Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 286 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l’adoption 251
Contre 91

Le Sénat a adopté.

Article 12
Dossier législatif : proposition de loi pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France
Article additionnel après l'article 12 bis - Amendement n° 97

Article 12 bis (nouveau)

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport dressant un bilan de la mise en œuvre de l’article L. 236-1 A du code rural et de la pêche maritime et présentant les possibilités de mise en place de clauses miroirs aux frontières du marché intérieur.

Mme le président. L’amendement n° 96, présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Ce rapport comporte un bilan sur la politique de contrôle sanitaire des denrées alimentaires importées. Il précise le nombre de contrôles effectués pour l’année, dont le nombre de contrôles aléatoires, le nombre d’agents affectés à ces contrôles, les résultats de ces enquêtes, ainsi que les mesures, mises en œuvre et proposées, au niveau national et européen pour mieux lutter contre les risques sanitaires et environnementaux liés aux produits importés.

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Nous proposons de compléter le contenu du rapport relatif à la mise en œuvre des clauses miroirs, dont on parle si souvent, plus précisément en ce qui concerne l’article 44 de la loi Égalim.

Ce dossier n’avance pas. Les moyens affectés par l’État pour protéger notre agriculture de la concurrence déloyale des produits importés qui ne sont pas conformes aux exigences que, à raison, nous nous appliquons sont bien trop faibles pour permettre à l’administration de mener à bien sa mission.

L’instauration de clauses miroirs aux frontières du marché intérieur serait pourtant un moyen de protéger notre agriculture de la concurrence déloyale, comme cela est démontré dans le rapport d’information du Sénat sur les retraits et les rappels de produits à base de graines de sésame importées d’Inde ne respectant pas les normes minimales requises dans l’Union européenne et dans le rapport sur le projet de loi de finances pour 2023.

Les producteurs font face à une concurrence déloyale, tandis que les consommateurs sont exposés à des risques sanitaires.

La lutte contre les importations ne respectant pas nos normes sanitaires et environnementales est l’un des éléments permettant de construire une véritable compétitivité pour notre agriculture dans ses dimensions économiques, sociales, environnementales et sanitaires.

Nous proposons que soit dressé un bilan de la politique de contrôle sanitaire des denrées alimentaires importées. Au Sénat, on parle depuis très longtemps des clauses miroirs, sur lesquelles nous sommes assez nombreux à être d’accord. Il faut désormais aller de l’avant pour lutter contre la concurrence déloyale.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Sophie Primas, rapporteur. Favorable.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre. Défavorable.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 96.

(Lamendement est adopté.)

Mme le président. Je mets aux voix l’article 12 bis, modifié.

(Larticle 12 bis est adopté.)

Article 12 bis (nouveau)
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Article 13

Après l’article 12 bis

Mme le président. L’amendement n° 97, présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 12 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Pour l’atteinte des finalités de la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation mentionnées au présent I, la France soutient au niveau international et européen le principe d’un traitement différencié dans le cadre des relations commerciales internationales du secteur agricole, qui l’exclut de tout accord commercial global ou de libre-échange. »

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Si les clauses miroirs évoquées dans la présente proposition de loi peuvent constituer un outil pour amorcer une régulation des échanges, elles ne seront pas suffisantes.

Par ailleurs, la Commission européenne semble résolue à conclure l’accord avec la Communauté économique des pays d’Amérique du Sud (Mercosur), alors que les conditions, notamment des clauses miroirs suffisantes, ne sont pas réunies.

C’est pourquoi nous proposons d’inscrire, parmi les finalités de la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation, le soutien de la France, à l’échelon international et européen, au principe d’un traitement différencié du secteur agricole dans le cadre des relations commerciales internationales, afin de l’exclure de tout accord commercial global ou de libre-échange.

Sans régulation des marchés agricoles et sans sortie de ce secteur des accords de libre-échange, la construction de la compétitivité environnementale, sociale, économique et sanitaire de notre agriculture sera nécessairement mise à mal par la concurrence de productions moins-disantes.

Penser que les agriculteurs français pourront rivaliser avec leurs concurrents à l’échelle mondiale est un leurre. Une telle rivalité n’est en outre pas souhaitable, car la compression des normes et des charges se fait au détriment de la protection sociale des travailleurs et de l’environnement.

Le choix des systèmes alimentaires doit s’effectuer sans dumping, pour atteindre la souveraineté alimentaire telle qu’elle a été définie par La Via Campesina lors du sommet de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) : il s’agit du « droit des peuples à une alimentation saine et culturellement appropriée, produite par des méthodes […] durables, et le droit des peuples de définir leurs propres systèmes agricoles et alimentaires ».

Tel est le sens de cet amendement.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Sophie Primas, rapporteur. Je considère qu’il s’agit d’un amendement d’appel, parce que l’exclusion du secteur agricole de tout accord commercial global ou de libre-échange ne me semble ni réaliste ni même souhaitable.

Néanmoins, je partage les préoccupations de notre collègue : il faut être attentif à l’addition des accords de libre-échange conclus à l’échelon européen et à leurs conséquences sur chacune des filières.

Enfin, cet amendement s’apparentant à une injonction au Gouvernement, la commission y est défavorable.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement, pour les raisons que vient d’invoquer Mme la rapporteure.

J’ajoute, à la suite de l’échange que nous avons eu précédemment sur les questions de surtransposition, que si nous étions déjà d’accord entre Européens sur les normes à appliquer, l’idée qu’il faut avancer sur les clauses miroirs serait davantage acceptée.

Quand je dis à nos partenaires européens qu’il faut mettre en œuvre des clauses miroirs, ils me répondent que les sujets concernés relèvent d’une réglementation française. C’est notamment pour cette raison que je milite pour des réglementations européennes s’appliquant dans tous les États membres : c’est à partir de ce moment-là que nous pourrons imposer des clauses miroirs dans les accords commerciaux.

Enfin, comme l’a indiqué Mme la rapporteure, nous avons besoin d’accords internationaux et de règles dont l’agriculture ne doit pas être exclue. C’est d’ailleurs parce que nous signons des accords internationaux que nous pouvons faire reconnaître nos signes de qualité à l’extérieur de nos frontières et empêcher que certains faussaires ne viennent troubler le jeu.

Nous devons travailler sur les clauses miroirs, les penser en Européens et ne pas exclure totalement le secteur agricole des accords internationaux, ce qui serait contraire à la vocation exportatrice de notre pays.

Mme le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Je remercie notre collègue Daniel Salmon d’avoir déposé cet amendement. Il nous donne l’occasion de parler un peu de la question du libre-échange, alors que le Parlement est privé de débat sur ce sujet – il y a quand même là un petit problème démocratique.

Je le dis de nouveau, il faudra bien que le Ceta, l’accord économique et commercial global avec le Canada, soit examiné un jour par le Sénat.

D’ailleurs, monsieur le ministre, je vous répète également que je suis toujours disponible pour visiter une exploitation agricole qui trouverait des avantages à la signature de cet accord.

M. Marc Fesneau, ministre. Je ne l’ai pas oublié !

M. Fabien Gay. De même, si vous trouvez une exploitation pour laquelle un accord avec le Mercosur serait bénéfique, je suis preneur !

Vous êtes le quatrième ministre de l’agriculture en six ans à me dire que vous allez me faire visiter une telle exploitation : j’attends toujours !

Pour ma part, je ne comprends pas comment le Sénat peut continuer à se laisser humilier ainsi par le Gouvernement. Allons-nous un jour contraindre le Gouvernement à débattre au Parlement du Ceta et à nous permettre de voter sur cet accord ? En cas de vote négatif, peut-être remettrons-nous sur la table certaines choses ?

Les clauses miroirs, c’est très intéressant : il ne faut pas accepter d’importer des produits qui sont interdits en France. Je pense que nous pourrions nous mettre d’accord sur ces questions avec une grande partie de la droite sénatoriale.

Par ailleurs, monsieur le ministre, je suis ravi d’apprendre qu’il faut des accords de libre-échange pour faire du commerce ! Si tel était le cas, nous n’aurions pas beaucoup commercé depuis le Moyen Âge ! Ainsi, il aurait fallu attendre l’ultralibéralisme et le libre-échangisme pour faire du commerce ? J’ignorais que l’on vivait en autarcie avant les années 1970. (Sourires.) Soyons un peu sérieux !

Je pense que la question se pose d’inscrire dans les traités de libre-échange une exception agricole, à l’instar de l’exception culturelle, car l’agriculture est toujours la variable d’ajustement dans ces traités. Sommes-nous d’accord pour dire que les produits alimentaires et agricoles ne sont pas des produits comme les autres ?

Il faudra bien, à un moment, que nous ayons un débat sérieux sur ces questions. Et j’espère que le Sénat dans son ensemble se fera un jour respecter par le Gouvernement ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Pierre Cuypers et Mme Anne Chain-Larché applaudissent également.)

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 97.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme le président. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Sophie Primas, rapporteur. Mes chers collègues, je vous informe que, depuis la reprise de la séance, nous avançons au rythme de quatorze amendements à l’heure, ce qui pourrait nous conduire, si nous continuions ainsi, à achever l’examen du texte vers trois heures trente du matin.

Or, pour des raisons de cohérence, je vous propose d’essayer d’achever l’examen de ce texte ce soir. Si nous accélérions un peu notre rythme, nous pourrions peut-être nous coucher à une heure un peu plus raisonnable. Ne voyez toutefois dans mon propos aucune volonté de ma part de contraindre le débat très intéressant que nous avons ce soir.

Mme le président. Mes chers collègues, il est presque minuit, je vous propose d’ouvrir la nuit afin de terminer l’examen de ce texte dans les conditions que vient d’indiquer Mme le rapporteur.

Il n’y a pas d’objection ?…

Il en est ainsi décidé.

Article additionnel après l'article 12 bis - Amendement n° 97
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Article 14

Article 13

I. – Les deuxième et troisième phrases du deuxième alinéa de l’article L. 1313-5 du code de la santé publique sont remplacées par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, le ministre chargé de l’agriculture peut, par arrêté motivé, suspendre une décision du directeur général prise en application du onzième alinéa de l’article L. 1313-1, après avoir réalisé une balance détaillée des risques sanitaires, environnementaux et de distorsion de concurrence avec un autre État membre de l’Union européenne, et évalué l’efficience de solutions alternatives. »

II. – La section 1 du chapitre III du titre V du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 253-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 253-1-1. – Un retrait d’autorisation ou une modification de l’autorisation d’utilisation visant à restreindre l’usage d’un produit emporte l’obligation pour l’État de financer un accompagnement technique et de recherche adapté pour les professionnels.

« Dans le cas d’une décision de retrait, et sous les réserves mentionnées à l’article 46 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil, le délai de grâce est systématiquement porté à six mois pour la vente et la distribution, et à un an supplémentaire pour l’élimination, le stockage et l’utilisation des stocks existants.

« Le directeur général peut, à l’occasion de l’instruction d’une demande d’autorisation préalable à la mise sur le marché et à l’expérimentation telle que décrite à l’article L. 1313-1 du présent code, s’en remettre à la décision, par arrêté, du ministre chargé de l’agriculture. »

Mme le président. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 40 rectifié est présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme Préville, M. Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau, Redon-Sarrazy, J. Bigot, Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 63 est présenté par M. Gay, Mmes Varaillas, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 114 est présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 40 rectifié.

M. Christian Redon-Sarrazy. Cet amendement vise à supprimer l’article 13.

Initialement, cet article prévoyait que l’Anses devait présenter, dans ses décisions d’autorisation de mise sur le marché (AMM) des produits phytopharmaceutiques, une balance détaillée des bénéfices et des risques sanitaires, environnementaux et économiques.

En commission, la rapporteure a proposé de réécrire le dispositif, estimant que l’Anses ne pourrait pas assumer cette mission, et donné au ministre de l’agriculture le pouvoir de suspendre une décision du directeur général de l’Anses sur le fondement de cette balance bénéfices-risques.

L’article 13 prévoit également d’introduire un délai de grâce systématique en cas de retrait d’une AMM pour permettre, dans un premier temps, et pendant six mois, de continuer à vendre et distribuer ce produit, puis, dans un second temps, de continuer à l’utiliser, à le stocker ou à l’éliminer pendant une année supplémentaire.

Les sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s’opposent fermement à ces deux propositions, qui, si elles étaient adoptées, remettraient totalement en cause le processus actuel d’autorisation et de retrait des AMM et affaibliraient fortement l’Anses, et ce uniquement dans une logique économique.

D’une part, nous estimons que l’Anses est une agence d’expertise scientifique indépendante, dont le rôle est notamment d’évaluer l’impact d’un produit sur la santé humaine et l’environnement. Il semble inenvisageable que ses décisions puissent être dictées ou remises en cause sur le fondement de critères économiques.

Nous considérons qu’un ministre de l’agriculture ne peut pas avoir le pouvoir de suspendre à son gré une décision de cette agence, notamment s’il peut invoquer, à l’appui de sa décision, les distorsions de concurrence avec un autre État membre.

Nous savons tous ici qu’il n’en faudra pas plus à certains lobbies pour s’engouffrer dans la brèche, exercer des pressions et produire des analyses plus ou moins fondées, comme l’a bien montré le récent scandale Phytéis.

D’autre part, l’introduction d’un délai de grâce automatique, qui pourrait courir pendant une durée de dix-huit mois, pose aussi de graves questions en matière de sécurité sanitaire et environnementale.

Rien, dans cet article, ne va dans le bon sens. Une fois de plus, nous avons le sentiment que, derrière la recherche de compétitivité, il y a une volonté de déréguler et de déréglementer.

Mme le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 63.

M. Fabien Gay. Il est défendu, madame la présidente.

Mme le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 114.

M. Joël Labbé. Il est également défendu !

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Sophie Primas, rapporteur. La commission est évidemment défavorable à la suppression de cet article.

Je l’ai dit lors de la discussion générale, nous ne touchons pas aux missions de l’Anses, nous redonnons au ministre de l’agriculture un pouvoir politique sur un certain nombre de molécules.

Il s’agit de lui permettre non pas d’agir à son gré, mais de procéder à une analyse bénéfices-risques, de vérifier si les molécules qui sont en cause sont autorisées ou pas dans d’autres pays européens, s’il existe des solutions de repli et d’évaluer les conséquences sur les filières et sur l’industrie agroalimentaire.

Fort de ces éléments, le ministre pourra ensuite prendre une décision, pousser la recherche afin de trouver des solutions de remplacement et inciter l’Union européenne à décréter une interdiction totale dans l’ensemble de l’Union européenne, si cela est nécessaire.

Cela ne remet absolument pas en cause l’indépendance de l’Anses, qui continuera de rendre ses avis de la même manière.

J’avoue être très surprise de la position du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, qui a adopté des positions très fortes sur le projet de fusion de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) lors de l’examen du projet de loi relatif au nucléaire. Vous avanciez alors la question de l’indépendance ; vous vous contredisez aujourd’hui, mais peu importe.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre. Paradoxalement, à partir des mêmes arguments que Mme la rapporteure, j’émets un avis favorable sur ces amendements.

Je n’ai jamais dit, y compris lors des récentes controverses sur ce sujet, qu’il fallait remettre en cause les prérogatives de l’Anses. Jamais ! J’ai simplement dit qu’on pouvait débattre avec elle, comme vous le faites d’ailleurs vous-même dans bien des cas, quand cela vous arrange, sur le rapport coût-efficacité et sur les conséquences de ses travaux.

Mesdames, messieurs du groupe écologiste, vous avez vous-mêmes remis en cause les préconisations de l’Anses sur la grippe aviaire, ainsi que sur les nitrites.

M. Guillaume Gontard. Nous n’en avons pas le pouvoir !

M. Marc Fesneau, ministre. Si, si, vous avez remis en cause les préconisations de l’Anses sur le plan nitrites, mais aussi sur d’autres sujets.

La question des néonicotinoïdes est un problème de droit européen et de surtransposition française. L’Anses n’a rien à voir dans cette affaire.

Cela étant, il ne faut pas nier les obstacles. Nous devons mettre fin à l’utilisation des néonicotinoïdes, tout le monde est d’accord sur ce point, y compris ici au Sénat.

M. Pierre Cuypers. On est d’accord !

M. Marc Fesneau, ministre. La dérogation n’aura duré que deux ans, mais le fait est que nous avions initialement prévu trois ans. Si certains souhaitent que l’on renouvelle cette dérogation pour trois ans, puis encore pour trois ans, etc. alors le problème est d’une autre nature. Il nous faut trouver des solutions de remplacement, car nous sommes pour l’instant dans une impasse.

Nous avons besoin que l’Anses éclaire les débats et qu’elle délivre les autorisations de mise sur le marché, mais il n’est pas inutile que nous ayons un débat sur la synchronisation avec les négociations européennes.

Monsieur le sénateur Labbé, vous avez dit que l’on connaissait déjà la décision de l’Autorité européenne de sécurité des aliments. Non, nous ne la connaissons pas : une décision sur le S-métolachlore sera rendue dans quelques semaines, à la fin du mois de mai. Qu’adviendra-t-il si la décision prise à l’échelon européen diffère de celle de l’Anses ?

M. Laurent Duplomb. C’est ce qui va se passer !

M. Marc Fesneau, ministre. Qu’aurons-nous gagné ?

La question qui se pose n’est pas de savoir ce que dit l’Anses sur le fond, d’autant qu’elle a accordé un délai de six mois pour la vente des produits contenant du S-métolachlore et d’un an pour l’utilisation des stocks ; la question est, et cela ne me paraît pas révolutionnaire, d’essayer de synchroniser les agendas européens et nationaux.

Mais je m’éloigne de l’article 13. Je le redis, j’émets un avis favorable sur les amendements de suppression, car cet article ne règle pas les questions que nous nous posons sur l’Anses. Les sujets qu’il nous reste à traiter sont, pour certains, devant nous, en particulier la synchronisation avec le calendrier européen.

Le risque n’est pas ici la concurrence avec des pays tiers hors de l’Union européenne. Si certaines molécules étaient durablement interdites dans notre pays, bien avant les autres États membres de l’Union européenne, aucune disposition ne nous permettrait d’empêcher l’arrivée des produits. Ce sont alors nos filières qui disparaîtraient, quand d’autres pays continueraient d’utiliser des produits que nous aurions, nous, interdits. Tels sont les sujets sur lesquels nous devons travailler, dans le cadre d’un débat apaisé.

L’Anses n’est pas une autorité indépendante, c’est une agence, placée sous cotutelle conformément à la loi – le dire n’a rien d’insultant. En tant que tutelle, le ministre de l’agriculture a le droit d’émettre un avis et d’essayer de trouver la voie d’un compromis. Cela ne remet pas en cause la validité des éléments scientifiques utilisés par l’Anses.

Nous devons continuer de travailler sur ces sujets afin d’éviter les surtranspositions.

Mme le président. La parole est à M. Serge Mérillou, pour explication de vote.

M. Serge Mérillou. Mon explication de vote portera sur l’article 13, qui est au cœur des débats sur cette proposition de loi.

J’ai déjà fait part de mes réticences sur un certain nombre de dispositions concernant l’usage des pesticides.

Comme je l’ai expliqué lors de la réunion de la commission des affaires économiques, les modifications qui ont été introduites en commission sont pour moi une ligne rouge, car elles induisent un durcissement du dispositif.

La version initiale de cet article préservait la souveraineté de l’Anses, et ce malgré l’introduction d’un calcul bénéfices-risques. En offrant au ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire un droit de veto sur ses futures décisions, les modifications introduites en commission retirent de facto son pouvoir décisionnaire à l’Agence.

Confier la décision finale de l’interdiction d’un produit phytosanitaire au ministre présente le risque que les arbitrages ne se fassent pas dans le but de défendre le seul intérêt général.

C’est la raison pour laquelle, comme je l’ai fait en commission des affaires économiques, je voterai contre l’article 13.

Mme le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Je prends brièvement la parole pour répondre à M. le ministre, qui a avancé à plusieurs reprises le même argument concernant l’Anses et la grippe aviaire.

Monsieur le ministre, il ne vous a pas échappé que nous ne faisions pas partie du Gouvernement. En tant que groupe d’opposition, nous pouvons émettre des critiques contre des décisions de l’Anses. Les choses sont éminemment différentes, quand un ministre en exercice critique une autorité indépendante.

M. Marc Fesneau, ministre. L’Anses n’est pas une autorité administrative indépendante !

M. Daniel Salmon. Je tenais à vous faire remarquer qu’il existe une petite différence entre vous et nous.

M. Laurent Duplomb. C’est sûr !

M. Marc Fesneau, ministre. Elle ne m’avait pas échappé !

Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 40 rectifié, 63 et 114.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme le président. L’amendement n° 127, présenté par Mme Primas, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer les mots :

, par arrêté,

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Sophie Primas, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre. Sagesse.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 127.

(Lamendement est adopté.)

Mme le président. Je mets aux voix l’article 13, modifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 287 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 332
Pour l’adoption 215
Contre 117

Le Sénat a adopté.

Article 13
Dossier législatif : proposition de loi pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France
Article 15

Article 14

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi puis tous les trois ans, un rapport des mesures d’encadrement des pratiques agricoles, en précisant et détaillant les objectifs recherchés, les coûts de la transition, leur couverture par des accompagnements publics ou des rémunérations par les marchés et leurs impacts sanitaires, environnementaux et économiques au regard des objectifs initiaux.

Mme le président. L’amendement n° 21 rectifié ter, présenté par MM. Canévet, Mizzon, Cadic, Levi et Henno, Mme N. Goulet, M. Le Nay et Détraigne, Mmes Havet, Billon, Herzog et Jacquemet, M. Duffourg, Mme Perrot, M. Chauvet et Mme Doineau, est ainsi libellé :

Après le mot :

agricoles

insérer les mots :

ainsi que de l’aquaculture lacustre et de rivière

La parole est à M. Michel Canévet.