin, qui pose le diagnostic et qui est le plus à même de prescrire un traitement.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, je vous invite à voter ce texte modifié par la commission et qui n’a plus rien à voir avec celui qui nous a été transmis.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 135 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 213
Pour l’adoption 199
Contre 14

Le Sénat a adopté.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé
 

7

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mercredi 15 février 2023 :

À quinze heures :

Questions d’actualité au Gouvernement.

À seize heures trente et le soir :

Désignation des vingt-trois membres de la mission d’information sur le thème « L’impact des décisions réglementaires et budgétaires de l’État sur l’équilibre financier des collectivités locales » ;

Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à sécuriser l’approvisionnement des Français en produits de grande consommation (texte de la commission n° 327, 2022-2023).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures dix.)

 

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER