Présidence de M. Gérard Larcher
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Hommage à une victime du narcotrafic
M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, chaque jour le narcotrafic fait en France de nouvelles victimes.
Nous avons une pensée pour ce jeune Marseillais, Mehdi Kessaci, lâchement assassiné, le 13 novembre dernier. Assassinat qui constitue, selon le ministre de l'intérieur, un « point de bascule ».
Je tenais à exprimer, au nom de notre assemblée, notre volonté inébranlable de faire face à ce fléau.
Ce combat, le Sénat l'a porté au travers de la proposition de loi de nos collègues Étienne Blanc et Jérôme Durain qui recueillit le soutien d'une large majorité de parlementaires.
La loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic promulguée le 13 juin dernier donne les outils nécessaires à l'État dans cette lutte qui, nous le savons, demande courage, volonté et moyens.
Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, nos compatriotes, et avec eux le Sénat, attendent désormais des résultats, notamment avec l'installation du parquet national anti-criminalité organisée (Pnaco) en janvier prochain. Nous en avons besoin de manière impérative !
Pour ce jeune et sa famille, en association avec l'ensemble de nos collègues des Bouches-du-Rhône, je vous demande un instant de recueillement. (Mmes et MM. les sénateurs, M. le Premier ministre, ainsi que Mmes et MM. les ministres, se lèvent et observent un moment de recueillement.)
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Annonce du « duoday » au sénat
M. le président. Mes chers collègues, en cette semaine européenne de l'emploi pour les personnes en situation de handicap, nous sommes heureux de vous annoncer que le 25 novembre prochain nous accueillerons, dans nos tribunes, une soixantaine de duos qui viendront découvrir le fonctionnement de notre institution, mais aussi nos métiers.
Le Sénat est pleinement mobilisé pour l'intégration des personnes en situation de handicap dans le monde du travail, notamment au travers de ces journées d'échanges qui constituent un moment privilégié pour changer de regard et, ensemble, dépasser nos préjugés.
Je remercie chaque sénatrice, sénateur, fonctionnaire, contractuel et collaborateur de sa participation à cette journée consacrée à l'emploi des personnes en situation de handicap.
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Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.
Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Au nom du bureau du Sénat, j'appelle chacun de vous, mes chers collègues, à observer au cours de nos échanges l'une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, qu'il s'agisse du respect des uns et des autres ou de celui du temps de parole.
Ce temps de parole est de deux minutes, tant pour les sénateurs que pour le Gouvernement. Le seul qui en soit exonéré est le Premier ministre, mais je sais qu'il n'en abusera pas.
assassinat de mehdi kessaci et état de la menace liée au narcotrafic
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guy Benarroche. Avant de commencer, je tenais à vous remercier, monsieur le président, de l'hommage que vous avez rendu à Mehdi Kessaci.
« Non, je ne me tairai pas », a dit Amine Kessaci, mon ami. Son frère, Mehdi Kessaci, a été abattu par le crime organisé du narcotrafic. Son frère qui, d'après les mots mêmes d'Amine, n'était coupable que d'être son frère. Il s'agit d'un meurtre d'intimidation, d'un meurtre d'asservissement.
Je veux apporter mon soutien à cet homme et à cette famille dévastée par le narcotrafic. Eux-mêmes n'ont eu de cesse de soutenir et d'accompagner les autres familles de victimes, ces enfants happés, puis enchaînés par le narcotrafic. Cet engagement envers les autres, pour les autres, Mehdi le manifestait également puisqu'il voulait rejoindre les forces de l'ordre.
Ayons aussi une pensée pour toutes ces mamans, ces grands-mères, ces sœurs de victimes.
Au-delà de l'hommage, je souhaite porter le témoignage d'Amine, qui a pris la parole aujourd'hui dans une tribune. L'action judiciaire, policière, financière, diplomatique est nécessaire, mais elle ne suffit pas.
Le volet consacré à la prévention et au soutien social a été oublié dans la loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic. Dès 2024, nous avions insisté sur la nécessité d'une action de prévention destinée à enrayer l'engrenage pour ceux que la tentation ou la contrainte conduit vers cette économie mortifère.
Amine le rappelle : l'État doit prendre la mesure de ce qui se passe et comprendre qu'une lutte à mort est engagée. Il est temps d'agir, par exemple, en faisant revenir les services publics dans les quartiers, en luttant contre l'échec scolaire qui fournit aux trafiquants une main-d'œuvre soumise, en dotant les enquêteurs et les forces de police des moyens dont ils ont besoin et en soutenant réellement les familles de victimes du narcotrafic, y compris pour leur relogement.
« Je dirai […] les failles de la République, les territoires abandonnés et les populations oblitérées », a affirmé Amine. Il faut le reconnaître, notre pays a laissé prospérer le narcotrafic parce qu'il se déroulait dans des quartiers populaires que personne ne voulait regarder, parce qu'il semait le malheur parmi des citoyens que personne ne daignait écouter, parce que l'on a, trop longtemps, considéré que certaines vies ne comptent pas. C'est cela qui doit changer aujourd'hui.
Ce n'est pas une question, monsieur le ministre, c'est le relais d'un cri qui retentit, la demande d'une action politique, sanitaire, sociale et scolaire de prévention, d'une stratégie de fond, en quelque sorte, pour ne pas laisser prospérer l'emprise du crime organisé ! (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et INDEP. – Mme Solanges Nadille applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Laurent Nunez, ministre de l'intérieur. Je m'associe, à mon tour, à l'hommage rendu à Mehdi Kessaci, tragiquement assassiné. Nous avons une pensée pour lui comme pour son frère Amine, qui dénonce les narcotrafics.
Monsieur le sénateur, soyez assuré que nous poursuivrons le combat que nous menons depuis maintenant de nombreuses années. Je le redis ici : dès 2015, la coordination renforcée et l'approche globale expérimentée à Marseille ont permis aux services de se décloisonner et de mieux agir.
Depuis 2017, les coups portés au trafic, le renforcement des effectifs, la réforme de l'Office anti-stupéfiants (Ofast) et les frappes particulièrement dures infligées au narcotrafic produisent, malgré tout, des effets. Il faut le reconnaître : nous obtenons des résultats. Les homicides liés au trafic ont été divisés par deux entre 2023 et 2024 ; ce chiffre mérite d'être rappelé. Le nombre de réseaux démantelés augmente, comme l'illustre encore l'opération menée à la Castellane en avril.
Vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, et nous en convenons – le Gouvernement le partage et, en tant que ministre de l'intérieur, je le partage pleinement : il faut faire encore plus et il faut faire mieux. C'est ce que nous mettons en œuvre aussi dans le cadre de la loi qui vient d'être d'adoptée et qui offre des outils nouveaux, extrêmement précieux, aux forces répressives, notamment judiciaires. Nous allons les mobiliser. Je songe, en particulier, aux quartiers de lutte contre la criminalité organisée au sein des établissements pénitentiaires : vingt-six membres des mafias marseillaises y sont incarcérés.
Enfin, nous allons travailler avec le parquet national anti-criminalité organisée (Pnaco), qui sera instauré au 1er janvier prochain, ainsi qu'avec l'état-major mis en place par Bruno Retailleau, alors ministre d'État, rattaché à la direction nationale de la police judiciaire (DNPJ), ce qui permet aux services d'échanger des informations.
Nous allons poursuivre sans relâche cette lutte implacable contre les trafics. Comme l'a rappelé M. le président du Sénat et comme l'a déclaré M. le Premier ministre hier à l'Assemblée nationale : la guerre est engagée, mais elle est loin d'être achevée même si nous gagnons des batailles. Vous pouvez compter sur la détermination du ministre de l'intérieur que je suis pour poursuivre ce combat. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)
baisse des moyens accordés par l'état aux collectivités territoriales
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Brigitte Devésa et M. Louis Vogel applaudissent également.)
M. Stéphane Sautarel. Monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, ma question est à la fois grave et large, mais aussi sécuritaire, car elle touche à la manière dont l'État considère les territoires et renvoie à quelque chose de plus profond que la seule gestion. Comme le disait Tocqueville, « c'est pourtant dans la commune que réside la force des peuples libres ».
Les communes de France, les collectivités locales, le pays et tous ceux qui sont attachés aux services publics locaux et à l'investissement d'avenir, à ce qui fonctionne encore dans notre pays, ont lancé un avis de recherche.
Recherche des libertés locales perdues : les collectivités se sentent prisonnières d'un agresseur, enfermées dans une verticalité normative et une forme d'infantilisation qui n'a cessé de se renforcer depuis 2017 et qui, bien souvent – ironie du sort –, les place en accusation.
Recherche, aussi, d'un forban qui a supprimé un impôt qui ne lui appartenait pas, la taxe d'habitation (TH), et ment – certes de longue date – quant à ses engagements de compenser ce qu'il a choisi de supprimer ou de transférer : la dotation globale de fonctionnement (DGF), qui constitue un dû et non un don, la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) et, désormais, les valeurs locatives industrielles, sans même évoquer les charges transférées, en particulier dans le domaine social.
Ce n'est pourtant pas en saignant les bien-portants, qui le sont d'ailleurs chaque jour un peu moins, que l'on soigne le malade, lui qui en demande toujours plus tant son addiction est grande.
Même si le malade, le coupable, joue parfois les « Zorro » grâce à une péréquation par ailleurs bienvenue, mais souvent financée par les autres, je vous le demande, monsieur le Premier ministre : allez-vous enfin mettre aux arrêts ce bandit de grand chemin et rendre à nos territoires leur dû ou, tout du moins, ne pas leur en prendre davantage dans ce projet de loi de finances ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP. – M. Christian Bilhac applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.
Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation. J'ai noté la gravité de votre propos, monsieur le sénateur Sautarel, qui recueille, sans aucun doute, un large assentiment dans cet hémicycle. Je vous le dis avec franchise : vos mots, souvent forts, éclairent les enjeux, et, en même temps, vous demeurez un sénateur constructif, capable de reconnaître les faits. Je tiens, d'ailleurs, à vous remercier pour le travail que vous menez avec votre collègue Isabelle Briquet sur les collectivités territoriales.
Monsieur le sénateur Sautarel, je rappelle le point de départ de notre histoire commune : le fleuve remonte à sa source, et sa source consiste en une dette publique de 3 400 milliards d'euros, dette qui s'alourdit de 12 millions d'euros chaque heure qui passe, tout au long de l'année.
M. Jean-François Husson. Ce n'est pas le Saint-Esprit qui a fait la dette !
Mme Françoise Gatel, ministre. Nous sommes la « maison France », qui réunit à la fois l'État et les collectivités. L'ambition de chacun, ici, vise à redresser notre pays pour permettre, comme vous l'avez souligné et comme vous l'exigez, monsieur le sénateur Sautarel, que la France retrouve des couleurs et garantisse, jusqu'au dernier kilomètre, les services que nous devons rendre.
Vous avez raison, monsieur le sénateur : les équilibres budgétaires évoluent et vous vous en saisirez. Permettez-moi toutefois de rappeler quelques éléments que vous connaissez parfaitement. Vous mettez le doigt sur les irritants : ces difficultés nous interpellent et appellent des réponses. Je dois néanmoins souligner que l'ensemble des transferts de l'État vers les collectivités s'élève à 154 milliards d'euros par an. À l'intérieur de cette enveloppe figurent les dotations auxquelles vous faites référence.
Nous avons maintenu les dotations globales de fonctionnement. M. le Premier ministre a réaffirmé, pas plus tard que la semaine dernière, sa totale solidarité à l'égard des départements. Nous porterons le fonds de sauvegarde de 300 millions à 600 millions d'euros. Nous avons augmenté la dotation de solidarité rurale (DSR). (On s'impatiente sur plusieurs travées, le temps de parole de l'oratrice étant écoulé.)
M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.
Mme Françoise Gatel, ministre. Monsieur le président, je reconnais bien là la frugalité du Sénat. Nous poursuivrons ce travail en commun, monsieur le sénateur.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour la réplique.
M. Stéphane Sautarel. Madame la ministre, nous n'ignorons pas la situation de nos finances publiques. Pour autant, les collectivités n'en sont pas responsables !
M. Stéphane Sautarel. Les derniers chiffres d'exécution pour 2025 montrent que leurs dépenses progressent moins vite que celles de l'État et de la sécurité sociale.
Puisque vous évoquez les fleuves, madame la ministre, un proverbe africain rappelle que, lorsqu'on est dans le fleuve, on ne le voit plus. Cette image illustre précisément ce qui, aujourd'hui, pénalise la vision de l'État à l'égard des collectivités territoriales.
Faites donc confiance aux collectivités et ne les ponctionnez pas davantage, en dehors des seules mesures de trésorerie et d'épargne forcée. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP. – MM. Jean-Yves Roux et André Guiol applaudissent également.)
forages en guyane
M. le président. La parole est à M. Georges Patient, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Georges Patient. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, la Guyane française restera-t-elle éternellement sacrifiée ? Je pose la question avec gravité, mais aussi avec indignation.
La vérité est que la Guyane est un tas d'or, de richesses minières, de ressources halieutiques, mais pas pour les Guyanais. Pire, nous laissons d'autres se servir et les piller. Je songe aux plus de 10 tonnes d'or volées chaque année par les garimpeiros brésiliens.
Il en sera bientôt de même pour le pétrole. La loi du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement, dite loi Hulot, a placé ce territoire sous une cloche étanche qui interdit même de connaître son potentiel.
Tous nos voisins explorent, produisent et se développent grâce au pétrole. Le Brésil de Lula, en pleine COP30, a même ouvert de nouvelles zones d'exploration le long de notre frontière maritime. Pourquoi la Guyane devrait-elle être la seule à être exemplaire sur tout le plateau des Guyanes ?
Que l'on ne nous dise pas que c'est par souci écologique, car même en 2050, si nous atteignons la neutralité carbone, la France continuera d'importer des hydrocarbures.
Nous sommes sommés d'être exemplaires pour être une vitrine écologique, une espèce de sanctuaire inerte, mais sans compensation. Il faut le dire, cette cloche posée sur la Guyane est une servitude coloniale, l'expression d'un paternalisme qui n'a plus lieu d'être en 2025.
La Guyane ne demande pas un passe-droit. Elle demande le droit à un développement endogène basé sur ses richesses, le droit d'avoir des routes pour les communes enclavées, le droit d'avoir de l'eau potable, le droit d'avoir de l'électricité 24 heures sur 24, le droit d'avoir des logements. Toutes ces infrastructures que l'État peine à financer. Les Guyanais ne veulent plus que plus de 50 % d'entre eux restent dans la pauvreté.
Monsieur le Premier ministre, je vous le demande solennellement : il est plus que temps d'enlever cette cloche sur la Guyane, plus que temps de lever ces mesures qui freinent et bloquent son développement, au premier rang desquelles la loi Hulot. Les Guyanais ne peuvent et ne veulent plus attendre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Catherine Conconne et M. Victorin Lurel applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la mer et de la pêche.
Mme Catherine Chabaud, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, de la biodiversité et des négociations internationales sur le climat et la nature, chargée de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur Georges Patient, permettez-moi tout d'abord de vous dire ma fierté de m'exprimer pour la première fois devant la représentation nationale en tant que ministre déléguée chargée de la mer et de la pêche.
Permettez-moi aussi de vous présenter les excuses de Mme la ministre Monique Barbut, actuellement retenue au Brésil dans le cadre de la COP30. Elle se rendra dans la foulée en Guyane, où elle aura justement l'occasion d'échanger avec vous, monsieur le sénateur, au sujet du développement économique de ce territoire.
La Guyane, comme tous nos outre-mer, participe à la dimension maritime de la France. Je sais que vous échangerez également sur la préservation des ressources. Vous l'avez souligné, elles sont nombreuses en Guyane : l'or, le bois et les ressources halieutiques qui font la richesse de votre territoire. Notre volonté est que ces ressources soient exploitées avant tout au bénéfice des Guyanais.
Le Président de la République a organisé un dîner le 15 octobre dernier avec les élus d'outre-mer. Il a été décidé de lancer un groupe de travail (Exclamations ironiques sur les travées du groupe UC.) en vue de déterminer un cadre institutionnel adapté à chaque territoire. Cela vaut particulièrement pour la Guyane.
Dans le cadre de ces travaux, la question de la valorisation des ressources occupera une place centrale, tout comme celle de son autonomie énergétique. Sur ce point, la Guyane est un territoire exemplaire de notre République et sa programmation pluriannuelle de l'énergie prévoit un mix énergétique 100 % renouvelable en 2027, c'est-à-dire demain.
À l'heure où la France et une grande partie des États dans le monde s'engagent dans une trajectoire d'électrification des usages, la pertinence de lancer des projets d'exploitation d'hydrocarbures ne me semble pas – à titre personnel et pour notre pôle – aller dans le sens de l'histoire.
Je profite de l'occasion que vous me donnez pour vous dire qu'à la COP30 les autres solutions venues de l'océan sont de plus en plus nombreuses à être évoquées, notamment la décarbonation du transport maritime, le développement des énergies de la mer, mais également les solutions fondées sur la nature. (Marques d'impatience sur plusieurs travées.)
M. le président. Il faut conclure !
Mme Catherine Chabaud, ministre déléguée. En Guyane, vous avez des écosystèmes marins et aquatiques qu'il faut régénérer.
Mme Laurence Rossignol. Monsieur le président, il faudrait rappeler aux ministres les règles relatives au temps de parole !
préservation des petites lignes ferroviaires dans le grand est
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Nicole Duranton applaudit également.)
M. Marc Laménie. La question ferroviaire est une problématique d'aménagement du territoire qui concerne l'ensemble du pays.
Je souhaite, en particulier, alerter M. le ministre des transports sur la situation du TGV Est mis en place en juin 2007, soit il y a un peu plus de dix-huit ans. Le développement du réseau Grand Est, qu'il s'agisse les lignes à grande vitesse ou, en parallèle, des trains express régionaux (TER), vise à assurer la desserte du territoire et répond à un besoin d'aménagement du territoire.
Il s'agissait, notamment, de désenclaver le département des Ardennes que ma collègue Else Joseph et moi-même représentons, mais aussi la Marne, la Meuse, les Vosges – je pense, en particulier, aux communes de Bar-le-Duc, d'Épinal, de Remiremont, de Saint-Dié-des-Vosges, etc. À ce titre, nous pouvons remercier l'ancien président de la Haute Assemblée, Christian Poncelet.
L'interconnexion entre les lignes, la mobilité et la répartition équilibrée au sein des territoires ont été réalisées avec un cofinancement des collectivités territoriales.
Toutefois, au fil des ans, un sentiment d'abandon se fait sentir. Les Ardennais sont pourtant attachés à leurs deux TGV journaliers directs avec une desserte de Rethel, de Charleville-Mézières et de Sedan, à la fois sous-préfecture et préfecture.
Or nous constatons que depuis la loi pour un nouveau pacte ferroviaire de 2018, que je n'avais pas votée, les correspondances entre TGV et TER sont devenues difficiles. Avec le développement du tout-numérique, le personnel a, hélas ! quasiment disparu dans les gares. C'est d'ailleurs ce qui attend la gare de Rethel avec la fin de la présence physique au niveau des guichets.
Dès lors, nous pouvons nous interroger. Quel accompagnement pour les voyageurs ? Quelle qualité pour les interconnexions ? Je salue, à ce titre, le travail quotidien de l'ensemble des personnels. Quels moyens nous donnons-nous ? Les garanties de maintien des TGV directs seront-elles maintenues ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe UC. – M. Jean-François Husson applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des transports.
M. Philippe Tabarot, ministre des transports. Monsieur le sénateur Marc Laménie, le train est un formidable outil d'aménagement du territoire et a vocation à le rester : je ne vous l'apprends pas, vous qui êtes un fin connaisseur du ferroviaire en France. (Applaudissements sur diverses travées.)
S'agissant de votre territoire et de celui de Mme la sénatrice Else Joseph, l'offre demeurera stable. La SNCF a confirmé le maintien de la desserte TGV en ce qui concerne Rethel, Charleville-Mézières et Sedan. Les deux trains directs auxquels les Ardennais demeurent attachés sont donc préservés.
Vous le savez, j'ai placé la qualité de service et la sûreté dans les transports au cœur de mon action, notamment à travers la loi que j'ai initiée ici même en tant que sénateur et promulguée comme ministre.
S'agissant des guichets physiques, plusieurs solutions sont possibles en fonction des spécificités des territoires : offices de tourisme, buralistes, commerces de proximité. Comme vous l'avez indiqué, ce sont bien les régions qui ont la main sur cette compétence.
À ce titre, je sais que la région Grand Est travaille à des alternatives, notamment avec La Poste de Rethel, située à moins de 500 mètres de la gare.
Au-delà de l'offre, l'enjeu porte sur l'infrastructure. Comme l'a rappelé le nouveau président-directeur général de la SNCF, M. Jean Castex, et comme son prédécesseur l'affirmait également, le réseau demeure la mère des batailles.
Dès ma prise de fonction, j'ai engagé une conférence de financement des infrastructures de transport. Vous m'interrogez sur les moyens que nous nous donnons. À la suite de cette conférence transpartisane, de grandes orientations ont été définies. C'est tout l'objet de la loi-cadre que nous préparons et qui vous sera prochainement présentée, ainsi que l'a rappelé le Premier ministre lors de sa déclaration de politique générale. À l'issue de la conférence a été acté le fléchage des péages ferroviaires vers le réseau, à hauteur de plus de 1,5 milliard d'euros d'ici à 2028, afin de résorber cette fameuse dette grise.
Vous le constatez, monsieur le sénateur, le Gouvernement n'abandonne pas les territoires, et encore moins nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes RDPI et Les Républicains.)
décentralisation budgétaire et aménagement du territoire
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Bernard Buis applaudit également.)
M. Jean-Yves Roux. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Il y a quelques jours, vous avez annoncé que vous proposerez au Parlement un nouvel acte de décentralisation et de déconcentration visant à clarifier les compétences entre l'État et les collectivités, à renforcer le rôle des préfets et à simplifier l'action locale. Toutefois, l'expérience montre que cet objectif soulève aussi la question de l'exercice des compétences constitutionnelles et des priorités de l'État.
Au Sénat, dès aujourd'hui, nous constatons une autre forme de décentralisation, plus subie : la décentralisation budgétaire de fait, qui interroge la cohérence du contrat liant l'État républicain à la diversité de ses territoires.
Plusieurs signaux d'alerte émergent : la situation critique des départements, associée à un risque de recentralisation ; la réduction de 30 % des missions d'aménagement dans le contrat de présence postale, qui fragilise surtout les zones de montagne et rurales ; la mise en œuvre du dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités territoriales (Dilico), combinée au gel de la TVA et à la hausse des cotisations salariales, qui fragilise les territoires industriels en pleine réindustrialisation ; le fonds d'investissement pour les territoires, qui ne garantit en rien la stabilité des priorités en matière de politique de la ville et de ruralité au sein des départements.
De plus, notre contrat commun se juge aussi à sa capacité à résister aux crises. Or la multiplication des risques climatiques et les menaces croissantes en matière de sécurité et de cybersécurité ne manqueront pas de redessiner nos territoires et d'en fragiliser durablement quelques-uns.
Mes chers collègues, oui à une clarification des compétences, mais avec qui ? Concernera-t-elle tous les acteurs locaux ou seulement ceux qui ont les moyens de tenir ?
Monsieur le Premier ministre, ma question n'est en rien provocatrice : dans un contexte de crise budgétaire majeure, comment comptez-vous préserver les principes et les actes d'un aménagement équilibré des territoires, dans un partenariat fort, responsable et prospectif ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.
Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation. Monsieur le sénateur Jean-Yves Roux, je vous remercie de votre question, qui anticipe sur les interrogations que nous devrons soulever.
Nous vivons aujourd'hui un moment irritant et douloureux : celui du budget. Dans cette séquence, nous devons faire en sorte d'aboutir à ce que j'ai appelé tout à l'heure un « budget de responsabilité et de frugalité ».
Alors que le Sénat va bientôt engager ses travaux sur ce budget, j'entends, dans vos questions, mesdames, messieurs les sénateurs, les suggestions et les idées qui sont les vôtres.
Vous demandez, en substance, comment nous pourrions faire autrement quand, pour l'heure, c'est surtout la fin du mois qui préoccupe.
Vous le savez, le Sénat a produit moult rapports extrêmement intéressants sur la question – d'autres, comme Éric Woerth ou Boris Ravignon, en ont fait également –, expliquant que nous pouvons sans doute retrouver la confiance de nos concitoyens, mais aussi des élus locaux, en travaillant autrement, dans la liberté et la responsabilité.
Avant de dire comment nous réformerons, demain, les dotations et les ressources des collectivités, qui, de fait, méritent d'être remises à plat, peut-être pouvons-nous travailler ensemble à partir de tous les matériaux qui nous ont été fournis, à savoir qui fait quoi et qui est responsable de quoi. Il arrive que de nombreux acteurs interviennent sur une même compétence, ce qui génère de la lenteur et des surcoûts. Nous pouvons donc entamer ensemble cette réflexion sur la décentralisation en nous demandant qui fait quoi.
Vous avez également rappelé un point important, qui est celui de la déconcentration.
À cet égard, il convient de donner au préfet de département un rôle de chef d'orchestre. En effet, il n'est plus possible qu'il y ait, dans notre pays, cinq services de l'État et trois agences qui émettent des avis différents, avec les maires au milieu de cette nasse ! Un décret a été pris afin de pallier cette difficulté.
Il nous faut maintenant entreprendre autrement et recourir à la norme de manière plus mesurée. Nous sommes tous concernés, car je pense que nous sommes collectivement responsables de certaines difficultés. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
assassinat de mehdi kessaci et narcotrafic