Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Chère Marion Canalès, il y avait une petite erreur de conjugaison dans votre propos : nous n’allons pas avoir une génération d’accros ; nous l’avons déjà !

Permettez-moi de vous faire part d’un témoignage personnel. J’ai une fille éducatrice en crèche. Dans ces établissements, il n’y a plus un seul enfant qui accepte de manger un yaourt non sucré ou sans fruit. Ils sont déjà accros ; c’est un combat quotidien. Certes, me direz-vous, on peut mettre un peu de confiture – nous avons une excellente filière en France – dans un yaourt. Non ! Si un enfant de deux ans ne peut pas manger un yaourt nature, c’est un problème, et le signe d’une véritable dépendance.

Oui, une taxation s’impose car, si les industries agroalimentaires mettent du sucre dans leurs produits, c’est pour rendre les enfants dépendants. Je pourrais vous citer un certain nombre d’émissions diffusées sur Arte qui montrent cette stratégie visant à étendre cette dépendance au sucre.

Dans le monde, le sucre est synonyme de colonialisme. Certes, quand on songe à l’esclavage et au commerce triangulaire, c’est d’abord le coton qui vient à l’esprit. Mais, historiquement, le colonialisme a d’abord eu pour origine le sucre ! Voyez ce qui s’est passé, par exemple à La Réunion. Il y a eu une véritable emprise coloniale pour imposer le sucre. Aujourd’hui encore, c’est l’un des tout premiers lobbys.

En tout état de cause, je tiens à lancer une alerte : la génération qui vient est accro au sucre.

Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour explication de vote.

Mme Florence Lassarade. À mon sens, il y a un peu de confusion dans ce débat.

Il n’y a pas de secteur plus réglementé que celui de la nutrition du petit enfant. Les laits en poudre sont spécialement étudiés pour coller au plus près aux besoins de l’enfant et se rapprocher autant que possible du lait maternel.

Et l’alimentation du petit est surveillée par le médecin tous les mois. Il y a des examens, avec des puéricultrices et des pédiatres : il en reste quelques-uns qui se consacrent à éduquer les parents à alimenter correctement l’enfant…

Le problème, comme le soulignait ma collègue Chantal Deseyne, c’est que l’on ne cuisine plus à la maison. L’alimentation idéale pour un enfant, c’est celle qui est préparée par sa mère ou son père ; ce n’est tout de même pas très compliqué de faire une banane pochée. Il y a des plats très simples à cuisiner !

C’est quand il quitte la maison, quand il va à la crèche ou à l’école, que l’enfant devient accro au sucre. Songeons aussi aux goûters d’anniversaire, où l’on distribue des bonbons.

À mes yeux, imposer de nouvelles obligations ou créer de nouvelles taxes sur les petits pots pour bébés, alors que les grandes marques font déjà le nécessaire depuis des années, c’est compliquer inutilement les choses. Ce n’est pas là que tout se joue. Le problème survient plus tard parce que l’enfant est sédentaire et boit du Coca-Cola. Il existe même des biberons de Coca !

Les petits pots de purée de fruits, qui sont le plus souvent sans sucres ajoutés, ce n’est pas vraiment le sujet.

Mme Florence Lassarade. Je pense sincèrement que nous créons des problèmes là où il n’y en a pas.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. Je connais la profession de notre collègue Florence Lassarade et je ne doute pas de son expertise en la matière.

Simplement, moi qui ne suis pas pédiatre, je lis aussi les travaux des scientifiques de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) ou du Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Tous font état de la présence de produits tels que du dioxyde de titane dans les laits pour bébés. Les produits pour bébés sont peut-être extrêmement contrôlés, chère Florence Lassarade, mais il y a manifestement des choses qui passent au travers des contrôles…

Je ne suis donc pas certaine que l’on puisse affirmer que la présence de sucre dans les pots pour bébés ne pose aucun problème de santé publique !

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.

Mme Audrey Bélim. Une enquête de l’association Consommation, logement et cadre de vie (CLCV) montre que l’offre pour bébés est globalement trop sucrée. Malheureusement, elle ne fait pas de distinction entre l’outre-mer et l’Hexagone. Il a fallu attendre l’adoption de la loi du 3 juin 2013 visant à garantir la qualité de l’offre alimentaire en outre-mer, dite loi Lurel, pour pouvoir plafonner le taux de sucre dans nos départements.

Si rien ne nous prouve que les produits sont plus sucrés dans nos territoires, rien ne prouve non plus qu’ils le sont moins. Par conséquent, une taxe sur le modèle de celle que proposent nos collègues serait très bénéfique pour nos territoires. Nous avons besoin d’un peu plus de constance.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 854 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 11 quater, et l’amendement n° 1700 rectifié n’a plus d’objet.

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 542 rectifié bis est présenté par Mme Pantel, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Masset et Roux et Mme Girardin.

L’amendement n° 1705 est présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 11 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section III du chapitre II du titre III de la deuxième partie du code général des impôts est complétée par un article 1613 ter… ainsi rédigé :

« Art. 1613. – I. – Est instituée une contribution perçue sur les boissons froides et préparations liquides pour boissons froides destinées à la consommation humaine :

« 1° Relevant des codes NC 2009 et NC 2202 du tarif des douanes ;

« 2° Contenant un seuil minimal de 150 milligrammes de caféine pour 1 000 millilitres, destinées à la consommation humaine ;

« 3° Conditionnées dans des récipients destinés à la vente au détail, soit directement, soit par l’intermédiaire d’un professionnel.

« II. – Le taux de la contribution est fixé à 100 € par hectolitre.

« Ce tarif est relevé au 1er janvier de chaque année à compter du 1er janvier 2027, dans une proportion égale au taux de croissance de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’avant-dernière année. Il est exprimé avec deux chiffres significatifs après la virgule, le deuxième chiffre étant augmenté d’une unité si le chiffre suivant est égal ou supérieur à cinq. Il est constaté par arrêté du ministre chargé du budget, publié au Journal officiel.

« III. – La contribution est due par la personne qui réalise la première livraison des produits mentionnés au I, à titre gratuit ou onéreux, en France, en dehors des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, de la Nouvelle-Calédonie, des Terres australes et antarctiques françaises et de l’île de Clipperton, à raison de cette première livraison.

« Est assimilée à une livraison la consommation de ces produits dans le cadre d’une activité économique. La contribution est exigible lors de cette livraison.

« IV. – La contribution est établie et recouvrée selon les modalités, ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d’affaires.

« V. – Le produit de cette taxe est affecté à la Caisse nationale d’assurance maladie mentionnée à l’article L. 221-1 du code de la sécurité sociale. »

La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 542 rectifié bis.

Mme Maryse Carrère. Alertée par les enseignants, les parents et les professionnels de santé, notre collègue Guylène Pantel souhaiterait interdire la vente de boissons énergisantes aux moins de 16 ans, comme le Royaume-Uni l’envisage déjà.

Dans l’immédiat, elle propose de taxer les boissons pouvant contenir l’équivalent de quatre tasses de café, qui exposent particulièrement les enfants à des risques tels que la tachycardie, l’hypertension, les troubles du rythme, les troubles psychiques, l’irritabilité, les anxiétés et les crises de panique.

Une étude parue en 2024 montre le lien de ces boissons avec des comportements à risques. Et la taxe qui avait été appliquée entre 2014 et 2017 avait permis de réduire la teneur en caféine de ces produits.

Cet amendement nous donne l’occasion de rouvrir le débat sur la protection des mineurs, afin d’inciter les industriels à limiter le sucre et la caféine dans leurs boissons. La taxe sur les boissons sucrées peut servir de modèle.

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l’amendement n° 1705.

Mme Corinne Féret. Cet amendement vise à instaurer une taxe comportementale sur les boissons énergisantes, afin d’inciter l’industrie à réduire la teneur en caféine, en taurine et autres substances stimulantes.

La consommation de boissons énergisantes n’est pas sans conséquences. Elle a des effets réels sur la santé de celles et ceux qui en consomment.

D’abord, ce sont les enfants et les adolescents qui sont de plus en plus touchés par ces produits. Cela représenterait près de 15 % de l’apport en caféine chez les enfants. Leur sensibilité aux effets de la caféine est pourtant bien plus importante que celle des adultes. Ils présentent donc des risques accrus d’intoxication et d’effets indésirables : troubles du sommeil, fatigue, somnolence, difficulté de concentration. Ces effets peuvent altérer leur capacité cognitive et, par ricochet, leurs performances scolaires. La consommation précoce de ces boissons peut également conduire les jeunes à développer des conduites addictives en les exposant très tôt aux effets psychotropes et à la recherche de sensations et de performances.

Chez les adultes aussi, les boissons énergisantes ont des conséquences nombreuses, y compris sur la santé mentale. Il est donc de notre devoir de sensibiliser et d’agir face à une consommation qui peut conduire à des phénomènes d’addiction et être source d’atteintes importantes à la santé.

Le dispositif envisagé dans cet amendement est inspiré de la taxe sur les boissons sucrées, telle que reprise dans le PLFSS pour 2025, qui prévoit trois paliers fortement progressifs destinés à encourager les industriels à proposer dans leurs produits des concentrations de sucre relevant du palier inférieur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. La fiscalité sur les produits concernés est déjà très importante, avec une taxation d’environ 100 euros par hectolitre. C’est très au-dessus, par exemple, de celle des boissons sucrées de type soda, qui est de 35 euros. L’efficacité de la nouvelle contribution proposée est incertaine s’agissant de produits déjà très fiscalisés.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 542 rectifié bis et 1705.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 1704, présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 11 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre 5 du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale est complété par une section 6 ainsi rédigée :

« Section 6

« Taxe sur les dépenses de publicité en faveur des produits alimentaires manufacturés et des boissons avec ajouts de sucres, de sel ou d’édulcorants de synthèse

« Art. L. 245-. – I. – Est instituée, à compter du 1er janvier 2025, une taxe sur les dépenses publicitaires portant sur la promotion de l’achat de produits alimentaires manufacturés et des boissons avec ajouts de sucres, de sel ou d’édulcorants de synthèse. Son produit est affecté à la branche maladie de la sécurité sociale.

« II. – Sont redevables de cette taxe les entreprises produisant, important ou distribuant en France des produits alimentaires manufacturés et des boissons avec ajouts de sucres, de sel ou d’édulcorants de synthèse et dont le chiffre d’affaires du dernier exercice est supérieur ou égal à 5 millions d’euros, hors taxe sur la valeur ajoutée.

« III. – Cette taxe est assise sur les frais d’achats d’espaces publicitaires, quelle que soit la nature du support retenu et quelle que soit sa forme, matérielle ou immatérielle, ainsi que les frais d’évènements publics et de manifestations de même nature.

« IV. – Le taux de la taxe est fixé à 1 % du montant hors taxes sur la valeur ajoutée des dépenses mentionnées au I.

« V. – Les modalités d’application de la taxe, notamment sur les produits alimentaires visés, sont précisées par arrêté pris après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail et de Santé publique France.

« VI. – Les modalités de recouvrement de la taxe sont précisées par décret ».

La parole est à M. Jean-Luc Fichet.

M. Jean-Luc Fichet. Par cet amendement, nous proposons de créer une taxe sur les publicités pour les produits alimentaires industriels et pour les boissons contenant des sucres, du sel et des édulcorants de synthèse. L’objectif est simple : contribuer au financement de la branche maladie de la sécurité sociale.

En 2023, sur les plus de 5,5 milliards d’euros dépensés en publicité par l’industrie agroalimentaire, une grande part concerne des produits trop gras, trop sucrés ou trop salés, comme le souligne le rapport Linjuste prix de notre alimentation, publié en 2024. Ce montant de 5,5 milliards d’euros est mille fois supérieur à ce qu’était le budget de communication du programme national nutrition santé (PNNS) en 2014, soit 5,5 millions d’euros !

Santé Publique France montrait déjà en 2020 que la moitié des investissements publicitaires portaient sur des produits de mauvaise qualité nutritionnelle, classés D ou E au Nutri-score. Autrement dit, la publicité contribue clairement à un environnement favorisant l’obésité. La publicité alimentaire influence profondément nos comportements, et c’est un secteur où se crée une grande partie de la valeur ajoutée de l’agroalimentaire.

Dans le contexte sanitaire, environnemental et social actuel, une régulation s’impose : interdiction aux heures où les enfants regardent la télévision, encadrement des promotions sur les réseaux sociaux et limitation des contenus visant les publics vulnérables.

Concrètement, prélever 1 % sur les 5,5 milliards d’euros investis dans ces campagnes publicitaires rapporterait 50 millions d’euros supplémentaires. Ce n’est pas excessif, surtout quand on sait que la collectivité dépense aujourd’hui dix fois plus, soit 11,7 milliards d’euros, pour prendre en charge les maladies provoquées par la mauvaise alimentation, comme le diabète et l’obésité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous entamons l’examen d’une série d’amendements portant non plus sur les aliments eux-mêmes, mais sur la publicité en leur faveur.

Cet amendement et les suivants, sous réserve de certaines modulations, visent à taxer les dépenses de publicité pour les aliments trop riches en sucre, en sel ou en matière grasse. Je vais donc vous faire part d’une position de principe qui vaudra aussi pour tous les amendements ayant globalement le même objet.

Encore une fois, je crois plus utile de réguler le marketing alimentaire et d’encadrer les publicités pour les mauvais aliments que de taxer les publicités. L’impôt ne fait pas une politique de santé publique ! Taxer les dépenses de publicité n’améliorera pas la santé nutritionnelle des Français. D’ailleurs, les industriels recourent de plus en plus aux influenceurs – vous l’avez souligné précédemment à propos d’un autre sujet – et développent de nouvelles stratégies marketing qui rendent ce type de taxes inefficaces.

De plus, la rédaction de certains de ces amendements est trop imprécise et ne définit pas clairement le périmètre des aliments concernés.

Je voudrais enfin profiter de l’occasion pour interpeller la ministre de la santé sur les travaux de Santé Publique France, qui a émis des recommandations intéressantes pour encadrer le marketing alimentaire auprès des publics jeunes. Cela mériterait que le Gouvernement s’en saisisse.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je comprends les objectifs de santé publique des auteurs de cet amendement.

Mes prédécesseurs avaient commencé à travailler sur la prévention et sur la lutte contre le surpoids et l’obésité des jeunes, notamment au travers du PNNS ; je présenterai le prochain plan dans les semaines à venir.

Sur le marketing alimentaire, les réflexions sont encore en cours dans le cadre de l’élaboration de la future stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat (Snanc), afin de réduire l’exposition des enfants et des adolescents aux publicités en faveur de produits trop gras, trop sucrés ou trop salés et de lutter contre l’obésité. Nous allons continuer à avancer sur le sujet.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement qui vise à mettre en place une nouvelle taxation.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1704.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 1230 est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° 1367 est présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.

L’amendement n° 1693 est présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 11 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 2133-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 2133-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 2133-1-…. – Les messages publicitaires et activités promotionnelles en faveur de produits alimentaires et boissons trop riches en sucre, sel ou matières grasses et ayant notamment pour cible les enfants de moins de seize ans sont soumis au versement d’une contribution dont le produit est affecté à la branche maladie de la sécurité sociale.

« Cette contribution est assise sur le montant annuel des sommes destinées à l’émission et à la diffusion de ces messages, hors remises, rabais, ristournes et taxes sur la valeur ajoutée, payées par les annonceurs. Le montant de cette contribution est égal à 10 % du montant de ces sommes.

« Le fait générateur est constitué par la diffusion des messages publicitaires ou la mise à disposition des documents visés au premier alinéa. La contribution est exigible au moment du paiement par l’annonceur aux régies ou au moment de la première mise à disposition des documents visés. La contribution est déclarée, liquidée, recouvrée et contrôlée selon les procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe. Il est opéré un prélèvement de 10 % effectué par l’État sur le montant de cette contribution pour frais d’assiette et de recouvrement.

« Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État pris après avis de Santé publique France. »

La parole est à M. Pierre Barros, pour présenter l’amendement n° 1230.

M. Pierre Barros. En France, environ 4 % des enfants et adolescents sont obèses, et 17 % en surpoids. Ces enfants sont exposés très tôt à des publicités pour des produits riches en sucre, en sel ou trop gras.

L’impact de la publicité sur ces jeunes est encore plus puissant que sur les adultes, et les industriels de l’agroalimentaire le savent bien. Ces publicités influencent très fortement leurs choix alimentaires, renforcent les comportements addictifs et contribuent au développement de pathologies à long terme, qui nécessitent souvent des chirurgies bariatriques extrêmement coûteuses.

Une telle situation nous coûte collectivement. Les pathologies associées comme le diabète, les maladies cardiovasculaires ou les problèmes articulaires coûtent des milliards d’euros à la sécurité sociale. Pourquoi laisser les industriels éviter toute contribution à cette charge ?

Cet amendement vise à mettre en place une solution qui nous semble équilibrée : faire contribuer les annonceurs qui s’adressent aux moins de 16 ans avec des messages pour des aliments trop sucrés à hauteur de 10 % des sommes investies et affecter le produit de cette contribution à la branche maladie. Ceux qui exploitent le marketing pour influencer les enfants financeraient ainsi une partie du coût à la charge de la collectivité.

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Souyris, pour présenter l’amendement n° 1367.

Mme Anne Souyris. La publicité, c’est le nerf de la guerre. Ceux qui gagnent le plus d’argent dans cette histoire, ce ne sont pas les industriels ; ce sont les publicitaires. C’est la double peine !

Oui, nous assumons de parler de taxes. Qu’est-ce qui a fait le succès de la loi Évin ? C’est aussi l’interdiction de la publicité sur l’alcool et le tabac.

Comme nous ne parvenons pas à interdire les publicités sur un certain nombre de produits, nous misons sur la dimension dissuasive de la taxation pour réduire leur influence. Il est important que l’argent public permette de financer les politiques, ô combien nécessaires, de prévention.

Dans une autre vie, j’ai été professeure des écoles. Je voyais des enfants arriver en petite section la bouche pleine de dents cariées jusqu’à l’os à cause de toutes les nourritures transformées qu’ils avaient avalées depuis leur naissance. Ne faut-il pas réfléchir au fait que certains continuent à faire des publicités qui leur sont principalement destinées ?

Pourquoi ne pas s’inspirer du principe pollueur-payeur ? Parmi ceux qui « polluent » et qui doivent payer, il y a évidemment les producteurs et les vendeurs, mais, dans le cas des publicitaires, c’est encore plus grave ; ce sont les premiers responsables de l’accroissement de la consommation de ce type de produits.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 1693.

Mme Annie Le Houerou. Tous les groupes de gauche se rejoignent sur l’objectif d’accentuer la prévention alimentaire et proposent d’instituer une taxe sur les publicités pour les aliments trop gras, trop sucrés ou ultra-transformés.

En effet, si, pour l’ensemble des Français, 31,1 % des apports énergétiques sont issus d’aliments ultratransformés (AUT), ce taux monte à 46 % chez les enfants.

Les personnes qui consomment le plus ces aliments ont un apport plus élevé en sucre ajouté, soit 17,17 grammes par jour, et leur consommation de fibres est plus faible, soit moins de 4 grammes par jour. Or, pour chaque augmentation de 10 % de la proportion de sucre ajouté dans l’alimentation, le risque de décès prématuré augmente de 2,7 % et le risque de maladies cardiovasculaires croît de 12 %.

Selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), 77 % des produits transformés examinés contiennent au moins un ingrédient sucrant ou un vecteur de goût sucré. En outre, 20 % à 30 % des adultes consomment plus de 100 grammes de sucre par jour.

Le surpoids et l’obésité sont reconnus comme la cinquième cause de mortalité par l’OMS et l’OCDE, et ils réduisent de deux à trois ans la durée de vie des Français.

Selon la direction générale du Trésor, le coût social de l’obésité est estimé à 20 milliards d’euros. Nous avons donc d’importantes recettes à récupérer. Aujourd’hui, 75 % des enfants en surpoids ou obèses sont issus des catégories populaires et inactives. Ces chiffres sont la conséquence d’une politique de prix bas qui favorise une alimentation malsaine au détriment des produits frais.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je voudrais tout de même signaler une hypocrisie. Vous prétendez qu’il ne sert à rien de taxer la publicité, mais comment se fait-il que cette dernière coûte si cher et qu’on ait à subir des couloirs publicitaires complètement dingues ? Si autant d’argent est mis dans la publicité, c’est bien parce qu’elle est efficace !

Les publicités pour les hamburgers et les produits sucrés comportent toujours un bandeau d’avertissement, écrit en petits caractères, invitant le consommateur à ne pas manger des produits excessivement gras, sucrés et salés. Il n’y a rien de plus hypocrite : c’est seulement un moyen de s’acheter une bonne conscience !