M. Loïc Hervé. Mme Gatel a la cote !

Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Aujourd’hui, le texte que vous proposez étant de bon sens, j’émets un avis favorable.

Je signale toutefois qu’il nous faudra, dans la suite de la discussion parlementaire, nous assurer et faire confirmer par la délibération collective que ce texte ne porte pas atteinte au principe de parité, auquel je ne peux que réitérer mon plein et entier attachement. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux.

M. Jean-Yves Roux. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je pense que tout le monde salue les progrès effectués ces dernières années en matière de parité et de mixité au sein des institutions publiques.

Bien sûr, il nous reste beaucoup à accomplir. La marge de progrès est indéniable au sein de la représentation politique et, plus largement, dans l’accès à toutes les fonctions publiques, surtout pour des postes à responsabilité. Je pense également, au-delà de la question du sexe, aux progrès à réaliser en matière d’origines sociales.

Le sujet de la parité est pris en compte depuis plusieurs décennies. Ainsi, la loi constitutionnelle du 8 juillet 1999 relative à l’égalité entre les femmes et les hommes visait à compléter l’article 1er de la Constitution, anciennement l’article 3, en posant que « la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ». Ont suivi, très spécifiquement, la loi du 6 juin 2000 tendant à favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, puis la loi du 31 janvier 2007 tendant à promouvoir l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. Enfin, des dispositions au sein d’autres textes plus vastes sont venues compléter ces apports ; je pense en particulier à la loi du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, mais également à la loi du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique.

Bref, même s’il reste beaucoup à faire, reconnaissons tout de même que le législateur n’a pas failli à sa mission ! Seulement, chacun conviendra également que les mécanismes incitatifs, voire coercitifs, en vue de rendre effective cette représentation paritaire ne doivent pas conduire à des blocages.

Le droit actuellement applicable aux conseils communautaires a déjà été rappelé. Je citerai brièvement à mon tour l’article L. 273-10 du code électoral : dans les communes de plus de 1 000 habitants, « lorsque le siège d’un conseiller communautaire devient vacant, pour quelque cause que ce soit, il est pourvu par le candidat de même sexe élu conseiller municipal ou conseiller d’arrondissement suivant sur la liste des candidats aux sièges de conseiller communautaire sur laquelle le conseiller à remplacer a été élu. »

Les auteurs de cette proposition de loi ont raison de souligner que cette disposition pose parfois des difficultés d’application, en particulier dans le cas où un seul siège est à pourvoir. Le candidat complémentaire qui figure en deuxième et dernière position de la liste a vocation à constituer le remplaçant du conseiller communautaire élu. Or, le remplaçant ne pouvant être de sexe différent, la personne qui figure en deuxième position, nécessairement de sexe différent de la tête de liste du fait de cette règle de parité, ne peut ainsi jamais assurer cette fonction. C’est évidemment regrettable et il est nécessaire de rectifier ce dispositif.

Il a été souligné par la rapporteure que les objectifs fixés par l’auteure de la proposition de loi étaient partagés, quand bien même la rédaction du texte initialement présenté a dû être ajustée afin de la rendre plus opérante.

Le texte initial prévoyait de s’appliquer seulement au terme de la première année suivant le renouvellement général des conseils municipaux. La nouvelle rédaction a écarté le décalage d’un an de sorte que, même la première année du mandat, aucune vacance ne pourrait échapper à l’application des dispositions de la proposition de loi.

Cela me paraît être un travail de qualité. Je tiens à remercier celles et ceux qui y ont pris une part active. Aussi, vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe RDSE votera en faveur de ce texte.

M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Dominique Vérien applaudit également.)

Mme Agnès Canayer. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si « l’unité dans la diversité » est la devise de l’Union européenne, elle pourrait être aussi celle de toutes les intercommunalités de France.

Regroupant plus de 34 000 communes, elles sont toutes différentes. Plus ou moins grandes, plus ou moins riches, plus ou moins vastes, elles se sont progressivement constituées pour exercer leurs compétences dans un contexte de décentralisation. Ces regroupements ont fait émerger une nouvelle gouvernance fondée sur la légitimité des élus municipaux.

Au Sénat, nous savons que l’intercommunalité est un organe de coopération au sein duquel chaque commune doit avoir sa juste représentation. Toutefois, cet échelon soulève des questions légitimes comme la représentativité de son conseil à la fois entre les oppositions et la majorité, entre les communes, selon leur population, et entre les hommes et les femmes.

Ainsi, un équilibre subtil est à trouver entre l’exigence légale d’égalité entre hommes et femmes, et l’indispensable « représentation juste et continue des communes » au sein des conseils communautaires, selon les mots de notre collègue rapporteure Nadine Bellurot.

Aussi, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui, déposée par la présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, Françoise Gatel, tend à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires.

Je me félicite que notre collègue se saisisse de ce sujet important pour la démocratie locale et qui touche particulièrement les intercommunalités de la Seine-Maritime. Tout particulier et ponctuel qu’il soit, le cas dont nous débattons aujourd’hui n’en est pas moins problématique. Il s’agit de la vacance d’un siège faute de candidat du même sexe pour remplacer un conseiller communautaire démissionnaire.

Les règles actuelles ont montré leurs limites. La vacance durable de siège communautaire conduit à un amoindrissement de la représentation des communes ou des droits de l’opposition, ou encore à un défaut de représentativité et de légitimité. Un siège durablement vide au conseil communautaire alimente, tant l’on connaît le rôle des EPCI dans la vie des Français, un sentiment pernicieux dont nous pouvons faire l’économie : l’incompréhension.

Le pragmatisme du Sénat est donc, une fois encore, exigé pour régler les problèmes posés par l’insatisfaisante règle actuelle, à savoir concilier les principes de parité et de représentation des communes.

Occasion nous est donnée de mesurer les effets inattendus de l’exigence légale qu’est la parité. Dans le département que je représente, plusieurs exemples attestent la nécessité de faire évoluer une règle générale et absolue qui résiste mal à la réalité du terrain.

À Tourville-sur-Arques, en Seine-Maritime, le maire a dû composer avec les volontés, les aspirations et les attentes de chacun. Ainsi, il a souhaité s’entourer de deux adjointes, car elles avaient vraiment manifesté leur souhait de s’engager pour cette commune de 1 300 habitants. Eh bien non ! La parité a interdit au maire de les nommer. Il a fallu choisir un homme, pas forcément volontaire, et une des deux femmes a dû devenir simple conseillère municipale déléguée. Vous le savez, l’engagement devient rare. Il ne faut pas gaspiller nos chances d’avoir des élus volontaires, qu’ils soient homme ou femme.

Autre exemple, celui d’une commune que je connais particulièrement bien puisque j’y suis élue, Le Havre voit son conseil municipal siéger en totalité au conseil communautaire. Or, depuis le 3 janvier 2022, un siège y est vacant. En effet, la conseillère municipale de la majorité du Havre dernièrement désignée ne peut pas siéger au conseil communautaire, où elle doit remplacer un collègue masculin. Elle est la seule des élus du conseil municipal du Havre qui n’ait pas le droit de siéger au sein de l’instance intercommunale. Des cas similaires se retrouvent dans l’agglomération de Fécamp, voire celle de Bolbec – je viens d’avoir un échange sur ce dernier cas avec Mme Brulin.

Par conséquent, en ce qui concerne la communauté urbaine Le Havre Seine Métropole, un siège demeurera vacant jusqu’en 2026. Comment le comprendre quand, dans les communes, en cas de démission, il n’est pas nécessaire d’avoir un suivant de liste de même sexe ?

Ainsi, la représentation des communes n’est pas assurée dans son intégralité au sein des intercommunalités quand la parité prédomine sur la représentativité démocratique, ce qui est particulièrement vrai pour les communes les plus rurales. Il est donc urgent d’adopter cette très bonne proposition de loi, particulièrement pragmatique, qui répond à cette difficulté, certes parfois mineure, mais réelle, rencontrée sur le terrain.

Pour toutes ces bonnes raisons, notre groupe votera en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Gatel applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Dany Wattebled. (M. Daniel Chasseing applaudit.)

M. Dany Wattebled. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, certaines communes sont confrontées à des situations durables de vacance de siège au sein des conseils communautaires, faute de candidats de même sexe pour remplacer le conseiller démissionnaire.

Certes, il s’agit de dysfonctionnements exceptionnels, qui peuvent toutefois être amenés à se multiplier.

C’est pourquoi je me félicite de l’initiative de notre collègue Françoise Gatel visant à pallier cette difficulté déjà rencontrée par des élus locaux.

En effet, ces situations de vacance peuvent être à bien des égards dommageables pour les communes et les intercommunalités, cela a été relevé à juste titre par la rapporteure : affaiblissement de la représentation des communes au sein du conseil communautaire, diminution des droits de l’opposition ou, encore, atteinte à la représentativité et à la légitimité des décisions.

Afin d’apporter une solution pragmatique à ces situations, certes ponctuelles, mais portant toutefois atteinte à la démocratie, la proposition de loi prévoit, pour les seules communes de plus de 1 000 habitants représentées par plusieurs sièges au conseil communautaire, et lorsqu’il n’existe pas de conseiller municipal, fléché ou pas, de même sexe candidat à un siège vacant, de le pourvoir par le suivant de liste « fléché » et élu au conseil municipal, sans tenir compte de son sexe.

Lorsque la liste concernée ne comporte plus de conseillers municipaux dits fléchés, le siège serait alors pourvu par le premier conseiller municipal élu sur la liste n’exerçant pas de mandat de conseiller communautaire, sans tenir compte de son sexe.

Ces ajustements apportent une réponse équilibrée aux dysfonctionnements ponctuels constatés, tout en préservant à la fois l’impérieuse nécessité de représentation continue des communes au sein des conseils communautaires et l’obligation de représentation égale des hommes et des femmes.

Enfin, je rejoins la position de la commission, qui a souhaité apporter une modification au texte initial en précisant que le dispositif s’appliquerait à compter d’une année suivant la date d’installation du conseil municipal, afin notamment de tenir compte d’éventuels renouvellements locaux.

Madame la ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi constitue un texte correctif pertinent, répondant à une difficulté ponctuelle à laquelle plusieurs collectivités se sont déjà heurtées, à savoir la vacance durable d’un siège au sein d’un conseil communautaire. Elle remédie ainsi à des situations pouvant porter atteinte au bon exercice de la démocratie.

Aussi le groupe Les Indépendants votera-t-il pour ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Françoise Gatel applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Guy Benarroche. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la représentativité, la parité, la diversité dans les instances décisionnaires sont considérées généralement comme bénéfiques, notamment, dans la conduite des affaires publiques.

Sans conteste, les lois sur la parité ont permis de faire progresser celle-ci au sein des communes puis des conseils communautaires.

L’application de la contrainte paritaire a facilité une entrée massive des femmes dans les conseils municipaux des villes de plus de 3 500 habitants. Alors que leur proportion n’était que de 25,7 % dans les conseils municipaux issus des élections de 1995, celle-ci a grimpé à 48,5 % en 2008. Par ailleurs, la part des femmes dans les conseils communautaires a augmenté et atteint 35,8 % après les élections en 2020.

L’obligation a donc eu des effets, mais elle demeure indispensable. Dans la mesure où la proportion de femmes n’a augmenté que parmi les jeunes élus, cela augure d’un renouvellement à terme encore plus paritaire.

Parallèlement, la vocation des élus s’essouffle, nous l’avons tous observé, et le nombre de démissions tend à déstabiliser la conduite des travaux des EPCI.

Les règles actuelles imposent aux communes de plus de 1 000 habitants une règle de parité pour la constitution des listes de candidats aux conseils communautaires.

Elles obligent aussi à maintenir la parité tout au long du mandat : une femme représentant une commune au sein d’un EPCI ne pourra être remplacée que par une femme de la même liste ; à défaut, le siège restera vacant. Le mécanisme a été expliqué par les collègues qui m’ont précédé à la tribune.

C’est bien à ce problème de vacance que l’auteure a souhaité répondre. Les EPCI exercent des compétences essentielles pour la vie de la commune, aussi l’absence de conseillers au sein des conseils communautaires peut-elle être préjudiciable.

L’incompréhension de nos élus locaux sur ces difficultés de représentativité s’est installée de manière durable.

À cet égard, personne dans ces travées ne m’accusera d’être insensible aux questions de représentativité au sein des intercommunalités, y compris de statut spécifique, et aux conséquences que cela emporte quant à la compréhension de nos citoyens, sur les questions de la gestion des déchets, des routes, des transports en commun et des autres compétences exercées.

La proposition de loi issue des travaux de la commission vise à répondre à l’incongruité qui voudrait qu’une commune ou une opposition ne puisse plus être représentée au sein de l’EPCI auquel elle participe.

Certes, la réponse apportée par cette proposition de loi est sans doute imparfaite s’agissant de l’application de la parité. Notre groupe restera très attentif aux utilisations qui seront faites de ce texte, qui ne visait initialement à répondre qu’à des situations ponctuelles qui doivent rester isolées. Le resteront-elles ? L’imagination de certains hommes politiques est sans limite. Je dispose de quelques exemples, mais je n’aurai pas le temps de vous les donner…

La rédaction semble apporter un certain nombre de garde-fous : l’instauration d’un délai de réserve d’un an suivant l’installation des conseils municipaux permettra d’éviter toute tentative d’effet d’aubaine après une élection. Toutefois, toute atteinte à l’obligation de parité peut avoir des effets négatifs, même si elle ne remet pas en cause les dispositions liées à la parité, mais permet simplement leur adaptation, en cas d’impossibilité matérielle de remplacer les conseillers communautaires.

Notre groupe a conscience de l’importance de la représentativité de l’ensemble des idées et des territoires au sein d’une assemblée, et a toujours attiré l’attention sur les difficultés des positions minoritaires au sein des assemblées. Je pense notamment à la représentativité des commissions mixtes paritaires.

Dans sa grande majorité, notre groupe ne peut se satisfaire de ce type de solution. Pourquoi ne pas permettre des listes plus longues ? Pourquoi ne pas le limiter aux villes de moins de 3 500 habitants ? Ainsi, majoritairement, notre groupe voit dans cette mesure une solution moyenne à un vrai problème.

Pour autant, certains d’entre nous, dont je fais partie, voteront ce texte, en restant très attentifs aux résultats de l’application de ces dispositions au regard des progrès obtenus dans le cadre d’une meilleure et plus juste représentativité des femmes au sein de nos institutions locales. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)

M. le président. La parole est à M. Alain Richard.

M. Alain Richard. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le sujet sur lequel nous avons à délibérer, la proposition judicieuse de notre collègue Françoise Gatel, résulte de la conjonction de deux principes électoraux.

Le premier est celui du fléchage et de l’élection des conseillers communautaires à l’intérieur des listes municipales, en gardant ce que j’appellerai un « chaînage », une solidarité permanente et une cohérence entre les représentations communales et intercommunales. Ce système est parfois discuté et confronté à d’autres. J’entends, avec beaucoup d’irritation, que l’on continue à employer l’expression d’« élection directe des conseillers communautaires », pour parler d’autre chose, à savoir une élection supracommunale ou même extérieure aux conseils municipaux, qui changerait fondamentalement la nature des intercommunalités.

Dans le système existant, il y a une cohérence et une solidarité entre la liste municipale et ses élus communautaires, que ce soit dans la majorité ou la minorité.

Le second principe, qu’il s’agit bien évidemment de faire appliquer le plus efficacement possible, est celui de la parité, qui opère dans le cas des élections communautaires de façon assez spécifique. En effet, de toutes les élections au scrutin de liste, où s’impose une composition paritaire des listes, seule l’élection du conseil communautaire possède une règle spécifique de remplacement.

Qu’il s’agisse du Parlement européen, des conseils régionaux ou des conseils municipaux, un siège vacant est toujours attribué au suivant de liste, quel que soit son sexe ou son genre. Il faut bien le dire, la précaution supplémentaire instaurée dans la loi de 2013 s’agissant des vacances de siège dans les conseils communautaires était probablement un coup d’épée dans l’eau. En effet, compte tenu du nombre de cas dans lesquels des communes n’ont qu’un nombre impair – un ou trois – de conseillers communautaires, avec une grande majorité de têtes de liste hommes, une règle de succession sans condition de sexe aboutirait probablement à l’arrivée en cours de mandat d’un plus grand nombre de conseillères communautaires femmes que la disposition actuelle.

Nous ferons un jour le bilan d’une telle disposition, qui s’applique dans cet unique cas. Il en résulte deux types de situations, qui ont été décrites. Mme Canayer a évoqué le cas des grandes villes ou des communes-centres, dont les conseillers représentent une très grande proportion du conseil communautaire et dans lesquelles tous ou quasiment tous les conseillers sont des conseillers communautaires. Au contraire, dans d’autres communes, le cas de conseillers communautaires manquants peut concerner les listes minoritaires.

Dans ces deux cas, il peut y avoir un déficit de représentation, dans la mesure où le dernier poste vacant ne peut pas être pourvu par un conseiller communautaire ou municipal de même sexe.

Notre groupe a donc estimé que ce texte permettait d’introduire un aménagement de bon sens dans l’application d’une règle spécifique qui n’a pas forcément démontré sa plus grande efficacité en matière de respect de la parité. C’est la raison pour laquelle nous soutiendrons également cette proposition de loi.

M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Éric Kerrouche. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, parfois, les règles qui s’appliquent aux collectivités territoriales relèvent du cabinet de curiosité ! Il s’avère que notre collègue Françoise Gatel a des dons pour les débusquer. Mais elle participe parfois à la création de ce bestiaire : je pense ainsi à la commune-communauté !

Mme Françoise Gatel. Belle invention !

M. Éric Kerrouche. Néanmoins, dans les deux cas, il s’agit de mesures ayant leur intérêt.

S’agissant de cette proposition de loi, il convient bien évidemment de corriger ce que nous appellerons une bizarrerie. Certes, il ne s’agit pas du cas de figure le plus courant au sein des intercommunalités. Néanmoins, on peut se demander pourquoi il existe encore.

Tout le monde l’a bien compris, ce texte concerne le remplacement, pour les communes de plus de 1 000 habitants, des conseillers communautaires : le remplaçant serait disponible, mais ne pourrait occuper le siège vacant, car l’alternance homme-femme ou femme-homme ne serait pas respectée. Pourquoi laisser vacants ces postes, s’il existe une possibilité de remplacement participant du bon sens ?

C’est la raison pour laquelle notre groupe votera ce texte.

De manière plus large, cette proposition de loi renvoie à deux problématiques adjacentes.

La première est la spécificité, ou l’exotisme, du scrutin applicable à nos communes de moins de 1 000 habitants. Voilà peu de temps, je vous le rappelle, on pouvait être élu « à l’insu de son plein gré ». Il y avait des possibilités de panachage. Dans ce type de scrutin, il y a un tir au pigeon qui se fait souvent au détriment du maire, celui qui est identifié comme prenant les décisions.

La seconde problématique est liée à la question de la parité, qui n’est pas applicable pour ces scrutins. Ainsi conviendrait-il d’unifier le mode de scrutins, afin que, quelle que soit la commune dans laquelle on se trouve, celui-ci soit identique, ce qui imposera de manière définitive la parité, y compris dans les communes de moins de 1 000 habitants, lesquelles, si je ne m’abuse, représentent un peu plus de 18 000 communes françaises – autre trait parfaitement atypique.

De fait, la proposition de loi renvoie à la question plus large de la parité entre les femmes et les hommes au sein des intercommunalités, et aux moyens d’y parvenir.

Or l’amendement sur la parité que nous avons déposé a été jugé irrecevable, ce que je regrette. Il reprenait une proposition du groupe des sénatrices et sénateurs socialistes formulée lors de l’examen du projet de loi Engagement et proximité et traduite dans une proposition de loi que j’ai déposée.

Il s’agit d’établir une parité-miroir au sein de l’exécutif intercommunal : la proportion de femmes vice-présidentes serait au moins équivalente à la proportion de femmes à l’intérieur du conseil communautaire.

Cet amendement a été adopté au Sénat de haute lutte lors de l’examen du projet de loi Engagement et proximité. Malheureusement, la majorité présidentielle de l’Assemblée nationale a supprimé cette disposition – vous n’étiez pas encore au Gouvernement à l’époque, madame la ministre – dans le cours de la navette, et cette suppression a été entérinée par la commission mixte paritaire, malgré une proposition de rédaction discutée au cours de sa réunion.

Les dispositions introduites étaient les suivantes : « Avant le 31 décembre 2021, les dispositions du code électoral relatives à l’élection des conseillers municipaux et des conseillers communautaires sont modifiées pour étendre l’égal accès des femmes et des hommes aux fonctions électives dans les communes et leurs groupements. »

À ma connaissance, nous sommes le 15 mars 2023 et ces dispositions ne trouvent toujours pas à s’appliquer. Ainsi, la prise en compte de cet amendement aurait été une bonne chose, en permettant de réguler ce qui demeure un problème.

Néanmoins, parce que nous continuerons à défendre dans le temps cette disposition, qui dépasse donc le cadre de cette proposition de loi, nous voterons pour ce texte, qui nous paraît de bon sens. Toutefois, nous rejetterons l’amendement déposé, qui nous semble aller au-delà du périmètre de la correction proposée par Françoise Gatel. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi permet une continuité de la représentation dans les conseils communautaires, dans un contexte où les EPCI exercent des compétences structurantes qui ont un impact fort dans le quotidien des communes et des habitants. De ce fait, la représentation continue des communes au sein des EPCI via les élus est nécessaire. Tel est l’objet de cette proposition de loi.

Nous savons que cette proposition de loi n’est pas discutée pour remettre en cause le principe de parité. Simplement, certaines situations vécues par nos élus locaux méritent d’être entendues. Nous devons, quand cela est possible, apporter des solutions et des réponses concrètes.

Ce n’est pas faire offense à l’auteure de cette proposition de loi ni au travail de Mme la rapporteure en disant que l’enjeu de ce texte est faible, dans la mesure où celui-ci ne concerne, cela a été dit, que quelques communes. Il ne s’agit donc pas d’une remise en cause du principe de la parité et de la représentation, même si, Agnès Canayer l’a rappelé, nous avons tous en tête des exemples de certaines aberrations dans la constitution des exécutifs locaux. Par exemple, un adjoint homme a assez peu de délégations, alors qu’une femme conseillère déléguée se retrouve avec un nombre important de délégations. Mais tout cela n’est pas remis en cause dans le cadre de cette proposition de loi.

En amendant la règle de droit, on permet aussi aux groupes d’opposition, je le souligne, de faire entendre leur voix au sein du conseil communautaire. En effet, c’est souvent dans le cadre de leurs listes que le nombre d’élus fléchés pour siéger au conseil de communauté vient à manquer. Ils ne disposent pas d’une liste suffisante de remplaçants ou de remplaçantes pour assurer le remplacement de la personne démissionnaire du même sexe.

Une telle situation peut entraîner une non-représentation et ainsi mettre en difficulté leur droit d’expression en tant qu’élus d’opposition.

Cette proposition de loi a du sens et permettrait une représentation pérenne au sein des conseils communautaires, mais surtout corrigerait la législation, qui n’a pas pris en compte des situations ponctuelles particulières qui peuvent exister.

Ainsi, dans le cadre des dispositions prévues par cette proposition de loi, quand il n’existera pas de conseiller communautaire de même sexe sur la liste communautaire, on pourra nommer le suivant de liste sans tenir compte de son sexe, afin d’assurer la mission première confiée aux élus, celle de la représentation de leur commune et de leur population.

Attaché au principe de démocratie et de représentation des communes au sein des EPCI, le groupe CRCE votera cette proposition de loi, qui permet d’apporter une solution à des problématiques rencontrées au sein de nos collectivités.

Reste devant nous l’éternel chantier, jamais mis en œuvre, qui mérite nombre de débats et d’évolutions sociétales, celui de la place des femmes et des hommes dans la vie politique locale et nationale. Si une simple proposition de loi suffisait à régler des problèmes de société, cela se saurait ! En l’état, nous voterons cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – Mme Françoise Gatel applaudit également.)