La commission des affaires européennes a nommé M. Ronan Le Gleut et Mme Karine Daniel pour réaliser un travail de contrôle sur l’initiative des Universités européennes.
Le rapport d'information de M. Ronan Le Gleut et Mme Karine Daniel a été adopté le 17 octobre 2024.
Pourquoi ce contrôle ?
Cette initiative des Universités européennes – qui fait suite au discours de la Sorbonne prononcé par le président de la République Emmanuel Macron en 2017 - a été lancée officiellement par la Commission européenne en 2018, par le biais d’un premier appel à projet.
Depuis lors, quatre appels à projet ont été lancés (dont un actuellement en cours) visant à financer des alliances d’établissements d’enseignement supérieur de l’Union européenne et de certains pays européens. Ces établissements se regroupent ainsi pour mener des actions de coopération approfondie impliquant l’ensemble ou une partie de leurs domaines d’activités (formation, recherche, innovation).
L’objectif de la Commission européenne devrait ainsi être atteint d’ici 2025, à savoir la constitution de 60 alliances d’universités européennes, impliquant 10 % de l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur européens.
Après six années d’existence, la commission des affaires européennes du Sénat a jugé important de conduire une première évaluation de ce dispositif, tâche qu’elle a confiée aux rapporteurs Ronan Le Gleut et Karine Daniel en vue d’établir certaines perspectives et recommandations.
Dans le cadre de leur mission de contrôle, les rapporteurs s’intéresseront aux avancées permises par cette initiative des universités européennes pour les établissements concernés - en terme de formation, de mobilité, ou d'attractivité -, mais également aux difficultés rencontrées sur le plan du financement ou de la gouvernance notamment.
Les questions du diplôme européen et du statut juridique des alliances seront également au cœur de leurs travaux, qui s’appuieront sur les retours des acteurs concernés par le dispositif par le biais d’auditions ou de contributions écrites.
Quels constats et recommandations ?
Qualifiée par certains de « deuxième révolution » après le programme Erasmus, l’initiative des universités européennes constitue indéniablement un vecteur de transformation de l’enseignement supérieur français et européen. Plus de 500 établissements représentant 35 pays sont impliqués dans ces 64 universités européennes.
Le premier bilan qui peut être fait de ce dispositif se révèle globalement très positif. La vertu « transformatrice » de ces alliances apparaît indéniable et un engouement se constate pour cette initiative dans les établissements, qu’ils soient ou non membres d’alliances.
Le développement des alliances européennes se heurte néanmoins à un certain nombre d’obstacles :
- Un financement incertain qui questionne le modèle économique des alliances et leur pérennité, une organisation « en silo » contraignante et un sous-financement du volet recherche ;
- Une gouvernance fragile, qui pâtit de l’absence de structure ou de statut juridique adapté ;
- Une mise en œuvre complexe des programmes et diplômes conjoints, non résolue par le processus de Bologne ;
- Une reconnaissance insuffisante de l’engagement du personnel et une mobilisation parfois difficile de la communauté universitaire ;
- Une implication différente des partenaires de l’alliance.
A l’aune de ce constat, les rapporteurs préconisent d’institutionnaliser les alliances européennes pour les inscrire dans le temps long et y inclure à terme tous les établissements volontaires. En pratique, les rapporteurs formulent les recommandations suivantes :
- Pérenniser et simplifier le modèle de financement des alliances : consolider le modèle économique des alliances, afin d’en assurer la pérennité et de mettre fin à la fragmentation des financements ;
- Mieux prendre en compte le volet « recherche » : renforcer cette dimension pour que les établissements d’enseignement supérieur jouent pleinement leur rôle dans le développement de l’espace européen de la recherche ;
- Revoir la gouvernance et le statut : mettre en place un mode de gouvernance et/ou un statut juridique pour le développement des alliances, en optant pour un cadre règlementaire adapté aux objectifs et spécificités de chacune d’entre elles ;
- Encourager la mise en œuvre de programmes et diplômes conjoints, d’une part via un recours accru à l’approche européenne d’assurance qualité et une réforme des lignes directrices (ESG - European Standards and Guidelines) pour y inclure une dimension recherche et employabilité, et d’autre part via une simplification des réglementations nationales, sur la base d’une coopération entre États membres, en veillant au respect de certaines spécificités nationales ;
- Miser sur le label / diplôme européen, un outil nécessaire pour encourager la mise en place de diplômes conjoints ;
- Encourager d’autres formes de coopération universitaire européenne que les diplômes conjoints, telles que l’internationalisation des programmes nationaux, la pratique des micro‑certifications, ou le développement des mobilités virtuelles ou hybrides ;
- Mieux reconnaître l’engagement du personnel dans les projets de coopérations transnationales, notamment par le biais de dotations spécifiques ou de primes ;
- Généraliser le modèle des alliances : donner à tous les établissements qui le souhaitent la possibilité de rejoindre une alliance.