Au cours de sa réunion du jeudi 7 novembre 2019, le Bureau du Sénat a examiné les questions suivantes :
I. APPLICATION DE LA LÉGISLATION SUR LES INCOMPATIBILITÉS PARLEMENTAIRES
Examen de déclarations d’intérêts et d’activités (DIA) de sénateurs
Le Bureau a examiné, sur le rapport de M. Vincent Delahaye, Vice-président, président de la délégation chargée du statut et des conditions d’exercice du mandat du sénateur, trois déclarations d’intérêts et d’activités de début de mandat, ainsi que sept déclarations d’intérêts et d’activités modificatives, au regard des dispositions du code électoral relatives aux incompatibilités parlementaires.
Réflexion sur le contenu et la procédure d’examen des DIA
M. Gérard Larcher, Président du Sénat, a indiqué s’être interrogé, de même que M. Vincent Delahaye, en constatant que certains de ses collègues déclaraient désormais des fonctions bénévoles ne suscitant aucun risque de conflit d’intérêts, comme l’appartenance à des associations sans activité lucrative, et avoir souhaité qu’une clarification soit faite à ce sujet.
Il a indiqué que les possibilités de simplification éventuelle étaient limitées par le cadre rigide des dispositions législatives et réglementaires, d’autant qu’il semblerait que l’exhaustivité croissante des déclarations s’explique pour partie par les conseils donnés par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP),
Il a envisagé de se rapprocher du Président de l'Assemblée nationale pour entamer une démarche commune, puis de prendre contact avec le Président de la HATVP à ce sujet. Dans l'immédiat, le Bureau a décidé, suivant sa proposition, de ne plus donner acte de certaines fonctions évidemment compatibles avec le mandat parlementaire, comme la participation à un organisme extraparlementaire, ou l'appartenance à une association comme simple membre.
II. PRISE EN CHARGE ET CONTRÔLE DES FRAIS DE MANDAT
Audition de MM. Arnaud Bazin et Thierry Carcenac, Président et Vice-président du Comité de déontologie parlementaire, sur le bilan du contrôle des frais de mandat pour 2018 et les recommandations du Comité
M. Arnaud Bazin, Président du Comité de déontologie parlementaire, a constaté, à titre liminaire, d’une part, que 2018 avait été une « année d’apprentissage » pour les sénateurs en matière d’utilisation du dispositif de frais de mandat, mais aussi pour les membres du Comité dans leur mission de contrôle et, d’autre part, que l’unanimité avait prévalu dans les décisions prises par le Comité.
M. Thierry Carcenac, Vice-Président du Comité de déontologie parlementaire, a ensuite présenté les principales étapes de la procédure de contrôle mise en œuvre. Il a rappelé qu’à la différence de l’Assemblée nationale, le Comité s’était appuyé sur des tiers extérieurs dotés d’une expertise suffisante pour l’accompagner dans son contrôle, à savoir la Compagnie nationale des commissaires aux comptes et le Conseil supérieur de l’ordre des experts-comptables. Il a précisé que le contrôle avait été effectué sur la base d’un référentiel de contrôle élaboré par la Compagnie et d’une procédure fixée dans le règlement intérieur du Comité, en veillant au respect de deux impératifs : garantir un contrôle approfondi des justificatifs annuels de chaque sénateur au moins une fois avant le terme normal de son mandat et assurer en permanence un aléa suffisant pour que le type de contrôle auquel ces justificatifs sont soumis demeure imprévisible.
Le Vice-président du Comité de déontologie parlementaire a indiqué que 35 experts-comptables avaient examiné, d’avril à juin derniers, les justificatifs depuis les locaux du Sénat, en procédant si nécessaire à un échange contradictoire avec les sénateurs ou en demandant des pièces complémentaires. Il a proposé que les deux cabinets d’experts-comptables désignés cette année soient renouvelés l’an prochain pour leur permettre de capitaliser leur expérience. Il a également suggéré que certaines améliorations soient apportées à la procédure, notamment pour éviter d’avoir à demander à nouveau la production d’éléments déjà fournis aux experts-comptables. Parallèlement, il a estimé souhaitable de permettre aux sénateurs d’accompagner le dépôt de leurs justificatifs, sous l’application Julia, d’un commentaire et d’un « dossier permanent » comportant des pièces telles que le bail locatif de la permanence ou du logement parisien, ou encore un contrat de prêt pour l’achat d’un véhicule.
Puis M. Thierry Carcenac a expliqué qu’après avoir arrêté des lignes directrices pour l’interprétation à retenir des règles de prise en charge, le Comité avait statué sur les situations individuelles des sénateurs en juillet 2019, à la suite de la remise du rapport du Conseil supérieur de l’ordre des experts-comptables et d’un échange contradictoire avec les sénateurs concernés sur la base de ce rapport. Il a enfin relevé que le Président du Sénat n’ayant sollicité aucune nouvelle délibération de la part du Comité, les décisions de ce dernier, devenues définitives, avaient donné lieu à une information des sénateurs concernés fin septembre, ainsi que, le cas échéant, à des courriers des Questeurs précisant les sommes correspondant aux dépenses non susceptibles d’être prises en charge. En conclusion, il a souhaité qu’en 2020 le Comité commence ses opérations de contrôle dès le mois de mars, afin d’avoir achevé la campagne de contrôle avant l’été.
A l’issue de cette présentation, le Président du Comité de déontologie parlementaire a formulé quelques recommandations d’évolution de la règlementation, concernant notamment l’impossibilité de prendre en charge des dépenses ne présentant aucun lien avec l’exercice du mandat, une distinction plus claire entre frais de représentation et frais de réception, ou la précision du contenu de certaines catégories de dépenses susceptibles d’être prises en charge. Il a souhaité qu’une réflexion soit engagée sur certains points particuliers. Il a conclu en souhaitant la diffusion de « bonnes pratiques » et en soulignant la solidité du nouveau régime de prise en charge et de contrôle des frais de mandat mis en place en moins de deux ans par le Sénat.
Intervention du Questeur délégué
M. Vincent Capo-Canellas, Questeur délégué, a félicité le Comité de déontologie parlementaire pour les conditions dans lesquelles ont été conduites les délicates et complexes opérations de contrôle des frais de mandat pour 2018. Il a jugé pertinente l’organisation mise en place pour ces contrôles, avec le concours de professionnels présentant l’expérience et la compétence requises, et s’est félicité de l’approche pragmatique retenue pour apprécier le caractère raisonnable de la dépense. Approuvant les recommandations du Comité, il a présenté un projet d’arrêté tendant à compléter le référentiel sur certains points particuliers (fournitures de bureau, dispositifs de sécurité, ou encore petit mobilier pour la permanence parlementaire ou l’hébergement parisien) et à prévoir la faculté pour le Conseil de Questure d’édicter des circulaires d’application permettant d’expliciter la réglementation et le référentiel. Pour l’avenir, il a souhaité que soient envisagées une évolution du contrôle transversal, suivant la proposition du Comité, et une analyse de la situation particulière des avances spécifiques, sans toutefois remettre en cause le principe de leur non-fongibilité avec l’avance générale.
A l’issue d’un large débat, le Bureau a adopté l’arrêté proposé par les Questeurs.
Le Président du Sénat a par ailleurs annoncé que dans la perspective des prochaines élections municipales, un vade-mecum allait être diffusé à l’ensemble des sénateurs afin notamment de leur rappeler les précautions à prendre pour que les moyens mis à leur disposition dans le cadre de l’exercice de leur mandat ne contribuent pas, même indirectement, au financement de campagnes électorales.
III. COMMUNICATION DU PRÉSIDENT DU COMITÉ DE DÉONTOLOGIE PARLEMENTAIRE SUR LE CONTRÔLE DU RESPECT DES RÈGLES APPLICABLES AUX REPRÉSENTANTS D’INTÉRÊTS
M. Arnaud Bazin, Président du Comité de déontologie parlementaire, a informé le Bureau de la récente réunion du Comité pour statuer sur la conformité du comportement d’un représentant d’intérêts au code de conduite applicable aux représentants d’intérêts au Sénat. Il a précisé que la première saisine du Comité sur ce sujet portait sur l’affaire « révélée » par la presse, selon laquelle la société Monsanto aurait « fiché » des personnalités, dont des sénateurs. Il a indiqué qu’à cette occasion, le Comité avait posé le principe selon lequel un représentant d’intérêts manquerait à ses obligations d’intégrité et de probité si, dans le cadre de son activité de représentation d’intérêts, il méconnaissait ses obligations légales comme responsable d’un traitement de données à caractère personnel concernant des sénateurs.
Le Président du Comité de déontologie parlementaire a estimé que l’avis adopté par le Comité constituait un utile rappel des règles applicables à l’égard des représentants d’intérêts, même s’il ne concluait pas, à ce stade, à l’existence d’un manquement dans le cas d’espèce. Il a rappelé que le code de conduite adopté par le Bureau s’appliquait depuis le 1er juillet 2017 aux relations des représentants d’intérêts avec les sénateurs, mais aussi avec les collaborateurs parlementaires, les collaborateurs des groupes politiques et les fonctionnaires du Sénat.
Il a proposé que le Comité mène, sous l’autorité du Président du Sénat, des actions de communication destinées à mieux informer les représentants d’intérêts de l’existence de ces règles sénatoriales et à sensibiliser les sénateurs à la possibilité de signaler au Comité tout comportement qu’ils jugeraient inapproprié.
M. Gérard Larcher, Président du Sénat, a approuvé cette proposition et a annoncé qu’il adresserait l’avis rendu par le Comité aux représentants d’intérêts concernés, au sénateur à l’origine du signalement, ainsi qu’aux présidents de la HATVP et de la CNIL.
Le Président du Sénat a en outre indiqué qu’il avait convenu avec M. Richard Ferrand, Président de l’Assemblée nationale, d’engager une réflexion conjointe, en lien avec la HATVP, sur le contrôle de l’activité des représentants d’intérêts.
IV. COMMUNICATION DU PRÉSIDENT DU SÉNAT SUR LA RÉFORME DE L’IGB CONCERNANT LA PRÉSENCE DES COLLABORATEURS AUX AUDITIONS DES RAPPORTEURS ET AUX RÉUNIONS DES COMMISSIONS, DES DÉLÉGATIONS ET DES INSTANCES TEMPORAIRES
M. Gérard Larcher, Président du Sénat, a rappelé qu’à l’occasion de l’examen, au mois de juin dernier, de la proposition de résolution visant à clarifier et actualiser son Règlement, le Sénat avait adopté une disposition confiant au Bureau du Sénat le soin de déterminer les catégories de collaborateurs dont chaque président de commission (ou de délégation ou d’instance temporaire) pouvait autoriser la présence lors des auditions des rapporteurs et des réunions plénières, ainsi que les obligations qui leur seraient applicables. Il a indiqué que dans la perspective de la modification de l’Instruction générale du Bureau (IGB) nécessaire à la mise en œuvre de cette disposition, il avait consulté l’ensemble des présidents de groupe, de commission et de délégation et que le Secrétaire général du Sénat avait par ailleurs rencontré, à sa demande, les représentants des associations d’administrateurs et d’administrateurs-adjoints et des organisations professionnelles de collaborateurs, ainsi que les Secrétaires généraux des groupes.
Il a annoncé que le projet de texte élaboré au vu de cette large concertation allait maintenant être adressé à l’ensemble des personnes précédemment consultées, afin de recueillir leurs observations en vue d’un examen par le Bureau au cours de sa prochaine réunion en décembre et d’une entrée en vigueur des nouvelles dispositions à compter du 1er janvier 2020.
V. COMMUNICATION DU PRÉSIDENT DE LA DÉLÉGATION AUX RESSOURCES HUMAINES ET À L’AGAS SUR L’ÉVOLUTION DU CRÉDIT COLLABORATEURS
M. Jean-Marc Gabouty, Vice-président, président de la délégation aux ressources humaines et à l’AGAS, a présenté un premier bilan de la mise en œuvre de l’augmentation de 15 points du crédit collaborateurs décidée lors de la réunion de Bureau du 26 septembre 2018.
Il a constaté une large utilisation de cette augmentation des moyens mis à la disposition des sénateurs, qui s’est traduite par une hausse significative du nombre d’avenants aux contrats en cours, mais non des nouvelles embauches : au total, 53,2 % des collaborateurs en ont bénéficié, pour un montant moyen de 300 euros bruts par mois. Il a par ailleurs relevé que le recours aux contrats de travail dérogatoires était resté extrêmement marginal. Il a enfin annoncé l’ouverture au premier semestre 2020 d’une négociation avec les organisations représentant les collaborateurs sur les questions relatives aux contrats de travail et au temps de travail.
VI. QUESTIONS DIVERSES
Déclarations des déplacements à l’étranger des sénateurs
M. Gérard Larcher, Président du Sénat, a rappelé l’importance pour les sénateurs de déclarer les invitations à des déplacements à l’étranger financés par des organismes extérieurs au Sénat, non seulement pour respecter leurs obligations réglementaires, mais aussi pour permettre d’assurer leur protection au cours de ces déplacements.
Signalement au ministère public de propos et menaces portant sur des sénateurs
Le Président du Sénat a regretté que plusieurs sénateurs aient été mis en cause de manière particulièrement virulente sur les réseaux sociaux, notamment à la suite de leur vote en faveur de la proposition de loi tendant à assurer la neutralité religieuse des personnes participant au service public de l’éducation. Il a indiqué avoir procédé à un signalement des propos circulant ainsi sur internet au Procureur de la République de Paris, en application de l’article 40 du code de procédure pénale, et avoir exprimé son soutien aux sénateurs ayant d’ores et déjà porté plainte. Il a en outre précisé qu’il allait saisir la CNIL de la question de la constitution éventuelle de fichiers relatifs aux positions exprimées par les sénateurs.
Le Président du Sénat a enfin annoncé qu’il allait faire parvenir aux présidents de groupe un vade-mecum sur la procédure à suivre par les sénateurs faisant l’objet de mises en cause ou de menaces pour lui faire connaître ces faits et porter plainte si cela apparaissait utile.
Saisine de M. David Assouline, Vice-président, concernant les propos tenus dans l’hémicycle par M. Jean Louis Masson le 29 octobre 2019
M. David Assouline, Vice-président, s’est ému de certains propos tenus par M. Jean Louis Masson, sénateur de la Moselle, lors de la séance du Sénat du 29 octobre dernier consacrée à l’examen de la proposition de loi tendant à assurer la neutralité religieuse des personnes participant au service public de l’éducation. A l’issue d’un débat auquel a notamment participé M. Philippe Dallier, Vice-Président, qui présidait cette séance, le Bureau a constaté qu’il n’avait pas compétence pour sanctionner de quelque manière que ce soit un sénateur pour des propos inappropriés tenus en séance publique. Suivant la proposition du Président du Sénat, le Bureau a cependant, tout en réaffirmant son attachement au droit absolu à la liberté d’expression des sénateurs, désapprouvé le caractère provocateur et vexatoire des propos mis en cause.
Adaptation des règles de visite de l’hémicycle en conséquence de l’installation du système de vote électronique
Le Président du Sénat a indiqué que la mise en service du scrutin électronique conduisait à prévoir des précautions particulières pour préserver le bon fonctionnement des terminaux de vote et qu’en conséquence, les groupes de visiteurs accompagnés par un sénateur ne pourraient désormais plus être autorisés à circuler dans les travées de l’hémicycle.
Demande d'anonymisation d’un compte rendu d'audition d'une commission d'enquête par une personne citée par l'auditionné (« droit à l’oubli »)
Suivant la proposition du Président du Sénat, le Bureau a décidé de donner une suite favorable à une demande d’anonymisation du compte rendu d’une commission d’enquête publié sur le site du Sénat, présentée sur le fondement du règlement européen dit Règlement général sur la protection des données (RGPD). Il a adopté un arrêté habilitant le Président du Sénat à répondre à des demandes analogues concernant les comptes rendus publiés par les structures temporaires de contrôle ou les commissions spéciales du Sénat.
Réflexion sur l’amélioration de la procédure applicable en cas de suspicion de harcèlement à l'égard d'un collaborateur de sénateur
Le Bureau a confié à M. Jean-Marc Gabouty, Vice-président, président de la délégation du Bureau en charge de l’AGAS, et à MM. les Questeurs le soin de mener une réflexion approfondie en vue d’améliorer et de conforter le dispositif actuel de prévention et de lutte contre le harcèlement au travail concernant les collaborateurs de sénateurs.
Déplacements de commissions et de groupes interparlementaires d’amitié
Sur la proposition de M. Philippe Dallier, Vice-président, président de la délégation chargée des activités internationales et des groupes d’amitié, le Bureau a autorisé des délégations de la commission des affaires étrangères à effectuer des déplacements à Madagascar et en Colombie fin novembre et début décembre 2019 et a émis un avis favorable à l’organisation au mois de novembre 2019 d’un déplacement de groupe d’amitié en Ukraine.
Le Bureau a en outre été informé d’un déplacement de Mme Sophie Primas, Présidente de la commission des affaires économiques, en Finlande fin octobre 2019, d’un déplacement d’une délégation de la commission des lois en Guyane début novembre 2019 et d’un déplacement de groupe d’amitié en Turquie en octobre 2019.
Désignation des directeurs chargés de représenter l’administration au sein de la CAP
Le Bureau a désigné les directeurs chargés de représenter l’administration au sein de la commission administrative paritaire appelée à siéger en 2020.