EXAMEN EN COMMISSION

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(MERCREDI 17 JANVIER 2018)

M. François-Noël Buffet , rapporteur . - Cette proposition de loi de notre collègue député Jean-Luc Warsmann vise à résoudre un problème ponctuel mais urgent lié au statut des demandeurs d'asile soumis au règlement européen dit de Dublin. Il ne s'agit pas ici de résoudre l'ensemble de la problématique migratoire. Elle sera l'objet d'un projet de loi dont la présentation au Conseil d'État est annoncée pour le mois de février, et que nous n'examinerons sûrement pas avant le printemps, après l'Assemblée nationale.

Le régime d'asile européen commun résulte des accords de Tampere de 1999, le Conseil retenant comme principe cardinal qu'un seul État soit compétent pour gérer l'examen de chaque demande d'asile. Les accords de Dublin sont appliqués dans 32 États, les membres de l'Union européenne ainsi que l'Islande, la Norvège, la Suisse et le Lichtenstein. Un migrant qui fait une demande d'asile est enregistré dans la base de données Eurodac, il est autorisé à rester dans le pays où il a présenté sa demande, mais pas à se déplacer. Une personne qui, par exemple, a fait sa demande en Grèce et qui serait contrôlée en Allemagne doit être renvoyée en Grèce pour que sa demande d'asile soit traitée, l'objectif étant d'éviter un « forum shopping » de l'asile, et de développer la solidarité entre États parties aux accords.

Lorsqu'un étranger est contrôlé en France ou qu'il fait une demande d'asile, nous devons nous assurer que le traitement de sa demande ne relève pas d'un autre État, et en particulier qu'il n'a pas fait de demande ailleurs en Europe auparavant. Si c'est le cas, nous adressons une demande d'autorisation de transfert au pays qui a reçu la première demande, puis nous le renvoyons. Huit critères bien définis et hiérarchisés permettent à l'administration d'apprécier la situation de ces étrangers et de déterminer le pays responsable.

Ce système « Dublin » fonctionne tant que les flux migratoires ne sont pas trop importants, pas en cas de crise.

Depuis quelque temps, nous rencontrons des difficultés liées à l'augmentation des flux migratoires et à la volonté d'évitement de ces enregistrements. Par exemple, il a pu arriver que, de manière volontaire ou non, des entrées en Grèce, en Italie ou ailleurs ne soient pas enregistrées dans Eurodac.

Or, au bout d'un certain délai, si le pays d'arrivée n'a pu être identifié, la France redevient responsable et c'est à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) d'examiner la demande d'asile. Sur les 100 412 demandes faites à l'Ofpra en 2017, 22 000 relèveraient ainsi de ce cas.

Le droit français actuel ne permet pas le placement en rétention des étrangers sous procédure « Dublin » avant l'obtention d'une autorisation de transfert - conformément à la volonté initiale du législateur -, comme l'a rappelé le Conseil d'État, saisi pour avis par la cour administrative d'appel de Douai.

Après une décision de transfert, et pour préparer celui-ci, la préfecture peut placer l'étranger sous assignation à résidence ou en rétention. L'article 28 du règlement Dublin III précise les conditions requises pour décider d'une rétention après l'obtention de l'autorisation de transfert : un risque non négligeable de fuite, caractérisé après un examen individuel de la situation et respectant le principe de proportionnalité, étant entendu que d'autres mesures, comme l'assignation à résidence, peuvent être préférées. Mais un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), en mars 2017, a considéré que le placement en rétention d'un étranger « dubliné » ne pouvait être mis en oeuvre par un État que si celui-ci avait défini, par des dispositions de portée générale, les critères établissant le risque non négligeable de fuite.

La Cour de cassation a suivi le même raisonnement et jugé que les critères figurant dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour autoriser la rétention de droit commun n'étaient pas suffisants, faute de définition explicite du risque non négligeable de fuite. Aujourd'hui, nos préfectures n'ont donc plus la possibilité de placer en rétention une personne, même si elle a fait l'objet d'une autorisation de transfert.

Nos auditions et nos déplacements le confirment : nos services de préfecture considèrent la situation comme intenable, l'exécution de la décision de transfert dans le pays de première demande est impossible dans bien des cas, faute de pouvoir recourir désormais à la rétention.

La proposition de loi vise, en réponse à ce problème, d'une part à sécuriser juridiquement la possibilité de placement en rétention après la décision de transfert en précisant la définition du « risque non négligeable de fuite », et d'autre part à autoriser, dans certains cas, le placement en rétention avant l'obtention d'une autorisation de transfert.

Le texte de l'Assemblée nationale ne pose pas de problème sur le fond, mais je vous proposerai plusieurs améliorations : préciser les modalités de la prise d'empreintes digitales, ramener à sept jours le délai de recours contre la décision de transfert et allonger de quatre à six jours la durée de validité de l'ordonnance autorisant les visites domiciliaires par les forces de l'ordre en cas d'assignation à résidence ; cela sécurise cette procédure et est de nature à éviter le choix systématique d'un placement en rétention.

Je propose en outre d'insérer un article additionnel : une question prioritaire de constitutionnalité a donné lieu à une décision du Conseil constitutionnel, en novembre dernier, fragilisant l'assignation à résidence des étrangers condamnés à une interdiction de territoire national mais qui ne peuvent être éloignés. Le Conseil constitutionnel exige que la loi fixe une durée à l'issue de laquelle l'administration doit motiver à nouveau la décision de maintien sous assignation à résidence.

Le Conseil constitutionnel a laissé au Gouvernement jusqu'à la fin juin 2018 pour régler ce problème, mais ce dernier n'a rien entrepris pour l'instant, considérant sans doute qu'il pourrait régler la question dans le futur projet de loi sur l'asile et l'immigration. Il paraît plus prudent de régler cette question dès à présent, d'autant qu'elle concerne souvent des personnes condamnées pour terrorisme, dont on ne doit pas perdre la trace.

La crise migratoire met à mal le règlement de Dublin. Voyez les difficultés auxquelles se heurtent la Grèce, l'Italie, à telle enseigne que l'Union européenne a dû mettre en place en 2015 un dispositif dérogatoire de relocalisation. Les services de la Commission nous ont dit que des discussions étaient en cours pour faire évoluer le règlement de Dublin sans remettre en cause son principe, mais cela prendra du temps. Il faut donc traiter le point particulier dont il est question aujourd'hui, tout en ayant conscience de la nécessité de faire évoluer le règlement dans son ensemble
- mais cela nous échappe largement.

Je ne suis pas hostile, vous le savez, à l'efficacité de la lutte contre l'immigration irrégulière. Mais nous devrons aussi veiller aux moyens matériels et humains accordés aux centres de rétention. Un effort supplémentaire sera nécessaire en 2018.

M. Philippe Bas , président . - Merci pour cette présentation limpide. C'est un texte modeste mais qui ne manque pas d'importance. Il tire les conséquences de plusieurs décisions de justice qui ont influé sur l'état du droit.

M. Jean-Yves Leconte . - Je partage votre description objective, même si je diffère sur vos conclusions. Dublin est une conséquence de Schengen, où il a été décidé que chaque pays serait responsable de sa partie de frontière extérieure. Depuis 2015, cela ne fonctionne plus, compte tenu du nombre des arrivées. On n'y remédiera pas en mettant une rustine sur une chambre à air complètement déchirée ! Depuis deux ans, nous avons fait de grands progrès grâce à Frontex et au Bureau européen d'appui en matière d'asile, qui a un rôle de plus en plus important, comme dans les prises d'empreintes digitales en Grèce et Italie. Ces pays ont accepté que ces agences enregistrent des étrangers qui ne l'étaient pas auparavant.

Il faudrait éviter qu'un étranger ait des chances différentes d'obtenir l'asile selon le pays où il le demande. C'est une première condition pour que le règlement de Dublin fonctionne. Mais le problème, au-delà, c'est que dans les conditions actuelles, un pays comme le Luxembourg n'est pas concerné au même niveau que la Grèce ou l'Italie. Il y a de plus en plus d'étrangers en France qui ont été enregistrés dans Eurodac mais, si nous respections le règlement de Dublin à la lettre, l'Italie devrait prendre en charge la moitié des demandeurs d'asile européens ! Ce n'est pas sérieux !

Vous parlez des relocalisations, mais elles ne concernent que 30 000 personnes, soit trois jours d'arrivées en 2015. C'est infime ! Quant à la rustine que vous proposez, elle sera inefficace et moralement loin d'être satisfaisante.

Les « dublinés » sont de deux types : certains, déboutés en Allemagne, tentent leur chance ailleurs - la logique voudrait qu'on les éloigne. Mais renvoyer les autres, arrivés par l'Italie et la Grèce, vers ces pays, équivaut à un non-respect de nos engagements en termes de droit d'asile. Il y a par ailleurs un problème d'efficacité : sinon pour faire du chiffre, quel est l'effet d'un éloignement de Lille vers Cologne ? Le demandeur revient deux jours après ! Même chose pour l'Italie, mais dans les conditions que l'on connaît...

Rappelons-nous que le séjour d'un demandeur d'asile sur le territoire est régulier le temps de l'instruction de sa demande. Pour la première fois de notre histoire, nous placerions en rétention des personnes séjournant régulièrement sur le territoire !

Notons enfin que le fait de passer par une proposition de loi et non par un projet de loi évite une étude d'impact qui montrerait l'inefficacité des mesures proposées et un examen par le Conseil d'État qui aurait révélé son caractère incompatible avec les engagements internationaux de la France. C'est pourquoi le groupe socialiste et républicain proposera la suppression de chacun des articles de ce texte.

M. Pierre-Yves Collombat . - À vos voeux liminaires de bonne santé, monsieur le président, je veux en ajouter un, pour souhaiter une bonne santé morale à notre pays ! Car j'avoue que la compétition que l'on observe entre les promoteurs de textes de plus en plus répressifs en matière d'immigration a de quoi effrayer.

Il s'agirait, ici, selon l'intitulé du texte, de permettre une bonne application du régime d'asile européen. Mais comme l'a rappelé Jean-Yves Leconte, ce n'est plus le problème. Le régime de Dublin ne fonctionne pas, il est injuste - la Grèce et l'Italie en font les frais, malgré les pseudo-aides qu'on leur accorde. Il trahit une approche insuffisante du problème de l'immigration, que l'on ne peut plus traiter, ainsi que le soulignait le rapporteur, comme une simple question juridique ni même d'ordre public, parce que les flux ne sont plus les mêmes.

Non seulement ce texte n'apporte pas de solution, mais il retarde le moment où l'on prendra le problème à bras le corps, pour se doter d'une politique globale de l'immigration au niveau européen. Si, sur un tel sujet, on ne peut apporter de réponse au niveau européen, alors, à quoi sert l'Europe ? Il ne s'agit pas de placer un système moribond sous soins palliatifs, mais bien de revoir totalement les fondements de cette politique.

M. Dany Wattebled . - Je suis étonné d'apprendre qu'un étranger condamné et interdit de séjour puisse éviter d'être renvoyé dans son pays d'origine, pourtant prêt à l'accueillir, sans qu'il ne se passe rien.

M. Philippe Bas , président . - Notre rapporteur y reviendra peut-être. Il s'agit d'un cas d'espèce, mais qui peut avoir des conséquences importantes. Le Conseil constitutionnel a simplement jugé que l'assignation à résidence d'un ancien détenu interdit du territoire national ne peut être prolongée ad vitam aeternam sans réexamen de la motivation de la mesure. Il y a là un motif tout à fait légitime en ce qu'il touche aux libertés publiques, mais cela pose problème lorsque ne sont pas réunies toutes les conditions juridiques pour un renvoi vers le pays d'origine en cas de risques de torture, par exemple. D'où la proposition de notre rapporteur.

M. Alain Richard . - Je rends hommage à la clarté et aux orientations de ce rapport. La proposition de loi vise à éviter que le système de protection des réfugiés soit détourné. Elle concerne des personnes qui, bien qu'informées d'avoir à déposer leur demande d'asile dans le pays par lequel elles sont entrées dans l'Union européenne, essayent délibérément de se déplacer pour éviter une reconduite.

À ceux qui jugent qu'il ne faut pas faire ce travail de mise en ordre et de recherche réaliste des moyens de reconduire, au motif que la solution passe par un système global au niveau européen, je fais remarquer que l'application du droit d'asile est de compétence nationale, et qu'il est peu vraisemblable qu'un accord entre tous les États membres de l'Union européenne en viennent à court terme à transférer cette compétence. Nous sommes donc dans un schéma de coopération entre États souverains, et il faudra bien continuer à procéder par accords internationaux...

M. Pierre-Yves Collombat . - Il s'agit de les transformer.

M. Alain Richard . - ... comme les accords de Dublin, et à les appliquer de façon plus rigoureuse et plus méthodique. C'est pourquoi je soutiens cette proposition de loi.

M. Philippe Bonnecarrère . - Merci de votre présentation, monsieur le rapporteur, sur un sujet complexe qui appelle à éviter tout manichéisme. Cette proposition de loi répond aux conséquences de décisions de justice, non pour les contourner ou les infirmer, mais pour prendre acte que la loi de 2015 présente des insuffisances, puisqu'à défaut d'un certain nombre de critères objectifs, elle ne permet pas de tirer des conséquences qui avaient pourtant été souhaitées. Ce texte de bon aloi corrige, en somme, des insuffisances rédactionnelles, et notre groupe n'y voit pas de difficulté.

Il est difficile de déconnecter ce débat de celui qui se profile, avec le projet de loi à venir. Notre pays est celui qui, en Europe, écarte le moins les personnes qui viennent sur notre territoire - ce qui décrédibilise le système européen - en même temps que celui qui accueille le moins bien les personnes en situation régulière. C'est cumuler les déficiences et c'est pourquoi un projet de loi est indispensable.

Comme l'a rappelé Alain Richard, il n'y a pas eu, sur le droit, d'asile, de transfert complet de souveraineté, si bien que la question n'est pas, à proprement parler, de compétence européenne, même si des solutions techniques sont possibles, qui restent à mettre en place : reconnaissance mutuelle des décisions en matière de droit d'asile, alignement des critères
- ce qui éviterait, par exemple, que les Afghans déboutés en Allemagne se précipitent en France pour tenter une nouvelle fois leur chance.

Je suis fort marri de constater qu'aucun accord ne se dessine entre les États européens, qui permettrait d'envisager un règlement de Dublin IV. On peut le regretter, de fait, car quelle que soit la qualité des dispositions nationales que nous prendrons, nous peinerons, en l'absence d'un accord européen, à trouver des solutions efficaces.

Dernière observation, enfin. Un amendement de notre rapporteur concerne le relevé des empreintes digitales, indispensable pour suivre les réfugiés dans leur parcours européen. Il me semble cependant nécessaire de vérifier si cette disposition est conforme à nos règles constitutionnelles et, s'il était tranché dans un sens défavorable, de songer à ce point à l'occasion de la prochaine révision constitutionnelle, tant il est important pour la suite des opérations.

Mme Brigitte Lherbier . - Je remercie notre rapporteur de son travail mené sans a priori . Cette proposition de loi apporte une réponse objective aux insuffisances constatées, d'autant que la France, comme le soulignait M. Bonnecarrère, se doit d'affiner son accueil des étrangers en situation régulière.

J'insiste sur le problème des étrangers ayant commis des actes délictueux, soulevé par M. Wattebled. Le Président de la République a fait une différence entre les uns et les autres, en déclarant qu'une attention particulière devait être portée à ceux qui ont troublé l'ordre public. Existe-t-il des fichiers européens permettant de repérer ceux qui ont commis des actes délictueux en Europe ? Les autres pays européens ont-ils la même réaction que nous ? Car s'il est des pays d'origine qui acceptent de voir revenir leurs ressortissants, il en est aussi qui n'en veulent plus. Que fait-on dans ce cas ?

Vous avez pu constater qu'au centre de rétention de Lesquin, près des trois quarts des personnes retenues sortaient de prison. Il est regrettable de ne pas avoir recherché de solution en amont, en traitant ce problème en prison. Notre rapporteur a donc bien fait d'en proposer une ; et il faudra encore affiner, au niveau européen.

M. Alain Marc . - Existe-t-il des études sur les différences de traitement des demandeurs d'asile selon les pays ? Les pays réputés plus accueillants ont-ils un effet de « pompe aspirante » pour les demandeurs d'asile ? Existe-t-il un référentiel commun à tous les pays pour le statut de Dublin ? Ne doit-on pas, tout en préservant la compétence nationale, y travailler ?

M. André Reichardt . - Nous convenons tous que le dispositif de Dublin ne fonctionne plus, compte tenu de l'importance des flux migratoires, et qu'il convient de le modifier. Mais c'est affaire de coopération internationale, ce qui prendra beaucoup de temps. En l'attente, cette proposition de loi se justifie amplement pour appliquer le seul dispositif existant. J'y suis donc favorable.

M. François-Noël Buffet , rapporteur . - Il faut avoir à l'esprit que le migrant qui arrive, en Grèce ou ailleurs, et se fait enregistrer comme demandeur d'asile acquiert l'autorisation de rester sur le territoire du pays d'arrivée, mais pas celle de se déplacer sur l'ensemble du territoire européen. Lorsqu'il va dans un autre pays, il est en situation irrégulière. Que les choses soient claires sur ce point. Sans vous abreuver de chiffres à l'excès, je rappelle qu'à la préfecture du Nord, 42 % des demandeurs d'asile relèvent du statut de Dublin. C'est dire la situation.

M. Bonnecarrère a insisté sur le relevé d'empreintes digitales. À l'heure actuelle, quelqu'un qui refuse de donner ses empreintes peut être poursuivi pénalement. Autant dire que l'efficacité est nulle. Nous proposons donc de prévoir qu'en cas de refus, l'administration puisse se prévaloir de cet élément pour placer l'intéressé en rétention. C'est conforme au règlement de Dublin. Nous avons également ajouté, parmi les critères d'appréciation, des éléments relatifs aux documents d'identité - selon qu'ils ont été perdus ou détruits, par exemple, l'appréciation ne saurait être la même.

Le problème des étrangers condamnés à une peine d'emprisonnement et que l'on ne peut renvoyer dans leur pays d'origine est récurrent. Sur l'affaire qui a donné lieu à QPC, je précise qu'elle concerne un étranger condamné dont le tribunal a jugé qu'à l'issue de sa peine, il ne pouvait rester sur le territoire national. L'intéressé, assigné à résidence, a déposé plusieurs recours et se retrouve inexpulsable en raison des risques qu'il encourt dans son pays. Le Conseil constitutionnel n'a fait que juger que l'on ne pouvait assigner quelqu'un à résidence ad vitam aeternam , sans réexaminer la motivation de cette décision, parce que ce serait contraire à la liberté d'aller et venir. Il a donc demandé au législateur de fixer un délai au terme duquel la décision doit être remotivée. Ce qui n'est pas une interdiction de reconduite.

Lors des entretiens que nous avons eus à Bruxelles, il est clairement apparu que l'idée d'une agence européenne de l'asile destinée à unifier les décisions n'était pas à l'ordre du jour, pour des raisons politiques. Pour être plus précis encore, j'ajoute que la question se poserait de son statut : serait-elle indépendante ou dépendante des États, sachant qu'en Europe, seule la France et la Belgique laissent les mains libres à leur organisme en charge de l'asile. Ailleurs, c'est l'État qui pilote, en direct.

En revanche, il y a bien volonté de faire converger d'un État à l'autre les critères de protection utilisés par les organismes nationaux chargés de l'asile, et d'harmoniser les jurisprudences, pour trouver des solutions équilibrées sur l'ensemble du territoire. C'est là un travail important, qui est engagé.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1 er

L'amendement de suppression COM-3 n'est pas adopté.

M. François-Noël Buffet , rapporteur . - Mon amendement COM-4 , rédactionnel, vise à assurer la lisibilité de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatif aux conditions de placement en rétention des étrangers.

L'amendement COM-4 est adopté.

M. François-Noël Buffet , rapporteur . - Mon amendement COM-5 vise à introduire, dans les critères d'appréciation du « risque non négligeable de fuite » permettant le placement en rétention d'un « dubliné », le refus de se soumettre au relevé de ses empreintes digitales ou l'altération volontaire de celles-ci.

L'amendement COM-5 est adopté.

M. François-Noël Buffet , rapporteur . - Mon amendement COM-6 fait des dissimulations relatives au parcours migratoire, à la situation familiale et aux demandes antérieures d'asile un critère d'appréciation du risque non négligeable de fuite.

L'amendement COM-6 est adopté.

L'amendement rédactionnel COM-7 est adopté.

M. François-Noël Buffet , rapporteur . - Mon amendement COM-8 vise à allonger de quatre à six jours la durée de validité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant les visites domiciliaires chez un étranger assigné à résidence. C'est une demande de la police aux frontières.

L'amendement COM-8 est adopté.

Article 1 er bis

L'amendement de suppression COM-1 n'est pas adopté.

L'amendement de coordination COM-9 est adopté.

Article 2

L'amendement de suppression COM-2 n'est pas adopté.

M. François-Noël Buffet , rapporteur . - Mon amendement COM-10 vise à ramener de 15 à 7 jours le délai de contestation d'une décision de transfert. Le Sénat avait adopté une disposition identique en 2015, à l'initiative de notre collègue Valérie Létard.

L'amendement COM-10 est adopté.

L'amendement de précision COM-11 est adopté.

Article additionnel après l'article 2

M. François-Noël Buffet , rapporteur . - Mon amendement COM-12 vise à sécuriser les assignations à résidence des étrangers faisant l'objet d'une interdiction judiciaire du territoire. Il s'agit, en réponse à la décision du Conseil constitutionnel du 30 novembre 2017, de disposer d'un texte clair avant la date limite du 30 juin 2018. Je m'en suis expliqué.

L'amendement COM-12 est adopté.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 1 er
Conditions de placement en rétention et d'assignation à résidence
des étrangers faisant l'objet d'une procédure « Dublin »

M. LECONTE

3

Suppression de l'article 1 er

Rejeté

M. BUFFET, rapporteur

4

Rédactionnel et coordination

Adopté

M. BUFFET, rapporteur

5

Ajout du refus de se soumettre au relevé de ses empreintes digitales et de l'altération de celles-ci dans la liste des critères permettant de caractériser un risque non négligeable de fuite

Adopté

M. BUFFET, rapporteur

6

Ajout des dissimulations relatives au parcours migratoire, à la situation familiale et aux demandes antérieures d'asile comme critères permettant de caractériser un risque non négligeable de fuite

Adopté

M. BUFFET, rapporteur

7

Rédactionnel

Adopté

M. BUFFET, rapporteur

8

Allongement de quatre à six jours de la durée de validité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant les visites domiciliaires d'un étranger assigné à résidence

Adopté

Article 1 er bis
Information et conditions de placement en rétention
des étrangers faisant l'objet d'une procédure « Dublin »

M. LECONTE

1

Suppression de l'article 1 er bis

Rejeté

M. BUFFET, rapporteur

9

Coordination

Adopté

Article 2
Coordinations - Interdiction de transférer un demandeur d'asile vers un État « Dublin »
faisant preuve de « défaillances systémiques » - Délai de saisine du juge administratif

M. LECONTE

2

Suppression de l'article 2

Rejeté

M. BUFFET, rapporteur

10

Réduction de 15 à 7 jours du délai de contestation d'une décision de transfert

Adopté

M. BUFFET, rapporteur

11

Interdiction du transfert vers les pays à défaillances systémiques mais maintien de la possibilité d'engager la procédure « Dublin »

Adopté

Article additionnel après l'article 2

M. BUFFET, rapporteur

12

Sécurisation juridique, en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité, des assignations à résidence des étrangers faisant l'objet d'une interdiction judiciaire du territoire

Adopté

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