D'une manière générale, la convention franco-finlandaise et l'avenant franco-suédois modernisent nos cadres bilatéraux, évitent la double imposition et, surtout, verrouillent l'interprétation commune, condition indispensable pour qu'un pays ne découvre pas a posteriori un angle mort au détriment de ses contribuables.

Pour toutes ces raisons, nous voterons ce texte, mais nous le ferons en gardant à l'esprit que la valeur d'une convention se mesure non pas à son existence formelle, mais à son application réelle.

Je l'ai dit ici à plusieurs reprises, la signature d'une convention ne met pas fin au risque.

Madame la ministre, je citerai des exemples que vous connaissez très bien puisque vous avez été députée des Français de l'étranger, et que vous avez été particulièrement sensibilisée à ces sujets.

L'exemple de l'Italie a démontré qu'une volte-face interprétative suffit à faire surgir rétroactivement des dettes fiscales et, surtout, des pénalités massives, alors même que les contribuables respectaient le droit tel qu'il était appliqué depuis des années.

J'interpelle le Gouvernement sur cette situation depuis 2020. Des discussions ont été engagées l'été dernier avec votre homologue italien et des accords partiels auraient été conclus. Que peuvent espérer nos compatriotes français installés en Italie ?

Un autre cas préoccupant est celui de la Thaïlande, pays auquel une convention fiscale nous lie depuis 1974. La Thaïlande a ainsi décidé, au début de l'année 2024, d'imposer les résidents passant plus de 180 jours dans le pays sur tous leurs revenus de source étrangère qui y sont transférés.

La France n'arrive pas à obtenir de ce pays la confirmation que cette nouvelle imposition ne concerne pas les revenus déjà imposés en France au titre de la convention fiscale.

Cette absence de clarification fait peser un risque réel de double imposition et de rappels avec pénalités. Il est impératif, j'y insiste, de ne pas laisser le scénario italien se répéter.

Mes chers collègues, comme je n'ai pas manqué de le marteler à plusieurs reprises, les conventions fiscales sont autant un instrument de coopération qu'un instrument de protection.

Il en résulte un devoir de vigilance sur trois points : une vigilance textuelle pour éviter toute équivoque, une vigilance bilatérale pour assurer une interprétation partagée, et une vigilance temporelle pour empêcher toute rétroactivité par un changement d'analyse. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Sophie Briante Guillemont applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Fouassin.

M. Stéphane Fouassin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui un texte d'apparence technique, mais qui a tout d'un instrument politique essentiel : le projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre la République française et la République de Finlande pour l'élimination de la double imposition en matière d'impôts sur le revenu et la prévention de l'évasion et de la fraude fiscales, ainsi que l'approbation de l'avenant à la convention entre la France et la Suède, qui suit quasiment la même logique.

Derrière les articles et les sigles, il y a une ambition claire : rendre notre fiscalité internationale plus juste, plus lisible, plus efficace et, disons-le, plus moderne.

Le premier texte, la convention franco-finlandaise signée à Helsinki en avril 2023, vient remplacer celle qui l'avait été en 1970, à une époque où, souvenons-nous, les montages fiscaux se faisaient à la machine à écrire.

Cette nouvelle convention est pleinement alignée sur les standards de l'OCDE. Elle modernise la définition des revenus et des établissements stables. Elle renforce les échanges d'informations et les règles anti-abus. Elle adapte le traitement des pensions et des dividendes. Surtout, elle inscrit noir sur blanc que l'objectif est d'éliminer la double imposition sans créer de double exonération, bref de fermer les portes à l'évasion fiscale.

Le second texte, signé avec la Suède, n'est pas une nouvelle convention. Il s'agit d'un avenant à la convention de 1990.

Trois évolutions essentielles y figurent : un préambule anti-évasion, une amélioration des procédures amiables pour les contribuables et une clause anti-abus inspirée du projet Beps de l'OCDE.

Ces deux textes poursuivent le même but : lutter contre les montages artificiels tout en garantissant la sécurité juridique des entreprises et des particuliers. Ils s'inscrivent dans le vaste mouvement de coopération fiscale internationale que la France promeut activement depuis plusieurs années, notamment dans le cadre européen et au sein du G20.

Pour les entreprises françaises présentes en Finlande ou en Suède, c'est une bonne nouvelle, avec pour perspective un cadre fiscal clair, prévisible et équitable. Pour l'État, c'est un outil de protection de la base imposable nationale. Et pour nos citoyens, c'est une preuve que la mondialisation ne rime pas avec impunité fiscale : elle peut être aussi synonyme de responsabilité partagée.

Je noterai enfin que ces accords raffermissent nos liens économiques et politiques avec deux partenaires nordiques exemplaires en matière de transparence et de gouvernance.

Quand le froid du nord souffle un vent de clarté fiscale, cela ne peut que réchauffer nos relations diplomatiques. (Sourires.)

Pour toutes ces raisons, le groupe RDPI votera résolument en faveur de ce projet de loi.

Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Florence Blatrix Contat. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui un projet de loi autorisant l'approbation de deux accords fiscaux : une nouvelle convention entre la France et la Finlande et un avenant à la convention existante avec la Suède, tous deux destinés à éliminer la double imposition et à prévenir l'évasion fiscale.

Ce type de texte, classique mais nécessaire, vise à moderniser les conventions fiscales bilatérales de la France pour les aligner sur les standards internationaux issus du programme Beps de l'OCDE, qui vise à lutter contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert artificiel des bénéfices.

Depuis 2018, la France a signé plus d'une dizaine d'accords de ce type et le texte qui nous est soumis s'inscrit dans cette continuité.

La convention qui liait la France à la Finlande datait de 1970. Jamais amendée depuis, elle était l'une des plus anciennes encore en vigueur.

Surtout, elle comportait des lacunes qui rendaient possibles des montages d'arbitrage des dividendes, les fameux CumCum externes, les dividendes versés aux non-résidents étant exonérés de toute retenue à la source.

La nouvelle convention signée le 4 avril 2023 vient donc mettre à jour le cadre fiscal bilatéral sur plusieurs plans. Elle aligne son contenu sur le modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune 2017 de l'OCDE, en introduisant notamment des clauses anti-abus et de coopération fiscale, en actualisant la définition de l'établissement stable, en modernisant les mécanismes d'élimination de la double imposition et, enfin, en redéfinissant le partage des droits d'imposition sur différentes catégories de revenus, dont les revenus passifs.

L'État de source pourra désormais appliquer une retenue à la source, plafonnée à 15 %, sur les dividendes sauf pour les sociétés qui détiennent plus de 5 % du capital pendant au moins un an, qui bénéficieront d'une exonération dans le cadre du régime mère-fille.

En d'autres termes, la convention met fin à l'anomalie qui faisait de la Finlande le seul État européen avec lequel la France appliquait un taux nul.

La convention introduit également une nouveauté sur les pensions de retraite privées. Jusqu'à présent, ces pensions étaient imposées uniquement dans l'État de résidence. Désormais, la Finlande bénéficiera d'un droit d'imposition résiduel, compensé par un crédit d'impôt inversé : l'État source déduira le montant déjà acquitté dans l'État de résidence.

Ce mécanisme, déjà utilisé avec le Danemark, garantit l'absence de double imposition tout en préservant les recettes de la France.

Je rappelle que le nombre de résidents fiscaux en France percevant des pensions finlandaises s'élève à 700, pour une assiette d'environ 10 millions d'euros, quand les ressortissants français recensés comme retraités et établis en Finlande sont au nombre de 46. En réalité, ce chiffre pourrait être cinq fois plus élevé : il est fréquent en effet que nos compatriotes ne s'inscrivent pas sur les registres consulaires.

La deuxième partie du texte porte sur un avenant à la convention fiscale franco-suédoise de 1990, signé le 22 mai 2023.

La Suède a fait le choix de ne pas signer directement la convention multilatérale Beps, et préfère actualiser ses conventions une à une, par voie d'avenants bilatéraux.

Ce choix est regrettable, car il contribue à fragmenter l'architecture fiscale mondiale, alors même que la lutte contre l'évasion exige davantage d'unité et de coordination.

Ledit avenant, composé de quatre articles, se borne donc à intégrer les apports essentiels de l'instrument multilatéral : un nouveau préambule précisant l'objectif de lutte contre l'évasion et la fraude fiscales, une réforme de la procédure de règlement des différends et, enfin, une clause anti-abus.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera en faveur de ce projet de loi. Les conventions que nous nous apprêtons à approuver modernisent nos relations fiscales avec deux partenaires européens proches, et contribuent à la lutte contre la fraude et les montages d'optimisation agressive.

Toutefois, il convient de souligner, au-delà de leur contenu, la fréquence des textes de cette nature : plus d'une dizaine de conventions bilatérales ont été signées depuis 2018 sans que la situation internationale évolue réellement.

Cela dit quelque chose des limites de l'approche bilatérale et de la fragilité du cadre fiscal de l'OCDE, d'autant que les États-Unis se sont retirés de l'accord au début de l'année 2025 : les multinationales américaines sont désormais exemptées de la taxe minimale de 15 %.

Cette décision, prise sans débat, illustre – je tiens à le souligner – l'incapacité de l'OCDE à imposer un cadre réellement contraignant, ainsi que la faiblesse des pays européens face aux pressions de Washington.

Ce sont des milliards de recettes fiscales qui échappent à la France, alors même que nous sommes contraints d'imposer aux classes moyennes et populaires de nouvelles restrictions.

La coopération internationale ne peut plus dépendre d'accords à géométrie variable. La justice fiscale appelle désormais une réponse multilatérale, sans doute refondée à l'échelle des Nations unies. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Barros. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K – Mme Gisèle Jourda applaudit également.)

M. Pierre Barros. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, parler de fiscalité internationale, c'est un peu comme monter un meuble Ikea.

Les notices – CML, cadre multilatéral de l'OCDE, Beps – précisent comment empêcher les doubles impositions et les non-impositions, et limiter l'érosion des bases fiscales.

Les pièces sont bien identifiées : établissement stable, clause anti-abus, principe de pleine concurrence ou encore procédure amiable.

Sur le papier, tout s'emboîte parfaitement. Mais quand on passe du manuel – le multilatéral – à l'assemblage concret – le bilatéral –, on découvre que l'ensemble vacille sous le poids des stratégies d'optimisation du capital.

Or un meuble fiscal bien monté, c'est celui qui reste stable quand la richesse s'y installe. Ainsi, la méthode Beps se traduit trop souvent, dans les conventions bilatérales, par un simple respect du minimum standard.

Prenons d'abord les prix de transfert, cœur du problème.

Imaginez un groupe qui conçoit à Helsinki, dépose sa marque à Stockholm, centralise sa trésorerie à Amsterdam, fabrique à Lille et vend à Lyon. Sur le papier, chaque filiale se facture des services, des licences ou des prêts internes, comme si elle était une entreprise indépendante. C'est le principe de pleine concurrence, pierre angulaire du Beps.

Sauf que, dans la réalité, ce marché n'existe pas : il n'y a pas de prix de marché pour un algorithme propriétaire, une marque mondiale ou un service interne spécifique. Résultat : la marge se déplace, discrètement mais sûrement, vers la filiale la plus faiblement imposée.

Le problème vient de là : tant que nous continuerons à fonder l'imposition sur des prix fictifs entre entités dépendantes, nous laisserons un espace d'optimisation parfaitement légal.

Concrètement, lorsque les comparables du marché n'existent pas – c'est le cas dans les secteurs du numérique, de la pharmacie ou de la propriété intellectuelle –, la France devrait systématiser la méthode du partage des bénéfices.

Cette méthode consiste non plus à chercher à reconstituer un prix illusoire, mais à répartir le profit global du groupe entre les pays concernés selon des critères objectifs : effectifs, actifs, chiffre d'affaires. Elle est plus réaliste, plus équitable et plus conforme à la logique de la lutte contre l'érosion des bases fiscales.

Pour l'heure, le Principal Purpose Test, ou critère de l'objet principal, permet de refuser un avantage si l'intention principale est d'obtenir un gain d'impôt, ce qui est une très bonne chose. Mais il ne dit rien des groupes intégrés dont les flux sont « naturellement » ou « sans intention manifeste » orientés vers les pays qui disposent des taux les plus avantageux.

Autre fragilité, la nouvelle convention prévoit une exonération totale de retenue à la source pour les dividendes dès 5 % de participation sur un an.

Cela réduit certes les montages CumCum et CumEx, où un dividende est « lavé » plusieurs fois de son impôt, mais le seuil retenu reste bas et peut toujours favoriser la constitution de holdings visant l'optimisation.

Compte tenu du prélèvement forfaitaire unique à 30 % appliqué en France, les taux d'imposition français et finlandais sont comparables. Mais si la France décidait demain, légitimement, de rehausser la fiscalité du capital, cette exonération conventionnelle rendrait les flux intragroupes plus avantageux que les distributions nationales. Cela soulève un enjeu de démocratie fiscale.

Nous avons donc du Beps, mais un Beps minimal : la notice existe, mais l'assemblage reste fragile. Alors, pour que le meuble tienne, il faut resserrer les boulons.

Il faut d'abord ajouter au test d'intention un test de substance, afin que les clauses anti-abus ne se limitent plus à juger des intentions, mais reposent sur des critères économiques.

Il faut ensuite systématiser la méthode du partage des bénéfices dès lors qu'il n'existe aucun prix de marché fiable.

Il faut encore relever les planchers de retenue à la source sur les flux de dividendes, d'intérêts et de redevances, sauf preuve d'une imposition équivalente dans l'État partenaire.

Il faut enfin adosser toutes nos conventions au pilier 2 du Beps pour que, lorsque le taux effectif d'imposition tombe sous 15 %, la France puisse exercer son droit de rappel fiscal et récupérer la différence.

C'est là la voie d'une diplomatie fiscale exigeante, seule à même de lutter contre l'érosion des bases taxables tout en s'appuyant sur un cadre multilatéral qui reste à renforcer. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K – Mme Gisèle Jourda applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Ghislaine Senée. (M. Pascal Savoldelli applaudit.)

Mme Ghislaine Senée. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui un projet de loi autorisant l'approbation de deux textes en apparence techniques – une nouvelle convention fiscale et un avenant –, mais qui posent en réalité des questions profondément politiques : celles de la justice fiscale, de l'équité entre les États et, au fond, de notre capacité à rétablir un minimum de cohérence entre la mondialisation économique et la fiscalité.

Les textes dont il est question actualisent des accords bilatéraux anciens, parfois très anciens, comme celui qui lie la France avec la Finlande depuis 1970.

En un demi-siècle, les flux financiers se sont mondialisés, les dividendes ont explosé, et l'ingénierie fiscale est devenue un sport planétaire pour les grandes entreprises et les détenteurs de capitaux.

Il était donc urgent de moderniser ces conventions. Je le dis d'emblée : le groupe écologiste votera en faveur de ce projet de loi, afin que les textes visés puissent entrer en vigueur dès le 1er janvier prochain.

L'un des apports majeurs de la nouvelle convention signée avec la Finlande est l'instauration d'une retenue à la source de 15 % sur les dividendes, là où le taux était jusqu'alors de 0 %. C'est une avancée importante, qui met fin à une anomalie fiscale : la non-imposition de revenus du capital dans un pays servant de refuge à des contribuables d'autres États.

Les montants en jeu sont considérables : au moins 140 milliards d'euros ont échappé aux administrations fiscales européennes depuis le début des années 2000. Comme l'a rappelé Mme la rapporteure, neuf pays appliquent encore un taux nul sur les dividendes. C'est à la fois injustifiable et insoutenable.

Chaque euro de dividende non imposé est un euro de moins pour les services publics, la transition écologique ou la solidarité nationale. Nous saluons donc la volonté du Gouvernement et de nos partenaires européens d'avancer vers davantage d'équité.

Permettez-moi toutefois d'émettre deux réserves.

Premièrement, les conventions fiscales ne sont jamais neutres : elles reflètent des rapports de force et peuvent parfois reproduire les déséquilibres qu'elles prétendent corriger.

Comme le rappelait le désormais célèbre économiste Gabriel Zucman samedi dernier sur France Inter, dès qu'on crée des régimes d'exception ou des zones grises, de nouvelles stratégies d'optimisation apparaissent aussitôt. L'évasion suit toujours la faille.

Il faudra donc veiller à ce que les dispositifs destinés à lutter contre les montages abusifs, notamment les pratiques dites CumCum, soient réellement efficaces. Ces opérations consistant à faire circuler artificiellement des titres autour des dates de versement des dividendes pour échapper à l'impôt ont coûté des milliards d'euros aux finances publiques européennes. Nous devons être certains que les conventions que nous approuvons ferment enfin la porte à de telles manœuvres.

Deuxièmement, nous déplorons l'exclusion, dans la nouvelle convention avec la Finlande, de toute disposition relative à la taxation des grandes fortunes.

Comme l'a justement souligné Mme la rapporteure dans son rapport, c'est un recul symbolique, mais aussi politique. La contribution des plus aisés est en effet au cœur du pacte fiscal. Si chacun ne participe pas à hauteur de ses moyens, le consentement à l'impôt s'érode et, avec lui, notre modèle de redistribution et de protection sociale.

Dans un contexte où les inégalités de patrimoine atteignent des records et où les multinationales continuent de déplacer artificiellement leurs bénéfices vers les paradis fiscaux, renoncer à cet aspect envoie un bien mauvais signal. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.

Mme Sophie Briante Guillemont. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la fiscalité internationale est souvent perçue comme un enchevêtrement de règles complexes, et ce projet de loi en est une illustration supplémentaire.

Derrière sa technicité, le texte porte pourtant sur des enjeux bien concrets. Il s'inscrit dans un mouvement de fond qui témoigne de la manière dont notre pays conçoit sa souveraineté fiscale à l'heure de la mondialisation.

L'actualisation de nos conventions avec la Finlande et la Suède était nécessaire. Comme cela a été rappelé, la convention avec la Finlande, en particulier, datait de 1970.

L'objectif est notamment d'harmoniser notre modèle avec celui de l'OCDE, dans le cadre d'une diplomatie économique cohérente, qui fait le choix d'une fiscalité fondée sur la confiance, la transparence – via le renforcement des échanges de données – et le respect des règles communes entre États.

Les instruments conventionnels reflètent l'évolution du droit fiscal international vers davantage de coopération. En l'occurrence, il s'agit, au travers des conventions avec la Finlande et la Suède, d'éviter la double imposition, de prévenir la fraude et d'empêcher la délocalisation artificielle des bénéfices.

Les accords de ce type sont la clé d'une relation de confiance entre la France et ses citoyens, en particulier ceux qui résident à l'étranger.

Indépendamment des deux pays ici concernés – trois avec le nôtre –, la lisibilité des règles fiscales est essentielle pour nos compatriotes établis hors de France, qu'ils soient particuliers ou chefs d'entreprise. Trop souvent, ils se heurtent à des règles de résidence fiscale complexes et parfois même contradictoires. Cette incertitude alimente les incompréhensions, et surtout un sentiment d'éloignement par rapport à l'administration fiscale française et, in fine, par rapport à la France.

La modernisation de nos conventions contribue donc à restaurer cette confiance, même si, au-delà de la signature de celles-ci, il faudra surveiller leur application, comme l'a très justement rappelé notre collègue Évelyne Renaud-Garabedian.

Aussi me semble-t-il important, à ce stade, de revenir sur ce que sont les conventions fiscales : des traités internationaux visant à éviter que les contribuables ne soient imposés deux fois pour un même revenu par deux pays différents, mais aussi des instruments de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales.

Or, il y a quelques jours, l'Assemblée nationale a failli adopter un amendement du président de la commission des finances visant à instaurer un impôt universel dit « ciblé », c'est-à-dire un impôt dû non pas parce qu'une personne perçoit des revenus de source française, mais uniquement parce qu'elle est française.

Présenté comme un outil de lutte contre l'exil fiscal et visant les personnes aux revenus supérieurs à 230 000 euros par an, cet amendement est un exemple de la caricature que subissent en permanence les Français de l'étranger, encore trop souvent perçus comme des exilés fiscaux, mais révèle aussi un refus de voir le monde tel qu'il fonctionne.

Ce n'est pas parce qu'un Français est parti vivre dans un pays où l'imposition est inférieure qu'il a forcément déménagé pour des raisons fiscales. Choisir un pays, c'est épouser non pas sa fiscalité, mais plutôt son conjoint qui en est originaire ou sa culture dont on souhaite s'imprégner ; c'est encore rechercher une expérience professionnelle différente.

Des mesures de ce genre sont désormais examinées tous les ans à l'Assemblée nationale. Cela n'aurait rien d'inquiétant si, d'année en année, les députés ne manifestaient pas à leur égard une adhésion croissante. Ainsi, l'amendement précité, qui a été rejeté à une voix près, a reçu le soutien massif des groupes La France insoumise (LFI) et Rassemblement national (RN).

Si le débat sur la juste répartition de l'effort fiscal en France est tout à fait légitime, il ne doit pas tomber dans les mauvais clichés, alors que ce sont précisément les conventions fiscales qui permettent de bâtir une fiscalité internationale fondée sur la coopération, la transparence et la solidarité.

En actualisant la définition de la résidence fiscale, en harmonisant les critères d'imposition et en renforçant les procédures amiables entre administrations, ces accords rendent le cadre fiscal plus lisible pour les Français de l'étranger, plus prévisible et donc plus juste. Ils apportent une sécurité juridique indispensable.

Vous l'aurez compris, le groupe RDSE votera en faveur de ce texte.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Vincent Capo-Canellas. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui un texte à première vue technique, mais dont les enjeux sont, en réalité, profondément politiques et stratégiques : le projet de loi autorisant l'approbation de deux conventions fiscales, l'une avec la Finlande, l'autre avec la Suède.

Ces deux accords ont en commun une même ambition : une fiscalité internationale plus juste, plus moderne et plus coopérative, afin de lutter efficacement contre la fraude et l'évasion fiscales.

Depuis sa création, notre famille politique défend cette idée simple : une Europe forte, c'est une Europe qui protège, y compris contre l'injustice fiscale.

La convention signée le 4 avril 2023 entre la France et la Finlande remplace un accord datant de 1970. Depuis un demi-siècle, les pratiques ont évolué, les failles se sont creusées, les modèles économiques se sont digitalisés et les montages fiscaux se sont complexifiés.

Il était donc temps d'actualiser notre cadre juridique pour le mettre en cohérence avec les derniers standards de l'OCDE, notamment avec les principes du projet Beps visant à empêcher l'érosion des bases fiscales et le transfert artificiel des bénéfices.

Le nouvel accord franco-finlandais modernise la définition de la résidence fiscale et de l'établissement stable, garantit que la double imposition soit évitée sans tomber dans la non-imposition, encadre les prix de transfert et, surtout, introduit de robustes clauses anti-abus.

Il met également fin à une anomalie ancienne : l'exonération totale de retenue à la source sur les dividendes, qui favorisait des montages d'arbitrage de dividendes – les fameux CumCum externes –, contre lesquels nous avons lutté avec notre collègue Nathalie Goulet et la commission des finances.

L'avenant signé avec la Suède en mai 2023 poursuit la même philosophie. Là encore, il s'agit d'intégrer les standards internationaux issus de la convention multilatérale de l'OCDE.

Concrètement, l'avenant renforce les garanties pour les contribuables en élargissant les procédures amiables de règlement des différends, et introduit une clause générale anti-abus permettant de refuser les avantages conventionnels en cas de montage artificiel.

Désormais, la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales est un objectif explicite, inscrit noir sur blanc. C'est une avancée juridique, mais aussi symbolique : nous affirmons que la loyauté fiscale est une composante de la loyauté européenne.

Mes chers collègues, ces textes traduisent une réalité essentielle : la fiscalité n'est plus un sujet strictement national. À l'heure où les entreprises opèrent sans frontières et où les flux financiers circulent de manière instantanée, seule une coopération internationale solide peut garantir une équité fiscale.

Harmoniser nos règles avec nos voisins, c'est renforcer notre souveraineté en la rendant efficace et crédible face à la mondialisation.

Les conventions que nous nous apprêtons à approuver ne se limitent pas à éviter les doubles impositions. Elles instaurent un climat de confiance réciproque entre administrations, favorisent les investissements multilatéraux, et donnent de la prévisibilité, en particulier à nos petites et moyennes entreprises (PME) et entreprises de taille intermédiaire (ETI) qui se développent à l'international.

Elles illustrent cette diplomatie économique et la notion de justice fiscale internationale, auxquelles la France est attachée.

Notre groupe votera naturellement pour ce projet de loi d'approbation de ces deux conventions parce qu'il modernise, parce qu'il protège, et parce qu'il renforce la coopération entre démocraties fiscales européennes. Je salue le travail du Gouvernement, qui a permis d'aboutir à ces deux textes en faveur d'une fiscalité internationale plus juste, plus efficace, et plus protectrice de nos intérêts nationaux. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – MM. Marc Laménie et Laurent Somon applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie.

M. Marc Laménie. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je commencerai par remercier Mme la rapporteure, Vanina Paoli-Gagin, pour son travail de qualité sur ce texte.

Nous examinons en cette fin d'après-midi un projet de loi permettant l'entrée en vigueur de deux conventions fiscales. En effet, en application de l'article 53 de la Constitution, l'entrée en vigueur des traités et de certains accords internationaux est soumise à l'accord du Parlement.

S'articulant autour de deux articles, le projet de loi a d'abord pour objectif d'autoriser l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Finlande pour l'élimination de la double imposition en matière d'impôts sur le revenu et la prévention de l'évasion et de la fraude fiscales. Mme la ministre nous a indiqué le nombre de personnes concernées : 700 retraités finlandais demeurent en France, alors que peu de Français sont déclarés retraités en Finlande.

Pour l'anecdote, je voyage très peu et la Finlande est l'un des rares pays que je connaisse pour l'avoir visité en 1981. Comme je m'intéresse au ferroviaire, j'avais voyagé en train entre Helsinki et Rovaniemi, sur le cercle polaire arctique. Aussi cette discussion m'évoque-t-elle des souvenirs … (Sourires.)

Le texte vise ensuite à autoriser l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Suède en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune.

Le Sénat est saisi de ce projet de loi avant l'Assemblée nationale.

J'aborderai tout d'abord la nouvelle convention fiscale entre la France et la Finlande. La convention initiale franco-finlandaise, qui remonte à 1970, n'est plus aujourd'hui en conformité avec la pratique conventionnelle française et ne répond plus aux derniers standards internationaux. La nouvelle convention du 4 avril 2023 vise donc à remédier à cette situation.

En premier lieu, je me réjouis que cet accord intègre les derniers standards de l'OCDE. Il prévoit ainsi une définition de l'établissement stable respectant le modèle de cette organisation. Il comprend également des clauses anti-abus et de coopération fiscale. Il redéfinit enfin le partage des droits d'imposition entre la France et la Finlande sur plusieurs types de revenus.

En second lieu, je me félicite que la nouvelle convention fiscale franco-finlandaise comprenne les éléments relevant de la pratique conventionnelle de chacun des États parties. Elle satisfait ainsi une demande forte de la Finlande concernant le partage d'imposition des pensions privées, principal point d'achoppement lors des négociations. Elle répond aussi à la volonté de la France d'introduire une imposition sur les dividendes dans le but de prévenir tout risque de montage abusif, tel que les arbitrages de dividendes.

Je suis heureux que, lors des discussions, tout écueil ait pu être évité et que nous soyons parvenus à des concessions réciproques. Ce travail en commun entre États est important pour le monde économique, notamment les entreprises.

J'en viens maintenant à l'avenant franco-suédois du 22 mai 2023. Celui-ci découle du choix fait par la Suède de modifier ses conventions fiscales bilatérales au moyen d'avenants. Il a pour objectif d'inclure dans la convention bilatérale du 27 novembre 1990 les apports de l'instrument multilatéral de l'OCDE.

La convention fiscale bilatérale franco-finlandaise du 4 avril 2023 et l'avenant du 22 mai 2023 à la convention fiscale franco-suédoise du 27 novembre 1990 semblent présenter un certain équilibre et ne soulèvent aucune difficulté particulière. Notre groupe Les Indépendants – République et Territoires votera donc unanimement en faveur du projet de loi permettant l'entrée en vigueur de ces deux accords internationaux en matière fiscale. (Mme Sophie Briante Guillemont applaudit.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.