Mardi 28 novembre 2006

- Présidence de M. Nicolas About, président. -

PJLF pour 2007 - Mission « Solidarité et intégration » et articles 53 à 56 rattachés - Examen du rapport pour avis

La commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Paul Blanc sur le projet de loi de finances pour 2007 (mission « Solidarité et intégration » et articles 53 à 56 rattachés).

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a tout d'abord indiqué que les crédits de la mission « Solidarité et Intégration » s'élèvent pour 2007 à 12,2 milliards d'euros, dont plus de la moitié est affectée à l'allocation de parent isolé (API) et l'allocation aux adultes handicapés (AAH).

Pourtant, à enveloppe globale constante, grâce aux économies permises par la diminution significative du nombre de demandeurs d'asile et à la réduction de la contribution de l'Etat au fonds de financement de la couverture maladie universelle (fonds CMU), il sera possible de financer par redéploiement les deux priorités de la mission : la poursuite du plan de cohésion sociale et la montée en charge de la loi « Handicap ».

En effet, le budget de 2007 permet à l'Etat d'honorer les engagements pris au titre du plan de cohésion sociale dans trois domaines.

Il s'agit, en premier lieu, d'améliorer l'accueil des publics fragiles ou en difficulté.

A cet égard, le financement de 600 places nouvelles dans les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), dont 100 dans les départements d'outre-mer, particulièrement sous-dotés, ainsi que la revalorisation des salaires des personnels constituent un élément positif.

En revanche, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a déploré que l'assainissement de la situation financière des CHRS, préconisé par la mission d'inspection de l'Igas et de l'IGF en 2005, n'ait pas été poursuivi, et a annoncé qu'il présenterait un amendement visant à verser, pour 2007, 6 millions d'euros supplémentaires en complément de l'effort déjà produit en 2006.

En outre, il faut regretter que les mesures correctrices déjà prises ne se soient pas encore traduites par une réduction significative de la durée des séjours dans les CHRS et par une diminution de la part des demandeurs d'asile parmi les personnes accueillies. La persistance de ces deux dérives crée ainsi un engorgement des CHRS et ne leur permet plus d'assumer pleinement leur mission d'accueil des publics en difficulté et d'accompagnement social adapté. La solution réside dans l'augmentation de l'offre de logements dans le parc social et dans le développement des dispositifs d'accueil des demandeurs d'asile.

En revanche, il convient de souligner la création de 1.500 places nouvelles dans les maisons relais, ce qui portera à près de 6.000 la capacité d'accueil de ces structures en 2007.

Enfin, le plan triennal d'hébergement d'urgence prévoit la pérennisation de 2.000 places d'accueil, la transformation de 1.000 autres en places de CHRS, l'allongement de la période d'ouverture des centres d'hébergement et le renforcement de l'accompagnement sanitaire et social.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a ensuite souligné l'effort significatif réalisé en faveur des centres d'accueil pour demandeurs d'asile (Cada), dont les capacités d'hébergement ont été multipliées par quatre depuis 2000, pour atteindre presque 20.000 places à la fin de 2006. Ce dispositif, renforcé par l'existence de 5.700 places d'hébergement d'urgence, la création en 2007 de 1.000 places nouvelles et la revalorisation du tarif journalier des places d'hébergement, privilégie ainsi l'hébergement sur le versement d'une allocation.

Parallèlement, malgré la diminution de 70 % de l'enveloppe budgétaire qui lui est consacrée, la nouvelle allocation temporaire d'attente est revalorisée d'1,8 % à compter du 1er janvier 2007. Les économies réalisées résultent à la fois de la baisse du nombre des demandeurs d'asile, du raccourcissement des délais d'instruction des dossiers et de l'augmentation des places disponibles en Cada.

En ce qui concerne les crédits destinés à améliorer les conditions d'accès aux soins, la diminution de 80 % en deux ans de la contribution de l'Etat au financement du fonds CMU est inquiétante. Elle s'explique par la participation accrue de l'assurance maladie au financement du fonds CMU, compensée par le transfert d'une partie de la taxe sur les alcools et des droits tabacs, ce qui a permis à l'Etat de réduire considérablement sa subvention d'équilibre.

De même, les crédits consacrés au financement de l'aide médicale d'Etat (AME) demeurent insuffisants. Le Conseil d'Etat a annulé les deux décrets du 28 juillet 2005, alors qu'ils devaient permettre d'enrayer la dérive des dépenses constatée chaque année, grâce à un resserrement des conditions d'accès à cette aide. Rappelant que la dette cumulée de l'Etat auprès de la Cnam atteint déjà près de 681 millions d'euros à la fin 2005, le rapporteur pour avis a proposé d'adopter un amendement visant à redéployer des crédits de la mission au profit de l'AME.

Enfin, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a détaillé les mesures relevant de la troisième priorité du plan de cohésion sociale : l'intégration des étrangers et la lutte contre les discriminations.

Le contrat d'accueil et d'intégration connaît une montée en charge d'une rapidité exceptionnelle, puisque plus de 160.000 contrats seront signés à la fin de 2006. L'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (Anaem), qui assure désormais sa mise en oeuvre, sera dotée pour 2007 de 28,6 millions d'euros.

Le budget pour 2007 financera aussi le développement des activités de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde), dont les missions ont été étendues par la loi pour l'égalité des chances du 31 mars 2006. Ses interventions concernent d'ailleurs essentiellement le règlement de litiges relatifs aux discriminations liées à l'origine ou à l'emploi.

Puis M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a dressé un bilan rapide de l'évolution du RMI et de l'allocation de parent isolé (API), qui participent pour une large part à la politique nationale de lutte contre les exclusions.

Trois ans après sa décentralisation, le bilan du RMI est contrasté :

- le ralentissement de la hausse du nombre d'allocataires, 3,9 % en 2005 et 2,4 % en 2006, constitue un élément positif, tempéré par l'échec relatif des dispositifs favorisant le retour à l'activité. En effet, au 30 juin 2006, seuls 8.000 contrats d'insertion - RMA et environ 6.500 contrats d'accompagnement dans l'emploi (CAE) ont été signés, tandis que les contrats d'avenir ont remporté une plus large adhésion (33.000 contrats signés). Par ailleurs, il est encore trop tôt pour percevoir les effets des mesures adoptées dans le cadre de la loi du 23 mars 2006 relative au retour à l'emploi des bénéficiaires de minima sociaux ;

- malgré le dérapage très important des dépenses constatées en 2005, le Gouvernement a ouvert une enveloppe complémentaire de 500 millions d'euros, qui a permis de limiter le surcoût pour les départements à 250 millions. Pour autant il convient que le Gouvernement trouve une solution durable pour garantir le paiement de ce surcoût, d'ores et déjà estimé, pour 2006, à plus d'un milliard d'euros.

Par ailleurs, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a estimé que les crédits consacrés au financement de l'API, 917 millions d'euros pour 2007, sont encore largement insuffisants, bien que les hypothèses retenues pour évaluer l'augmentation du nombre de bénéficiaires soient plus réalistes qu'en 2006. Il faut espérer que les articles 55 et 56 rattachés à la mission, qui limitent le recours à l'API et révisent son mode de calcul, permettent d'en réduire le coût.

Pourtant, au vu de la dette cumulée de l'Etat à l'égard de la branche famille qui, au 30 juin 2006, s'élevait à 232 millions d'euros, il a jugé opportun de prévoir un amendement permettant de redéployer une partie des crédits de la mission « Solidarité et intégration » au profit de l'API.

En ce qui concerne la politique du handicap, ses crédits s'élèvent à 8 milliards d'euros en 2007 et ils ne représentent qu'une petite partie de l'effort public en faveur des personnes handicapées qui mobilise en réalité 47 milliards d'euros, tous financeurs confondus.

Les ressources d'existence pour les personnes handicapées sont le premier poste de dépenses pour l'Etat : les crédits relatifs à l'allocation aux adultes handicapés (AAH) s'élèvent en effet en 2007 à 5,4 milliards d'euros. Certes, le nombre prévisionnel des bénéficiaires pour 2007 est plus fiable que l'an passé mais le montant moyen versé aux bénéficiaires est, lui, largement sous-estimé : il ne tient compte ni de la montée en charge des nouveaux compléments d'AAH, ni du dérapage général observé en 2006. Cette imprévision de l'Etat fait peser sur la branche famille une dette croissante. Il a donc proposé de majorer, par amendement, les crédits affectés à cette allocation.

Puis M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a approuvé le remplacement de la notion d'« impossibilité de se procurer un emploi du fait du handicap » par celle de « restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi » comme fondement de l'octroi de l'AAH pour les personnes dont le taux d'invalidité est compris entre 50 % et 80 %. Pour clarifier encore les conditions d'attribution de cette allocation, il a proposé de supprimer la condition d'ancienneté au chômage d'un an requise de ces personnes.

La seconde priorité de la politique du handicap en 2007 est d'assurer la montée en charge du droit à compensation, plus particulièrement de la prestation de compensation du handicap (PCH) entrée en vigueur le 1er janvier 2006. Malgré la publication des dispositions réglementaires nécessaires, le versement des premières aides a été retardé à cause des délais de mise en place des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Au 31 août 2006, seules 6.500 prestations avaient été attribuées, alors que 38.000 demandes avaient été déposées.

La PCH a toutefois permis de réels progrès, notamment pour le financement des aides humaines : les montants attribués sont supérieurs de 80 % à ceux versés dans le cadre de l'ancienne allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP). Au total, en 2007, le financement de la PCH mobilise 1,2 milliard d'euros de la part des départements et de la caisse nationale de solidarité (CNSA).

Les retards pris dans la mise en place des fonds départementaux de compensation du handicap, chargés d'aider les personnes handicapées à couvrir les frais restant à leur charge après déduction de la PCH sont inquiétants : en septembre 2006, seuls, 50 % des départements avaient installé ce fonds et l'implication de l'Etat reste modeste, équivalente à sa contribution d'autrefois aux sites pour la vie autonome (SVA).

De plus, lorsque ce fonds existe, le versement des aides aux personnes handicapées est affecté par une interprétation extrêmement restrictive de ses possibilités d'intervention : la plupart des gestionnaires considèrent la limitation du « reste à charge » pour les personnes handicapées à 10 % de leurs ressources non pas comme un plancher, mais comme un plafond d'intervention. Un amendement sera donc proposé pour revenir à la position première du Sénat en la matière, afin de préciser que la règle des 10 % s'appliquera aux tarifs et montants-plafonds de la PCH et que le fonds interviendra ensuite pour réduire encore le « reste à charge » si cela est nécessaire.

L'Etat participe à deux autres dispositifs en faveur du droit à compensation : la compensation collective à travers le financement de l'accueil en établissements et services médico-sociaux et le financement des tutelles et curatelles. Sur le premier point, 2.500 places d'établissements et services d'aide par le travail, financées par l'Etat, seront créées en 2007 ainsi que 5.900 places en établissements et services pour adultes et enfants lourdement handicapés, financées par l'assurance maladie et la CNSA. La répartition de ces nouvelles places se fera désormais dans le cadre des programmes interdépartementaux d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie (Priac), en fonction des opérations prioritaires pour équilibrer à l'échelle de la région l'offre d'accueil.

Abordant enfin la question de la participation des personnes handicapées à la vie de la cité, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a salué les progrès remarquables obtenus pour la scolarisation en milieu ordinaire des enfants handicapés : en deux ans, leur nombre a augmenté de 36 % dans le premier degré et de 55 % dans le second degré, grâce au développement des dispositifs d'accompagnement des élèves handicapés, notamment les auxiliaires de vie scolaire (AVS). En 2007, l'éducation nationale financera près de 6.500 postes d'AVS, soit 5 % de plus qu'en 2006.

En matière d'emploi des personnes handicapées, les employeurs publics ont vu pour la première fois leur non-respect de l'obligation d'emploi sanctionné par une contribution au fonds « fonction publique » qui a collecté à ce titre plus de 52 millions d'euros. Le fait qu'aucune aide n'ait été versée en 2006 s'explique par les délais incompressibles pour la mise en place du fonds et de ses structures locales. Il est en revanche incompréhensible que les fonds ainsi collectés soient placés à la Caisse des dépôts et consignations sur un compte non rémunéré, alors que le produit du placement de ces sommes pourrait accroître les crédits destinés à l'insertion des fonctionnaires handicapés. De même, le refus du fonds « fonction publique » de financer le réseau des « Cap Emploi » ne se justifie pas : le décret qui précise les actions susceptibles d'être financées par ce fonds doit être modifié pour l'imposer.

En conclusion, il a proposé d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Solidarité et intégration » et des articles qui lui sont rattachés, sous réserve des amendements qu'il présentera.

M. Guy Fischer s'est inquiété du fait que les crédits relatifs à de nombreuses actions de la mission soient sous-estimés et imposent le dépôt d'amendements de transfert au profit des lignes sous-dotées.

Concernant les CHRS, il a souligné la nécessité de réformer le système d'hébergement d'urgence, dont la saturation résulte à la fois de l'afflux des demandeurs d'asile et de la difficulté à leur trouver un logement dans le parc social. En outre, les crédits de fonctionnement de ces centres sont insuffisants, alors que les personnels sont confrontés à des personnes qui connaissent des difficultés sociales et sanitaires croissantes, nécessitant un véritable accompagnement.

Il s'est alarmé de la politique conduite à l'égard des demandeurs d'asile qui font l'objet de discriminations croissantes et dont les conditions d'entrée sur le territoire ont été considérablement restreintes. A cet égard, il s'est félicité de l'annulation par le Conseil d'Etat des décrets du 28 juillet 2005 limitant les conditions d'accès à l'AME. Puis il a émis des réserves sur la diminution importante des crédits alloués à l'allocation temporaire d'attente, qui révèle la rigueur de la politique migratoire menée par le ministère de l'intérieur.

Il a dénoncé, par ailleurs, le désengagement de l'Etat pour le financement de l'AME, de la CMU complémentaire, du RMI, de l'API et de l'AAH, pour lesquels les crédits sont largement insuffisants.

Evoquant les études récentes de l'Insee relatives à la pauvreté en France, qui mettent en évidence l'émergence de nouvelles formes de pauvreté, il a rappelé l'existence de 7 millions de travailleurs précaires.

Abordant enfin la politique en faveur des personnes handicapées, M. Guy Fischer a souligné la nécessité d'affiner la réforme mise en oeuvre par la loi du 11 février 2005, notamment dans le domaine de la compensation et des aides par le travail. Il s'est d'ailleurs inquiété des difficultés financières d'un grand nombre de ces établissements. Le retard dans la mise en place des fonds départementaux de compensation est inacceptable, mais il s'explique par le fait que l'effort demandé aux départements est considérable et constitue un véritable transfert de charges de la solidarité nationale vers les contribuables locaux.

Mme Bernadette Dupont a salué l'ampleur de l'effort public en faveur des personnes handicapées. Elle a souhaité connaître les hypothèses retenues pour fixer le montant de l'enveloppe consacrée à l'AAH en 2007. Elle a estimé qu'une attention particulière doit être portée à la prise en charge de nouvelles formes de handicaps, ainsi qu'à la question des personnes handicapées vieillissantes. Elle a enfin dénoncé le manque de personnel qualifié dans un certain nombre d'établissements médico-sociaux.

Malgré les progrès accomplis, elle a considéré que l'effort en faveur de la scolarisation des enfants handicapés doit être poursuivi, notamment par le développement des AVS dont il faut améliorer les conditions de recrutement, de remplacement et de formation.

En réponse à M. Guy Fischer, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a reconnu que l'insuffisance de l'offre de logement constitue un handicap majeur qui résulte des défaillances des politiques menées en la matière dans les trois dernières décennies. La politique conduite par le Gouvernement à l'égard des demandeurs d'asile constitue, selon lui, une réponse adaptée, dans la mesure où la France ne dispose pas des moyens budgétaires suffisants pour assumer les conséquences d'une politique migratoire laxiste.

Concernant le développement des dispositifs d'aide par le travail et des entreprises adaptées, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a admis que ces structures peinent à se développer, bien que le nombre de places ait considérablement augmenté.

Il a en outre relativisé l'ampleur des transferts de charges non compensés pour les départements en matière de RMI, puisque le Gouvernement leur a affecté une enveloppe exceptionnelle de 500 millions d'euros. Il a toutefois rappelé qu'un rapport rédigé par M. Jean-Pierre Fourcade demande que la compensation se fasse à l'euro près.

Par ailleurs, en réponse à Mme Bernadette Dupont, il a fait valoir que la loi « Handicap » du 11 février 2005 est encore récente, ce qui explique certaines lenteurs dans son application. Il faut néanmoins souligner le succès des maisons départementales du handicap qui se sont implantées sur l'ensemble du territoire national.

Les hypothèses retenues pour apprécier la progression du nombre de bénéficiaires de l'AAH paraissent réalistes, car elles tablent sur une augmentation d'1,5 %, qui correspond à la réalité observée cette année. De même, la croissance du montant de l'allocation, évaluée à 1,9 %, est en ligne avec l'inflation prévisionnelle pour 2007. En revanche, le coût des compléments d'AAH a été sous-estimé : il s'est élevé à 83 millions d'euros en 2006, et non 29 millions d'euros comme l'indique le présent projet de budget.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, s'est enfin félicité de la création de 6.466 postes d'AVS pour 2007, ce qui permet d'assurer la présence d'un adulte pour onze élèves handicapés scolarisés. Le nombre de postes reste toutefois insuffisant, notamment en raison des conditions restrictives de leur recrutement, ce qui justifierait un assouplissement des conditions de qualification exigées pour obtenir l'agrément.

Mme Michèle San Vicente a souhaité des précisions sur les progrès accomplis en 2006 en matière de scolarisation, ainsi que sur l'effort réalisé en faveur des établissements et services d'aide par le travail (Esat).

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a indiqué que des négociations ont été engagées avec les actionnaires d'Esat sur le montant de l'aide au poste. Il a reconnu que certains de ces établissements se trouvent en difficulté en raison de la concurrence avec les pays à bas salaires. Cette situation n'est pas propre à la France : la principale entreprise adaptée suédoise a perdu son marché de sous-traitance avec Nokia et Ericson, ces entreprises ayant préféré délocaliser leur production. Il est donc nécessaire de soutenir les efforts d'adaptation des entreprises adaptées pour trouver de nouveaux débouchés.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle a souligné l'importance de donner aux CHRS les moyens financiers de s'adapter à l'évolution du profil des personnes accueillies qui comprennent désormais des familles avec enfants.

Elle a indiqué que dans son département, l'entrée en Esat est subordonnée à des listes d'attente allant jusqu'à cinq ans et que le faible nombre des personnes sortant chaque année de ces établissements ne permet pas d'intégrer un nombre suffisant de jeunes adultes maintenus dans les établissements pour enfants au titre de l'amendement « Creton ». En conséquence, elle a voulu savoir comment les nouvelles places créées en 2007 se répartissent entre établissements pour adultes et établissements pour enfants.

Elle s'est interrogée sur l'organisme retenu pour gérer le fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP). Cet organisme aura-t-il les mêmes missions en matière d'insertion des travailleurs handicapés que l'association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés (Agefiph) ?

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a fait observer que les CHRS ont la possibilité de louer des appartements dans les organismes HLM afin d'accueillir des familles.

Il a ensuite considéré que le nombre de places manquantes en Esat n'était pas très important compte tenu des efforts de création de places réalisés ces dernières années. Les jeunes adultes maintenus en établissement pour enfants sont en majorité des personnes qui relèvent non pas des Esat, mais d'une prise en charge en foyer occupationnel. Il est donc nécessaire d'inciter les départements à créer davantage de places dans ce type de structures qui relèvent de leur compétence.

S'agissant de la répartition des créations de places, le projet de loi de finances pour 2007 prévoit 2.500 places nouvelles en Esat, tandis que la loi de financement de la sécurité sociale crée 2.100 places en maisons d'accueil spécialisé (Mas) et en foyers d'accueil médicalisé (Fam) et 300 places en instituts médico-éducatifs (IME).

Il a précisé que le FIPHFP est géré financièrement par la Caisse des dépôts et consignations, mais que l'attribution des aides relève d'un comité national regroupant des représentants des employeurs publics et des fonctionnaires. Il a de nouveau insisté sur la nécessité de modifier les règles d'intervention de ce fonds pour permettre sa participation au financement des « Cap Emploi ». Il a en outre rappelé que la commission était initialement favorable à une fusion de ce fonds avec l'Agefiph.

M. Alain Milon a voulu savoir si l'ensemble des AVS sont salariés par l'éducation nationale : dans son département, un certain nombre de postes restent financés par les communes.

M. Nicolas About, président, a expliqué que les AVS sont normalement pris en charge par l'éducation nationale, mais que des règles de qualification très strictes conduisent souvent les rectorats à refuser leur agrément aux personnes sélectionnées par les familles, qui n'ont alors d'autre recours que de se tourner vers les communes pour financer l'accompagnement nécessaire pour leur enfant.

Mme Bernadette Dupont s'est déclarée méfiante vis-à-vis d'un recrutement des AVS à travers des associations, craignant que l'attribution d'une aide ne finisse par être subordonnée à l'adhésion à l'une de ces associations.

M. Nicolas About, président, a expliqué que ce type de dérives l'a conduit à militer pour la séparation entre associations gestionnaires d'établissements et de services et associations non gestionnaires.

M. Alain Vasselle s'est enquis de la mise en oeuvre effective des propositions de la commission d'enquête sénatoriale sur la maltraitance des personnes handicapées. S'agissant de la maltraitance institutionnelle, un grand nombre de ses propositions restent en effet lettre morte, notamment celle relative à la liberté de sortie des personnes handicapées accueillies en établissement.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a indiqué que les deux principales causes de maltraitance en établissement sont le manque de formation du personnel et la dégradation du taux d'encadrement en raison des trente-cinq heures. Le recrutement dans ces établissements est difficile en raison des faibles marges de manoeuvre budgétaires accordées par les financeurs. Il a également dénoncé le fait que l'Etat agrée les conventions collectives applicables dans ces structures, sans en tirer les conséquences en matière de fixation des enveloppes de financement.

M. Nicolas About, président, a souhaité revenir sur la question des aides humaines attribuées aux personnes handicapées dans le cadre de la PCH. Il a dénoncé le fait que les personnes qui choisissent de recruter directement leur personnel sans passer par une association reçoivent des sommes plus faibles que lorsqu'elles recourent à un service mandataire ou prestataire. Or, le tarif de prise en charge des aides humaines devrait être identique quel que soit le mode de recrutement, de façon à permettre aux personnes handicapées d'optimiser l'affectation des sommes qui leur sont versées.

La commission a ensuite adopté les amendements présentés par le rapporteur :

- le premier vise à transférer 6 millions d'euros au profit des CHRS afin d'assainir leur situation financière, en prélevant les crédits correspondants sur les dépenses de communication interne et externe du programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » ;

- le deuxième supprime les 114,8 millions d'euros de crédits consacrés au financement des missions d'intégration de l'Ancsec afin de les redéployer au profit de l'AME, de l'API et de l'AAH, dont la sous-évaluation récurrente a entraîné l'accumulation d'une dette de l'Etat à l'égard de la sécurité sociale, qu'il s'agit de réduire ;

- le troisième réaffecte la subvention versée au FIAH au profit du financement des mesures de tutelle et de curatelle d'Etat qui figurent dans le programme « Action en faveur des familles vulnérables » ;

- le quatrième opère une clarification des conditions d'octroi de l'AAH aux personnes dont le taux d'invalidité est compris en 50 % et 80 %, en supprimant la condition d'ancienneté au chômage ;

- le cinquième corrige une erreur de référence ;

- le dernier prévoit que les tarifs de la PCH sont fixés de telle sorte que les frais de compensation restant à la charge de la personne handicapée n'excèdent pas 10 % de ses ressources personnelles, nettes d'impôt.

Mme Valérie Létard a approuvé le principe d'un transfert de recettes au profit des CHRS pour améliorer leur situation financière. En revanche, elle a craint que la suppression des crédits de l'Ancsec dans la mission « Solidarité et intégration » n'hypothèque le financement des actions en faveur de l'intégration. Aussi bien s'est-elle dite favorable à l'amendement proposé, à la condition que le Gouvernement s'engage à rétablir les crédits correspondants dans la mission « Ville et logement », ainsi que le suggère le rapporteur.

A M. Jean-Pierre Godefroy qui s'étonnait qu'aucune proposition ne soit faite pour organiser le placement des sommes collectées par le fonds « fonction publique » sur un compte rémunéré, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a indiqué que cette mesure relève plutôt du domaine réglementaire.

Enfin, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Solidarité et intégration » pour 2007 ainsi modifiés et à l'adoption des articles 53 à 56 qui lui sont rattachés.

Nomination de rapporteurs

Puis la commission a procédé à la désignation des rapporteurs suivants :

M. Alain Milon sur le projet de loi n° 91 (2006-2007) ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique ;

M. Gilbert Barbier sur le projet de loi n° 3062 (AN - XIIe législature) portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament.

Mercredi 29 novembre 2006

- Présidence de M. Nicolas About, président -

PJLF pour 2007 - Mission « Santé » - Examen du rapport pour avis

La commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Alain Milon sur le projet de loi de finances pour 2007 (mission « Santé »).

M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a indiqué que la mission « Santé » comprend trois programmes d'inégale importance, dotés de 430 millions d'euros en 2007. Ces moyens ne sont toutefois qu'une part minoritaire de l'effort public, car les dépenses fiscales qui s'y rattachent représentent 1,9 milliard d'euros, soit cinq fois les crédits de la mission, et l'assurance maladie assure le financement du volet sanitaire des mesures. Par ailleurs, les frais de personnels sont imputés sur la mission « Solidarité et intégration » pour près de 300 millions d'euros, en contradiction avec l'esprit de la Lolf, qui veut que l'ensemble des moyens destinés à une politique soient rassemblés dans une même mission.

Quoi qu'il en soit, le budget affecté à la santé publique augmentera de 7,8 %, au profit presque exclusif du financement du plan cancer, qui arrive à échéance en 2007.

M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a d'abord présenté le programme « Santé publique et prévention » qui poursuit quatre objectifs attachés chacun à une action : concevoir et piloter la politique de santé, promouvoir l'éducation pour la santé, diminuer la mortalité et la morbidité évitables et améliorer la qualité de vie des malades. Deux opérateurs sont associés à leur mise en oeuvre : l'institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes) et l'institut national du cancer (INCa).

Ce programme constitue le coeur de la mission et mobilise à ce titre l'essentiel de l'effort budgétaire. Ses crédits atteignent près de 290 millions d'euros pour 2007, soit une augmentation de 20 %, presque exclusivement fléchés vers l'action « Pathologies à forte morbidité/mortalité » : celle-ci concentre, avec 220 millions d'euros, plus de 76 % des moyens du programme et la moitié de ceux de la mission. Ces crédits témoignent de la priorité absolue donnée à l'achèvement du « plan cancer » engagé en 2003 et dont la mise en oeuvre est confiée à l'INCa.

Il a estimé, à cet égard, que si l'INCa a été la cible de critiques continues portant sur sa gestion, depuis sa création en 2005, il revient aujourd'hui à sa nouvelle direction de restaurer la confiance en sa capacité à mener le plan à échéance et à poursuivre la coordination de la lutte contre le cancer après 2007.

Puis il a fait valoir que la priorité, légitime, donnée à la lutte contre le cancer se fait mécaniquement au détriment de la prise en charge financière d'autres pathologies : les maladies rares, bucco-dentaires et cardio-vasculaires, ainsi que le programme de lutte contre les hépatites, doté de 3,2 millions d'euros, qui reste très en deçà des besoins de prévention et de dépistage, car ces infections touchent déjà 650.000 personnes et sont la cause de plusieurs milliers de décès chaque année.

En revanche, les moyens sont maintenus pour la lutte contre le Sida (36,3 millions d'euros) et pour le plan « santé mentale » (5,6 millions d'euros), même s'il paraît encore sous-doté. Sur ce point, le rapporteur a souhaité le retrait effectif du volet « psychiatrie » du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, conformément aux engagements pris par le Gouvernement devant l'Assemblée nationale.

Enfin, la lutte contre la tuberculose bénéficie de 28,4 millions d'euros au titre des cinquante-deux départements qui ont renoncé à exercer eux-mêmes cette compétence. Cette action, désormais largement à la charge de l'Etat, doit faire l'objet d'une attention particulière, dans la mesure où l'on assiste aujourd'hui à une recrudescence du risque infectieux chez les populations les plus précaires.

Concernant l'action « Déterminants de santé », qui rassemble les politiques d'information sur les risques de santé évitables liés à des comportements ou à un environnement à risque, M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a indiqué qu'elle sera dotée, en 2007, de 31,4 millions d'euros, soit une progression de 94 % par rapport à 2006. Cette augmentation n'est qu'apparente : elle traduit seulement le retour sur cette action des crédits transférés l'an dernier, à l'initiative du Sénat, sur le programme « Drogue et toxicomanie ». En réalité, cette enveloppe diminue et ne représente plus que 10,8 % des moyens du programme. Ainsi, les moyens destinés à la prévention de la violence baissent de moitié et l'Etat se désengage partiellement de la lutte contre les addictions, à la suite des résultats satisfaisants des mesures mises en oeuvre. Or, ces premiers résultats sont encore fragiles et ne justifient pas de baisser la garde aussi rapidement.

En revanche, le second programme national nutrition-santé lancé pour la période 2006-2010 sera doté de 3 millions d'euros, pour prévenir l'obésité qui constitue une urgence de santé publique. Comme pour le premier PNNS, l'institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes) sera le principal opérateur de la mise en oeuvre de ce plan. A cet égard, l'application rapide de la taxe sur les publicités en faveur des produits sucrés, créée par la loi de santé publique, est souhaitable afin que les industriels s'engagent dans une politique de prévention efficace.

La troisième action, « Qualité de la vie et handicap », affecte 6,6 millions d'euros aux mesures destinées à améliorer la qualité de vie des malades à tous les âges de la vie, du plan périnatalité aux actions en faveur du grand âge (plans Alzheimer, douleur et soins palliatifs), en passant par la prévention et le dépistage des troubles de l'apprentissage chez les enfants, du diabète et des maladies rénales. Sur cette action, la participation de l'Etat demeure symbolique et la charge de financement repose presque exclusivement sur l'assurance maladie.

M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a ensuite abordé le programme « Offre de soins et qualité du système de soins », qui rassemble les actions relatives à la gestion des établissements et des personnels de santé et bénéficie, en 2007, de 104,7 millions d'euros, soit un niveau presque équivalent à celui de 2006. Toutefois, ces crédits ne rendent que très partiellement compte des moyens consacrés à l'offre de soins, puisque l'Etat n'intervient qu'à hauteur d'1 % du total des dépenses.

Les deux tiers des crédits du programme sont inscrits sur l'action « Niveau et qualité de l'offre de soins », qui a pour objet d'optimiser la formation et la répartition, géographique et par spécialité, des professionnels de santé. Il s'agit essentiellement du financement de la formation des internes et du financement des stages et recherches qu'ils effectuent pendant leur cursus universitaire.

Les crédits restants sont notamment consacrés à la Haute Autorité de santé : sa dotation ne s'élèvera qu'à un million d'euros en 2007, soit près de dix fois moins qu'en 2006, mais cette baisse sera compensée par un prélèvement de 33 millions d'euros sur son fonds de roulement.

Puis M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a indiqué que les crédits de l'action « Accessibilité de l'offre de soins » s'élèvent à seulement 1,3 million d'euros pour le développement de la télémédecine dans le cadre des contrats de plan Etat-régions et le renforcement des réseaux de santé et que l'action « Modernisation du système de soins » rassemble le dernier tiers des crédits du programme, soit 36,3 millions d'euros en 2007, dont 22 millions d'euros de subvention aux agences régionales de l'hospitalisation (ARH).

Les différentes mesures financées par ce programme ne permettront pas d'améliorer sensiblement l'offre de soins, car les inégalités persistent en la matière : il semble que 10 % à 40 % des médecins refuseraient de recevoir les bénéficiaires de la couverture maladie universelle (CMU) et de l'aide médicale de l'Etat (AME). La Halde a d'ailleurs condamné ces comportements et a demandé que des sanctions soient prises à l'encontre de ces professionnels. Le rapporteur a donc souhaité qu'une campagne d'information soit menée auprès des médecins, pour leur rappeler leurs obligations et les modalités de remboursement de leurs honoraires pour ces patients, mais aussi en direction des publics défavorisés, afin de leur faire connaître leurs droits et leurs devoirs dans ce domaine.

M. Alain Milon, rapporteur pour avis, s'est enfin intéressé au programme « Drogue et toxicomanie », décliné en trois actions pilotées par la Mildt qui se partageront 36,5 millions d'euros en 2007, compte non tenu des crédits transférés l'année dernière, soit une baisse d'environ 2,2 %.

Il s'est refusé à transférer à nouveau les crédits du volet sanitaire du plan de lutte contre le tabac, l'alcool et les drogues illicites vers ce programme, car la Mildt, dont la mission se limite normalement à coordonner les actions des différents ministères concernés, a rencontré l'an dernier d'importantes difficultés à gérer ces crédits, notamment ceux destinés à subventionner les associations au niveau local. La situation s'est encore dégradée du fait du ressentiment de la direction générale de la santé à se voir dépossédée d'une partie de ses compétences. Ce constat pose donc plus largement la question de la légitimité de l'inscription du programme « Drogue et toxicomanie », par nature interministériel, dans la mission « Santé » pilotée par le ministère de la santé et des solidarités.

L'essentiel des crédits de ce programme est affecté à l'action « Coordination interministérielle des volets préventif, sanitaire et répressif », notamment pour le financement d'actions locales. L'action « Expérimentation de nouveaux dispositifs partenariaux de prévention, de prise en charge et d'application de la loi » est, pour sa part, dotée de 3,1 millions d'euros, soit une diminution massive de 42,5 %. Cette baisse des moyens alloués à la Mildt s'explique par la pérennisation du plan « crack » et par la prise en charge, par l'assurance maladie, du financement des communautés thérapeutiques, qui ne relèvent désormais plus d'une politique expérimentale.

M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a enfin précisé que la troisième action du programme est consacrée à la coopération internationale en matière de lutte contre la drogue et bénéficie de 1,5 million d'euros.

Par ailleurs, la Mildt bénéficie d'un fonds de concours d'1,5 million d'euros, abondé par la valeur des biens et du numéraire saisis lors de l'interpellation de trafiquants de drogues, puis ventilé au profit des ministères concernés par la lutte contre la drogue et la toxicomanie. Or, ce fonds était, l'an dernier, menacé de récupération par le ministère de l'économie et des finances, qui souhaitait en effectuer lui-même la répartition. Le rapporteur s'est donc félicité de son maintien au bénéfice de la Mildt en 2007, tout en observant qu'une solution doit être trouvée pour rendre ce mécanisme compatible avec les exigences de la Lolf.

En conclusion, M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a invité la commission des affaires sociales à donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Santé ».

M. Jean-Pierre Godefroy a estimé l'avis présenté trop critique pour pouvoir donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission. Si les moyens sont renforcés pour le « plan cancer », les difficultés d'application demeurent sur le terrain en raison du manque de médecins dans certains départements ruraux, la Manche par exemple, où les femmes doivent attendre huit à neuf mois pour un dépistage du cancer du sein.

Il s'est en revanche félicité de la constance des moyens consacrés à la lutte contre le Sida et a estimé que, sans contester son intérêt, la vente des préservatifs à 20 centimes d'euro constitue une diversification singulière de l'activité des buralistes confrontés à la diminution des ventes de cigarettes.

Il s'est étonné que la taxe applicable aux publicités sur les produits caloriques ne soit pas encore entrée en vigueur. Ce délai de mise en oeuvre est trop long, comme l'a été d'ailleurs celui de l'apposition du pictogramme de prévention à destination des femmes enceintes sur les conditionnements d'alcool.

En ce qui concerne le problème du refus de soins par certains médecins aux bénéficiaires de la CMU et de l'AME, il a demandé l'application de sanctions sévères à leur encontre et a souhaité plus largement attirer l'attention de la commission sur les difficultés d'accès aux soins pour les personnes qui ne bénéficient plus du tiers payant.

Il a constaté, pour la lutte contre la toxicomanie, que si le projet de loi de prévention de la délinquance multiplie les mesures coercitives, le projet de budget limite inversement les moyens alloués à cette politique.

Il a enfin considéré que, s'il était indispensable de retirer le volet « psychiatrie » du même projet de loi « délinquance », il est inacceptable de traiter ces questions par voie d'ordonnance, d'autant que les dispositions prévues font l'objet d'un débat et sont en totale contradiction avec les propositions de la HAS en la matière.

M. Louis Souvet s'est inquiété des conséquences sur l'emploi de la limitation drastique de la subvention de l'Etat à la HAS. Il a également estimé très insuffisante la dotation de 5,6 millions d'euros pour le plan de santé mentale, compte tenu de l'ampleur des besoins.

Il a souhaité qu'un moyen soit rapidement trouvé pour permettre aux médecins étrangers d'exercer de façon durable dans les hôpitaux français et a considéré que les médecins coupables de discrimination dans l'accès aux soins doivent être fermement sanctionnés.

Mme Bernadette Dupont a demandé si une partie des crédits affectés au plan santé mentale est consacrée à la problématique particulière de la prévention du suicide des jeunes.

Mme Sylvie Desmarescaux a jugé ce budget inquiétant, notamment en ce qui concerne la diminution des moyens consacrés à la lutte contre les addictions, domaine dans lequel les progrès sont fragiles, ainsi que de la faiblesse des crédits affectés à l'action « qualité de la vie et handicap ». Elle a estimé, plus largement, que le financement des plans de santé publique repose de manière excessive sur l'assurance maladie.

Reconnaissant par ailleurs que le comportement des médecins qui refusent de recevoir les bénéficiaires de la CMU et de l'AME est anormal, elle a considéré que les patients doivent également être rappelés à l'ordre lorsqu'ils ne respectent pas leurs devoirs vis-à-vis des soignants.

Abordant le problème des discriminations géographiques et sociales en matière d'accès aux soins, M. André Lardeux a considéré que la solution ne peut être immédiate, dans la mesure où il faut au moins dix ans pour former un médecin et où la question de la liberté d'installation reste taboue. Les attentes professionnelles des jeunes médecins ont changé : les critères familiaux, sociaux et environnementaux jouent de plus en plus dans leur choix de carrière, d'autant que 70 % des jeunes diplômés sont des femmes qui ne souhaitent plus être assujetties aux mêmes contraintes horaires que leurs prédécesseurs. Concernant les discriminations à l'égard des bénéficiaires de la CMU et de l'AME, il a jugé que ce phénomène touche plus particulièrement l'Ile-de-France et s'explique aussi souvent par la désinvolture de certains patients vis-à-vis des professionnels de santé.

M. Francis Giraud a observé que, plus qu'une question de moyens budgétaires, les problèmes évoqués traduisent l'évolution des mentalités du corps médical, auquel ses devoirs doivent être rappelés dans le cadre de la formation initiale et continue, et l'ignorance d'une partie de la population, en direction de laquelle un effort d'éducation à la santé doit être mené.

M. Guy Fischer a qualifié ce budget de « trompe-l'oeil », estimant que l'effort en faveur du « plan cancer » ne constitue qu'un rattrapage des dotations insuffisantes des années précédentes. Il a rappelé, à cet égard, que le projet « étoile » des régions Rhône-Alpes et Auvergne a failli être abandonné faute de moyens. Il a également regretté les transferts de charges incessants vers l'assurance maladie.

Il s'est inquiété des inégalités récurrentes en matière d'accès aux soins, tant en milieu rural que dans les quartiers difficiles. L'accompagnement sanitaire des bénéficiaires de minima sociaux doit être renforcé et les médecins coupables de discrimination doivent être sanctionnés.

Il s'est élevé contre la décision du Gouvernement de légiférer par ordonnance pour réformer la psychiatrie, alors même que ce secteur est sinistré et qu'il doit faire l'objet d'un vaste débat public.

Il a enfin souhaité que soit renforcée la lutte contre les addictions, qui accroissent les inégalités sociales et professionnelles.

Mme Brigitte Bout s'est félicitée de la différenciation opérée prochainement entre la prévention de la délinquance et la prise en charge des malades mentaux.

Par ailleurs, elle a fait état des bons résultats obtenus dans sa commune en matière de lutte contre l'obésité, où des actions sont menées depuis 1992 dans le cadre d'un contrat ville-santé. L'application rapide de la taxe sur les publicités en faveur des produits caloriques est donc hautement souhaitable.

Mme Isabelle Debré s'est inquiétée de l'insuffisance des crédits affectés à certaines pathologies, notamment la lutte contre les addictions.

Elle a également dénoncé l'attitude de certains bénéficiaires de la CMU, qui ne se rendent pas aux rendez-vous fixés ou ne présentent pas leur carte Vitale au médecin, et a estimé que de telles attitudes peuvent justifier un refus de soins.

M. Jean-Pierre Michel a considéré que la présentation des crédits de cette mission ne peut se conclure que par un vote défavorable.

Reconnaissant l'existence de fraudes à la CMU, il a estimé que les caractéristiques sociales de la population concernée doivent être prises en compte et qu'il faut informer les personnes les plus défavorisées sur leurs droits et leurs devoirs en matière d'accès aux soins.

Sur les moyens affectés à la santé mentale, il les a jugés très inférieurs aux besoins, notamment en pédopsychiatrie et en obstétrique, et a regretté que l'on envisage une réforme majeure des textes par voie d'ordonnance.

En réponse aux intervenants, M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a rappelé que les crédits de la mission « Santé » n'ont pas vocation à financer l'ensemble des plans de santé publique, mais seulement les mesures de prévention et d'éducation prévues dans ce cadre.

Il a indiqué que des crédits sont spécifiquement prévus pour la prévention du suicide des jeunes dans le plan « santé mentale ».

Il a estimé que les problèmes de démographie médicale vont s'aggraver dans les cinq prochaines années. Ce sujet difficile sera traité dans le rapport d'information confié sur ce thème à M. Jean-Marc Juilhard par la commission.

Il a considéré que la réussite des « plans cancer » et de lutte contre les addictions doit être reconnue, même si les efforts doivent être poursuivis, notamment dans le domaine de l'alcoolisme des jeunes.

Concernant enfin l'accès aux soins des plus défavorisés, il a observé qu'il s'agit essentiellement d'un problème francilien et qui concerne plus particulièrement les médecins spécialistes. Il a rappelé que le médecin conserve sa liberté de soigner, en l'absence de danger pour le patient, et que les malades ont également des devoirs vis-à-vis des professionnels de santé.

A l'issue de ce débat, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Santé » pour 2007.

PJLF pour 2007 - Programme « Veille et sécurité sanitaires » de la mission « Sécurité sanitaire » - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Gilbert Barbier sur le projet de loi de finances pour 2007 (programme « Veille et sécurité sanitaires » de la mission « Sécurité sanitaire »).

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a indiqué qu'au sein de la mission interministérielle « Sécurité sanitaire », le programme « Veille et sécurité sanitaires » regroupe les crédits destinés à la prévention des crises sanitaires touchant la santé humaine pour 105,2 millions d'euros en 2007, soit une légère augmentation de 2 %.

Cette enveloppe ne traduit pas la totalité des moyens engagés par les pouvoirs publics en matière de sécurité sanitaire : l'assurance maladie participe largement à son financement et les dépenses de personnels attachées au programme sont inscrites sur la mission « Solidarité et Intégration », ce qui contredit, d'ailleurs, la lettre et l'esprit de la Lolf.

Globalement, l'effort de la nation en matière de prévention des risques sanitaires est élevé et ne cesse de se renforcer depuis la loi du 1er juillet 1998, tant sur le plan budgétaire qu'en ce qui concerne le fonctionnement du système de veille, de surveillance et d'alerte, récemment amélioré par les leçons tirées de la canicule de l'été 2003 et de l'épidémie de chikungunya de l'hiver 2005-2006.

Le système français de prévention des crises sanitaires fonctionne avec plusieurs agences spécialisées par type de risque : l'institut de veille sanitaire (InVS), l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), l'agence française de sécurité sanitaires des aliments (Afssa), l'agence française de sécurité sanitaire environnementale et du travail (Afsset) et l'agence de biomédecine (ABM). En conséquence, l'essentiel des crédits du programme (86 millions d'euros) correspond aux subventions de fonctionnement qui leur sont accordées, même si elles ne représentent qu'une partie plus ou moins importante de leur budget, chacune disposant de ressources propres. Ces subventions sont ventilées entre les quatre actions du programme, en fonction des activités de chaque agence.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a d'abord présenté l'action « veille, surveillance, expertise et alerte », qui a pour finalité d'identifier, d'évaluer et de gérer les risques sanitaires qui menacent la population. Elle couvre la collecte et l'exploitation des données existantes sur les risques sanitaires pour les repérer dans les nouveaux produits et technologies de santé, les signalements de pharmacovigilance auprès de l'Afssaps, la détection des signaux et le déclenchement des alertes par l'InVS et la promotion de la recherche dans le domaine de la sécurité sanitaire.

Cette première action constituant le coeur de la politique de sécurité sanitaire, elle bénéficie de 60 % des crédits du programme, soit près de 64 millions d'euros. Cette dotation, en hausse de 25 %, est principalement destinée à l'InVS, pour 45 millions d'euros, les quatre autres agences se partageant 10 millions d'euros. Ce traitement privilégié s'explique d'abord par le fait que les activités de veille, de surveillance et d'alerte constituent l'essentiel des missions de l'InVS, et plus encore parce que l'Etat ne peut plus, cette année, faire l'économie d'une subvention correspondant aux besoins de financement de l'institut, dont le fonds de roulement a été largement ponctionné l'an dernier.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a ensuite abordé la deuxième action du programme, consacrée à la « gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises », qui a pour objet de garantir la pertinence des décisions des autorités en cas de crise grâce, notamment, à la mise en oeuvre de plans de réponse aux situations d'urgence sanitaire : « pandémie grippale », actualisé récemment à la suite des derniers développements du virus, « canicule » et « Biotox ».

Pour 2007, les crédits de l'Etat affectés à cette action s'élèvent à 12,3 millions d'euros, soit une hausse de près de 60 %, qui traduit à nouveau, non pas un effort supplémentaire de l'Etat en faveur de cette action, mais bien la prise en charge des besoins de financement de l'InVS.

Toutefois, ces crédits sont loin de donner aux opérateurs les moyens de répondre à l'émergence d'un danger sanitaire ; ils permettront seulement d'organiser l'activation des différents plans, dont les mesures sont in fine financées par l'assurance maladie.

En témoigne l'exemple des modalités de financement imaginées par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 pour le nouveau fonds de prévention des risques sanitaires. Ce fonds remplacera le fonds Biotox, créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, et il financera les dépenses nécessaires à la lutte contre la grippe aviaire (achat de stocks d'antiviraux, de masques de protection et de vaccins notamment) et contre le bioterrorisme, Or, selon le projet de loi de financement initial, ses recettes devaient être constituées d'une contribution annuelle à la charge de l'assurance maladie (175 millions d'euros en 2007) et d'une subvention non obligatoire de l'Etat, laquelle n'apparaît d'ailleurs pas dans le projet de loi de finances de cette année.

Il a estimé regrettable que l'Etat se désengage du financement de ces mesures, qui ressortent typiquement de ses missions régaliennes, et a souhaité que la proposition de la commission d'obliger l'Etat à participer à la moitié des recettes du fonds, qui a été adoptée dans le texte final du projet de loi de financement de la sécurité sociale, ne soit pas remise en cause par la suite.

Puis M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a présenté la troisième action du programme « Veille et sécurité sanitaires », relative à la « production et mise en oeuvre de règles, de recommandations, de décisions et autres dispositifs » par les agences sanitaires. Celle-ci a pour objet la diffusion de recommandations et de bonnes pratiques de façon à éviter l'émergence d'un danger, la définition d'une réglementation garantissant un niveau élevé de protection sanitaire pour la population et le suivi de l'application de ces décisions par des contrôles réguliers.

Les crédits destinés à cette action s'élèvent, en 2007, à 18,3 millions d'euros, soit une baisse de près de 43 % par rapport à 2006. La moitié est consacrée aux agences sanitaires chargées d'édicter les normes et de délivrer les autorisations - l'Afssaps, l'Afssa, l'Afsset et l'ABM -. Ce poste de dépenses fait plus particulièrement les frais des mesures d'économies appliquées à l'action. Notamment, la dotation de l'Afssaps est divisée par trois, ce qui conduira à ponctionner son fonds de roulement à hauteur de 11 millions d'euros, sans pour autant empêcher qu'elle mène à bien ses missions.

Sur ce point, sans être opposé à la diminution du fonds de roulement des agences lorsqu'il est très élevé, il est nécessaire de le maintenir à un niveau suffisant pour faire face aux besoins. En tout état de cause, cette pratique constitue une mesure d'économie ponctuelle et l'Etat sera conduit à augmenter sa dotation à l'Afssaps dès le prochain projet de budget, comme il le fait cette année pour l'InVS.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a enfin présenté les actions menées en matière de formation et d'information regroupées au sein de la quatrième action du programme, plus modeste puisque dotée de 10,8 millions d'euros, soit 10 % des crédits du programme. Ces moyens sont destinés à assurer la diffusion d'une information au grand public en cas de crise et, plus largement, à établir des documents informatifs sur les facteurs de risque sanitaire pour les professionnels et la population. Plusieurs formations sont également proposées aux professionnels, en lien avec l'Ecole des hautes études en santé publique.

Ces actions sont principalement menées par l'InVS, à l'instar des campagnes sur les dangers de l'exposition prolongée au soleil, les risques auditifs dans les discothèques ou encore les dangers liés aux peintures anciennes dégradées dans les habitations, et par l'ABM, avec la diffusion de messages sur le don d'organes. De fait, ces deux agences bénéficient de 80 % des crédits de l'action.

Sous réserve de ces quelques remarques, M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a invité la commission à donner un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Veille et sécurité sanitaires » de la mission interministérielle « Sécurité sanitaire » pour l'année 2007.

M. Jean-Pierre Michel a souhaité savoir si les recommandations de la mission d'information sur le médicament ont eu des répercussions au niveau des crédits alloués à l'Afssaps en 2007.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a indiqué que, sans avoir nécessairement de traduction budgétaire, les recommandations de la mission ont été largement prises en compte par l'Afssaps, notamment celles concernant l'indépendance de l'expertise. La prochaine transposition de la directive européenne du 31 mars 2004 permettra certainement d'améliorer encore la situation.

Enfin, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Veille et sécurité sanitaires » de la mission « Sécurité sanitaire » pour 2007.