· Intervention de Mme Michèle RIVASI, députée, présidente du groupe d'amitié France-Madagascar

Je vais essayer d'être brève tout en apportant des éléments concrets sur la coopération et la diplomatie parlementaire. Vous savez que je suis présidente du groupe d'amitié France-Madagascar. A ma nomination à ce poste, j'avoue avoir été ravie. En effet, je connaissais déjà Madagascar.

1. - Formation des élus et fonctionnaires parlementaires malgaches

C'est en tant que présidente du groupe d'amitié France-Madagascar que je me suis rendue sur place, en novembre 1998, à la demande de l'Assemblée nationale malgache pour faire un stage et former les députés nouvellement élus. L'intérêt de former des députés désireux de connaître le statut exact d'un député en France m'a paru évident.

La polémique locale, à l'époque, était la suivante : fallait-il doter ou non les députés malgaches de 4X4 ? Sachant qu'ils n'avaient pas d'assistants parlementaires, cette polémique se nourrissait du fait que cette Assemblée nationale était quelque peu un gadget. Le président de Madagascar, ainsi que son gouvernement, avait un rôle très important d'un point de vue politique, rôle bien plus important que celui de l'Assemblée nationale. L'attente était donc très forte, contrairement à ce que vous avez dit, M. Carcassonne. Les députés étaient vraiment demandeurs d'une formation. A ce stade, l'implication des députés malgaches était essentielle. Auparavant, l'absentéisme était très important dans cette assemblée.

A la suite de ce stage, j'ai constaté que cette assemblée n'avait pas de fonctionnaires et ne comptait que des assistants politiques. A chaque changement d'assemblée, l'ensemble des personnels était renouvelé. Le président malgache de l'Assemblée souhaitait donc réfléchir à la manière dont cette chambre pouvait se doter d'un outil permanent de fonctionnement. Nous sommes, comme cela a été indiqué tout à l'heure, des exportateurs de démocratie. Mais encore faut-il que des outils démocratiques préexistent dans ces pays.

La demande du président de l'Assemblée nationale malgache, appuyée par le président de l'Assemblée nationale française, insistait sur la question de la formation des fonctionnaires. Nous y avons répondu dans le cadre de trois missions.

La première d'entre elles consistait à élaborer un programme de concours. La seconde visait à la constitution d'un jury, une fois le programme du concours établi grâce à l'équivalent de l'ENA à Madagascar, et à l'institution d'un secrétariat général malgache. Deux fonctionnaires de l'Assemblée nationale française se sont rendus à Madagascar, ce qui est très important pour les Malgaches car, à défaut, nombre d'étudiants ne se seraient pas présentés au concours en raison de la corruption qui règne dans ce pays. Sans la présence de ces fonctionnaires, ils ne se seraient pas présentés. C'est dire l'importance de notre image en termes de démocratie.

Enfin, nous avons organisé un stage de formation de quinze jours - où je ne suis, pour ma part, resté que quatre ou cinq jours (vous savez qu'un député ne peut s'absenter trop longtemps de sa circonscription). Quinze fonctionnaires ont été recrutés selon les règles déontologiques suivantes : la compétence, la disponibilité et la neutralité politique - élément très important dans ce pays.

M. Xavier de VILLEPIN

Sont-ils restés neutres ?

Mme Michèle RIVASI

Oui, du moins pour l'instant... L'histoire nous le dira.

Nous envisageons de les faire venir en stage de formation à l'Assemblée nationale en France. Il nous a fallu trois ans pour mettre sur pied le dispositif, grâce à la volonté des Assemblées nationales malgache et française. Cet outil pourrait d'ailleurs parfaitement être réutilisé dans d'autres pays africains. Plus qu'un outil de formation des fonctionnaires, il s'agit d'un outil de démocratie.

Je voudrais maintenant vous citer un deuxième exemple de coopération parlementaire. Dans une circonscription, il existe de nombreux exemples de jumelage, notamment au niveau de l'Institut national du tourisme (la demande touristique étant importante). Dans ma circonscription, des conventions ont été établies avec le lycée hôtelier et l'hôpital, qui disposent de matériels qui, n'étant plus aux normes européennes, pourraient parfaitement être transférés dans d'autres pays.

Par ailleurs, vous connaissez ma passion pour l'environnement et je me suis engagée, à ce titre, dans des projets de financement en faveur des énergies renouvelables, en coopération avec la Communauté européenne et l'ADEME. J'ai, pour ma part, incité le Conseil régional Rhône-Alpes à nous rejoindre. Pour plus de quinze villages, on a pu ainsi financer l'achat de cellules photovoltaïques et, demain, d'éoliennes.

2. - Pour des jumelages circonscription par circonscription

Je voudrais également formuler une demande concernant les groupes d'amitié. On peut demander à des parlementaires français de se rendre à Madagascar, mais il me semble plus intéressant de mettre en place un jumelage entre députés malgaches et français. Contrairement à ce que vous pensez, lorsque je vais là-bas, je rencontre de nombreux membres de l'Exécutif et pas seulement les parlementaires. Je rencontre ainsi les ministres et le président de la République Didier Ratsiraka, qui sont très demandeurs de l'avis d'hommes politiques français. Ces interlocuteurs doivent, eux aussi, tenir compte de leur électorat et trouvent fructueux les échanges entre parlementaires et entre parlementaires et ministres, qui sont souvent aussi des députés.

Dans le cadre du groupe d'amitié, il me semblerait intéressant d'organiser des jumelages circonscription par circonscription. Un député malgache pourrait se rendre dans la circonscription d'un député français et vice-versa. Notre formation politique nous permet, en fonction de la caractéristique de notre circonscription, de savoir ce que nous pouvons leur apporter et ce qu'ils peuvent nous apporter. Ensuite, nos interventions sont complémentaires à celles des diplomates. Lorsque deux Français ont été emprisonnés après avoir gagné un match de rugby, s'être rendus en boîte de nuit et y avoir réalisé un strip-tease, j'ai dû intervenir personnellement pour les faire sortir de prison ! Les tentatives du Quai d'Orsay avaient échoué et j'ai dû intervenir directement auprès du président de la République.

Je suis persuadée que des députés motivés, passionnés, qui aiment le pays qu'ils représentent, qui souhaitent développer une vraie coopération avec d'autres parlementaires peuvent oeuvrer favorablement pour la démocratie dans le monde.

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