AMENDEMENT PROPOSÉ PAR VOTRE COMMISSION DES FINANCES

MM.  GAILLARD et de MONTESQUIOU

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ARTICLE 62 NONIES

Supprimer cet article.

OBJET

L'article 62 nonies vise à étendre aux départements d'outre-mer l'application de la taxe sur les entrées en salle de cinéma, et le bénéfice des soutiens automatiques du CNC qui en constitue la contrepartie.

Par ailleurs, il prévoit une entrée en vigueur différée au 1 er janvier 2015 et une montée en puissance progressive du taux de la taxe.

Un dispositif très proche avait été introduit par le Gouvernement dans le projet de loi de finances rectificative de décembre 2010, et supprimé à l'initiative du Sénat, au motif que la taxe aurait pour conséquence de faire disparaître l'activité cinématographique outre-mer.

Cet amendement propose donc de supprimer l'article 62 nonies , en cohérence avec la position exprimée par le Sénat en 2010.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 22 octobre 2013, sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de MM. Yann Gaillard et Aymeri de Montesquiou, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Culture ».

M. Yann Gaillard , rapporteur spécial . - Avant de vous présenter les points saillants des programmes « Création » et « Transmissions des savoirs et démocratisation de la culture », un mot sur les grands enjeux de la mission « Culture » en 2014 : 2,57 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 2,58 milliards d'euros en crédits de paiement sont prévus l'année prochaine. En volume, les crédits de la mission diminuent de 1,1 % en autorisations d'engagement et de 2,1 % en crédits de paiement, conformément à la trajectoire prévue par le programme triennal 2013-2015 : on ne peut pas dire que la culture soit favorisée par ce gouvernement.

Une importante partie des économies réalisées, 55 milliards d'euros, découle de l'arrêt ou de l'achèvement de plusieurs grands chantiers - notamment le Musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée (MuCEM) de Marseille et le bâtiment des archives nationale de Pierrefitte-sur-Seine - ainsi que de la progression des chantiers du musée Picasso et de la Philharmonie de Paris. La diminution des restes à payer se poursuit logiquement.

L'effort financier global de l'État en faveur de la culture et de la communication est de l'ordre de 13 milliards d'euros. Les dépenses fiscales y contribuent pour 393 millions d'euros, contre 406 en 2013. La modernisation de l'action publique (MAP) concerne bien sûr la mission « Culture », mais le budget 2014 ne comporte aucune réforme structurelle. Espérons que l'évaluation prévue de plusieurs politiques culturelles débouchera bientôt sur des rationalisations.

Les nombreux opérateurs seront mis à contribution, la réduction des subventions touchant surtout les grands établissements publics. Outre une réduction forfaitaire de leur dotation, ils feront l'objet d'un prélèvement exceptionnel tenant compte du niveau de leur fonds de roulement - ce n'est pas une source d'économie durable. La compensation de la gratuité dans les musées pour les 18-25 ans, inscrite dans la subvention pour charges de service public des opérateurs du programme 175 « Patrimoines » depuis la loi de finances pour 2013, diminuera de 65 % pour s'établir à 10,9 millions d'euros. En outre, le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) subira une ponction de 90 millions d'euros sur son fonds de roulement, après un prélèvement de 150 millions d'euros en 2013. En revanche, les taxes affectées à cet opérateur ne sont pas plafonnées.

S'agissant des emplois des opérateurs, le bilan est plus mitigé : si leur plafond d'emplois global est stable par rapport à 2013, les emplois hors plafond progressent très fortement, notamment au titre des emplois d'avenir. Par exemple, dans le programme « Patrimoines », les emplois sous plafond sont réduits de 8 550 à 8 510, mais les emplois hors plafonds passent de 272 à 473. En outre, je regrette que seuls 23 opérateurs sur 81 soient dotés d'un contrat d'objectifs et de performance. De nombreux rapports ont dénoncé cette carence, qui affaiblit la tutelle, notamment sur les plus gros opérateurs tels que le CNC.

Les crédits de paiement du programme 131 « Création » s'élèveront à 746 millions d'euros en 2014, soit une réduction de 4 %, plus forte que l'an passé. Le spectacle vivant absorbe 683 millions d'euros, les arts plastiques dix fois moins (63,3 millions d'euros). Les dépenses d'intervention du spectacle vivant et des arts plastiques sont ainsi consolidées, les dépenses des gros opérateurs de l'État maîtrisées. L'Opéra national de Paris, l'Établissement public du parc et de la grande halle de la Villette et la Cité de la Musique subiront notamment une baisse pérenne de 2,5 % ainsi qu'une baisse non pérenne de leurs subventions. De surcroît, l'Opéra national de Paris perdra 20 équivalents temps plein (ETP). Le budget 2014 est aussi marqué par une réduction sensible des crédits de paiement pour le chantier de la Philharmonie de Paris. J'espérais ne pas vous parler de ce sujet douloureux...

M. Philippe Marini , président . - Il le faut néanmoins !

M. Yann Gaillard , rapporteur spécial . - L'ouverture est désormais prévue pour début 2015. Le public habitué aux salles de concert du centre parisien se déplacera-t-il à la Villette ? Ce chantier mobilisera 26,3 millions d'euros en 2014, contre 50 en 2013. Retards et surcoûts s'accumulent et le coût final est désormais évalué à 396 millions d'euros contre 386 millions l'an passé. La Ville de Paris et la région refusant de payer leur part, l'État devrait prendre à sa charge la totalité des surcoûts. L'affaire est mal engagée.

M. Vincent Delahaye . - C'est inacceptable !

M. Yann Gaillard , rapporteur spécial . - Les dépenses d'intervention du spectacle vivant s'élèveront à 403 millions d'euros en 2014 et financeront notamment les artistes, les compagnies artistiques et les scènes de musique actuelles. Une dotation de près de 2 millions d'euros sera spécifiquement dédiée au renouvellement des directions des centres chorégraphiques et dramatiques nationaux.

Le budget 2014 consacrera 0,8 million d'euros à l'instauration d'un fonds de soutien aux galeries d'art, et les crédits d'intervention seront en hausse pour la mise à niveau des fonds régionaux d'art contemporain de nouvelle génération. Enfin, 2,8 millions d'euros seront dédiés à l'extension de l'espace de présentation permanente de la donation exceptionnelle faite à l'État, en 2012, par le galeriste Yvon Lambert, qui compte 556 oeuvres.

Les crédits du programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » seront globalement stables. Cette évolution générale occulte cependant des différences selon les actions : le soutien aux établissements d'enseignement supérieur et d'insertion professionnelle augmente de 7,2 %, dans la ligne des priorités affichées par le Gouvernement, mais les autres dotations diminuent, en particulier le soutien aux établissements d'enseignement spécialisé comme les conservatoires de rayonnement départemental ou régional, pour lesquels la baisse atteint 32 % - je m'en étonne.

Les dépenses de fonctions support hors dépenses de personnel se stabilisent à 82,3 millions d'euros, après un important effort de réduction en 2013. Les dépenses de personnel du ministère sont également stabilisées. Le plafond d'emplois augmentera de 4 équivalents temps plein (ETP), évolution qui s'explique notamment par différents transferts. En revanche, la masse salariale diminuera légèrement. Enfin, la prévision de réduction des effectifs imputés sur la mission est supérieure à l'effort consenti cette année : moins 83 équivalents temps plein (ETP), contre moins 15 en 2013.

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial . - Il me revient de vous présenter les crédits du programme 175 « Patrimoines ». En 2014, la dotation sera de 761 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 746 millions en crédits de paiement, ce qui représente une baisse respective de l'ordre de 1,2 % et de 4 %. Les grands équipements étant achevés, l'année 2014 consolidera une politique d'investissements soutenue en faveur des monuments historiques, du réseau des musées de France et des archives départementales sur l'ensemble du territoire.

On observe toutefois des disparités selon les actions : les crédits dédiés au patrimoine monumental, à l'architecture et aux acquisitions se stabilisent ; ceux consacrés au patrimoine des musées de France baissent fortement ; enfin, les moyens alloués au patrimoine archivistique et au patrimoine archéologique augmentent sensiblement.

Le patrimoine monumental (action 1) bénéficiera de 345 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 332 millions d'euros en crédits de paiement. Ces chiffres tiennent compte de la rebudgétisation de la taxe sur les jeux en ligne, jusqu'alors affectée au Centre des monuments nationaux (CMN). Nous nous félicitons de cette rationalisation, que notre commission appelle de ses voeux depuis longtemps. Hors grands projets, les crédits d'entretien atteignent 48 millions d'euros, les crédits de restauration 240 millions, dont 139 dédiés à des monuments historiques n'appartenant pas à l'État. À cet égard, il me semble qu'il serait plus intelligent de confier aux entreprises du bâtiment les interventions d'entretien et de réparation ordinaires sur les sites classés, et de réserver aux architectes des bâtiments de France les opérations curatives les plus lourdes. Cela serait une source d'économies pour l'État.

La réduction des crédits affectés aux patrimoines des musées de France (action 3) s'explique par la fin du chantier du MuCEM. Sur les 340 millions d'euros de cette action, 258 financeront les subventions pour charges de service public des opérateurs du programme, contre 247 millions d'euros en 2013. La baisse est due notamment à la forte réduction de la compensation de la gratuité dans les musées, précédemment mentionnée par Yann Gaillard.

La dotation allouée au patrimoine archivistique s'élèvera à 27 millions d'euros. Cette hausse de 7,6 % tient aux besoins du nouveau centre des archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine, au projet interministériel de plateforme d'archivage électronique et au lancement du chantier de rénovation des archives nationales du monde du travail à Roubaix.

Enfin, les crédits dédiés au patrimoine archéologique, 17 millions d'euros en autorisations d'engagement et 8,7 millions en crédits de paiement, augmenteront fortement, du fait du lancement de deux projets en partenariat avec les collectivités territoriales : le Centre d'art pariétal à Lascaux et le Centre de conservation et d'études d'archéologie du pôle de recherches interdisciplinaires archéologiques de Moselle.

Notre commission peut se féliciter d'avoir lancé le débat sur la fiscalité affectée, grâce à ses amendements sur le CNC...

M. Philippe Marini , président . - Absolument !

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial . - ... et d'avoir mis la Cour des comptes sur la piste du CMN. L'enquête de la Cour a dressé un bilan mitigé du suivi de ses recommandations : la redéfinition du périmètre de l'opérateur est toujours en suspens, les résultats de la maîtrise d'ouvrage demeurent peu satisfaisants, les progrès dans la gestion ont été partiels et tardifs. La Cour des comptes réitère donc ses principales préconisations. Des efforts supplémentaires doivent être consentis rapidement, par le CMN comme par sa tutelle.

La Cour des comptes a en outre publié en août 2013 un référé très critique sur l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap), appelant à des réformes structurelles majeures afin de garantir la pérennité du modèle d'archéologie préventive à la française. La situation de l'Inrap devra donc être suivie attentivement dans les prochains mois.

En conclusion, Yann Gaillard et moi-même vous recommandons l'adoption des crédits de cette mission.

M. Yann Gaillard , rapporteur spécial . - On ne peut pas faire autrement !

M. François Marc , rapporteur général . - Je salue la qualité du travail de nos deux rapporteurs. Les dépenses fiscales rattachées à la mission « Culture » sont toujours aussi nombreuses : 27 dispositifs, pour un total de 393 millions d'euros... La Cour des comptes comme l'Inspection générale des finances nous ont pourtant donné à penser qu'il faudrait passer tout cela au peigne fin. Quel est votre sentiment ? Le ministre a-t-il commencé à y regarder de plus près ?

Les taxes affectées représentent 700 millions d'euros. On se félicite de la rebudgétisation de la taxe sur les jeux en ligne, et on pourrait utilement étudier l'extension de ce type d'action à une plus grande échelle.

Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche contribue aux crédits de cette mission, au moyen du programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » de la mission « Recherche et enseignement supérieur », à hauteur de 515 millions d'euros. Quelle est la destination de ces crédits ? Financent-ils les musées ou profitent-ils vraiment aux étudiants ?

M. Yann Gaillard , rapporteur spécial . - L'action du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche consiste à valoriser le patrimoine scientifique, technique et naturel et à accompagner les projets des établissements. Une partie de ce montant sert à compenser la gratuité d'accès aux espaces d'exposition permanente des jeunes de moins de 26 ans, par exemple au musée du Quai Branly. Par ailleurs, ces crédits couvrent les subventions pour charges de service public en faveur des établissements d'enseignement supérieur.

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial . - S'agissant des dépenses fiscales, nous avons posé, dans notre questionnaire budgétaire, une question sur les perspectives de réduction dans le cadre du budget 2014. Le ministère ne semble pas avoir l'intention de supprimer de dispositifs pour le moment. Notre commission se doit de revenir à la charge. C'est bien notre insistance à dénoncer l'inutilité du trésor de guerre du CNC qui est à l'origine de la ponction en 2013 puis en 2014.

M. François Marc , rapporteur général . - Oui, nous avions poussé le ministère dans ses retranchements. Nous pourrions poursuivre la démarche, avec une analyse détaillée des 27 dispositifs.

M. Philippe Marini , président . - Nous avons récupéré sur le CNC 150 millions d'euros l'année dernière, 90 cette année. Monsieur le rapporteur général, nous prenons acte de votre préconisation d'approfondir l'évaluation des dispositifs de dépense fiscale.

M. Roger Karoutchi . - Je félicite nos deux rapporteurs pour leur travail. La politique du ministère de la culture me laisse perplexe. Comme l'a expliqué l'an dernier Yann Gaillard dans son rapport d'information sur la Philharmonie de Paris, le coût du projet a dérivé, pour un total qui approche aujourd'hui les 400 millions. On invoque des demandes des architectes, mais ces exigences n'ont été négociées ni avec la Ville de Paris, ni avec la région Ile-de-France !

La région n'est pas compétente en matière culturelle et s'est pourtant engagée dans le projet initial, dont le coût était estimé à 204 millions d'euros : pourquoi financerait-elle les dépassements ? Fin 2012, on nous demandait de mordre sur le budget 2013, de même cette année sur le budget 2014, et maintenant on nous sollicite pour rénover certains bâtiments, châteaux, églises... Ce n'est pas notre mission et nous n'avons pas d'argent. L'État préfère les opérations nouvelles, et pour l'entretien du patrimoine, il se défausse sur nous. S'il se faisait moins pressant, nous pourrions discuter, mais en toute hypothèse, nous ne pouvons pas tout faire : avec quel argent ?

M. Yann Gaillard , rapporteur spécial . - Notre commission a fait un gros travail sur la Philharmonie l'an dernier, nos conclusions avaient d'ailleurs fait scandale. Nous ne pouvons pas revenir chaque année sur ce sujet, d'autant que le mal est fait.

M. Gérard Miquel . - Je félicite à mon tour nos deux rapporteurs. Lassé par l'inefficacité et les retards accumulés par l'Institut national de recherches archéologiques préventives, j'ai constitué ma propre équipe d'archéologie préventive dans le département. Ses interventions donnent toute satisfaction. La direction régionale des affaires culturelles (Drac), avec qui nous avons monté le projet, s'était engagée à apporter conseils et financement. Je ne vois toujours rien venir.

M. Philippe Marini , président . - Depuis un an, les choses se sont détériorées...

M. Gérard Miquel . - Je pourrais vous raconter des épisodes similaires datant de la période antérieure. Messieurs les rapporteurs, usez de votre influence auprès du ministère de la culture pour résoudre ce problème ! En 2006, le ministère de la culture a proposé de donner à certains départements la gestion des crédits relatifs au patrimoine. Après deux ans de négociations, elle nous a été confiée. Les crédits ont légèrement augmenté et ils ont été abondés par le département et la région. Il ne s'agissait pas seulement du patrimoine de l'État, mais de tous les bâtiments, publics ou privés. Trois ou quatre ans plus tard, les inspecteurs du ministère ont trouvé ce système formidable et ont préconisé sa généralisation dans toute la France. Mais l'administration centrale n'aime pas la décentralisation... Les crédits ont donc été repris par l'État, et je demande en vain depuis des mois un rendez-vous à la ministre. Nous sommes réactifs, efficaces, seulement les architectes de bâtiments de France voient cette évolution d'un mauvais oeil. Cette situation me désole !

M. Vincent Delahaye . - L'année dernière, tout le monde reconnaissait que le CNC disposait d'un fonds de roulement excessif. Le prélèvement proposé par le Gouvernement était de 150 millions d'euros. Pour ma part, j'avais déposé un amendement le fixant à 400 millions d'euros, qui avait été rejeté. Vient un moment où il faut se mettre d'accord. Et à dire vrai, nous pouvons prélever davantage : sur 800 millions d'euros de fonds de roulement, je persiste à penser que nous pourrions en récupérer 400.

M. Albéric de Montgolfier . - Selon l'architecte Dominique Perrault, l'entretien de la Bibliothèque nationale de France coûterait 200 à 300 millions d'euros par an, ce qu'il juge très normal. Si c'est le coût exact, il faudrait s'en souvenir au moment du choix de futurs projets architecturaux !

Le rapport indique qu'un avenant au contrat de performance 2011-2013 de l'Inrap devrait être signé. Or nous versons la redevance d'archéologie préventive mais les architectes de l'Inrap - qui ne compte pas moins de 2 095 équivalents temps plein (ETP) - ne sont jamais sur le terrain... C'est le contrat de performance entier qu'il faudrait renégocier.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx . - Je salue à mon tour la qualité du travail de nos deux rapporteurs.

Contrairement à certains ici, je vois dans ce budget une véritable diminution. Le ministère de la culture n'est peut-être pas une variable d'ajustement, mais nous n'en sommes pas loin ! Tout le monde doit faire un effort. L'Opéra de Paris est une référence internationale, il remplit une mission de service public. En 2014, ses subventions n'en diminuent pas moins, en investissement comme en fonctionnement. Cela ne sera pas sans conséquences sur sa programmation artistique. Certes, il est dépourvu de contrat de performance et a récemment changé de directeur. Mais son plan pluriannuel de financement a déjà été revu en juillet dernier, et se verra cantonné à des mises aux normes du bâtiment. L'État doit arrêter de lancer de nouvelles opérations, faute de quoi son patrimoine existant sera condamné à vivre d'expédients.

Quoi qu'il en soit, je suis étonnée de voir à quel point le budget de la culture est sacrifié cette année !

M. Philippe Marini , président . - L'on devrait, partout, réussir à faire mieux avec moins.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx . - Pas à l'Opéra.

M. Philippe Marini , président . - Là comme ailleurs.

M. Éric Doligé . - L'Inrap agace tout le monde. Albéric de Montgolfier vous le confirmera, chez nous, il a fallu débourser 6 millions d'euros pour dégager les restes de quelques fermes gallo-romaines, alors qu'il y en a partout et qu'on les connaît déjà très bien. En période de crise économique, cela fait beaucoup. Le préfet et la Drac se moquent de nous nous ! Ils savent que nous avons raison mais trouvent toujours intéressant de fouiller. Nos lois ne tiennent pas suffisamment compte de la situation économique et environnementale.

Nous avons des services d'archéologie. Mais nous dépendons des services de l'État, dont les recettes proviennent à 60 % des fouilles. Quand ils ont besoin d'argent, ils viennent fouiller chez nous. Rendez-vous compte : sur un terrain de 8 hectares, 3 millions d'euros de fouilles, pour une malheureuse ferme gallo-romaine ! En période de récession, cela n'est plus supportable. Certaines entreprises sont parties à cause de cela. Ce n'est pas ainsi que les Drac se feront aimer des élus locaux.

Mme Michèle André . - Si le budget de la culture diminue, c'est parce que le Gouvernement a demandé des efforts à tous les ministères. Il y a certes des choses à revoir, mais il faut bien trouver des économies quelque part.

Je suis novice en matière de politique culturelle parisienne : qu'est-ce que l'association de préfiguration de la Philharmonie de Paris ? Si une collectivité se rendait responsable de dépassements de budget de cette nature, il y a belle lurette qu'elle en aurait répondu.

M. Philippe Marini , président . - Tout figure dans le rapport de Yann Gaillard de l'année dernière. En 2012, nous faisions remarquer que manquait surtout à la Philharmonie de Paris une véritable maîtrise d'ouvrage apte à définir ses objectifs et à prendre ses responsabilités.

M. Jean Germain . - Les crédits des établissements d'enseignement spécialisé pour la musique et la danse, à savoir les conservatoires à rayonnement régional ou départemental, diminuent : 320 000 élèves sont concernés. En 2004 une clarification des compétences de chaque niveau de collectivité avait été demandée, elle n'a pas été faite. La baisse des crédits a atteint 25 % en 2013 et sera de 30 % en 2014. J'en redoute les conséquences... D'autant que les communes recherchent des animateurs dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires.

Mme Marie-France Beaufils . - Je partage les interrogations de Jean Germain. Ces baisses auront des conséquences sur l'évolution des activités de création dans lesquelles les collectivités territoriales sont impliquées. L'intervention de l'État recule ; nous savons vers qui se tournent alors ces structures. Les conséquences sur le terrain ne seront pas négligeables.

Pour ce qui est du CNC, je ne partage pas les vues de Vincent Delahaye. Mieux vaudrait des actions bien ciblées qu'une suppression des moyens. Nous avons été nombreux à remettre à niveau nos salles de cinéma, nous n'avons pas toujours été accompagnés. Enfin, nous devons veiller à la traçabilité de toute taxe affectée, qui doit conserver son objet, et non devenir un nouvel impôt alimentant le budget général.

Sur la question des fouilles préventives, le choix doit se faire en amont : nous avons décidé, nous, législateurs, que l'on fouillerait systématiquement. Si nous voulons infléchir cette orientation, à nous de le faire, l'Inrap n'est pas en cause.

M. Michel Berson . - Ma question porte sur l'établissement public de coopération culturelle de Tautavel, le Centre européen de la préhistoire, qui associe un musée de la préhistoire à un centre de recherche sur la préhistoire. Ce type d'association est fréquent entre le ministère de la culture et le ministère de la recherche. Or la culture souhaite se désengager des activités de recherche et les confier à l'Université de Perpignan. C'est là une hérésie : la collection est riche, mais elle perdra toute sa valeur si on en éloigne les chercheurs. C'est un problème budgétaire, il faut trouver une autre solution. D'autres établissements de même type pourraient connaître le même sort.

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial . - Je partage le point de vue de notre collègue Karoutchi, l'affaire de la Philharmonie est un vrai scandale.

M. Yann Gaillard , rapporteur spécial . - Nous avons déjà dénoncé tout cela...

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial . - La région n'a toutefois payé que 3,3 millions d'euros sur les 20 millions d'euros qu'elle s'était engagée à apporter, auxquels s'ajoutent les 25 millions que doit la Ville de Paris au titre des surcoûts identifiés en 2012. Enfin, si l'on prend en compte les 10 millions d'euros de surcoût identifiés cette année, c'est un minimum de 52 millions d'euros de dépassements qui seraient à la charge de l'État.

J'indique à Marie-Hélène des Esgaulx que, oui, la subvention de l'Opéra de Paris diminue mais, Michèle André l'a bien rappelé, en temps de disette il faut choisir des victimes. Même chose pour les conservatoires : nous sommes condamnés à supprimer certains crédits. Je comprends vos préoccupations, mais alors il faut prendre l'argent autre part. Quant aux interrogations de Marie-France Beaufils, je rappelle que la ponction sur le CNC porte, non sur ses ressources, mais sur un trésor de guerre stérile et inutile. Enfin, le devenir du Centre de recherche de Perpignan est en effet une question préoccupante.

M . Philippe Marini , président . - Elle méritera d'être approfondie.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Culture ».

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Réunie à nouveau le jeudi 21 novembre 2013, sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission, a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la mission « Culture » et a décidé de proposer au Sénat la suppression de l'article 62 nonies.

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