COM (2001) 447 final  du 26/07/2001
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 18/02/2003

Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 20/09/2001
Examen : 23/04/2002 (délégation pour l'Union européenne)


Justice et affaires intérieures

Critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile

Texte E 1800 - COM (2001) 447 final

(Procédure écrite du 23 avril 2002)

Cette proposition de règlement vise à se substituer à la Convention relative à la détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres de l'Union, signée à Dublin le 15 juin 1990, dite « Convention de Dublin ».

Il s'agit donc de la « communautarisation » d'un instrument intergouvernemental, fondée sur les nouvelles dispositions du traité issues de la révision effectuée à Amsterdam.

I - LE CONTENU DE LA PROPOSITION

Ce règlement reposerait sur les mêmes principes que la « Convention de Dublin », c'est-à-dire sur l'idée qu'il est nécessaire de fixer des règles d'attribution de la responsabilité fondées sur des critères objectifs et acceptés par tous. Dans un espace de libre circulation des personnes, chaque État membre est, en effet, comptable vis-à-vis de tous les autres de son action en matière d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers et doit en assumer les conséquences dans un esprit de solidarité et de loyale coopération.

Le texte reprend donc le principe d'après lequel la responsabilité de l'examen d'une demande d'asile pèse sur l'État membre qui a pris la plus grande part dans l'entrée ou le séjour du demandeur d'asile dans la Communauté, soit en lui attribuant un visa ou un titre de séjour, soit en étant défaillant dans le contrôle de ses frontières, soit encore en permettant l'entrée sans visa. Ainsi, si un demandeur d'asile pénètre illégalement sur le territoire de l'Union, l'État membre responsable est le premier État dont le demandeur d'asile franchit les frontières. Si un demandeur d'asile possède un visa en règle, l'État membre qui l'a délivré est en principe responsable, même si ce visa a été délivré sur la base d'informations fictives ou de documents falsifiés.

La proposition comporte, en outre, un certain nombre d'innovations par rapport à la « Convention de Dublin », en particulier :

· des nouvelles dispositions mettant l'accent sur la responsabilité que prend chaque État membre vis-à-vis de l'ensemble de ses partenaires de l'Union en laissant perdurer des situations de séjour clandestin sur son territoire. Seraient, ainsi, responsables :

- l'État membre qui a, pendant plus de deux mois, en toute connaissance de cause, toléré (en ne prenant aucune mesure tendant soit à l'éloignement, soit à la régularisation) la présence irrégulière d'un ressortissant d'un pays tiers sur son territoire ;

- l'État membre sur le territoire duquel un ressortissant d'un pays tiers s'est maintenu en situation irrégulière pendant plus de six mois ;

· des délais de procédure beaucoup plus brefs afin de concourir à l'objectif d'un traitement rapide des demandes d'asile :

- un délai réduit de six mois à soixante-cinq jours ouvrables pour présenter à un autre État membre une requête aux fins de prise en charge,

- un délai réduit de trois mois à un mois pour répondre à une telle requête,

- la possibilité de réclamer une réponse en urgence,

- des précisions nouvelles quant au niveau de preuve requis pour établir la responsabilité d'un État membre.

· un délai porté de un à six mois pour la mise en oeuvre des transferts vers l'État responsable, afin de tenir compte des difficultés pratiques rencontrées dans l'exécution de tels transferts et, compte tenu de ce qu'un transfert vers un autre État membre ne saurait causer un préjudice grave et difficilement réparable, la suppression de la possibilité de donner à ce recours un caractère suspensif ;

· des dispositions nouvelles visant à préserver l'unité de la famille des demandeurs d'asile.

II - L'EXAMEN PAR LE CONSEIL ET L'AVIS DU PARLEMENT EUROPÉEN

L'examen de cette proposition a soulevé peu de difficultés au sein du Conseil, étant donné que le texte présente de nombreuses ressemblances avec celui de la « Convention de Dublin ». Les principales questions ont porté sur les dispositions relatives à l'unité familiale, à l'utilité d'étendre ce dispositif aux formes de protection internationale autres que l'asile conventionnel et à la hiérarchie des critères. Seul un État membre souhaite aller vers une modification plus radicale de la « Convention de Dublin », en faisant de l'État où est déposée la première demande d'asile le critère essentiel d'attribution de la responsabilité.

La proposition a également reçu un accueil favorable de la part du Parlement européen.

III - LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE LA DÉLÉGATION

La proposition de la Commission européenne reprend, dans une large mesure, les dispositions de la « Convention de Dublin », qui vise à limiter les mouvements secondaires des demandeurs d'asile au sein de l'Union, tout en garantissant à chaque demandeur d'asile que sa demande sera examinée de manière équitable, et dans les délais les plus brefs.

Il est peu de dire que le dispositif issu de la « Convention de Dublin » n'a pas été à la hauteur des attentes et des objectifs fixés. Ainsi, selon un document de la Commission européenne évaluant la mise en oeuvre de la « Convention de Dublin », sur plus de 650.000 demandes d'asile présentées au sein de l'Union européenne entre 1998 et 1999, seulement 6 % ont donné lieu à une demande de prise en charge par un autre État membre. Dans près de 95 % des cas, c'est l'État membre saisi de la demande d'asile qui assume finalement la responsabilité de son examen.

De plus, parmi le faible nombre de demandes de prise en charge par un autre État membre, le transfert effectif du demandeur d'asile n'est attesté que dans un peu moins de 30 % des cas. Au total, le nombre des demandeurs d'asile effectivement transférés représente donc environ 1,70 % du total des demandes d'asile présentées dans les quinze États membres.

En conséquence, même si on ne peut qu'être favorable aux innovations apportées au mécanisme de détermination de la responsabilité, qui visent à en améliorer l'efficacité, on peut néanmoins s'interroger sur la portée de ces innovations et l'intérêt de conserver l'essence même de ce dispositif, qui se traduit par une charge de travail et un coût non négligeables pour les administrations nationales. D'ailleurs, comme le reconnaît elle-même la Commission européenne, la « Convention de Dublin n'a pas eu d'effet perceptible sur le niveau de la demande d'asile dans l'Union européenne ».

Il semblerait que ce constat confirme une nouvelle fois la nécessité de parvenir à un degré élevé d'harmonisation, à la fois des conditions d'accueil des demandeurs d'asile (voir le texte E 1743), des procédures et du statut de réfugié au sein de l'Union européenne.

Compte tenu de ces observations, la délégation a décidé de ne pas intervenir plus avant dans l'examen de cette proposition.