M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, en France, aujourd’hui, près de 7 millions de personnes – cela représente environ 20 % de la population en âge de travailler – connaissent des difficultés pour se déplacer. Et 28 % des personnes en insertion professionnelle abandonnent leur emploi ou leur formation pour des raisons de mobilité. Le dernier chiffre que je vais évoquer montre que nous ne sommes pas près d’inverser la courbe : le prix moyen pour passer le permis de conduire avoisine désormais les 2 000 euros.

Que fait un étudiant face à cela ? Un chômeur qui doit absolument obtenir le permis ? Le smicard qui compte ses fins de mois, encore plus dans une situation de crise ? Et j’en passe…

Les freins à la mobilité sont nombreux : le coût, mais aussi l’absence de transports en commun dans certaines communes, surtout en zone rurale. Le permis est nécessaire, indispensable parfois, pour espérer obtenir un travail ou répondre aux besoins personnels. Le droit à la mobilité est un réel sujet, auquel il faut apporter des solutions concrètes pour que les Français et les Françaises puissent s’émanciper, être autonomes et construire sereinement leur parcours de vie.

Aujourd’hui, le permis conditionne fortement l’accès à l’emploi et à la formation. C’est un sujet structurant de notre société ; il faut consacrer de réels moyens et prévoir un accompagnement à la hauteur.

Ne pas répondre à ce défi aura inévitablement pour conséquences d’accroître et d’aggraver les inégalités sociales et territoriales dans notre pays. Nous aurions pu, là encore, nous attendre, dans le cadre d’une semaine réservée par priorité au Gouvernement, à un véritable projet de loi, visant à répondre à ces défis. C’est indispensable pour que chacune, chacun, quel que soit son lieu de vie, quelle que soit sa condition sociale, puisse tout simplement bien vivre.

Nous nous satisferons donc de la proposition de loi transmise par l’Assemblée nationale. En effet, il existe de nombreux dispositifs d’aide pour le financement du permis de conduire. Ce texte permettra de rendre plus lisibles les aides des collectivités territoriales en créant une plateforme numérique. Pourquoi pas ? Espérons tout de même que cette plateforme aura un meilleur succès que « 1 jeune, 1 solution »…

Notons enfin que cette proposition de loi n’est pas une révolution, qu’elle n’apporte pas de solutions concrètes face aux problématiques majeures que sont, notamment, le coût du passage du permis de conduire et les délais d’attente très longs entre deux épreuves.

Une meilleure connaissance des aides financières mises à disposition dans certaines collectivités territoriales suffira-t-elle à répondre à la demande des millions de Français que j’évoquais précédemment ? Nous le verrons dans les années à venir. L’emploi d’agents publics contractuels permettra-t-il réellement de réduire les délais de passage ? Nous le verrons dans les années à venir.

Comme nous ne nous opposons pas à cette volonté de relever les défis, nous voterons cette proposition de loi. Mais, je le répète, si ces défis ne sont pas relevés, nous aurons demain de gros soucis, avec l’aggravation des différentes fractures déjà évoquées.

La mobilisation du CPF apportera une réelle aide financière. Mais elle soulève des questions. D’abord, les auto-écoles qui ne proposent pas cette option pourraient se trouver en difficulté demain. Et à l’heure où le CPF montre ses limites dans un certain nombre de domaines, est-il vraiment pertinent de le mobiliser dans le cadre de la formation au permis de conduire ? Malgré ces réserves, nous voterons la présente proposition de loi.

M. Loïc Hervé, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Dominique Vérien. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, 7 millions de personnes – cela représente environ 20 % de la population en âge de travailler – connaissent des difficultés pour se déplacer.

Si, pour les urbains, les transports en commun sont un bon moyen de déplacement, pour les ruraux, la voiture individuelle reste souvent la seule option disponible. Ainsi, pour les jeunes, l’obtention du permis de conduire est le sésame vers l’émancipation et l’autonomie. C’est un prérequis indispensable à l’insertion professionnelle.

Le permis de conduire constitue le premier examen de France, avec plus d’un million et demi de candidats chaque année. Pourtant, l’âge moyen d’obtention augmente ; il est aujourd’hui de 23 ans.

La principale raison d’un tel désintérêt réside probablement dans le coût d’obtention. Certes, le permis de conduire n’a jamais été peu coûteux, mais il faut aujourd’hui débourser entre 1 600 euros et 2 000 euros pour l’obtenir, et ce avec de fortes disparités territoriales.

Les délais à rallonge pour passer l’examen sont aussi une cause de surcoût, les candidats étant naturellement amenés à prendre plus d’heures de conduite, sans que cela garantisse la réussite à l’examen. Le taux de réussite, qui est en baisse par rapport aux années précédentes, n’est que de 58,7 % à l’examen de conduite, et de 50,2 % au code.

M. Loïc Hervé, rapporteur. Exact !

Mme Dominique Vérien. Dans l’Yonne, il y a malheureusement un certain nombre de jeunes qui, après avoir été décrocheurs scolaires, sont en grande difficulté pour trouver du travail. L’une de ces difficultés réside dans l’absence de permis de conduire et de véhicule. La plupart du temps, ils ont essayé de passer le permis, et ont échoué au code : j’ai bien dit au code ! Ils ne viennent donc pas encombrer les files d’attente pour passer l’examen pratique. En revanche, ils encombrent celles du RSA…

Avez-vous essayé, vous qui, pour beaucoup, devez avoir le permis, de repasser le code ? On cherche moins à vous apprendre à vous diriger sur la route qu’à vous piéger avec des questions improbables, questions qui se poseront peut-être une fois dans votre vie, mais dans vingt ans, à un moment où vous aurez alors oublié la réponse ! Mieux encore, parfois, hésitant entre deux réponses, vous en choisissez une, mais – pas de chance ! – il fallait cocher les deux… Bref, c’est une machine à échec, qui fait un tri certain entre les différents niveaux d’étude et de culture. C’est une machine à échec, qui fait que nombre de jeunes conduisent quand même, au mieux un scooter, au pire une voiture. Et lorsqu’ils se font arrêter sans permis, on leur demande de se rendre au tribunal, à 50 kilomètres de là, sans transport en commun…

Une telle situation n’est pas satisfaisante au regard de l’importance de cet examen. Toutefois, comme cela relève du règlement, je n’ai pas déposé d’amendement.

La présente proposition de loi tente de réduire les coûts et les délais pour passer le permis.

Comme pour le code, nombre de ces nouvelles mesures auraient pu être prises par voie réglementaire – je pense en particulier au recrutement des inspecteurs –, ce qui aurait probablement permis d’aller plus vite. Il faut croire que le calendrier parlementaire n’est pas aussi rempli que celui de nos auto-écoles…

Mais ce texte n’est pas totalement dépourvu d’intérêt ; il contient même des mesures de bon sens.

Dans le détail, l’article 1er prévoit la création d’une plateforme recensant l’intégralité des aides disponibles pour la préparation du permis de conduire.

Oui, il existe des aides pour financer son permis de conduire. La délégation à la sécurité routière ne recense pas moins de douze dispositifs régionaux, trente-cinq dispositifs départementaux et plus d’une centaine de dispositifs communaux ou intercommunaux.

Beaucoup d’aides donc, sans doute un peu trop pour que l’aspirant conducteur s’y retrouve. La création de cette plateforme nationale sera donc un précieux outil, de nature réglementaire bien sûr, mais utile.

Notre commission – je salue ici le travail et l’enthousiasme de notre rapporteur, Loïc Hervé – a fait le choix de supprimer une disposition adoptée en séance à l’Assemblée nationale : il était prévu que les collectivités et structures apportant un financement aux candidats pour le permis de conduire établissent chaque année un bilan de leurs interventions. C’était probablement la meilleure façon de les dégoûter d’aider !

Sinon, dans ce texte, l’article 1er bis vise à simplifier le cadre juridique permettant d’organiser dans les lycées, en dehors du temps scolaire, l’épreuve théorique du permis de conduire et sa préparation, en se contentant de l’autorisation du représentant de l’établissement.

L’article 2 étend la possibilité d’utiliser le CPF à toutes les catégories de permis de conduire d’un véhicule terrestre à moteur. Il est largement utilisé, aujourd’hui, pour le permis B : 90 % des 783 000 formations. Les autres permis seront finançables dès le 1er janvier 2024 par ce biais.

C’est un fort enjeu financier là aussi, puisque environ 160 000 personnes passent chaque année le permis moto.

Attention toutefois à préserver le lien entre formation et emploi et à ne pas dénaturer le CPF.

Enfin, l’article 3 étend les possibilités de recourir aux agents publics comme examinateurs des épreuves de conduite du permis B, en supprimant la condition limitant cette possibilité aux seuls départements où le délai médian entre deux présentations d’un même candidat est supérieur à quarante-cinq jours. La commission a rendu obligatoire ce recours, si les quarante-cinq jours sont dépassés. Merci pour les candidats au permis !

En conclusion, le groupe Union Centriste votera ce texte.

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme Maryse Carrère. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le 14 août prochain, nous fêterons les 130 ans du décret du préfet Lépine aux termes duquel nul « ne pourra conduire un véhicule à moteur mécanique s’il n’est porteur d’un certificat » pour lequel il aura fait « la preuve, devant l’ingénieur en chef des mines chargé du service des appareils à vapeur, qu’il possède l’expérience nécessaire pour l’emploi prompt et sûr des appareils de mise en marche et d’arrêt et pour la direction du véhicule ». Cette première à Paris allait se généraliser moins de dix ans plus tard.

Ce bref détour historique nous rappelle combien le sujet du permis de conduire n’a rien d’anodin. La question de son obtention est primordiale, notamment dans les territoires ruraux, où la voiture reste pour les habitants le meilleur, si ce n’est le seul, moyen de déplacement.

La problématique peut se décliner de plusieurs manières. Une première est celle des carences en matière de mobilité collective. Dans de nombreux territoires, les transports en commun sont encore trop peu développés.

À l’heure où chacun scrute son bilan carbone, à l’heure où le prix de l’énergie et des carburants s’envole, l’État doit donner les moyens aux Français de vivre, en recourant le moins possible à la voiture individuelle.

La tâche a été réalisée dans les grandes villes et souvent de manière réussie. Le chantier est d’envergure dans le milieu rural et souvent impossible. Malgré tout, il faut continuer d’avancer.

La question du permis de conduire nous pousse aussi à réfléchir aux problématiques de sécurité routière. C’est d’ailleurs l’essence de ce certificat de capacité qu’avait institué le préfet Lépine.

Après une tendance à la baisse au début des années 2010, nous observons une stagnation des chiffres de l’accidentalité routière dans notre pays. Sans surprise, les plus touchés, notamment par les accidents mortels, sont les jeunes conducteurs, en particulier ceux âgés de 18 ans à 25 ans.

Il y a évidemment une part d’inéluctable dans ce constat : l’inexpérience des novices. Mais il existe certainement des axes d’amélioration. Cela peut venir des outils pédagogiques comme du développement de la conduite accompagnée, mais également des campagnes de sensibilisation ou du renforcement des sanctions, notamment en ce qui concerne l’alcoolémie ou la consommation de stupéfiants.

Enfin, s’interroger sur l’obtention du permis de conduire revient à s’interroger sur son coût et sur l’accès à l’examen.

Nous arrivons ici au cœur de cette proposition de loi, qui ne sera peut-être pas la plus révolutionnaire et la plus attendue de la législature, mais qui aborde une difficulté que rencontre chaque jeune majeur.

Si l’on en croit une étude récente, le coût moyen du permis de conduire en France est de 1 804 euros lorsqu’il est passé dans une auto-école traditionnelle.

C’est un montant évidemment important, surtout lorsqu’on le demande à quelqu’un qui doit aussi financer ses études, voire un logement. Tout le monde n’a pas la chance de pouvoir compter sur ses parents pour tout cela.

Bien entendu, comme l’ont souligné les auteurs du texte, il existe de nombreux dispositifs d’aide pour le financement, comme le permis à un euro par jour pour les jeunes, l’aide financière pour certaines personnes inscrites à Pôle emploi ou encore la mobilisation du compte personnel de formation pour certains permis.

Je ne vois donc aucune difficulté à la mise en place d’une plateforme numérique nationale d’information sur les dispositifs de financement du permis de conduire, même si je ne suis pas sûre qu’une loi soit nécessaire pour cela.

Je rejoins la position de notre commission, qui, sur l’initiative de son rapporteur, a supprimé l’obligation de bilan annuel, trop lourde et peu utile, pour les collectivités et structures apportant un financement.

Le groupe du RDSE ne voit pas de difficulté à suivre la commission en votant son texte.

Je conclurai en évoquant l’article 3, qui prévoit le recours élargi à des agents publics ou contractuels comme examinateurs autorisés à faire passer l’épreuve de permis de conduire. Ce dispositif est sans doute nécessaire pour répondre dans l’urgence aux besoins en examinateurs, afin de réduire les délais pour passer l’examen.

Pour autant, cela ne me semble pas être une solution pérenne. Il existe un corps de métier spécifique, celui des inspecteurs du permis de conduire, qui suivent un parcours et une formation adaptés.

Nous pensons qu’il vaudrait mieux valoriser ce métier et recruter davantage d’inspecteurs plutôt que de participer à une tendance à laquelle notre groupe n’est pas favorable : l’augmentation du nombre des agents contractuels dans la fonction publique.

Le groupe du RDSE votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Antoine Lefèvre. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il était hier un sésame incontournable et convoité ; il est désormais boudé pour son coût, sa difficulté et une utilité jugée moindre. Le permis de conduire, qui a fêté son centenaire l’année passée, se heurte aux aléas de notre époque.

D’abord, les contraintes liées à la sécurité routière ont amplement complexifié son obtention, notamment en zone urbaine. On dénotait ainsi 47 % de réussite à l’examen pratique dans le Rhône ou à Paris contre 75 % en Lozère ou encore 78 % à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Ensuite, son coût a considérablement augmenté : de 1 500 francs en moyenne, soit 200 euros, en 1981 contre 1 592 euros en moyenne en 2022, là encore, avec de grandes disparités territoriales.

Enfin, le développement des nouvelles mobilités ou les considérations écologiques rendent son obtention moins nécessaire qu’elle ne l’était par le passé, notamment pour les résidents des zones urbaines.

Pourtant, le permis de conduire demeure le passeport vers la liberté pour un grand nombre de jeunes au lendemain de leurs 18 ans. C’est le seul moyen pour nombre de nos concitoyens d’assurer leur autonomie dans les territoires ruraux ou les petites villes, où l’offre de transports est souvent insuffisante, voire inexistante.

Il est par ailleurs indispensable au quotidien à la mobilité de millions de travailleurs, au point d’être une condition sine qua non de recrutement sur certains emplois.

C’est pourquoi il paraît aujourd’hui quasiment anachronique que le permis de conduire demeure un parcours du combattant pour autant de personnes : 20 % des Français en âge de travailler, soit 7 millions d’individus, se trouveraient en situation de précarité en termes de mobilité ; 28 % des personnes en insertion professionnelle auraient même déclaré avoir dû refuser une formation ou un emploi en l’absence de moyens de déplacement.

Il convient bien évidemment de saluer l’initiative de cette proposition de loi. Les rectifications apportées par notre collègue rapporteur, Loïc Hervé, vont dans le sens d’un assouplissement des contraintes techniques et administratives qui pèsent sur l’examen.

Je pense plus spécifiquement à la suppression du bilan mentionné à l’article 1er, qui imposait aux collectivités de retracer l’ensemble des financements apportés aux candidats au permis. L’objectif de transparence est louable ; imposer une nouvelle contrainte sur les collectivités ou les missions locales l’est moins.

Je salue aussi la suppression de l’article introduit par les députés qui tendait à renvoyer à un décret en Conseil d’État la tâche d’assouplir l’exigence de présenter l’ASR ou l’ASSR 2 pour les moins de 21 ans.

Cependant, il reste plusieurs points sur lesquels le texte ne répond pas pleinement aux problématiques identifiées sur le sujet.

Le recrutement de nouveaux inspecteurs du permis par voie externe est une première avancée, mais elle ne saurait résoudre durablement la question des délais de présentation de l’examen, quand on sait que les facteurs susceptibles de prolonger ceux-ci sont davantage d’ordre financier pour bon nombre de nos concitoyens.

Le financement par le CPF est une solution judicieuse pour les personnes en emploi. La proposition d’une cessibilité au sein d’un seul et même foyer, comme entre parents et enfants, est le fruit d’une bonne intention, mais devra être retravaillée pour combler les risques de fraude et de mésusage et pour atténuer les risques d’iniquité.

Les droits à la formation sont en effet variables selon la profession, généralement plus généreux pour les professions les plus qualifiées. Cela risquerait donc de pénaliser les ménages les moins aisés.

Le principal problème réside, sans surprise, dans le coût de l’épreuve et des heures de conduite. Les aides financières sont insuffisantes et cette proposition de loi n’y apporte pas de solutions concrètes.

Les missions locales pour l’emploi et la formation, les centres communaux d’action sociale (CCAS) et les agences de Pôle emploi peuvent apporter un complément de financement pour aider les plus en difficulté, mais elles ont des moyens d’action limités.

Le plan gouvernemental « 1 jeune, 1 solution » devra aller plus loin sur les financements proposés et associer les collectivités dans le pilotage de ces fonds.

Enfin, je ne suis pas favorable à un abaissement trop important de l’âge légal d’obtention du permis. On a pu observer dans les dernières statistiques fournies par l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière que la mortalité décroissait avec l’âge : le ratio moyen atteint 101 tués par million d’habitants pour les jeunes de 18-24 ans, avant de descendre à 61 pour les 25-34 ans, puis à 52 pour les 35-74 ans.

Si un abaissement de l’âge venait à être adopté, il faudrait absolument mettre les bouchées doubles sur la sensibilisation et la prévention routières dans les collèges et les lycées. À l’heure actuelle, les campagnes font effet, mais elles ne sont pas encore suffisantes.

Bien évidemment, la demande des jeunes provenant des territoires ruraux s’entend, mais la réponse ne doit pas entraîner un retour en arrière sur les progrès réalisés en matière de sécurité routière.

La route est encore longue pour faire du permis de conduire une étape accessible à tous financièrement et matériellement, tout en gardant comme finalité suprême la lutte pour la sécurité routière.

Le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi, mais appelle le Gouvernement à consolider les moyens de son action en la matière. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau.

M. Joël Guerriau. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, chaque année, 1,5 million de nos concitoyens aspirent à obtenir leur permis de conduire, un rite de passage vers l’indépendance et la mobilité. Cependant, les candidats se heurtent à des obstacles financiers et à des difficultés pour obtenir des heures de formation ou un créneau pour l’examen pratique.

Si le permis demeure pour les plus jeunes une première étape vers davantage d’autonomie, c’est aussi un passeport incontournable pour l’emploi, ainsi qu’un outil primordial de l’insertion sociale, en particulier dans les territoires ruraux. Je le mesure dans les 207 communes de mon département.

Cette réalité justifie que le législateur cherche à lever les obstacles qui freinent l’accès au permis de conduire, afin de permettre à tous les candidats de se présenter à l’examen dans des conditions de délai et de coût raisonnables.

La proposition de loi que nous examinons ce soir tend ainsi à faciliter le passage et l’obtention de l’examen du permis de conduire. Ce texte s’articule autour de trois objectifs : rendre l’accès au permis moins coûteux, plus simple et plus rapide.

L’article 1er a pour objet la création d’une plateforme numérique unifiée destinée à rassembler toutes les aides financières accessibles aux jeunes pour les accompagner dans l’obtention de leur permis de conduire. Cette initiative revêt une importance cruciale, car elle vise à offrir une visibilité nationale et simplifiée sur les soutiens disponibles de la part tant des collectivités territoriales que de l’État.

Trop souvent, nos jeunes concitoyens se voient contraints d’abandonner leur projet de préparation au permis en raison du coût moyen de 1 600 euros qui peut représenter un obstacle insurmontable pour certains. En facilitant l’accès aux aides existantes, cette plateforme numérique incarne un véritable enjeu d’égalité des chances permettant à chaque jeune de bénéficier d’un accompagnement adapté pour franchir cette étape déterminante de sa vie.

L’article 1er bis vise, quant à lui, à simplifier la procédure permettant d’organiser la préparation et le passage de l’épreuve théorique dans les établissements scolaires. Il présente une indéniable utilité, car il renforce l’accès au permis de conduire, notamment pour les élèves des zones rurales souvent délaissés et éloignés des écoles de conduite et des centres d’examen.

L’article 2, en étendant le financement du permis de conduire à toutes les catégories grâce au compte personnel de formation, offre une nouvelle perspective aux personnes en quête d’emploi. Plus de la moitié de celles qui ont utilisé leur CPF pour obtenir leur permis ont vu leur situation professionnelle s’améliorer.

Le permis de conduire est un véritable levier pour redonner confiance et espoir à ceux qui cherchent un emploi, en leur permettant de surmonter les obstacles et d’accéder à de nouvelles perspectives professionnelles.

L’article 2 bis procède à l’ajout de la Caisse des dépôts et consignations, au titre de sa mission de gestion du système d’information du CPF, à la liste des autorités, organismes et agents auxquels sont communiquées les informations relatives à l’existence, la catégorie et la validité du permis de conduire, afin de protéger l’intégrité du permis et de combattre les fraudes.

L’enjeu de l’article 3 est de réduire le délai entre deux passages de l’examen. L’élargissement des postes d’examinateur à d’autres catégories d’agents publics pallie le manque d’inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière, mais peut susciter une inquiétude catégorielle.

Enfin, l’article 3 quater apparaît intéressant, en prévoyant la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement qui permettra d’analyser les conséquences d’un éventuel abaissement de l’âge d’obtention du permis de conduire.

Je profite de l’examen de cette proposition de loi pour attirer votre attention sur la dématérialisation des cartes grises et la possibilité de réaliser des plaques d’immatriculation à l’étranger.

Cela peut être à l’origine de nouvelles fraudes qui peuvent avoir pour conséquence des retraits de points et de permis pour des personnes victimes de plaques dupliquées. Ces personnes peuvent se retrouver, si leur permis est annulé, sans emploi et acculées à un parcours dispendieux et complexe pour défendre leurs droits, alors qu’elles n’y sont pour rien. Il s’agit d’une nouvelle forme de délinquance. Nous devons y être particulièrement attentifs, parce que les conséquences sont catastrophiques pour les personnes concernées.

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, dans les territoires ruraux, les petites villes et les montagnes, la mobilité passe inévitablement par le permis de conduire, qui constitue un passeport pour l’embauche, les visites du quotidien, les loisirs ou encore la vie sociale.

Le groupe Les Indépendants – République et Territoires partage évidemment la volonté de faciliter le passage et l’obtention du permis de conduire et votera, vous l’aurez compris, en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Mélanie Vogel. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord d’excuser Guy Benarroche, qui a suivi ce texte au nom du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, mais qui n’est pas disponible à cet instant pour venir présenter notre position. Je le remplace donc au pied levé ! Vous me pardonnerez de ne pas connaître par cœur l’ensemble des dispositions en discussion.

Je vais peut-être surprendre certains de nos collègues, en particulier celles et ceux qui aiment nous dépeindre comme des anti-voitures, mais les écologistes soutiennent ce texte, qui a pour objet de faciliter l’obtention du permis de conduire, donc potentiellement l’utilisation de la voiture individuelle.

Les écologistes savent en effet qu’obtenir son permis de conduire plus facilement est d’abord une question de justice sociale. L’un des freins à l’obtention du permis de conduire est son coût, et il n’est pas juste que cela soit facile pour certains et beaucoup plus difficile pour d’autres. En particulier quand on est jeune, la voiture, c’est le début de la liberté, la capacité à être mobile de façon indépendante.

Obtenir son permis de conduire plus facilement, c’est aussi une question de justice territoriale.

Quand on habite dans un endroit où la première gare est à trente kilomètres et qu’un train passe toutes les trois heures, on ne peut pas demander aux gens de privilégier le train ! De toute façon, il faut bien une voiture pour aller à la gare… Nous devons réparer les fractures territoriales.

Par ailleurs, et je le dis sans aucune difficulté, la voiture a son rôle à jouer dans les questions environnementales. Je pense notamment à l’autopartage ou au covoiturage. Il existe parfois des situations dans lesquelles l’usage partagé de la voiture est la meilleure solution de mobilité. Je pense en particulier aux zones très isolées ou aux îles, où construire des infrastructures ferroviaires n’est pas forcément la meilleure solution.

Oui, nous voulons réduire l’usage de la voiture et la place qu’elle a prise dans nos villes et dans notre économie, mais nous considérons qu’elle a encore un rôle à jouer.

Nous soutenons donc cette proposition de loi, en particulier la disposition permettant d’utiliser le compte personnel de formation pour passer les épreuves pratiques et théoriques du permis de conduire ; c’est une mesure de bon sens que nous approuvons pleinement.

Nous soutenons aussi la volonté de mieux recenser les aides grâce à une nouvelle plateforme. Mais, au-delà du recensement de l’existant, nous souhaiterions surtout élargir ces aides et notamment rendre gratuites les formations théoriques.

Toutefois, nous n’aimons pas franchement l’article 3, qui autorise tout agent public ou contractuel à faire passer les épreuves pratiques. Demander à des personnes dont ce n’est pas le métier de faire passer le permis de conduire n’est pas une solution. Je préfère que l’on forme des professionnels. Il n’est quand même pas anodin de faire passer le permis de conduire ; c’est une question de sécurité.

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, faciliter l’obtention du permis de conduire ne va pas résoudre nos problèmes de mobilité. Comme il faut bien que je tombe un peu dans les clichés écologistes, je vais vous parler du train !

Nous devons absolument développer notre réseau ferroviaire.

À la sortie de la Première Guerre mondiale, la France comptait 70 000 kilomètres de voies ferrées, nous en avons aujourd’hui moitié moins ; 30 000 kilomètres. Ce n’est quand même pas normal ! Nous devons mettre l’argent public en priorité sur cette politique.

Au-delà du développement du réseau en kilomètres de voies et en fréquence de passage des trains, nous devons aussi mettre en place une tarification abordable.

Aucun modèle n’est parfait, mais nous pouvons nous inspirer de nombre de pays de l’Union européenne, en particulier là où les écologistes ont été ou sont au pouvoir, par exemple en Allemagne, en Espagne, au Luxembourg ou en Autriche. Ainsi, l’Allemagne vient de mettre en place un ticket-climat à 49 euros qui permet un accès à tout le réseau ferroviaire régional.

Développement du réseau ferroviaire et tarification accessible : nous devons avancer dans ce sens, si nous voulons réduire nos émissions de gaz à effet de serre et offrir de nouvelles formes de mobilités à la population. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)