Assises de la subsidiarité



Palais du Luxembourg, 24 octobre 2008

M. Isidoro GOTTARDO , Membre de la Chambre des Députés de la République italienne, Membre du Comité des régions

Merci à tous d'avoir organisé cette réunion. Je remercie en particulier le Président Van Den Brande, qui est mon Président, puisque je suis membre du Comité des régions. Mais maintenant, c'est au nom de la Chambre des Députés italiens que je prends la parole. La Chambre des Députés italiens apprécie cette initiative et je profite de l'occasion pour remercier le Sénat Français d'avoir organisé cette conférence.

Le Parlement italien a une forte tradition pro-européenne. Le traité a été ratifié à l'unanimité à la Chambre des Députés et au Sénat, et ce, suite à un long débat. Donc cette unanimité n'était pas le fait du hasard. Nous avons mesuré toutes les contradictions de cette Europe, qui semble bien distante aux citoyens. Enfin, nous avons pris cette décision en connaissance de cause, en pensant que c'est bel et bien le traité qui permettrait de rapprocher l'Union européenne du citoyen. Je tenais à le souligner pour vous expliquer la situation de notre pays. Pour nous il ne s'agit pas de savoir si le traité va entrer en vigueur. Mais quand. Pour nous, il est évident qu'il entrera en vigueur, même si nous sommes parfaitement conscients - et je le souligne en passant - que nous devons être extrêmement déterminés, car ce problème ne fait que s'aggraver, pour l'Europe: si le traité entre en vigueur trop tard, nous risquons d'éloigner une fois de plus l'Europe des citoyens. Le traité est là pour accomplir ce qui n'avait pas été fait dans le cadre du traité de Nice. Nous sommes donc convaincus de son utilité dans l'Europe d'aujourd'hui. Il faut donner des perspectives de certitude et de sécurité aux citoyens, face à la mondialisation. La récente crise financière montre bien qu'une réponse rapide et efficace à l'échelle mondiale, n'est possible que si l'action est commune au niveau européen. Nous avons bien compris, à ce moment-là, ce qu'était la subsidiarité.

Il ne s'agit plus maintenant d'une perception de haut vers le bas, mais d'une subsidiarité qui s'impose au moment de crises.

Nous nous sommes aperçus que l'Europe avait des responsabilités qu'on ne lui connaissait pas. Il faut donc utiliser tous les principes et les instruments de l'Union européenne existants, garantis par le traité de Lisbonne. La subsidiarité est absolument fondamentale en l'espèce, si l'on veut aller au-delà de ce paradoxe qui suscite les critiques de l'opinion publique. Certains pensent qu'il n'y a pas suffisamment d'Europe là où il en faudrait plus, et trop là où le niveau local serait plus adapté. Ce n'est pas par hasard que le traité a prévu des prérogatives différentes, les unes dévolues aux Comité des régions, de manière indirecte, et les autres aux Parlements nationaux. Ils ont maintenant des pouvoirs de contrôle de la subsidiarité.

Par ce biais, nous avons voulu créer un nouvel équilibre institutionnel et rapprocher les gouvernements des citoyens. C'est donc dans la logique même du traité que de mettre en place une véritable coopération, pour mieux contrôler le principe de subsidiarité entre les Parlements nationaux et le Comités des régions.

Pour structurer cette coopération, nous devrions, à mon avis, nous inspirer de certains éléments importants et poursuivre la réflexion des Parlements nationaux et du Parlement européen, fondée sur le respect de l'autonomie et de la parité de tous les Parlements. C'est-à-dire en évitant d'avoir recours à des méthodes de coopération directe et en privilégiant l'exercice collectif, et non pas en laissant chacune des Assemblées exercer ses propres prérogatives.

L'importance des instruments pour échanger à temps les informations et les estimations sur la subsidiarité, comme le système IPEX, par exemple, s'impose. Il faut avoir d'autres forums d'échanges de vues concernant les bonnes pratiques et le contrôle de subsidiarité, comme la COSAC, plutôt que de procéder à une estimation commune de ce qui se fait autour de tel ou tel acte. Il faut être conscient que les Parlements nationaux, et aussi le Comité des régions et les Assemblées régionales, ne doivent pas être de simples gardiens des compétences. Il faut interpréter les mécanismes du traité, mais certainement pas à des fins de blocage de l'action européenne ou à son ralentissement. Non seulement le contrôle de la subsidiarité doit être compris pour limiter d'éventuels abus, mais, le cas échéant, il doit être conçu comme une possibilité d'étendre les capacités d'interventions européennes. Je souligne enfin ce dernier aspect des choses: la subsidiarité ne peut pas monopoliser l'attention et les ressources de nos institutions, qui devraient privilégier l'intervention des choix politiques et réglementaires de l'Union européenne, sur le fond. La subsidiarité ne doit pas être seulement revendiquée. Il faut y croire. Il faut que chacun la construise par son action quotidienne, et dans tous les cas.

Ce matin, le Président Formigoni nous a présenté un scénario très complet et très complexe de la subsidiarité et de ce qu'elle signifie. Il peut le mettre en oeuvre, car il vient d'une région qui a su construire cette subsidiarité depuis longtemps, en termes institutionnels mais aussi en termes sociaux, qui privilégient la liberté et la compétitivité, qui met la personne au centre de l'action et la famille au côté des institutions. Tout ceci, avec des instruments de répartition des responsabilités qui fonctionnent convenablement. Conformément à cette approche, la Chambre des Députés italienne a l'intention de définir les instruments appropriés de coopération avec le Comité des régions, afin de renforcer l'exercice de leurs compétences respectives.

Je vous rappellerai qu'au cours de la ratification du traité de Lisbonne par le Parlement, la Chambre a déjà manifesté le fait qu'elle était favorable à ce que l'on consulte régulièrement et rapidement les Assemblées régionales italiennes. C'est d'ailleurs ce qui est prévu par l'article 6 du protocole.

En conclusion, je dirais qu'il est important - sans arriver aujourd'hui à des conclusions dans ce domaine - que tous les sujets impliqués se lancent dans une réflexion approfondie. Il faut voir auprès de quels forums cette réflexion devra être poursuivie. Mais cet appel n'est pas que le mien. C'est aussi celui de la Chambre des Députés italienne. Il faut agir afin que le traité de Lisbonne entre en vigueur sans retard supplémentaire. C'est la réponse qu'attend l'Europe, si elle veut récupérer la confiance de ses propres citoyens.

Merci.

M. Denis BADRÉ

Merci, Monsieur Gottardo. Il était bon que l'on termine sur ce rappel de l'urgence à ce que le traité de Lisbonne puisse être ratifié. Je sais qu'il y a des demandes de parole et je me demande si on ne va pas la satisfaire après la deuxième phase de la soirée. Si ça ne vous ennuie pas, on va regrouper l'ensemble des questions après la deuxième partie qui porte sur le contrôle juridictionnel de la subsidiarité. Ensuite parole sera donnée à ceux qui en ont manifesté le souhait. Je remercie Monsieur Glowski, Madame Neuwirth, Madame Lundgren, Lord Tope et Monsieur Gottardo pour leurs contributions à nos débats.

Je demande à Messieurs Lenaerts, Mildon et Merloni de me rejoindre à la tribune.

Pendant tous nos travaux, nous avons senti planer le besoin et la nécessité d'avoir des bases juridiques claires de façon à savoir qui contrôlera quoi et comment.

Je donne la parole à Monsieur Lenaerts, juge à la Cour de Justice de la Communauté européenne.

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