Mmes Fabienne Keller et Marie-Hélène des Esgaulx et MM. Gérard Miquel et François Fortassin, rapporteurs spéciaux

VI. LE PROGRAMME 159 « INFORMATION GÉOGRAPHIQUE ET CARTOGRAPHIQUE »

Le programme 159 « Information géographique et cartographique » est placé sous la responsabilité de la direction de la recherche et de l'innovation du MEEDDM. Il comprend les moyens dévolus à la production de l'information géographique et aux activités de recherche menées dans cette discipline. La quasi-totalité des crédits du programme est consacrée à la subvention pour charges de service public de l'Institut géographique national (IGN).

A. LES CRÉDITS DEMANDÉS EN 2011

1. Des crédits en hausse de 11,35 %

Après une baisse des crédits entre 2009 et 2010, l'année 2011 marque une hausse de 11,35 % . 82 millions d'euros en AE et en CP sont demandés, au titre du programme 159, pour 2011, dont 81,4 millions d'euros constituent la subvention pour charges de service public de l'IGN.

Les crédits du programme relèvent presque exclusivement du titre 3 « Fonctionnement » et sont répartis en trois actions, ce qui constitue une innovation par rapport à 2010. En effet, une nouvelle action 3 a été créée . Celle-ci est consacrée au pilotage de la politique d'information géographique .

L'action 1 « Production de l'information géographique » représente 81,4 % des crédits du programme, avec 66,7 millions d'euros. Sa dotation augmente ainsi de 13 % par rapport à 2010. Cette action comporte essentiellement les moyens dévolus à l'IGN pour le financement des activités de formation de l'Ecole nationale des sciences géographiques (11 millions d'euros), les activités de maintien des réseaux géodésiques et de nivellement, de prises de vue aérienne et de documentation (17,5 millions d'euros), ainsi que les activités d'entretien, de mise à jour et de diffusion du référentiel à grande échelle (RGE) et de celles des autres bases de données, des fonds cartographique et du Géoportail de l'institut (38,2 millions d'euros).

L'action 2 « Recherche dans le domaine de l'information géographique » représente 17,9 % des crédits du programme, avec 14,6 millions d'euros, soit une légère hausse de 0,37 % par rapport à 2010. Elle regroupe les moyens dédiés aux activités de recherche et de développement de l'IGN, soit 11,6 millions d'euros de dépenses de personnel, 2,5 millions d'euros de dépenses de fonctionnement et 500 000 euros de dépenses d'investissement.

Enfin, la nouve lle action 3 « Pilotage de la politique d'information géographique » , dotée de 600 000 euros, soit 0,7 % des crédits du programme, retrace le financement de l'activité d'animation et de coordination interministérielle assurée par le MEEDDM dans le domaine géographique et de la maîtrise d'ouvrage du Géoportail. En outre, elle comporte les crédits destinés au fonctionnement et aux activités du Conseil national de l'Information géographique (CNIG). Cette action comprend également le soutien de l'Etat aux activités d'animation de la communauté des acteurs du domaine exercées par l'Association française pour l'Information géographique (AFIGEO).

Le dispositif d'évaluation de la performance demeure inchangé par rapport à 2010. Il se compose de trois objectifs et de sept indicateurs.

2. La situation financière de l'IGN en 2010 et 2011
a) L'exécution du budget 2010

L'exécution du budget 2010 s'est caractérisée :

- en dépenses , par une hausse de 2,8 millions d'euros des charges de personnel par rapport à l'exercice précédent. Celle-ci s'explique, malgré la baisse des effectifs, par l'augmentation des taux de cotisation du CAS pensions de 60,14 % à 62,47 % et du fonds spécial de pension des ouvriers des établissements industriels de l'Etat (FSPOEIE) de 27 % à 30 % ; la diminution des charges de fonctionnement (moins 2,1 millions d'euros) et d'investissement (moins 700 000 euros).

- en recettes , par des subventions en provenance de l'Etat (subvention pour charges de service public en provenance du programme 159 et subvention en provenance du CAS immobilier) à un niveau légèrement inférieur à celui de l'exercice précédent (moins 600 000 euros), et des recettes commerciales en progression de 9,7 millions d'euros, du fait de la facturation d'un contrat exceptionnel de vente de licences Référentiel à grande échelle (RGE) à un opérateur privé pour 14 millions d'euros ;

- une hausse du fonds de roulement , qui s'est établi à 30 millions d'euros, soit plus de 3 millions d'euros par rapport à 2009, et le maintien du niveau de trésorerie à 12,5 millions d'euros à fin 2010.

b) Les principaux points du budget pour 2011

Si la subvention pour l'année 2011 augmente de 8,4 millions d'euros par rapport à 2010, elle a été calculée en prenant en compte les facteurs suivants :

- la réduction des effectifs de l'établissement conformément au principe de non remplacement d'un départ à la retraite sur deux, soit - 26 ETP sous plafond en 2011 ;

- la baisse des dépenses de fonctionnement courant de l'établissement, qui doivent diminuer de plus de 10 % entre 2010 et 2013 ;

- la couverture des besoins en investissements de l'établissement : ceux-ci s'élèvent à 10,9 millions d'euros en 2011. Ils couvrent notamment les immobilisations des bases de données et les investissements de développement, en particulier pour le renouvellement du Géoportail ;

- la réorientation de la politique tarifaire , à travers la diffusion des données du Référentiel à grande échelle au coût marginal à la sphère publique. Le montant de la subvention intègre à ce titre les transferts en provenance du MEEDDM et des autres ministères destinés à compenser la perte de recettes due au changement de modèle économique, pour un total de 6 millions d'euros en 2011 ;

- les économies attendues de la mise en oeuvre de la convergence entre la base de données parcellaire et le plan cadastral informatisé ;

- la politique immobilière de rationalisation des implantations de l'IGN et la poursuite des opérations sur le site de Saint-Mandé.

En outre, le projet de budget pour 2011 se caractérise, par rapport au budget 2010, par :

- une hausse de 2,8 millions des charges de personnel, pour des raisons identiques à celles de 2010, notamment l'évolution des taux de cotisation retraite (augmentation des taux de CAS pensions de 62,47 % à 65,72 % et du Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat de 30 % à 33 %) ;

- une baisse de 12 % des charges de fonctionnement grâce à la poursuite des mesures d'économies et au moindre recours à la sous-traitance ;

- une baisse de l'ordre de 8 % des dépenses d'investissement courant ;

- une réduction significative des recettes commerciales de 13,4 millions d'euros, à hauteur de 48,1 millions d'euros, partiellement compensée par de plus fortes recettes prévues de la part du secteur de la Défense ;

- un prélèvement sur le fonds de roulement de 4,1 millions d'euros, tablant sur une diminution du besoin en fonds de roulement par une gestion rigoureuse des stocks et des créances, permettant de maintenir une trésorerie au-dessus des 10 millions d'euros.

Tableau résumé du budget réalisé 2009, du budget 2010 en cours d'exécution
de l'IGN et du projet de budget pour 2011

(en millions d'euros)

2009

2010

2011

Réalisé

Actualisé

Prévisionnel

Dépenses

Charges de personnel

100,0

102,8

105,6

Fonctionnement

29,1

27,0

23,7

Investissements

7,4

6,7

10,9

Total dépenses

136,5

136,5

140,2

Recettes

Subventions de l'Etat

76,9

73,0

81,4

Recettes commerciales

51,8

61,5

48,1

Autres recettes

- 0,4

1,3

1,3

Total recettes

128,3

135,8

130,8

Prélèvement sur fonds

de roulement

- 8,2

2,6

- 4,1

Fonds de roulement

27,4

30,0

25,9

Trésorerie

11,6

12,5

10,6

Source : réponses au questionnaire budgétaire de vos rapporteurs spéciaux

B. LES EFFORTS DE L'IGN POUR AMÉLIORER SA GESTION

Vos rapporteurs spéciaux avaient souligné l'année dernière les conclusions sévères, insérées dans le cadre du rapport public annuel de 2009 de la Cour des Comptes, au sujet de la gestion et de la stratégie financière de l'IGN. Ils avaient également déploré le retard pris dans la signature du nouveau contrat d'objectifs. Ils se félicitent donc que la signature très attendue de ce nouveau contrat soit enfin intervenue en septembre 2010.

1. La signature d'un nouveau contrat d'objectifs et de performance

Le budget pour 2011 s'inscrit dans le nouveau contexte précisé dans le contrat d'objectifs et de performance, qui couvre la période 2010-2013. Celui-ci a été validé par le conseil d'administration de l'IGN lors de sa séance du 16 juillet 2010, et signé en septembre. Les orientations stratégiques prises par l'établissement dans le cadre de ce contrat s'appuient sur les nouvelles priorités des pouvoirs publics, ainsi définies :

- promouvoir une politique nationale d'information géographique partagée, renforcer les coopérations entre ses acteurs et mettre en oeuvre la directive INSPIRE ;

- adapter le contenu et les spécifications du référentiel à grande échelle aux nouveaux besoins ;

- généraliser l'accès à l'information géographique de référence au moyen d'Internet ;

- renforcer les coopérations entre l'établissement et les services de l'Etat dans un souci d'économies de moyens ;

- dynamiser l'usage national des images satellites d'observation des surfaces continentales ;

- augmenter l'appui apporté au ministère de la Défense notamment en matière d'acquisitions de données.

Dans ce cadre, l'une des principales orientations stratégiques consiste à diffuser le RGE aussi largement que possible en aménageant les conditions de sa mise à disposition auprès des autorités publiques, l'objectif étant de favoriser l'interopérabilité des bases de données géographiques et de limiter le coût global d'établissement et d'entretien des référentiels en permettant un échange des données au sein de la sphère publique aussi libre que possible.

Vos rapporteurs spéciaux se montreront vigilants quant au respect de ces objectifs ambitieux.

La directive INSPIRE : de nouvelles obligations et de nouveaux atouts
pour les autorités publiques

La directive européenne 2007/2/CE du 14 mars 2007, dite directive Inspire, vise à établir une infrastructure d'information géographique dans la Communauté européenne pour favoriser la protection de l'environnement . Ce que la directive appelle infrastructure d'information géographique est un ensemble de services d'information disponibles sur Internet, répartis sur les sites web des différents acteurs concernés, et permettant la diffusion et le partage de données géographiques.

La directive Inspire s'adresse aux autorités publiques (l'Etat, les collectivités territoriales et leurs groupements, les établissements publics ainsi que « toute personne physique ou morale fournissant des services publics en rapport avec l'environnement » ). Elle s'applique aux données géographiques détenues par les autorités publiques, dès lors que ces données sont sous forme électronique et qu'elles concernent l'un des 34 thèmes figurant dans les trois annexes de la directive. Ces annexes correspondent à un ordre de priorité, l'annexe I devant être traitée la première.

De surcroît, la directive impose aux autorités publiques, d'une part de rendre ces données accessibles au public en les publiant sur Internet, d'autre part de les partager entre elles.

En outre, elle ne crée pas seulement des obligations : elle facilite leur mise en oeuvre grâce à la publication, en cours, de textes techniques : règlements européens (fixant les règles obligatoires) et guides de bonnes pratiques (contenant des recommandations).

Enfin, la directive Inspire vise à faciliter et accélérer la réponse des autorités publiques à la forte demande des citoyens et des entreprises de disposer sur Internet d'informations géographiques : cadastre et PLU de leur commune, informations multimodales sur les services de transport (horaires, correspondances), informations environnementales (risques naturels et technologiques, zones protégées). Cette demande résulte du développement récent de l'utilisation de l'information géographique par des services en ligne, commerciaux, culturels ou administratifs, permettant d'obtenir des renseignements, d'effectuer des achats ou de réaliser une téléprocédure.

Source : site du MEEDDM

2. Les suites données au rapport annuel de la Cour des comptes de 2009

Si vos rapporteurs ont relayé l'an dernier les critiques de la Cour des comptes relatives à la gestion de l'IGN, ils saluent cette année les suites données par l'établissement aux recommandations formulées, qui témoignent d'un effort notable de la part de l'opérateur .

En ce qui concerne la stratégie et la gouvernance de l'IGN , la Cour recommandait de mettre à profit l'élaboration d'un nouveau contrat d'objectifs pour réexaminer la stratégie et les missions de l'établissement, et de revoir la composition du conseil d'administration. L'élaboration du nouveau contrat d'objectifs a effectivement tenu compte de ses recommandations. De plus, le conseil d'administration de l'IGN a créé en son sein deux commissions consultatives, l'une dédiée à la stratégie et aux programmes, l'autre aux questions de tarification, afin d'instruire de façon plus efficace les délibérations sur les sujets dont l'approbation relève de sa compétence. Le conseil d'administration a également été ouvert à des personnalités extérieures à la sphère publique et compétentes dans le domaine de l'information géographique. Cette décision représente un progrès dont vos rapporteurs spéciaux se félicitent.

Au regard de la gestion financière , un réaménagement du fonctionnement administratif et financier comprenant la mise en place d'un dispositif de contrôle interne a été défini avec l'aide d'un consultant. Il devrait permettre de répondre, avec la mise en oeuvre d'un nouveau système de gestion (SAP) en 2008, aux préconisations de la Cour. De surcroît, un service plus étoffé chargé des affaires financières et du contrôle de gestion a été mis en place en 2009. Enfin, le conseil d'administration a réglé, par ses délibérations d'avril 2009, les règles de passation des marchés et a instauré une commission des marchés présidée par une personnalité extérieure à l'établissement.

De plus, l'IGN a pris des initiatives dans le domaine des ressources humaines , afin de répondre aux recommandations de la Cour sur la réduction des effectifs et l'accroissement des compétences des personnels. La politique menée vise ainsi à optimiser les ressources humaines dans un souci d'atteinte des objectifs de l'établissement. Elle s'appuie sur une gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences actualisée chaque année et s'inscrit dans le cadre national de réduction des effectifs dans la fonction publique. L'approche métier représente à cet égard la référence principale pour la gestion des ressources humaines. Le recrutement dans les différents corps ou catégories de personnel est fixé à l'aide de règles de pourvoi de postes spécifiées dans une carte des emplois décrivant l'ensemble des métiers et emplois de l'IGN (120 en 2009), en termes de missions, d'activités, de compétences et d'aptitudes. Un équilibre est recherché entre le recrutement externe par concours et le recrutement de fonctionnaires en mobilité.

Au surplus, l'IGN promeut une politique de développement des applications de l'information géographique et, dans ce cadre, favorise la mobilité des ingénieurs et des géomètres vers les collectivités territoriales et les services déconcentrés de l'Etat. En outre, l'établissement met en oeuvre une politique de formation continue permettant la reconversion ou l'adaptation des agents aux nouvelles technologies et aux nouveaux outils de production, de diffusion ou de gestion de l'information géographique, qui facilite les parcours professionnels.

En ce qui concerne la gestion immobilière , la construction en cours du nouveau siège de l'Institut à Saint-Mandé, en commun avec celui de Météo-France, traduit l'engagement d'une vaste opération de réaménagement du site historique de l'IGN, dont le but est d'optimiser sa gestion et son fonctionnement, tout en libérant, en vue de sa cession, la moitié de la surface de terrain qu'il occupe actuellement. De surcroît, la recommandation de la Cour relative à la cession de l'immeuble occupé par la filiale IGN - France  International a été suivie. En effet, le conseil d'administration a délibéré sur l'inutilité de cet immeuble pour l'IGN au printemps 2009. En outre, la décision d'inutilité de l'immeuble de la rue la Boétie, abritant le magasin de vente, a été approuvée par le conseil au cours de sa séance du 17 décembre 2009. Cet immeuble devrait donc être libéré fin 2010 et le magasin relocalisé sur une surface plus réduite, située rue de la Verrerie dans le quatrième arrondissement de Paris.

Enfin, l'établissement, conformément aux directives ministérielles, a établi un schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI ), qui comporte un diagnostic physique des immeubles utilisés et un volet stratégique définissant les enjeux et les objectifs de la stratégie immobilière retenue dans le cadre des orientations fixées par le conseil d'administration.

Vos rapporteurs spéciaux se montreront attentifs au suivi de la mise en oeuvre de ces mesures et à leurs résultats.

Principales observations de vos rapporteurs spéciaux sur le programme 159
« Information géographique et cartographique »

1. Les crédits demandés pour le programme 159 « Information géographique et cartographique » connaissent une forte progression, à hauteur de 11,4 % en 2011 . Contrairement à l'année dernière, la subvention pour charges de service public augmente, tandis qu'une baisse des recettes commerciales est anticipée.

2. L'IGN parvient à maintenir une trésorerie supérieure à 10 millions d'euros.

3. Un nouveau contrat d'objectifs et de performance ambitieux a été signé en septembre 2010.

4. L'IGN a effectué de réels efforts pour répondre aux recommandations de la Cour des comptes formulées dans le cadre de son rapport annuel public 2009. Il conviendra d'en évaluer les résultats au cours de la prochaine loi de règlement.