B. L'ADMISSION AU SÉJOUR POUR RAISON DE SANTÉ

1. Un recul des demandes

L'admission au séjour pour raisons de santé a été instituée par la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile qui a modifié l'ordonnance du 2 novembre 1945. Le dispositif de droit au séjour pour raison médicale figure désormais au 11° de l'article L.313-11 de ce code, qui prévoit donc l'attribution d'une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » pour raisons de santé.

Historique de délivrance de cartes de séjour temporaires
pour raisons de santé en première demande

2004

2005

2006

2007

2008

Total

7 580

7 315

6 568

5 680

5697

Source : MIIINDS

Outre ces cartes de séjour, des autorisations provisoires de séjour, quoique non expressément prévues par la loi, peuvent être délivrées pour raison de santé lorsque le médecin de l'administration estime que l'état de santé de l'étranger ne nécessite qu'un séjour en France, de quelques semaines ou de quelques mois, ne justifiant donc pas la délivrance d'une carte de séjour temporaire, dont la durée est d'un an. Le nombre de ces autorisations provisoires a été de 4.265 en 2006, 3.878 en 2007 et 4.815 en 2008.

Après une croissance des titres de séjour délivrés en première demande pour motif médical avant 2004, il est constaté une décroissance de ce chiffre à partir 2004 avec une légère baisse du flux en 2005, qui s'est accentuée en 2006 et s'est confirmée en 2007. On constate toutefois une légère inflexion à la hausse en 2008. Cette baisse générale est en particulier constatée pour les titres délivrés aux Algériens, qui constituent la nationalité la plus représentée dans cette catégorie d'étrangers séjournant en France (1.278 délivrés en 2005 ; 822 en 2007 ; 803 en 2008).

Cette diminution serait due à une amélioration des prises en charge médicales, dans certains pays et pour certaines pathologies, prise en compte dans les décisions des préfets prises après l'avis des médecins inspecteurs de santé publique (MISP) et, à Paris, du médecin-chef du service médical de la préfecture de police.

Par ailleurs, le nombre d'étrangers qui quittent le statut d'étranger malade, soit parce qu'aucun titre ne leur est plus délivré, soit parce qu'il leur est délivré un titre d'une autre nature, est inférieur au nombre des nouveaux entrants. Il en résulte que la population étrangère en possession de documents de séjour pour raison de santé continue d'augmenter, passant de 18.773 personnes fin 2004 à 28.460 personnes fin 2008.

2. Une jurisprudence abondante

Un arrêté du 8 juillet 1999 exige du médecin inspecteur de santé publique compétent un avis émis, à partir du rapport médical établi sur l'état de santé de l'intéressé, par un médecin agréé ou un praticien hospitalier, répondant aux questions essentielles de façon suffisamment claire et précise, à savoir :

- si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ;

- si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ;

- si l'intéressé peut effectivement ou non bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ;

- la durée prévisible du traitement.

Ces dernières années ont vu la formation d'une jurisprudence importante sur ces critères, dont il est possible aujourd'hui de faire le bilan.

Notons d'abord qu'au plan du droit international, le Conseil d'Etat a jugé que l'article 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, en vertu duquel la France s'est engagée à prendre toute mesure permettant à chacun de bénéficier du meilleur état de santé physique et mentale qu'il soit capable d'atteindre, ne produit pas d'effet direct à l'égard des particuliers et ne peut être utilement invoqué (CE, 19 mars 2008, n° 297-954).

En ce qui concerne les moyens le plus souvent invoqués par les requérants, visant à établir l'impossibilité pour eux de recevoir un traitement approprié dans le pays d'origine, en produisant des certificats médicaux ou des attestations médicales diverses, il ressort de la jurisprudence que les certificats médicaux doivent être suffisamment circonstanciés et précis quant à la nature, à la gravité de la pathologie et à l'impossibilité de suivre un traitement approprié dans le pays d'origine. Ces documents ne sont pas de nature à remettre en cause le contenu de l'avis du médecin inspecteur de santé publique, lorsqu'ils sont insuffisamment précis et circonstanciés eu égard à ces trois critères (CE, 28 novembre 2007, n°297829).

Ainsi, le juge prend en compte les certificats médicaux produits mais il remet très rarement en cause l'avis du MISP sur cette base (CE, 17 octobre 2007, n° 296-602). Par ailleurs, le Conseil d'Etat considère que l'avis du MISP est suffisamment motivé quand il indique que l'étranger peut être soigné dans son pays d'origine, même s'il n'a pas donné d'indications sur la pathologie .

Concernant la possibilité pour le requérant de bénéficier d'un traitement approprié dans le pays d'origine, le juge administratif estime que les difficultés financières d'accès aux soins, l'éloignement géographique des structures hospitalières et l'état sanitaire général du pays d'origine ne sont pas de nature à entacher d'illégalité une mesure de refus ou d'éloignement, (CE, 13 février 2008, n°297-518 ; CAA Bordeaux, 30 juin 2009, n° 08BX03223 ).

Enfin, concernant la capacité de l'étranger malade à supporter le voyage, le Conseil d'Etat et l'ensemble des juges du fond considèrent que le préfet doit examiner cet élément quand il est invoqué par l'étranger mais aussi lorsque les pièces du dossier, et notamment les certificats médicaux, sont de nature à susciter des interrogations sur ce point. En revanche, la jurisprudence estime que le défaut de cette mention dans l'avis du MISP n'entache pas la légalité de la décision si aucun élément du dossier ne conduit à s'interroger sur la capacité de voyager (CE, 19 mars 2008 précité ; CAA Bordeaux, 2 juillet 2009, n°09BX00058).

Page mise à jour le

Partager cette page