Mercredi 12 novembre 2008

- Présidence de M. Jacques Legendre, président -

Collectivités territoriales - Financement des écoles privées - Examen du rapport

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Claude Carle sur la proposition de loi n° 20 (2008-2009) déposée par M. Jean-Claude Carle et plusieurs de ses collègues tendant à garantir la parité de financement entre les écoles primaires publiques et privées sous contrat d'association lorsqu'elles accueillent des élèves scolarisés hors de leur commune de résidence, ainsi que sur la proposition de loi n° 19 (2008-2009) déposée par M. Yves Détraigne et plusieurs de ses collègues visant à encadrer la participation des communes au financement des écoles privées sous contrat d'association.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a rappelé que l'article 89 avait pour vocation originelle de mettre fin à un déséquilibre indiscutable entre écoles primaires publiques et écoles primaires privées sous contrat d'association, contredisant l'exigence de parité qui préside aux relations financières des pouvoirs publics et des écoles sous contrat d'association, depuis l'adoption de la « loi Debré » n° 59-1557 du 31 décembre 1959 sur les rapports entre l'Etat et les établissements d'enseignement privés. Pour les écoles primaires, cette exigence trouve sa consécration à l'article L. 442-5 du code de l'éducation, qui dispose que : « les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mêmes conditions que celles des classes correspondantes de l'enseignement public ». Il revient donc aux communes de les acquitter.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a précisé que ces charges constituaient des dépenses obligatoires et que, s'agissant des classes élémentaires, les communes devaient les acquitter sans que leur accord au contrat passé entre l'Etat et l'école concernée ne soit requis. La jurisprudence est très claire sur ce point : quelle que soit la position du maire de la commune sur la laïcité ou la liberté de l'enseignement, qu'il y ait ou non une école publique sur le territoire de la commune, il est tenu de les prendre en charge. Cette obligation trouve en effet son origine dans le souci de protéger l'exercice effectif de la liberté d'enseignement sur l'ensemble du territoire.

Il a ensuite observé que, jusqu'à l'intervention de l'article 89, cette exigence n'était pas respectée quand une école privée sous contrat d'association accueillait des enfants domiciliés dans une autre commune. Les règles de répartition des contributions respectives des communes d'accueil et des communes de résidence différaient en effet selon que l'école considérée était privée ou publique.

S'agissant des écoles publiques, la commune de résidence des enfants et la commune sur le territoire de laquelle ils sont scolarisés ont l'obligation, en vertu du principe posé à l'article L. 212-8 du code de l'éducation, de s'entendre pour se répartir les dépenses de fonctionnement de l'école concernée. Si elles ne trouvent pas d'accord, il revient au préfet de régler la question. Il dispose pour ce faire de certains éléments d'appréciation déterminés par l'article du code précité et doit à ce titre prendre en compte notamment le nombre d'élèves scolarisés hors de leur commune ainsi que l'importance de chacune des collectivités concernées, ces critères lui permettant de moduler la contribution de chacune en fonction de la situation particulière qui lui est soumise. De plus, la loi fixe certaines conditions qui, lorsqu'elles sont vérifiées, conduisent la commune de résidence à devoir participer au financement de l'école publique de la commune d'accueil ou, au contraire, l'exonèrent de cette obligation.

Ainsi, la commune de résidence n'est pas obligée de contribuer au financement de l'école publique si elle dispose des capacités d'accueil suffisantes pour scolariser les élèves en question, sauf si le maire de la commune, préalablement consulté, a donné son accord à la scolarisation de ces élèves en dehors de la commune.

Toutefois, la commune de résidence est tenue d'acquitter cette participation :

- si les parents des élèves en question ont besoin pour des raisons professionnelles de pouvoir recourir à un système de garde et que celui-ci n'existe pas dans la commune ;

- si des raisons médicales obligent à scolariser l'enfant dans une autre commune ;

- ou bien encore si le frère ou la soeur de l'enfant est déjà inscrit dans une école de la même commune.

Mais, en tout état de cause, si la commune de résidence n'est pas tenue de payer, c'est la commune d'accueil qui le sera. La scolarité d'un élève d'une école publique est donc toujours prise en charge par une ou plusieurs communes.

S'agissant des écoles privées sous contrat d'association, le principe posé à l'article L. 212-8 pour les écoles publiques était, jusqu'en 2004, également applicable : commune d'accueil et commune de résidence devaient donc partager le poids de cette contribution et rechercher un accord, en application de la loi n° 85-97 du 25 janvier 1985 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat. Rien n'était toutefois prévu pour permettre au préfet de trancher un éventuel désaccord, de même qu'aucune condition particulière n'était posée afin de contraindre l'une ou l'autre des communes à acquitter cette contribution, ce qui a conduit ce principe à rester le plus souvent lettre morte.

Les dépenses de fonctionnement liées à l'accueil d'un enfant dans le privé sous contrat d'association pouvaient donc n'être prises en charge par aucune des deux collectivités, ce qui était à l'évidence contraire tant à la lettre qu'à l'esprit de la loi Debré. Cela revenait également à faire peser sur certaines familles l'obligation de financer les dépenses de fonctionnement, alors même que, de par la loi, cette obligation aurait dû échoir à la commune. De ce point de vue, il y avait donc une indiscutable rupture d'égalité entre contribuables. Quant aux établissements privés, ils souffraient eux aussi de cette situation, la plupart des écoles ne pouvant intégralement répercuter sur les familles des charges de fonctionnement qui pour certaines auraient été trop lourdes.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a relevé que ce déséquilibre, en première analyse défavorable au privé, pouvait également tourner au désavantage du public. Comme l'a indiqué M. Michel Charasse au cours de la séance où l'article 89 a été adopté par le Sénat, certains maires profitaient en effet de cet état lacunaire du droit pour inciter fortement leurs administrés à scolariser leurs enfants dans l'école privée de la commune voisine plutôt que dans l'école publique d'une autre commune, puisqu'ils n'avaient rien à payer dans un cas, alors qu'ils devaient le faire dans l'autre. Dès lors, il était parfaitement légitime et même nécessaire d'étendre, comme l'a fait l'article 89, la garantie de l'intervention préfectorale aux écoles privées sous contrat d'association et de rétablir ainsi les équilibres fondamentaux issus de la loi Debré.

Toutefois, en rendant applicable au financement par les communes de résidence des classes élémentaires sous contrat d'association l'arbitrage préfectoral, l'article 89 n'a étendu aux établissements privés qu'une partie du régime prévu par l'article L. 212-8 précité. En particulier, il laissait de côté l'ensemble des dispositions précisant les conditions auxquelles les communes de résidence pouvaient être tenues de participer à la prise en charge des dépenses de fonctionnement. Au niveau des communes de résidence, la parité se trouvait ainsi rompue, une commune pouvant avoir à acquitter cette contribution pour une école privée là où elle n'aurait pu y être contrainte pour une école publique.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a alors précisé que cette rupture de la parité ne suffisait pas à rendre l'article 89 contraire à la Constitution, dès lors qu'elle se produisait au seul niveau des communes de résidence. Pour les écoles publiques, lorsque la commune de résidence ne se voit pas contrainte d'acquitter une participation, celle-ci pèse alors automatiquement sur la commune d'accueil. Dès lors, les classes primaires sous contrat d'association ne bénéficiaient d'aucun concours financier dont ne disposent également les écoles publiques. Le problème central est celui de la répartition de ce concours et cela explique que le Conseil constitutionnel, saisi de la loi du 13 août 2004 précitée, n'ait pas déclaré les dispositions de l'article 89 contraires à la Constitution.

Pour autant, cette rupture de la parité au niveau des seules communes de résidence faisait problème dès lors que les dispositions de l'article L. 442-5 du code précité prévoient que « les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mêmes conditions que celles des dépenses correspondantes de l'enseignement public ». Cette formulation du principe de parité au niveau législatif faisait en effet obstacle à une application de l'article 89 pris dans son sens le plus strict et imposait un effort de conciliation entre ces deux dispositions de même valeur apparemment contradictoires.

Cette conciliation était d'autant plus nécessaire que les maires étaient nombreux à s'interroger sur les effets que pourrait avoir l'article 89 sur les budgets communaux et à craindre que cette disposition nouvelle ne nuise, en dernière analyse, aux écoles publiques en réduisant les moyens que les communes étaient en mesure d'y consacrer.

Par deux circulaires quasiment identiques, les ministères de l'intérieur et de l'éducation nationale ont dès lors adopté une lecture de l'article 89 pleinement respectueuse du principe de parité au niveau des communes de résidence. Celles-ci disposaient que « conformément au principe de parité qui doit guider l'application de la loi, la commune de résidence doit participer au financement de l'établissement privé sous contrat dans tous les cas où elle devrait participer au financement d'une école publique qui accueillerait le même élève ». L'article 89 devait être donc être interprété à la lumière des dispositions de l'article L. 442-5 précité, ce qui conduisait à considérer comme applicables aux concours versés aux établissements privés les conditions posées à l'article L. 212-8 du code de l'éducation pour le financement des écoles publiques par les communes de résidence.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a alors souligné le caractère ingénieux et convaincant de cette solution, tout en notant qu'elle n'avait pas été acceptée par l'ensemble des partenaires concernés. Une telle construction juridique ne pouvant être confortée que par l'intervention du seul Conseil d'Etat, saisi d'un recours à l'encontre d'une des circulaires, l'Association des maires de France et le Secrétariat général de l'enseignement catholique, qui ne s'accordaient pas sur la valeur de cette lecture de l'article 89, étaient donc convenus, en 2006, de l'appliquer dans cet esprit dans l'attente d'une décision au fond de la juridiction supérieure administrative.

Celle-ci n'est toutefois jamais intervenue, le Conseil d'Etat ayant annulé une première circulaire pour des raisons de forme. Si l'application de l'article 89 se fait désormais dans un climat apaisé, il semble néanmoins nécessaire de clarifier enfin les choses, en donnant valeur législative à l'interprétation conçue par les ministères concernés et acceptée, à titre transitoire, par les principales parties impliquées.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a alors rappelé que la proposition de loi qu'il présentait avec M. Yves Détraigne et plusieurs de leurs collègues venait prolonger les travaux menés depuis plusieurs années par la commission des affaires culturelles. Celle-ci s'est en effet penchée sur l'article 89 :

- à l'occasion de l'examen de la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005 d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, en donnant un avis favorable à l'adoption de deux amendements identiques de MM. Paul Girod et Yves Détraigne, qui encadraient le montant de la contribution versée par la commune de résidence ;

- à l'occasion du dépôt de la proposition de loi n° 291 (2005-2006) tendant à abroger l'article 89 de la loi du 13 août 2004 précitée, la commission ayant confié à son auteure, Mme Annie David, le soin d'analyser l'état d'application de la loi et les difficultés qu'elle soulevait ;

- à l'occasion de l'inscription à l'ordre du jour réservé du Sénat de la proposition de loi n° 106 (2007-2008) déposée par M. Jean-Marc Todeschini et les membres du groupe socialiste et rattachés, tendant également à abroger l'article de ladite loi.

Ces différents travaux ont fait apparaître la nécessité pour le législateur d'intervenir, mais ont également permis de constater qu'un large effort de concertation était tout d'abord nécessaire.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a ensuite précisé que le texte dont il était l'auteur s'inscrivait dans ce processus. Il a en effet été préparé en lien avec les différentes parties intéressées, qui ont toutes manifesté leur intérêt pour les solutions qu'il propose. Celles-ci sont inspirées par le souci de clarifier les obligations mises à la charge des maires, de garantir le respect du principe de parité au niveau des communes de résidence et de permettre aux établissements privés de bénéficier de financements qui leur seront effectivement versés. En l'absence d'accord sur son sens, l'article 89 restait en effet le plus souvent inappliqué.

L'article premier de la proposition de loi n° 20 précitée consacre donc la lecture de l'article 89 adoptée, depuis 2005, par les ministères de l'intérieur et de l'éducation nationale. Il stabilise ainsi l'état du droit, en prévoyant que les mêmes conditions sont applicables au financement des écoles publiques et privées sous contrat d'association par les communes de résidence.

La particularité du régime juridique propre aux établissements privés appelle toutefois deux réserves :

- la référence à l'accord préalable du maire ne peut être conservée, une liberté garantie par la Constitution ne pouvant voir son exercice effectif subordonné à la décision d'une autorité locale ;

- la mention de l'organisation d'un service d'assistantes maternelles est inutile, le financement obligatoire des écoles privées sous contrat d'association ne concernant que les seules classes élémentaires.

Sous ces deux réserves, le régime juridique proposé est strictement identique à celui actuellement en vigueur pour les écoles publiques.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a également mis l'accent sur la possibilité, ouverte formellement par la proposition de loi aux communes de résidence, de contribuer de manière facultative au financement des dépenses de fonctionnement des classes élémentaires sous contrat d'association, dans la limite du concours qu'elles apportent à ce même titre aux écoles publiques.

Ce nouveau dispositif pourrait prendre place dans le code de l'éducation et remplacer les dispositions actuellement en vigueur de la loi du 13 août 2004 et du code de l'éducation, qui devraient en conséquence être abrogées. Tel est l'objet du I de l'article 1er et de l'article 2 de la proposition de loi.

Après avoir constaté que ce texte et la proposition de loi n° 19 susmentionnée de M. Yves Détraigne et plusieurs de ses collègues poursuivaient une même intention, M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a proposé à la commission de retenir la formulation de la première, sous réserve des modifications suivantes :

- un article 3 est inséré dans la proposition de loi, afin de permettre un redécoupage formel du texte et une ventilation de ses dispositions sur trois articles ;

- la mention des assistantes maternelles est supprimée, cette dernière étant inutile en l'espèce ;

- la rédaction du nouvel article 2 est précisée, afin de permettre l'harmonisation rédactionnelle du texte.

Un large débat a suivi l'intervention du rapporteur.

Mme Béatrice Descamps a rappelé que les établissements privés étaient souvent fréquentés par un nombre très important d'élèves domiciliés dans une autre commune. Ces dernières disposent bien souvent des capacités d'accueil nécessaires dans leurs écoles publiques. Aussi n'auront-elles que rarement à acquitter leur contribution aux dépenses de fonctionnement.

Mme Françoise Cartron a fait part de l'intérêt du bureau de l'Association des maires de France pour les principes définis par le texte proposé par le rapporteur, qui reflètent au demeurant les accords passés par le Secrétariat général de l'enseignement catholique avec cette même association.

M. Pierre Martin a souligné la complexité juridique et pratique de la question du financement des classes sous contrat par les communes de résidence. Il en est résulté d'étonnantes inégalités d'application sur le territoire, certains préfets retenant une interprétation large du texte, d'autres adoptant au contraire une lecture stricte de ses dispositions. La situation restait dès lors profondément insatisfaisante. Une intervention législative apparaissait donc nécessaire et il est bon qu'elle soit inspirée par le souci de placer sur un pied d'égalité les écoles publiques et privées sous contrat. Il demeure toutefois des incertitudes sur le sens exact du régime applicable pour le public, les ministères concernés s'étant révélés dans l'incapacité de fournir une définition claire du service de restauration et de garde mentionné à l'article L. 212-8 du code précité.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin a indiqué que si, en première analyse, le texte lui semblait fondé sur des principes équilibrés, elle restait cependant convaincue de la nécessité d'abroger les dispositions de l'article 89. Toute nouvelle construction juridique risque en effet d'être inspirée par le souci de faire bénéficier les écoles privées de financements nouveaux, alors même que les écoles publiques sont confrontées à une austérité budgétaire inédite.

Mme Françoise Laborde s'est ensuite interrogée sur la nature exacte des dépenses de fonctionnement mises à la charge des communes de résidence. Si ces dernières incluent les coûts de transport, de garde et des activités périscolaires, la contribution risque d'être extrêmement élevée et de peser très lourdement sur les budgets communaux.

En réponse à ces interrogations, M. Jean-Claude Carle, rapporteur, a apporté les précisions suivantes :

- l'article 89 se justifie précisément par le nombre important d'élèves qui fréquentent une école privée située en dehors de leur commune de résidence. En l'absence de toute sectorisation, qui serait contraire au principe de la liberté de l'enseignement, et compte tenu du maillage des établissements privés, il ne peut en aller autrement ;

- comme en témoigne l'annexe de la circulaire n° 2007-142 du 27 août 2007, les dépenses de fonctionnement prises en compte sont celles des classes élémentaires sous contrat d'association, ce qui exclut les frais de transport lorsqu'ils ne sont pas liés à une activité proprement scolaire, ainsi que les dépenses de garde, qui relèvent par nature du temps péri-scolaire.

A l'issue de ces échanges de vues, la commission a adopté les conclusions proposées par le rapporteur sur cette proposition de loi, les groupes socialiste, communiste républicain et citoyen et du RDSE ne prenant pas part au vote.

Nominations de rapporteurs

Puis la commission a procédé aux nominations suivantes :

M. Jean-Claude Etienne, rapporteur de sa proposition de loi n° 64 (2008-2009) relative à la création d'une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants ;

- M. Philippe Richert, rapporteur de la proposition de loi n° 70 (2008-2009) de M. Jean Louis Masson tendant à dispenser les communes de moins de 1.500 habitants de la charge du service minimum d'accueil des élèves dans les écoles ;

Mme Catherine Morin-Desailly et M. Michel Thiollière, corapporteurs du projet de loi organique n° 1208 rectifié (AN) relatif à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions, Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France et du projet de loi n° 1209 (AN) relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.

Lutte contre le dopage - Audition de M. Pierre Bordry, président de l'Agence française de lutte contre le dopage

La commission a ensuite entendu M. Pierre Bordry, président de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), en présence de MM. Philippe Dautry, secrétaire général, Jacques de Ceaurriz, directeur des analyses, Jean-Pierre Verdy, directeur des contrôles, et Michel Rieu, conseiller scientifique.

M. Pierre Bordry a indiqué que l'Agence avait effectué 7.375 contrôles au cours des trois premiers trimestres de l'année 2008, contre 6.408 en 2007, soit une hausse de 15 %. Ce nombre important de contrôles s'explique par la poursuite des contrôles individualisés sur les sportifs appartenant au groupe cible de l'Agence et par l'importance du dispositif mis en oeuvre lors du Tour de France cycliste, pour lequel l'Agence a disposé d'une pleine compétence.

Il a précisé que pendant les trois premiers trimestres de l'année 2008, sur les 643 contrôles effectués dans le cyclisme, qui a fait l'objet du tiers des contrôles diligentés par l'AFLD, 36 infractions ont été constatées, soit un taux de 5,6 %. Sur le Tour de France, 298 prélèvements ont été effectués et 22 analyses se sont révélées positives (4 EPO, 2 stimulants, 14 glucocorticoïdes, 2 bêta-agonistes). Après la compétition, des analyses rétrospectives ont été pratiquées sur 38 échantillons sanguins et 8 d'entre eux ont été positifs à l'EPO Cera. A l'occasion d'autres épreuves cyclistes, sur les 345 contrôles effectués, 6 ont donné lieu à des analyses positives. Par ailleurs, des infractions ont aussi été relevées pour des sports tels que l'athlétisme (3 infractions sur 257 contrôles), le ball-trap et le tir de balle (2 infractions sur 12 contrôles), le football (2 infractions sur 277 contrôles), le golf (2 infractions sur 22 contrôles), le billard, la pétanque, le sport universitaire, le triathlon, le squash, la voile, ou encore le vol à voile.

Puis il s'est inquiété du fait que le niveau amateur soit davantage frappé par le dopage que le sport professionnel. Ainsi dans le football et le rugby, les professionnels sont à l'origine de 2 infractions pour 51 imputables à ceux considérés comme amateurs en raison de leur niveau de compétition.

Evoquant ensuite plus en détail la question du Tour de France, M. Pierre Bordry s'est félicité de ce que l'Agence mondiale antidopage ait soutenu l'AFLD dans son souhait de contrôler hors de France des sportifs étrangers à l'entraînement, que la coopération avec les autres agences antidopage, notamment suisse et espagnole, ait été efficace, et que la décision de l'Agence de reprendre les échantillons sanguins pour détecter l'EPO Cera ait été reconnue au niveau mondial par le Comité international olympique. En revanche, il a déploré que l'accès de l'Agence aux données issues du passeport sanguin ne soit pas prévu, alors qu'il permettrait d'améliorer le ciblage des sportifs. En outre, certaines grandes courses cyclistes internationales ne sont pas soumises aux mêmes contrôles que le Tour de France et les procédures de notification des contrôles positifs sont parfois difficiles à mettre en oeuvre.

S'agissant du budget de l'Agence française de lutte contre le dopage, tout en reconnaissant que la dotation de 7,1 millions d'euros proposée par le ministère chargé des sports n'était pas éloignée de la demande initiale de l'Agence (7,6 millions d'euros), M. Pierre Bordry a regretté l'application d'une réserve de 5 % sur ces crédits, alors que les dépenses de personnel constituent une grande partie du budget de l'Agence. Reconnaissant l'existence d'un fonds de roulement assez important, il s'est interrogé sur sa capacité à l'utiliser pour financer les dépenses de fonctionnement. En outre, la hausse des frais de fonctionnement de l'Agence en 2009 est probable en raison de la nécessité d'utiliser davantage de contrats à durée déterminée supplémentaires dans le laboratoire, du renforcement des effectifs des contrôleurs dans le cadre du suivi des sportifs du groupe cible, et de l'augmentation attendue du nombre de contentieux.

Il a souligné enfin les difficultés rencontrées avec certaines directions régionales de la jeunesse et sports, qui ne sont pas toujours en mesure de fournir les préleveurs qu'elles sont supposées mettre à disposition de l'Agence, lors de contrôles dans les compétitions locales.

Un débat s'est ensuite engagé.

Après s'être félicité de l'adoption de la loi n° 2008-650 du 3 juillet 2008 sur le trafic des produits dopants, M. Alain Dufaut a mis en avant la bonne perception de la lutte antidopage par les sportifs français, le fait que la première détection de l'EPO Cera par une agence antidopage ait été effectuée par l'AFLD, et enfin la qualité des contrôles opérés dans le cadre des Jeux olympiques. Il s'est cependant inquiété de la difficulté de mettre à profit le passeport sanguin et des problèmes budgétaires de l'Agence. Il a souhaité, enfin, l'adoption rapide des modifications législatives nécessaires pour mettre notre législation en conformité avec le code mondial antidopage, s'agissant notamment de la possibilité d'utiliser d'anciens échantillons.

Après s'être interrogé sur la réussite des athlètes jamaïcains lors des Jeux olympiques, M. Pierre Martin, rapporteur des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », s'est demandé pourquoi le taux de sportifs dopés est plus élevé dans le cyclisme.

M. Pierre Bordry a fait les réponses suivantes :

- les efforts de l'Agence portent sur toutes les disciplines, mais la médiatisation du cyclisme et du dopage dans les compétitions est très forte ;

- les excellentes relations de l'Agence avec les sportifs sont régulièrement soulignées ;

- l'évolution du code mondial antidopage imposera de nouveaux aménagements législatifs. En outre, le toilettage des décrets pourrait aujourd'hui être utile, notamment les notifications écrites aux sportifs ;

- enfin, il est regrettable que l'Agence n'ait pas été associée aux discussions entre le secrétariat d'Etat au sport et l'Union cycliste internationale sur le passeport sanguin, et que l'Etat ait subventionné la mise en place de ce dispositif à hauteur de 200.000 euros, sans que son objet ait été clairement défini. Poursuit-on un objectif de suivi médical, de ciblage des sportifs, ou de mise en place de sanctions ?

- Présidence de M. Jacques Legendre, président, puis de Mme Colette Mélot, vice-présidente -

PJLF pour 2009 - Audition de M. Bernard Laporte, secrétaire d'Etat chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative

Au cours d'une seconde réunion tenue dans l'après-midi, la commission a auditionné M. Bernard Laporte, secrétaire d'Etat à la jeunesse, au sport et à la vie associative, sur le projet de loi de finances pour 2009.

Evoquant tout d'abord le terrible incendie qui a dévasté le centre aquatique de l'Institut national du sport et de l'éducation physique (INSEP) dans la nuit du lundi 10 au mardi 11 novembre, le ministre a souligné qu'une réflexion sur la délocalisation de l'entraînement de certains athlètes était déjà engagée.

M. Bernard Laporte, secrétaire d'Etat à la jeunesse, au sport et à la vie associative, a, à titre liminaire, indiqué qu'il ne se livrerait pas à une présentation détaillée du projet de budget de son ministère, préférant répondre aux questions des parlementaires.

Il a seulement évoqué la question du Programme national de développement du sport (PNDS), dont le financement était spécifiquement limité à la période 2006-2008, pour préciser qu'il n'avait jamais été question de le prolonger. Le ministère chargé des sports pâtit de sa disparition sans pouvoir la remettre en cause.

Dans ce contexte de restriction budgétaire, il a insisté sur sa décision de maintenir en l'état les conventions d'objectifs avec les fédérations sportives, mais a reconnu que le programme « Jeunesse et vie associative » en subit les conséquences. Cependant, la publication d'un document de politique transversale sur la politique de la jeunesse, qui est souhaitée par le secrétariat d'Etat, permettrait de constater l'importance de l'effort gouvernemental dans ce domaine.

Un débat s'est ensuite engagé.

M. Pierre Martin, corapporteur pour avis des crédits consacrés au sport, a souhaité avoir des précisions sur les points suivants :

- la rationalisation administrative engagée par le ministère ;

- le bilan olympique de la France ;

- le projet de mise en place d'une école supérieure de management du sport, suite à la publication du rapport Bertsch en juin 2008 ;

- le maintien éventuel du prélèvement supplémentaire sur la Française des Jeux qui finançait le Programme national de développement du sport (PND) à hauteur de 63 millions d'euros en 2008, au vu de la relative faiblesse du budget 2009 ;

- la réforme du droit à l'image collective proposée par l'article 78 du projet de loi de finances pour 2009 ;

- et le financement de la lutte antidopage.

M. Bernard Laporte, secrétaire d'Etat à la jeunesse, au sport et à la vie associative, a apporté les réponses suivantes :

- si le bilan olympique est positif s'agissant du volume de médailles, le nombre de médailles d'or est quant à lui insuffisant. Des nations telles que le Japon, le Royaume-Uni, et l'Australie ont avancé dans le classement des médailles, grâce à l'attention portée au sport dans ces pays. Ainsi, le Royaume-Uni a investi lourdement dans des équipements de qualité avec le souhait de réussir les Jeux olympiques de Londres. Si la France peut s'inspirer de certaines pratiques, elle ne suivra cependant pas la stratégie consistant à miser uniquement sur les disciplines particulièrement pourvoyeuses de médailles, comme le cyclisme sur piste ;

- le faible nombre de femmes médaillées est dû à des raisons conjoncturelles telles que l'absence d'athlètes majeures remportant plusieurs médailles. En revanche, la diminution du nombre de licenciées dans les fédérations, qui pourrait peser, à terme, sur les résultats de la France aux Jeux olympiques, est un réel sujet d'inquiétude ;

- la France a obtenu 53 médailles aux Jeux paralympiques, alors qu'elle en attendait 70. Cela s'explique notamment par le fait que seulement 1 % des personnes handicapées en France font du sport, contre 23 % en Chine. Tout en saluant la présence de spectateurs dans les enceintes sportives lors de ces Jeux, il a cependant constaté l'absence de journalistes dans les tribunes de presse. Il a donc proposé que les Jeux paralympiques aient lieu en amont des Jeux olympiques et que la flamme ne s'éteigne pas entre les deux compétitions ;

- l'amélioration de la place de la France passe par la réforme du haut niveau. Le nombre de 15.000 sportifs de haut niveau est en effet trop élevé : il conduit au saupoudrage des investissements dans les pôles Espoirs et à la désillusion de nombreux jeunes sportifs ;

- la rénovation de l'INSEP doit être l'occasion de mettre en place dès 2010 l'école de management prévue par le rapport de M. Jean Bertsch. Un institut du coaching est également envisagé dans lequel pourraient enseigner des spécialistes tels que M. Claude Fauquet, directeur technique national de la fédération française de natation ;

- la suppression du PND du sport est liée à son caractère temporaire, puisqu'il visait à accompagner la mise en place de quatre éléments structurants aujourd'hui réalisés. L'ouverture des paris sportifs devra en revanche être l'occasion d'obtenir de nouveaux financements pour le sport, lesquels devront faire l'objet d'une péréquation, notamment en direction des sports olympiques ;

- la réforme du droit à l'image collective peut inquiéter certaines fédérations sportives, comme le rugby. Mais sa situation est moins concurrentielle que celle des autres disciplines. Le handball ou le basket-ball ont en revanche besoin d'être soutenus, dans la mesure où leur structuration en clubs professionnels est récente ;

- le travail réalisé par l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) est excellent et les sportifs en sont très satisfaits. Le budget de l'Agence semble adapté, dans la mesure où son fonds de roulement comporte des réserves importantes.

M. Jean-Jacques Lozach, corapporteur pour avis des crédits consacrés à la jeunesse et à la vie associative, tout en reconnaissant la transversalité de la politique de la jeunesse, a souhaité faire part au ministre de certaines inquiétudes relatives à :

- l'avenir d'un certain nombre d'organismes associatifs dont l'existence est menacée par la diminution du budget de la Jeunesse et de la vie associative ;

- la réforme des Centres régionaux d'éducation populaire et de sport (CREPS) ;

- la nature des contrats de performance passés avec les services déconcentrés dans le cadre de la révision générale des politiques publiques ;

- l'engagement bénévole des sportifs bénéficiaires du droit à l'image collective ;

- la restructuration de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (INJEP);

- la mise en oeuvre du service civique obligatoire ;

- la limitation du nombre de volontaires associatifs ;

- l'état d'avancement de l'organisation des championnats du monde de ski à Val d'Isère.

M. Bernard Laporte, secrétaire d'Etat à la jeunesse, au sport et à la vie associative, a fourni les réponses suivantes :

- l'engagement des sportifs de haut niveau dans des actions et associations locales est régulièrement constaté ;

- la bonne organisation des championnats du monde de ski est désormais garantie, notamment grâce à l'action salutaire du directeur général du Comité d'organisation nommé en septembre 2007 ;

- la réforme des CREPS, qui fait suite à un rapport de l'Inspection générale de la jeunesse et des sports, n'a pas pour objet le désengagement de l'Etat, mais vise à le recentrer sur la formation et le sport de haut niveau. L'idée est de placer l'INSEP à la tête d'un réseau constitué des CREPS ;

- si la mission de l'INJEP est importante, ses infrastructures sont aujourd'hui trop onéreuses et son personnel trop nombreux. Un certain nombre d'agents publics rattachés à l'éducation nationale devront réintégrer leur administration d'origine ;

- le service civique devrait être mis en place à partir de 2010 autour d'une réorganisation des multiples dispositifs existants (volontariat associatif, Envie d'agir...) qui souffrent d'une faible notoriété ;

- enfin, le ciblage des dispositifs « Envie d'agir » ou « Parcours animation sport » en 2009 sur les quartiers difficiles permettra d'améliorer leur efficacité.

M. Alain Dufaut s'est déclaré favorable à la réduction de la liste des sportifs de haut niveau. Il s'est à cet égard interrogé sur l'intérêt de mettre en place, parallèlement, un véritable statut pour les sportifs de cette liste. Il a ensuite insisté sur l'importance du maintien de la dotation de l'Agence française de lutte contre le dopage à un niveau au moins similaire à celui de l'an dernier. Il s'est enfin interrogé sur l'utilisation et les finalités du passeport sanguin.

M. Jacques Legendre, président, a également souhaité que l'AFLD dispose de moyens suffisants pour accomplir sa mission de lutte contre le dopage.

M. Bernard Laporte, secrétaire d'Etat à la jeunesse, au sport et à la vie associative, a insisté sur la constance de l'engagement financier de l'Etat pour la lutte contre le dopage, notamment par l'intermédiaire de la dotation à l'AFLD. Il a reconnu cependant que l'Union cycliste internationale ne faisait pas un usage pertinent des données issues du passeport sanguin et que les efforts de la France pour renforcer cet outil ne seront pas poursuivis dans l'immédiat. S'agissant du sport de haut niveau, il a enfin précisé que l'INSEP doit devenir le « Harvard » du sport français et que cela passe par l'augmentation de l'investissement privé.

PJLF pour 2009 - Audition de M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale

La commission a enfin procédé à l'audition de M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, sur le projet de loi de finances pour 2009.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, a tout d'abord indiqué que les crédits des programmes de la mission « Enseignement scolaire » relevant de sa compétence progresseraient en 2009 de 2,06 % et atteindraient près de 60 milliards d'euros. Ces moyens seront mobilisés autour de trois objectifs :

- diviser par trois le nombre d'élèves sortant en grande difficulté de l'enseignement primaire ;

- réduire de manière significative le nombre d'élèves quittant le système scolaire sans qualification ;

- mieux préparer les élèves du secondaire à l'enseignement supérieur, pour leur offrir toutes les chances d'y réussir.

Les réformes engagées au sein du ministère de l'éducation nationale s'insèrent dans ce contexte.

S'agissant de l'enseignement primaire, la mise en place de nouveaux programmes, la refonte de la semaine scolaire, qui permettra d'accorder plus de place à l'accompagnement des élèves, notamment à ceux qui connaissent le plus de difficultés et enfin le développement de l'évaluation en cours élémentaire première année (CE1) et en cours moyen deuxième année (CM2) permettront de renforcer l'égalité des chances en attaquant l'échec scolaire à sa racine. Les enquêtes internationales, de même que les travaux du Haut conseil de l'éducation, ont en effet permis à la communauté éducative de prendre conscience du fait que les inégalités scolaires se creusaient très tôt.

La sédentarisation de 3.000 maîtres « E » et « G », qui jusqu'alors officiaient dans les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED) participe de ce souci de lutter contre l'échec scolaire précoce. Ces professionnels reconnus pourront ainsi prendre en charge de manière continue les difficultés des élèves.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, a également souligné la place centrale que tenait la maternelle dans ces politiques en faveur de l'égalité des chances. L'école maternelle est en effet une véritable école, ce dont témoigne le souci de la doter de véritables programmes. Mais cette nature proprement scolaire la dessert lorsqu'il lui faut accueillir des enfants trop jeunes pour être des écoliers. Si la scolarisation des enfants à partir de 3 ans lorsque les parents le souhaitent est une excellente chose, il est possible de s'interroger, comme l'ont fait Mme Monique Papon et M. Pierre Martin dans leur récent rapport, sur l'opportunité du maintien de la scolarisation précoce. En deçà de 3 ans, des structures comme des jardins d'éveil seraient sans doute mieux adaptées.

S'agissant de l'enseignement secondaire, la rénovation de la voie professionnelle a été engagée. Dès la rentrée 2008, 78.000 élèves suivent un cursus de baccalauréat professionnel en trois ans qui deviendra la référence en 2009. L'égale considération due à chacune des voies sera ainsi confortée.

Quant à la réforme du lycée, elle permettra de mieux préparer les élèves du secondaire à l'enseignement supérieur. De nouveaux services seront ainsi proposés aux élèves des lycées généraux et technologiques pour leur permettre de mieux s'orienter et de mieux réussir leur parcours scolaire.

Pour ce faire, les rythmes scolaires seront transformés :

- l'année scolaire sera divisée en deux semestres et scandée par quatre rendez-vous situés au milieu et à la fin de chaque semestre. Au coeur de ce nouveau calendrier prendra place une semaine d'intersemestre destinée à proposer aux élèves un soutien scolaire adapté, une aide méthodologique, un conseil d'orientation, un travail interdisciplinaire ou, pour ceux qui sont le plus à l'aise, d'approfondissement ;

- la semaine scolaire s'organisera en trois grands ensembles. Les enseignements généraux de tronc commun couvriront 21 heures. S'y ajouteront 6 heures d'enseignements complémentaires modulaires, ainsi qu'un accompagnement personnalisé de 3 heures.

Afin de permettre à cette réforme de se mettre en place, celle-ci ne se traduira pas par une baisse des moyens budgétaires dans le second degré : les 2.000 postes qui n'y seront pas renouvelés correspondent aux seuls effets de la décrue démographique de 22.000 élèves qu'il subit.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, a alors mis l'accent sur sa volonté de proposer aux élèves et à leurs familles de nouveaux services tout en maîtrisant les coûts globaux des politiques éducatives en utilisant mieux les moyens dont dispose son ministère.

La révision des mises à disposition d'enseignants auprès d'autres services que ceux de l'éducation nationale permettra ainsi de réduire de 1.000 dans le second degré et de 500 dans le primaire le nombre de postes de professeurs. De même, l'optimisation du remplacement grâce à la création d'une agence nationale chargée de cette tâche se traduira par une économie de 3.000 postes.

Cet usage raisonné des moyens est à l'origine d'un enrichissement de l'offre éducative à budget quasi constant. Ainsi l'effort en direction des élèves handicapés se poursuivra en 2009 : 200 unités pédagogiques d'intégration (UPI) seront ainsi ouvertes et l'effort de recrutement d'assistants de vie scolaire individuels (AVSi) continuera. D'ores et déjà, leur formation a été renforcée et, seuls, 5 % des accompagnants étaient en attente d'une formation en juin 2008, contre 35 % en septembre 2007.

De plus, l'accompagnement éducatif, auquel l'éducation nationale consacre 323 millions d'euros, se renforce. A la rentrée 2008, il permettait aux élèves de tous les collèges ainsi qu'à ceux des écoles de l'éducation prioritaire de bénéficier d'une aide aux devoirs et de pratiquer des activités sportives, culturelles et artistiques.

Les stages de vacances gratuits proposés aux élèves de cours moyen en difficulté s'inscrivent dans la même logique d'accompagnement individualisé. Ils seront reconduits et trouveront un écho dans les stages de remise à niveau qui seront proposés aux élèves.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, a enfin précisé que la maîtrise des moyens budgétaires n'excluait en rien la revalorisation des métiers des personnels de son ministère. Dans la droite ligne de l'effort global de concertation qui préside à présent aux politiques éducatives, un protocole d'accord a été signé avec l'un des principaux syndicats de personnels administratifs qui prévoit, en contrepartie de cet effort de rationalisation des moyens, une remise à niveau indemnitaire sur trois ans. De même, le projet de loi de finances pour 2009 comprend 410 millions d'euros de mesures catégorielles qui permettront d'améliorer la situation matérielle et morale des personnels de l'éducation nationale.

Un large débat a suivi cette intervention.

Après avoir exprimé sa satisfaction d'ensemble devant un budget qui tient tout à la fois compte de l'impératif de maîtrise des dépenses publiques et de la nécessité de construire de véritables politiques qualitatives dirigées en priorité vers les élèves les plus fragiles, M. Jean-Claude Carle, corapporteur pour avis, a interrogé le ministre sur cinq points :

- le recrutement d'infirmières paraît toujours aussi difficile, alors même que la présence de ces dernières est indispensable à l'équilibre physique et psychologique des élèves, condition première de toute réussite ;

- la concertation avec les collectivités territoriales semble n'avoir pas toujours été parfaitement aboutie. Ces dernières ont en effet dû supporter les conséquences matérielles de certaines réformes, notamment au sein de l'enseignement primaire, sans néanmoins disposer de tous les moyens pour les mettre en oeuvre ;

- le financement de l'enseignement privé a sans doute trouvé un point d'équilibre avec la règle non écrite des « 80-20 ». Pour autant, cette dernière produit des effets pervers, l'évolution du nombre d'enseignants étant ainsi déconnectée -pour une part au moins- de celle des effectifs d'élèves. Enfin, la question de la contribution des communes de résidence à la prise en charge des dépenses de fonctionnement des classes élémentaires sous contrat reste pendante ;

- l'évaluation et la prévision demeurent encore insatisfaisantes dans l'éducation nationale, le nombre d'élèves anticipé pour chaque rentrée étant souvent bien différent de celui qui est réellement constaté dans les classes début septembre ;

- le budget de l'enseignement agricole pour 2009 ne laisse pas d'être inquiétant.

Après avoir indiqué qu'elle partageait ces inquiétudes justifiées, Mme Françoise Férat, corapporteur pour avis, a exprimé son souhait de voir l'éducation nationale et l'enseignement agricole collaborer plus étroitement. Si les singularités respectives de chacun de ces systèmes éducatifs fait leur richesse, ces particularités ne sont pas telles qu'elles les condamnent à ne pas travailler ensemble. Les efforts en ce sens sont jusqu'ici restés bien limités, même si la première réunion commune des recteurs et des directeurs régionaux de l'agriculture et de la forêt doit être saluée. Il faut néanmoins poursuivre dans cette direction et cela est d'autant plus nécessaire que l'enseignement agricole, même si ses pratiques sont encore perfectibles, apparaît comme un vivant témoignage du succès qui attend certaines des réformes engagées par le ministère de l'éducation nationale. Aussi serait-il bon qu'une stratégie budgétaire commune soit élaborée par les différents acteurs de la mission interministérielle « Enseignement scolaire ».

Mme Marie-Christine Blandin s'est étonnée, alors même que « l'approche sensible de la nature » a été explicitement mentionnée dans les nouveaux programmes du primaire, d'apprendre que l'éducation aux sciences risquait de disparaître du tronc commun des lycées. Au moment même où, dans la droite suite du Grenelle de l'environnement, chacun reconnaît la nécessité d'une promotion de la culture scientifique et notamment des sciences naturelles, un tel choix apparaîtrait fort peu judicieux.

M. Ivan Renar a ensuite fait part de trois inquiétudes :

- le débat qui s'engage sur l'école maternelle ne doit pas masquer le fait que cette dernière reste un modèle pour les pays étrangers. Nombreuses sont en effet les délégations qui s'y intéressent tout particulièrement ;

- la réforme du lycée risque de marginaliser certains enseignements pourtant essentiels, comme l'histoire-géographie, l'éducation civique, les sciences expérimentales et les sciences économiques et sociales. Pourtant, le renforcement de ces disciplines semble la condition sine qua non pour atteindre les objectifs que l'Union européenne s'est fixés lors du sommet de Lisbonne de mars 2000 ;

- les RASED sont un outil essentiel de lutte contre les difficultés scolaires, notamment dans les régions où problèmes sociaux et déséquilibres économiques se concentrent. Aussi l'annonce de la sédentarisation d'une partie des maîtres qui y interviennent peut-elle laisser craindre un abandon des aides apportées non pas seulement aux élèves en difficulté, mais encore et surtout aux élèves en grande difficulté.

Après avoir exprimé ses doutes sur l'opportunité de fragiliser les RASED, M. Yannick Bodin a souhaité connaître les résultats des évaluations menées en matière de désectorisation. Les témoignages apparaissent en effet contradictoires, certains établissements se vidant, d'autres se trouvant au contraire à l'extrême limite de leurs capacités d'accueil. Au total, la mixité sociale, pourtant essentielle à l'école républicaine, semble ainsi fragilisée, avec les inconvénients pédagogiques et pratiques que cela comporte. A cet égard, il serait intéressant de connaître les suites réservées par les ministères concernés au rapport qu'avait consacré la commission à la question des classes préparatoires.

Il s'est enfin interrogé sur le choix de n'aborder pour l'heure que la seule réforme de la classe de seconde, alors même qu'il paraît difficile de procéder à de telles modifications sans avoir envisagé du même coup leur effet sur le cycle terminal.

M. Alain Dufaut a formulé à son tour les sérieux doutes que lui inspirait la réforme de la carte scolaire, tous les exemples démontrant dans le Vaucluse que les établissements les plus en difficulté perdent un nombre très important d'élèves. La libéralisation semble ainsi accroître la ségrégation scolaire, ce qui est de nature à appeler une révision profonde de la politique engagée et un retour aux principes républicains de mixité sociale et de présence de l'école dans tous les territoires.

M. Jacques Legendre, président, a d'abord déploré que certains départements n'abritent aucune classe préparatoire, ce qu'il a jugé difficilement acceptable. Puis il a souligné la nécessité d'une politique de diversification linguistique appuyée dans l'enseignement scolaire. Les postes mis aux concours dans certaines langues, comme le russe, sont inexistants ou quasi inexistants. Cela ne paraît que très peu satisfaisant, alors même que l'éveil à la diversité culturelle passe en tout premier lieu par l'apprentissage de langues vivantes autres que l'anglais.

En réponse aux intervenants, M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, a apporté les précisions suivantes :

- le recrutement des infirmières fait en effet difficulté. L'un des problèmes principaux tient aux récupérations de carrière pour les personnels ayant pratiqué l'exercice libéral de leur profession. Un accord vient d'être signé afin de lever ces difficultés avec l'un des principaux syndicats d'infirmières ;

- la concertation avec les collectivités territoriales est poursuivie. La nouvelle organisation de la semaine scolaire, dont la nature précise dépend des décisions des conseils d'école, pose sans doute des difficultés du point de vue des transports scolaires. Mais l'absence de cours le samedi matin permet d'économiser deux tournées de ramassage scolaire, venant ainsi réduire les contraintes pesant sur les collectivités ;

- s'agissant de l'enseignement privé, et notamment du problème du financement des classes élémentaires sous contrat par les communes de résidence, le choix de la parité semble le plus pertinent ;

- le développement d'une prévision plus précise des effectifs est effectivement nécessaire. Il suppose toutefois de neutraliser certains biais administratifs qui entraînent la surévaluation des effectifs. Celle-ci a toutefois des conséquences positives, puisqu'elle permet un renforcement des taux d'encadrement ;

- le ministre de l'éducation nationale n'a pas de prise sur l'enseignement agricole. Il conviendrait toutefois d'engager un effort de suivi commun des deux budgets ;

- les sciences de la vie et de la terre ainsi que la physique-chimie appartiendront toujours au tronc commun de la nouvelle seconde. Ils sont simplement réunis sous le vocable général de sciences expérimentales. Par ailleurs, outre les enseignements obligatoires, les élèves pourront suivre des modules dans ces disciplines et renforcer leur formation en la matière. De même, tous les élèves continueront à suivre des cours d'histoire-géographie. Enfin, le statut des sciences économiques et sociales ne sera pas modifié, et la nouvelle structure modulaire permettra aux élèves qui le souhaitent d'approfondir cette discipline ;

- la maternelle est une chance pour la France et nul n'envisage d'y porter atteinte d'une manière ou d'une autre. Mais l'école maternelle est avant tout une école, où interviennent des professeurs formés pour enseigner aussi bien aux élèves de la petite section qu'à ceux du CM2. Aussi n'ont-ils pas vocation à accueillir des enfants trop jeunes pour être de véritables écoliers ;

- la suppression des RASED n'est pas à l'ordre du jour, la sédentarisation de 3 000 maîtres ayant pour seule vocation de fixer une petite partie des enseignants de ces réseaux dans les établissements où l'on a le plus besoin d'eux ;

- l'impact de la réforme de la carte scolaire sera évalué à la fin de l'année scolaire. Pour l'heure, chacun peut toutefois constater que les familles ont fait usage de cette nouvelle liberté, qui a bénéficié notamment aux boursiers sociaux. Ils sont en effet plus d'un tiers à avoir changé d'établissement. Le fait que des collèges et des lycées puissent se vider est sans aucun doute préoccupant. Il témoigne toutefois des difficultés que ces établissements connaissent et qui, même en l'absence de toute réforme, auraient persisté. C'est à elles qu'il faut donc s'attacher ;

- il importait d'ouvrir la réforme du lycée par la transformation de la seule classe de seconde. Celle-ci est en effet une étape autonome, qui ne doit pas servir de tremplin vers telle ou telle filière du cycle terminal, comme tel a été le cas jusqu'ici ;

- l'ouverture sociale des classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) est une préoccupation constante des ministères de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur et de la recherche. D'ores et déjà, chaque lycée peut envoyer 5 % de ses élèves dans ces classes, ce qui a permis de renforcer la mixité sociale. S'agissant de la présence des CPGE dans chaque département, elle sera rendue possible par la prise en compte de cet objectif, au fil des ouvertures de sections.

- l'enseignement des langues rares est une nécessité, mais le recrutement d'enseignants se heurte au problème de l'absence d'élèves. En conséquence, augmenter le nombre de professeurs de certaines langues vivantes reviendrait mécaniquement à augmenter le nombre d'enseignants en surnombre disciplinaire. Dès lors, il paraît plus efficace de développer le statut de professeur associé, qui permet de répondre avec plus de souplesse aux besoins.