Sommaire

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

Mme Nicole Bonnefoy,

Mme Sonia de La Provôté.

Questions d'actualité au Gouvernement

situation à gaza (i)

eaux en bouteille (i)

situation à gaza (ii)

certification des comptes de la caisse nationale des allocations familiales

scandale nestlé et influence privée dans les décisions de l'état

eaux en bouteille (ii)

partenariat stratégique entre londres et l'union européenne en matière de pêche

fermetures de classes

ingérences chinoises en métropole et en outre-mer

fast fashion et taxation des petits colis

certification des comptes de la caisse nationale des allocations familiales

harcèlement et sévices dans l'armée

rapport sur les frères musulmans

morts de sans-abris et politique du logement

entraves normatives et hausse du coût des fertilisants subies par les agriculteurs

lutte contre l'immigration illégale dans les alpes

PRÉSIDENCE DE Mme anne Chain-Larché

vice-présidente

Modification de l'ordre du jour

Communication d'un avis sur un projet de nomination

Communication relative à une commission mixte paritaire

Traité de coopération en matière de défense avec Djibouti

Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale

projet de loi autorisant la ratification du traité de coopération en matière de défense entre la république française et la république de djibouti

Article unique

Lutte contre les fraudes aux aides publiqueS

Adoption définitive des conclusions d'une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques

Article 1er

Article 1er ter

Article 2

Article 2 bis

Article 2 ter A

Article 2 ter B

Article 2 ter

Article 2 quater A

Article 2 quater B

Article 2 quater

Article 2 quinquies

Article 2 sexies

Article 3

Article 3 bis AAA

Article 3 bis AAB

Article 3 bis AAC

Article 3 bis AAD

Article 3 bis AA

Article 3 bis AB

Article 3 bis AC

Article 3 bis AD

Article 3 bis A

Article 3 bis B

Article 3 bis C

Article 3 bis D

Article 3 bis

Article 3 ter

Article 3 quater

Article 4

Article 5

Article 6

Article 7

Article 8

Article 9

Article 10

Article 11

Article 2

Article 2 quater B

Article 2 sexies

Article 3 bis B

Vote sur l'ensemble

Ordre du jour

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

Mme Nicole Bonnefoy,

Mme Sonia de La Provôté.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat, ainsi que sur notre site internet.

J'appelle chacun de vous à observer au cours de nos échanges l'une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, qu'il s'agisse du respect des uns et des autres ou de celui du temps de parole.

situation à gaza (i)

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme Maryse Carrère. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, il n'y a plus de doute : le risque de famine n'a jamais été aussi élevé à Gaza. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) prévoit ainsi que près de deux millions de Palestiniens seront affamés si rien n'est fait rapidement. Ce drame s'ajoute aux dizaines de milliers de personnes – hommes, femmes, enfants – tuées par les bombardements de Tsahal depuis bientôt trente-six mois.

Il ne fait plus de doute non plus que le gouvernement israélien crée délibérément les conditions d'un désastre humanitaire. Il envoie ses « chariots de Gédéon », des chariots de feu, et, dans le même temps, il bloque l'essentiel de l'aide humanitaire. Il empêche que soit charriée la vie plutôt que la mort. Nourriture, eau, médicaments, marchandises, tout manque à Gaza.

Personne n'oublie les odieux attentats du 7 octobre 2023. Reconnaissons cependant que l'objectif initial de la guerre – décimer le Hamas – a considérablement évolué : aujourd'hui, c'est l'ensemble de la population palestinienne qui est visée. On observe par ailleurs l'émergence de projets politiques qui font fi de l'existence des Palestiniens et qui présupposent le consentement de tous les Israéliens.

Une seule ouverture est à noter à ce stade : mon groupe constate avec satisfaction l'intensification des critiques et de la mobilisation à l'échelle internationale.

Notre ministre des affaires étrangères a qualifié Gaza de « mouroir » et de « cimetière ». La France est claire et doit continuer d'œuvrer pour la paix. Plusieurs dirigeants européens, le Royaume-Uni et le Canada se mobilisent d'ailleurs à ses côtés.

Je salue également la demande, par une majorité d'États membres, de la révision de l'accord d'association entre l'Union européenne et Israël. La perspective d'une conférence en juin prochain, sous l'égide de l'ONU, est aussi une bonne chose.

Il reste à renforcer la pression sur les acteurs de la région proche-orientale, qui, disons-le, manquent pour la plupart à leurs obligations.

Monsieur le Premier ministre, comment la France compte-t-elle agir et répondre à l'urgence causée par la famine ?

Le RDSE, attaché à la défense des droits de l'homme, s'en remet à tous les responsables pour que le courage l'emporte. Nous-mêmes, supporterions-nous un tel drame humanitaire aux portes de l'Europe ? (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, GEST, SER et CRCE-K.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. François Bayrou, Premier ministre. Madame la présidente Carrère, au travers de votre question, vous avez énoncé avec clarté et émotion la situation telle que nous la voyons. La volonté de la France a été affirmée de la même manière.

Qu'observons-nous ? La situation humanitaire à Gaza, que vous avez su parfaitement décrire, est désormais effroyable : risque de famine, manque d'eau et de médicaments. En outre, les perspectives d'une guerre se dessinent, avec l'annonce par le gouvernement israélien d'une nouvelle offensive militaire et l'évocation de déplacements de populations, ainsi que d'annexions.

Déplacements de populations, annexions, famine, dangers pour les civils : la France ne peut pas l'accepter ! Et nous croyons que, grâce à la France ou avec elle, d'autres pays du monde, qui jouent un rôle très important dans la région, ne peuvent pas l'accepter non plus.

J'ajoute, pour ceux qui s'intéressent à l'Histoire, que voir la France et le Royaume-Uni, compte tenu de leur histoire dans cette région, annoncer de concert qu'ils vont reconnaître l'État de Palestine, dans le cadre d'une solution à deux États, a évidemment une signification très importante.

Que pouvons-nous faire ? L'aide humanitaire est d'ores et déjà acheminée sur place : de la nourriture et de l'eau, qui permettraient de ravitailler les populations pendant plusieurs mois, sont ainsi disponibles à la frontière. Cette aide avait été intégralement bloquée jusqu'à avant-hier, et seule une toute petite quantité est entrée à Gaza depuis lors.

Nos efforts vont inlassablement dans ce sens, tout comme, vous l'avez rappelé, les initiatives de l'Europe, car la question des accords entre l'Union européenne et Israël est remise sur la table.

Nous cherchons à mobiliser la communauté internationale et à soutenir tous ceux qui veulent la paix, sans pour autant oublier que cette explosion a eu pour détonateur le pogrom du 7 octobre 2023.

Nous sommes ceux qui ont une vision équilibrée et volontaire de l'avenir de cette région, et je vous remercie, madame la présidente, de l'avoir rappelé. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et RDSE.)

eaux en bouteille (i)

M. le président. La parole est à M. Alexandre Ouizille, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Alexandre Ouizille. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire.

Lundi dernier, au nom de la commission d'enquête sur les pratiques des industriels de l'eau en bouteille, j'ai eu l'honneur de présenter le rapport Eaux minérales naturelles : préserver la pureté, que nous avons adopté à l'unanimité, moins une abstention.

C'est l'occasion pour moi de saluer à la fois la présidence très efficace et très sénatoriale, comme il aime lui-même à le dire, de mon collègue Laurent Burgoa (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER.), les travaux pionniers de ma collègue Antoinette Guhl (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.), l'énergie de mon collègue Hervé Gillé, avec qui je porte ce sujet depuis le début au sein du groupe socialiste (Applaudissements sur les travées du groupe SER.), et, enfin, tous les membres de la commission d'enquête.

Lundi, c'était le temps des révélations et de la transparence, mais aussi celui des propositions. Nous en avons formulé vingt-huit, toutes extrêmement précises.

Parmi nos révélations, l'une a particulièrement ému l'opinion : celle du caviardage par l'agence régionale de santé d'Occitanie d'un rapport administratif, écrit sous la dictée de l'industriel Nestlé Waters et à ce point dénaturé que le fonctionnaire instructeur a demandé que l'on retire sa signature au bas du document.

Plus largement, notre rapport témoigne d'une logique transactionnelle de l'État, qui a fait le choix, jusqu'à l'Élysée, de ne pas révéler ce scandale aux Français et qui a validé des traitements contraires au droit européen. L'inspection générale des affaires sociales (Igas) considère d'ailleurs que ces traitements constituent une fausse sécurité sanitaire, celle-ci n'étant finalement assurée que par la destruction massive, mais difficilement compréhensible sur le plan écologique, de produits finis dans les usines d'embouteillage.

Aussi, c'est un État ensablé dont nous avons retracé l'action et la conduite, même si certains fonctionnaires ont fait leur travail. Je pense ici au directeur de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) et au directeur général de la santé d'alors, Jérôme Salomon, qui n'ont cessé de dénoncer des errements.

Je conclurai, madame la ministre, en vous disant que nous avons besoin de vous, à la fois parce que certaines de nos recommandations nécessitent l'intervention du pouvoir réglementaire et parce que nous voulons poursuivre le travail transpartisan que nous avons engagé.

Ce travail a pris la forme d'une proposition de loi, qui ne pourra aboutir et contribuer à nous faire sortir de ce scandale qu'avec le soutien du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe GEST. – M. Laurent Burgoa applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur Alexandre Ouizille, je m'associe aux remerciements que vous venez d'adresser et tiens à mon tour à féliciter tous les membres de la commission d'enquête sénatoriale, à laquelle vous avez participé en votre qualité de rapporteur.

Cette commission d'enquête dresse un état des lieux, établit un diagnostic et formule un certain nombre de recommandations, dont vous venez de faire état. Elle met en lumière les enjeux qui sont liés à la préservation des ressources et de la qualité de l'eau. Elle insiste sur la nécessité d'un renforcement des contrôles, ainsi que d'une plus grande précision de la réglementation.

Je veux rappeler ici l'attachement absolu du Gouvernement à la sécurité sanitaire de tout ce qui concerne les eaux mises en marché.

J'ajoute que l'eau est l'un des aliments les plus contrôlés en France et que la qualité des eaux conditionnées produites en France est très satisfaisante. D'ailleurs, plus de 150 000 analyses sont réalisées chaque année dans le cadre du contrôle sanitaire mené par les ARS.

Cela étant, un certain nombre de choses méritent d'être améliorées.

Ainsi, conformément à l'engagement du directeur général de la santé lors de son audition devant votre commission d'enquête, le ministère de la santé diffusera d'ici à quelques jours aux directeurs généraux des ARS et aux préfets une circulaire visant à clarifier la doctrine du recours aux microfiltrations, puisque c'est de cela qu'il s'agit.

Le rapport de la commission d'enquête suggère par ailleurs que l'Anses puisse être saisie bientôt pour se prononcer scientifiquement sur l'acceptabilité de cette pratique de microfiltration. Cette recommandation nous paraissant tout à fait pertinente, le Gouvernement saisira donc l'Anses.

Enfin, un vide juridique pourrait subsister. Vous l'avez vous-même mentionné, monsieur le sénateur, puisque vous avez appelé de vos vœux de nouvelles dispositions législatives et réglementaires.

Sachez que le Gouvernement est pleinement engagé en ce sens. Il a du reste décidé de saisir la Commission européenne pour l'interroger sur ses intentions quant à une possible révision de la directive européenne sur les eaux, dans laquelle figurent la définition de la pureté originelle, sa caractérisation et le statut de la microfiltration.

Le Gouvernement entend poursuivre son action dans ce domaine. Je vous remercie des travaux que vous avez engagés de votre côté au travers de votre commission d'enquête. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)

situation à gaza (ii)

M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

M. Ian Brossat. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

« Israël prendra le contrôle de toute la bande de Gaza ». Ces mots sont ceux du Premier ministre d'extrême droite israélien, Benjamin Netanyahou. C'est non plus une menace, mais une promesse, celle d'une domination totale, par la force, par la terreur, par la destruction.

Ce week-end encore, on a dénombré plus de cent morts et l'on a vu des familles pulvérisées, des enfants ensevelis sous les gravats. Gaza était déjà une prison à ciel ouvert. C'est désormais un cimetière à ciel ouvert.

Depuis le début de la guerre, plus de 64 000 Gazaouis ont été tués, selon la revue The Lancet. La famine s'installe. Il n'y a plus d'eau, plus d'électricité, plus de soins. Depuis le 2 mai, Israël bloque l'entrée de toute aide humanitaire. Et l'ONU alerte : si l'aide n'est pas acheminée dans les quarante-huit prochaines heures, 14 000 nourrissons pourraient mourir…

Soyons clairs, ce n'est pas une guerre, c'est un siège ! Et tout cela est documenté par les institutions internationales.

En janvier 2024, la Cour internationale de justice (CIJ) a exigé des mesures urgentes pour prévenir un génocide – ce sont ses mots. En mars de la même année, l'ONU a affirmé que ce seuil avait été franchi. En juin, une commission d'enquête – de l'ONU toujours – concluait à l'existence de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité. Et en novembre, c'est la Cour pénale internationale qui émettait un mandat d'arrêt contre Benjamin Netanyahou.

Face à cela, que fait la France ? Que fait l'Europe ?

Le Président de la République a exprimé sa volonté de reconnaître l'État de Palestine. Mais que vaudra la reconnaissance de la Palestine s'il n'y a plus un seul Palestinien en vie ? Que sera la Palestine si Benjamin Netanyahou parvient à ses fins ? De quoi s'agira-t-il ? D'un drapeau planté sur un charnier ? Les mots ne suffisent plus. Il faut des actes !

Combien d'images insoutenables d'enfants déchiquetés et de femmes ensevelies faudra-t-il avant que la France ne prenne ses responsabilités ? Monsieur le ministre, que fait la France pour mettre Benjamin Netanyahou hors d'état de nuire ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER. – M. Ahmed Laouedj applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur et des Français de l'étranger.

M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et des Français de l'étranger. Monsieur le sénateur Ian Brossat, vous l'avez dit, Gaza est devenu un cimetière à ciel ouvert. Une violence aveugle et le blocage de l'aide humanitaire ont transformé ce territoire en un véritable mouroir.

Vous l'avez aussi dit fort justement, monsieur le sénateur, et vos mots sont justes. La faim ronge le corps des enfants et la terreur se lit dans les yeux de leurs parents.

Pour autant, comme le Premier ministre l'a très bien expliqué dans son intervention, en aucun cas, nous ne devons relativiser ce qui s'est produit depuis le 7 octobre 2023. Nous devons reconnaître l'immense responsabilité, la responsabilité historique qui est celle du Hamas.

Il est en effet du devoir de la France de rappeler que le Hamas doit être désarmé,…

M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué. … qu'il doit d'abord libérer les otages qu'il détient et que ses dirigeants doivent quitter Gaza et ne pas faire partie de la future administration du territoire. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe CRCE-K.)

Mme Cécile Cukierman. Les dirigeants du Hamas sont au Qatar !

M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué. Ce préalable ne doit pas être sous-estimé.

Monsieur le sénateur, ce n'est pas faire offense au peuple d'Israël que de le dire, aujourd'hui, le gouvernement israélien hypothèque la sécurité de la région, à commencer par celle de l'État hébreu. On ne peut pas construire la paix et préserver la stabilité en ayant recours à l'injustice et à la violence. On bâtit la paix et on obtient la stabilité en respectant le droit, en prenant en compte la dignité de la personne et en privilégiant le dialogue.

Mme Cécile Cukierman. Le dialogue avec le Qatar ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué. C'est, comme l'a indiqué le Premier ministre, ce que la France prône depuis longtemps.

Vous avez vu que, cette semaine, le Canada et le Royaume-Uni ont emboîté le pas de notre pays, avec un objectif très clair : créer les conditions d'une solution politique reposant sur deux États, vivant côte à côte, en paix et en sécurité.

Pour y parvenir et, par suite, pour susciter la création de l'État de Palestine, la France est, vous le savez, déterminée à reconnaître ce nouvel État. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

certification des comptes de la caisse nationale des allocations familiales

M. le président. La parole est à M. Guislain Cambier, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Guislain Cambier. Ma question s'adresse à Mme la ministre chargée des comptes publics.

Madame la ministre, 6,3 milliards d'euros : tel est le montant des erreurs non corrigées de la branche famille de la sécurité sociale. Aussi, fort logiquement, la Cour des comptes s'est déclarée « dans l'impossibilité de certifier » les comptes de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) pour 2024. C'est un peu Retour vers le futur, puisqu'il en a été de même en 2022 et en 2023…

Ces 6,3 milliards d'euros d'erreurs concernent aussi bien des versements indus que des prestations non versées, donc à la fois des économies et des dépenses publiques supplémentaires.

Quelle que soit la nature de la dette, et alors que le Premier ministre a fait de la lutte contre celle-ci sa priorité, nous sommes nombreux à nous poser la question du pilotage d'une politique qui vise plus de 13 millions de familles françaises. Ces erreurs représentent 8 % des prestations versées ; elles concernent notamment le RSA, la prime d'activité et les aides au logement. Plus du quart des montants versés au titre de la prime d'activité sont ainsi entachés d'erreurs.

Je ne reviendrai pas sur le contexte budgétaire – nous en débattons chaque semaine –, mais évidemment, compte tenu des sommes en jeu, le Gouvernement ne peut rester inactif. Il doit apporter une réponse à une situation pointée par la Cour des comptes.

Aussi, madame la ministre, quelles actions le Gouvernement compte-t-il engager afin de rendre sincères les comptes de la branche famille de la sécurité sociale ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des comptes publics.

Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Monsieur le sénateur, la situation que vous décrivez est incompréhensible pour les Français et insatisfaisante pour nous tous et, au premier chef, pour la ministre Catherine Vautrin, dont je vous prie d'excuser l'absence – elle est actuellement retenue à l'Assemblée nationale – et moi-même, en tant que ministre des comptes publics.

Sous l'autorité du Premier ministre, je cherche avant tout à simplifier notre régime de prestations. Ainsi, vous le savez, nous travaillons à la mise en place d'une allocation sociale unique. En somme, nous tentons de remettre de l'ordre dans nos prestations et, de ce fait, dans nos comptes.

À plus court terme, l'absence de certification des comptes de la branche famille s'explique, comme vous l'avez très bien dit, par le cumul de versements indus et de prestations non versées.

La bonne nouvelle, si je puis m'exprimer ainsi, est que, depuis le 1er mars 2025, nous avons structurellement changé la donne grâce à une réforme que certains appellent la solidarité à la source, c'est-à-dire le préremplissage automatique de toutes les déclarations pour l'attribution de la prime d'activité et du revenu de solidarité active (RSA) adressées aux caisses d'allocations familiales.

Cette réforme signifie une chose très simple : l'administration remplit, le citoyen contrôle. Nous le faisons déjà tous pour le paiement de nos impôts, et cela fonctionne très bien – nous sommes d'ailleurs en pleine saison des déclarations d'impôt…

Depuis le 1er mars dernier, donc, dans tous les départements où cette simplification s'est déployée, nous observons que, dans 96 % à 98 % des cas, les allocataires valident la déclaration qui leur a été proposé. Cela aura donc un effet direct – en tout cas, nous y travaillons – sur les comptes de l'année en cours.

Nous espérons que la Cour des comptes pourra observer une amélioration significative de la situation budgétaire de la sécurité sociale, ce qui signifiera à la fois que l'on aura réalisé des économies sur les versements indus, que l'on peine aujourd'hui à recouvrer, et – il faut le dire – que l'on aura versé davantage de prestations auxquelles les Français ont droit, donc que l'on aura progressé dans la lutte contre le non-recours.

Cette réforme est essentielle, d'autant qu'elle s'inscrit dans le second axe de la politique que nous menons, à savoir la lutte contre la fraude, un combat que nous menons là encore d'arrache-pied : l'année dernière, 30 % de fraudes supplémentaires ont ainsi été détectées par les organismes de sécurité sociale, pour un total des fraudes aux prestations sociales estimé à près de 3 milliards d'euros. Et croyez-moi, nous entendons bien continuer en ce sens ! (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Guislain Cambier, pour la réplique.

M. Guislain Cambier. Je vous remercie, madame la ministre.

Vous avez raison, il faut parler avec sérieux quand il est question de 6,3 milliards d'euros d'erreurs… Vous venez d'évoquer la fraude sociale : je ne puis que vous renvoyer aux travaux menés ici par Mme Nathalie Goulet. Et puisque vous parlez de contrôle des comptes publics, en particulier de ceux de la sécurité sociale, je vous invite à consulter les travaux que conduit Mme Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales du Sénat.

De manière générale, face à l'urgence de la dette, il convient d'être sérieux quand on évoque nos comptes publics. Ce n'est pas un conseil gratuit de ma part : le Sénat explore des pistes intéressantes ; il conviendrait de vous y référer si vous voulez non pas laisser filer nos comptes, mais bien les suivre au quotidien. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

scandale nestlé et influence privée dans les décisions de l'état

M. le président. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Antoinette Guhl. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire.

Madame la ministre, si je devais dire en quelques mots ce que je retiens de plus d'un an d'auditions sur les eaux en bouteille, je dirais : « Construction du mensonge, fabrique savamment orchestrée du doute, complicité des autorités et opacité totale. »

Vous me répondrez : « Tout est sous contrôle ». Oui, c'est vrai, nombre de fonctionnaires ont fait leur travail, et bien. Ils ont contrôlé, constaté et alerté. D'autres l'ont bien fait aussi : ils ont enquêté et révélé. Je veux saluer ici les journalistes de la cellule d'investigation de Radio France et du journal Le Monde.

Sans la presse, nous n'aurions ni vu, ni su, ni compris ce scénario si bien ficelé, dans lequel, à chaque échelon, on a fermé les yeux, un scénario écrit de bout en bout par un industriel qui vous a fait répéter à loisir, avec la complicité de vos cabinets, et ce jusqu'au plus haut niveau de l'État, qu'il n'y avait pas de risque sanitaire.

C'est une stratégie, qui n'est, hélas, qu'une affaire de gros sous, ceux-ci se comptant en milliards d'euros… C'est aussi un chantage à l'emploi, pour mieux piller la ressource en eau, notre patrimoine commun, une eau vendue au mépris du consommateur, bien trop cher pour une eau traitée, et exportée aux États-Unis, sans aucune taxe qui plus est !

Je le dis, c'est un scandale d'État, un scandale sanitaire, un scandale démocratique ! Et c'est aussi un saccage écologique.

Aussi, madame la ministre, je vous le demande : comment est-il possible que notre État soit si peu résistant face aux lobbies ? Pourquoi les gouvernements successifs ont-ils couvert une entreprise qui ne respecte ni la réglementation, ni ses salariés, ni la ressource en eau, ni même ses consommateurs ? Répondez-moi, madame la ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER. – M. Fabien Gay applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Madame la sénatrice Antoinette Guhl, permettez-moi tout d'abord de saluer les travaux que vous avez menés sur ce sujet et la qualité du rapport que vous avez rendu fin 2024.

Ce rapport a finalement été l'une des prémisses de la commission d'enquête qui a rendu ses conclusions il y a quelques jours. Votre travail a permis d'identifier un certain nombre de priorités, telles que la nécessité d'améliorer la réglementation relative à la traçabilité des eaux ou celle de mettre fin à la microfiltration. Vous avez formulé dix propositions dont le Gouvernement tiendra compte, en sus des vingt-huit recommandations du rapport de la commission d'enquête.

Je le redis ici, cette affaire ne présente aucun risque sanitaire. Il s'agit simplement d'une question de loyauté par rapport à la réglementation en vigueur. Je le redis également avec force, il n'y a aucun scandale d'État autour de la question des eaux en bouteille.

Nous devons donc être très attentifs aux mots que nous employons. Je me contente pour ma part de me référer aux conclusions du rapport de la commission d'enquête sénatoriale.

N'oublions pas également qu'il y a des emplois en jeu. J'estime qu'il faut respecter les salariés, pour qui certains propos peuvent être blessants – soyons vigilants à cet égard. (Marques d'approbation sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur des travées des groupes GEST et SER.)

M. Hussein Bourgi. Ce ne sont pas les salariés qui sont en cause !

M. Rachid Temal. Ce sont les dirigeants de Nestlé les fautifs !

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. Je tiens enfin à rappeler un certain nombre d'actions engagées par l'exécutif.

Le 7 mai dernier, le préfet du Gard a mis Nestlé Waters en demeure de retirer sous deux mois le microfiltre que l'entreprise utilisait pour ses eaux minérales naturelles, les experts considérant que celui-ci modifie le microbisme de l'eau. L'État a quant à lui adressé plusieurs signalements à la justice entre 2022 et 2025 ; nous attendons de connaître les suites qui leur seront réservées. Le ministère de l'économie et celui de la santé veillent en outre désormais à améliorer leur coordination sur ces dossiers.

Pour conclure, contrairement à vos affirmations, j'indique que toutes les décisions qui ont été prises dans ce dossier l'ont été à l'issue d'échanges techniques entre l'administration et les cabinets ministériels. (Marques d'ironie sur les travées du groupe GEST.)

M. Yannick Jadot. Ainsi qu'avec Nestlé !

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. Il était important de le rappeler ici. (M. François Patriat applaudit.)

eaux en bouteille (ii)

M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Burgoa. Monsieur le Premier ministre, j'ai eu l'honneur de présider la commission d'enquête sénatoriale sur les eaux minérales, créée sur l'initiative du groupe socialiste du Sénat. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)

M. Laurent Burgoa. Je tiens d'ailleurs à remercier les membres de cette commission du travail qui a été mené et qui a conduit à l'adoption, à l'unanimité, du rapport aussi précis que nécessaire de notre collègue Alexandre Ouizille.

Ce rapport soulève plusieurs questions essentielles, qui devraient retenir l'attention de plusieurs ministères. J'en formulerai trois aujourd'hui.

Premièrement, l'État compte-t-il enfin établir une norme en matière de microfiltration ? Aujourd'hui, les femmes et les hommes chargés de faire respecter les règles sanitaires se retrouvent trop souvent seuls, confrontés à des responsabilités disproportionnées, faute de base juridique claire. Cette carence pèse lourdement sur eux et crée de l'incertitude pour les industriels.

Une norme permettrait à la fois de sécuriser l'action de terrain et d'offrir une meilleure lisibilité à l'ensemble de la filière, sachant que neuf minéraliers sur dix respectent aujourd'hui l'éthique de ce métier.

Deuxièmement, le Gouvernement envisage-t-il d'harmoniser la fiscalité portant sur les eaux minérales et celle qui pèse sur les eaux de boisson ? Le régime fiscal des premières ouvre droit à une contribution fiscale au profit des communes qui sont lieux de production. Tel n'est pas le cas du régime fiscal des secondes.

Les collectivités dans lesquelles les sources sont exploitées expriment une incompréhension légitime. Minérales ou non, les sources demeurent exploitées et les territoires, pourtant au cœur de cette ressource, doivent bénéficier d'un juste retour.

Troisièmement, et enfin, quelles actions l'État entend-il engager pour assurer un meilleur suivi de la qualité des nappes d'eau ? Notre rapport comporte des recommandations qu'il est urgent de mettre en application. Nous sommes prêts à y travailler avec vous. Il y a là un besoin crucial de transparence, ainsi qu'un besoin évident de financements, davantage privés que publics, à la hauteur de ce bien commun aussi essentiel que vulnérable.

Pour conclure, je dirai à l'adresse de Mme Guhl que les termes « scandale d'État » n'ont jamais figuré dans notre rapport. Chère collègue, les mots ont un sens !

Mme Antoinette Guhl. Je n'ai jamais dit que c'était dans le rapport !

M. Laurent Burgoa. Attention à ne pas les utiliser à mauvais escient et à ne pas stigmatiser, ce faisant, l'ensemble d'une profession ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur Laurent Burgoa, je veux tout d'abord vous remercier de l'ensemble des travaux qui ont été conduits sous l'égide de la commission d'enquête sénatoriale que vous avez présidée.

Vous me posez trois questions bien précises, tout en évoquant un certain nombre de failles. Ces manquements sont retracés dans un rapport qui comporte un grand nombre de recommandations, notamment sur la nécessité de préciser la réglementation en vigueur dans ce domaine.

Votre première interrogation porte sur la microfiltration, l'un des sujets les plus importants dans le cadre de vos travaux.

Sachez tout d'abord que, dans quelques jours, le ministère de la santé diffusera une instruction aux directeurs généraux des ARS et à l'ensemble des préfets pour clarifier la doctrine en la matière – je sais qu'il s'agit d'une attente forte sur le terrain.

De la même manière, l'Anses sera prochainement saisie et appelée à se prononcer scientifiquement sur les pratiques acceptables de microfiltration, c'est-à-dire sur celles qui ne dénaturent pas le microbisme de l'eau. C'est l'une des demandes de la commission d'enquête à laquelle nous répondons.

Enfin, le ministère de la santé va saisir la Commission européenne pour connaître sa position et l'interroger sur ses intentions quant à une possible révision de la directive européenne définissant la pureté originelle et le statut de la microfiltration, de sorte que nous parvenions à une harmonisation au niveau européen.

Par ailleurs, la fiscalité de l'eau peut en effet avoir des répercussions sur les collectivités territoriales. Des conférences territoriales sur l'eau ont d'ores et déjà été lancées le 7 mai. Elles seront l'occasion d'aborder plusieurs questions, dont celle du partage de la ressource face à la baisse de la disponibilité de l'eau. Je rappelle que le plan Eau vise une réduction de 10 % des prélèvements en 2030.

En ce qui concerne la protection des nappes phréatiques, le Gouvernement a l'intention d'associer l'ensemble des parties prenantes aux réflexions sur le sujet, qu'il s'agisse des parlementaires, des collectivités territoriales, des industriels ou des usagers. Il s'agit d'un enjeu majeur pour notre avenir, sur lequel des réflexions sont en cours.

Monsieur le sénateur, je vous propose de vous recevoir à mon ministère, avec le rapporteur de la commission d'enquête que vous avez présidée, pour que nous puissions étudier ensemble ces questions et prendre en compte vos recommandations. (M. François Patriat applaudit.)

partenariat stratégique entre londres et l'union européenne en matière de pêche

M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme Nadège Havet. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Depuis plusieurs années, le secteur de la pêche subit de nombreuses et grandes difficultés : interdiction de pêcher pendant un mois en hiver, liée à la fermeture administrative du golfe de Gascogne ; difficultés financières liées aux tarifs du carburant ; tensions sur les zones de pêche à cause, notamment, du développement de l'éolien en mer ; pression constante de certaines ONG sur la filière…

Il y a cinq ans, le Brexit a également bousculé les marins de la zone Manche-Atlantique. Nous nous souvenons de la bataille qu'il a fallu mener pour obtenir des licences de pêche pour les eaux britanniques.

Cinq ans plus tard, nous passons à une nouvelle phase : le renforcement des négociations bilatérales entre l'Union européenne et le Royaume-Uni dans le cadre du reset. Un sommet s'est tenu avant-hier entre les deux parties et, après des mois de négociations, un accord a enfin été trouvé.

Grâce à la mobilisation de la France et des États membres concernés, mais aussi grâce à votre mobilisation, madame la ministre, des concessions ont été obtenues de la part des Britanniques. C'est une bonne nouvelle, et je vous en félicite ! Alors que les dispositions actuelles en matière d'accès aux eaux britanniques expiraient en 2026, vous avez obtenu une prolongation.

Pourriez-vous détailler les avancées que comporte cet accord majeur ? Quelles conséquences emporte-t-il pour les pêcheurs français ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche. Madame la sénatrice Havet, je vous remercie de me donner l'occasion d'exposer les avancées que nous avons obtenues, car il s'agit d'une grande victoire française et européenne.

Cette négociation relative au droit de pêche inquiétait beaucoup nos pêcheurs et les élus des littoraux, car l'accord post-Brexit en la matière prenait fin cette année.

L'accord auquel nous sommes parvenus est le fruit d'un long travail collectif, au cours duquel je n'ai pas ménagé ma peine. Il prolonge jusqu'en 2038 les modalités d'accès et de répartition des ressources maritimes définies après la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne. En un mot, nous avons sécurisé l'avenir de notre filière.

Il s'agit d'une victoire pour nos pêcheurs, leurs familles et les territoires littoraux qui vivent de cette activité. Il s'agit aussi, permettez-moi de le souligner, d'une victoire pour la diplomatie française et pour le Gouvernement dans son ensemble, qui a tenu bon dans cette négociation, sans jamais céder sur les principes essentiels : stabilité, prévisibilité et respect de nos droits historiques.

Je veux également saluer le rôle actif des parlementaires français et européens, qui, eux non plus, n'ont pas ménagé leur peine et qui ont sur faire entendre la voix des pêcheurs, tant dans les enceintes européennes que dans le dialogue bilatéral.

Nos élus locaux ont également été des relais précieux, et je veux particulièrement saluer le rôle des présidents de région, qui ont donné de la voix auprès de la Commission européenne. Leur mobilisation constante a renforcé notre position et rappelé que la pêche est non pas une variable d'ajustement, mais une composante vitale de notre souveraineté alimentaire et de notre économie maritime.

Enfin, cet accord témoigne d'un fait essentiel : l'Europe, lorsqu'elle parle d'une voix unie et forte, est respectée. Aucun État membre n'aurait pu arracher un tel résultat seul. C'est ensemble, au sein d'une Union cohérente et solidaire, que nous avons pu obtenir la stabilité des règles pour plus d'une décennie.

Madame la sénatrice, soyez-en certaine, nous continuerons de défendre les intérêts et les droits de nos pêcheurs français, avec la même détermination et dans l'esprit de responsabilité et de solidarité européenne qui a guidé cette négociation, y compris vis-à-vis de la Commission européenne. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour la réplique.

Mme Nadège Havet. Je vous remercie, madame la ministre.

Je profite de cette tribune pour lancer une alerte. La troisième conférence des Nations unies sur l'océan (Unoc) doit bientôt avoir lieu. Il convient de préserver les océans, mais également de protéger ceux qui en vivent, notamment nos pêcheurs. Ces derniers ne sauraient servir de boucs émissaires, car ils sont des modèles. Il est donc important de leur dire qu'ils sont importants pour chacun d'entre nous ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP. – M. Vincent Louault applaudit également.)

fermetures de classes

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

Mme Laure Darcos. Ma question s'adressait à Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Les inspections d'académie vont bientôt achever leur travail d'élaboration de la carte scolaire pour la prochaine rentrée. Dans de nombreuses communes, la sanction sera cinglante et définitive : pas assez d'élèves, on ferme une classe ! En revanche, lorsqu'il s'agit de réouvertures, les quotas sont toujours très difficiles à atteindre…

Pour les maires, le dialogue avec l'éducation nationale se tient chaque année sous tension, lorsqu'il ne vire pas au cauchemar. Malgré la mobilisation des parents et des professeurs à leurs côtés, les élus sont tout juste consultés. Trop souvent, leur avis ne pèse rien face à la détermination des inspections d'académie.

Dans mon département de l'Essonne, à Videlles et Courson-Monteloup, dans le Nord, à Steene, en Indre-et-Loire, à La Croix-en-Touraine, dans la Marne, à Broussy-le-Grand, dans la Loire, à Montverdun, ou encore en Loire-Atlantique, à Guérande, la même politique de rationalisation des moyens s'applique, sans tenir compte de la réalité des territoires ruraux. Quasiment tous mes collègues me l'ont confirmé !

Peut-on réellement croire que la qualité de l'enseignement et des apprentissages pourra être maintenue ? La charge qui pèse sur les enseignants, à qui sont confiées des classes de trois, voire de quatre niveaux, est trop forte.

Vous me répondrez certainement que le taux d'encadrement n'a jamais été aussi favorable et que la démographie baisse très sensiblement dans le premier degré. Soit, mais n'est-ce pas une aubaine pour nos écoles rurales ou périurbaines, qui pourraient bénéficier de classes à effectif réduit, à l'instar des réseaux d'éducation prioritaire (REP) et des réseaux d'éducation prioritaire renforcé (REP+), pour enseigner les savoirs fondamentaux ? Où est l'égalité des chances lorsque l'on sacrifie les enfants ayant besoin d'un suivi individualisé ?

Les inspections d'académie ne pourraient-elles pas faire preuve d'une agilité accrue pour adapter leurs prévisions aux variations d'effectifs en cours d'année ? Ceux-ci évoluant au gré des livraisons de logements et des installations de familles, les projections devraient porter sur plusieurs années.

Par ailleurs, un dialogue soutenu avec les élus locaux est une nécessité. Êtes-vous prêt à leur donner plus de place dans le processus de concertation, afin de garantir une éducation de proximité, de préserver l'équité territoriale et d'assurer un avenir à nos campagnes ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Philippe Baptiste, ministre auprès de la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche. Madame la sénatrice Laure Darcos, Mme la ministre d'État étant retenue, je répondrai à sa place.

La question de la carte scolaire est particulièrement importante pour le ministère. Comme vous l'avez mentionné, nous dressons le constat d'une forte baisse démographique. Permettez-moi de rappeler quelques chiffres : lors de la rentrée 2025, près de 93 000 élèves se rendront en classe, dont 80 000 dans le premier degré, et le nombre moyen d'élèves par classes atteindra le niveau historiquement faible de vingt et un élèves par classe.

En ce qui concerne spécifiquement l'Essonne, la dotation du département prévoit la création de dix-neuf postes, bien que 380 élèves de moins soient attendus cette année. Je vous confirme donc, madame la sénatrice, que nous mettons bien cette baisse démographique au service de la réussite de tous les élèves et de la réduction des inégalités sociales et territoriales. (Murmures sur les travées des groupes SER et Les Républicains.)

M. Philippe Baptiste, ministre. En ce qui concerne la méthode, je vous rejoins parfaitement sur l'indispensable travail qui doit être mené conjointement par les directions académiques et les élus.

C'est tout le sens des observatoires des dynamiques rurales, qui ont été créés par Élisabeth Borne lorsqu'elle était Première ministre, dans le cadre du plan France ruralités, et qui ont été déployés cette année dans tous les départements. Ces instances permettent de partager avec l'ensemble des acteurs concernés les prévisions d'effectifs sur trois ans, comme vous appelez à le faire, madame la sénatrice.

M. Philippe Baptiste, ministre. Elles ont vocation à travailler sur les ouvertures et les fermetures de classes en associant étroitement les élus. (Protestations sur les travées du groupe SER.)

M. Alexandre Basquin. Ce n'est pas vrai !

M. Thierry Cozic. C'est faux  !

M. Philippe Baptiste, ministre. Dans ce cadre, la ministre d'État a récemment signé une convention avec l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF), dans laquelle elle a pris un double engagement : inscrire l'évolution de la carte scolaire dans une démarche pluriannuelle…

M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre.

M. Philippe Baptiste, ministre. … et associer les élus.

ingérences chinoises en métropole et en outre-mer

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour le groupe Les Républicains.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Monsieur le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, le Sénat a exprimé par deux fois son inquiétude face aux ingérences étrangères, en particulier face à l'influence chinoise, qui n'épargne ni l'Hexagone ni nos territoires ultramarins.

Permettez-moi de vous donner quelques exemples.

En matière culturelle, trouvez-vous normal que le musée Guimet, qui est dépositaire d'un patrimoine culturel tibétain, ait définitivement supprimé le mot « Tibet » de son répertoire à l'automne dernier ?

Trouvez-vous normal de laisser agir les instituts Confucius au sein de nos universités, alors qu'ils sont, comme l'a confirmé le rapport d'information publié par notre ancien collègue André Gattolin en septembre 2021, le bras armé de la Chine ?

Trouvez-vous normal que la pêche illégale fasse des ravages et détruise nos fonds marins au large de la Guyane, uniquement pour faire plaisir aux Chinois, qui sont des mangeurs de courbine ? De même, trouvez-vous normal que 80 % de l'or extrait de manière illégale dans la région parte en Chine ?

Ne redoutez-vous pas, à l'instar du ministre Manuel Valls, que des formes de colonialisme s'instaurent dans le Pacifique par le biais de la présence chinoise ?

En cédant à des pressions politiques dans le domaine de la culture et des arts, nous ouvrons la porte à de graves dérives autoritaires et partisanes, dont il faut impérativement se méfier.

Il serait irresponsable de ne pas s'inquiéter de la stratégie d'implantation chinoise dans le Pacifique, qui menace l'avenir de nos territoires ultramarins, après ce qu'il s'est passé dans les îles Salomon. Ne pas protéger nos universités de cette influence compromet la liberté d'expression et l'autonomie des établissements.

J'imagine que vous avez pris connaissance du rapport publié le 23 juillet 2024 par Rachid Temal et Dominique de Legge, au nom de la commission d'enquête sénatoriale, sur les politiques publiques face aux opérations d'influences étrangères, qui expliquait clairement les inquiétudes que nous nourrissons. J'ose espérer qu'une tolérance passive ne sévit pas au Quai d'Orsay.

Monsieur le ministre, je vous demande donc de nous rassurer : une cellule a-t-elle été mise en place au sein de votre ministère, afin de lutter contre cette entreprise d'influence chinoise ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Cadic applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur et des Français de l'étranger.

M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et des Français de l'étranger. Madame la sénatrice, vous avez raison de pointer ce sujet important, sensible et parfois grave de l'ingérence et de l'influence de puissances étrangères. Vous avez essentiellement cité la Chine, mais cette question concerne également d'autres pays.

Vous avez eu raison de préciser que ces ingérences ciblent non seulement notre territoire métropolitain, mais aussi nos outre-mers. Vous avez ainsi cité à juste titre le cas du Pacifique et de la Polynésie française.

M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué. Je tiens à vous rassurer : le Gouvernement et l'ensemble des administrations concernées sont non seulement au fait de cette question, sans aucune naïveté, mais tout à fait concentrés sur les actions qu'il convient de mener.

L'enjeu est culturel, mais aussi économique. Compte tenu de mon portefeuille, je suis concerné au premier chef et je pense en particulier à la sécurité de secteurs d'activité sensibles, qui sont directement liés à notre souveraineté et à notre autonomie stratégique.

Aussi, je tiens à vous rassurer, madame la sénatrice : sous l'impulsion du Président de la République, nos moyens en matière de sécurité économique ont été renforcés de manière significative.

Très concrètement, nous avons amélioré les capacités d'analyse et de surveillance de nos services de renseignement et mis en place des mécanismes de contrôle accru sur les financements étrangers des associations, notamment par le biais de la loi confortant le respect des principes de la République, qui, à cette fin, est utilisée à bon escient.

Par ailleurs, nous avons renforcé le dialogue avec les établissements d'enseignement supérieur et les collectivités locales, celles-ci étant également ciblées par des manœuvres d'influence.

Enfin, la coordination interministérielle pilotée par le secrétariat général de défense et de sécurité nationale joue pleinement son rôle.

En tant que ministre chargé du commerce extérieur, je tiens à déclarer que la France reste ouverte aux échanges internationaux et que ce n'est pas se replier sur soi-même que se défendre des ingérences étrangères.

Cela dit, nous ne sommes ni naïfs ni inattentifs. Nous continuerons d'agir avec une totale détermination, comme il se doit, pour défendre notre indépendance et protéger notre débat démocratique. (M. François Patriat applaudit.)

fast fashion et taxation des petits colis

M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Rémi Cardon. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire.

Sur le ring du commerce mondial, le match est truqué : d'un côté, Jennyfer, une enseigne française, est fragilisée et sera bientôt balayée ; de l'autre, Shein et Temu, des géants de l'e-commerce chinois, sont dopés par des produits à bas coût et polluants. Madame la ministre, en tant que prétendue arbitre, que faites-vous ?

À cause de la faillite de Jennyfer, 1 000 salariés sont menacés d'être licenciés, comme l'ont été les 2 100 de Camaïeu en 2022. Et demain, qui ? Et combien ?

Pendant ce temps, Shein réalise près d'un milliard d'euros de chiffre d'affaires en France, sans impôt et sans contrainte. En réalité, le scandale est triple : il est social, écologique et fiscal. Résultat : nos entreprises paient, eux contournent ; nos salariés sont licenciés, eux livrent ; nos normes contraignent, eux prospèrent.

Il est temps d'en finir avec la naïveté et d'exiger une réponse européenne, ferme, rapide et juste, d'adapter notre système douanier à l'e-commerce et d'imposer aux géants du numérique les mêmes règles qu'à nos commerçants de proximité.

Madame la ministre, qu'attendez-vous pour défendre l'emploi, la transition écologique et la justice fiscale ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K. – Mme Vanina Paoli-Gagin et M. Vincent Louault applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur Rémi Cardon, vous avez raison. Vous connaissez ce chiffre, puisqu'il a été annoncé par le PDG de cette entreprise au cours d'une audition au Sénat : 22 % des colis qui sont distribués par La Poste émanent de deux plateformes asiatiques.

L'une d'entre elles met en ligne 7 000 nouvelles références de produits textiles par jour et fait transiter 5 000 tonnes de produits textiles par jour à l'échelle mondiale par fret aérien. Au total, 1,5 milliard de colis sont livrés en France chaque année.

Ces livraisons ont des conséquences environnementales – le fret aérien a un impact négatif cent fois supérieur à celui du fret maritime –, mais aussi sociales et économiques. En effet, nous constatons une forme de concurrence déloyale : les produits qui arrivent sur le marché ne font pas l'objet des mêmes normes et de la même réglementation. Cela fragilise notre commerce physique. Nous devions donc sonner la mobilisation générale, et nous l'avons fait.

J'ai ainsi demandé à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) de tripler le nombre des contrôles des produits issus des plateformes en question. J'ai souhaité que ces contrôles soient effectués à 360 degrés, c'est-à-dire qu'ils portent tant sur la loyauté des pratiques commerciales que sur la régularité des produits. J'ai demandé que, lorsqu'une faille est constatée au sujet d'un petit acteur, des contrôles soient effectués sur les gros acteurs occupant le même segment de marché.

En outre, avec Amélie de Montchalin, j'ai renforcé la coordination entre les douanes et la DGCCRF. Et avec Agnès Pannier-Runacher, j'ai poussé pour que la proposition de loi visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile puisse être examinée au début du mois de juin prochain, mais aussi pour que nous soyons en mesure d'intégrer dans ce texte des dispositions plus robustes.

À l'échelle européenne, nous appelons à mettre fin à l'exemption de taxes douanières des colis d'une valeur de moins de 150 euros. Nous avons obtenu hier que la Commission européenne propose une surtaxe de 2 euros sur ces colis.

M. le président. Il faut conclure, madame la ministre déléguée.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. C'est déjà une avancée, mais nous continuons de travailler à l'échelle européenne, pour faire en sorte que ces pratiques cessent.

M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour la réplique.

M. Rémi Cardon. Je vous remercie de ces éléments de réponse, madame la ministre.

La surtaxe proposée par la Commission européenne est tout à fait insuffisante : 2 euros de frais de gestion sur des colis d'une valeur moyenne allant de 20 euros à 70 euros ne feront peur à personne ! Par ailleurs, alors qu'elle enregistre un chiffre d'affaires de 1,6 milliard d'euros, l'entreprise Shein ne paie que 0,02 % d'impôts – ce n'est pas moi qui le dis, c'est le patron de Coopérative U !

Madame la ministre, vous parlez d'actions, mais les faits évoquent plutôt un abandon. En réalité, ce gouvernement fait de la fast fashion sa ligne politique : tout pour l'image, rien pour la durabilité ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)

certification des comptes de la caisse nationale des allocations familiales

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Anne-Sophie Romagny applaudit également.)

M. Philippe Mouiller. Ma question s'adresse à Mme la ministre chargée des comptes publics et porte notamment sur la non-certification des comptes de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) par la Cour des comptes.

Cette question ayant déjà été posée par Guislain Cambier, je vais en poser une autre, pour aller plus loin et mettre en avant les dysfonctionnements profonds de la branche famille de la sécurité sociale. (M. Yannick Jadot s'exclame.)

Je rappelle tout de même que les comptes de la Cnaf n'ont pas été validés pour la troisième année consécutive. La réponse qui nous avait été apportée l'année dernière était d'ailleurs de la même nature que celle que vous nous donnez aujourd'hui, c'est-à-dire, en substance : « Ne vous inquiétez pas, nous avons la solution. » Je vous réponds donc : « Accélérez ! ».

Par ailleurs, le système d'information de la Cnaf est défaillant et soumis à de nombreuses attaques. Au-delà des défaillances formelles, l'administration fiscale, que vous connaissez bien, se trouve dans l'incapacité de transmettre plus de 2 millions d'euros de revenus fiscaux aux allocataires pour des problèmes de vérification des données. Cela pose problème pour effectuer les contrôles. Il s'agit d'un véritable dysfonctionnement.

Ensuite, malgré les chiffres importants que vous avez donnés à propos de la fraude, le nombre de contrôles effectués sur la branche famille a diminué de 7 % en 2024. Il s'agit d'un point essentiel : nous n'avons ni les outils informatiques ni les outils de suivi adaptés. Dans ce contexte, il est évidemment très difficile de mettre en place une politique de lutte contre la fraude, malgré la mobilisation de l'ensemble des fonctionnaires. Sur ce sujet, il y a urgence à agir.

La communication qui est faite depuis quelques jours est terrible. Nous ne pouvons pas expliquer aux Français que nous devons collectivement réaliser des efforts pour redresser les comptes sociaux, alors que nous n'avons pas les outils suffisants pour maîtriser les fraudes aux allocations logement et au revenu de solidarité active (RSA).

Il y a donc urgence à agir, et nous devons nous mobiliser de façon totalement transparente. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Mathieu Darnaud. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des comptes publics.

Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Monsieur le sénateur, vous nous invitez à aller plus loin et vous avez raison.

La lutte contre la fraude a connu un épisode pour le moins malheureux : avant que ce gouvernement ne soit formé, vous avez, mesdames, messieurs les sénateurs, mené avec les députés un travail conjoint dans le cadre du PLFSS 2025 sur plusieurs mesures. Je pense notamment à l'échange de données entre complémentaires et sécurité sociale, à la réforme du service médical ou encore à l'harmonisation des pratiques entre départements.

Or, chacun le sait, ces dispositions ont été considérées comme des cavaliers législatifs par le Conseil constitutionnel. Elles sont donc inapplicables et inappliquées.

Au fond, pour résumer la situation, nous constatons, d'un côté, que nos outils fiscaux fonctionnent de mieux en mieux. Je ne dis pas que nous avons fini de traquer la fraude fiscale, mais nous avons beaucoup progressé, notamment en termes de gels et de saisies. L'Office national antifraude (Onaf) a ainsi saisi 600 millions d'euros au cours de la seule année dernière.

De l'autre, il semble qu'il soit devenu plus facile de frauder la sécurité sociale que le fisc. C'est absolument intolérable. Catherine Vautrin et moi-même avons d'ailleurs communiqué sur ce sujet. Car, à la fin, il s'agit toujours de l'argent des Français : nous n'avons qu'un seul portefeuille, et des politiques publiques en partage.

Catherine Vautrin et moi-même travaillons donc pour appliquer les mécanismes qui fonctionnent dans le domaine fiscal – les procédures, le soutien judiciaire, la réactivité… – dans la sphère sociale. L'an dernier, nous avons détecté pour 1,6 milliard d'euros de travail dissimulé. Au total, nous avons mis au jour 2,9 milliards d'euros de fraude dans la sphère sociale.

Les contrôles fonctionnent, mais ils doivent s'améliorer dans plusieurs branches. Nous devons surtout parvenir à bloquer l'argent et à le saisir. Nous devons le bloquer, car Tracfin nous montre qu'une partie des sommes est captée par la criminalité organisée et part à l'étranger.

Notre détermination à travailler avec vous en ce sens est totale. Par ailleurs, nous voyons que nous avons besoin d'outils législatifs renforcés. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour la réplique.

M. Philippe Mouiller. Madame la ministre, je saisis la perche que vous avez tendue : nous pourrions défendre conjointement une proposition de loi sur les outils de lutte contre la fraude, pour éviter de nous retrouver dans la même situation qu'à l'issue de l'examen du PLFSS 2025.

Il y a urgence, car ce travail doit être mené d'ici à l'examen du PLFSS 2026 ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Tout à fait !

harcèlement et sévices dans l'armée

M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Jocelyne Guidez. Ma question s'adresse à M. le ministre des armées.

« Le principe n'était pas de nous former, mais de nous bizuter, de nous humilier pour amuser les cadres. Ils ont décidé de me briser. » Monsieur le ministre, ces mots sont ceux de Clovis Tritto, un ancien militaire du 8e régiment de parachutistes d'infanterie de marine (RPIMa) de Castres. Ils reflètent une souffrance que l'on ne peut ignorer.

Il y a quelques jours, quatre ex-militaires ont déposé plainte pour des faits de harcèlement moral, de violences psychologiques et d'humiliations. Ils décrivent un climat de soumission où l'autorité se confondrait avec la brutalité et des bizutages qui n'épargneraient ni l'intégrité physique ni la dignité. Parmi les quarante-six recrues de cette section, seules seize ont poursuivi leur engagement.

Soyons clairs, il ne s'agit pas de généraliser, et encore moins de salir l'image de notre armée. Nos cadres, sous-officiers et officiers, servent avec honneur et exigence. Nos armées forment la jeunesse à l'endurance, à l'engagement et à la maîtrise de soi. Cette autorité-là est précieuse. Elle fait la force, la fierté, l'identité et l'attractivité de nos armées.

Toutefois, l'autorité n'autorise pas les sévices, et la tradition ne saurait excuser la maltraitance. Or les abus existent, de même que les drames. Nos miliaires ont eux aussi une santé mentale. Ils peuvent connaître des troubles psychiques, un mal-être, une dépression, a fortiori lorsqu'ils sont confrontés au harcèlement.

Je pense à Louis Tinard, dont j'ai eu le père au bout du fil. Ce jeune militaire s'est suicidé dans sa caserne en 2022. Sa mort a été reconnue comme un accident de service.

Monsieur le ministre, quelles dispositions comptez-vous mettre en place pour éviter ce genre de drames ? Comment garantir à nos jeunes volontaires un encadrement sûr, digne et conforme aux valeurs de notre République, mais aussi de nos armées ? Comment mieux détecter et accompagner les soldats qui souffrent en silence ? Quand l'engagement devient souffrance, nous ne pouvons rester dans l'indifférence. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et SER.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des armées.

M. Sébastien Lecornu, ministre des armées. Madame la sénatrice, permettez-moi tout d'abord de partager votre émotion et la tonalité de votre question. Au nom de l'institution militaire et du Gouvernement, je redis la colère que nous avons ressentie lorsque les faits que vous évoquez sont parus dans la presse.

Ma réponse peut paraître simple, mais la première des réponses est de faire preuve de rigueur et d'empathie et de respecter la parole des victimes, ce qui n'a malheureusement pas toujours été le cas par le passé. Il nous faut non seulement tenir compte de leur parole, mais aussi, comme vous appelez à le faire, accompagner les victimes avec l'ensemble des outils dont nous disposons, y compris dans le domaine psychologique ou médicosocial.

Nous l'avons certes fait dans le cadre de ce qui a été nommé, d'ailleurs à tort, le « #MeToo des armées », mais nous n'avons pas été à la hauteur dans d'autres cas. Depuis lors, des mesures correctives ont été prises.

La deuxième des réponses réside dans les enquêtes de commandement qui doivent avoir lieu. Le chef d'état-major de l'armée de terre (Cemat) en a été saisi. Je rappelle que dans le champ militaire – je le dis sous le regard des officiers de la gendarmerie qui sont présents en tribunes –, l'autorité d'un officier en position de commandement lui impose également un devoir de protection de ses subordonnés. Nous devrons donc faire la lumière sur l'affaire que vous avez mentionnée.

La troisième des réponses est de collaborer avec l'autorité judiciaire dans les suites des enquêtes de commandement. Dans le cas des faits que vous avez rappelés, ce sont les plaignants qui ont saisi la justice. Par le passé, il est arrivé que l'institution militaire se contente d'une enquête de commandement. Or l'article 40 du code de procédure pénale, que chacun connaît ici, s'applique évidemment à l'autorité militaire.

La quatrième réponse est de savoir punir lorsque c'est nécessaire. Je le dis, car l'institution a trop souvent été tentée, par le passé, d'éloigner – pour le dire pudiquement – les victimes plutôt que les auteurs. Or elle doit être capable de se débarrasser de ses canards boiteux.

Enfin, vous l'avez dit, madame la sénatrice, mais je veux l'affirmer de nouveau devant le Sénat : quelques dérives individuelles ne sauraient en aucun cas porter atteinte à la réputation de l'institution militaire dans son ensemble. Il y va du succès des armes de la France. (M. François Patriat applaudit.)

M. Bruno Sido. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour la réplique.

Mme Jocelyne Guidez. Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse très claire.

Un soldat en souffrance ne sera jamais un bon soldat, et l'autorité naturelle d'un bon cadre ne résidera jamais dans l'humiliation. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP.)

rapport sur les frères musulmans

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. André Reichardt. Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, ce matin, un conseil de défense s'est réuni pour la présentation d'un rapport intitulé Frères musulmans et islamisme politique en France, réalisé par le préfet Pascal Courtade et le diplomate François Gouyette. L'élaboration de ce rapport commandé par votre prédécesseur a fait l'objet d'un important travail d'analyse de plusieurs mois.

Selon nos informations, il semblerait qu'il brosse le tableau effrayant d'un pays – le nôtre, la France, monsieur le ministre ! – miné de l'intérieur par une confrérie qui y a structuré un important réseau d'implantation. Que ce soit par des lieux de culte, des associations, des écoles confessionnelles, voire des écosystèmes complets, ce réseau investit progressivement nos quartiers et nos villes.

Tout cela se déroule à bas bruit, mais avec beaucoup d'efficacité, et serait même alimenté par des circuits financiers, notamment étrangers. L'objectif n'est rien de moins que d'établir la prééminence de la loi coranique sur les lois et les valeurs de notre République.

Monsieur le ministre d'État, vous auriez vous-même affirmé que ce rapport est accablant et alarmant. Compte tenu de ces propos très forts, pourriez-vous nous en dire plus et, bien entendu, nous indiquer la suite que le Gouvernement compte donner à ce constat effrayant ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.

M. Bruno Retailleau, ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, monsieur le sénateur André Reichardt, bien sûr que ce rapport est alarmant.

Il concerne l'islamisme. Au reste, il est essentiel de séparer ces menées islamistes d'une pratique de l'islam compatible avec la République. J'observe d'ailleurs que les pays les plus durs avec les Frères musulmans sont non pas les démocraties occidentales, mais les pays musulmans.

M. Loïc Hervé. Très bien !

M. Bruno Retailleau, ministre d'État. Il y a une grande différence entre ce que l'on a appelé le séparatisme et l'entrisme. Le séparatisme consiste à construire de petites contre-sociétés séparées de la communauté nationale, tandis que l'entrisme tend à nous faire modifier profondément nos propres règles, ce qui concerne l'ensemble de la communauté des citoyens.

Vous vous êtes intéressé à ce sujet, monsieur Reichardt, comme le montrent vos travaux, que je connais, notamment votre rapport de 2016 intitulé De l'Islam en France à un Islam de France, établir la transparence et lever les ambiguïtés, ainsi que votre proposition de loi relative aux conditions d'exercice de la liberté de culte dans un cadre républicain, adoptée par le Sénat en 2018.

Or qu'il s'agisse d'entrisme ou d'islamisme à bas bruit, c'est toujours la même matrice politique. Ce sont les Frères musulmans qui l'ont inventée, à partir de 1928, et elle n'a pas changé depuis lors. Elle repose sur la prééminence de la loi coranique sur la loi de la République, sur l'infériorisation du statut de la femme et sur l'antisémitisme sous couvert d'antisionisme.

Bien entendu, il faut prendre ce problème à bras-le-corps. Le rapport sur lequel vous m'interrogez, monsieur Reichardt, fait état de deux menaces.

La première porte sur nos intérêts fondamentaux, notamment le caractère républicain de nos institutions, mais aussi sur la cohésion nationale. Pour y remédier, dans les mois à venir, il faudra tout d'abord proposer une meilleure organisation de l'État, avec un véritable chef de filât en matière de renseignement et, au ministère de l'Intérieur, un parquet administratif pour diligenter des dissolutions et des entraves administratives.

La seconde est relative aux circuits financiers. Il est capital de comprendre comment les biens et les actifs de BarakaCity, après la dissolution de cette association, ont été transférés au Royaume-Uni. De même, comment se fait-il que, à la suite de la dissolution du Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF), ses biens et ses actifs soient allés se réfugier en Belgique ? Il y a là des lacunes qui doivent être comblées.

M. Bruno Sido. Eh oui !

M. Bruno Retailleau, ministre d'État. Enfin, il faudra mener une stratégie de sensibilisation informationnelle de la population et former les fonctionnaires et les élus, car c'est capital.

Dans quelques heures, le rapport sera rendu public.

M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre d'État.

M. Bruno Retailleau, ministre d'État. Nous avons la ferme intention de combattre le frérisme et l'entrisme. (Applaudissements prolongés sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Michel Masset applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour la réplique.

M. André Reichardt. Si, comme le disait Albert Camus, « mal nommer un objet, c'est ajouter au malheur de ce monde », ce ne sera pas le cas avec ce rapport, au sein duquel, cette fois, les ennemis des valeurs de notre République semblent être bien nommés.

Je salue vivement cette prise de conscience. Mais il faut également des actes pour démonter la mécanique à l'œuvre. Comme vous le savez, monsieur le ministre d'État, le Sénat a formulé plusieurs propositions en ce sens, dont celles qui sont contenues dans le rapport que vous avez bien voulu citer, que j'avais commis sous la présidence de Corinne Ferret et corédigé avec Nathalie Goulet.

La liste des recommandations que nous avions formulées était longue : la lutte pour la transparence des financements, le contrôle des subventions de l'Union européenne et la qualification des ministres du culte, entre autres.

M. le président. Il faut conclure !

M. André Reichardt. Il reste beaucoup à faire. Je sais qu'il faut du courage politique et de l'énergie. Monsieur le ministre d'État, vous ne manquez ni de l'un ni de l'autre. Allez-y ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

morts de sans-abris et politique du logement

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Annie Le Houerou. Madame la ministre chargée des comptes publics, selon le décompte du collectif Les Morts de la rue, publié avant-hier, 855 personnes auraient péri de la sorte en 2024.

Ce sont 855 personnes, dont une majorité d'hommes et 112 femmes, qui sont mortes sur la voie publique dans des abris de fortune ; 855 personnes, dont 19 de moins de 4 ans. Cette situation est intolérable dans notre pays. Or elle s'aggrave et concerne tous les départements.

Depuis 2017, le nombre de morts de la rue a augmenté de 135 %. Pourtant, la fortune des milliardaires français a crû de plus de 24 milliards d'euros depuis 2019, selon Oxfam. La Fondation pour le logement des défavorisés, quant à elle, fait état de 350 000 sans domicile fixe en 2024. Au-delà de celles qui sont à la rue, 1 118 000 personnes sont sans logement à soi.

À rebours des promesses du président Macron formulées en 2017, les politiques sociales des gouvernements successifs aggravent les risques de se retrouver à la rue. Ainsi, les places d'hébergement d'urgence et le budget afférent stagnent depuis des années. Les services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO) sont plus que débordés, au désespoir des travailleurs sociaux.

La promesse de 10 000 places supplémentaires ne répondra qu'à 7 % des besoins. En outre, la loi du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l'occupation illicite, dite loi Kasbarian-Berger, a provoqué une chute des constructions de logements sociaux : en 2024, moins d'une demande de logement social sur dix est satisfaite et neuf sur dix ne le sont pas.

Dans nos territoires, la tension qui règne sur les budgets des collectivités et des associations de solidarité empêche celles-ci de répondre aux besoins exprimés. Les difficultés d'accès aux soins en santé mentale accentuent aussi la marginalisation de certaines personnes.

Madame la ministre, confirmez-vous ces chiffres insupportables du nombre de morts dans la rue en France ? Quelles mesures envisagez-vous pour lutter contre la précarité et assurer un abri décent pour tous, enfants, femmes, hommes mis en danger de mort dans les rues de notre pays ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des comptes publics.

Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Madame la sénatrice, vous nous interrogez sur un sujet qui se situe à la croisée de la politique du logement, de la politique budgétaire, de l'aménagement du territoire et, plus largement, de la politique de soutien aux personnes les plus vulnérables. (Mme Laurence Rossignol s'exclame.)

Valérie Létard aurait pu vous donner les détails des chiffres et des politiques qu'elle mène dans son action résolue en tant que ministre du logement.

Je voulais vous répondre sur un élément qui a été moteur depuis 2017, à savoir le dispositif Logement d'abord. Il s'agit d'un plan massif d'investissement, en lien avec les collectivités, pour sortir de la logique de l'urgence et redonner aux personnes leur dignité. Nous parlons de centaines de milliers de Français et de familles qui, depuis 2017, ont été sortis de la précarité et de cette boucle infernale de l'hébergement d'urgence où l'on ne se réinsère pas, où l'on ne se scolarise pas et où l'on ne peut, malheureusement, trouver ni travail ni emploi.

Le Logement d'abord, qui a permis à ces centaines de milliers de familles de sortir de la précarité,… (Protestations sur les travées du groupe SER.)

Mme Amélie de Montchalin, ministre. … est une politique que nous continuons de mener grâce aux collectivités.

Hier, avec Valérie Létard, nous avons confirmé notre soutien aux bailleurs sociaux. Nous avons ainsi signé le décret relatif à la réduction de loyer de solidarité (RLS), de sorte à diminuer le poids de l'hébergement en 2025. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie proteste.)

Avec Valérie Létard, je soutiens toutes les mesures, notamment dans le cadre de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) et de l'Agence nationale de l'habitat (Anah), en faveur des personnes les plus fragiles.

Madame la sénatrice, nous ne voulons pas opposer les Français entre eux, alors que tous contribuent à la solidarité nationale. Je vous sais attachée à la justice fiscale : nous le sommes aussi. (Vives protestations sur les travées du groupe SER.)

M. Bernard Jomier. On aura tout entendu !

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je vous sais attachée à la bonne tenue des comptes publics. Or nous luttons contre la fraude, toute la fraude, qu'elle soit fiscale ou sociale. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)

M. Hussein Bourgi. Quel est le rapport ?

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n'est pas le sujet !

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je ne souhaite pas que nous opposions les efforts que nous réalisons sur des politiques d'ampleur en ce qui concerne l'aide aux plus vulnérables.

Je pourrais vous donner, avec Valérie Létard, les chiffres du budget consacré au logement : nous n'avons ni gelé ni annulé les crédits liés au logement d'urgence. Nous n'avons ni gelé ni annulé les crédits liés à la politique du logement social.

M. Hussein Bourgi. Demandez à Kasbarian !

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Notre politique est lisible. Nous voulons que cela fonctionne mieux, et nous n'y arriverons que si, dans chaque bassin de vie, dans chaque commune, nous travaillons de manière collective, sans polémiques et sans effets d'annonce, lesquels, malheureusement, ne sont que trop rarement suivis d'actions concrètes. (M. François Patriat applaudit.)

MM. Bernard Jomier et Hervé Gillé. Mais des gens meurent dans la rue !

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour la réplique.

Mme Annie Le Houerou. Madame la ministre, les chiffres sont têtus ! Le nombre de morts dans la rue augmente et le Logement d'abord ne résoudra pas ce problème.

C'est une question de dignité des personnes. Nous devons un toit à tous les Français – tous ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.)

entraves normatives et hausse du coût des fertilisants subies par les agriculteurs

M. le président. La parole est à Mme Kristina Pluchet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Kristina Pluchet. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'agriculture.

Madame la ministre, de nouvelles manifestations se préparent la semaine prochaine, nourries par le démontage méthodique à l'Assemblée nationale de la proposition de loi visant à lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur portée notre collègue Laurent Duplomb, sous l'influence des lobbies écolo-gauchistes. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K.)

M. Mickaël Vallet. Et même islamo-gauchistes !

Mme Kristina Pluchet. Dans ce contexte, je veux saluer la clarté et l'engagement sans faille de la ministre Annie Genevard, que je sais présente en ce moment aux côtés des agriculteurs, durement touchés par les récentes intempéries dans le Sud-Ouest. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP.)

Toutefois, voilà qu'un nouveau front s'ouvre. La Commission européenne a proposé et les États membres ont validé une augmentation substantielle et exponentielle, dès juillet prochain, des droits de douane sur les engrais d'origine russe et biélorusse, dans le cadre de la proposition de règlement portant modification des droits de douane applicables aux importations de certains produits originaires de la Fédération de Russie et de la République de Biélorussie ou exportés directement ou indirectement à partir de ces pays.

Cette taxe, cette surtaxe, cette énième taxe va inévitablement faire flamber les prix et posera un problème de disponibilité. Les agriculteurs en seront, une fois de plus, les premières victimes, alors que leurs trésoreries sont plus que tendues et qu'ils subissent déjà de plein fouet l'inflation, la concurrence déloyale et un carcan normatif toujours plus suffocant.

Madame la ministre, avez-vous l'assurance d'une compensation rapide, lisible et efficace tendant à pallier l'inévitable explosion du prix des engrais azotés ?

Surtout, comment garantir que ces fertilisants russes ne seront pas réimportés, à des prix prohibitifs, via des pays tiers ? Que l'Europe veuille pénaliser la Russie, c'est une chose, mais le faire sur le dos de ceux qui nous nourrissent, c'en est une autre, qui est inacceptable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée, porte-parole du Gouvernement. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Kristina Pluchet, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, qui se trouve actuellement dans le Sud-Ouest, aux côtés des agriculteurs dont les exploitations ont été affectées par des intempéries au cours des dernières nuits.

Vous soulevez la question de la surtaxe des fertilisants azotés, en évoquant, ce qui est bien compréhensible, les fortes inquiétudes que celle-ci suscite chez les agriculteurs. Nous l'entendons.

La Commission européenne a déposé cette proposition avec un double objectif. D'une part, comme vous l'avez dit, la visée est d'ordre géopolitique : il s'agit de ne pas financer l'effort de guerre de la Russie. Je crois que nous pouvons nous accorder sur cette nécessité. D'autre part, nous devons réduire nos dépendances stratégiques, celles qui sont suscitées par les engrais étant inacceptables.

Le but est donc de diversifier les approvisionnements en provenance de pays tiers et, à plus long terme, de réimplanter en Europe des industries pour la production d'engrais. La Commission européenne a ainsi proposé un système progressif, jusqu'à 2028, avec une évolution lente au départ, afin de permettre une forme d'adaptation.

Cela étant, la position de la France, consciente de l'effort requis, est de considérer que celui-ci ne doit pas être supporté par nos agriculteurs. La protection de ces derniers est notre priorité, celle du Gouvernement, sous l'autorité du Premier ministre et de notre ministre de l'agriculture. Nous l'avons fait comprendre au Conseil de l'Union européenne.

Nous avons ainsi demandé l'intégration de mesures de remédiation et un mécanisme de stop and go pour protéger les agriculteurs en cas de crise. Nous nous sommes opposés à l'inclusion de l'ammoniac dans les produits soumis à la surtaxe et nous avons obtenu de la Commission un engagement à prendre des mesures adéquates en cas d'augmentation trop importante des prix.

Nous avons également indiqué que nous souhaitions la mise en place de dispositifs visant à éviter que la mesure ne soit contournée et que ne reviennent, via d'autres pays, des flux en provenance de la Russie.

M. le président. Il faut conclure, madame la ministre déléguée.

Mme Sophie Primas, ministre déléguée. La France sera très vigilante sur les conditions de prix. Nous serons aux côtés de la ministre de l'agriculture pour veiller à ce que les agriculteurs ne soient pas pénalisés par ces dispositions. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Sido. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Kristina Pluchet, pour la réplique.

Mme Kristina Pluchet. Le bon sens aurait voulu que l'Europe soit souveraine en matière de production d'engrais avant d'envisager de couper le robinet russe ! Cependant, il n'en est rien.

J'y insiste, il nous faut des garanties rapidement, comme celle d'une levée des taxes douanières et anti-dumping sur les importations d'engrais provenant d'autres régions du monde, afin de maintenir un approvisionnement compétitif de nos agriculteurs. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

lutte contre l'immigration illégale dans les alpes

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le ministre d'État, ministre de l'intérieur, ma question porte sur les moyens affectés à la lutte contre l'immigration illégale, tout particulièrement à la frontière italienne dans le département des Hautes-Alpes, au col de Montgenèvre.

En effet, ce col, situé entre 1 800 et 1 900 mètres d'altitude, est devenu en 2015 le premier point d'entrée terrestre de flux illégaux de migrants en France. On constate ainsi une augmentation de plus de 130 % du nombre des passages entre 2024 et 2025. Face à ces afflux et compte tenu des conditions géographiques et climatiques du col, la police aux frontières est, tout bonnement, dépassée.

Premièrement, la charge de travail ayant quadruplé, le manque de personnel se fait durement ressentir, avec un nombre insuffisant d'officiers de police judiciaire.

Deuxièmement, les locaux sont inadaptés, tant à un accueil digne pour les migrants qu'à des conditions de travail décentes pour les fonctionnaires de police. Je rappelle que les rétentions administratives s'opèrent dans des Algeco situés à plus de 2 000 mètres d'altitude.

Troisièmement, il existe un flou juridique concernant le traitement des étrangers en situation irrégulière depuis que la Cour de justice de l'Union européenne a estimé, dans un arrêt du 21 septembre 2023, que la France ne pouvait pas procéder au refoulement de personnes migrantes entrées illégalement sans que ces dernières aient bénéficié d'un délai au cours duquel elles peuvent quitter volontairement le territoire.

Monsieur le ministre, ma question est simple. Le Gouvernement compte-t-il déployer des moyens durables pour faire face à cette situation, qui n'est pas sans conséquence sur la sécurité du territoire national dans son ensemble ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Lauriane Josende applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.

M. Bruno Retailleau, ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur Jean-Michel Arnaud, nous sommes parvenus à verrouiller la frontière entre les Alpes-Maritimes et l'Italie. Ainsi, désormais, le flux d'Érythréens passe en Italie, par Lampedusa, puis par le col de Montgenèvre, donc par les Hautes-Alpes. En effet, 90 % des mineurs non accompagnés qui ont été interceptés proviennent de l'Érythrée.

Qu'allons-nous faire ? Tout d'abord, protéger la frontière. Vous savez que, contrairement à beaucoup d'autres pays, nous n'avons pas de corps unifié de gardes-frontières.

Nous avons donc constitué un corps diversifié, comprenant les gendarmes, la police aux frontières, la douane, bien sûr, et l'armée, au travers de l'opération Sentinelle, pour mieux garder les frontières. J'ai également décidé de dépêcher une compagnie républicaine de sécurité (CRS) pour renforcer ces effectifs. Ces derniers seront également complétés par des officiers de police judiciaire et bénéficieront de bâtiments modulaires supplémentaires. C'est fondamental.

Je mentionne, par ailleurs, l'Office central pour la répression de la traite des êtres humains (OCRTEH), qui traque les filières dans ce domaine. Ainsi, l'an dernier, nous avons pu démanteler 269 d'entre elles, qui comprennent de véritables trafiquants d'êtres humains. Nous renforcerons cette dimension de notre action.

Vous m'interrogez sur la question juridique, monsieur le sénateur, notamment la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne de septembre 2023, dite ADDE, du nom de l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers. Elle nous complique énormément le travail, comme vous le savez.

Avec l'Italie, nous avons obtenu des résultats, notamment dans les Alpes-Maritimes. Nous avons, avec des patrouilles mixtes, la possibilité d'avoir une procédure simplifiée. Il faut faire de même dans votre département des Hautes-Alpes, qui comprend, certes, moins de policiers.

Surtout, la révision de la directive Retour est absolument fondamentale. Aujourd'hui, je tends plutôt à l'appeler directive Antiretour, puisqu'elle donne aux clandestins le choix de rester en leur accordant un délai de départ volontaire... Autant dire que cela ne peut pas fonctionner. L'idée est d'inverser la logique. C'est ce que la Commission européenne a proposé il y a quelques semaines. Voilà qui va tout changer.

Croyez-moi, monsieur le sénateur, nous sommes totalement mobilisés pour garder la frontière entre votre département et l'Italie. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Jean-Marc Ruel applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour la réplique.

M. Jean-Michel Arnaud. Vous ne m'avez pas répondu sur la question des locaux, monsieur le ministre d'État. Il s'agit d'un élément important pour la dignité des personnes migrantes, mais aussi, et surtout, pour le travail des policiers. En effet, le centre de rétention administrative (CRA) le plus proche se trouve à plus de deux heures de route. Vous comprenez aisément les conséquences que cela peut entraîner dans les deux domaines que j'ai mentionnés. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.

Notre prochaine séance de questions au Gouvernement aura lieu le mercredi 28 mai 2025, à quinze heures.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de Mme Anne Chain-Larché.)

PRÉSIDENCE DE Mme anne Chain-Larché

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

2

Modification de l'ordre du jour

Mme la présidente. Mes chers collègues, par lettre en date du 20 mai 2025, M. Claude Raynal, président de la commission des finances, a demandé l'inscription à l'ordre du jour de la semaine d'initiative sénatoriale de la proposition de loi visant à garantir une solution d'assurance à l'ensemble des collectivités territoriales.

Nous pourrions inscrire ce texte en dernier point de l'ordre du jour du mercredi 11 juin 2025, ouvrir la nuit et prévoir la suite de l'examen de ce texte le jeudi 12 juin, à l'issue des espaces réservés et le soir.

Nous pourrions fixer au mardi 10 juin, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance et, à quinze heures, le délai limite pour les inscriptions des orateurs des groupes.

Y a-t-il des observations ?…

Il en est ainsi décidé.

3

Communication d'un avis sur un projet de nomination

Mme la présidente. En application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, ainsi que de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010, prises pour son application, la commission des lois a émis un avis favorable, à vingt-deux voix pour et zéro voix contre, à la nomination de M. Alain Espinasse aux fonctions de directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).

4

Communication relative à une commission mixte paritaire

Mme la présidente. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à faciliter la transformation des bâtiments de destination autre qu'habitation en habitations est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

5

Traité de coopération en matière de défense avec Djibouti

Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant la ratification du traité de coopération en matière de défense entre la République française et la République de Djibouti (projet n° 491, texte de la commission n° 620, rapport n° 619).

La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux. Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de présenter aujourd'hui devant vous le projet de loi autorisant la ratification du traité de coopération en matière de défense entre la République française et la République de Djibouti, signé à Paris le 24 juillet 2024.

La France et Djibouti ont noué, au fil des années, un partenariat privilégié, fondé sur une confiance mutuelle et une coopération déployée dans de nombreux domaines. Ce partenariat a été réaffirmé à l'occasion du deuxième déplacement du Président de la République à Djibouti, en décembre dernier.

Le présent traité matérialise la convergence des intérêts stratégiques français et djiboutiens en mer Rouge et dans le golfe d'Aden.

La présence militaire française à Djibouti est stratégique en ce qu'elle contribue à la sécurisation de la mer Rouge, par laquelle transite 30 % du trafic mondial. Cette route commerciale est, rappelons-le, vitale pour l'approvisionnement de l'Europe.

La base militaire française participe, en outre, à l'autonomie stratégique de notre pays, en facilitant la projection de forces vers l'Indopacifique et les territoires français d'outre-mer situés dans l'océan Indien.

En cas de crise, l'emprise française permet d'assurer des opérations de grande envergure. En témoigne l'évacuation de plus de 1 000 personnes dans le cadre de l'opération Sagittaire, survenue à la suite des affrontements armés au Soudan, en avril 2023. Notre base militaire à Djibouti permet aussi aux 1 500 soldats qui y sont stationnés de poursuivre plus facilement leurs entraînements sur le territoire djiboutien.

Djibouti est également le seul pays au monde où l'on trouve, au même endroit, une base militaire chinoise et une base militaire américaine. Des détachements des forces japonaises et italiennes y sont également présents.

C'est dans ce cadre que s'inscrit le projet de loi dont nous vous demandons d'autoriser la ratification, mesdames, messieurs les sénateurs.

Ce traité, en négociation depuis mai 2023, remplace le précédent accord en vigueur depuis 2014. Pour l'essentiel, il conforte la situation existante en apportant des garanties supplémentaires aux deux parties, notamment grâce à l'allongement de dix ans à vingt ans de la durée des stipulations.

Le traité se distingue par le maintien d'une clause de sécurité en vertu de laquelle la France s'engage à contribuer, selon les moyens qu'elle juge appropriés, à la défense de l'intégrité territoriale de Djibouti.

La France est la seule puissance, parmi les cinq qui disposent de forces prépositionnées à Djibouti, à assumer une mission de défense au profit de ce pays.

Par ailleurs, ce traité conforte notre relation bilatérale de défense dans les domaines opérationnels et stratégiques et réaffirme l'approche partenariale de la France au travers d'une coopération renforcée avec les forces armées djiboutiennes.

Cette coopération prend diverses formes : mise en place de formations, entraînement des forces djiboutiennes aux opérations de maintien de la paix et accueil des soldats au sein d'écoles ou d'unités militaires françaises.

Le traité prévoit une augmentation de la contribution financière versée à Djibouti, qui n'avait jamais été réévaluée depuis près de vingt-cinq ans.

Ce nouveau traité, qui conforte notre position comme principal partenaire de défense de Djibouti, est avantageux pour tous, dans un contexte de compétition géostratégique accrue.

Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations que le Gouvernement souhaitait formuler devant vous. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains. – Mme Hélène Conway-Mouret applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Cédric Perrin, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le traité de défense qui a été signé par la France et Djibouti, le 24 juillet dernier, est d'une importance toute particulière pour notre pays.

Il s'inscrit dans un contexte qui nous est globalement défavorable en Afrique. Après la fin de l'opération Barkhane et le retrait de nos forces armées du Mali, du Burkina Faso, du Niger et du Tchad, entre 2022 et 2024, la présence des bases militaires françaises dans les pays du golfe de Guinée a été remise en cause. L'effectif de nos soldats a été drastiquement réduit en Côte d'Ivoire et au Gabon. Ce mouvement a aussi touché le Sénégal.

Cette dégradation rapide est en partie due à la pression des opinions publiques des pays concernés, mais aussi aux agissements de la Russie, qui a ouvert un nouveau front dans sa guerre hybride contre l'Occident, maniant la désinformation et la propagande avec l'habileté que l'on sait.

En conséquence du retrait de nos forces armées, il sera désormais impossible pour la France, du moins dans un délai aussi bref qu'auparavant, de déclencher, par exemple, une évacuation de ressortissants de grande ampleur en Afrique de l'Ouest.

Ce genre d'opération restera toutefois possible depuis Djibouti grâce au présent traité, à l'image du rôle essentiel que la base française a joué dans l'opération Sagittaire, en avril 2023.

Cette importance stratégique, Djibouti la doit d'abord à une situation géographique exceptionnelle, en face d'un détroit de Bab el-Mandeb qui voit passer 12 % du commerce mondial, plus de 6 millions de barils de pétrole par jour et 30 % du trafic mondial des conteneurs.

Elle la doit aussi, actuellement, à sa proximité avec une zone de crise, celle qui a été déclenchée par l'offensive des Houthis au lendemain du massacre du 7 octobre 2023. Cette offensive par drones et missiles balistiques, dirigée contre le territoire israélien et des navires passant par le détroit, a fait baisser le trafic de 40 %. Elle a aussi conduit à deux opérations qui ont été menées, d'une part, par les États-Unis et une coalition de dix pays, et, d'autre part, par l'Union européenne.

En raison de sa situation géographique privilégiée, Djibouti est devenu un hub pour les opérations militaires, humanitaires et de renseignement dans la Corne de l'Afrique, la péninsule arabique et l'océan Indien. De ce fait, c'est le seul pays au monde à accueillir simultanément des bases militaires permanentes de plusieurs grandes puissances : la France, les États-Unis, le Japon, l'Arabie saoudite et, bien sûr, la Chine.

Ce nouveau traité s'inscrit dans une relation franco-djiboutienne ancienne et dense. Djibouti est devenu indépendant de la France le 27 juin 1977. Jusqu'au milieu des années 2010, les relations bilatérales se sont un peu refroidies, notamment en raison de la réduction du nombre des militaires français et de la participation moindre de la France aux grands projets de développement du pays.

Cependant, face à la montée en puissance de la Chine, pourvoyeuse d'infrastructures et première détentrice d'une dette qui devient difficilement soutenable, les autorités djiboutiennes cherchent désormais à rééquilibrer leurs relations extérieures. Elles manifestent ainsi une volonté renouvelée de rapprochement avec notre pays. De nombreuses visites présidentielles et ministérielles ont permis de réaffirmer la solidité de ce partenariat.

Au-delà de la dimension politique, les relations franco-djiboutiennes sont également denses dans les domaines de l'économie, du commerce, de l'investissement solidaire et de la culture, ainsi que, depuis peu de temps, dans le domaine spatial.

J'ajouterai quelques mots sur le format de la base française. Ses effectifs ont progressivement baissé, passant d'environ 5 600 soldats en 1977 à environ 1 500 aujourd'hui. Le dispositif a été fortement réduit en 2011, avec le départ de la 13e demi-brigade de la Légion étrangère et la réduction de l'aviation de combat, passée de dix à quatre Mirages. Les équipements de l'armée française actuellement déployés à Djibouti restent toutefois assez importants.

Nous nous félicitons des quelques évolutions qui devraient intervenir dans les années à venir, comme le passage aux véhicules du programme Scorpion, le remplacement des hélicoptères, l'éventuelle arrivée des Rafales et la rénovation de plusieurs infrastructures aériennes et navales. Une légère remontée des effectifs devrait accompagner la mise en place de ces nouveaux moyens.

J'en viens au contenu du traité en matière de défense. Il se caractérise par une grande continuité avec le précédent. Ainsi, la clause de sécurité non automatique, prévue à l'article 4, est logiquement maintenue.

Cet article revêt une importance particulière en ce qu'il détaille les engagements de la République française à l'égard de Djibouti en matière de défense et d'intégrité territoriale.

La présence militaire française à Djibouti a ainsi une double finalité : fournir un point d'appui aux forces françaises projetées vers la zone indopacifique et contribuer à la sécurité de Djibouti. Ce pays craint notamment des incursions érythréennes, comme celle qui a eu lieu en 2008, ainsi que des attentats menés par des djihadistes infiltrés depuis la Somalie ou le Yémen, les Shebab ayant appelé à frapper les intérêts français et américains. L'instabilité de l'Éthiopie constitue également une menace forte pour le pays.

Dans ce contexte, la clause de sécurité est, pour Djibouti, un élément essentiel de notre partenariat. Elle a également un caractère dimensionnant pour notre présence, justifiant une empreinte importante en matière de personnel et de matériel.

L'un des aspects remarquables de cette clause de sécurité est reflété par la mention selon laquelle « [l]a partie française participe avec la partie djiboutienne à la police de l'espace aérien djiboutien et à la coordination du trafic aérien militaire ». Il s'agit pour les forces françaises d'une prérogative importante, qui témoigne de l'entente approfondie entre les deux pays.

Par ailleurs, nous pouvons nous féliciter du fait que le nouveau traité prévoie une coopération fluidifiée. Ainsi, « les forces françaises stationnées organisent les exercices et manœuvres nécessaires à leur entraînement après notification auprès des autorités djiboutiennes compétentes ». Cette évolution facilitera les activités menées par les forces françaises stationnées à Djibouti, dans la mesure où le précédent traité prévoyait un accord préalable.

L'article 8 prévoit en outre la création d'un nouveau comité militaire de dialogue stratégique. L'objectif est d'accompagner de manière plus suivie la transformation, à l'horizon de 2030, des forces armées djiboutiennes en une armée d'emploi, apte à s'engager dans la lutte contre les groupes terroristes et les menaces maritimes.

Enfin, le nouveau traité prévoit la restitution par la France de 40 % de la superficie de l'îlot du Héron. Sur le plan symbolique, cette restitution permet de répondre à une demande forte des autorités djiboutiennes. Cette façade maritime, située dans un quartier convoité de la ville de Djibouti, pourra en effet être exploitée dans le cadre d'une activité commerciale.

Cette restitution n'aura pas d'impact opérationnel majeur, car la partie rétrocédée accueille principalement des logements qui seront relocalisés et en partie remplacés par des prises à bail. Toutefois, il conviendra non seulement de bien préserver les ateliers de la base et les cales de mise à l'eau, mais aussi de réaliser les travaux nécessaires à la réorganisation de l'enceinte.

Enfin, la contribution financière de la France s'élève désormais à 85 millions d'euros par an, contre 30 millions d'euros auparavant. Rappelons qu'elle n'avait pas été réévaluée depuis 2003. Or la concurrence qui s'est accrue à Djibouti au cours des vingt dernières années, avec l'installation d'autres bases, a justifié une évolution.

En tout état de cause, il faut se féliciter que le principe d'une contribution forfaitaire libératoire de tout impôt, taxe, droit de douane ou autre prélèvement a été préservé, d'autant que le traité est signé pour une durée de vingt ans, contre seulement dix ans pour le traité conclu en 2011.

Au total, ce nouveau traité présente l'ensemble des garanties requises pour assurer la pérennité de la base française à Djibouti au cours des vingt prochaines années.

Cette base constitue pour nos armées un point d'appui de premier ordre en bordure de la région indopacifique et un outil de projection opérationnelle sans égal. Par ailleurs, elle envoie un signal permanent à nos nombreux concurrents stratégiques.

La coopération militaire dont elle constitue le support prend place dans une relation bilatérale ancienne et profonde, qui, en retour, lui confère son atmosphère de confiance mutuelle et durable.

Pour maintenir cette confiance, il faudra toutefois rester constamment à l'écoute de ce partenaire. Ne nous leurrons pas : si nous sommes ici dans une situation différente de celle qui prévaut au Sahel et en Afrique de l'Ouest, Djibouti n'est à l'écart ni des courants d'opinion qui traversent la population, en particulier la jeunesse africaine, ni des campagnes de désinformation de nos adversaires stratégiques.

Pour l'ensemble de ces raisons, mes chers collègues, je vous propose d'adopter de ce projet de loi de ratification, approuvé par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées lors de sa réunion du 14 mai dernier. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI. – Mme Mireille Jouve applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.

Mme Hélène Conway-Mouret. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, sans entrer dans le détail du traité de coopération en matière de défense entre la France et Djibouti, je voudrais, en quelques minutes, vous démontrer pourquoi ce texte est un pacte d'avenir, même si nous avions, par ce biais, l'occasion de remettre à plat nos relations et ne l'avons pas fait.

Djibouti et la France partagent une histoire forgée dans la durée, mais aussi dans le sang. En cette année de commémorations, je voudrais saluer la mémoire des 84 engagés volontaires qui ont participé, en avril 1945, à la libération de la poche du Médoc ; la moitié d'entre eux sont décédés au combat.

Cette fraternité d'armes explique peut-être pourquoi la France demeure le seul pays avec lequel Djibouti entretient une relation de défense globale depuis son indépendance en 1977, malgré la présence permanente de plusieurs grandes puissances étrangères sur ce petit territoire à la position géostratégique si convoitée.

En témoignent le maintien de la clause de sécurité à l'article 4 et l'ajout d'un dispositif d'alerte permanent sur les menaces à l'article 7, symboles de l'intensité et de la singularité de cet accord.

Le renouvellement de ce traité montre que l'amitié qui nous lie à Djibouti résiste au temps et aux turbulences du monde.

Dans cette région instable, située au carrefour de la mer Rouge et du golfe d'Aden, sur la route la plus courte entre l'Asie et l'Europe, où passent dix-sept câbles sous-marins – il faut parler de ce qui se passe sur l'eau, mais aussi de ce qui se passe au-dessous –, nous partageons des intérêts communs, notamment en matière de sécurité et de liberté de circulation maritime.

La présence des Forces françaises stationnées à Djibouti (FFDj) prend alors tout son sens : elle contribue à la sécurité du territoire djiboutien, sécurise le trafic maritime, avec l'opération Aspides, ouvre une porte vers l'Indopacifique et permet la projection rapide de nos forces. Notre base a d'ailleurs servi d'appui crucial lors de l'évacuation des ressortissants français et étrangers de Khartoum dans le cadre de l'opération Sagittaire, en avril 2023.

Si la France demeure à Djibouti d'une manière si singulière, c'est aussi et surtout grâce aux liens de confiance tissés au fil du temps. Contrairement à d'autres, nos personnels militaires et leurs familles s'intègrent pleinement à la vie économique et sociale, se soignent au centre médico-chirurgical interarmées (CMCIA), qui emploie du personnel français et djiboutien, et scolarisent leurs enfants aux côtés d'élèves locaux, au lycée français de Djibouti.

Nos partenariats ne cessent de s'élargir, que ce soit en matière d'infrastructures, avec l'accord des présidents Macron et Guelleh pour la construction d'un deuxième aéroport, ou en matière spatiale, avec le lancement réussi des deux premiers satellites djiboutiens, développés par des ingénieurs formés à l'université de Montpellier.

L'action dans ce domaine sera d'ailleurs prolongée par la création de la future agence spatiale de Djibouti.

L'amitié franco-djiboutienne repose aussi sur un héritage commun : le français. Djibouti est un îlot francophone, dans une Corne de l'Afrique anglophone ou arabophone, et abrite d'ailleurs le Centre régional francophone pour l'Afrique (Crefa) dans le cadre de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF).

Certes, le préambule du traité rappelle notre souhait commun de promouvoir la francophonie, qui reste la langue usitée dans l'administration. Mais cet ancrage linguistique s'érode. L'anglais progresse avec l'ouverture de deux écoles américaines, et les étudiants se tournent trop souvent vers nos concurrents pour leurs études supérieures, du fait des difficultés pour obtenir un visa pour la France.

Ce patrimoine commun, fragile et précieux, appelle notre engagement renouvelé. Notre vigilance s'impose d'autant plus que Djibouti suscite l'intérêt croissant de nombreuses puissances. Je pense bien sûr à la Chine, qui réalise des investissements massifs et détient une part importante de la dette du pays.

À l'heure où les autorités djiboutiennes cherchent à diversifier leurs partenariats pour réduire leur dépendance, nous devons rester à la hauteur des attentes de notre partenaire et répondre présent.

C'est de tous ces éléments que notre relation d'exception tire sa force. Ce traité équilibré témoigne d'une volonté réciproque, celle de prolonger un partenariat privilégié et choisi pour les vingt prochaines années.

Voilà les raisons pour lesquelles le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et RDSE. – M. Marc Laménie applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Malhuret. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. Jean-Baptiste Lemoyne applaudit également.)

M. Claude Malhuret. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky a demandé le retour à la procédure d'examen en séance de ce texte, à la place du vote en commission, afin de pouvoir exprimer son rejet d'un traité dont il pense qu'il engage notre pays dans une impasse. (Mme Cécile Cukierman s'exclame.) Pour ma part, je me félicite de ce débat en séance publique, mais pour des motifs exactement inverses.

Ce traité revêt une importance stratégique majeure, pour de nombreuses raisons.

Tout d'abord, Djibouti jouit d'une situation géographique exceptionnelle, puisque ce pays est situé en face du détroit de Bab el-Mandeb, au carrefour de la Corne de l'Afrique, de la péninsule arabique et de l'océan Indien.

La présence, depuis 2017, de quatre bases militaires étrangères – celles des États-Unis, du Japon, de l'Italie et de la Chine –, en plus de la nôtre, suffirait à elle seule à confirmer cette importance stratégique, au moment où la guerre civile au Yémen s'intensifie et où les Houthis menacent les navires passant dans le détroit, ce qui a drastiquement réduit les flux commerciaux en mer Rouge.

Ensuite, ce traité s'inscrit dans un contexte de diminution de la présence française en Afrique au cours des dernières années : baisse des effectifs militaires en Côte d'Ivoire, au Gabon ou au Sénégal et retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger, ainsi que, dernièrement, du Tchad.

À ce sujet, rappelons que la Russie a utilisé le Sahel comme un véritable laboratoire pour manipuler les opinions publiques locales et instrumentaliser les médias. Force est de constater qu'elle est parvenue à trouver un écho favorable au-delà du seul continent africain.

Cinquante-huit Français sont tombés en combattant le terrorisme au Sahel, après que la France a répondu à l'appel de détresse lancé par les autorités maliennes ; je voudrais saluer la mémoire de cette femme et de ces hommes, ainsi que l'engagement de tous nos soldats.

Cette histoire récente du Sahel rend d'autant plus important le maintien de la coopération militaire avec Djibouti. La France devrait-elle renoncer à défendre ses partenaires et ses valeurs et donner à la Russie de Poutine et aux mercenaires de l'ex-groupe Wagner un blanc-seing sur les coopérations militaires dans la région ?

Loin de constituer une impasse, nous considérons que la présence française est indispensable. La France a pour ambition d'être une puissance d'équilibre. Par sa présence et son action, elle est en mesure de renforcer la sécurité de la zone.

En plus de permettre à nos forces armées de se projeter en mer Rouge et en Indopacifique, l'accord conclu avec Djibouti répond en premier lieu, il faut le rappeler, à une demande des autorités djiboutiennes elles-mêmes.

Après avoir ouvert leurs portes au régime chinois dans les années 2010, les autorités djiboutiennes veillent à maintenir un équilibre des puissances présentes sur leur territoire, afin de ménager leur indépendance. Tout comme elles, nous souhaitons que notre relation se poursuive. La France ne doit pas se désengager des affaires du monde, au moment même où les tensions s'accroissent. Nous devons maintenir notre coopération en matière de défense avec Djibouti.

Pour l'ensemble de ces raisons, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera ce texte à l'unanimité. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Allizard. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Pascal Allizard. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens avant toute chose à remercier notre collègue Cédric Perrin de son rapport, qui rappelle les enjeux de ce projet de loi.

En tant que rapporteur budgétaire du programme 144, je suis amené à suivre les activités internationales du ministère des armées. À ce titre, j'avais souligné la nécessité de faire aboutir rapidement les pourparlers pour la révision du traité de coopération en matière de défense avec la République de Djibouti. C'est désormais chose faite ! Nous nous en réjouissons, car l'enjeu est de taille.

Située à proximité immédiate du détroit de Bab el-Mandeb, qui ouvre la circulation maritime vers la mer Rouge et le canal de Suez, Djibouti est au cœur de la géopolitique des détroits. Voyez les pressions qui s'exercent de plus en plus sur les détroits de Malacca, d'Ormuz et de Panama. Avec celui de Bab el-Mandeb, ils constituent les points de passage obligés des flux maritimes mondiaux, qui suscitent le plus haut intérêt des puissances.

Verrou méridional de la mer Rouge, le détroit de Bab el-Mandeb et sa sentinelle Djibouti représentent un hub stratégique où se pressent nombre d'États. Certains d'entre eux, comme la France, les États-Unis, la Chine, l'Italie et le Japon, y entretiennent des bases militaires permanentes.

La Chine y a même construit sa première base à l'étranger, avec des capacités de premier ordre, et s'investit fortement sur le territoire dans le cadre des routes de la soie, un projet qui contribue à un endettement djiboutien difficilement soutenable. Les Chinois envoient ainsi un signal fort et clair concernant leurs ambitions régionales et globales.

De cette situation atypique, Djibouti entend, à bon droit, tirer le bénéfice le plus large.

Tout d'abord sur le plan sécuritaire, puisque cette concentration de forces contribue à la protection de ce petit État, situé au cœur d'une région aujourd'hui frappée par l'instabilité. À cet égard, soulignons le rôle joué par la France dans la surveillance des espaces aériens et maritimes de Djibouti et, surtout, la clause de sécurité qui lie nos deux pays. Celle-ci pose le principe de notre éventuelle participation à la défense de l'intégrité territoriale de Djibouti.

Le bénéfice recherché est aussi économique. En effet, chacune des bases installées contribue à dynamiser l'activité locale et participe significativement aux rentrées budgétaires. Lors de mon déplacement à Djibouti, les autorités locales m'avaient d'ailleurs rappelé le différentiel entre le loyer qui est payé par la France et celui dont s'acquittent les autres États…

Force est de constater que, dans un contexte de montée des tensions, les forces françaises prépositionnées à Djibouti apparaissent comme un actif stratégique, dont la valeur ne cesse de s'apprécier.

Dans ce contexte, la contribution forfaitaire de la France s'élève de 30 millions à 85 millions d'euros par an. En outre, pas moins de 40 % de l'îlot du Héron seront restitués par la France. Ce territoire abrite une base navale tout à fait essentielle pour la France, particulièrement pour la mise en œuvre opérationnelle de sa stratégie dans la zone indopacifique.

Ces transferts sont une source d'inquiétude, en particulier au vu de l'expansion des capacités chinoises, à quelques encablures de l'îlot.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous assurer que ces évolutions ne porteront pas préjudice au bon fonctionnement de la base du Héron ? Pouvez-vous également nous indiquer si elles auront un impact sur la nécessaire modernisation des infrastructures militaires dont nous disposons sur place ? Enfin, les effectifs des forces françaises stationnées à Djibouti remonteront-ils, après les baisses drastiques subies en quelques années et compte tenu des moyens engagés par les autres États ?

Les concessions faites par notre pays dans le cadre de ce nouveau traité sont importantes. Elles apparaissent comme un prix nécessaire vu le point d'appui que représente Djibouti pour nos armées dans un environnement instable.

La France est fortement mise au défi en Afrique francophone. Dans notre intérêt, il faut accepter la compétition et nous donner les moyens d'y répondre, en refondant nos partenariats avec les pays africains, ou, à défaut, accepter le déclassement.

Les forces et les infrastructures françaises à Djibouti ont joué un rôle cardinal dans diverses opérations. Le texte qui nous est soumis aujourd'hui va au-delà d'un simple accord de présence. Il s'agit d'un levier pour renforcer les capacités nationales de défense de Djibouti dans un contexte régional particulièrement dégradé et face à des menaces accrues. Cette coopération technique pourrait se révéler précieuse.

Ce faisant, l'accord témoigne d'une volonté de promouvoir une approche partenariale de la sécurité internationale. Il offre un cadre juridique clair à nos personnels militaires et conforte la relation diplomatique de qualité que nous entretenons avec Djibouti.

Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains soutiendra résolument sa ratification. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Hélène Conway-Mouret et M. Stéphane Fouassin applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd'hui pour un moment important : la ratification du traité de coopération en matière de défense entre la France et Djibouti.

Ce texte revêt une signification particulière en raison de la force et de la profondeur des relations qui unissent nos deux pays et nos deux peuples.

Les liens humains, façonnés par l'Histoire, témoignent d'une véritable amitié entre nos nations : aujourd'hui, entre 4 000 et 5 000 Français vivent à Djibouti. S'y ajoutent des liens culturels importants, nourris par notre appartenance commune à la francophonie. J'ai notamment à l'esprit le magnifique travail de l'Institut français de Djibouti, du lycée français et de l'école de la Nativité.

Enfin, je n'oublie pas les liens économiques, avec la vocation bien connue de hub de ce pays, que l'engagement d'Aéroports de Paris Ingénierie (ADPI) et d'Egis aux côtés de nos partenaires pour la réalisation d'un second aéroport illustre parfaitement.

Le moment est important, en outre, car nous avons noué avec Djibouti un partenariat militaire particulièrement fort et stratégique.

Il s'appuie, tout d'abord, sur la clause de sécurité inscrite à l'article 4, qui engage la France à défendre l'intégrité territoriale de Djibouti. Ensuite, notre pays participe à la police de l'espace aérien djiboutien et coordonne désormais le trafic militaire aérien. Enfin, sont présents 1 500 militaires français des trois armées. Les FFDj entretiennent des liens étroits avec les forces armées djiboutiennes, et ces relations seront encore renforcées par la simplification des manœuvres militaires prévue à l'article 5 du traité.

Notre partenariat est également stratégique, en raison de la position de Djibouti sur le détroit de Bab el-Mandeb et de la proximité du pays avec des théâtres de crises régionales : Houthis au Yémen, qui déstabilisent la région, contextes complexes en Éthiopie, au Soudan ou en Somalie.

La base française à Djibouti est un point d'appui pour la projection de nos forces et pour les opérations humanitaires. Nous l'avons constaté encore récemment lors de l'évacuation de Français et d'Européens depuis le Soudan. Il en va de même dans le cadre du pivot indopacifique.

Pour avoir été présent au début des discussions sur ce nouveau traité de coopération militaire et de défense (TCMD) dès 2020-2021, je puis témoigner que celui-ci est le fruit de l'engagement au plus haut niveau des présidents Ismaïl Omar Guelleh et Emmanuel Macron, des forces de défense des deux pays, des ministres de la défense et des deux diplomaties respectives.

Je tiens à saluer particulièrement Mahamoud Ali Youssouf, ancien ministre des affaires étrangères et aujourd'hui président de la commission de l'Union africaine, pour son rôle déterminant, ainsi que le travail de nos ambassadeurs de l'époque, Ayed Mousseid Yahya et Arnaud Guillois.

Alors que les bases de négociation initiales présentaient un écart notable entre les positions des deux États, nous sommes parvenus à un traité équilibré et conçu pour durer. Nous avons réussi à conserver une emprise opérationnelle sur l'île du Héron, les contributions financières ont été réévaluées – c'était nécessaire – et cet accord engage les deux parties pour vingt ans.

Au vu de ces avancées, le groupe RDPI votera avec conviction en faveur de la ratification de ce traité. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Hélène Conway-Mouret applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Mireille Jouve. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme Mireille Jouve. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.) Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a encore quelques années, nous vivions dans une économie de paix et peu d'entre nous accordaient de l'intérêt aux sujets touchant à la défense. Il y avait l'Europe, il y avait l'Onu ; la régulation des rapports entre les sujets de droit était ainsi peu ou prou respectée.

Ce temps est malheureusement révolu. Nous devons supporter la folie des hommes et une accumulation de crises sociales, économiques et climatiques, qui exacerbent les passions. Immanquablement, ces dérèglements suscitent interrogations et inquiétudes. Tout cela explique que nous ayons changé de logiciel en matière de défense.

Je tiens à remercier le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky d'avoir demandé le retour à la procédure normale, car cela nous permet d'aborder le fond du traité de coopération, pilier de la relation bilatérale de défense avec la République de Djibouti.

Chacun le sait, Djibouti accueille cinq bases militaires étrangères : la nôtre, depuis 1977, et celles des États-Unis depuis 2003, du Japon depuis 2011, de l'Italie depuis 2012 et enfin de la Chine depuis 2017. Ainsi, Djibouti est devenu un point névralgique des luttes d'influence.

Pour autant, la France y joue un rôle à part. Parmi les puissances militaires présentes, elle est la seule à avoir signé, conformément à l'article 4 du nouveau traité, une clause de sécurité en vertu de laquelle elle assure l'intégrité du territoire de Djibouti. Elle contribue ainsi à la défense des espaces aérien, terrestre et maritime de ce pays.

La position géographique de Djibouti et l'instabilité environnante lui confèrent une image d'îlot de stabilité indispensable au déploiement de notre stratégie régionale, sur le plan tant géopolitique que géoéconomique.

Djibouti participe aux efforts internationaux et régionaux de contre-terrorisme visant à perturber les Shebab de Somalie et les rebelles Houthis du Yémen, mais constitue également un important nœud de câbles de données sous-marins, plus de 90 % de la capacité Europe-Asie étant acheminée par la mer Rouge. Ces câbles représentent aujourd'hui un enjeu géopolitique mondial, et leur destruction emporterait des incidences substantielles pour les États, alors que chacun tente de peser de tout son poids sur la diffusion de l'information.

Situé face au Yémen, Djibouti voit passer une part non négligeable du trafic maritime mondial : 12 % du volume total, 40 % des échanges Asie-Europe et, par exemple, 90 % des exportations japonaises, ces chiffres évoluant naturellement depuis la crise avec les Houthis, consécutive à l'affrontement entre le Hamas et Israël.

Djibouti se trouve aussi au cœur de notre stratégie indopacifique. Notre engagement se voit renforcé par nos territoires d'outre-mer comme La Réunion, Mayotte et la Polynésie française. L'océan Indien est aujourd'hui le théâtre des rivalités entre grandes puissances, notamment la Chine, les États-Unis et l'Inde.

Pour toutes ces raisons, le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen votera en faveur de ce traité de coopération. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Ludovic Haye. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Ludovic Haye. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la ratification du traité de coopération en matière de défense entre la République française et la République de Djibouti représente à la fois une réaffirmation de notre partenariat historique avec ce pays et un instrument stratégique face aux nouveaux défis géopolitiques.

Ce texte vient renforcer un lien de confiance tissé depuis près de quarante-cinq ans. Cette coopération, qui n'a rien perdu de sa vitalité, doit aujourd'hui être adaptée aux enjeux sécuritaires contemporains.

À cet égard, je tiens à saluer le travail rigoureux de notre président de commission et rapporteur de ce projet de loi, dont l'analyse a permis de mettre en lumière toute la portée de cet accord.

Situé à l'entrée du détroit de Bab el-Mandeb, carrefour maritime essentiel entre la mer Rouge et l'océan Indien, Djibouti occupe une position géostratégique majeure et constitue une pièce centrale de la stabilité régionale et du commerce international, au cœur d'une zone traversée chaque jour par près de 30 % des échanges commerciaux mondiaux.

Toutefois, la montée des tensions en mer Rouge, alimentée par les attaques des Houthis contre la navigation commerciale et l'instabilité des rives voisines, exige une adaptation de notre présence et de nos engagements.

C'est pourquoi ce traité modernise les modalités de l'engagement militaire français dans la région.

Dans une logique de respect mutuel et de préservation de la souveraineté djiboutienne, cette coopération stratégique s'articulera autour d'un comité bilatéral renforcé ; elle permettra un appui concret aux forces armées djiboutiennes, notamment au travers de la formation, du transfert d'expertise et de la fourniture de matériels de défense français, pour un montant de plusieurs dizaines de millions d'euros.

Ce traité devient ainsi un levier concret de stabilité pour l'ensemble de la région et porte l'ambition plus large de contribuer à la sécurité internationale, en conformité avec les objectifs inscrits dans la Charte des Nations unies.

Il convient de le replacer dans un contexte de compétition stratégique croissante à Djibouti. Face à la montée en puissance de la présence chinoise, à la fois économique et militaire, les autorités djiboutiennes manifestent aujourd'hui une volonté explicite de rééquilibrer les forces en présence et de renforcer leurs liens avec la France. Cette dynamique va dans le sens de nos intérêts communs.

Enfin, je souhaite adresser, devant les militaires présents dans nos tribunes, un hommage solennel à l'ensemble des soldats qui, depuis des décennies, ont servi à Djibouti. Par leur professionnalisme et par leur sens du devoir, ils incarnent concrètement nos débats et sont les premiers acteurs de cette coopération stratégique que nous nous apprêtons à renforcer.

C'est parce que ce traité se situe à la croisée de notre histoire partagée, de nos intérêts stratégiques et de notre responsabilité internationale que le groupe Union Centriste votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDSE. – MM. Cédric Perrin et Jean-Baptiste Lemoyne applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et RDSE.)

Mme Cécile Cukierman. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, oui, notre groupe a sollicité le retour à la procédure normale, car, à la différence de notre collègue Claude Malhuret, il se refuse à adapter l'exigence du respect des droits de l'homme dans les différents pays du monde au gré des intérêts militaires de la France. Je lui laisse donc ses arguments, et vous m'autoriserez, bien sûr, au nom de la démocratie, à développer les miens.

Nul n'ignore le double objectif de ce partenariat : d'une part, maintenir une présence militaire dans le détroit de Bab el-Mandeb, afin de contrer les attaques des rebelles Houthis contre les navires commerciaux, et, d'autre part, garantir des capacités de projection de forces sur le continent africain et dans l'Indo-Pacifique.

Cependant, permettez-moi de revenir sur plusieurs points de ce traité.

Sur la forme, tout d'abord – c'est là notre première objection –, force est de constater, malheureusement, une montée en puissance des Houthis en dépit des actions menées par les différentes coalitions internationales, ce qui souligne d'ailleurs, s'il en était encore besoin, l'échec d'une approche exclusivement guerrière.

Sur le fond, ensuite, le soutien à une telle approche militaire dans ce détroit nous apparaît tout à la fois inefficace et contre-productif, notamment pour ce qui concerne l'objectif de maintien de forces de projection dans le cadre de la stratégie de l'Otan dite de l'Indo-Pacifique.

Vous le savez, nous sommes résolument opposés à cette logique de bloc, qui vise, d'une part, à endiguer la puissance chinoise, et, d'autre part, à soutenir et à encourager une présence militaire américaine dans la région. Je le redis ici : nous ne choisissons pas entre deux impérialismes – ou ingérences, comme disent certains, avec beaucoup de pudeur, lorsque cela les dérange.

Nous affirmons, au contraire, la nécessité, par la force diplomatique de notre pays – y compris, à certains moments, par sa puissance militaire –, de rendre aux peuples la capacité de s'émanciper et de décider souverainement de leur avenir.

Enfin, je m'étonne qu'aucun des orateurs précédents n'ait abordé la nature du régime de Djibouti. Je souhaite donc mettre en lumière l'absence d'exigence morale que sous-tend la ratification d'un tel partenariat : un concours financier de 1,2 milliard d'euros annuels, sur une période de vingt ans, au bénéfice d'un régime dictatorial !

Qu'il me soit permis de le dire crûment : outre les exécutions arbitraires et l'application des lois de la charia, le régime de Djibouti persiste dans son refus de ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Il s'obstine à ne pas ratifier les protocoles facultatifs se rapportant à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, ainsi qu'à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Mes chers collègues, concevez-vous que l'on puisse, d'un côté, applaudir, comme ce fut le cas ici même il y a un peu plus d'une heure, le ministre de l'intérieur, M. Bruno Retailleau, lorsqu'il affirme, à juste titre, la nécessité de combattre l'islamisme qui se répand à bas bruit, et, de l'autre, approuver par notre vote un soutien financier de plusieurs milliards d'euros à des États qui l'entretiennent objectivement et menaceront, pour les années à venir, l'équilibre de notre planète ?

Soyons la France, celle des Lumières ! Attachons-nous à défendre les principes des droits de l'homme tant que la lumière brille encore dans ces États ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, porte d'entrée de la mer Rouge et du golfe d'Aden, le détroit de Bab el-Mandeb revêt une importance stratégique majeure. Il relie la Méditerranée à l'océan Indien, constituant un point de transit crucial pour l'Europe : 70 % de son trafic maritime le traverse. L'intérêt stratégique de Djibouti n'est donc plus à démontrer.

La France, ancienne puissance coloniale, le sait très bien. Depuis l'indépendance du pays en 1977, nous y maintenons une présence militaire, dont nous discutons aujourd'hui du renouvellement pour vingt ans.

Ce nouveau traité renforce celui de 2014 sur plusieurs points, notamment par la rétrocession de 40 % de l'île du Héron à Djibouti et par une augmentation du loyer annuel de notre base, fixé désormais à 85 millions d'euros.

Ce nouvel accord vise à maintenir notre implantation dans une région où les enjeux de sécurité demeurent nombreux. Les actes de piraterie des milices shebab depuis la Somalie, ainsi que les attaques des rebelles Houthis du Yémen, menacent la circulation maritime. Djibouti est donc un point d'appui indispensable pour sécuriser ces flux, et la France prend toute sa part aux opérations européennes en la matière.

Notre base de Djibouti sert aussi à projeter des moyens militaires vers l'Afrique de l'Est, le Moyen-Orient et l'océan Indien, où les tensions sont nombreuses. Il s'agit d'un relais utile pour connecter l'Hexagone à La Réunion et à Mayotte ; ce fut le cas, par exemple, pour l'aide d'urgence lors des récents cyclones.

À l'heure d'une forte compétition entre les grandes puissances, notre maintien à Djibouti est d'autant plus vital que notre présence en Afrique recule fortement. Nos bases au Mali, au Niger, au Tchad et au Burkina Faso sont fermées depuis les coups d'État militaires intervenus entre 2021 et 2023, celles de Côte d'Ivoire et du Sénégal sont en train d'être évacuées, et notre présence au Gabon va être réduite.

En quelques années à peine, la France a donc perdu presque toute sa présence militaire en Afrique, à l'exception de Djibouti. Nous ne pouvons prendre le risque de voir cette implantation disparaître à son tour et d'autres puissances non démocratiques comme la Chine prendre notre place. C'est pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera en faveur de cet accord.

Néanmoins, cette débandade et la montée du sentiment anti-français dans toute l'Afrique doivent nous interroger.

Malgré nos nombreuses alertes à cette tribune, les vieux réflexes de la Françafrique restent présents. J'avertis donc de nouveau : si Djibouti est officiellement démocratique, son président est en poste depuis 1999 et son âge avancé pose la question de sa succession. La France doit plaider pour la démocratisation du régime, en particulier pour le droit de l'opposition à concourir aux élections parlementaires.

Cet épuisement d'un pouvoir autocratique accusé de crimes de guerre et de torture pose question, tant ce scénario rappelle celui qui a abouti au départ tumultueux de nos troupes du Sahel.

La formation des soldats djiboutiens par la France se doit donc d'être exemplaire et de ne pas déboucher sur des massacres de civils. Il y va du respect des droits humains comme de notre intérêt stratégique : notre présence s'effondre quand les dictateurs avec lesquels nous la négocions disparaissent. Je forme donc le vœu que ce vote permette, enfin, d'envisager de nouvelles relations avec l'Afrique.

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

projet de loi autorisant la ratification du traité de coopération en matière de défense entre la république française et la république de djibouti

Article unique

Est autorisée la ratification du Traité de coopération en matière de défense entre la République française et la République de Djibouti, signé à Paris le 24 juillet 2024 et dont le texte est annexé à la présente loi.

Mme la présidente. Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l'article unique constituant l'ensemble du projet de loi autorisant la ratification du traité de coopération en matière de défense entre la République française et la République de Djibouti.

Je rappelle que le vote sur l'article vaudra vote sur l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quinze, est reprise à dix-sept heures vingt.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

6

Lutte contre les fraudes aux aides publiqueS

Adoption définitive des conclusions d'une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi renforçant la lutte contre les fraudes aux aides publiques (texte de la commission n° 570, rapport n° 569).

La parole est à M. le rapporteur.

M. Olivier Rietmann, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires économiques, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l'examen parlementaire de cette proposition de loi renforçant la lutte contre les fraudes aux aides publiques.

Je remercie notre présidente Dominique Estrosi Sassone de m'avoir confié la mission de rapporter ce texte, ainsi que le rapporteur pour la commission des finances, Antoine Lefèvre…

Mme Nathalie Goulet. Le remarquable Antoine Lefèvre ! (Sourires.)

M. Olivier Rietmann, rapporteur. … de nos excellents échanges.

Tout au long de l'examen de cette proposition de loi, ma boussole a été triple : renforcer la protection des consommateurs dans la transition énergétique et dans la révolution numérique ; veiller à la simplicité du cadre législatif, garante de son intelligibilité et de son applicabilité, ainsi qu'à la simplicité de l'action administrative, en prévenant tout effet de silo ; enfin, faire suite aux travaux sénatoriaux, notamment en matière de démarchage téléphonique.

À l'issue de la commission mixte paritaire (CMP), je me félicite que le texte final, qui compte trente-cinq articles, conserve la quasi-totalité des apports sénatoriaux.

À l'article 1er, la CMP a maintenu la possibilité de renouveler la suspension d'une aide publique en cas de pratique frauduleuse. Elle a également conservé l'article 1er ter, qui vise à exclure les indus de revenu de solidarité active (RSA) obtenus frauduleusement de toute remise de dette.

Deux dispositions issues de la commission d'enquête sénatoriale sur l'efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique ont prospéré : le renforcement de l'information sur le service public de la performance énergétique de l'habitat et la possibilité pour la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), d'interdire à une entreprise de candidater à un label.

J'en viens au sujet crucial du démarchage téléphonique. Je rappelle que l'Assemblée nationale a ajouté dans le texte sur les fraudes une partie de la proposition de loi de notre collègue Pierre-Jean Verzelen visant à interdire le démarchage téléphonique, laquelle avait été adoptée à l'unanimité par le Sénat, mais ne faisait pas l'objet de la procédure accélérée.

Nous avons choisi de conserver cet ajout et de le compléter, en responsabilité, afin d'encadrer le plus rapidement possible ces pratiques qui exaspèrent nos concitoyens.

Globalement, la CMP a conforté les acquis du Sénat : elle a précisé la notion d'exception client ; elle a étendu le champ des organisations exemptées de l'interdiction d'utiliser certains numéros pour les appels émis par des automates, comme les organismes de sondage ou les entreprises de recouvrement ; elle a également confirmé la date d'entrée en vigueur du passage à l'opt-in au 11 août 2026. Surtout, elle a refusé toute exemption catégorielle à l'encadrement du démarchage téléphonique, qui aurait complexifié et fragilisé le dispositif.

Les parlementaires que nous sommes ne doivent pas écrire la loi en réponse aux sollicitations de quelques entreprises qui crient plus fort que les autres. Celles-ci ont les moyens de s'adapter ; elles ont besoin d'un peu de temps et de visibilité. Or c'est exactement ce que nous proposons, avec une entrée en vigueur de l'opt-in au 11 août 2026, soit dans quatorze mois, pour toutes les entreprises.

À l'article 4, qui modifie les contrôles et les sanctions en matière de certificats d'économies d'énergie (C2E), plusieurs apports sénatoriaux ont été maintenus. Les C2E pourront être modulés, de manière à exclure en amont les opérations les plus sujettes aux fraudes. Ils seront ainsi mieux contrôlés, et ces contrôles seront assortis de sanctions plus importantes et plus cohérentes.

En contrepartie, nous avons accepté de supprimer la définition par décret de la fonction de mandataire, aux côtés de celle de délégataire.

À l'article 5, qui introduit des contrôles visuels à distance pour les C2E, la version adoptée par le Sénat a été retenue dans le texte final. Sur la forme, elle propose une rédaction simplifiée, en conservant le dispositif pérenne, mais pas celui qui devait être expérimental. Sur le fond, elle offre une disposition consolidée en appliquant un délai de six ans, plutôt que de cinq ans, pour la conservation des pièces collectées.

Je suis également satisfait que le texte final conserve plusieurs articles additionnels adoptés au Sénat : les articles concernant les pouvoirs d'enquête, de sanction et de communication de la DGCCRF ; les articles qui visent à lutter contre la fraude dans le champ social, dont la formation professionnelle ; enfin, l'article 8, qui facilite les contrôles à distance des fraudes aux compteurs communicants d'électricité et de gaz. Pour maintenir cette dernière disposition, nous avons accepté de préciser les infractions recherchées, de même que la qualification des agents et les conditions de leur intervention.

Au nom de la commission des affaires économiques, j'invite donc le Sénat à adopter les conclusions de cette commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Marc Laménie applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous examinons aujourd'hui la proposition de loi renforçant la lutte contre les fraudes aux aides publiques, qui a fait l'objet d'un accord le 6 mai dernier en commission mixte paritaire et qui vous est donc soumise. Cet examen, je l'espère, entérinera les améliorations apportées au texte.

Je tiens avant tout à remercier les rapporteurs, MM. Cazenave, Rietmann et Lefèvre, ainsi que tous les membres de la CMP, de leur esprit de consensus et de leur efficacité, qui ont permis de parvenir à un texte désormais considéré par de nombreux acteurs comme essentiel pour lutter contre un certain nombre de maux bien connus.

Ce texte est essentiel, car Thomas Cazenave, alors ministre délégué chargé des comptes publics, avait repéré, avec l'ensemble des services de Bercy, un trou dans notre cadre juridique : nous avions déployé des outils contre la fraude fiscale et nous essayions de déployer davantage d'outils contre la fraude sociale, mais se développait dans notre pays ce nouveau type de fraude, aux aides publiques, contre laquelle l'État se retrouvait relativement démuni.

Frauder, je le rappelle, c'est voler tous les Français, et toutes les fraudes méritent notre attention, qu'elles soient fiscales, sociales, douanières ou encore liées aux aides publiques.

Je ne referai pas ici le bilan de l'année 2024 en termes de détection – 20 milliards d'euros de fraude – ou encore d'encaissement – 13 milliards d'euros, un record ! –, mais je tiens à vous redire combien nous sommes mobilisés pour aller plus loin.

Aller plus loin en permettant systématiquement le préremplissage du plus grand nombre de déclarations et de données – le revenu de solidarité active (RSA) et la prime d'activité ont déjà été évoqués ; aller plus loin en termes de moyens, avec 1 000 agents supplémentaires dans le champ social pour moderniser nos systèmes d'information, mais surtout pour mieux contrôler, détecter, punir et récupérer les fonds fraudés ; aller plus loin, enfin, dans notre mobilisation sur le plan législatif et juridique.

Le Conseil constitutionnel a décidé que certaines dispositions du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025, concernant les échanges de données avec les complémentaires santé ou la poursuite de la sécurisation de la carte Vitale, ne pourraient aller à leur terme, et nous entendons, collectivement, me semble-t-il, agir à ce sujet.

Nous devons également continuer de nous mobiliser pour que le crime organisé et la fraude aux aides publiques cessent de faire bon ménage. Nous constatons aujourd'hui, avec le démantèlement de grands réseaux criminels, que fraude aux aides publiques et criminalité organisée vont de plus en plus souvent de pair.

Au fond, nous souhaitons frapper au portefeuille ces criminels, comme on dit, et mettre fin aux détournements croissants de ces dispositifs d'incitation, comme les certificats d'économies d'énergie (C2E) ou MaPrimeRénov', dont nous avons longuement fait état ici lors de l'examen de ce texte. Les Français considèrent que ces dispositifs leur sont d'abord destinés, mais les fraudeurs les voient comme des cibles de choix.

Si nous prétendons restaurer la confiance des Français dans nos finances publiques, nous ne devons pas laisser s'éroder la puissance de l'État en manquant de répondre à ceux qui cherchent à l'affaiblir.

Comme vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, grâce au travail de Tracfin, nous avons, hélas, retrouvé des centaines de millions d'euros d'argent public à l'étranger. Nous avons souvent été en mesure de geler, saisir et ramener ces sommes dans les comptes publics. Nous constatons toutefois à quel point il est crucial d'agir avec efficacité et détermination.

Si ce texte ne résout pas tout, il nous aidera à faire un bon bout de chemin. En cas de suspicion de fraude, nous pourrons notamment suspendre le versement d'une aide publique et renouveler une fois cette mesure en présence d'éléments probants.

Grâce aux outils dont nous disposerons désormais, les indus de RSA obtenus frauduleusement ne pourront plus faire l'objet d'une remise ou d'un effacement de dette.

Les pouvoirs d'enquête et de sanction de la DGCCRF seront accrus, de sorte que nous pourrons mieux détecter les fraudes aux compteurs communicants, les fameux compteurs Linky. Les agents agréés et assermentés des gestionnaires de réseaux de distribution d'électricité et de gaz pourront notamment contrôler et établir des procès-verbaux à distance.

Comme vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur, sur l'initiative du sénateur Verzelen, que je tiens vraiment à remercier, le démarchage téléphonique sera interdit. Les Français en ont assez de se voir proposer l'achat de pompes à chaleur, d'isolants ou de fenêtres à triple vitrage de manière incessante.

Ce texte apporte une garantie supplémentaire en matière de protection du consommateur et de limitation des fraudes liées au démarchage téléphonique, lesquelles frappent, hélas, les Français les plus vulnérables, les plus âgés et, de manière générale, tous ceux qui ne se rendent pas compte que ce harcèlement téléphonique n'est autre que la vitrine d'énormes mécanismes de fraude et de vol.

Les échanges d'informations entre les différentes administrations – les inspections générales des ministères et la Commission de régulation de l'énergie (CRE) –, mais aussi entre Tacfin et le parquet européen sur tout fait susceptible de relever de la compétence de ce dernier, seront également renforcés.

Ces avancées législatives sont le fruit du travail remarquable des équipes, notamment de la douane et de la mission interministérielle de coordination antifraude, la Micaf, qui a pointé les pistes d'amélioration au sein de notre arsenal juridique et administratif.

Je tiens également à vous remercier, madame la sénatrice Goulet, car vous avez permis l'inscription d'une disposition qui peut paraître symbolique, mais que j'estime essentielle. (Mme Nathalie Goulet sourit.) Dans notre droit, le vol en bande organisée est un crime s'il est commis à l'encontre d'autrui, mais un délit s'il est commis à l'encontre de l'État. Je vous remercie donc d'avoir proposé ce rééquilibrage de notre droit, par lequel, dans l'échelle des peines, il ne sera plus considéré qu'il est moins grave de voler l'État que son voisin.

Je tiens enfin à saluer de nouveau la qualité du travail sénatorial et la rapidité de la navette. Mesdames, messieurs les sénateurs, soyez assurés de mon plein soutien et de la grande énergie avec laquelle, une fois ce texte promulgué, je m'assurerai que l'ensemble des décrets d'application soient pris, de sorte que ces dispositions trouvent leur traduction concrète le plus rapidement possible dans la vie des Français comme dans celle des fraudeurs.

M. Olivier Rietmann, rapporteur. Nous y veillerons !

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je me tiendrai bien évidemment à votre disposition pour vous rendre compte de ces avancées. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP et RDSE. – Mme Agnès Canayer et MM. Jean-Jacques Michau et Fabien Gay applaudissent également.)

Mme la présidente. Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement, le Sénat examinant après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques

Article 1er

Le chapitre V du titre Ier du livre Ier du code des relations entre le public et l'administration est complété par un article L. 115-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 115-3. – I. – En l'absence de dispositions spécifiques, en présence d'indices sérieux de manquement délibéré ou de manœuvres frauduleuses en vue d'obtenir ou de tenter d'obtenir indûment l'octroi ou le versement d'une aide publique, les agents désignés et habilités d'une administration ou d'un établissement public industriel et commercial chargés de l'instruction, de l'attribution, de la gestion, du contrôle ou du versement d'aides publiques peuvent procéder à la suspension de l'octroi ou du versement d'une aide publique. La durée de la mesure de suspension ne peut excéder trois mois à compter de sa notification. Lorsque des éléments nouveaux laissant supposer un manquement délibéré ou des manœuvres frauduleuses sont portés à leur connaissance durant cette période, les agents précités peuvent renouveler la mesure de suspension pour la même durée.

« II. – En cas de manquement délibéré ou de manœuvres frauduleuses, les autorités mentionnées au I peuvent rejeter la demande d'une aide publique. Elles peuvent également rejeter le versement d'une aide publique, sous réserve, le cas échéant, du retrait de la décision d'octroi de l'aide dans les conditions prévues aux articles L. 241-2 et L. 242-2.

« III. – Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article. »

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

Article 1er ter

L'article L. 711-4 du code de la consommation est ainsi modifié :

1° Le 3° est complété par les mots : « ou des collectivités territoriales débitrices de prestations et d'aides sociales » ;

2° L'avant-dernier alinéa est complété par les mots : « , soit par une sanction prononcée par le président du conseil départemental dans les conditions prévues à l'article L. 262-52 du code de l'action sociale et des familles ».

Article 2

I. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 561-30-1, il est inséré un article L. 561-30-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 561-30-1-1. – I. – Lorsque les investigations du service mentionné à l'article L. 561-23 mettent en évidence des faits susceptibles de relever de l'une des infractions mentionnées à l'article 22 du règlement (UE) 2017/1939 du 12 octobre 2017 mettant en œuvre une coopération renforcée concernant la création du Parquet européen, ce service saisit le procureur européen délégué par une note d'information. Cette note ne comporte pas la mention de l'origine des informations.

« Dans les affaires ayant fait l'objet d'une note d'information en application du présent article, le procureur européen délégué informe le service de l'engagement d'une procédure judiciaire, du classement sans suite et des décisions prononcées par une juridiction répressive.

« II. – Outre les saisines prévues au I du présent article, le service mentionné à l'article L. 561-23 est autorisé à transmettre des informations au procureur européen délégué, sous réserve qu'elles soient en relation avec les missions de celui-ci. » ;

2° Les troisième à dix-huitième alinéas de l'article L. 561-31 sont remplacés par deux alinéas ainsi rédigés :

« Il peut aussi transmettre des informations à l'administration fiscale, sous réserve que ces informations soient en relation avec les missions de celle-ci.

« Le service peut également transmettre des informations à des administrations, à des autorités, à des organismes, à des établissements publics ou à des personnes chargées d'une mission de service public, dont la liste est fixée par arrêté des ministres chargés de l'économie et du budget, sous réserve que ces informations soient en relation directe avec leurs missions respectives. » ;

3° À l'article L. 775-36, les trente-et-unième et trente-deuxième lignes du tableau sont remplacées par quatre lignes ainsi rédigées :

 

« 

L. 561-30-1

l'ordonnance n° 2016-1635 du 1er décembre 2016

L. 561-30-1-1

Résultant de la loi n° … du … contre toutes les fraudes aux aides publiques

L. 561-30-2

l'ordonnance n° 2016-1635 du 1er décembre 2016

L. 561-31

Résultant de la loi n° … du … contre toutes les fraudes aux aides publiques

 »

 

II. – Le code des relations entre le public et l'administration est ainsi modifié :

1° Le chapitre V du titre Ier du livre Ier est complété par un article L. 115-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 115-2. – I. – En l'absence de dispositions spécifiques, en présence d'indices sérieux de manquement délibéré ou de manœuvres frauduleuses en vue d'obtenir ou de tenter d'obtenir indûment l'octroi ou le versement d'une aide publique, les agents désignés et habilités d'une administration ou d'un établissement public industriel et commercial chargés de l'instruction, de l'attribution, de la gestion, du contrôle ou du versement d'aides publiques ou de la lutte contre la fraude ainsi que les officiers et les agents de police judiciaire et les agents habilités à effectuer des enquêtes judiciaires en application des articles 28-1, 28-1-1 et 28-2 du code de procédure pénale peuvent échanger tous les renseignements ou les documents utiles à la recherche et à la constatation des fraudes ainsi qu'au recouvrement des sommes indûment versées.

« II. – Un décret en Conseil d'État définit les modalités d'application du présent article. » ;

2° La quinzième ligne du tableau du second alinéa des articles L. 552-3, L. 562-3 et L. 572-1 est ainsi rédigée :

 

«

L. 115-1 à L. 115-3

Résultant de la loi n° … du … contre toutes les fraudes aux aides publiques

»

 

III. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa de l'article L. 114-16-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils sont également habilités à recevoir tous les renseignements et les documents utiles à l'accomplissement de leurs missions de délivrance et de contrôle des titres d'identité, des titres de voyage et des titres de séjour lorsque les agents mentionnés à l'article L. 114-16-3 suspectent ou constatent une fraude en matière sociale mentionnée à l'article L. 114-16-2. » ;

2° L'article L. 114-16-3 est complété par un 8° ainsi rédigé :

« 8° Les agents consulaires. »

IV. – Les organismes de qualification des professionnels réalisant des travaux de rénovation énergétique, des audits énergétiques, l'installation et la maintenance des infrastructures de recharge pour les véhicules électriques ou l'installation sur des bâtiments de dispositifs de production d'électricité utilisant l'énergie solaire photovoltaïque, les organismes de contrôle de ces organismes de qualification et les organismes d'instruction des demandes d'agrément et des rapports de contrôle transmettent les informations utiles qu'ils détiennent à l'Agence nationale de l'habitat et au service de l'État chargé de la coordination interministérielle pour la lutte contre la fraude aux finances publiques pour l'exercice de leur mission de répression de la fraude, sous réserve que ces informations soient en relation avec ces missions.

Un décret en Conseil d'État précise les modalités de transmission de ces informations.

V. – Le 2° du I entre en vigueur le premier jour du troisième mois suivant celui de la publication de la présente loi.

Article 2 bis

(Supprimé)

Article 2 ter A

I. – (Supprimé)

II (nouveau). – Après le premier alinéa de l'article L. 114-10-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : « Les constatations et les résultats des contrôles réalisés par les agents mentionnés au premier alinéa du présent article peuvent être rendus opposables à l'occasion des contrôles diligentés pour le compte d'un autre organisme ou des procédures qui sont applicables à celui-ci. »

III (nouveau). – Le 2° du III et le IV de l'article 26 de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025 sont abrogés.

Article 2 ter B

I. – Après l'article L. 81 A du livre des procédures fiscales, il est inséré un article L. 81 B ainsi rédigé :

« Art. L. 81 B. – Lorsque l'administration exerce son droit de communication à l'égard d'une personne physique ou d'une personne morale soumise à l'obligation prévue au premier alinéa de l'article 1649 A du code général des impôts, elle peut lui demander de répondre par voie dématérialisée, selon des modalités et formats déterminés par arrêté du ministre chargé du budget. »

II. – Le paragraphe 2 de la section 3 du chapitre IV du titre II du code des douanes est complété par un article 65 sexies ainsi rédigé :

« Art. 65 sexies. – Lorsque le droit de communication prévu à la présente section est exercé à l'égard d'une personne physique ou d'une personne morale soumise à l'obligation prévue au premier alinéa de l'article 1649 A du code général des impôts, les agents des douanes compétents peuvent lui demander de répondre par voie dématérialisée, selon des modalités et formats déterminés par arrêté du ministre chargé des douanes. »

Article 2 bis
Dossier législatif : proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques
Article 2 ter B

Article 2 ter

Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

1° L'article L. 119 est complété par un III ainsi rédigé :

« III. – L'administration des impôts communique aux agents de l'organisme mentionné au I les informations qu'elle détient en application de l'article 1649 A du code général des impôts et nécessaires à leurs missions d'instruction des demandes d'aides publiques, de paiement des sommes dues à ce titre ainsi que de contrôle et de recouvrement des sommes indûment versées. » ;

2° (Supprimé)

Article 2 quater A

Après l'article L. 116 du livre des procédures fiscales, il est inséré un article L. 116 A ainsi rédigé :

« Art. L. 116 A. – L'administration des impôts communique aux agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes les informations qu'elle détient en application de l'article 1649 A du code général des impôts et nécessaires à leurs missions d'enquête et de contrôle. »

Article 2 quater B

I. – L'article L. 561-36-2 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les inspections des personnes mentionnées aux 8°, 11° et 15° du même article L. 561-2 sont réalisées par les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. » ;

b) (nouveau) Aux troisième et quatrième alinéas, après chaque occurrence du mot : « inspecteurs », sont insérés les mots : « et les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes » ;

2° Le II est ainsi modifié :

a) Au début, les mots : « L'autorité administrative chargée » sont remplacés par les mots : « Les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes chargés » ;

b) Les mots : « au titre V du livre IV du code de commerce » sont remplacés par les mots : « à l'article L. 511-5 du code de la consommation » ;

3° Au VII, les références : « 8°, », « 11°, » et « , 15° » sont supprimées ;

4° Il est ajouté un VIII ainsi rédigé :

« VIII. – Les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes chargés de l'inspection des personnes mentionnées aux 8°, 11° et 15° de l'article L. 561-2 peuvent enjoindre à un professionnel de se conformer à ses obligations dans les conditions prévues à l'article L. 521-1 du code de la consommation, sans préjudice des sanctions qui peuvent être prononcées par la Commission nationale des sanctions. » ;

5° (nouveau) À l'article L. 775-36, la quarantième ligne du tableau est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

 

« 

L. 561-36-2

Résultant de la loi n° … du … contre toutes les fraudes aux aides publiques

 »

L. 561-36-3

L'ordonnance n° 2020-1342 du 4 novembre 2020

 

II (nouveau). – Au deuxième alinéa de l'article 8-2 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, les mots : « L'autorité administrative mentionnée au I de l'article L. 561-36-2 du code monétaire et financier assure » sont remplacés par les mots : « Les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes mentionnés au I de l'article L. 561-36-2 du code monétaire et financier assurent ».

Article 2 quater

I. – Toute personne peut transmettre à l'inspection générale des finances, d'office ou à la demande d'un membre de cette dernière, des documents, des renseignements ou des informations couverts par des secrets légalement protégés s'ils sont nécessaires à l'exercice de ses missions.

II. – Dans le cadre de leurs missions, les membres de l'inspection générale des finances ont accès à tous les renseignements, les documents et les informations détenus par les administrations centrales, les services à compétence nationale et les services déconcentrés soumis à l'autorité des ministres chargés de l'économie et du budget ainsi que par les personnes morales placées sous leur tutelle, sans que puisse être opposé un secret protégé par la loi, si ces renseignements, ces documents ou ces informations sont nécessaires à l'exercice desdites missions.

III. – A. – Dans le cadre de leurs missions de vérification et de contrôle, les membres de l'inspection générale des finances ont accès à tous les renseignements, les documents et les informations relatifs à la gestion des services et des organismes soumis à leur contrôle et nécessaires à l'exercice de leurs attributions. Dans le cadre de l'exercice de ce droit de communication, ne peuvent opposer de secret protégé par la loi :

1° Les agents des entités vérifiées ou contrôlées. Pour les besoins de ces mêmes vérifications et contrôles, les membres de l'inspection générale des finances peuvent exercer le droit de communication que les agents des services financiers tiennent de la loi ;

2° Les agents des entités qui exercent un contrôle, au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, sur les entités vérifiées ou contrôlées ;

3° Les commissaires aux comptes des entités vérifiées ou contrôlées, y compris les commissaires aux apports et les commissaires aux fusions ;

4° Lorsque la vérification ou le contrôle porte sur l'exécution d'une convention de délégation de service public passée par l'entité vérifiée ou contrôlée, les agents de ses cocontractants. Les membres de l'inspection générale des finances ont accès dans les mêmes conditions aux factures, aux livres et aux registres pouvant se rapporter aux opérations prévues par lesdites conventions.

B. – Lorsqu'il n'est pas fait droit à la demande de communication de l'un des documents, renseignements ou informations mentionnés au A du présent III, le chef du service de l'inspection générale des finances peut enjoindre à la personne concernée, après une procédure contradictoire, d'y procéder dans un délai qu'il fixe et qui ne peut être inférieur à soixante-douze heures.

Faute d'exécution dans ce délai, cette même autorité peut prononcer, à l'encontre de la personne soumise à cette obligation de communication, une astreinte dont le montant ne peut excéder 1 000 € par jour et doit être proportionné à la gravité des faits.

Cette astreinte est recouvrée comme les créances de l'État étrangères à l'impôt et au domaine. Elle ne peut être acquittée, sous quelque forme que ce soit, par des financements publics.

IV. – Les documents, les renseignements et les informations dont la révélation ou la divulgation est interdite par les dispositions relatives au secret de la défense nationale, au secret médical, au secret des délibérations judiciaires, au secret de l'enquête ou de l'instruction judiciaires ou au secret professionnel de l'avocat sont exclus du régime de communication défini aux I à III.

V. – L'inspection générale des finances prend toutes dispositions pour garantir le secret de ses investigations. Les travaux de l'inspection générale des finances comportant des informations couvertes par un secret protégé par la loi et obtenues en application des I à III sont soumis à la même protection. L'accès aux données protégées par le secret statistique s'exerce dans les conditions prévues par la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques.

VI. – Le II de la section 2 du chapitre III du titre II de la première partie du livre des procédures fiscales est complété par un article L. 135 ZQ ainsi rédigé :

« Art. L. 135 ZQ. – Dans le cadre de leurs missions, les membres de l'inspection générale des finances ont accès à tous les renseignements, les documents et les informations détenus par l'administration fiscale. »

Article 2 quinquies

I. – Toute personne peut transmettre à l'inspection générale de l'administration, d'office ou à la demande d'un de ses membres, des documents, des renseignements, des informations ou des données personnelles couverts par des secrets légalement protégés s'ils sont nécessaires à l'exercice de ses missions.

II. – Dans le cadre et pour les besoins de leurs missions, les membres de l'inspection générale de l'administration ont accès à tous les renseignements, les documents, les informations et les données personnelles détenus par les administrations centrales et territoriales de l'État et les services à compétence nationale soumis à l'autorité du ministre de l'intérieur, des ministres chargés des collectivités territoriales, de l'outre-mer, de l'immigration, de la fonction publique ainsi que par les personnes publiques qui relèvent de leur tutelle ou de leur contrôle administratif direct.

Les membres de l'inspection générale de l'administration peuvent requérir tout agent public exerçant au sein de l'un de ces services administratifs afin que cet agent leur communique les données personnelles auxquelles la loi et les règlements lui donnent accès.

III. – Pour l'exercice de leurs missions de vérification, de contrôle et de lutte contre la fraude, les membres de l'inspection générale de l'administration ont accès, sur pièces et sur place, à tous les renseignements, les documents, les informations, les livres comptables, les factures, les registres, les archives et les données personnelles nécessaires à l'exercice de leurs attributions et relatifs à la gestion des organismes de droit privé soumis à leur contrôle ou à celui des représentants de l'État dans le département.

Ce droit d'accès et de communication peut être exercé à l'égard des organismes de droit privé ayant conclu avec l'État une convention les associant à l'exécution d'une mission d'intérêt général, bénéficiant d'un label ou d'une reconnaissance publique ou titulaires d'un agrément administratif les habilitant à concourir à l'établissement des documents, titres et autorisations administratifs.

IV. – Dans le cadre de l'exercice du droit d'accès et de communication mentionné aux I à III, les responsables et les agents des entités vérifiées ou contrôlées ne peuvent opposer de secret protégé par la loi, à l'exception des documents, renseignements, informations et données personnelles dont la révélation ou la divulgation est interdite par les dispositions relatives au secret de la défense nationale, au secret médical, au secret fiscal, au secret des délibérations judiciaires ou au secret professionnel de l'avocat.

V. – Lorsqu'il n'est pas satisfait au droit d'accès ou de communication mentionné au III, le chef du service de l'inspection générale de l'administration peut enjoindre à la personne morale concernée ou à son représentant légal, après une procédure contradictoire, d'y procéder dans un délai qu'il fixe et qui ne peut être inférieur à soixante-douze heures.

Faute d'exécution dans ce délai, le chef du service de l'inspection générale de l'administration peut prononcer, à l'encontre de la personne morale soumise à cette obligation de communication, une astreinte dont le montant ne peut excéder 1 000 € par jour et doit être proportionné à la gravité des manquements.

Cette astreinte est recouvrée comme les créances de l'État étrangères à l'impôt et au domaine. Elle ne peut être acquittée, sous quelque forme que ce soit, par des financements publics.

VI. – L'inspection générale de l'administration prend toutes dispositions pour garantir le secret de ses investigations et de ses sources. Les travaux de l'inspection générale de l'administration comportant des informations couvertes par un secret protégé par la loi et obtenues en application des I à III sont soumis à la même protection. Les données à caractère personnel contenues dans les documents et les informations transmis en application du présent article ne peuvent être conservées après la date d'épuisement des voies et délais de recours contre les décisions administratives qui seraient prononcées sur le fondement d'éléments transmis en application du présent article.

Article 2 sexies

I. – Le code pénal est ainsi modifié :

1° L'article 313-2 est ainsi modifié :

a) (nouveau) Au dernier alinéa, le mot : « l'escroquerie » est remplacé par les mots : « les escroqueries prévues aux 1° à 4° bis du présent article » et les mots : « est commise » sont remplacés par les mots : « sont commises » ;

b) Il est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les peines sont portées à quinze ans de réclusion criminelle et 1 000 000 euros d'amende lorsque l'escroquerie prévue au 5° du présent article est commise en bande organisée.

« Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 sont applicables à l'infraction prévue à l'avant-dernier alinéa du présent article. » ;

2° (nouveau) Après le mot : « loi », la fin de l'article 711-1 est ainsi rédigée : « n° … du … contre toutes les fraudes aux aides publiques. »

II. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au 3° bis de l'article 28-1 et au 3° de l'article 28-2, après la référence : « 5° », sont insérés les mots : « et à l'avant-dernier alinéa » ;

2° L'article 706-73-1 est ainsi modifié :

a) Au 1°, le mot : « dernier » est remplacé par le mot : « huitième » ;

b) Après le même 1°, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :

« 1° bis Crime d'escroquerie en bande organisée prévu à l'avant-dernier alinéa de l'article 313-2 du code pénal ; »

3° (nouveau) Le début du premier alinéa de l'article 804 est ainsi rédigé : « Le présent code est applicable, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … contre toutes les fraudes aux aides publiques, en Nouvelle-Calédonie… (le reste sans changement). »

Article 3

I. – (Supprimé)

bis. – La sous-section 1 de la section 5 du chapitre III du titre II du livre Ier du code de commerce est complétée par un article L. 123-38-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 123-38-1. – Le fait, pour une personne mentionnée aux 1° à 3°, 5° ou 6° de l'article L. 123-36, de ne pas être immatriculée au registre national des entreprises est puni d'une amende administrative de 7 500 euros.

« Les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes sont habilités à rechercher et constater, dans les conditions prévues aux articles L. 450-1 à L. 450-7, les infractions et les manquements mentionnés à l'article L. 123-38 et au présent article, et peuvent mettre en œuvre les mesures prévues aux articles L. 470-1 et L. 470-2. »

II. – Le code de la consommation est ainsi modifié :

AA. – Le livre Ier est ainsi modifié :

1° À la première phrase du troisième alinéa de l'article L. 121-11, après le mot : « vendu », sont insérés les mots : « ou au consentement au démarchage téléphonique mentionné au chapitre III du titre II du livre II » ;

2° Après l'article L. 132-14, il est inséré un article L. 132-14-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 132-14-1. – Lorsque l'abus de faiblesse ou d'ignorance est commis dans les conditions mentionnées au 1° de l'article L. 121-9, les peines prévues au premier alinéa de l'article L. 132-14 sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 500 000 € d'amende.

« Le montant de l'amende peut être porté, de manière proportionnée aux avantages tirés du délit, à 10 % du chiffre d'affaires moyen annuel, calculé sur les trois derniers chiffres d'affaires annuels connus à la date des faits. » ;

A. – Le livre II est ainsi modifié :

1° Le titre II est ainsi modifié :

aa) La seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 221-16 est ainsi rédigée : « Si le consommateur s'oppose à la poursuite de la communication, le professionnel met fin sans délai à l'appel et s'abstient de le contacter à nouveau. » ;

ab) Au début de l'intitulé du chapitre III, le mot : « Opposition » est remplacé par le mot : « Consentement » ;

a) L'article L. 223-1 est ainsi modifié :

– les deux premiers alinéas sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Il est interdit de démarcher par téléphone, directement ou par l'intermédiaire d'un tiers agissant pour son compte, un consommateur qui n'a pas exprimé préalablement son consentement à faire l'objet de prospections commerciales par ce moyen.

« Pour l'application du présent article, on entend par consentement toute manifestation de volonté libre, spécifique, éclairée, univoque et révocable par laquelle une personne accepte, par un acte positif clair, que des données à caractère personnel la concernant soient utilisées à des fins de prospection commerciale par voie téléphonique.

« Il appartient au professionnel d'apporter la preuve que le consentement du consommateur a été recueilli dans les conditions prévues au deuxième alinéa.

« L'interdiction prévue au premier alinéa n'est pas applicable lorsque la sollicitation intervient dans le cadre de l'exécution d'un contrat en cours et a un rapport avec l'objet de ce contrat, y compris lorsqu'il s'agit de proposer au consommateur des produits ou des services afférents ou complémentaires à l'objet du contrat en cours ou de nature à améliorer ses performances ou sa qualité. » ;

– au troisième alinéa, après le mot : « objet », sont insérés les mots : « l'offre de prestations de service, », après le mot : « vue », sont insérés les mots : « de leur adaptation au vieillissement ou au handicap ou » et le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « quatrième » ;

– les quatrième à sixième alinéas sont supprimés ;

– après le mot : « téléphonique », la fin du septième alinéa est ainsi rédigée : « peut avoir lieu lorsqu'elle est autorisée en application du présent article. Toutefois, le professionnel peut solliciter le consommateur en dehors des jours et horaires prévus par le décret si le consommateur consent explicitement à être appelé à une date et à un horaire précisément spécifiés et que le professionnel peut en attester. » ;

– au début de la première phrase du huitième alinéa, les mots : « Le professionnel mentionné au quatrième alinéa respecte » sont remplacés par les mots : « Les professionnels respectent » ;

– le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Les modalités d'application du présent article sont précisées par décret en Conseil d'État. » ;

a bis) L'article L. 223-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 223-2. – Lorsqu'un professionnel recueille les données téléphoniques d'un consommateur, il informe celui-ci que toute sollicitation téléphonique effectuée à des fins commerciales, sauf si elle intervient dans le cadre de l'exécution d'un contrat en cours au sens du quatrième alinéa de l'article L. 223-1, suppose son consentement préalable. Lorsque ce recueil de données téléphoniques se fait à l'occasion de la conclusion d'un contrat, le contrat mentionne, de manière claire et compréhensible, qu'il est interdit de démarcher par téléphone un consommateur sans son consentement préalable. » ;

a ter A) Les articles L. 223-3 et L. 223-4 sont abrogés ;

a ter) Au début du premier alinéa de l'article L. 223-5, les mots : « Les interdictions prévues aux articles L. 223-1 et L. 223-3 ne s'appliquent » sont remplacés par les mots : « L'interdiction prévue à l'article L. 223-1 ne s'applique » ;

b) Après le chapitre III, il est inséré un chapitre III bis ainsi rédigé :

« CHAPITRE III BIS

« Autres modes de prospection commerciale

« Art. L. 223-8. – La prospection commerciale de consommateurs par des professionnels par message sur un service de communications interpersonnelles, par courrier électronique ou sur un service de réseaux sociaux en ligne et ayant pour objet l'offre de prestations de services, la vente d'équipements ou la réalisation de travaux pour des logements en vue de la réalisation d'économies d'énergie, de la production d'énergie renouvelable ou de leur adaptation au vieillissement ou au handicap est interdite, sauf si elle intervient dans le cadre de l'exécution d'un contrat en cours au sens du quatrième alinéa de l'article L. 223-1. » ;

b bis) Le second alinéa du 1° de l'article L. 224-27-1 est supprimé ;

c) Le chapitre IV est complété par une section 21 ainsi rédigée :

« Section 21

« Rénovation énergétique des bâtiments

« Art. L. 224-114. – I. – Avant la conclusion d'un contrat ayant pour objet l'offre de prestations de services, la vente d'équipements ou la réalisation de travaux pour des logements en vue de la réalisation d'économies d'énergie ou de la production d'énergie renouvelable et pour lesquels l'octroi d'aides financières est subordonné à la détention d'un label ou d'un signe de qualité, le professionnel indique au consommateur de manière lisible et compréhensible, sur un support durable, s'il détient ou non un tel label ou un tel signe de qualité pour les catégories de travaux concernés. Le cas échéant, le professionnel informe le consommateur, selon les mêmes modalités, des conséquences de la non-détention dudit label ou dudit signe de qualité sur l'obtention des aides financières auxquelles il peut prétendre. Ces informations figurent dans le contrat fourni par le professionnel au consommateur.

« II. – Pour attester le cas échéant qu'il détient un label ou un signe de qualité requis pour l'octroi d'aides financières, le professionnel fournit au consommateur, avant la signature du contrat mentionné au I, un justificatif délivré par un organisme agréé pour délivrer les labels et les signes de qualité mentionnés au même I. Ce justificatif est annexé au contrat fourni par le professionnel au consommateur.

« III. – (Supprimé)

« Art. L. 224-114-1. – I. – Avant la conclusion d'un contrat ayant pour objet l'offre de prestations de services, la vente d'équipements ou la réalisation de travaux pour des logements en vue de la réalisation d'économies d'énergie ou de la production d'énergie renouvelable, le professionnel qui recourt à la sous-traitance pour assurer partiellement ou totalement l'exécution du contrat en informe le consommateur.

« II. – Le professionnel fournit au consommateur l'identité des sous-traitants contribuant à l'exécution du contrat et lui indique si ces sous-traitants détiennent ou non un label ou un signe de qualité requis pour l'octroi d'aides financières pour les catégories de travaux concernés. Le cas échéant, le professionnel informe le consommateur des conséquences de la non-détention par les sous-traitants dudit label ou dudit signe de qualité sur l'obtention des aides financières auxquelles il peut prétendre.

« Pour attester le cas échéant que les sous-traitants contribuant à l'exécution du contrat détiennent un label ou un signe de qualité requis pour l'octroi d'aides financières, le professionnel fournit les justificatifs prévus au II de l'article L. 224-114 pour ces sous-traitants.

« III. – Les informations prévues aux I et II du présent article figurent, de manière lisible et compréhensible, dans le contrat fourni par le professionnel au consommateur. » ;

2° Le chapitre II du titre IV est ainsi modifié :

a) Après la section 3, est insérée une section 3 bis ainsi rédigée :

« Section 3 bis

« Autres modes de prospection commerciale

« Art. L. 242-16-1. – I. – Tout manquement à l'article L. 223-8 est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale. Cette amende est prononcée dans les conditions prévues au chapitre II du titre II du livre V.

« II. – (Supprimé)

« III. – Tout contrat conclu avec un consommateur en violation de l'article L. 223-8 est nul. » ;

b) La section 4 est complétée par une sous-section 18 ainsi rédigée :

« Sous-section 18

« Rénovation énergétique des bâtiments

« Art. L. 242-51. – I. – Tout manquement à l'article L. 224-114 est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 15 000 € pour une personne physique et 75 000 € pour une personne morale.

« Cette amende est prononcée dans les conditions prévues au chapitre II du titre II du livre V.

« II. – Tout contrat conclu avec un consommateur en violation des articles L. 224-114 et L. 224-114-1 est nul. » ;

B. – Le livre V est ainsi modifié :

1° Au 3° de l'article L. 511-5, les mots : « , II et III » sont remplacés par les mots : « à III bis » ;

1° bis La section 1 du chapitre Ier du titre II est complétée par un article L. 521-3-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 521-3-2. – Lorsqu'il est constaté une infraction ou un manquement au présent code par une entreprise titulaire d'un label ou d'un signe de qualité requis pour l'octroi d'aides financières, les agents habilités peuvent lui enjoindre de faire suivre, à ses frais, dans un délai qu'ils fixent, à l'un, au moins, de ses employés, une formation relative au droit de la consommation. » ;

2° Le même chapitre Ier est complété par une section 3 ainsi rédigée :

« Section 3

« Mesures spécifiques relatives au secteur de la rénovation énergétique des bâtiments

« Art. L. 521-28. – I. – À titre conservatoire, l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation peut suspendre, pour une durée de six mois renouvelable une fois, le label ou le signe de qualité délivré à une entreprise et auquel est subordonné l'octroi d'aides financières pour les travaux d'installation ou de pose d'équipements ou pour les travaux portant sur des logements en vue de la réalisation d'économies d'énergie ou de la production d'énergie renouvelable lorsque les agents habilités ont constaté une infraction prévue aux articles L. 132-2, L. 132-11, L. 132-14 ou L. 441-1.

« Lorsque le label ou le signe de qualité délivré à une entreprise a été suspendu pour un des motifs mentionnés au premier alinéa et a été retiré pour le même motif par l'organisme de qualification, l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation peut prononcer l'interdiction pour l'entreprise de demander l'obtention d'un ou de plusieurs signes de qualité ou labels pour une durée maximale de cinq ans. Cette mesure de police administrative peut s'appliquer, pour la même durée, aux personnes physiques dirigeant la personne morale dont le signe de qualité ou le label a été retiré ou à leurs représentants.

« II. – À titre conservatoire, l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation peut suspendre, pour une durée de six mois renouvelable une fois, l'agrément prévu à l'article L. 232-3 du code de l'énergie lorsqu'au moins une des conditions nécessaires pour obtenir cet agrément n'est plus remplie, lorsqu'est constaté un manquement aux règles prévues au titre Ier de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance ou aux dispositions spécifiques applicables à la mission d'accompagnement mentionnée à l'article L. 232-3 du code de l'énergie, ou lorsque les agents habilités ont constaté une infraction prévue aux articles L. 132-2, L. 132-11, L. 132-14 ou L. 441-1 du présent code. L'autorité administrative informe sans délai l'Agence nationale de l'habitat de toute procédure de suspension.

« III. – Les modalités d'application du présent article sont précisées par décret. Le décret précise notamment les conditions dans lesquelles, en cas de décision de suspension du label ou du signe de qualité, prise sur le fondement du I, ou de décision de suspension de l'agrément, prise sur le fondement du II, le ménage conserve le bénéfice de l'aide financière octroyée. »

III. – Les aa à a ter et le b bis du 1° du A du II entrent en vigueur le 11 août 2026.

Article 3 bis AAA

Le code de la consommation est ainsi modifié :

1° La section 3 du chapitre II du titre II du livre Ier est complétée par une sous-section 9 ainsi rédigée :

« Sous-section 9

« Information sur l'existence du service public de la performance énergétique de l'habitat

« Art. L. 122-26. – Tout support de promotion ou de publicité proposant des travaux de rénovation énergétique fait mention de l'existence et du rôle du service public de la performance énergétique de l'habitat défini aux articles L. 232-1 à L. 232-3 du code de l'énergie.

« Les modalités et le contenu de cette information sont précisés par arrêté.

« Les sites internet proposant des travaux de rénovation énergétique comportent un lien de redirection vers le site internet du service public de la performance énergétique de l'habitat.

« Tout manquement au présent article est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 15 000 € pour une personne physique et 75 000 € pour une personne morale. » ;

2° Au 2° de l'article L. 511-6, après les mots : « chapitre Ier », sont insérés les mots : « et la sous-section 9 de la section 3 du chapitre II ».

Article 3 bis AAB

Le code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :

1° Au III de l'article L. 32-3, après le mot : « ligne », sont insérés les mots : « ou de messages textuels » ;

2° Le troisième alinéa de l'article L. 34 est ainsi modifié :

a) (nouveau) Après le mot : « téléphonie », sont insérés les mots : « fixe ou » ;

b) (nouveau) Après la seconde occurrence du mot : « opérateur », sont insérés les mots : « de téléphonie fixe ou ».

Article 3 bis AAC

Le VI de l'article L. 44 du code des postes et des communications électroniques est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'autorité définit une catégorie de numéros consacrés aux appels et messages concourant à un objectif d'intérêt général, notamment en favorisant le pluralisme des courants de pensée et d'opinion ou en contribuant au maintien de l'ordre public économique, pour laquelle l'interdiction prévue au premier alinéa du présent VI ne s'applique pas. Un arrêté des ministres chargés de la consommation et des communications électroniques fixe la liste des organisations pouvant être affectataires d'un numéro de cette catégorie. »

Article 3 bis AAA
Dossier législatif : proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques
Article 3 bis AAC

Article 3 bis AAD

I. – L'article 11 du code de procédure pénale ou les dispositions relatives au secret professionnel ne font pas obstacle à la communication entre les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse et la Commission nationale de l'informatique et des libertés d'informations et de documents détenus ou recueillis dans l'exercice de leurs missions et nécessaires à la recherche et à la constatation des infractions et des manquements définis :

1° (nouveau) À la section 5 du chapitre Ier et au chapitre III du titre II du livre II ainsi qu'aux articles L. 242-12, L. 242-14 et L. 242-16 du code de la consommation ;

2° (nouveau) Aux articles L. 34-5 et L. 44 du code des postes et des communications électroniques.

II. – (Supprimé)

III. – L'article 18 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au deuxième alinéa, le secret professionnel ne fait pas obstacle à la communication à la Commission nationale de l'informatique et des libertés, par les opérateurs mentionnés au 15° de l'article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, de l'identité de la personne physique ou morale affectataire d'un numéro du plan de numérotation ou, par les opérateurs mentionnés aux 1 et 2 du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, de l'identité des responsables de traitement destinataires de leurs services. »

Article 3 bis AA

Le livre V du code de la consommation est ainsi modifié :

1° À l'article L. 511-11, après le mot : « infractions », sont insérés les mots : « et les manquements » ;

2° Au quatrième alinéa de l'article L. 521-1, le mot : « constatée » est remplacé par les mots : « ou le manquement constaté » ;

3° L'article L. 521-2 est ainsi modifié :

a) Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« La mesure de publicité prévue au premier alinéa du présent article peut être assortie d'une astreinte journalière qui ne peut excéder 0,05 % du chiffre d'affaires mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos de la personne morale contrôlée. Si ce chiffre d'affaires n'est pas connu, l'astreinte journalière ne peut excéder 1 500 €. Elle court à compter du jour suivant l'expiration du délai imparti au professionnel pour publier la décision et jusqu'à la date de sa publication effective. » ;

b) Le cinquième alinéa est ainsi rédigé :

« Le montant total des sommes demandées au titre de la liquidation de l'astreinte ne peut excéder 2 % du chiffre d'affaires mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos ou, à défaut de chiffre d'affaires connu, 150 000 €. Si l'injonction est adressée à une personne morale dont les comptes ont été consolidés ou combinés en application des dispositions applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de la personne morale consolidante ou combinante. » ;

c) À l'avant-dernier alinéa, après le mot : « tardive », sont insérés les mots : « , et lors de ses liquidations successives » ;

4° L'article L. 522-6 est ainsi rédigé :

« Art. L. 522-6. – La décision prononcée par l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation peut faire l'objet d'une mesure de publicité dans des conditions prévues par le décret mentionné à l'article L. 522-10.

« Dans ce cas, la personne mise en cause est informée, lors de la procédure contradictoire préalable au prononcé de la sanction, de la nature et des modalités de la publicité envisagée. La publicité est effectuée aux frais de la personne qui fait l'objet de sanction.

« La mesure de publicité prévue au premier alinéa peut être assortie d'une astreinte journalière qui ne peut excéder 0,05 % du chiffre d'affaires mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos de la personne morale contrôlée. Si ce chiffre d'affaires n'est pas connu, l'astreinte journalière ne peut excéder 1 500 €.

« L'astreinte journalière court à compter du jour suivant l'expiration du délai imparti au professionnel pour publier la décision et jusqu'à la date de sa publication effective.

« L'autorité administrative chargée de la concurrence peut procéder à la liquidation de l'astreinte dans les conditions prévues à l'article L. 521-1.

« Le montant total des sommes demandées au titre de la liquidation de l'astreinte ne peut excéder 150 000 €. » ;

5° Au dernier alinéa de l'article L. 522-9-1, après le mot : « alinéa », sont insérés les mots : « ou de non-respect des obligations prévues au troisième alinéa » ;

6° Le 2° de l'article L. 523-1 est ainsi rédigé :

« 2° Les délits prévus par le présent code, qui ne sont pas punis d'une peine d'emprisonnement ou qui sont punis d'une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à trois ans ainsi que pour les infractions prévues aux articles L. 121-2 à L. 121-4. » ;

7° La section unique du chapitre II du titre III est ainsi modifié :

a) La sous-section 1 est ainsi rédigée :

« Sous-section 1

« Injonctions

« Art. L. 532-1. – Le fait de ne pas déférer, dans le délai imparti, à une injonction relative aux infractions ou aux manquements constatés avec les pouvoirs prévus au présent livre, est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 15 000 € pour une personne physique et 75 000 € pour une personne morale.

« Toutefois, ce montant est porté à celui de l'amende encourue pour l'infraction ou le manquement ayant justifié la mesure d'injonction, lorsque ce montant est supérieur à celui mentionné au premier alinéa.

« L'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation prononce l'amende dans les conditions prévues au chapitre II du titre II. » ;

c) Les articles L. 532-2 et L. 532-4 sont abrogés ;

d) Au premier alinéa de l'article L. 532-3, la référence : « L. 521-22 » est remplacée par la référence : « L. 521-24 ».

Article 3 bis AB

Le livre V du code de la consommation est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 512-2, il est inséré un article L. 512-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 512-2-1. – I. – Dans l'exercice de ses fonctions, tout agent de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes peut être autorisé à ne pas être identifié par ses nom et prénom lorsque la révélation de son identité à la personne contrôlée ou à une personne en relation avec celle-ci est susceptible de mettre en danger sa vie ou son intégrité physique ou celles de ses proches.

« L'autorisation, écrite et motivée, est délivrée nominativement par le directeur de l'administration ou du service à compétence nationale dans lequel l'agent est affecté. Copie en est transmise au procureur de la République territorialement compétent.

« L'agent qui bénéficie de cette autorisation est identifié par un numéro d'immatriculation administrative, par sa qualité et par la mention de l'administration ou du service à compétence nationale dans lequel il est affecté.

« Cette possibilité s'applique selon les conditions et dans les actes et les procédures prévues à l'article 15-4 du code de procédure pénale.

« II. – Les juridictions administratives et judiciaires ont accès aux nom et prénom de la personne identifiée par un numéro d'immatriculation administrative dans un acte de procédure.

« III. – Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent article. » ;

2° (Supprimé)

3° L'article L. 512-11 est ainsi rédigé :

« Art. L. 512-11. – Lorsque les documents existent sous forme informatisée, les agents habilités ont accès aux logiciels, aux données stockées et aux algorithmes et peuvent solliciter l'assistance de toute personne afin d'être en mesure de les exploiter.

« Sur demande des agents habilités, les documents leur sont communiqués sur un support informatique et sous une forme permettant le traitement des informations. » ;

4° Au premier alinéa de l'article L. 512-16, les mots : « et de la fourniture de services » sont remplacés par les mots : « , de la fourniture de services et des pratiques commerciales » ;

5° La section 3 du chapitre II du titre Ier est ainsi modifiée :

a) Après l'article L. 512-51, il est inséré un article L. 512-51-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 512-51-1. – Les agents habilités peuvent recourir à toute personne qualifiée dans les conditions prévues à l'article L. 512-17. » ;

b) L'article L. 512-59 est ainsi modifié :

– au deuxième alinéa, après le mot : « habilités, », sont insérés les mots : « la personne qualifiée mentionnée à l'article L. 512-51-1, » ;

– le dernier alinéa est complété par les mots : « , dans les conditions prévues à l'article 56 du code de procédure pénale » ;

c) Après le même article L. 512-59, il est inséré un article L. 512-59-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 512-59-1. – Lorsque des supports de données informatiques ont été placés sous scellés fermés provisoires en application de l'article L. 512-59, les agents habilités peuvent recourir à toute personne qualifiée pour procéder à l'ouverture des scellés en vue de réaliser une ou plusieurs copies de ces données, après avoir procédé aux éventuelles opérations techniques nécessaires à leur mise à disposition dans un format permettant leur exploitation, sans porter atteinte à leur intégrité.

« La personne qualifiée replace sous scellés fermés provisoires les supports de données informatiques examinés et les copies de données en résultant, après en avoir dressé l'inventaire. Elle fait mention des opérations effectuées dans un rapport. Elle y mentionne, le cas échéant, le nom et la qualité des personnes qui l'ont assistée, sous son contrôle et sa responsabilité, pour la réalisation des opérations jugées par elle nécessaires à l'exécution de la mission qui lui a été confiée.

« Sauf si elle est inscrite sur une des listes prévues à l'article 157 du code de procédure pénale ou si elle est membre d'un service ou organisme de police technique et scientifique de la police nationale, de la gendarmerie nationale ou de la sécurité intérieure, la personne qualifiée mentionnée au premier alinéa du présent article prête, par écrit, serment d'apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience. » ;

6° Après l'article L. 531-2, il est inséré un article L. 531-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 531-2-1. – La révélation des nom et prénom du bénéficiaire d'une autorisation délivrée en application de l'article L. 512-2-1 ou de tout élément permettant son identification personnelle ou sa localisation est punie des peines prévues au IV de l'article 15-4 du code de procédure pénale. »

Article 3 bis AC

Le code du travail est ainsi modifié :

1° L'article L. 6351-3 est ainsi modifié :

a) (Supprimé)

b) Après le 3°, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :

« 3° bis L'organisme ne dispose pas de locaux lui permettant de justifier de sa capacité à réaliser les actions mentionnées au 4° de l'article L. 6313-1 ; »

c) (Supprimé)

d) Sont ajoutés des 5°et 6° ainsi rédigés :

« 5° Le dirigeant de droit ou de fait de l'organisme a fait l'objet, dans les quatre ans précédant la demande, d'un procès-verbal constatant l'une des infractions prévues aux articles L. 6355-1 à L. 6355-22 assorti d'une annulation de la déclaration d'activité dans les conditions fixées à l'article L. 6351-4 ;

« 6° Le dirigeant de droit ou de fait de l'organisme a fait l'objet, dans le cadre d'un contrôle de ses dépenses ou de ses activités, en application des articles L. 6361-1 à L. 6361-3, dans les cinq ans précédant la demande, d'une décision de rejet et de versement mentionnée à l'article L. 6362-10 devenue définitive et ne justifie pas du règlement du montant exigible auprès de l'administration chargée du recouvrement dans les conditions prévues à l'article L. 6362-12.

« II. – (Supprimé) » ;

2° Après le 3° de l'article L. 6351-4, il est inséré un 4° ainsi rédigé :

« 4° Soit qu'un organisme chargé de réaliser tout ou partie des actions mentionnées à l'article L. 6313-1 a établi ou utilisé intentionnellement des documents de nature à obtenir indûment l'enregistrement de la déclaration d'activité, le versement d'une aide, le paiement ou la prise en charge de tout ou partie du prix de prestations de formation professionnelle. »

Article 3 bis AD

Le code du travail est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 6351-4, il est inséré un article L. 6351-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 6351-4-1. – L'autorité administrative qui a enregistré la déclaration d'activité peut, au cours du contrôle mentionné à l'article L. 6361-1, en suspendre les effets lorsque les premiers éléments issus du contrôle font apparaître que le présent titre et le titre VI du présent livre ne sont pas respectés ou en cas d'indices sérieux de manœuvres frauduleuses ou de manquement délibéré à ces dispositions.

« La suspension, d'une durée maximale de quatre mois, ne peut intervenir qu'après que le titulaire de la déclaration d'activité a été invité à présenter ses observations.

« Les décisions de suspension sont motivées et indiquent les voies et délais de recours. » ;

2° Le premier alinéa de l'article L. 6362-7-3 est complété par les mots : « et à la suspension de l'enregistrement de la déclaration d'activité dans les conditions prévues à l'article L. 6351-4-1 ».

Article 3 bis A

L'article L. 126-32 du code de la construction et de l'habitation est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Après le mot : « énergétique », la fin de la troisième phrase est ainsi rédigée : « , de l'Agence nationale de l'habitat, des organismes chargés des contrôles des compétences des personnes mentionnées à l'article L. 271-6 du présent code, du ministre chargé de la construction et de l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation, dans le cadre de l'exercice de leurs missions. » ;

b) (Supprimé)

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cadre de la réalisation des diagnostics de performance énergétique, sont mis en place des moyens d'identification des personnes mentionnées à l'article L. 271-6 et de vérification du lieu de leurs interventions. Les modalités d'application du présent alinéa sont précisées par arrêté du ministre chargé de la construction. »

Article 3 bis B

I. – L'article L. 321-2 du code de la construction et de l'habitation est ainsi rédigé :

« Art. L. 321-2. – I. – L'exercice de l'activité de mandataire au profit des bénéficiaires des aides est subordonné à des engagements, notamment de restitution des aides indûment perçues pour le compte du mandant, de déclarations préalables à l'Agence nationale de l'habitat ou relatifs aux conditions d'exercice de l'activité ainsi qu'à des garanties, notamment financières, de compétence, de probité et de moyens appropriés. Le mandataire qui ne satisfait pas aux engagements et aux garanties fixés ne peut se voir désigner auprès de l'agence en cette qualité pour le compte du bénéficiaire des aides. Ces engagements et ces garanties ainsi que leur périmètre sont précisés par décret.

« II. – L'Agence nationale de l'habitat peut prononcer des sanctions à l'encontre des bénéficiaires des aides ou de leur mandataire ainsi que des signataires d'une convention prévue aux articles L. 321-4 ou L. 321-8 ayant contrevenu aux règles ou aux conventions conclues. Elle peut, pour une durée maximale de cinq ans, refuser une nouvelle demande d'aide émanant d'un même bénéficiaire ou d'un mandataire, personne physique ou morale. Pour le mandataire personne morale, cette sanction peut s'appliquer aux présidents et aux dirigeants qui étaient en exercice au moment où le manquement a été réalisé, sans que la durée de cette sanction puisse excéder celle de la sanction de la personne morale concernée.

« III. – L'agence peut également prononcer des sanctions pécuniaires en tenant compte de la gravité des faits reprochés et de la situation financière de la personne physique ou morale intéressée. Pour les personnes physiques, le montant de ces sanctions ne peut excéder la moitié de l'aide accordée ou une somme équivalant à deux ans de loyer. Pour les personnes morales, le montant de ces sanctions ne peut excéder dix fois le montant de l'aide accordée par dossier ou, si cette valeur est inférieure et déterminable, 4 % du dernier chiffre d'affaires hors taxes connu à la date des faits, et 6 % en cas de manquements réitérés.

« La décision infligeant une sanction pécuniaire prononcée à l'encontre d'une personne physique ou morale fait l'objet, compte tenu de la gravité des faits reprochés, en tout ou partie d'une mesure de publicité sur le site internet de l'agence. La publication ne peut intervenir qu'après avoir fait l'objet d'un traitement permettant de rendre impossible l'identification de tiers et après l'expiration des délais de recours administratifs et contentieux. La durée de cette publication ne peut excéder cinq ans. Un décret en Conseil d'État définit les modalités d'application du présent alinéa.

« IV. – Les personnes concernées sont mises en mesure de présenter leurs observations avant le prononcé des sanctions mentionnées aux II et III. »

II. – L'article L. 232-3 du code de l'énergie est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

1° bis (nouveau) À la fin de la deuxième phrase du troisième alinéa, le mot : « article » est remplacé par la mention : « I » ;

2° Après le cinquième alinéa, sont insérés des II et III ainsi rédigés :

« II. – Les opérateurs agréés au sens du présent article informent sans délai les consommateurs avec lesquels ils ont conclu un contrat ou une convention d'accompagnement du retrait ou de la suspension de leur agrément.

« Le contrat ou la convention d'accompagnement peut être résilié, de plein droit et sans frais, par le consommateur cocontractant de l'opérateur lorsque toutes les conditions suivantes sont remplies :

« 1° Un dossier de demande d'aide publique, pour lequel le recours à un opérateur agréé est une condition d'éligibilité au titre du dernier alinéa du I du présent article, a été déposé auprès de l'Agence nationale de l'habitat ;

« 2° L'agrément a été retiré avant le versement du solde de l'aide publique mentionnée au 1° du présent II, dans les conditions prévues au 2° du IV ;

« 3° Le retrait se fonde sur un ou plusieurs manquements de l'opérateur à la réglementation applicable au dispositif d'accompagnement, dans les conditions prévues au même 2°.

« Le contrat est résilié de plein droit à la date de prise d'effet d'un nouveau contrat ou d'une nouvelle convention d'accompagnement avec un opérateur dont l'agrément est valide.

« En cas de résiliation de plein droit, les avances versées par le consommateur cocontractant de l'opérateur sont remboursées dans un délai de trente jours à compter de la date de résiliation, déduction faite des sommes correspondant à l'exécution du contrat jusqu'à cette date.

« Les dispositions du présent II sont d'ordre public. Elles sont précisées par décret en Conseil d'État.

« III. – L'Agence nationale de l'habitat peut prononcer des sanctions à l'encontre des opérateurs agréés ayant contrevenu aux règles qui leur sont applicables. Elle peut refuser toute nouvelle demande d'agrément pour une durée maximale d'un an, et de trois ans en cas de manquements réitérés. Cette sanction peut s'appliquer au président et aux dirigeants qui étaient en exercice à la date du manquement, sans que la durée de cette sanction puisse excéder celle de la sanction de la personne morale concernée. L'agence peut également prononcer des sanctions pécuniaires dont le montant ne peut excéder 4 % du dernier chiffre d'affaires hors taxes connu à la date des faits, et 6 % en cas de manquements réitérés. La décision infligeant une sanction pécuniaire prononcée à l'encontre d'une personne physique ou morale fait l'objet, en tenant compte de la gravité des faits reprochés, en tout ou partie d'une mesure de publicité sur le site internet de l'agence. La publication ne peut intervenir qu'après avoir fait l'objet d'un traitement permettant de rendre impossible l'identification de tiers et après l'expiration des délais de recours administratifs et contentieux. La durée de cette publication ne peut excéder cinq ans. Les opérateurs concernés sont mis en mesure de présenter leurs observations avant le prononcé des sanctions. Un décret en Conseil d'État définit les modalités d'application du présent alinéa. » ;

3° Au début du sixième alinéa, est ajoutée la mention : « IV. – » ;

4° Aux première et dernière phrases du 2° et au 3°, après les mots : « deuxième alinéa », sont insérés les mots : « du I » ;

5° (Supprimé)

6° Au 5°, les mots : « cinquième alinéa », sont remplacés par les mots : « dernier alinéa du I » ;

7° Le 6° et la première phrase du 7° sont complétés par les mots : « dernier alinéa du I », sont complétés par les mots : « du I ».

III. – Le II de l'article 15 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« L'exercice de l'activité de mandataire au profit du bénéficiaire de la prime de transition énergétique est subordonné à des engagements, notamment de restitution des primes indûment perçues pour le compte du mandant, de déclarations préalables à l'Agence nationale de l'habitat ou relatifs aux conditions d'exercice de l'activité ainsi qu'à des garanties, notamment financières, de compétence, de probité et de moyens appropriés. Le mandataire qui ne satisfait pas aux engagements et aux garanties fixés ne peut se voir désigner auprès de l'agence en cette qualité pour le compte d'un bénéficiaire de la prime de transition énergétique. Ces engagements et ces garanties ainsi que leur périmètre sont précisés par décret. » ;

2° Avant la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa, sont insérées quatre phrases ainsi rédigées : « La décision infligeant une sanction pécuniaire prononcée à l'encontre d'une personne physique ou morale fait l'objet, en tenant compte de la gravité des faits reprochés, en tout ou partie d'une mesure de publicité sur le site internet de l'agence. La publication ne peut intervenir qu'après avoir fait l'objet d'un traitement permettant de rendre impossible l'identification de tiers et après l'expiration des délais de recours administratifs et contentieux. La durée de cette publication ne peut excéder cinq ans. Un décret en Conseil d'État définit les modalités d'application du présent alinéa. »

IV. – Le code de la construction et de l'habitation est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa du I de l'article L. 321-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle peut également procéder au contrôle de la qualité des prestations liées à la rénovation ou à l'efficacité énergétique réalisées par des entreprises ayant une certification, une qualification, un label ou un signe de qualité requis par la réglementation. » ;

2° Après l'article L. 321-1-4, il est inséré un article L. 321-1-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 321-1-5. – I. – Lorsqu'elle constate des non-conformités à la réglementation sur le fondement des contrôles effectués au titre de ses missions définies à l'article L. 321-1, l'Agence nationale de l'habitat peut suspendre, pour une durée maximale de six mois renouvelable une fois, le label ou le signe de qualité délivré à une entreprise et auquel est subordonné l'octroi d'aides financières pour les travaux d'installation ou de pose d'équipements, pour les travaux portant sur des logements en vue de la réalisation d'économies d'énergie ou de la production d'énergie renouvelable ou pour la réalisation d'un audit énergétique.

« II. – L'Agence nationale de l'habitat informe sans délai l'organisme ayant délivré le label ou le signe de qualité à l'entreprise, ainsi que l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation, de toute procédure de suspension et signale les non-conformités relevées dans les conditions prévues à l'article L. 221-13 du code de l'énergie.

« III. – Les modalités d'application du présent article sont précisées par décret. Le décret précise notamment les conditions dans lesquelles, en cas de décision de suspension du label ou du signe de qualité de l'entreprise ayant réalisé les travaux, prise sur le fondement du I, le ménage conserve le bénéfice de l'aide financière octroyée. »

Article 3 bis C

(Supprimé)

Article 3 bis D

La section 1 du chapitre II du titre VI du livre III de la sixième partie du code du travail est ainsi modifiée :

1° Le début de l'article L. 6362-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 6362-1. – Les employeurs et les organismes chargés de réaliser tout ou partie des actions mentionnées à l'article L. 6313-1 communiquent … (le reste sans changement) » ;

2° Après l'article L. 6362-1, il est inséré un article L. 6362-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 6362-1-1. – L'administration fiscale, les organismes de sécurité sociale, les services de l'État chargés de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, France compétences, l'Agence de services et de paiement, les services de l'État chargés de la procédure nationale de préinscription mentionnée au I de l'article L. 612-3 du code de l'éducation, les collectivités territoriales, les administrations qui financent des actions de formation, les ministères certificateurs mentionnés à l'article L. 6113-2 du présent code et les membres des missions, placées sous leur autorité, chargées du contrôle pédagogique des formations par apprentissage et les services chargés du contrôle de l'application de la législation du travail et du contrôle de la formation professionnelle peuvent échanger, spontanément ou sur demande, tous documents et informations détenus ou recueillis dans le cadre de leurs missions respectives et utiles à leur exercice.

« Peuvent également participer à cet échange les organismes financeurs mentionnés à l'article L. 6316-1, les organismes certificateurs mentionnés à l'article L. 6113-2, l'instance nationale d'accréditation, les instances de labellisation, les services chargés des missions prévues au I de l'article L. 6111-3 et les organismes mentionnés à l'article L. 6316-2.

« Le secret professionnel ne peut être opposé aux demandes effectuées par les administrations, les établissements publics, les collectivités territoriales et les opérateurs de l'État mentionnés au premier alinéa du présent article.

« Ces échanges d'informations peuvent être conduits sous forme dématérialisée et dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. »

Article 3 bis

L'article L. 271-6 du code de la construction et de l'habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un annuaire rendu public recense les personnes en activité mentionnées au premier alinéa du présent article. Les modalités d'application du présent alinéa sont précisées par arrêté du ministre chargé de la construction. »

Article 3 ter

I. – (Supprimé)

II. – (nouveau)(Supprimé)

II bis. – Le présent article s'applique aux travaux d'amélioration de la performance énergétique de logements bénéficiant des financements suivants :

1° La prime de transition énergétique mentionnée à l'article 15 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 ;

2° Les subventions attribuées au titre de l'article L. 321-1 du code de la construction et de l'habitation pour la rénovation énergétique ;

3° Les avances remboursables ne portant pas intérêt mentionnées à l'article 244 quater U du code général des impôts ;

4° Les prêts avance mutation ne portant pas intérêt mentionnés à l'article 244 quater T du même code ;

5° Les certificats d'économies d'énergie mentionnés à l'article L. 221-1 du code de l'énergie.

II ter. – Dans le cadre d'un contrat de sous-traitance régi par la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, l'entreprise principale qui réalise la facturation détient un signe de qualité dans des conditions définies par décret.

II quater. – Pour les travaux visés au II bis, le recours à la sous-traitance ne peut excéder deux rangs.

II quinquies. – Les II bis et II quater entrent en vigueur le 1er janvier 2026.

III. – Le II ter entre en vigueur le 1er janvier 2027.

Article 3 quater

Lorsque les travaux et dépenses d'amélioration des logements portant sur l'adaptation à la perte d'autonomie sont facturés par une entreprise ayant recours à un contrat de sous-traitance régi par la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, les aides ne peuvent être accordées par l'Agence nationale de l'habitat au titre de l'article L. 321-1 du code de la construction et de l'habitation si la sous-traitance excède un niveau de deux rangs.

Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2026.

Article 4

I. – Le code de l'énergie est ainsi modifié :

1° Le 1° de l'article L. 221-1 est ainsi modifié :

a) Les mots : « ou du fioul domestique » sont remplacés par les mots : « appartenant aux catégories fiscales du code des impositions sur les biens et services ou des produits de la catégorie fiscale des fiouls domestiques mentionnée à l'article L. 312-23, » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Un arrêté du ministre chargé de l'énergie précise les carburants automobiles concernés ; »

1° bis A Après le 2° du même article L. 221-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les seuils mentionnés aux 1° et 2° sont fixés par type d'énergie, de façon à éviter des effets de contournement des obligations d'économies d'énergie par les personnes mentionnées aux mêmes 1° et 2°. » ;

1° bis Le premier alinéa de l'article L. 221-8 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il peut également être pondéré dans l'objectif de maintenir un temps minimal de retour sur investissement ou un reste minimal à la charge des bénéficiaires des économies d'énergie. » ;

2° Après l'article L. 221-9, il est inséré un article L. 221-9-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 221-9-1. – La demande de certificats d'économies d'énergie vaut attestation, par le demandeur, de la conformité des opérations faisant l'objet de cette demande aux obligations déclaratives mentionnées au premier alinéa de l'article L. 222-2. » ;

3° Le premier alinéa de l'article L. 221-10 est complété par quatre phrases ainsi rédigées : « À l'exception des personnes mentionnées aux 1° à 6° du même article L. 221-7, l'ouverture de ce compte est soumise à l'accord préalable du ministre chargé de l'énergie. Les informations à fournir par le demandeur au moment de la demande d'ouverture de compte ainsi que les critères d'évaluation de la demande sont précisés par décret. Ce même décret précise les conditions dans lesquelles une actualisation de ces informations peut être demandée. La conservation du compte au regard de cette actualisation est soumise à l'accord préalable du ministre chargé de l'énergie selon les mêmes critères. » ;

3° bis A (Supprimé)

3° bis Au premier alinéa de l'article L. 221-13, après le mot : « délai », sont insérés les mots : « au ministre chargé de l'énergie et » ;

4° Après l'article L. 222-1, il est inséré un article L. 222-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 222-1-1. – Pour les besoins de la vérification avant la délivrance des certificats, le ministre chargé de l'énergie peut mettre en demeure le demandeur de certificats d'économies d'énergie de lui adresser dans un délai d'un mois, pour chaque opération qu'il désigne, les documents justificatifs de la conformité de l'opération aux obligations déclaratives mentionnées au premier alinéa de l'article L. 222-2. Cette mise en demeure suspend les délais d'instruction de la demande de certificats d'économies d'énergie. » ;

5° L'article L. 222-2 est ainsi modifié :

aa) Au premier alinéa, après le mot : « déclaratives, », sont insérés les mots : « y compris dans les cas prévus aux articles L. 221-9-1 et L. 222-1-1, » ;

a) Le 1° est ainsi modifié :

– le mot : « concerné » est remplacé par les mots : « de l'opération concernée » ;

– le taux : « 4 % » est remplacé par le taux : « 10 % » ;

– le taux : « 6 % » est remplacé par le taux : « 12 % » ;

b) Au 3°, le mot : « concerné » est remplacé par les mots : « de l'opération concernée » ;

c) Après le 5°, il est inséré un 6° ainsi rédigé :

« 6° Prononcer une sanction pécuniaire à l'encontre des personnes ayant acquis des certificats d'économies d'énergie et n'ayant pas mis en place ou ayant mis en place de façon incomplète les dispositifs mentionnés au même article L. 221-8. Le montant de la sanction est proportionné à la gravité du manquement, sans pouvoir excéder le double de la pénalité prévue au premier alinéa de l'article L. 221-4 par kilowattheure d'énergie finale de l'opération concernée par le manquement et sans pouvoir excéder 10 % du chiffre d'affaires hors taxes du dernier exercice clos, ou 12 % en cas de nouveau manquement à la même obligation.

« Les manquements à des obligations déclaratives peuvent être constatés à compter du dépôt de la demande de certificats d'économies d'énergie. Lorsqu'un manquement est constaté avant la délivrance des certificats, les délais d'instruction de la demande peuvent être suspendus par la mise en demeure. La suspension des délais est applicable aux opérations de même nature incluses dans la demande de certificats en cause et, le cas échéant, aux autres demandes en cours d'instruction du même demandeur. La mise en demeure précise les demandes de certificats et les natures d'opérations concernées. » ;

d) Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce décret précise les conditions dans lesquelles les dispositifs mentionnés aux 5° et 6° du présent article sont considérés comme mis en place de façon incomplète. » ;

5° bis L'article L. 222-2-1 est ainsi modifié :

a) Le I est ainsi modifié :

– après la deuxième phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ce choix est soumis à l'accord du ministre chargé de l'énergie. » ;

– au début de la dernière phrase, le mot : « Elles » est remplacé par les mots : « Les vérifications » ;

b) Le 1° du II est ainsi rédigé :

« 1° Ayant donné lieu à la délivrance de certificats d'économies d'énergie au cours des deux années précédant la notification des griefs mentionnée à l'article L. 222-3 ; »

c) Après le même 1°, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :

« 1° bis Ayant fait l'objet d'une demande de certificats d'économies d'énergie non délivrés à la date de la décision du ministre mentionnée au premier alinéa du présent II ; »

d) À la première phrase du deuxième alinéa du IV, les mots : « du 1° » sont remplacés par les mots : « des 1° et 1° bis » ;

6° L'article L. 222-6 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elles mentionnent la nature de l'opération, l'identité de la personne sanctionnée et de ses mandataires ayant participé à la préparation de la demande de certificats d'économies d'énergie concernée par la décision, l'identité des entreprises ayant concouru à la réalisation de l'opération, notamment des entreprises ayant réalisé les travaux ou les audits énergétiques, et, le cas échéant, l'identité de l'organisme ayant réalisé le contrôle avant le dépôt de la demande de certificats d'économies d'énergie. »

II. – Le I de l'article L. 330-2 du code de la route est complété par un 21° ainsi rédigé :

« 21° Aux fonctionnaires et aux agents mentionnés à l'article L. 222-9 du code de l'énergie. »

Article 5

I. – L'article L. 221-9 du code de l'énergie est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le demandeur des certificats d'économies d'énergie est également tenu, pour certaines opérations définies par arrêté du ministre chargé de l'énergie, de réaliser des photographies horodatées et géolocalisées ou des contrôles par vidéo à distance attestant de la réalisation desdites opérations. Ces éléments sont conservés par le demandeur pour une durée minimale de six ans et sont tenus à la disposition des fonctionnaires et des agents mentionnés au même article L. 222-9. Les conditions dans lesquelles ces contrôles sont effectués sont précisées par ce même arrêté. »

II. – (Supprimé)

Article 6

I. – Après l'article L. 512-20 du code de la consommation, il est inséré un article L. 512-20-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 512-20-1. – Les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et les agents de la Commission de régulation de l'énergie peuvent se communiquer spontanément ou sur demande tous les renseignements et documents détenus ou recueillis dans le cadre de leurs missions respectives, sans que les dispositions de l'article 11 du code de procédure pénale ou celles relatives au secret professionnel fassent obstacle à une telle communication. »

II. – Après l'article L. 134-17 du code de l'énergie, il est inséré un article L. 134-17-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 134-17-1. – Les agents de la Commission de régulation de l'énergie et les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes peuvent se communiquer spontanément ou sur demande tous les renseignements et documents détenus ou recueillis dans le cadre de leurs missions respectives, sans que les dispositions de l'article 11 du code de procédure pénale ou celles relatives au secret professionnel fassent obstacle à une telle communication. »

Article 4
Dossier législatif : proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques
Article 6

Article 7

I. – Après l'article L. 512-20-1 du code de la consommation, sont insérés des articles L. 512-20-2 et L. 512-20-3 ainsi rédigés :

« Art. L. 512-20-2. – Pour les besoins de leurs missions de contrôle et d'expertise, les agents de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, les agents de l'Agence nationale de l'habitat et les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes peuvent se communiquer spontanément ou sur demande tous documents et renseignements détenus ou recueillis dans le cadre de leurs missions respectives, sans que les dispositions de l'article 11 du code de procédure pénale ou celles relatives au secret professionnel fassent obstacle à une telle communication.

« Art. L. 512-20-3. – Les agents habilités de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes peuvent communiquer aux organismes délivrant une certification, une qualification, un label ou tout signe de qualité les éléments recueillis à l'occasion de leurs contrôles et susceptibles de constituer des non-conformités manifestes aux règles de certification, de qualification ou de labellisation relevant de ces organismes.

« Les organismes mentionnés au premier alinéa examinent sans délai les éléments transmis et mènent le cas échéant des investigations complémentaires pouvant conduire à la suspension ou au retrait de la certification, de la qualification, du label ou du signe de qualité. »

II. – (Supprimé)

Article 8

Le code de l'énergie est ainsi modifié :

1° Le 7° de l'article L. 322-8 est complété par les mots : « , dont la constatation des destructions, dégradations ou détériorations légères commises sur les dispositifs de comptage dans les conditions fixées à l'article L. 322-11-1 » ;

2° Après l'article L. 322-11, il est inséré un article L. 322-11-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 322-11-1. – I. – Les agents agréés et assermentés du gestionnaire du réseau de distribution d'électricité sont habilités à constater, à distance ou sur place, les destructions, dégradations ou détériorations légères commises sur les dispositifs de comptage mentionnées au 7° de l'article L. 322-8. Ils peuvent intervenir sur place, selon les conditions fixées par le contrat de fourniture d'électricité concerné, pour contrôler ces dispositifs.

« II. – Lorsqu'une destruction, dégradation ou détérioration légère est constatée, les agents mentionnés au I du présent article établissent un procès-verbal et le transmettent à l'utilisateur du dispositif de comptage concerné et au procureur de la République. Ils en informent le fournisseur d'électricité de cet utilisateur.

« Le gestionnaire du réseau de distribution d'électricité peut facturer à l'utilisateur du dispositif de comptage concerné, éventuellement par l'intermédiaire du fournisseur d'électricité, la consommation d'électricité due, corrigée du volume de consommation lié à la destruction, dégradation ou détérioration légère, ainsi que la remise en état de ce dispositif de comptage.

« L'utilisateur du dispositif de comptage concerné peut former un recours auprès du gestionnaire du réseau de distribution d'électricité, du médiateur national de l'énergie ou des autres médiateurs de la consommation, définis aux 6° et 7° de l'article L. 611-1 du code de la consommation, dans le respect des modalités prévues à l'article L. 612-5 du même code, ou un recours juridictionnel.

« III. – Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission de régulation de l'énergie, détermine les modalités d'application du présent article. » ;

3° Le 7° de l'article L. 432-8 est complété par les mots : « , dont la constatation des destructions, dégradations ou détériorations légères commises sur les dispositifs de comptage dans les conditions fixées à l'article L. 432-15-1 » ;

4° Après l'article L. 432-15, il est inséré un article L. 432-15-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 432-15-1. – I. – Les agents agréés et assermentés du gestionnaire du réseau de distribution de gaz naturel sont habilités à constater, à distance ou sur place, les destructions, dégradations ou détériorations légères commises sur les dispositifs de comptage mentionnées au 7° de l'article L. 432-8. Ils peuvent intervenir sur place, selon les conditions fixées par le contrat de fourniture de gaz naturel concerné, pour contrôler ces dispositifs.

« II. – Lorsqu'une destruction, dégradation ou détérioration légère est constatée, les agents mentionnés au I établissent un procès-verbal et le transmettent à l'utilisateur du dispositif de comptage concerné et au procureur de la République. Ils en informent le fournisseur de gaz naturel de cet utilisateur.

« Le gestionnaire du réseau de distribution de gaz naturel peut facturer à l'utilisateur du dispositif de comptage concerné, éventuellement par l'intermédiaire du fournisseur de gaz naturel, la consommation de gaz naturel due, corrigée du volume de consommation lié à la destruction, dégradation ou détérioration légère, ainsi que la remise en état de ce dispositif de comptage.

« L'utilisateur du dispositif de comptage concerné peut former un recours auprès du gestionnaire du réseau de distribution de gaz naturel, du médiateur national de l'énergie ou des autres médiateurs de la consommation, définis aux 6° et 7° de l'article L. 611-1 du code de la consommation, dans le respect des modalités prévues à l'article L. 612-5 du même code, ou un recours juridictionnel.

« III. – Un décret en Conseil d'État pris après avis de la Commission de régulation de l'énergie détermine les modalités d'application du présent article. »

Article 9

Après le 6° de l'article L. 114-12-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un 7° ainsi rédigé :

« 7° Sous réserve d'être individuellement désignés et dûment habilités, dans le cadre de leurs missions, les agents diplomatiques et consulaires dont les fonctions sont énumérées dans la Convention de Vienne de 1963 sur les relations consulaires, ainsi que les agents placés sous leur autorité, chargés dans les postes diplomatiques et consulaires des fonctions de lutte contre la fraude. »

Article 10

La section 2 du chapitre III du titre III du livre III de la sixième partie du code du travail est complétée par un article L. 6333-7-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 6333-7-2. – Lorsqu'il existe, de la part d'un prestataire mentionné à l'article L. 6351-1 référencé sur le service dématérialisé mentionné à l'article L. 6323-9, plusieurs indices sérieux de manœuvres frauduleuses ou de manquement délibéré à ses obligations ou de commission d'infractions au titre du compte personnel de formation, les agents des services et organismes suivants peuvent solliciter de la Caisse des dépôts et consignations, dans le cadre de leurs missions respectives, la suspension conservatoire de tous paiements au titre du compte personnel de formation à l'égard dudit prestataire :

« 1° Les agents chargés des contrôles de la formation professionnelle mentionnés à l'article L. 6361-5 ;

« 2° Les agents de contrôle de l'inspection du travail mentionnés à l'article L. 8112-1 ;

« 3° Les agents de contrôle mentionnés à l'article L. 243-7 du code de la sécurité sociale ;

« 4° Les agents de l'administration fiscale mentionnés à l'article L. 135 ZO du livre des procédures fiscales ;

« 5° Les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes mentionnés à la section 1 du chapitre I du titre Ier du livre V du code de la consommation ;

« 6° Les agents du service mentionné à l'article L. 561-23 du code monétaire et financier ;

« 7° Les officiers, les agents de police judiciaire et les agents habilités à effectuer des enquêtes judiciaires en application des articles 28-1 à 28-2 du code de procédure pénale.

« La suspension des paiements intervient dans les conditions prévues à l'article L. 115-3 du code des relations entre le public et l'administration. »

Article 11

Avant le livre Ier de la huitième partie du code du travail, il est ajouté un article L. 8000-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 8000-1. – Sans préjudice des contrôles exercés en application du présent code ou d'autres dispositions légales ou réglementaires, les organismes qui assurent la mise en œuvre des législations du travail, de l'emploi ou de la formation professionnelle ou qui participent à la mise en œuvre de celle-ci sont soumis, quels que soient leur nature et leur statut juridique, au contrôle de l'inspection générale des affaires sociales pour l'application de ces législations.

« Les personnes morales qui exercent, directement ou indirectement, le contrôle exclusif ou conjoint des organismes mentionnés au premier alinéa ainsi que les autres personnes morales qu'elles contrôlent et qui concourent à la gestion de ces organismes ou leur fournissent des biens et services sont également soumises au contrôle de l'inspection générale des affaires sociales, pour leurs activités en lien avec l'application desdites législations.

« Le contrôle de l'inspection générale des finances s'exerce dans les mêmes conditions quand les organismes mentionnés au même premier alinéa bénéficient de financements mentionnés aux I et II de l'article 43 de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier.

« Le contrôle de l'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche s'exerce dans les mêmes conditions quand les organismes mentionnés au premier alinéa du présent article sont des établissements de formation. »

Mme la présidente. Nous allons maintenant examiner les amendements déposés par le Gouvernement.

Article 2

Mme la présidente. L'amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

À l'alinéa 9, substituer aux mots :

« trente et unième et trente-deuxième »,

les mots :

« trente-troisième et trente-quatrième ».

La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Si vous le voulez bien, je présenterai en même temps l'ensemble des amendements déposés par le Gouvernement, madame la présidente.

Certains de ces amendements sont purement rédactionnels – l'amendement n° 2 vise ainsi à corriger la conjugaison d'un verbe –, d'autres sont des amendements de coordination, notamment sur les outre-mer.

En tout état de cause, les dispositions que je vous propose d'introduire dans le texte ne changent en aucune manière l'accord trouvé en commission mixte paritaire.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Olivier Rietmann, rapporteur. J'émets un avis favorable sur l'ensemble de ces amendements.

Mme la présidente. Le vote est réservé.

Article 2 quater B

Mme la présidente. L'amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Compléter l'alinéa 6 par les mots :

« et le mot : « assure » est remplacé par le mot : « assurent ».

Cet amendement a déjà été défendu, et la commission a émis un avis favorable.

Le vote est réservé.

L'amendement n° 3, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

À l'alinéa 11, substituer au mot :

« quarantième »,

le mot :

« quarante-troisième ».

Cet amendement a déjà été défendu, et la commission a émis un avis favorable.

Le vote est réservé.

Article 2 sexies

Mme la présidente. L'amendement n° 4, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Compléter l'alinéa 7 par les mots :

« , en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna. »

Cet amendement a déjà été défendu, et la commission a émis un avis favorable.

Le vote est réservé.

Article 3 bis B

Mme la présidente. L'amendement n° 5, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

À l'alinéa 24, supprimer les mots :

« sont complétés par les mots : « dernier alinéa du I », ».

Cet amendement a déjà été défendu, et la commission a émis un avis favorable.

Le vote est réservé.

Vote sur l'ensemble

Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.

La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour le groupe Les Républicains.

M. Antoine Lefèvre. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi renforçant la lutte contre toutes les fraudes aux aides publiques, adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale, puis modifiée par la Haute Assemblée le 2 avril dernier, marque une étape décisive dans la protection de nos finances publiques et la préservation de la confiance dans l'action publique.

Je salue le travail du rapporteur, ainsi que celui de l'ensemble de nos collègues, qui ont permis à la commission mixte paritaire de parvenir à un accord, lequel reprend très largement les apports du Sénat, fruit des travaux respectifs des commissions des affaires économiques et des finances.

J'insisterai notamment sur le renforcement de la lutte à la source. Le Sénat a consolidé la possibilité, pour l'administration, de suspendre temporairement le versement d'une aide publique en cas de suspicion de fraude. Cette mesure vise à agir en amont, avant que les fonds ne soient définitivement détournés, et à responsabiliser l'ensemble des acteurs impliqués dans la distribution des aides.

Je soulignerai également la fluidification des échanges d'informations. Le texte élargit et systématise les échanges d'informations entre administrations en levant certains secrets professionnels. Désormais, Tracfin pourra transmettre des informations à l'Agence nationale de l'habitat (Anah) et à la mission interministérielle de coordination antifraude, notamment pour lutter contre la fraude à la rénovation énergétique dans le cadre du dispositif MaPrimeRénov'.

Une clause générale permettra à toutes les administrations concernées d'échanger librement des informations en cas de suspicion de fraude, tout en respectant la protection des données personnelles. Ces dispositifs donnent à l'administration les clefs pour agir efficacement.

Je me félicite également que l'Agence nationale de l'habitat, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et l'Agence de services et de paiement (ASP) puissent accéder au fichier national des comptes bancaires et assimilés (Ficoba). Une telle disposition, qui prend acte des évolutions législatives récentes, contribuera à renforcer l'efficacité des contrôles.

Ce texte encadre par ailleurs le recours à la sous-traitance en cascade pour les travaux de rénovation ouvrant droit à des aides publiques, les objectifs étant de limiter les risques de fraude, en particulier dans le secteur de la rénovation énergétique, et de protéger les bénéficiaires finaux.

Le Sénat a du reste insisté sur la nécessité de responsabiliser tous les acteurs des dispositifs contribuant à la transition énergétique, notamment dans le cadre des certificats d'économies d'énergie (C2E), pour garantir l'exemplarité et l'efficacité de l'action publique.

Je rappellerai enfin que le présent texte intègre un ensemble de dispositifs prévus dans la proposition de loi pour un démarchage téléphonique consenti et une protection renforcée des consommateurs contre les abus, adoptée à l'unanimité par le Sénat. Ces dispositifs, qui ciblent particulièrement les secteurs à risque et instaurent l'obligation d'un consentement préalable, marquent un tournant majeur dans la régulation du démarchage commercial en France.

À compter du 11 août 2026, toute forme de démarchage téléphonique commercial sera interdite, sauf si la personne a explicitement donné son consentement préalable pour être contactée par ce moyen.

Cette règle s'applique à toutes les entreprises, sans exception, y compris pour les travaux de rénovation énergétique ou d'adaptation des logements au vieillissement ou au handicap. L'interdiction concerne non seulement les appels téléphoniques, mais aussi, pour certains secteurs sensibles – rénovation énergétique, adaptation du logement… –, le démarchage électronique par SMS, par courriel et sur les réseaux sociaux.

La commission mixte paritaire a donc conservé les apports du Sénat et retenu l'approche pragmatique et équilibrée préconisée par ce dernier. L'administration disposera désormais d'outils pour détecter et prévenir plus efficacement la fraude, tout en garantissant le respect des droits fondamentaux.

Fruit d'un accord en commission mixte paritaire, ce texte est désormais prêt à entrer en vigueur pour répondre à l'urgence d'une fraude qui menace la justice sociale et la soutenabilité de nos finances publiques. Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains du Sénat votera en faveur de celui-ci. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – MM. Marc Laménie et Henri Cabanel applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky. (MM. Henri Cabanel et Marc Laménie, ainsi que Mme Nathalie Goulet, applaudissent.)

M. Fabien Gay. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, si la lutte contre la fraude aux finances publiques est un combat transpartisan, nous divergeons sur ce que l'on entend par fraude. Comme je l'avais indiqué lors de la première lecture de ce texte, il ne faut pas tout mélanger en mettant sur le même plan les aides publiques et les prestations sociales contributives.

Si ce texte sectoriel marque un timide progrès, il esquive selon nous l'essentiel, à savoir l'offensive nécessaire contre les fraudes structurelles d'un capitalisme oligarchique : optimisation fiscale agressive, évitement social des multinationales, captation indue de fonds publics par des intérêts privés, etc.

L'affaiblissement programmé de la DGCCRF, qui a vu ses effectifs baisser de 25 % depuis 2007, illustre la schizophrénie d'un pouvoir qui durcit les lois tout en asphyxiant les services de contrôle. Comment croire à l'effectivité de cette règle, alors que l'administration chargée de la faire respecter fonctionne de manière contrainte, à effectifs réduits ?

Si nous saluons les avancées de ce texte, n'oublions pas que des réformes d'ampleur seront nécessaires si nous voulons nous attaquer aux fraudes structurelles. Il ne suffit pas, en effet, de criminaliser les petits fraudeurs tout en légalisant l'évitement fiscal via la multiplication des niches et en adoptant un comportement permissif face à l'optimisation. Ce « deux poids, deux mesures » révèle la doctrine de l'État : la rigueur pour les sans-voix, la clémence pour les puissants.

Par ailleurs, en ce qui concerne le volet relatif à la rénovation énergétique, cela fait des années que la fragilité des mécanismes d'aides est dénoncée, eu égard aux fraudes massives qu'ils ont suscitées.

L'interdiction du démarchage téléphonique est en revanche une très bonne disposition. Je salue à ce titre le travail du rapporteur Olivier Rietmann, qui, ne cédant pas d'un pouce, a résisté aux pressions exercées par certains collègues et par des lobbies.

Je salue également le renforcement de la responsabilité des donneurs d'ordre en cas de travaux de rénovation, l'encadrement de la sous-traitance et le renforcement de la transparence en matière de détention d'un label reconnu garant de l'environnement (RGE) ou apparenté. Toutefois, cela ne doit pas nous dispenser d'un débat sur ces dispositifs hybrides, mi-publics, mi-marchands, qui créent les conditions structurelles de la fraude.

MaPrimeRenov' n'est pas un accident : ce dispositif est le résultat d'une politique qui abandonne les biens communs aux appétits privés.

En effet, en confiant la gestion de la rénovation énergétique aux acteurs économiques, la France a fait le choix d'en passer par des mécanismes de marché, permettant ainsi la prolifération d'intermédiaires marchands sans compétences techniques. Résultat, démarchage agressif, abus de confiance, promesses financières irréalistes, sous-traitance massive des chantiers de rénovation, contraintes irréalistes des commanditaires en termes de temps, de coûts et de choix de matériel, etc.

Quant aux certificats d'économies d'énergie, les C2E, qui sont présentés comme un outil de marché au service de la transition écologique, ils fonctionnent en réalité comme une taxe déguisée sur les ménages.

Concrètement, obligés par la loi de financer des travaux d'isolation, les fournisseurs d'énergie répercutent 85 % du coût sur les factures des consommateurs et des consommatrices. Résultat, alors que 6 milliards d'euros sont prélevés annuellement sur le pouvoir d'achat des ménages et des entreprises, seulement 18 % de ces sommes financent des rénovations globales efficaces.

Derrière le vernis technocratique se cache en réalité une privatisation rampante de la transition écologique. Ce mécanisme libéral transforme l'impératif climatique en une marchandise financiarisée. Chaque certificat acheté est en réalité une faveur accordée aux appétits privés, permettant aux multinationales d'externaliser leurs obligations environnementales sur la facture des ménages.

Cette gabegie organisée illustre la tendance à externaliser les politiques publiques vers des acteurs privés motivés par la seule rentabilité immédiate. TotalEnergies et Engie deviennent ainsi les caissiers d'une transition écologique low cost, transformant une obligation régalienne en occasion de greenwashing. La Cour des comptes pointe d'ailleurs ce hold-up institutionnalisé et envisage la suppression de ce dispositif.

En conclusion, nous voterons ce texte, qui constitue une modeste avancée, mais nous considérons que le chemin est encore long et que, à l'heure où le Gouvernement cherche à imposer un nouveau coup de rabot budgétaire de 40 milliards d'euros, il nous faut redoubler d'efforts en matière de fraude aux finances publiques. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et RDSE – M. Marc Laménie applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Fouassin, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP et RDSE.)

M. Stéphane Fouassin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous arrivons aujourd'hui au terme du processus d'élaboration de ce texte important qui vise à renforcer la lutte contre la fraude aux aides publiques.

Je me réjouis que la version issue de la commission mixte paritaire soit fidèle à l'équilibre que nous avions trouvé au Sénat. Cela atteste une fois de plus du sérieux de notre chambre et de sa capacité à bâtir et à ajuster des textes solides, à la hauteur des enjeux.

Je tiens à remercier les rapporteurs et l'ensemble des collègues qui ont œuvré aux conclusions de cette commission mixte paritaire. En trouvant un accord, ils ont contribué à faire progresser les choses.

Loin d'un simple désordre technique, la fraude est une fracture morale. C'est une attaque directe contre la solidarité nationale, contre la confiance des citoyens, contre notre capacité collective à protéger les plus fragiles et à soutenir les transitions sociales nécessaires. Dans un contexte de tension budgétaire, où chaque euro compte, lutter contre la fraude, c'est faire preuve de justice, mais aussi de responsabilité.

Disons-le franchement : lorsque l'on demande des efforts aux Français, il est légitime qu'ils exigent en retour que l'État fasse respecter les règles.

Je tiens toutefois à rappeler que la mobilisation contre la fraude ne date pas d'hier. En 2023, un plan de lutte contre les fraudes prévoyait le renforcement des moyens consacrés à celle-ci d'ici à 2027. Les premiers résultats montrent l'efficacité de ce plan.

Cette même année 2023, les mises en recouvrement de fraudes fiscales ont atteint un record historique de 15,2 milliards d'euros, le nombre de contrôles fiscaux sur les particuliers aux plus hauts revenus a augmenté de 25 % et le montant des redressements liés à la fraude sociale a crû de 50 %, l'Urssaf ayant redressé 1,2 milliard d'euros en 2023, contre 800 millions d'euros en 2022.

Enfin, avec près de 400 millions d'euros détectés par les caisses d'allocations familiales, 200 millions d'euros détectés par l'assurance vieillesse et 450 millions d'euros détectés par l'assurance maladie, les fraudes aux prestations sociales ont, elles aussi, atteint des montants records en 2023.

Mme Nathalie Goulet. Quand on cherche, on trouve ! (Sourires.)

M. Stéphane Fouassin. Grâce aux travaux menés par nos deux assemblées, les conclusions de la commission mixte paritaire s'inscrivent pleinement dans la continuité des efforts déjà entrepris.

En dotant notre administration de moyens d'action plus efficaces, ce texte permet toutefois une avancée décisive. Il renforce notre capacité à détecter les fraudes en amont et à intervenir plus rapidement, plus fermement, mais aussi de manière plus juste. Il alourdit les sanctions à l'encontre des entreprises fraudeuses. Il encadre strictement le recours à la sous-traitance lorsque celle-ci nuit à la traçabilité des fonds publics. Surtout, il interdit sous condition des pratiques devenues intolérables pour nos concitoyens, telles que le démarchage téléphonique.

En clair, ce texte nous dote de nouveaux outils. Il clarifie les règles et il affirme un principe simple : l'argent public doit être protégé avec rigueur, utilisé avec responsabilité et contrôlé avec exigence.

Mieux lutter contre la fraude aux aides publiques, c'est protéger la légitimité de l'action publique, car, à chaque fraude révélée, ce sont des dispositifs entiers qui sont fragilisés et, avec eux, tout le tissu économique et social de notre pays, mes chers collègues. Le groupe RDPI espère donc que, comme en première lecture, ce texte sera adopté à l'unanimité.

Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Henri Cabanel. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd'hui s'en tire avec les honneurs du jury, ce qui n'était pas acquis.

Souvenons-nous : avec ses quatre articles, la version initiale de la proposition de loi du député Thomas Cazenave était loin d'être à la hauteur de son intitulé ; nous étions du reste nombreux à douter de sa portée réelle. Le Parlement, en particulier le Sénat, a œuvré à empêcher que ce texte ne soit qu'un énième coup de com' politique. L'enjeu était trop important.

Un enjeu budgétaire tout d'abord, car, grâce à ce texte, l'État pourrait récupérer jusqu'à 1,6 milliard d'euros par an de recettes supplémentaires.

Un enjeu économique ensuite, car l'argent public volé est autant d'argent public en moins pour investir dans notre croissance et nos services publics.

Un enjeu sociétal enfin, car la fraude est un coup de canif porté à notre pacte fiscal et démocratique, entretenant un sentiment d'injustice fiscale chez nombre de nos concitoyens.

Par ce texte, nous apportons une réponse sur trois volets.

Premièrement, nous octroyons davantage de moyens légaux à nos administrations pour mieux prévenir et détecter les fraudes aux aides publiques, à la rénovation et aux aides sociales.

Deuxièmement, nous renforçons la sévérité des sanctions à l'égard des fraudeurs.

Troisièmement, nous portons un coup décisif au harcèlement téléphonique qui exaspère aujourd'hui neuf Français sur dix.

Avec la rédaction que nous nous apprêtons à adopter, dans laquelle près de 80 % des mesures introduites par notre assemblée sur l'initiative de notre collègue Pierre-Jean Verzelen ont été conservées – notre rapporteur Olivier Rietmann, dont je salue le travail, l'a rappelé –, nous faisons un choix clair : punir plus sévèrement les voleurs et combattre plus activement la fraude organisée. Surtout, nous faisons le choix de soutenir le savoir-faire et le travail de nos artisans du bâtiment et de la rénovation, dont l'image est abîmée par les arnaques en tout genre.

Mes chers collègues, l'adoption de ce texte envoie aux Françaises et aux Français un message clair quant à notre volonté de nous attaquer plus fortement aux fraudes. Le groupe RDSE le votera donc à l'unanimité.

Il constitue toutefois non pas la réponse ultime, ainsi que son intitulé le laissait entendre, mais seulement un premier pas. Le chemin est encore long. Ce texte ne s'attaque en effet qu'à une partie des montants fraudés – entre 1 % et 5 % –, la somme totale de ces derniers étant estimée par la Cour des comptes entre 30 et 100 milliards d'euros par an.

Face à l'urgence budgétaire qui doit nous conduire à consentir plus de 100 milliards d'économies d'ici à 2029, notre mobilisation ne doit pas fléchir. Ces dernières années, le Parlement a beaucoup légiféré pour améliorer l'efficacité de l'action des administrations. Il est toutefois clair que, sans moyens adéquats, nulle action ne peut être efficace, madame la ministre.

Or les signaux sont aujourd'hui inquiétants. La direction générale des finances publiques (DGFiP) compte par exemple bien moins d'agents qu'auparavant. En dix ans, le nombre d'agents chargés du contrôle fiscal a diminué de 2 400. En supprimant plus de 500 équivalents temps plein (ETP), la loi de finances pour 2025 confirme cette dynamique.

Tracfin a pour sa part perdu un cinquième de son budget par rapport à 2024, alors que son activité ne cesse de s'intensifier.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Non, Tracfin a un million d'euros en plus !

M. Henri Cabanel. Le recours à la technologie et à l'intelligence artificielle ne suffira pas, à lui seul, à renforcer notre force de frappe contre la fraude. En 2022, alors que plus de la moitié des contrôles ont été déclenchés grâce à l'usage de ces techniques, les sommes recouvrées par ce biais ne se sont élevées qu'à 14 % du montant total. Ce n'est pas assez.

Pour lutter efficacement contre la fraude, le groupe RDSE estime qu'il faut clarifier les principes et les moyens mobilisés par les administrations fiscale et sociale en matière de fraude. À l'occasion de l'adoption de la présente proposition de loi, il vous appelle donc, madame la ministre, à prouver que les moyens engagés sont cohérents avec les objectifs affichés par votre ministère pour 2029. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et RDPI, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour le groupe Union Centriste.

Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ayant passé la journée avec les Frères musulmans, il me faut effectuer un véritable reset pour aborder maintenant la fraude aux aides publiques ! (Sourires.)

La fraude aux finances publiques n'est pas une fraude sans victime. C'est un crime social, économique et démocratique. Mon groupe votera donc bien évidemment le texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Alors que nous attendons le grand soir de la lutte contre la fraude, il s'agit toutefois d'un texte modeste, madame la ministre.

Certes, la suspension de l'octroi et du versement des aides publiques en cas de suspicion de fraude ou de rejet d'une demande d'aide est une bonne chose. Mais notre demande de renforcement des pouvoirs des greffes a, elle, été déclarée irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution. Il faudra revenir sur ce sujet, ainsi que sur les entreprises éphémères.

Lors des travaux de la commission d'enquête sur la lutte contre la délinquance financière et la criminalité organisée que j'ai l'honneur de rapporter et devant laquelle vous serez auditionnée dans quelques instants, madame la ministre, nous avons appris avec effarement que les entreprises n'avaient pas à déclarer les comptes bancaires qu'elles détiennent à l'étranger – les auditions étant publiques, je ne dévoile là aucun secret d'alcôve !

Autrement dit, les dispositions qui s'appliquent aux personnes physiques ne s'appliquent pas aux entreprises, ce qui rend la fraude d'autant plus facile. C'est une aberration ! Il n'y a donc nul besoin d'aller chercher très loin des éléments tangibles d'amélioration : faire obligation aux entreprises de déclarer leurs comptes à l'étranger faciliterait grandement les contrôles, et ce serait le minimum minimorum ! Nous préconiserons bien évidemment l'instauration de cette obligation dans notre rapport.

Les extensions des autorisations d'échange d'informations entre les administrations sont également une bonne chose – nous avons entendu la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) à plusieurs reprises sur ce sujet.

Je tiens toutefois à revenir sur les 6 milliards d'euros d'erreurs de versement de la CAF, sur lesquels mon collègue Guislain Cambier vous a posé une question d'actualité, madame la ministre.

Quelle entreprise privée, dans n'importe quel pays, accepterait-elle qu'un dirigeant commette trois années d'affilée des erreurs dont le montant total varie de 3 à 6 milliards d'euros ? De telles erreurs sont d'autant plus inacceptables qu'elles sont itératives, qu'elles soient dues au non-recours ou à des fraudes. Car, chaque année, c'est la même musique : le rapport de la Cour des comptes révèle le montant de ces erreurs dans l'indifférence générale, car cela n'intéresse personne.

En matière de lutte contre la fraude aux travaux énergétiques, le texte comporte des avancées certaines. J'estime que le problème sera donc réglé.

Dans le temps qu'il me reste, madame la ministre, je souhaite vous proposer un plan d'action avant le projet de loi de finances, qui sera notre grand rendez-vous – du moins pour ceux d'entre nous qui seront encore là. (Sourires.)

J'estime en effet que nous ne pourrons faire l'économie ni d'une amélioration de l'orange budgétaire relatif à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales ni des préconisations, peut-être différentes, qui émaneront, d'une part, de la commission d'enquête créée à la demande du groupe Union Centriste que j'évoquais à l'instant, et, d'autre part, de la commission d'enquête sur l'utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants qui a été créée sur l'initiative du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Si ces préconisations donnent lieu au dépôt de propositions de loi avant l'examen du prochain projet de loi de finances, il faudra que nous les examinions rapidement, madame la ministre. Notre situation budgétaire nous interdit en effet toute paralysie : il nous faut travailler ensemble, dès maintenant, à l'amélioration des dispositifs de lutte contre la fraude.

Madame la ministre, je vous demande également de veiller à une application tout à fait rigoureuse des dispositifs de lutte contre la fraude à l'arbitrage des dividendes. Au regard des dispositions que nous avons votées, le texte paru au Bulletin officiel des finances publiques (Bofip) paraît en effet quelque peu réducteur. J'espère qu'il ne s'agit que d'une impression et que, en réalité, ce texte est parfaitement conforme à l'intention du législateur.

En conclusion, un petit texte contre la fraude valant mieux qu'aucun texte du tout, le groupe Union Centriste votera sans enthousiasme cette modeste proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, RDSE et CRCE-K.)

Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

M. Grégory Blanc. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il me paraît bon de rappeler une nouvelle fois que, au vu du contenu de ce texte, son titre, à savoir « proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques », est manifestement trompeur, ce qui est fâcheux.

En effet, il n'y a rien sur la fraude fiscale des grandes entreprises, le montant de celle-ci étant pourtant estimé à 80, voire à 100 milliards d'euros ; rien sur la fraude à la TVA, dont le montant est évalué à au moins 10 milliards d'euros, ni sur les abus dont certaines niches font l'objet, ce que vous avez vous-même souligné à plusieurs reprises, madame la ministre ; rien sur les montages agressifs, les abus ni sur les entreprises éphémères que Nathalie Goulet évoquait à l'instant ; rien non plus sur les pratiques douteuses de certaines multinationales.

C'est donc une proposition de loi non pas contre toutes les fraudes, mais contre quelques-unes d'entre elles seulement qui nous est soumise.

Agir sur quelques-unes des fraudes constitue bien évidemment un petit pas utile. Je regrette toutefois ce décalage entre l'affichage et le contenu qui, selon nous, nuit à la crédibilité de la démarche.

Mon explication de vote reposera sur trois constats. À l'issue de son examen par le Sénat en séance publique, nous avions voté contre ce texte, car, en dépit d'évolutions positives, trois lignes rouges avaient été franchies : l'élargissement des rangs de sous-traitance, l'accès de l'inspection générale de l'administration (IGA) à des données personnelles couvertes par le secret et l'habilitation du préfet à suspendre ou à refuser des droits de manière discrétionnaire. Je reviendrai rapidement sur chacun de ces points.

Premièrement, en actant le passage de deux à trois rangs de sous-traitance et en effaçant tout lien clair de responsabilité entre l'entreprise qui réalise le devis des travaux et celle qui émet la facture, le Sénat avait vidé de sa substance le contenu initial de la proposition de loi. Les fédérations du bâtiment, ne s'y trompant pas, étaient d'ailleurs fortement montées au créneau. La commission mixte paritaire a réaffirmé l'impossibilité de dépasser deux rangs de sous-traitance, corrigeant les excès du texte issu du Sénat.

Elle a aussi amélioré certaines mesures relatives à la lutte contre le démarchage téléphonique. Ces corrections, qui correspondent aux dispositions que nous défendions au Sénat, constituent pour nous une bonne nouvelle.

Deuxièmement, la transmission à l'inspection générale de l'administration de renseignements, d'informations ou de données personnelles couverts par des secrets légalement protégés nous paraît exorbitante au regard de la protection des droits. Ce point nous pose problème.

Troisièmement, et ce sujet est bien plus gênant, notre groupe ne peut accepter les moyens que le texte accorde au préfet. Soyons très clairs : toutes les fraudes, y compris les fraudes sociales, doivent être combattues. Toutefois, l'article 2 habilite le préfet à suspendre ou à refuser des droits sur la base d'une simple suspicion de fraude, sans décision judiciaire préalable ni garde-fou.

À nos yeux, il y a là une dérive dangereuse. Ce contournement du droit fait peser le risque d'illégalité sur des personnes pourtant en règle. Voilà qui ouvre la porte à l'arbitraire, au soupçon généralisé, à la stigmatisation.

Notre État de droit est un bien extrêmement précieux que certains veulent aujourd'hui mettre à bas. Nous ne pouvons tolérer que des décisions aussi lourdes soient prises sans preuve tangible, ni débat contradictoire, ni avis du juge.

Cette mesure revient à ouvrir la voie à ce que, sous l'effet de possibles excès de zèle, des préfets utilisent le levier de la fraude sociale à des fins de politique migratoire.

Agir contre la fraude sociale, oui ; mettre en œuvre des politiques migratoires, pourquoi pas, même si celles qui sont actuellement conduites n'emportent évidemment pas notre assentiment.

Nous considérons que les politiques sociales sont faites pour que chacun, même en situation difficile, demeure dans la dignité. Si des politiques migratoires faites de coups de menton prennent le pas sur les politiques sociales, il y a une inversion de l'ordre des choses. À nos yeux, il faut un équilibre : nous sommes favorables à la lutte contre la fraude, mais la proposition de loi, dans sa version finale, ne préserve aucun garde-fou, ce que nous ne pouvons cautionner.

En conséquence, notre groupe s'abstiendra lors du vote des conclusions de la commission mixte paritaire.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

M. Jean-Jacques Michau. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons les conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques, qui s'est réunie le 6 mai dernier.

Ce texte, initialement composé de quatre articles, en comporte désormais trente-sept. Une telle manière de légiférer, par propositions de loi « gonflées » lors de leur examen en commission et en séance publique, n'est guère satisfaisante.

Sans étude d'impact ni avis du Conseil d'État, nous ne disposons pas d'une pleine capacité d'expertise. Celle-ci nous fait particulièrement défaut au moment d'examiner des amendements du Gouvernement.

Je suis bien évidemment favorable aux dispositions qui visent à lutter plus efficacement contre les fraudes aux aides publiques, mais légiférer dans l'urgence au moyen d'une proposition de loi téléguidée par le Gouvernement n'est pas la meilleure façon de procéder.

Autre regret, ce texte ne s'attaque pas à la fraude fiscale, qui coûte entre 80 milliards et 100 milliards d'euros par an, ni à la fraude aux cotisations sociales, qui représente entre 5 milliards et 7 milliards d'euros, ni à la fraude aux prestations sociales, estimée à 3 milliards d'euros.

Le groupe des sénateurs socialistes a toujours été favorable à la protection du consommateur et à la lutte contre la fraude aux aides publiques. C'est un impératif pour renforcer l'acceptation de l'impôt chez nos concitoyens.

Je suis aussi très favorable aux dispositions interdisant le démarchage téléphonique, sauf si le consommateur donne son consentement, tant nos compatriotes ne supportent plus les sollicitations permanentes dont ils sont assaillis. Je salue l'apport décisif du Sénat sur ce sujet. La date du 11 août 2026 me semble laisser un délai réaliste pour permettre aux entreprises de s'adapter à cette nouvelle législation.

Je suis également favorable aux dispositions permettant de mieux lutter contre la fraude aux travaux de rénovation énergétique et d'adaptation à la perte d'autonomie. En ce qui concerne la limitation du nombre de rangs de sous-traitance dans les chantiers aidés pour la rénovation énergétique ou l'adaptation des logements au handicap, le compromis trouvé me semble correct.

Les grandes enseignes ne pourront être donneuses d'ordre que si elles sont titulaires d'un label RGE ou équivalent. En effet, les sénateurs du groupe socialiste ont veillé à préserver le réseau des petites entreprises et des artisans locaux, gage de qualité et acteur précieux du développement économique des territoires.

Le renforcement de la lutte contre la fraude aux certificats d'économies d'énergie est un axe fort de cette proposition de loi. Le texte sécurise l'action du Pôle national des certificats d'économies d'énergie lors de ses contrôles, facilite la détection de fraudes lors de l'instruction des demandes et renforce la sanction que le Pôle peut prononcer.

Selon une récente enquête de l'UFC-Que Choisir, il est très difficile pour les consommateurs d'obtenir les C2E. Cette enquête, qui traite plus largement des dispositifs d'aide à la rénovation énergétique, souligne que l'accès aux aides reste trop complexe et peu efficace pour nos concitoyens. Il s'agit là de données que nous ne pouvons ignorer.

Nous sommes favorables au renforcement du partage d'informations entre la DGCCRF et la Commission de régulation de l'énergie (CRE) afin de mieux lutter contre la recrudescence de la fraude dans ce secteur.

De même, nous approuvons les mesures qui renforcent les échanges de données entre la DGCCRF, l'Ademe, l'Anah, les organismes de qualification et le ministère de la justice.

Je salue la volonté de conforter les missions des fonctionnaires de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, mais il faut renforcer les moyens humains. Nous avions déposé un amendement en ce sens, que nous avons retiré à la suite des engagements de Mme la ministre. Nous serons attentifs à leur concrétisation.

J'approuve les dispositions relatives aux contrôles à distance des compteurs communicants. Il est important de lutter contre leur destruction et leur dégradation. Ces dispositions sont très attendues par Enedis, Gaz réseau distribution France (GRDF), la CRE et le médiateur national de l'énergie.

Notre groupe votera en faveur des conclusions de cette commission mixte paritaire, la lutte contre la fraude aux aides publiques étant un impératif pour consolider notre État de droit. Toutefois, je suis convaincu que ce texte n'épuise pas le sujet… (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Nous n'avons jamais prétendu le contraire !

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Excellent !

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

M. Pierre-Jean Verzelen. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la fraude, qu'elle soit fiscale, sociale ou aux aides publiques, constitue une atteinte directe aux comptes de l'État et affecte ses capacités d'action.

Notre pays connaît un niveau très élevé de prélèvements obligatoires. Certains pensent qu'il en faut encore plus ; d'autres, et c'est plutôt mon cas, que c'est bien assez. Mais nous sommes tous d'accord pour dire que les détournements de fonds opérés par les fraudeurs développent un sentiment d'injustice auquel nous devons répondre.

Le texte issu des débats en commission mixte paritaire s'attaque particulièrement aux fraudes dans les domaines de la rénovation et de l'efficacité énergétique. La version finale de cette proposition de loi vient utilement lutter contre la fraude aux aides publiques en renforçant notre arsenal législatif. Le texte permettra notamment de suspendre l'instruction d'une aide publique en cas de suspicion ou de renforcer les sanctions à l'encontre des fraudeurs.

J'en viens au sujet du démarchage téléphonique. Sans chercher à refaire une fois de plus l'histoire, je tiens à remercier Olivia Richard, rapporteure de la proposition de loi pour un démarchage téléphonique consenti et une protection renforcée des consommateurs contre les abus, que le Sénat avait adoptée en novembre dernier.

Je salue également l'action de notre collègue Olivier Rietmann : sans son implication, sa détermination, son savoir-faire politique et sa capacité à convaincre, en séance publique comme en commission mixte paritaire, nous ne nous prononcerions pas ce soir sur la même version du texte. (M. Antoine Lefèvre marque son approbation.)

Cette rédaction est la plus aboutie que nous pouvions espérer. La proposition de loi pourrait considérablement endiguer le démarchage téléphonique en ce qu'elle tend, contrairement à toutes les mesures votées jusqu'ici, à changer le cadre, à inverser les choses.

À l'heure où nous parlons, chacun d'entre nous est considéré comme consentant à être appelé dans le cadre d'une démarche commerciale. Quand le texte s'appliquera, aucun Français n'aura plus le droit d'être contacté sauf s'il a expressément donné son accord. Aujourd'hui, c'est l'entreprise qui peut démarcher le consommateur ; demain, c'est le consommateur qui démarchera l'entreprise.

Élément essentiel, cette loi ne comporte aucune dérogation pour aucun secteur d'activité. Nous le savons, pour qu'une loi soit comprise, pour qu'elle ait une chance d'être efficace, elle doit être simple, claire et précise. C'est le cas.

La date d'entrée en vigueur du texte, en août 2026, paraît lointaine. Comme beaucoup, j'aurais préféré une application dès janvier prochain, mais l'État est tenu par son contrat avec Bloctel. Ce délai permettra aux entreprises concernées de s'adapter et au Gouvernement de prendre les décrets nécessaires pour que nos concitoyens voient la différence dès la mise en application de la loi.

Sur un plan législatif – je le dis humblement, car ce texte est le fruit du travail des rapporteurs et de tous les parlementaires –, il me semble difficile de faire mieux ou d'aller plus loin. Au Gouvernement désormais de prouver sa volonté politique sur ce sujet qui fait consensus. Si l'on s'en donne les moyens, cette proposition de loi permettra d'obtenir des résultats. Les élus du groupe Les Indépendants – République et Territoires voteront ce texte.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite vous apporter quelques précisions.

Monsieur le sénateur Cabanel, je vous le confirme, le budget de Tracfin a bien augmenté de 1 million d'euros entre 2024 et 2025. Sinon, le Gouvernement ne serait pas cohérent et ne tiendrait que des propos d'estrade sans se donner les moyens d'agir. Le budget de Tracfin est bien en hausse.

M. Henri Cabanel. Vous avez raison, madame la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Monsieur le sénateur Grégory Blanc, les inspections générales des ministères ne font que ce qui est permis dans des cadres juridiques préétablis, dont nous n'avons pas changé la nature. Elles peuvent mener des enquêtes pour contrôler des organisations ou des réseaux ou pour alimenter notre propre compréhension des mécanismes.

Laisser penser que nous aurions mis à mal le cadre de protection des données personnelles au travers de ce texte me semble dangereux. N'inquiétons pas les Français en leur faisant croire qu'une inspection générale ministérielle remettrait en question la protection de leur vie privée.

Vous avez aussi évoqué une forme de doute ou de crainte à l'égard de l'article 2 : les préfets pourraient, au prétexte de politiques migratoires, mettre fin à certaines aides sociales. Permettez-moi de rappeler clairement ce dont il est question.

Précédemment, les organismes de protection sociale pouvaient demander aux préfectures de vérifier l'authenticité des pièces d'identité qu'ils recevaient, afin de s'assurer qu'il n'y avait ni faux ni usurpation d'identité. Cette proposition de loi vient inverser la logique, en permettant aux préfectures de signaler aux caisses d'assurance maladie les pièces d'identité frauduleuses de manière proactive, ce qui permet des échanges réciproques.

Mme Nathalie Goulet. Bien sûr !

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Il ne s'agit pas de permettre aux préfets de suspendre les aides sociales d'untel ou untel, mais plutôt d'informer l'ensemble des caisses pour que plus personne ne puisse faire usage de pièces d'identité frauduleuses pour percevoir des aides publiques.

Il n'y a pas de ciblage. Lorsque l'on détient une fausse pièce d'identité, il est normal de ne pas avoir accès aux aides publiques. Il n'y a donc pas de remise en cause des politiques sociales sous couvert de politiques migratoires.

Je tiens à le préciser, pour ne pas inquiéter nos honnêtes concitoyens. Si le Gouvernement avait eu de telles intentions – et nous ne les avons pas, j'y insiste –, il ne serait pas passé par une proposition de loi visant à lutter contre les fraudes !

Madame la sénatrice Goulet, avant de vous retrouver dans quelques instants pour une audition de la commission d'enquête dont vous êtes le rapporteur, je vous réaffirme, ainsi que je l'ai précisé aujourd'hui même en réponse à une question d'actualité, que le Gouvernement et moi-même sommes bien évidemment prêts à travailler dès que les opportunités juridiques se présentent, qu'il s'agisse de propositions ou de projets de loi.

Comme vous l'avez souligné, le Conseil constitutionnel considère depuis des années que les dispositions antifraudes adoptées dans la plupart des lois de finances sont des cavaliers législatifs. Il faut donc réaliser ce travail au moyen d'autres vecteurs législatifs. Un certain nombre des propositions que vous faites méritent d'être examinées. Il faudra progresser, car la fraude est très imaginative et créative.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous êtes appelés à vous prononcer sur une proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques. Le Gouvernement fera le maximum pour l'appliquer, mais je peux d'ores et déjà vous assurer que, dans un, deux ou trois ans, nous aurons besoin de prendre de nouvelles dispositions, car les fraudeurs cherchent en permanence la moindre brèche dans nos dispositifs. Nous sommes très engagés, mais nous ne sommes pas infaillibles : c'est bien pour cette raison que notre corpus législatif doit régulièrement être remis à jour.

Enfin, monsieur le sénateur Michau, si un texte n'a pas été téléguidé par le Gouvernement, c'est bien celui-là : il a été déposé le 15 octobre dernier, alors que le présent gouvernement n'était pas encore en fonction. Une fois installé, le Gouvernement a repris le travail très activement, pour s'assurer que l'examen de cette proposition de loi se poursuive, car elle est utile pour les Français. C'est comme cela que nous travaillons.

Mme la présidente. Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifiée par les amendements du Gouvernement.

(La proposition de loi est adoptée définitivement.)

7

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 27 mai 2025 :

À dix-huit heures trente :

Explications de vote des groupes puis scrutins publics solennels sur le projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 613 rectifié, 2024-2025) et sur le projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 614, 2024-2025).

À vingt et une heures :

Débat sur le thème « Comment nos politiques publiques peuvent-elles contribuer à relever les défis auxquels sont confrontées les zones rurales de notre pays ? » ;

Débat sur le thème « Comment nos politiques publiques peuvent-elles contribuer à relever les défis auxquels sont confrontées les zones rurales de notre pays ? ».

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures quinze.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER