M. Xavier Iacovelli. C’est l’objet de mon prochain amendement !

Mme Nadia Sollogoub. Très bien !

M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. Retravaillons ce sujet plutôt que de créer de nouvelles taxes.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. Naturellement, nous voterons ces amendements.

Mes chers collègues, un chercheur du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) a mené récemment une expérience tout à fait éclairante. Il a rendu des rats accros à la cocaïne et au sucre, puis il a entrepris de les sevrer. Or, quand ils l’ont pu, la première chose sur laquelle ces rats se sont rués, c’est le sucre.

Nous avons parlé de l’obésité, des maladies cardiovasculaires et, plus largement, des problèmes de santé provoqués par la consommation excessive de sucre, qui est par nature addictif. C’est plus fort que nous : le sucre nous rend vraiment accros, qui que l’on soit, quels que soient les produits.

Nous parlerons plus particulièrement des petits pots pour bébés dans la suite de cette discussion. Dans l’ensemble, s’il y a trop de sucre dans notre alimentation, c’est parce que le sucre nous pousse à consommer encore et encore.

Je le répète, nous sommes face à un véritable problème d’addiction. Il ne s’agit pas seulement de lutter contre l’obésité et les maladies cardiovasculaires évoquées.

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.

Mme Anne Souyris. Amendement après amendement, j’entends répéter comme un mantra que les taxes comportementales ne servent à rien. Or ce n’est pas vrai !

Mes chers collègues, ce n’est pas parce que vous l’affirmez tous les uns après les autres que ces taxes ne servent à rien que c’est vrai. Beaucoup de pays ont pris de telles mesures. Beaucoup d’études ont été consacrées à cette question. Le Sénat lui-même y a consacré un rapport.

Peu après mon arrivée au Sénat, j’ai entendu Mme Doineau nous parler avec intérêt des taxes comportementales. J’ai également assisté à de nombreuses auditions tendant à démontrer qu’elles fonctionnent.

Nous disposons d’ailleurs d’un exemple : le tabac. C’est le seul produit pour lequel on a sérieusement entrepris cet effort, et c’est le seul pour lequel on a obtenu des résultats. Les quelques mesures prises, à ce titre, pour réduire la consommation de sucre ont aussi porté leurs fruits. C’est un fait. On peut estimer que cela dérange certaines filières…

Mme Sophie Primas. Ce n’est pas l’objet de ces amendements !

Mme Anne Souyris. On revient toujours à ces considérations. Mais, même si tel est le cas, les taxes comportementales donnent des résultats en matière de santé publique.

Il y a sans doute d’autres enjeux, que nous ne manquerons pas d’étudier. En tout cas, avec de tels dispositifs, on répond bien aux problèmes de santé publique.

Madame Deseyne, vous faites valoir que ce sont les pauvres qui en pâtiront : on nous a opposé le même argument au sujet du tabac ! Mais les pauvres pâtissent d’abord des méfaits du sucre, du tabac et de l’alcool. Ce sont eux qui en sont les plus malades et qui en meurent le plus. (Mme Sophie Primas proteste.) Ils ne seront pas les victimes d’une telle taxe : bien au contraire, cette dernière nous permettra de les protéger.

Enfin, chers collègues de la droite sénatoriale, vous ne cessez de répéter le grand mot de prévention : formidable ! Mais avec quel argent mettrez-vous en œuvre cette politique, puisque vous ne voulez aucune des recettes que l’on vous propose ? Je ne vois pas quand et comment l’on pourra mener des actions de prévention.

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.

Mme Audrey Bélim. Je ne reviendrai pas sur les problèmes de pouvoir d’achat et de vie chère qui frappent mon territoire. Je pose simplement cette question : pourquoi les industriels de l’agroalimentaire mettent-ils tant de sucre dans leurs produits ? Parce que le sucre permet de conserver les aliments à moindres frais – il coûte moins cher que les conservateurs – et, surtout, parce qu’il nous rend accros. C’est pourquoi tant de consommateurs continuent d’acheter des produits trop sucrés.

Les taxes comportementales ont pour but d’infléchir à la fois les choix des consommateurs et ceux des industriels. C’est une manière de dire aux fabricants qu’il est temps de revoir la composition de leurs produits ; qu’ils doivent arrêter de faire des profits en les sucrant outre mesure.

Mme Sophie Primas. Il y a le Nutri-score !

Mme Audrey Bélim. Il s’agit donc d’un premier pas. En créant ce type de taxes, nous aurons peut-être gagné une première bataille historique.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Je précise que les produits fabriqués directement par les artisans de bouche, ainsi que les productions bénéficiant d’une AOP ou d’une IGP, sont exclus du champ de l’amendement n° 814 rectifié.

En outre, ne seraient taxées que les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 10 millions d’euros. On éviterait ainsi de fragiliser les acteurs locaux, notamment les PME.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 857 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1574 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 562 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 814 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1526 rectifié et 1703.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 179 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Madame la ministre, mes chers collègues, il est presque minuit. Je vous propose de prolonger notre séance jusqu’à minuit et demi.

Il n’y a pas d’observation ?…

Il en est ainsi décidé.

L’amendement n° 1702, présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 11 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section III du chapitre II du titre III de la deuxième partie du code général des impôts est complétée par un article 1613… ainsi rédigé :

« Art. 1613. – I. – Est instituée une contribution perçue sur les produits alimentaires transformés destinés à la consommation humaine contenant des additifs alimentaires à risques.

« II. – La contribution est due par la personne qui réalise la première livraison des produits mentionnés au I, à titre gratuit ou onéreux, en France, en dehors des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, de la Nouvelle-Calédonie, des Terres australes et antarctiques françaises et de l’île de Clipperton, à raison de cette première livraison.

« Est assimilée à une livraison la consommation de ces produits dans le cadre d’une activité économique. La contribution est exigible lors de cette livraison.

« III. – Le montant de la taxe est relevé au 1er janvier de chaque année à compter du 1er janvier 2026, dans une proportion égale au taux de croissance de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’avant-dernière année. Ce montant est exprimé avec deux chiffres après la virgule, le deuxième chiffre étant augmenté d’une unité si le chiffre suivant est égal ou supérieur à cinq. Il est constaté par arrêté du ministre chargé du budget publié au Journal officiel.

« IV. – Cette taxe est recouvrée et contrôlée sous les mêmes règles, conditions, garanties et sanctions qu’en matière de contributions indirectes.

« V. – Le produit de cette taxe est versé à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale.

« VI. – Le tarif de la taxe mentionnée au I et ses modalités d’acquittement sont déterminés par décret. Ce tarif est d’au moins 1 euro par gramme d’additifs alimentaires à risques ajouté pour chaque kilogramme vendu des produits mentionnés au I. »

« VII. – Un décret établit la liste des additifs alimentaires qui, malgré leur autorisation par l’Autorité européenne de sécurité alimentaire, présentent selon la communauté scientifique des risques pour la santé.

« Cette liste est mise à jour tous les ans à compter du 1er janvier 2026.

« Au 1er janvier 2026, elle contient au moins les vingt additifs alimentaires les plus à risques. »

La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Par cet amendement, nous proposons de nouveau une taxe sur les aliments transformés contenant des additifs. Pour parler des problèmes que posent ces aliments, qui relèvent indéniablement du PLFSS, nous n’avons pas d’autre choix que de défendre de tels dispositifs, sachant que les demandes Madamede rapport sont systématiquement rejetées. En outre, la taxe est un des leviers permettant d’agir sur les modes de production.

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a analysé, entre 2008 et 2016, un grand nombre de produits transformés : 78 % d’entre eux contenaient au moins un additif. De son côté, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) souligne dans une étude de 2025 que certaines combinaisons, ou certains cocktails d’additifs, trouvées dans des produits ultratransformés pourraient être associées à un risque accru de diabète de type 2.

L’Agence européenne de sécurité alimentaire (EFSA) fournit des éléments scientifiques à la Commission européenne et aux États membres pour statuer sur l’autorisation des différents additifs et leur niveau d’usage. Mais, pour de nombreux additifs autorisés, la controverse scientifique perdure, d’autant que, de l’aveu même de l’EFSA, l’évaluation reste trop souvent dépendante des données fournies par les industriels.

Ainsi, les tests demandés ne couvrent que partiellement les toxicités possibles. Les effets cumulatifs à long terme sont sous-estimés, de même que l’effet cocktail résultant de l’exposition à de multiples additifs. Quant aux toxicités plus complexes, comme l’effet perturbateur endocrinien ou l’effet sur le microbiote, elles ne sont pas suffisamment prises en compte ; et, quand elles le sont, c’est souvent de manière inadaptée. Enfin, je rappelle que 30 % des 315 additifs autorisés avant 2019 restent à réévaluer.

Selon un sondage Eurobaromètre 2025 commandé par l’EFSA, 35 % des citoyens de l’Union européenne déclarent que les additifs comptent parmi leurs principales préoccupations en matière de sécurité alimentaire.

Mes chers collègues, vous pouvez le constater : par cet amendement, nous entendons répondre à une demande majeure, dans la droite ligne du rapport d’information que nos collègues Mmes Deseyne et Devésa ont consacré au surpoids et à l’obésité, avec notre ancienne collègue Michelle Meunier.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ma chère collègue, avec cet amendement, vous appelez notre attention sur les additifs à risque. Mais les produits dangereux pour le consommateur n’ont pas lieu d’être taxés : ils doivent être interdits …

Mme Annie Le Houerou. Ils sont là !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Certes, mais des seuils existent : les associations et les organismes scientifiques doivent intervenir pour obtenir l’interdiction des produits qui dépassent les limites autorisées et, de ce fait, se révèlent dangereux.

Peut-être faut-il opter pour un encadrement plus strict. Peut-être faut-il revoir certains de ces seuils à la baisse, mais – je le répète – la taxation n’est pas le bon outil. Il faut avant tout interdire les aliments dangereux pour la santé humaine. Aussi, la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je suis avec beaucoup d’attention les travaux et les recherches sur ces additifs. S’il est avéré que ces produits présentent un risque, il faudra non pas les taxer, mais les interdire.

Nous aurons un peu plus tard le même débat, tout aussi intéressant, sur la nicotine : quand il est démontré qu’un produit est dangereux pour la santé, à plus forte raison s’il n’est pas nécessaire, nous devons non pas le taxer, mais l’interdire. (Mme la rapporteure générale acquiesce.)

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. J’aimerais rebondir sur les propos de Mme la ministre.

J’ai déposé un amendement, qui a été déclaré irrecevable, visant à prévoir une surtaxation du protoxyde d’azote.

En effet, à ce stade, nous n’avons pas pu obtenir l’interdiction de ce produit, dont la dangerosité et les conséquences néfastes sur la santé sont pourtant avérées. Il y a bien une proposition de loi à l’Assemblée nationale, une autre au Sénat, mais aucun texte législatif d’initiative gouvernementale, moyennant quoi la vente de protoxyde d’azote, qui devrait être réservée aux professionnels et interdite aux particuliers, demeure insuffisamment régulée.

Nous sommes au Parlement : quand on ne peut pas obtenir une interdiction, on propose une taxe. Malheureusement, l’amendement que j’ai déposé en ce sens a été déclaré irrecevable, car je n’avais pas prévu d’affectation pour la nouvelle taxe envisagée.

Mais le dépôt de mon amendement était d’abord un cri du cœur !

Nous souhaitons une interdiction ? Nous ne l’obtenons pas ! Nous proposons, à défaut, une taxation ? Nous ne l’obtenons pas. Nous demandons a minima un rapport sur le sujet ? Nous ne l’obtenons pas. Mais comptez tout de même sur nous pour continuer à travailler et à défendre nos convictions avec énergie !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1702.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 854 rectifié, présenté par MM. Iacovelli, Buis et Rambaud, Mme Aeschlimann, M. Lévrier et Mme Havet, est ainsi libellé :

Après l’article 11 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – La section III du chapitre II du titre III de la deuxième partie du code général des impôts est complétée par un article 1613 … ainsi rédigé :

« Art. 1613 – I. – Il est institué une contribution perçue sur les préparations alimentaires non médicamenteuses présentées comme spécifiquement destinées aux besoins des nourrissons et des enfants en bas âge contenant des sucres ajoutés.

« II. – La contribution est due par la personne qui réalise la première livraison des produits mentionnés au I, à titre gratuit ou onéreux, en France, en dehors des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, de la Nouvelle-Calédonie, des Terres australes et antarctiques françaises et de l’île de Clipperton, à raison de cette première livraison.

« Est assimilée à une livraison la consommation de ces produits dans le cadre d’une activité économique. La contribution est exigible lors de cette livraison.

« III. – Le tarif de la contribution mentionnée au I est le suivant :

QUANTITÉ DE SUCRE

(en kg de sucre ajoutés par quintal de produits transformés)

TARIF APPLICABLE

(en euros par quintal de produits transformés)

Inférieur à 5

4

Entre 5 et 8

21

Au-delà de 8

35

« Pour le calcul de la quantité en kilogrammes de sucres ajoutés, celle-ci est arrondie à l’entier le plus proche. La fraction de sucre ajouté égale à 0,5 est comptée pour 1.

« Les tarifs mentionnés dans le tableau du deuxième alinéa et au troisième alinéa du présent III sont relevés au 1er janvier de chaque année dans une proportion égale au taux de croissance de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’avant-dernière année.

« Ces montants sont exprimés avec deux chiffres après la virgule, le deuxième chiffre étant augmenté d’une unité si le chiffre suivant est égal ou supérieur à cinq.

« IV. – La contribution est établie et recouvrée selon les modalités, ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d’affaires.

« V. – Le produit de cette contribution est affecté à la Caisse nationale de l’assurance maladie. »

II. – Le présent article entre en vigueur à compter du 1er juillet 2026.

La parole est à M. Xavier Iacovelli.

M. Xavier Iacovelli. M. le vice-président Alain Milon a évoqué précédemment les nourrissons. Cet amendement a précisément pour objet d’instituer une taxe sur les sucres ajoutés contenus dans les produits alimentaires destinés aux nourrissons et aux enfants de 1 an à 3 ans.

L’objectif est simple : protéger la santé des tout-petits en limitant l’exposition précoce au sucre, qui n’a aucune justification nutritionnelle à cet âge. Le dispositif envisagé ne concerne évidemment pas les ingrédients naturellement sucrants, comme les fruits ou le miel ; seuls sont visés les sucres ajoutés.

Ces derniers sont très présents dans l’alimentation des jeunes enfants, et ce malgré les recommandations de l’OMS, qui préconise de les éviter autant que possible à cet âge.

Les constats, chers collègues, sont alarmants. Selon une enquête publiée au mois d’octobre 2023, ce sont 22 % des préparations céréalières et 14 % des produits à base de fruits destinés aux jeunes enfants qui contiennent des sucres ajoutés. Il arrive même qu’une « faible teneur en sucre » soit alléguée alors que le produit contient beaucoup de sucres ajoutés, ce qui peut induire les parents en erreur.

Les exemples sont frappants. Des yaourts « dès 12 mois » affichent 6,1 grammes de sucre pour 100 grammes. D’autres yaourts, « dès 8 mois », montent à 10 grammes de sucre pour 100 grammes. Et d’autres poudres cacaotées ou biscuits « dès 10 mois » atteignent plus de 30 grammes de sucre pour 100 grammes. Tous ces produits contiennent des sucres ajoutés alors que des produits équivalents sans sucre existent déjà sur le marché !

La mesure que nous proposons est donc cohérente, incitative et protectrice pour les enfants. En taxant les sucres ajoutés sur les produits destinés aux tout-petits, nous encourageons les industriels à reformuler leurs recettes ou à indiquer les produits sur le marché qui n’en contiennent pas. Nous aidons donc les parents à faire un choix plus sain, et nous contribuons à prévenir, dès le plus jeune âge, le surpoids, l’obésité et toutes les mauvaises habitudes alimentaires que nous retrouverons une fois adultes.

Mme la présidente. L’amendement n° 1700 rectifié, présenté par M. Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 11 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – La section III du chapitre II du titre III de la deuxième partie du code général des impôts est complétée par un article 1613 … ainsi rédigé :

« Art. 1613 – I. – Est instituée une contribution perçue sur les aliments destinés aux nourrissons et aux enfants en bas âge contenant des sucres ajoutés.

« II. – La contribution est due par la personne qui réalise la première livraison des produits mentionnés au I, à titre gratuit ou onéreux, en France, en dehors des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, de la Nouvelle-Calédonie, des Terres australes et antarctiques françaises et de l’île de Clipperton, à raison de cette première livraison.

« Est assimilée à une livraison la consommation de ces produits dans le cadre d’une activité économique. La contribution est exigible lors de cette livraison.

« III. – Le tarif de la contribution mentionnée au I est le suivant :

QUANTITÉ DE SUCRE

(en kg de sucre ajoutés par quintal de produits transformés)

TARIF APPLICABLE

(en euros par quintal de produits transformés)

Inférieure à 5

4

Entre 5 et 8

21

Au-delà de 8

28

« Pour le calcul de la quantité en kilogrammes de sucres ajoutés, celle-ci est arrondie à l’entier le plus proche. La fraction de sucre ajouté égale à 0,5 est comptée pour 1.

« Les tarifs mentionnés dans le tableau du deuxième alinéa du III sont relevés au 1er janvier de chaque année, à compter du 1er janvier 2026, dans une proportion égale au taux de croissance de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’avant-dernière année.

« Ces montants sont exprimés avec deux chiffres après la virgule, le deuxième chiffre étant augmenté d’une unité si le chiffre suivant est égal ou supérieur à cinq.

« IV. – La contribution est établie et recouvrée selon les modalités, ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d’affaires.

« V. – Le produit de cette contribution est affecté à la Caisse nationale de l’assurance maladie. »

La parole est à Mme Marion Canalès.

Mme Marion Canalès. Cet amendement a le même objet que celui de M. Iacovelli.

L’OMS rappelle depuis 2022 que les produits destinés à l’alimentation infantile ne doivent contenir aucun sucre ; c’est clair et net. Ainsi que mon collègue vient de le souligner, les sucres ajoutés n’apportent aucune plus-value. Nous proposons donc d’instituer une taxe sur ce type de produits, car il y en a toujours, malgré les recommandations de l’OMS.

Peut-être faudrait-il plutôt envisager un système de bonus-malus, sur le modèle du bonus-malus écologique : ceux qui respectent leurs obligations n’auraient pas de malus ; ceux qui, malgré les recommandations, continuent d’ajouter du sucre finiraient par en avoir un.

Je pense qu’il s’agit d’un véritable enjeu de santé publique, dans un contexte de prévalence du surpoids. Nous sommes en train de créer une génération d’accros au sucre ! Aujourd’hui, quand on met une cuillérée de produits infantiles dans la bouche d’un bébé, on accroît la dépendance future au sucre de sa génération.

Voyez également le rebond d’adiposité auquel nous sommes confrontés aujourd’hui ; de plus en plus d’enfants ont un poids largement supérieur à ce qu’il devrait être. Nous allons avoir une génération d’enfants qui ne seront pas en bonne santé de ce point de vue…

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je remercie les auteurs de ces deux amendements. Je suis en effet particulièrement sensible au problème de l’excès de sucre dans les aliments pour les tout-petits. Comme je le soulignais tout à l’heure, cela commence dès le plus jeune âge : on administre du sucre aux enfants, et ils deviennent accros.

Ce qui nous a le plus scandalisés, c’est que même les petits pots de légumes contiennent du sucre. Je suis outrée !

À titre personnel, je serais plutôt favorable aux propositions de nos collègues, en particulier à l’amendement n° 854 rectifié, qui me paraît mieux-disant. J’émets donc un avis de sagesse sur ce dernier et je demande le retrait de l’amendement n° 1700 rectifié à son profit.

Je souhaite toutefois vous faire part d’une difficulté. Certains enfants souffrant de carences ou d’allergies ont des besoins spécifiques en matière alimentaire. Or les produits concernés – je pense par exemple à des laits spéciaux –, qui sont nécessaires dans certains cas, seraient eux aussi taxés en cas d’entrée en vigueur du dispositif proposé, étant donné que la rédaction de l’amendement ne prévoit aucune dérogation.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je partage les préoccupations des auteurs de ces deux amendements quant à l’excès de sucre ingéré et au risque d’addiction des jeunes générations.

Je souhaite néanmoins attirer l’attention de la Haute Assemblée sur les difficultés de mise en œuvre pratique des mesures envisagées. Il est proposé de taxer certains produits en fonction du taux de sucres ajoutés. Or, sur les petits pots, la teneur en sucres ajoutés n’est pas indiquée. Une telle taxe ne serait donc pas applicable.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour explication de vote.

M. Xavier Iacovelli. Je remercie Mme la rapporteure générale de son avis de sagesse.

J’entends ses observations sur les besoins spécifiques des enfants souffrant de carences ou d’allergies. Simplement, comme je l’ai rappelé, il existe déjà sur le marché des produits contenant des ingrédients naturellement sucrants, par exemple à base de fruits ou de miel. Voilà qui permet, me semble-t-il, de répondre aux inquiétudes, que je comprends parfaitement, de Mme la rapporteure générale.

Encore une fois, l’idée est de taxer les sucres ajoutés, dont la présence ne se justifie absolument pas dans les produits alimentaires pour nourrissons.

Madame la ministre, des mesures de clarification s’imposent. Vous avez raison : à ce stade, il n’y a aucune obligation d’indiquer la teneur en sucres ajoutés des produits. Il est d’ailleurs hallucinant que l’on n’ait pas obligé l’industrie agroalimentaire à afficher les éléments nutritifs des petits pots pour enfants.

Mais libre au Gouvernement de le faire ! Cela ne relève pas de la compétence des parlementaires dans le cadre de l’examen d’un PLFSS ; il nous appartient, pour notre part, de nous prononcer pour ou contre la création de recettes supplémentaires ou la réduction des dépenses. En l’occurrence, il s’agirait plutôt d’une mesure d’ordre réglementaire.

D’ailleurs, vous pourriez peut-être, si le Sénat avait la sagesse d’adopter cet amendement, vous engager, dans le cadre de la navette parlementaire, à faire en sorte que les professionnels de l’industrie agroalimentaire affichent l’ensemble de la composition nutritionnelle des petits pots pour enfants.